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L'acquisition du genre et du code switching chez l'enfant bilingue précoce

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par Sophie Rimbaud
Université Montpellier III - Master 2 2009
  

Disponible en mode multipage

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    Chapitre 1 : partie théorique

    Le langage humain est très différent du langage animal : d'une part la communication humaine est symbolique et grammaticale, d'autre part un humain peut apprendre différentes langues, même à l'âge adulte. Cette capacité qu'a l'homme de parler plusieurs langues fascine les chercheurs dans de nombreux domaines : les sociolinguistes ont été les premiers à travailler dans ce domaine, avec une approche sociale et culturelle du bilinguisme, à travers l'étude des contacts de langue. Cette recherche sur cette faculté à apprendre plusieurs langues s'est étendue dans le domaine la didactique, c'est-à-dire l'enseignement des langues étrangères pour l'adulte et plus généralement celui de la linguistique.

    Au début du siècle, des chercheurs en acquisition, confrontés à une situation de bilinguisme précoce se sont à leur tour penchés sur un phénomène bien particulier du bilinguisme : le bilinguisme précoce. L'acquisition du langage chez le bilingue c'est développé, mais à moindre vitesse que l'enfant monolingue et certains domaines en phonétique, prosodie, syntaxe, sémantique restent encore inconnus.

    Dans ce mémoire nous allons nous pencher sur le problème de l'acquisition du genre, qui reste à ce jour, très peu étudiée.

    Pour réaliser cette étude, nous allons travailler dans des domaines divers pour les relier à la problématique du bilinguisme en acquisition : dans la première partie, la psycholinguistique et la sociolinguistique nous servirons à définir les différents types de bilinguisme qu'il existe. Dans la seconde partie les neurosciences vont nous apporter des connaissances sur le fonctionnement du cerveau, et sur le fonctionnement du cerveau bilingue, pour expliquer cette facilité qu'a l'enfant, par rapport à un adulte, à apprendre les langues.

    Dans une troisième partie, nous rentrerons plus particulièrement dans une étude du bilingue précoce, sur son développement et son fonctionnement dans ses productions.

    Cette partie servira à établir un tableau théorique qui pose les bases de la partie expérimentale. L'étude expérimentale se fait sur un enfant bilingue français/anglais. Après avoir défini le type de bilinguisme dans lequel il se place, nous entrerons dans une étude de l'acquisition du genre chez cet enfant bilingue, étude qui servira à valider ou pas l'hypothèse de départ.

    Rimbaud Sophie L'acquisition du genre et le code mixing chez le bilingue précoce 2009 1. 1. Différents types de bilinguisme :

    Dans le bilinguisme il existe des degrés d'acquisition d'une ou plusieurs langues qui vont dépendre, entre autres, de l'âge auquel l'enfant apprend les deux langues et du contexte d'apprentissage (famille monolingue dans un pays étranger, famille bilingue...), cette acquisition ne peut donc pas se généraliser sous un seul terme et des sous-catégories doivent être établies. En effet, cette définition du bilinguisme étant trop littérale, le problème s'est posé de redéfinir la problématique du bilinguisme. Ainsi la littérature scientifique et populaire parle plutôt chez les enfants bilingues de « type de bilinguisme » : par cette expression, les auteurs entendent parler des différents stades d'acquisition où une différence sera perceptible en ce qui concerne l'acquisition des deux langues.

    Les classements des types de bilinguismes sont nombreux et dépendent souvent de l'angle d'approche théorique des chercheurs. De plus, ces classifications contextuelles, c'est-à-dire en lien avec l'environnement proche de l'enfant, seront à mettre en relation avec le développement du cerveau : en effet, comme nous le verrons dans une seconde partie1, c'est l'interaction avec le contexte qui développera la structure mentale du langage, permettant d'expliquer les différences marquantes au niveau de l'enfant que ce soit sur le plan cognitif, développemental ou interactionnel.

    De ce point de vue, il sera intéressant de définir ces différents « types de bilinguisme », ainsi que les critères dans la littérature scientifique, afin de les confronter d'un point de vue critique. Ainsi nous pourrons en dégager une problématique nouvelle qui sera celle de ce mémoire qui sera traitée dans l'analyse du corpus. Au vue des difficultés rencontrées, je prendrais position d'une façon argumentée afin de donner un point de vue différent ou complémentaire aux problèmes rencontrés.

    Etablir une définition du bilinguisme et surtout des types de bilinguisme existants permettra de présenter le corpus à analyser et de présenter l'enfant en fonction du type d'environnement bilingue.

    1. 1. Classification en fonction de la compétence dans les deux langues

    1 Cf. infra partie « Les bases neurologiques dans le fonctionnement du langage »

    Dans l'évaluation de la compétence linguistique, il est nécessaire de prendre en compte l'âge auquel l'enfant est exposé à la deuxième langue , si l'exposition aux deux langues se produit en même temps ou si la seconde langue est acquise après. De l'âge d'acquisition de la seconde langue dépendra le type de bilinguisme

    Cette partie traite de l'évaluation comparative des compétences dans les deux langues afin de qualifier un premier type de bilinguisme. Une distinction sera d'abord faite entre le bilinguisme équilibré, dans lequel les compétences de l'enfant sont au même niveau dans les deux langues, et le bilinguisme dominant dans lequel une des langues est acquise après la langue maternelle. Bien entendu, dans cette étude, la terminologie de « comparaison du niveau de compétence » (Hamers et Blanc, 1990) des langues est étudiée par opposition à l'acquisition de sa langue maternelle par un enfant monolingue. En effet on ne peut pas comparer l'acquisition de deux langues chez l'enfant avec l'apprentissage d'une langue étrangère chez l'adulte.

    Un bilinguisme équilibré n'est pas non plus la capacité d'un enfant à utiliser de la même manière les deux langues dans tous les domaines et toutes les utilisations possibles, mais sa capacité à atteindre un relatif niveau d'équilibre dans ses utilisations. C'est le contexte qui va déterminer le type de bilinguisme : quand l'enfant commence à parler et reste dans la cellule familiale, il va avoir une compétence orale équilibrée dans les deux langues, s'il est scolarisé dans une école monolingue il favorisera, à ses dépends et s'il ne suit pas le même apprentissage, une compétence (par exemple l'écriture) qui développera un déséquilibre dans une des fonctions du langage (l'écriture) de l'autre langue. En effet, la perception du contexte constitue un élément pragmatique qui sera relié à l'utilisation des langues, favorisant ou non l'utilisation d'une des deux langues (Lambert, Havelka et Crosby, 1958 cité par Hamers et Blanc, 1990) autrement dit selon le contexte l'enfant se trouve dans la nécessité d'employer d'avantage une langue qu'une autre, ce qui est le principe de la diglossie2. Dans le cas d'un bilinguisme équilibré, l'enfant est confronté à un contexte familial bilingue et possède le même avancement dans la maîtrise du système des deux langues.

    Dans le cas d'un bilinguisme dominant, l'enfant se trouve soit dans un contexte bilingue où l'utilisation d'une seule langue est privilégiée et l'enfant acquiert avant tout la langue la plus appropriée pour communiquer avec son entourage proche (Hamers et Blanc, 1990) ; L'enfant peut également évoluer dans une famille monolingue mais une autre langue est parlée dans un contexte extérieur généralement au titre de langue officielle, impliquant que l'enfant soit plus avancé dans une langue qu'une autre (Abddelilah-Bauer, 2006). Cet

    2 Cf. partie sur la diglossie

    avancement dans l'apprentissage de la langue n'est pas statique car il dépend de l'exposition à la langue : avant 3 ans l'enfant sera majoritairement au contact de la langue de ses parents, entre 3 et 6 ans, il sera de plus en plus souvent en contact avec d'autres enfants parlant une autre langue et enfin à partir de 6 ans il sera scolarisé dans une école où il va approfondir l'apprentissage de la langue du pays tout en développant de nouvelles compétences (lecture, écriture) d'une manière plus régulière et normée. C'est pour cela qu'il faut souligner que le bilinguisme équilibré représente le type de bilinguisme le plus rare voir utopique, car dans son usage, il présuppose d'une part que dans le cadre de la cellule familiale, il existe un usage indifférent d'une langue ou d'une autre, et d'autre part qu'il en soit de même dans le contexte social dans lequel évolue l'enfant.

    Pourtant, dans un contexte social, il n'existe pas d'exemple dans lequel des individus puissent employer indifféremment une langue ou l'autre, en fonction des idéologies linguistiques présentes dans la société. Une langue est toujours favorisée, soit parce qu'elle est la plus répandue, soit parce qu'elle représente le prestige, l'ascension sociale ou la langue de la communauté ou la langue officielle du pays. Ces idéologies se retrouvent dans la communauté linguistique et la cellule familiale, c'est pourquoi il paraît difficile de certifier l'existence de ce type de bilinguisme. Il semble alors cohérent de soutenir l'existence d'un bilinguisme exclusivement dominant, non pas au niveau de la maîtrise que l'enfant a des deux langues, mais au niveau de la favorisation faite pour une langue, soit par le locuteur, selon la représentation qu'il a des langues, soit par une contrainte de type sociale.

    La maîtrise des deux langues n'est alors pas à remettre en question. Ce qui varie, essentiellement, que ce soit dans la cellule familiale ou dans un contexte social, c'est la compétence de communication. En effet, dans le cadre d'un bilinguisme dominant, les deux langues ne sont pas sollicitées dans les mêmes contextes ni à la même fréquence. Il est alors possible que dans une des deux langues, la compétence de communication soit incomplète ou affaiblie. C'est sur la compétence de communication que repose la définition de ce type de bilinguisme, et le bilinguisme équilibré serait alors une maîtrise égale de la compétence de communication dans les deux langues. Cela est favorisé, dans un premier temps, si les parents ne parlent pas la même langue et dont l'usage sera partagé et alloué aux mêmes tâches dans la vie quotidienne. Cependant, une fois l'enfant placé dans un milieu social tel que le contexte scolaire ou dans sa relation avec les autres enfants, il va favoriser d'une manière plus explicite une des deux langues car le contexte social implique souvent de favoriser une langue au détriment de l'autre.

    Le bilinguisme équilibré ou dominant est de loin la compétence la plus difficile à définir et à évaluer. En effet, l'acquisition d'une compétence bilingue dans tous les domaines

    dépend non seulement du contexte dans lequel évolue l'enfant mais surtout de ses capacités cognitives. Chaque personne a sa propre configuration et celle-ci n'est pas fixe, mais cette définition est indispensable dans notre recherche car elle est indissociable de la vie et du développement de l'enfant et aura des conséquences sur son développement linguistique et cognitif.

    1. 2 . Classification en fonction de l'organisation cognitive de la langue

    Dans l'évaluation de la compétence cognitive de la langue, on prend en compte la manière dont se fait l'acquisition du lexique dans les deux langues et dans un même contexte. Cela revient à se demander s'il existe un ou deux systèmes. Dans cette partie, nous n'allons va pas rentrer dans le débat pour savoir s'il existe un ou deux systèmes nous allons présenter les différentes théories qui existent en donnant, si nécessaire, leurs limites.

    La classification est inspirée par Weinrich (1968 cité par Hamers et Blanc, 1990) et Hagège (1996) : il est difficile de donner une terminologie exacte à la classification de Weinrich (1968) mais Hagège parle « d'organisation des connaissances de mots dans les situations de bilinguisme ». Wienrich part de la structuration du lexique mental d'un enfant, lexique qui construit progressivement au contact de la langue. L'acquisition du lexique se fait dans le temps mais selon lui, c'est l'exposition à la langue qui a construit le type de bilinguisme : tout d'abord on parle de « bilinguisme composé» » pour caractériser un enfant qui apprend les deux langues dans un même contexte et dans une même situation. De ce fait, deux mots peuvent avoir un référent et un signifié commun, ainsi le langage se construit dans une interdépendance des deux langues sur le plan sémantique et de l'organisation cognitive du sens et de la perception des éléments du contexte.

    En effet, la catégorisation cognitive et sémantique des éléments contextuels perçus sera équivalente dans les deux langues. Par ailleurs, le bilinguisme est coordonné quand il se construit au sein d'une indépendance entre les deux langues. En effet, l'enfant apprend deux langues dans un contexte propre associé à chacune ; ainsi, chaque mot de chaque langue possède son propre référent et sa propre signification, impliquant deux signifiés et deux référents dans deux langues différentes. Selon cette classification, il y aurait deux systèmes linguistiques et conceptuels parfaitement distincts.

    Enfin, Weinrich est le seul à parler de bilinguisme « sous-coordonné » (Sub-coordinate3) dans le cadre d'un bilinguisme où les deux langues sont acquises mais

    3 Selon notre propre traduction.

    l'une d'elles va devenir « langue la plus forte » (stronger language (SL)) et l'autre « langue la plus faible » (weaker language (WL)) et la représentation du même mot dans les deux langues ne se fera que dans la langue forte (SL). Dans un «bilinguisme coordonné» une des deux langues va rendre l'ascendant sur l'autre, ce qui représente l'aboutissement d'un conflit diglossique.

    Dans l'acquisition du bilinguisme vont donc opposer deux définitions : la première où l'on parle de « bilinguisme composé», c'est-à-dire que l'enfant va avoir dans chaque langue un signifiant pour un signifié4. La seconde désigne un bilinguisme dit coordonné, où l'enfant va se représenter le monde de la même façon dans les deux langues et va donc avoir pour un mot, un signifié pour deux signifiants. La construction du monde se fait dans deux langues différentes. Dans la troisième définition, l'une des deux langues domine l'autre ; la structure de base sera toujours la langue fondamentale (maternelle et dominante) et l'utilisation d'une autre langue nécessitera un encodage supplémentaire qui se superposera à celui de la langue maternelle qui nécessite un traitement cognitif différent de celui de la langue maternelle, cependant selon Padilla et Liebman (1975 cité par Hamers et Blanc, 1990), l'implication précoce et importante de l'hémisphère droit chez un bilingue équilibré (par rapport à un monolingue où la mobilisation de l'hémisphère droit est relative), reste proche de celle d'un bilingue à tendance dominante si la seconde langue est apprise avant 6 ans.

    La première définition (« bilinguisme composé») s'applique facilement à des contextes de bilinguisme familial dans lequel les parents alternent sans distinction les deux langues dans leur parler. Le «bilinguisme coordonné» quant à lui s'applique à des situations plus scolaires où une seconde langue étrangère est apprise : c'est souvent le cas lorsque l'enfant est élevé dans une famille monolingue dans un pays qui parle une langue différente. Lorsqu'il se retrouve dans une situation d'apprentissage avec d'autres enfants il entre en contact avec une nouvelle langue, ce contact se fait par un enseignement, il n'est pas « naturel » (dans l'interaction discursive avec les parents) ainsi, l'enfant va apprendre à dire le monde qu'il connaissait déjà, dans une autre langue et d'une certaine manière va le réapprendre. La distinction entre les types composé et coordonné n'est pas exclusive pour Ervin et Osgood (1954) : ces types constitueraient les deux pôles du bilinguisme et les sujets bilingues se situeraient entre les deux, leur position variant en fonction des situations d'apprentissage et d'utilisation de la langue, ainsi que de l'âge de confrontation aux deux

    4 Le signifiant est la forme concrète (image acoustique) du signe linguistique. Alors que le signifié est le contenu sémantique du signe linguistique

    langues. Par conséquent le bilinguisme tiendrait plus à des stratégies cognitives adaptées à un contexte qu'à des modèles figés.

    Cette classification concentre le bilinguisme presque exclusivement sur un plan sémantique et lexical. Dans le cas du «bilinguisme coordonné» il se développe, selon les langues, une variation en fonction de la construction de la dimension sémantique et organisationnelle qui va également modifier la perception et la catégorisation d'éléments du monde. Cette définition présuppose que les deux systèmes linguistiques soient reliés à des systèmes indépendants. Il existerait alors deux représentations du monde, une pour chaque langue. Cette dimension implique, par exemple, que le référent de « forêt », en français, ne soit le même qu'en anglais. Cette perspective, qui peut se rapprocher de l'hypothèse SapirWhorf, impliquerait que la langue construit la vision du monde. La catégorisation cognitive impliquerait deux systèmes, donc deux fonctionnements neurolinguistiques différents. De même, on conceptualiserait le monde dans deux langues et la perception du monde s'en trouverait changée.

    Mais il est également intéressant de souligner que, si cette classification s'avère empiriquement exacte, le fonctionnement organisationnel du lexique et de la perception du contexte varie non seulement d'une langue à l'autre mais aussi d'un individu à l'autre en fonction à leur propre fonctionnement cognitif individuel. De ce fait, la classification ne servirait pas seulement à décrire différents types de bilinguisme, mais aussi les fonctionnements cognitifs et les stratégies d'apprentissage propres à chaque individu.

    1. 3. Classification en fonction du contexte d'acquisition

    Dans cette partie nous allons parler de la langue présente dans l'entourage immédiat de l'enfant (sa famille et la communauté dans laquelle il évolue) indépendamment du statut des langues dans le pays. Dans le cadre du bilinguisme (pour le différencier du plurilinguisme plus souvent évoqué par les sociolinguistes), l'enfant va être en contact avec deux langues mais selon le type de contact, le bilinguisme sera endogène ou exogène.

    Pour Hamers et Blanc (1986), le bilinguisme est dit endogène5, si les deux langues sont considérées comme maternelles, si elles sont toutes deux utilisées en contexte social formel et informel et considérées socialement. Le bilinguisme endogène implique, à l'origine, que les deux langues soient acquises en même temps, dans le contexte familial, et qu'elles aient le co-statut de langues maternelles, si l'on peut poser l'hypothèse de l'existence possible de

    5 Du grec evãov dedans et yevoç origine.

    deux langues maternelles chez un seul locuteur. Les impacts cognitifs du bilinguisme sont également dépendants de l'environnement socioculturel, en particulier du statut respectif des deux langues au sein d'une même communauté.

    Nous parlerons de bilinguisme exogène6 dans un contexte linguistique où l'une des deux langues apprises est la ou une des langues officielles, mais pas celle de la communauté (c'est le cas lors d'un contexte migratoire) Cette définition introduit la notion de conflit diglossique. En effet, c'est souvent le contexte exogène qui est à l'origine d'un bilinguisme diglossique, car il privilégie souvent une langue au détriment de l'autre. La langue privilégiée est alors la langue de la société, officielle, majoritaire, majorée, valorisée.

    Si l'on considère qu'il y a un impact social sur l'acquisition des langues, alors cet impact peut se faire de deux manières : si deux langues sont bien considérées par la société, alors l'enfant va avoir une vision positive qui va le pousser à apprendre la langue du pays tout en continuant à pratiquer la ou les langues de ses parents. En revanche dans un contexte migratoire, l'enfant aura plus de difficulté à apprendre sa langue maternelle qu'un enfant monolingue ou bien, comme on le voit en France dans les communautés arabophones, la langue de la famille qui a immigré disparaît au bout de trois ou quatre générations.

    1. 4. Classification en fonction du statut des langues

    Dans cette partie nous allons définir le bilinguisme en fonction de la place des langues acquises par l'enfant. Cette partie est très importante car c'est ici que nous allons enfin ce définir le terme de diglossie tel qu'il a été étudié par les sociolinguistes depuis Psichari (1928). Cette partie représente l'aboutissement d'une longue réflexion entamée au début de ce chapitre : lorsque nous parlons de bilinguisme en acquisition, est-ce que, au même titre que pour les adultes, il existe un bilinguisme diglossique chez les enfants ?

    Quand les phénomènes de contact des langues sont évoqués nous nous trouvons souvent confronté au concept de diglossie. Il nous semble important de définir plus en détail ce concept et de monter son articulation dans le développement du bilinguisme chez les jeunes enfants. Le terme de diglossie est employé pour la première fois en 1928, dans Le Mercure de France, par l'écrivain Jean Psichari mais son emploi s'est ensuite généralisé. Le terme servait à qualifier la situation linguistique de la Grèce où deux variétés de Grec coexistaient : le Katharevoussa, qui est l'héritage linguistique parlé par l'élite et le Démotiki, langue revendiquée par les jeunes mais refusée par l'élite. De cette opposition entre les

    6 Du grec, e÷o au-dehors et yerjrjcxv engendrer.

    langues naît le conflit diglossique. Selon Psichari, la diglossie sert à définir la coexistence de deux langues en conflit dans une société donnée. Ce concept émerge de situations concrètes c'est pourquoi il y a plusieurs interprétations du concept même de diglossie.

    Le deuxième modèle est celui développé par Fergusson : selon lui, il y a diglossie quand il y a deux variétés de la même langue en usage dans une communauté, une variété haute et une variété basse. La variété basse est acquise par transmission et la variété haute est apprise. La répartition des usages, contrairement au modèle grec, fait l'objet d'un consensus non problématique.

    La troisième école est celle de Bâle-Neuchâtel avec, entre autres chercheurs, Lüdi et Py (2000). Ce groupe accepte en partie le concept de diglossie mais en corrige la notion de prestige avec une variété haute et une variété basse :

    « diglossie : situation d'un groupe social (famille, ethnie, ville, région, etc...) qui utilise deux ou plusieurs variétés (langues, idiomes, dialectes, etc...) à des fins de communication, fonctionnellement différenciées, pour quelques raisons que ce soit ». Lüdi et Py (2000 :15).

    La diglossie devient ainsi un modèle consensuel à la base d'une stratégie de coopération, où le bilinguisme ou le plurilinguisme ne sont plus une source de conflit.

    Enfin dans une optique complètement différente celle de Lüdi et Py mais plus proche de celle de Psichari, Lafont (1960) définit la diglossie en prenant l'exemple du modèle catalano-occitan, comme conflictuelle : s'il y a contact de langue il y a compétition donc antagonisme.

    Pour résumer, quand il y a contact de langue il y une domination et une minoration plus ou moins importante qui parfois engendre un conflit. Les sociolinguistes ont surtout étudié ces phénomènes chez les adultes mais les enfants ne sont pas à l'abri des conflits de langue puisque dans des contextes bilingues ils sont confrontés à plusieurs des contacts de langues. Ce contact peut se faire au sein de la famille (famille bilingue) ou lors d'un contexte de migration (famille monolingue qui immigre dans un pays étranger). Dans le premier cas, l'enfant apprendra les deux langues en même temps et la disparité entre les langues sera moins grande ou apparaîtra plus tardivement dans le second cas la langue seconde sera apprise après la langue maternelle et le choc des deux langues sera peut-être plus violent.

    Pour résumer nous avons pu constater l'existence de situations conflictuelles dans lesquelles certaines langues acquises par l'enfant sont dévalorisées, dévaluées dans la société, alors que d'autres sont valorisées. Par exemple, en France, le français tient une

    place prépondérante qui écrase toutes les autres langues non officielles. Un enfant bilingue, en France, sera alors la plupart du temps, confronté à la forte représentation sociale de la langue française et au poids que cette dernière prend dans la société, comme langue de culture, d'ascension sociale, de langue officielle de la République.

    En faisant des recherches, un problème s'est posé au niveau de la terminologie : d'une part, deux auteurs utilisaient les mêmes termes pour parler de représentations différentes, d'autre part, une erreur dans le choix des termes a été relevée. Le conflit porte sur l 'utilisation des termes de bilinguisme additif et soustractif. D'une part Abdelilah-Bauer (2006 : 29) va utiliser la terminologie de bilinguisme additif et de bilinguisme neutre (ou soustractif) pour caractériser le développement d'une compétence à partir de l'impact cognitif qu'a le contexte sur cette langue, c'est-à-dire l'augmentation ou pas des compétences intellectuelles dans la dite langue.

    D'autre part, Hamers et Blanc (1990)7 parlent aussi d'impact cognitif valorisé ou pas mais dépendant du statut de la langue et non pas de son contexte d'acquisition : autrement dit, si les deux langues sont socialement valorisées, l'enfant les apprendra plus facilement que si l'une d'entre elles est valorisée aux dépens de l'autre. L'autre problème se pose au niveau de la sémantique : les termes d'additif et de soustractif sont très vagues, de plus un bilinguisme ne peut pas être à la fois neutre et soustractif.

    Par conséquent, étant donné les divergences terminologiques, pour parler du statut des langues nous préfèrerons utiliser, dans ce mémoire, le terme de bilinguisme neutre si les deux langues sont valorisées au même niveau ou de bilinguisme hiérarchique si l'une d'elles a un statut plus important. Mais le bilinguisme neutre au même titre que le bilinguisme équilibré est rare à notre connaissance le bilinguisme n'est jamais équilibré et bien qu'il soit utopique, il nous semble important d'aborder les différentes possibilités de bilinguisme sous ces deux angles.

    1. 5. Classification en fonction de l'âge

    Le développement du cerveau au cours des années qui suivent la naissance qui va permettre à cette capacité de se développer, autrement dit l'acquisition de la langue maternelle dépendra de la maturation des différentes régions du cerveau et de la relation au

    7 Ils citent Lambert W. E. (1974) « Culture and language as factors in learning and education » in F. E. Aboud & R. D. Meade (eds.) Cultural factors in learning, Bellingham : Western Washington State Union;

    contexte. Il en va de même pour l'acquisition d'une autre langue : En fonction de la période à laquelle l'enfant est exposé à la seconde langue, les conséquences en termes d'acquisition et de développement seront différentes. L'âge d'acquisition joue un rôle dans le développement cognitif de l'enfant mais aussi dans son développement linguistique, neuropsychologique et socioculturel. L'âge d'acquisition est également à mettre en relation avec le contexte et l'usage des deux langues. Ces trois facteurs se combinent souvent ensemble pour donner des variétés différentes de bilinguisme : ainsi de l'âge d'acquisition dépendra un contexte (si les deux langues sont déjà présentes en contexte familial bilingue, ou si l'une des deux langues n'est pas celle de la communauté mais une des langues parlées dans la société).

    Le terme de bilinguisme précoce (« childhood bilinguality ») sert à désigner une acquisition de deux langues avant l'âge de 6 ans. Avant cet âge, le cerveau n'est pas suffisamment mûr pour traiter séparément les informations de la seconde langue. A l'intérieur de cette catégorie , nous classerons deux sous-types de bilinguisme en fonction de l'exposition au contexte8. Le bilinguisme sera précoce et simultané dans le cas d'une exposition aux deux langues dans la cellule familiale dès la naissance ; on parlera de bilinguisme précoce et consécutif lorsque l'enfant, avant l'âge de six ans, évolue dans un milieu familial monolingue et apprend la langue étrangère du pays dans un contexte (hors du cadre familial) ou si la seconde langue est, d'une quelconque manière, introduite après l'âge de trois ans.

    Par opposition au bilinguisme précoce, on parlera de bilinguisme tardif dans le cadre d'un apprentissage intervenant après 6 ans où, soit la langue est celle du pays (différente de la langue maternelle), soit la langue est apprise dans la cadre d'un enseignement dans une institution. En effet, après 6 ans il devient de plus en plus difficile d'acquérir une langue de manière intuitive. De même, il est difficile dans les écrits scientifiques français de trouver une terminologie appropriée. Cet apprentissage peut être divisé en sous-catégories selon s'il se

    8 En réalité certains auteurs parlent de « bilingual first language acquisition » et de « bilingual second language acquisition » mais cela nous paraît plus approprié d'en dresser une définition et d'en établir les limites dans notre partie sur le bilinguisme précoce.

    fait entre 6 et 10 ans dans ce cas se sera un bilinguisme de l'enfance9, s'il se fait à l'adolescence (« adolescent bilinguality 10») entre 8 et 17 ans, soit à l'âge adulte (« adult bilinguality ») après 17 ans.

    Dans les cas de bilinguisme précoce consécutif et de bilinguisme tardif, si les compétences de communications acquises dans les deux langues sont identiques, alors on parlera de bilinguisme additif. Mais si l'enfant possède une plus grande compétence de communication dans une langue que dans une autre, on parlera de bilinguisme neutre ou soustractif. Les différences vont alors reposer sur l'influence du contexte social. En effet, la représentation des langues dans la société va peser sur le développement des compétences de communication dans la langue acquise après la langue maternelle, selon le fait que la langue soit pratiquée ou non, valorisée ou non.

    Cette classification en fonction de l'âge fait apparaître, en transparence, l'influence des concepts piagétiens selon lesquels l'acquisition dépend, avant tout, de constructions. Les bases génétiques de l'individu sont en relation avec une confrontation contextuelle qui, selon divers types de confrontation au contexte, va impliquer le développement des compétences sociales dont le langage et la langue. Dans un contexte bilingue, l'enfant est alors confronté à deux langues, et sa compétence langagière va alors se construire et s'exprimer dans deux langues différentes. La classification en fonction de l'âge implique l'idée de seuil, idée selon laquelle il existe un âge critique après lequel il devient beaucoup plus difficile d'apprendre une seconde langue, même dans son contexte. Comme cela a été abordé dans la partie sur le cerveau, l'âge implique des mobilisations diverses du cerveau, en relation avec le type de confrontation que l'individu a avec le contexte.

    Il apparaît alors que cette classification repose sur le fait que le type de bilinguisme dépend de l'âge au cours duquel la seconde langue est introduite.

    En résumé, les recherches que nous avons présentées ont montré qu'il existe différents types de bilinguisme. Le bilinguisme peut être classé en fonction de critères psychologiques : en premier lieu en fonction de la compétence dans les deux langues c'està-dire qu'il peut être équilibré si l'enfant a le même niveau dans les deux langues ou

    9 Par opposition à la petite enfance qui désigne les enfants en dessous de 6 ans. Je n'ai pas trouvé de terminologie permettant de désigner les enfants bilingues de 6 à 10 ans.

    10 N'ayant pas trouvé de correspondance dans des livres en français, la traduction ne dépend que de l'auteur et peut être soumise à des modifications terminologiques ultérieures. Les correspondances originelles en anglais étaient entre parenthèses et sont tirées de Hamers et Blanc (1990 : 10-11).

    dominant s'il est plus exposé à une langue qu'à l'autre et ainsi il va mieux parler la première langue que la seconde.

    Ensuite, le bilinguisme peut être classé en fonction de l'organisation cognitive de la langue, on parle d'un «bilinguisme composé» si pour un même référent la langue 1 et la langue 2 ont un même signifiant et un «bilinguisme coordonné» si pour un même référent la langue 1 et la langue 2 ont un signifiant respectif dans chaque langue.

    Dans une troisième partie nous avons abordé le bilinguisme en fonction de critères contextuels : dans un premier temps le statut de la langue a été étudié d'un point de vue général au sein de la communauté. Cependant au regard de l'analyse détaillée faite sur les différents types de bilinguisme, un problème s'est posé, en effet pour une même terminologie trois auteurs posaient une définition différente ainsi c'est posée la nécessité de proposer une terminologie nouvelle : j'ai parlé de bilinguisme à tendance neutre pour désigner deux langues qui sont valorisées au même niveau dans une même communauté, par opposition au bilinguisme à tendance hiérarchique où une langue domine l'autre11, ce qui me semble plus réaliste car le bilinguisme à tendance neutre me semble utopique, il n'existe par de situation dans laquelle une langue n'a pas de domination sur l'autre (cela n'induit pas toujours un conflit).

    D'un autre point de vue, le bilinguisme en fonction du contexte d'acquisition peut se définir comme la présence des deux langues dans la communauté. Dans ce cas le bilinguisme est appelé endogène alors que si la seconde langue n'est pas parlée dans la communauté on parlera de bilinguisme exogène.

    La dernière partie définit le bilinguisme en se fondant sur l'âge d'acquisition de la langue seconde. En effet, après 6 ans, on parlera d'apprentissage d'une langue étrangère ou de bilinguisme tardif, que ce soit hors du cadre familial (à l'école), à l'adolescence (entre 12 et 17 ans) ou à l'âge adulte (après 17 ans). Par opposition, on parlera d'acquisition ou de bilinguisme précoce lorsque la langue 2 est apprise avant 6 ans. Abdelilah-Bauer (2006) définit le bilinguisme précoce lorsque les langues 1 et 2 sont apprises avant 3 ans et parle de bilinguisme tardif lorsque la langue 2 est apprise seulement après 3 ans. Dans ce mémoire on préfèrera utiliser le terme de bilinguisme précoce pour désigner un bilinguisme acquis avant 6 ans qui se divise également en deux sous-catégories, lorsque les langues 1 et 2 sont acquises avant 3 ans on parlera de bilinguisme simultané alors qu'après 3 ans lorsque l'enfant est suffisamment grand pour distinguer les langues, s'il apprend une seconde langue on préfèrera le terme de bilinguisme consécutif.

    11 Cette domination, communément appelée « diglossie » n'est pas forcément conflictuelle. C'est la problématique de la diglossie qui fait qu'il ne pourra pas y avoir de bilinguisme équilibré.

    Notre nouvelle définition va se construire en fonction du traitement cognitif et du développement de l'enfant en fonction de son âge, car ce sont les plus pertinents dans le sens où ils sont démontrables dans la dimension empirique.

    Il est apparu, dans les différents types du bilinguisme, que les définitions étaient élaborées selon trois critères essentiels : la mobilisation des compétences cognitives, le contexte et l'âge d'acquisition. Il paraît évident que chaque critère a une pertinence et est essentiel dans une définition du bilinguisme qui cherche à être la plus précise possible. De ce point de vue, la définition en fonction de l'âge, qui prend également en compte le contexte, semble être la plus aboutie. Toutefois, il est nécessaire de constater que cette définition ne précise pas, selon les contextes, s'il y a un bilinguisme équilibré ou dominant. Il apparaît nécessaire de définir également le bilinguisme selon les critères de la diglossie. Ainsi, en reprenant les terminologies de la dernière définition, il sera nécessaire d'apporter, entre autres, la précision d'un bilinguisme équilibré ou dominant.

    Facteurs du bilinguisme

    Type de bilinguisme

    Définition

    Compétence dans les deux langues

    1. Bilinguisme équilibré

    2. Bilinguisme dominant

    Compétence dans la L1 = Compétence dans la L2

    Compétence dans la L1< ou > compétence dans la L2

    Organisation cognitive de la langue

    1. «bilinguisme composé»

    2. «bilinguisme coordonné»

    3.

    Un signifiant pour deux signifiés pour L1 et L2

    Un signifiant pour un signifié dans chaque langue

    Contexte d'acquisition

    1. Bilinguisme endogène

    2. Bilinguisme exogène

    3.

    Présence de la L2 dans la communauté

     

    Absence de la L2 dans la communauté

    Statut des deux langues

    1. Bilinguisme à tendance neutre

    2. Bilinguisme à tendance hiérarchique

    L1 et L2 sont valorisées au même niveau

    L1 est valorisée aux dépens de L2

    Age d'acquisition

    1. Bilinguisme précoce (acquisition)

    (a) Bilinguisme simultané

    (b) Bilinguisme consécutif

    L2 acquise avant 6 ans

    L1 et L2 = langues apprises avant 3 ans

    L2 apprise de 3 à 6 ans

    2. Bilinguisme tardif (apprentissage)

    (a) Apprentissage hors du cadre familial

    (b) Apprentissage à l'adolescence

    (c) Apprentissage à l'âge adulte

    L2 apprise après 6 ans

    L2 apprise entre 10 et 17 ans L2 apprise après 17 ans

    Tableau 1 : Tableau récapitulatif des différents types de bilinguisme sur critères psychologiques, contextuels et selon l'âge d'acquisition (inspiré de Hamers et Blanc, 1990 : 9)

    L1 : Langue 1, par défaut, la langue maternelle enfant

    L2 : Langue 2, par défaut la seconde langue maternelle ou la première langue étrangère

    Rimbaud Sophie L'acquisition du genre et le code mixing chez le bilingue précoce 2009 2. Les bases neurologiques dans le fonctionnement du langage

    Dès le début du XXème siècle de nombreuses études scientifiques ont été conduites sur le bilinguisme. Au début, ces études furent menées par des linguistes sur leurs enfants parce qu'ils évoluaient dans un contexte bilingue. Dès le XVIIème et XIXème siècles, l'hypothèse de l'existence de certaines zones du cerveau impliquées dans le traitement et la production du langage12 était mise en avant mais les théories sur l'interdépendance entre le cerveau et le fonctionnement du langage n'en étaient qu'à leurs débuts ; C'est pourquoi les premiers travaux sur le bilinguisme débutèrent avec l'étude de l'enfant dans divers environnements linguistiques, sur la base de collecte de corpus et portaient uniquement sur le développement linguistique (syntaxe, lexique) dans les deux langues en parallèle et les études neuropsychologiques, bien qu'existantes chez les sujets monolingues, furent laissées de côté.

    Depuis deux siècles mais encore plus aujourd'hui, grâce au développement de technologies perfectionnées, les travaux sur les bases neuropsychologiques du langage tiennent une place centrale dans la compréhension du processus d'acquisition. En effet, aujourd'hui, toute étude de l'émergence du langage que ce soit chez l'enfant monolingue ou bilingue présuppose l'existence de bases neurologiques et cognitives qui entrent en jeu dans le processus de production de la parole. Ainsi, l'émergence du langage implique également le développement neurologique parallèle et complémentaire à l'émergence de la parole qui va passer par différents stades de maturation que nous expliquerons dans cette partie comme la myélinisation des connections neuronales, la latéralisation des hémisphères, la spécialisation des hémisphères et la malléabilité du cerveau et son adaptation à des situations linguistiques particulières ou encore la modulation de certaines zones du cerveau .

    Pendant longtemps la plupart des recherches menées à ce sujet l'ont été sur des individus monolingues mais il paraît évident que, puisque à partir du moment où il y a émergence du langage, l'étude de ce processus sera pertinente que ce soit pour un enfant monolingue ou chez les enfants bilingues. Le langage humain repose sur l'existence et la fonction d'un système nerveux central et d'organes périphériques comme les organes articulateurs de la parole, mais également un fonctionnement neurologique spécifique. Ces moteurs de la parole ne sont pas effectifs dès la naissance et peuvent mettre de nombreuses années avant que leur maturation n'arrive à son terme. Le développement du

    12 En réalité les égyptiens déjà avaient émis l'hypothèse de la présence dans le cerveau de régions dont dépendent le langage, en étudiant certains hommes atteints d'aphasie mais leur recherches nous sont mal connues.

    langage dépend d'une interaction humaine dans un contexte : en effet, lorsqu'il naît, l'enfant ne parle pas encore mais est capable d'entendre. Il possède une grande sensibilité aux éléments acoustiques du fait de la précocité de la maturation de son système auditif et des zones neurologiques du traitement acoustique. Cette précocité serait fonctionnelle dès 5-6 mois au stade foetal (c'est un éveil fonctionnel qui peut être plus tardif) : à la naissance in identifie la voix de sa mère parmi les autres. Quand il naît l'enfant est physiquement capable de produire des sons mais l'acquisition des langues est progressive, en effet, pour comprendre et acquérir le langage, le bébé doit découper le signal sonore afin d'isoler des unités linguistiques pertinentes. Par la suite le développement du langage va passer par différentes étapes successives d'acquisition et de développement Alors que la première étape de perception et distinction des phonèmes est rapide, la seconde étape de l'apprentissage linguistique mettra de nombreuses années car elle dépend de processus qui ne s'achèvent que vers 15 ans.

    2. 1. Les courants théoriques dans la relation langage/cerveau 2. 1. 1. La localisation hémisphérique

    La neuropsychologie est l'étude des relations entre les fonctions psychologiques supérieures et les structures cérébrales. A la base de tout fonctionnement organique il y a une entrée neurologique autrement dit « les processus mentaux sont sous-tendus par des évènements physico-chimiques ayant leur siège dans le cerveau » (Faure, 2003-2004 : 1) 13. Dans les années 1800 le neuro-anatomiste allemand Franz Joseph Gall (1757-1828) se place en précurseur dans son domaine en mettant en avant l'hypothèse selon laquelle l'esprit possède des sous-fonctions localisées à l'intérieur de modules dans le cerveau ; il lance les bases de l'existence de régions spécialisées dans des fonctions mentales dans le cortex cérébral.

    Gall se place parmi les partisans des « localisateurs » mais avec ses idées il s'oppose au clan des « unitaires » dont fait partie Flourens (1794-1867) . Entre les années 1820 et 1861 le clan des unitaires prône l'idée selon laquelle le cerveau fonctionne comme un tout inséparable, il n'y aurait donc pas de zones spécifiques pour chaque faculté. Ce débat prendra fin avec les théories de Broca et Wernickle. A partir de ces constatations sur les lésions cérébrales et l'aphasie, divers scientifiques ont commencé à élaborer des théories sur le fonctionnement neurologique, notamment au niveau du langage. Les travaux de Gall seront repris par Jean Baptiste Bouillaud (1796-1881) qui, en étudiant des

    13 La plupart des indications historiques et scientifiques sont tirées des documents de cours de S. Faure sauf indication contraire.

    traumatismes crâniens accidentels et les lésions cérébrales, va les mettre en relation avec la perte de la parole :

    « Bouillaud inaugure l'anatomo-pathologie du langage qui deviendra la neuropsychologie. Il établit l'existence de cas de paralysie sélective de la langue et des organes phonateurs sans atteinte des membres » (Changeux, 1987 : 29).

    Broca s'inspire des travaux de Bouillaud en apportant, par l'examen du patient, des preuves scientifiques concrètes que des lésions de l'hémisphère gauche (désormais HG) sont responsables des troubles du langage même si les deux hémisphères sont lésés. Cette lésion unilatérale qui suffit à provoquer une aphasie chez le patient atteint ce qui montre l'asymétrie des hémisphères, ce que n'avait pas découvert Bouillaud. Cette découverte le conduit le 18 avril 1861 à faire une allocution devant la Société d'Anthropologie de Paris : c'est en observant le cerveau de M. Leborgne, patient aphasique, lors de son autopsie pratiquée la veille, que Broca confirma l'hypothèse de Bouillaud quant à la localisation du centre du langage :

    « La perte de la parole sans paralysie articulatoire et sans destruction de l'intelligence serait liée à des lésions de la troisième circonvolution frontale de l'hémisphère gauche du cerveau » (Broca, 1865 cité par Melher et Dupoux, 2002 : 210).

    L'aphémie, ainsi nommée par l'étude de cas de Broca, est nommée « aphasie de Broca. Il démontre que des lésions affectant les zones de l'hémisphère gauche impliquées dans le langage, déclenche des troubles langagiers, d'abord au niveau de la production, sur le plan syntaxique avant tout, mais aussi phonétique et lexical, puis au niveau de la compréhension.

    Illustration 2 : Lésions du cortex entraînant des troubles du langage.
    Image réalisée par scanographie (Changeux, 1987: 153)

    L'aphasie de Broca est dite « aphasie motrice » (B) par opposition à l'aphasie de Wernicke, dite « aphasie sensorielle » (C) où le patient développe des troubles de compréhension du langage mais cette aphasie est elle aussi causée par les lésions de l'hémisphère gauche (désormais HG). Les facultés mentales de l'hémisphère droit (HD) ont été identifiées beaucoup plus tard et n'ont que des liens indirects avec le langage : d'une manière globalisante HD est responsable des émotions, de l'espace et de la perception14. Les régions du cerveau ont été neurologiquement situées puis cartographiées par Brodmann en 1909 : il divise le cortex en cinquante-deux aires, chacune possédant un numéro et une fonction.

    2. 1. 1. Une nouvelle approche du cerveau : la théorie unitaire

    En 1842, Flourens développe une conception globaliste du cerveau selon laquelle il fonctionnerait comme un organe uni. Cette théorie de l'unité du cerveau est reprise un siècle plus tard par Lashley:

    «[...] le cerveau est équipotentiel c'est-à-dire que n'importe quelle des parties peut prendre à

    son propre compte les différentes aptitudes cognitives » (Melher et Dupoux, 2002, 204).

    Autrement dit, aucune des aires du cerveau n'est pleinement spécialisée : il a été observé des cas de lésions dans les aires dites du langage qui entraînaient une perte momentanée de la parole, le temps qu'une autre aire développe la fonction endommagée. Lashley a appelé cette propriété la vicariance de la fonction.

    Bien que la théorie de la spécialisation hémisphérique fasse toujours foi dans les écoles de médecine, on assiste à un revirement des études sur le cerveau en faveur de la théorie de Lashley. En mars 2009 Hugues Duffau, le spécialiste en chirurgie cérébrale, a pratiqué une opération sur la zone de Broca chez un patient cancéreux qui n'a pas perdu la parole suite à l'intervention. Voici un extrait de l'interview qu'il a accordé à Midi Libre (mars 2009)15 :

    « J'ai enlevé la zone de Broca, considérée comme la zone de la parole, chez le patient, qui continuera à parler.[...] On est en train de redéfinir le fonctionnement du système nerveux central, c'est une nouvelle porte qui s'ouvre dans l'approche des neurosciences. [...] L'imagerie a montré qu'après la première intervention, le cerveau s'est complètement réorganisé ».

    14 La médecine actuelle sait que HD peut compenser la perte des facultés langagières de HG mais plus les lésions sont importantes et plus le patient touché est vieux, moins vite se fera la reconstitution des fonctions.

    15 Cf. annexe fig. 1.

    Le cerveau implique un fonctionnement composé de réseaux parallèles c'est-à-dire quand il effectue une tâche il mobilise plusieurs zones, ce que les connexionnistes ont appelé les structures associées : une zone est allouée à une tache mais elle est mobilisée de façon secondaire par une autre tâche et mobilise elle-même d'autres aires. De cette façon lorsqu'une aire, comme celle qui participe au langage, est lésée dans son fonctionnement principal, une autre prend le relais. Dans ce cas, s'il y a une lésion sur des zones du langage qui entraîne une aphasie, alors c'est que les réseaux conducteurs (les fibres nerveuses) seraient touchés et ne feraient plus la jonction entre les zones.

    2. 2. Langage et cerveau

    2. 2. 1. Les zones du langage

    Comme les autres activités du système nerveux central, le langage repose sur une organisation sensori-motrice complexe du cerveau, en particulier de l'hémisphère gauche pour tout ce qui relève du plan linguistique du langage, contrairement à l'hémisphère droit, alloué à d'autres fonctions (traitement de l'espace, des émotions, etc.).

    Illustration 3 : Localisation des aires du langage

    L'enchaînement de ces divers mécanismes corticaux et sous-corticaux sont de mieux en mieux connus.

    1. L'aire de Broca : c'est par cette zone que passent les phénomènes moteurs de la parole (l'aphasie de Broca implique les phénomènes phonétiques, syntaxiques et lexicaux, essentiellement au niveau de la production).

    2. Une aire motrice supplémentaire située sur la face interne et supérieure de l'hémisphère.

    3. L'aire temporo-pariétale ou région de Wernicke (dont l'aphasie implique essentiellement des troubles de la perception et de la compréhension du langage,

    mais peuvent impliquer également une production souvent chaotique, incompréhensible ou imprécise).

    Illustration 4 : Anatomie du cerveau

    Les sièges des mécanismes d'enchaînement des idées sont dispersés dans plusieurs zones communes à celle du langage. Voici les trois localisations :

    1. Dans la zone temporale postérieure et pariétale postéro-inférieure, ce siège est en partie rattaché à l'aire de Wernicke.

    2. Dans la partie postérieure de la troisième circonvolution frontale c'est-à-dire en avant de l'aire de Broca.

    3. Dans une partie de l'aire motrice supplémentaire dans la scissure de Rolando. Remarque : l'aphasie sensorielle ou aphasie de Wernicke est causée par une interruption du faisceau arqué qui relie le cortex temporo-pariétal.

    2. 2. 2. La myélinisation du système nerveux

    En partant de l'hypothèse qu'il existe un rapport entre l'évolution de la myélinisation d'un système et les capacités fonctionnelles qui en dépendent (Chevrie/Narbonna, 2007), les travaux de Roch-Lecours ont mis en évidence la relation entre l'évolution des acquisitions et les cycles de myélinisation16 des différents systèmes et zones du cerveau. Parmi la masse d'informations médicales voici quelques extraits en lien direct avec l'acquisition du langage et les fonctions langagières qui se développent au cours de la maturation, ainsi que les déductions que nous pouvons en tirer :

    1. La myélinisation des voies acoustiques pré-thalamiques commence au 5ème mois de la vie foetale et elle est pratiquement achevée au 5ème mois de la vie extra-utérine. La précocité de la myélinisation des voies acoustiques justifie l'importance du rôle de l'audition chez l'enfant nouveau-né ; cela explique également qu'au 6ème mois, l'enfant ne perçoit plus

    16 La myéline est une substance lipidique et protéique formant une gaine autour de certaines fibres nerveuses et servant à accélérer la conduction des messages nerveux.

    que les sons de sa langue maternelle : comme si le placement d'un filtre auditif achevait la construction du système auditif. Cela explique également le fait que le foetus soit sensible à la voix de sa mère et aux paramètres prosodiques (Mehler et Dupoux, 1990), mais également que l'enfant, avant l'âge de six mois, soit capable de discriminer les sons de toutes les langues, puisque son système neuro-cognitif se spécialise, ne retenant que les sons pertinents de sa langue maternelle sous la forme de phonèmes. Dans le cas d'un enfant bilingue précoce, la sensibilité acoustique sera plus variée, s'étendant à un nombre plus important de sons, que ce soit des phonèmes communs aux deux langues et des phonèmes qui leur sont propres. De ce point de vue, il serait intéressant de considérer le fait que le système perceptif de l'enfant se spécialise pour ne retenir que les sons de sa langue maternelle et donc, s'il retient deux systèmes phonologiques, et qu'en plus il est capable de switcher avec, alors il serait possible que l'enfant bilingue développe deux langues maternelles en parallèle, sans que cela remette en cause le statut de la langue dans le débat sur la diglossie et le développement des compétences de communication. En résumé à la fin de la première année suivant la naissance l'enfant quitte le stade du babillage et rentre dans celui du lexique franchissant le cap du premier mot. Sur le plan phonologique l'enfant discrimine les sons de sa langue (à 6 mois les voyelles puis à 10-12 mois les consonnes).

    2. La myélinisation des voies post-thalamiques et des voies d'association commence à peu près à la naissance et se poursuit jusqu'à la 5ème année. Cette lente évolution montre que la stabilisation des mécanismes de fonctionnement ne sont pas tous simultanés et que la mise en place du fonctionnement du langage peut se prolonger au-delà de la période d'acquisition habituellement observée ; autrement dit les éléments complexes du langage vont continuer à se développer après la phase de myélinisation.

    3. La myélinisation des fibres associatives reliant les aires de Broca et de Wernicke débute dès le 1er ou 2ème mois et se poursuit jusqu'à 6-7 ans ce qui justifierait qu'après cette période on passe de l'acquisition d'une seconde langue à l'apprentissage d'une langue étrangère. A 10 ans l'enfant a un système phonologique et syntaxique complet.

    4. La myélinisation des fibres inter-hémisphériques se poursuit jusqu'à 15 ans pour le traitement du vocabulaire autrement dit après cette période on apprend plus difficilement des mots nouveaux.

    Ainsi, ces quatre étapes représentent les trois stades d'acquisition du langage. Elles confirment, comme cela sera développé dans la partie suivante, la théorie de Changeux (sur la sélection et la stabilisation de réseaux neurologiques parmi les possibilités multiples proposées par le système génétique et développées par le contexte). La spécialisation des réseaux est alors en relation avec le système linguistique de la langue, avec la sélection d'un système phonologique, syntaxique, puis lexical. La position de Changeux implique deux

    constatations, la première selon laquelle une dimension interactionniste (Vygotski, 1930) entre en jeu, certains éléments (linguistiques) que l'individu va percevoir, vont spécialiser les réseaux neuronaux ; la seconde que l'enfant bilingue possèderait des réseaux neuronaux spécialisés différemment, dans une reconnaissance de deux systèmes, ainsi qu'un réseau spécifique au code switching.

    2. 2. 3. Le fonctionnement du cerveau chez l'enfant bilingue 2. 2. 3. 1. Changeux et la théorie épigénétique

    Le développement du langage consiste en une succession d'états d'activités cérébrales. A partir d'un état d'activité organique primitif, la maturation amène l'organisme à des stades successifs, biologiquement déterminés dans leur ordre, qui vont le sensibiliser à l'environnement et le rendre capable de traiter les informations présentes dans son contexte immédiat ou pas. Le développement du langage est lié à l'accroissement des connexions dans le cortex cérébral : autrement dit l'augmentation des systèmes de fibres de liaison va faciliter la coordination des aires sous-corticales, des activités fonctionnelles corticales et vont les intégrer dans l'ensemble des activités cérébrales.

    Pour résumer, le développement du système neuronal dans l'activité langagière dépendra des stimuli du contexte dans lequel l'enfant va évoluer. Changeux n'aborde pas le langage par l'analyse des manifestations linguistiques mais exclusivement par l'analyse du développement du cerveau et des structures biologiques. Cela n'étant pas explicite, son étude est liée au développement du monolingue mais sa théorie est suffisamment aboutie pour que l'on puisse l'étendre à l'approche bilingue. Selon ses observations l'acquisition du langage implique une relation entre le système nerveux, des connexions neuronales et l'exposition au contexte dans l'émergence du langage. Autrement dit lors de la naissance l'enfant possède des zones génétiquement déterminées à la réception de certains stimuli. Lorsque ces stimuli sont présents dans le contexte immédiat, ils vont activer lesdites zones et participer au développement du langage qui, au fur et à mesure de la maturation du cerveau, vont se stabiliser. C'est pour cela qu'un enfant qui n'est jamais exposé au langage ne le développera plus ou très mal après le stade critique.

    Sa théorie étendue au bilinguisme explique que les stimuli présents dans le contexte bilingue étant différents de ceux de l'enfant monolingue, l'enfant bilingue devrait développer des structures neurologiques différentes qui vont elles aussi se spécialiser et se stabiliser. De là, on peut émettre l'hypothèse que ces zones mobilisées par l'enfant bilingue, existent

    chez le monolingue, en sommeil, et que lorsqu'il sera en situation d'apprentissage d'une seconde langue, ces structures vont se réveiller, mais se développer plus lentement si le processus de maturation est à un stade avancé, ce qui explique qu'après 10 ans il soit plus difficile d'apprendre une nouvelle langue. Le bilingue précoce développe donc des facultés mentales présentes chez tous les humains mais qui ne se développeront que dans un contexte d'acquisition spécifique : cela va donner lieu à une sélection puis une stabilisation d'un certain système neuronal bilingue mais seulement si l'enfant reste dans son contexte bilingue jusqu'à la maturation de son cerveau, c'est-à-dire entre 7 et 10 ans.

    2. 2. 3. 2. La période critique pour une seconde langue

    C'est la difficulté qu'ont les adultes à apprendre une langue étrangère qui nous amène à penser que l'acquisition d'une ou de deux langues est limitée dans le temps. En effet dans notre première partie nous avons établi différents types de bilinguisme, parmi lequel le bilinguisme tardif qui s'oppose au bilinguisme précoce selon la période d'immersion dans la langue. L'enfant développe un bilinguisme hors du cadre familial donc nous parlerons d'apprentissage, mais le cerveau de l'enfant étant encore malléable ses capacités d'apprentissage ne dépendent uniquement pas d'un facteur physique, nous pouvons dire que l'enfant est dans une période pivot où la limite entre acquisition et apprentissage est encore fragile et où une relation affective à telle ou telle langue facilitera son acquisition.

    A la base de cette rapidité d'acquisition des deux langues, chez le bilingue précoce, se trouve le phénomène de plasticité du cerveau :

    « A travers sa plasticité, la synapse serait en outre à la source de la capacité d'apprentissage. [...] la synapse est un objet dynamique, susceptible d'être modifié par son activité ou son inactivité. ». Debru (1987 : 205).

    La synapse dans sa dynamique propre, forme une des bases de la plasticité du cerveau. Changeux17 fait l'hypothèse que les contacts entre neurones, les synapses, véhiculent les informations à travers le système. Ainsi l'acquisition sera une stabilisation sélective de synapses, celles-ci créant un chemin dans le système. Nous avons une interdépendance entre les deux : la synapse crée le chemin dans le système et, le système, par la confrontation au contexte, oriente le développement de sa structure.

    Le processus de myélinisation paraît jouer un rôle fondamental dans la spécialisation de structures cognitives propres aux langues présentes dans le contexte, impliquant l'existence d'une limite dans l'acquisition des deux langues, celle de la fin du processus de myélinisation. C'est à-peu-près vers l'âge de sept ans que les connections nerveuses entre

    17 Cité par Debru (1987)

    les régions du langage dans le cerveau arrivent à maturation, au-delà de cette période l'acquisition de la seconde langue se fera avec moins d'aisance et relèvera d'un processus d'apprentissage.

    Grâce à l'avancée technologique et scientifique de ces dernières années, notamment le développement des recherches en imagerie par résonance magnétique, le fonctionnement du cerveau est mieux connu. Un point important a été mis en évidence : en fonction de l'âge d'acquisition des deux langues ou d'apprentissage d'une langue étrangère (chez un public adulte), les zones du cerveau qui sont sollicitées ne sont pas les mêmes (Fayol et Kail, 2000). En observant le cerveau d'un adulte bilingue nous remarquons que les zones sollicitées par la langue seconde se trouvent dans des régions différentes de la langue maternelle, alors que chez les bilingues précoces les zones du cerveau sont superposées ce qui signifie que les langues sont traitées indifféremment l'une de l'autre, ou plutôt, qu'elles sont traitées par les mêmes systèmes neuro-cognitifs (Abdelilah-Bauer 2006).

    La maturation neuropsychologique entraîne une prise en compte de l'âge auquel l'enfant est exposé à la seconde langue : l'exposition à la seconde langue sera traitée différemment selon le degré de maturation du cerveau et des processus de myélinisation. Par conséquent les zones du cerveau mobilisées pour le traitement linguistique bilingue ne seront pas forcément les mêmes et la vitesse d'acquisition/apprentissage de la langue seconde sera touchée.

    Ainsi, l'interaction avec la seconde langue ne permettra pas de mobiliser les mêmes structures neuronales et cognitives après 7 ans, et ne permettra plus d'influer sur ces structures et de considérer que la langue étrangère pourrait être traitée comme langue maternelle. Il ne serait alors plus possible d'acquérir une langue maternelle à la fin du processus de myélinisation, processus pendant lequel l'interaction avec les langues acquises a permis de spécialiser et stabiliser les structures neuro-cognitives du langage. Toutefois, il est apparu clairement que les critères de la maturation cognitive et de l'âge sont fondamentaux pour la classification des différents types de bilinguisme.

    2. 2. 3. 3. La latéralisation des hémisphères

    La latéralisation des hémisphères est un processus qui commence très tôt et qui serait déjà bien en place, voire achevé entre 4 et 5 ans (Hamers et Blanc, 1986). La mobilisation de l'hémisphère droit pour le traitement (linguistique et analytique comme la syntaxe, la phonétique ou le lexique) du langage est limité chez un monolingue, alors qu'il est largement mobilisé chez un bilingue précoce. Ainsi, la mobilisation diversifiée et beaucoup plus partagées des hémisphères entre en jeu dans la perception et le traitement de divers stimuli linguistiques.

    Il semble alors évident que la construction du bilinguisme a une influence majeure sur le fonctionnement neurologique et la dominance d'un hémisphère sur l'autre. De ce fait, les bilingues apparaissent plus bilatéraux (selon la terminologie de Jackson cité par Faure18) que les monolingues dans l'utilisation systématique qu'ils font de leur hémisphère droit dans le traitement linguistique. Selon Albert et Obler (1978), cela semble beaucoup plus important chez les bilingues à tendance dominante, entraînant souvent la dominance d'un hémisphère sur l'autre. Il apparaît alors que le degré de compétence de communication dans la langue seconde influence l'implication des hémisphères dans le traitement linguistique. Cette domination d'une langue sur l'autre, si importante dans le débat d'une ou deux langues maternelles, ne serait pas sans influence dans la répartition hémisphérique des tâches linguistiques. En effet, comme cela a été mentionné (cf. supra), l'hémisphère droit est en relation avec le traitement de l'espace, de la prosodie et surtout des émotions. Cet argument pourrait influer le fait qu'il n'existerait alors qu'une langue maternelle ou alors qu'une des deux langues est toutefois fortement favorisée par l'enfant sur le plan affectif. Ainsi la hiérarchisation des langues ne dépendrait pas toujours d'un contexte diglossique mais simplement d'une relation affective à cette langue.

    2. 3. Le traitement cognitif et neurologique du bilingue 2. 3. 1. La cohabitation des deux langues

    Les diverses expériences menées sur les enfants bilingues ont permis d'aboutir à la conclusion selon laquelle les bilingues construisent puis mobilisent différentes stratégies cognitives du traitement linguistique et communicationnel. En effet, si les bases fondamentales du langage sont neurologiquement les mêmes que celles d'un monolingue, un enfant bilingue possède des systèmes neurocognitifs qui lui sont propres, qui ont été développés pour un traitement spécifique des deux langues. Des expériences portées sur l'aphasie chez des bilingues ont conduit (Vaid et Lambert,1979) à considérer qu'il existait un

    18 « Introduction à la neuropsychologie », psychologie cognitive, cours de S. Faure, documents de cours 2003-2004.

    traitement neurologique du bilinguisme différent de celui d'un monolingue, l'enfant possédant une organisation cérébrale et cognitive propre à chaque langue.

    Les diverses expériences (Walters et Zatorre,1978) ont permis de montrer une plus grande implication de l'hémisphère droit chez les enfants bilingues que chez les enfants monolingues, en raison d'une hiérarchisation affective des deux langues. De plus, il a pu être constaté que l'implication des hémisphères ne variait pas selon les langues impliquées dans le bilinguisme, et que chacune des deux langues possédait la même mobilisation neurologique des hémisphères droit et gauche. Il n'existe donc pas de discrimination sur le plan neurologique, entre les langues impliquées dans le bilinguisme, ni entre les deux langues d'un bilingue et donc indépendamment du degré de compétence de communication dans chacune des langues. Il apparaît alors que la mobilisation neurologique est identique pour les deux langues dans le cas du bilinguisme précoce. Les deux langues relèvent de la mobilisation des mêmes zones neurologiques. Toutefois, la différence se situe dans le type de système cognitif et linguistique mobilisé, permettant ainsi la compréhension et la production de deux systèmes différents, même si ces systèmes sont traités par les mêmes zones neurologiques. Les différences cognitives vont alors porter, en relation avec la notion de hiérarchisation affective, sur les compétences de communication dans chacune des langues. Ces différences sont (comme cela a été défini ; cf. partie sur la diglossie) à caractère diglossique, impliquant le fait que sur le plan affectif et/ou contextuel, une langue est favorisée, impliquant des compétences de communication différentes. Ces différences de compétences vont alors peut-être avoir des influences sur la maîtrise d'un des deux systèmes, essentiellement la taille du vocabulaire dans chacune des deux langues, qui ne sera pas le même.

    2. 3. 2. L'impact de la seconde langue sur le système cognitif

    L'âge auquel un enfant est confronté à la seconde langue a une importance non négligeable dans la latéralisation des hémisphères et va jouer un rôle important dans le rôle de chaque hémisphère dans le traitement linguistique (Chevrie/Narbonna, 2007). Il existe alors diverses stratégies cérébrales et divers mécanismes neuropsychologiques impliqués dans le traitement du bilinguisme et des deux langues, sans pour autant avoir un quelconque rapport, comme cela a été expliqué avant, avec la compétence de communication dans chacune des langues : bien que les facteurs dont dépend l'acquisition liée à des prédispositions génétiques, c'est l'exposition au contexte qui va être déterminant dans le bilinguisme de l'enfant.

    Mais pour Caroll (1978), l'âge de la confrontation à la seconde langue aurait une importance majeure dans le rôle joué par chaque hémisphère dans le traitement linguistique comme, par exemple, le degré d'implication de l'hémisphère droit. Il est apparu que le bilinguisme équilibré impliquait une plus grande dominance de l'hémisphère gauche (donc un traitement analytique et linguistique des deux langues, ainsi qu'un code switching parfait, sans erreur ni interlangue), alors que le bilinguisme dominant impliquerait une plus grande dominance de l'hémisphère droit, sans pour autant, nous le rappelons, avoir une incidence sur le degré de compétence linguistique. A ce stade, seul le fait d'une mobilisation de stratégies cognitives différentes peut être avancé.

    Les différences hémisphériques seraient alors provoquées par la perception du contexte et l'âge auquel l'enfant est confronté à ce contexte, nécessitant un traitement catégoriel et organisationnel du monde différent de celui d'un enfant monolingue et dépendrait du degré d'implication des deux langues en contexte, ainsi que la fréquence de sollicitation de chacune. Cela serait alors les variations de la fréquence d'usage qui influeraient sur la compétence de communication. Ainsi, les considérations neurologiques du bilinguisme tendent à souligner une cause diglossique aux variations des compétences de communication, à la domination d'une langue sur l'autre. Cependant, si la confrontation aux contextes et l'âge d'exposition à la seconde langue influenceraient la dominance d'un hémisphère sur l'autre, une fois le processus de latéralisation établi, chaque langue semble neurologiquement mobilisée de la même manière et selon les mêmes processus neuropsychologiques établis (cf. supra : « la théorie unitaire »).

    Ces deux stades sont à mettre en relation avec le fait que l'enfant développe, dans un premier temps, des règles qui sont communes aux deux langues, puis, dans un second temps, des règles de différenciation des deux langues (Hamers et Blanc, 1986). Ces règles de différenciation relèvent d'une plus grande influence de l'hémisphère droit, ce qui justifierait que l'enfant bilingue possède une plus forte implication de cet hémisphère dans la pratique langagière.

    Pour conclure sur cette partie, je dirais que les implications du cerveau dans le bilinguisme semblent être de première importance. En effet, le cerveau est apparu comme étant à la fois à la base et au centre du développement du langage, celui-ci étant totalement dépendant d'abord au niveau des procédures de myélinisation puis de latéralisation des hémisphères, ce qui a conduit à considérer que le fonctionnement neurocognitif d'un enfant bilingue est légèrement différent de celui d'un enfant monolingue au niveau de la mobilisation des hémisphères dans le sens où ce ne sont non pas une langue mais deux qui

    doivent être différenciées et traitées. Par conséquent un enfant bilingue possède un hémisphère droit beaucoup plus impliqué dans les processus linguistiques qu'un enfant monolingue. Avant tout, il va créer des règles cognitives communes aux deux langues, puis développer des stratégies de différenciation. Cependant, il faut souligner qu'aucune de ces particularités de l'enfant bilingue n'a d'incidence sur la compétence de communication qui, elle, semble être contextuellement déterminée.

    3. Le bilinguisme précoce

    Parmi les différents types de bilinguisme, il a été mis en évidence l'existence d'un bilinguisme précoce simultané, lorsque les deux langues sont présentes dans l'environnement de l'enfant dès sa naissance, et d'un bilinguisme précoce consécutif lorsque la seconde langue est introduite avant l'âge de trois ans. Dans cette partie, ne sera développé que le type de bilinguisme en relation avec le corpus étudié dans le cadre de ce mémoire, le bilinguisme précoce simultané. Le bilinguisme lié à une acquisition (par opposition à apprentissage), est dit précoce car il se construit avant 6 ans. C'est ce type de bilinguisme qui se trouve actuellement au centre des préoccupations des chercheurs et des parents bilingues ou monolingues expatriés. Dans cette étude nous préférerons parler de bilinguisme simultané et consécutif.

    3. 1. Le contexte du bilinguisme précoce simultané

    Dans la plupart des cas, le bilinguisme précoce simultané intervient lorsqu'un enfant naît au sein d'un couple mixte dont chacun des parents possède une langue maternelle différente de celle de l'autre, mais dont chacun possède également une certaine compétence de communication dans la langue maternelle de son conjoint. Dans ce genre de contextes, il n'est jamais à exclure l'existence d'idéologies liées à la langue, si l'une est dévalorisée car n'étant pas celle de la communauté ou la langue officielle du pays, selon qu'elle représente l'ascension sociale ou non, etc.

    Ainsi, les parents pourront adopter certaines attitudes spécifiques qui pourront influencer la perception que l'enfant va avoir de chacune des langues, pouvant entraîner parfois un bilinguisme dominant dès les premières années. Toutefois, de nos jours, l'importance que requièrent des maîtrises plurilingues sur le plan professionnel, incite de nombreux parents à transmettre les deux langues à leur enfant.

    Rimbaud Sophie L'acquisition du genre et le code mixing chez le bilingue précoce 2009 3. 2. Le système langagier en construction : un ou deux systèmes ?

    La première idée qui s'est développée au début de la recherche, était que les enfants bilingues de naissance acquièrent dès le début de leur acquisition, un système commun aux deux langues qui va, avec le temps, se scinder en deux systèmes, un pour chaque langue. Cette hypothèse a été rapidement acceptée par la communauté scientifique et ses défenseurs les plus fervents furent Volterra et Taeschner (1978)19 ces chercheurs ont tenté de prouver cette théorie selon laquelle les enfants entrent dans le langage avec un système linguistique qui deviendra deux systèmes au fur et à mesure de l'acquisition du langage. Volterra et Taeschner ont dénombré trois stades d'acquisition de la grammaire qui montreraient que les systèmes passeraient progressivement de un à deux en étudiant en parallèle, les stratégies mises en place par les enfants pour acquérir chaque langue.

    Tout d'abord, l'enfant entre dans le langage avec un système uniquement lexical pour les deux langues, dans un second temps, alors qu'il va développer un système syntaxique pour les deux langues, le répertoire lexical commun va se diviser créant deux systèmes pour chaque langue. Enfin, dans un troisième et dernier temps, le système syntaxique se divise en deux ainsi l'enfant, parti d'un seul système linguistique commun aux deux langues fini par en développer deux, un pour chaque langue. Selon Volterra et Taeschner cette différence de système n'apparaît que lorsqu'un enfant adapte sa langue à celle de l'interlocuteur. Cette théorie fut un pas important dans l'étude de l'acquisition du bilinguisme précoce chez les enfants car elle avance que d'une part les enfants ne naissent pas avec deux systèmes linguistiques, ceux-ci se développent en trois temps dès que l'enfant commence à parler, et d'autre part les enfants sont psychologiquement capables de comprendre qu'ils parlent deux langues différentes et linguistiquement capables de s'adapter spontanément à la langue de leur interlocuteur.

    Cette hypothèse fut reprise et améliorée en particulier par les travaux de Genesee en 1989. Contre l'idée communément acquise que les enfants apprennent à parler deux langues en construisant dès le début deux systèmes linguistiques différents, il développe l'hypothèse selon laquelle les enfants passent par un stade durant lequel ils ne sont pas capables de faire de différence entre les deux langues. Il a élaboré cette théorie en analysant la capacité qu'avaient les enfants à mélanger les langues : si les enfants mélangeaient les langues c'est qu'au début ils ne pouvaient pas faire de différence entre les deux et qu'ils n'avaient donc qu'un système de représentation. Il confirmera cette hypothèse en ajoutant qu'à partir de l'étude d'expériences empiriques basées sur l'étude du code

    19 cité par Deuchar et Quay, 2000)

    switching, les enfants sont psychologiquement et linguistiquement capables de faire la différence entre les deux langues apprises et parlées et qu'en fonction des contextes ils s'adaptent à la langue de l'interlocuteur. En utilisant la langue de l'interlocuteur, l'enfant montre « sa conscience du contexte social » nous parlerons alors de différenciation pragmatique (Abdelilah-Bauer 2006 : 77).

    À la suite de ces considérations, plusieurs éléments peuvent être soulevés : à quel niveau de leur développement les enfants bilingues utilisent-ils deux systèmes langagiers distincts ? Swain (1972) donne l'hypothèse suivante : l'enfant développe d'abord des règles linguistiques communes aux deux langues. L'enfant bilingue doit développer différentes stratégies qui vont lui permettre de différencier les deux langues. Elle va plus loin en disant que l'enfant développe un système commun pour les règles partagées par les deux systèmes et deux systèmes différents pour certaines règles. Le temps de l'acquisition de certaines règles sont attribuées au fait que les enfants bilingues doivent développer différentes stratégies.

    Il est très possible que la confrontation à deux langues, à deux systèmes linguistiques, implique un élargissement du traitement cognitif des deux langues. En effet, l'enfant mobilise des stratégies de différenciation qui lui permettent de traiter différemment les systèmes syntaxiques, lexicaux et sémantiques.

    3. 3 Les premiers mots de l'enfant bilingue

    En parlant de l'enfant bilingue précoce simultané, Genesee (2005) indique que, la plupart du temps, les travaux sur le devenir bilingue donnent une approche souvent calquée sur le développement d'un monolingue. Cependant, depuis les travaux de Volterra et Taeschner (1978, cité par Genesee 2005), il a été mis en évidence que les étapes du développement du bilingue étaient différentes de celles d'un monolingue parce que le bilingue développe deux systèmes au lieu d'un seul (Cantone 2007).

    Les premiers mots d'un enfant bilingue vont varier selon les langues qu'il emploie ; nous ne pouvons pas donner d'explication sur le choix du type de mot que va d'abord employer un enfant. Ces différences sont d'abord dues à la fréquence à laquelle l'enfant est confronté à chacune des langues, et à quelle fréquence il est sollicité dans chacune d'entre elles. Si les mêmes mots ne sont pas appris dans les deux langues en même temps, alors les deux lexiques ne progressent pas de la même manière en même temps. D'une part, il développera plus rapidment le lexique de la langue dominante, d'autre part, les mots que

    l'enfant va employer sera également en relation avec le type de lexique auquel il est confronté dans le cadre familial. Il existerait donc un rapport statistique entre ce qui sera perçu (ainsi que la fréquence de perception de chaque langue) et ce qui sera produit par l'enfant (Grosjean, 2008).

    En nous référant aux travaux de Volterra et Taeschner dans un premiers temps, l'enfant bilingue précoce se constitue un seul système lexical, contenant à la fois les mots des deux langues.

    « In the first stage the child has one lexical system which includes words from both languages, in this stage the language development of the bilingual child seems to be like the language development of the monolingual child. »(Volterra et Taeschner 1978, cité par Genesee et Nicoladis, 2005, 1).

    Durant cette période, l'enfant ne distingue pas les deux langues et a un système de développement proche de l'enfant monolingue : l'enfant bilingue, comme le monolingue, ne possède qu'un seul système, essentiellement composé d'éléments lexicaux : il prononce indifféremment des mots de chacune des langues, quelque soit le contexte (Genesee 2005. C'est à ce stade que vont apparaître les premiers éléments de code-mixing (cf. définition infr), dans lequel l'enfant fait intervenir, dans le mot d'une langue, des éléments (phonétiques, morphologiques) de l'autre langue. Néanmoins il n'existe pas encore de relation pragmatique, de ce fait l'enfant ne va pas utiliser qu'une langue en fonction du contexte ou de la langue du locuteur.

    Cependant, Genesee et Nicoladis (2005) constatent que l'exposition aux deux langues va faire que ces deux langues ont une influence l'une sur l'autre, conduisant à la formation de patterns20 qui vont progressivement se dissocier du type de patterns d'un monolingue.

    « An additional issue is whether exposure to two languages simultaneously influences the pattern of development so that it differs from that observed in monolingual learners. Evidence that the patterns are different could give us insights as to how the processes that underlie language acquisition cope with dual language input. » (Genesee et Nicoladis, 2005 : 1).

    En effet, l'enfant acquiert des mots de traduction équivalente dans l'une et l'autre

    langue de façon très importante dès 1 ; 6, ce qui penche en faveur du fait que l'enfant

    commence à développer deux systèmes lexicaux distincts, malgré un usage indifférencié.

    « However, evidence that bilingual children acquire translation equivalents could be used to argue that they are not acquiring one language, but two (Patterson & Pearson, 2004). [...]The high rate of translation equivalents, a clear violation of mutual exclusivity, suggests that at

    20 C'est un concept qui n'a pas d'équivalent en linguistique. La traduction française est « modèle »

    least from this age on children have two distinct lexical systems. » (Genesee et Nicoladis, 2005 : , 6-7).

    Ensuite vient la seconde étape mentionnée par Volterra et Taeschner (1978, cité par

    Genesee et Nicoladis 2005), étape pendant laquelle l'enfant possède deux systèmes

    lexicaux différenciés, mais employés dans un seul et même système syntaxique.

    « [...] In the second stage, the child distinguishes two different lexicons, but applies the same syntactic rules to both languages . » (Genesee et Nicoladis 2005 ; 1).

    L'enfant, au niveau du lexique, différencie les deux systèmes mais quand il commence à acquérir la syntaxe il commence au début et ne développe qu'un système pour les deux langues. Durant cette période, le code-mixing (cf. partie infra sur la définition du code mixing) va prendre une place importante dans les productions de l'enfant. Le fait qu'il n'y ait qu'un seul système pour les deux langues impliquerait une interférence de mots d'une langue sur l'autre.

    Souvent, le code-mixing se situe alors au niveau de l'ordre des mots comme la construction d'un verbe d'une langue avec un pronom personnel sujet de l'autre langue, ou alors l'insertion d'un adjectif de l'autre langue, ou encore l'insertion, dans le cas d'un bilinguisme français-anglais, d'adjectifs français avant le nom anglais, alors qu'en français, l'adjectif est postposé au nom. Il y aurait donc, à ce stade, des transferts translinguistiques d'éléments morphosyntaxiques d'une langue à une autre :

    « A mitigating factor in cross-linguistic transfer could be language dominance. Children might be more likely to incorporate structures from their dominant into their weaker language, than vice versa (Döpke, 1998; Yip & Matthews, 2000; Petersen, 1988). [...] At the same time, there is evidence of cross-linguistic transfer of specific morphosyntactic features from one language into the other. » (Genesee et Nicoladis 2005 , 1).

    L'interférence est un signe de dominance linguistique, celle-ci pourrait apparaître plus tôt mais comme le fait remarque Genesee, les chercheurs en bilinguisme se focalisent plus sur la production que sur la perception. À cette étape du développement bilingue apparaîtrait la dominance d'une des deux langues : le système linguistique de la langue dominante va imposer son fonctionnement sur le système linguistique de la langue dominée. Le transfert translinguistique n'opèrerait alors que dans un sens unique, de la langue dominée vers la langue dominante, et non l'inverse.

    Enfin, dans un troisième temps, l'enfant maîtrise et différencie les systèmes lexicaux et syntaxiques dans chaque langue :

    « In the third stage the child speaks two languages differentiated both in lexicon and syntax... » (Genesee et Nicoladis 2005 , 1).

    La différence entre les deux langues se fait très tôt, dès que les systèmes se séparent : à notre connaissance les auteurs ne donnent pas d'âge pour la maîtrise des deux systèmes mais si nous partons du même postulat que chez le monolingue, l'enfant bilingue devrait acquérir un système syntaxique plus complexe que l'association de deux mots, entre 3 et 4 ans. Cependant, Cantone (2007) rappelle qu'un enfant bilingue précoce, étant exposé à deux langues, possède un temps d'exposition à chacune des langues inférieur au temps d'exposition d'un monolingue à sa langue maternelle, ce qui entraînerait un léger retard du développement des systèmes de ses deux langues chez le bilingue, mais que ce retard est très rapidement comblé à partir de l'âge de deux ans.

    3. 4. Définition du code mixing

    Le code-mixing est défini, chez un bilingue (Genesee 2005 ; Cantone 2007), comme l'usage d'éléments d'une langue parlée (phonétique, syntaxique, lexical), dans l'autre langue parlée.

    « It is the use of elements (phonological, lexical, morphosyntactic) from two languages in the same utterance or stretch of conversation. It can occur within an utterance (intra-utterance mixin-e.g., «see cheval»[horse]) or between utterances (inter-utterance mixing). Rates of code-mixing in children vary depending on the form of mixing (intra versus inter-utterance), the nature of the mixed element (function versus content words), the language of the conversation (the child's less versus the child's more proficient language), and the context (with interlocutors who are bilingual versus those who are monolingual, for example). » (Genesee et Nicoladis 2005 , 12).

    Au cours du premier stade, dans l'acquisition lexicale d'une langue à l'autre de mots qui peuvent avoir une traduction dans l'autre langue. Il arrive qu'un mot soit sujet au code-mixing, mais que ce même mot possède un équivalent traduit, dans l'autre langue, et que cet équivalent ne soit pas sujet au code-mixing. Cela révèle alors une probable dominance d'une langue sur l'autre.

    Au second stade, la syntaxe est, la plupart du temps, respectée, la syntaxe appelle une certaine structure (lexicale, phonologique, e. g. : un déterminant appelle un nom). En effet, selon Genesee (2005) le mélange n'interviendrait qu'au moment où les deux systèmes syntaxiques sont parfaitement parallèles et superposables.

    « Evidence for grammatical-gap filling comes from Petersen (1988) and Lanza (1997b) who report that bilingual children often mix function words and inflectional morphemes from their more proficient language with content words from their less proficient language, but seldom

    the reverse, and from Gawlitzek-Maiwald & Tracy (1996) who argue that young bilingual children use syntactic patterns from their stronger language to bootstrap into the grammar of their less proficient language. » (Genesee et Nicoladis 2005 , 15).

    Le code-mixing dépend alors de la nature de l'élément mélangé, du statut de la langue utilisée par l'interlocuteur. De ce point de vue, le code-mixing est presque indissociable du choix de la langue et du développement d'une compétence pragmatique basée sur le choix de la langue et de la nature de cette langue (dominante ou dominée). Par conséquent le mélange est à un sens, c'est la langue dominante qui fait irruption dans la langue dominée, et non l'inverse. En effet, la domination a été constatée du fait que l'enfant était parfaitement capable de différencier les deux langues, mais que seule une faisait irruption dans l'autre (Paradis et Genesee 1996, cité par Cantone 2007). Il y aurait donc à un moment, comme nous l'avons évoqué précédemment, un système linguistique plus élaboré que l'autre, plus abouti, peut-être en relation avec le temps d'exposition à chaque langue (Cantone 2007).

    L'existence d'un seul système syntaxique pour les deux langues induirait des cas de particularités qui seraient agrammaticaux, mais nous n'en n'avons pas trouvé. Le code-mixing est alors grammaticalement contraint et suit une syntaxe précise. Il est toujours grammatical. Il garde la syntaxe de la langue dominante par exemple dans l'occurrence « une red chaise », l'enfant bilingue considère l'anglais comme langue dominante et dans le code switching c'est la syntaxe de cette langue qui dominera mais il ne dira jamais « une rouge chaise » car il n'y a pas concurrence de systèmes et qu'en français l'adjectif est postposé.

    Selon Genesee (2005) le troisième stade est l'interférence linguistique ; elle est due au fait que l'enfant est en train de séparer l'usage des deux langues :

    « In the third stage the child speaks two languages differentiated both in lexicon and syntax... » (Genesee et Nicoladis 2005, 1).

    Cette séparation est liée à l'acquisition d'une compétence pragmatique de l'usage des langues : selon les contextes et les interlocuteurs, l'enfant adapte sa langue à celle de son interlocuteur. Il faut également souligner, selon Genesee (1989, cité par Cantone 2007), que le code-mixing interviendrait, dans certaines situations pour pallier à un manque dans une des deux langues, au niveau d'un manque dans le répertoire ou s'il lui manque un aspect syntaxique. Le développement et la maîtrise du système linguistique ne sont pas les mêmes dans les deux langues, et une langue est plus développée que l'autre, peut-être que

    se serait la langue la dominante la plus avancée. Le temps d'exposition aux langues n'étant pas la même dans le contexte, l'enfant a pu acquérir des mots dans une langue qu'il n'a pas dans l'autre : il utilisera alors le mot qu'il connaît dans la langue où il ne le connaît pas. Dans ce cas, l'interférence de la langue dominante serait pour compléter la langue dominée, et le code-mixing disparaîtrait dans le temps avec la maîtrise des deux systèmes.

    En résumé, le code-mixing serait révélateur d'une dominance d'une langue sur l'autre. Au premier stade, l'existence de mots sémantiquement équivalents peut donner lieu, sur l'un des mots d'une langue, à un code-mixing de niveau phonologique ou morphologique, sans que le mot de l'autre langue soit sujet au code-mixing. Au second stade, une syntaxe dominée par un modèle qui est proche de celui de la langue dominante. Au troisième stade, l'interférence lexicale peut pallier à un manque de vocabulaire dans la langue dominée et un système syntaxique de la langue dominante peut pallier au manque de celui de la langue dominée.

    « While mixing to fill lexical gaps because of incomplete mastery of their languages is one explanation of child code-mixing [...]. »(Genesee et Nicoladis 2005, 15).

    Les enfants bilingues ne mixeraient alors pas les structures et les mots appris plus vite dans une langue que dans une autre, alors que les structures acquises plus tardivement dans une langue que dans une autre seraient plus souvent sujettes au code-mixing. Le code-mixing pourrait alors être en relation avec la précocité du système : ce qui est acquis plus tôt dans une langue, par rapport à une autre, sera moins sujet au code-mixing, et, au contraire, serait plus susceptible de faire irruption dans la langue où l'équivalent n'existe pas encore. La langue qui se construirait le plus vite, avec un temps d'exposition à la langue supérieure à celui de l'autre langue, serait celle dite « dominante ». Cantone (2007) et Genesee(2005) posent le postulat que les enfants bilingues mixeraient plus dans une langue que dans une autre, et que la langue la plus sujette au code-mixing serait la langue dominée.

    « [...] Gawlitzek-Maiwald & Tracy (1996) who argue that young bilingual children use syntactic

    patterns from their stronger language to bootstrap into the grammar of their less proficient

    language. Both lexical and morpho-syntactic mixing attest to the young bilingual child's ability

    to access and use creatively the lexical and morpho-syntactic resources of both languages

    on-line during language production. » (Genesee et Nicoladis 2005, 15).

    Néanmoins Genesee (2005) fait aussi part d'une constatation selon laquelle l'enfant reproduit le fonctionnement parental : l'enfant reproduit le code-mixing de ses parents, c'està-dire qu'il mélange dans la même langue que ses parents produisent du code-mixing.

    « In particular, parents who adopt what Lanza dubs «bilingual discourse strategies», such as

    «move-on» or «expressed guess» strategies that imply that the parent has understood what the

    children are saying when they code-mix, tolerate and encourage further code-mixing. Parental discourse strategies may, therefore, be one way in which children learn to make appropriate language choices, at least with familiar interlocutors, and as well offers an explanation of some of the variation that characterizes children in different families » (Genesee et Nicoladis 2005, 18-19).

    L'enfant se fonde alors sur certains patterns du code-mixing parental qu'il mémorise et reproduit.

    3. 5. Le code mixing chez le bilingue précoce

    Lorsque l'enfant bilingue possède la traduction équivalente d'un mot dans l'autre langue, ce n'est pas pour autant qu'il emploiera indistinctement les deux mots. Si au premier stade, l'utilisation de mots des deux langues est indistinct quelque soit le contexte, à partir du second stade, l'utilisation d'un mot plutôt que sa traduction peut s'expliquer de deux façons : la première, parce que le mot prononcé appartient à une langue considérée comme dominante par l'enfant, la seconde en fonction du contexte et de la langue parlée par l'interlocuteur. L'adaptation à l'interlocuteur est très importante : en effet, Lanza (1997, cité par Deuchar et Quay, 2000), dit que l'enfant préfère utiliser la même langue que son interlocuteur.

    Ce choix des langues est souvent lié au développement d'une compétence pragmatique : l'enfant relie un usage à un contexte, souvent un interlocuteur, spécifique. Il a été constaté alors que l'enfant bilingue était très tôt capable d'adapter sa langue à celle de son interlocuteur (Deuchar et Quay, 2003 et Genesee et Nicoladis, 2005) :

    « There is considerable evidence that bilingual children's code-mixing is sensitive to contextual variables, including those related to interlocutor [...] topic (Lanvers, 2001), and the purpose of the interaction (Vihman, 1998). » (Genesee et Nicoladis 2005, 15-16).

    Les enfants bilingues ont tous la capacité d'adapter leur langue à la situation (Romaine 1984 et Andersen 1990, cités par Deuchar et Quay 2003). L'enfant peut choisir une langue de façon arbitraire : ce choix est aussi en relation avec le développement de la compétence de communication21 qui, si elle est inégale, peut favoriser une langue au profit d'une autre. Comme nous l'avons dit précédemment la langue dominante est souvent considérée comme celle où la compétence de communication est la plus grande : c'est la langue dans laquelle l'enfant s'exprime le plus facilement et dans un plus grand nombre de situations que dans l'autre langue. Le choix de cette langue est alors souvent conditionné par le contexte, car pour développer une plus grande compétence de communication, il faut que l'enfant ait été

    21 La compétence de communication se définit comme la capacité de communiquer avec différents locuteurs dans leur langue respective.

    exposé plus longtemps à cette langue qu'à l'autre. L'enfant maîtrise le choix de sa langue en fonction du contexte, mais ce choix, imposé par une plus grande exposition à une des deux langues, peut révéler, dans l'environnement de l'enfant, l'existence d'un contexte diglossique dans lequel les deux langues auxquelles l'enfant est exposé, n'ont pas le même statut, ni la même répartition temporelle et contextuelle dans la communauté.

    Il apparaît alors que le choix de la langue dépende fortement de paramètres contextuels diglossiques, développés dans la partie qui y a été consacrée. Si l'enfant montre un grand attachement identitaire à la langue il préfèrera parler la langue qu'il aura associée comme tenant de son identité (McClure 1981, cité par Deuchar et Quay). Le code-mixing révèle la langue dominante, celle choisie pour être mixée avec l'autre langue, que ce soit pour s'adapter un interlocuteur, ou pour pallier à un développement plus tardif de la deuxième langue : les carences lexicales ou syntaxiques peuvent être compensées par la langue qui possède les éléments qui n'existent pas encore dans l'autre langue. Mais le choix de la langue ne peut avoir lieu (Nicoladis et Genesee 1996, cités par Deuchar et Quay) que si les deux langues possèdent un répertoire suffisamment important pour être employées dans des contextes variés et spécifiques, et lorsque les traductions d'une langue à l'autre sont en nombre suffisant et significatifs. Ces choix des langues dépendent alors d'une compétence pragmatique qui s'acquiert parallèlement au développement des deux langues et qui lui permet d'apprendre quelle langue il faut utiliser en fonction du contexte.

    Lorsque le choix de la langue devient purement contextuel et diglossique alors la quantité de code-mixing diminue : l'enfant ne mixera plus avec un interlocuteur dont il parle la même langue. Au fur et à mesure que l'enfant grandit le code-mixing devient plus une pratique linguistique délibérée qu'un simple automatisme d'acquisition ; Dans ce cas, Genesee et Nicoladis (2005) notent que le choix du code-mixing a une fonction pragmatique, par exemple une fonction d'emphase, afin d'insister sur un mot.

    « Lanvers (2001) reports that her two German-English children (1;6 to 2:11) used language for emphasis (see also Goodz, 1989) and appeal, to quote a parent, and for topic shift (see also Vihman, 1998 ). » (Genesee et Nicoladis 2005, 16).

    Ce choix paraît contributeur de la compréhension de l'échange, par la facilité du décodage de l'intention de l'information. Lorsque l'enfant se trouve dans un contexte où il doit parler la langue qu'il maîtrise le moins il pourra utiliser le code-mixing pour pallier à ce manque linguistique : dans ce cas c'est la compétence de communication qui sera l'élément déclencheur du code-mixing. Cependant, les problèmes liés à la compétence de communication se comblent vite, dans la mesure où l'enfant développe très rapidement les

    compétences qui lui manquent. Lorsque l'enfant évolue dans un contexte social, hors du cadre familial, il va vite combler ce manque dans sa compétence de communication, car ce retard est lié au processus de socialisation : parallèlement à la nécessité de communiquer avec des interlocuteurs, nous assistons à un développement rapide des compétences22.

    L'usage du code-mixing peut alors faire partie intégrante de la compétence de communication, et plus encore s'il appartient au processus de socialisation langagière dans la mesure où dans les communautés bilingues il faut s'insérer, pratiquer des formes spécifiques de code-mixing. Ainsi, comme cela a été abordé, le choix de la langue ou/et du code-mixing dépend fortement du contexte diglossique dans lequel l'enfant évolue. Un enfant qui évolue dans un cadre familial dans lequel les parents imposent un contexte monolingue l'enfant réduira conséquemment son code-mixing, voire le fera disparaître.

    3. 6. Le code switching

    Le code switching peut apparaître à n'importe quel moment dans le discours d'un bilingue (Cantone 2007). Sur un plan cognitif, les deux langues sont toujours actives, mais le sont encore plus dans un contexte bilingue. Cette particularité cognitive permet d'établir la définition du code switching : ce serait alors la capacité volontaire à faire intervenir la deuxième langue dans le discours. Passer ainsi d'une langue à l'autre dans un discours se rapproche de l'utilisation du code-mixing mais nécessite un effort supplémentaire : en contexte monolingue l'enfant ne mixe pas mais switche et cette opération demande un effort cognitif supplémentaire. Nous pouvons néanmoins observer l'existence d'un code switching en contexte bilingue à condition qu'il soit le résultat d'une intention volontaire soulignant ou facilitant le décodage de l'intention communicative pour l'interlocuteur. En effet, dans ce dernier cas, si l'emphase n'était pas volontaire nous aurions affaire à du code-mixing, code défini précédemment, dans tout contexte bilingue. Dans ce contexte les deux langues sont cognitivement activées, beaucoup plus qu'en contexte monolingue. Au niveau cognitif si l'enfant ne fait pas d'effort pour passer d'une langue à l'autre nous parlerons de code-mixing alors que s'il y a un mouvement volontaire de la part de l'enfant nous parlerons de code switching.

    La frontière entre code-mixing et code swicthing est fine et la différence est délicate et la différence diverge selon les auteurs : C'est pour cela que nous nous réfèrerons à la définition de Myusken :

    22 Cependant si la langue dominée n'est pas parlée hors du cadre familial, alors le fossé créé entre les deux langues ne se comblera pas et l'enfant parlera la langue dominée sans en développer toutes les compétences de communication.

    « [...] all cases where lexical items and grammatical features from two languages appears in one sentence [...] the more commonly used term code switching will be reserved for the rapid succession of several languages in a single speech event » (Muysken 200023, cité par Cantone 2007 ; 56).

    Le code switching apparaît alors comme un choix délibéré en fonction de l'interlocuteur, du contexte, du sujet de la conversation, et de l'utilité pragmatique de recourir au code switching, sans enfreindre les codes sociolinguistiques, et en respectant les contraintes grammaticales spécifiques à l'intérieur de laquelle s'insère le code switching (Cantone 2007). Mais avant tout, il faut souligner les effets communicatifs du code switching, brièvement abordés auparavant. Le code switching est alors appréhendé comme une stratégie communicative (Cantone 2007). Son usage peut être sémantique, afin d'employer un mot qui n'a pas d'équivalent exact dans l'autre langue, ou qui apporte une nuance que l'autre mot n'a pas dans sa définition ; il peut être pragmatique, en posant une emphase sur le mot objet du switch ; il peut être social et faire partie d'un style socioculturel ; il peut également être purement rhétorique, afin de capter l'attention de l'interlocuteur.

    Le code switching se manifeste à travers trois phénomènes spécifiques (Cantone 2007), l'insertion, lorsque des éléments d'une deuxième langue sont insérés dans la langue parlée. Le transfert qui présuppose un calque parfait des structures syntaxiques des deux langues, et l'alternance d'un élément par un autre dans la même position syntaxique, en plaçant un mot pouvant exercer l'exacte fonction syntaxique du mot substitué.

    23 MUYSKEN P. (2000) Bilingual speech : a typology of code mixing, Cambridge : Cambridge University Press.

    3. 7. Synthèse de développement du langage chez le monolingue :

    L'acquisition est un processus naturel, long et complexe. Si cette acquisition vient naturellement en interaction avec un contexte, elle doit passer par des étapes successives. Le processus par étapes est le même pour l'enfant monolingue et bilingue : dans une étude sur le bilinguisme précoce simultané, il est nécessaire d'établir un parallèle entre ces deux processus d'acquisition, pour pouvoir établir le profil de l'enfant que nous allons étudier, à la fois dans l'acquisition du langage et genre. Néanmoins, l'acquisition du monolingue n'étant pas notre sujet, nous ne rentrerons pas dans les détails de cette acquisition.

    La période pré-linguistique précède l'installation du langage. Pendant les six premiers mois de la vie l'activité du bébé est centrée sur la perception : à cet âge sa compétence de discrimination est particulièrement développée, il est capable de discriminer des sons qui ne sont pas dans sa langue maternelle. Cette particularité explique pourquoi, dans le cadre du bilinguisme, un enfant est réceptif à deux langues différentes ou plus. De la naissance à 6 mois l'enfant produit des vocalisations qui vont se structurer pour donner entre 6 et 10 mois un babillage « canonique » (les syllabes sont soumises à un ordre tel qu'il sera dans le langage normé). Dès 9 mois, l'enfant est capable de comprendre des mots isolés qu'il a fréquemment entendu.

    La période linguistique commence, du point de vue de la production, vers 12-13 mois lorsque l'enfant prononce son premier mot. Alors qu'il babille encore il est capable de nommer des noms (papa, maman, son prénom) et les objets les plus fréquent de son environnement. Il commence à acquérir des éléments de syntaxe : on parle alors de babillage mixte.

    Entre 18 et 24 mois l'enfant connaît une explosion lexicale. Cette explosion s'exprimer dans les productions de l'enfant vers la fin de la première année, au début de la seconde, associé à un début de complexité syntaxique : l'enfant s'exprime en style télégraphique sans morphèmes grammaticaux. L'explosion grammaticale a lieu entre 2 et 3 ans avec l'acquisition des morphèmes (conjugaison de verbes, accord de genre de l'adjectif, mots fonctionnels). A partir de là, sa production gagnera en complexité syntaxique et ne cessera de se développer. Ainsi vers 4 ans la parole de l'enfant est construite et intelligible. Néanmoins certaines acquisition continuerons de se développer encore longtemps (jusqu'à 15 ans pour le vocabulaire).

    Chapitre 2 : Partie expérimentale

    1. Méthodologie

    Dans cette étude expérimentale, nous avons choisi un corpus sur la base de données CHILDES24, acronyme pour « Child Language Data Exchange System ». Il permet la transcription et l'analyse d'une large base de données à partir de vidéos et d'enregistrements audio. Les corpus sont élaborés avec un ensemble de normes de transcription spécialement construites pour l'étude des situations naturelles de dialogue. Ces normes sont connues sous le nom de CHAT (« Codes for the Human Analysis of Transcripts »). CHILDES se compose ainsi d'un « Editeur » (traitement de texte) qui permet la transcription selon les normes CHAT et permet une transcription phonétique selon le code SAMPA. SAMPA est l'acronyme de (« Speech Assessment Methods Phonetic Alphabet »), c'est un jeu de caractères phonétiques utilisable basé sur l'alphabet phonétique international (API).

    Les programmes permettant de transcrire des vidéos sont connus sous le nom CLAN (Computerized Language Analysis). Sous CLAN il est non seulement possible de faire des transcriptions mais aussi de lancer des requêtes pour trouver une occurrence simple ou codée. Au-delà de l'utilisation que nous allons en avoir pour cette étude il propose également des décomptes fréquentiels et des analyses de co-occurrences, des analyses phonétiques, lexicales, morphosyntaxiques, les calculs automatiques de divers indices utiles dans l'examen des productions langagières notamment le MLU (« Mean Lengh of Utterance » ou Longueur Moyenne des Enoncés).

    L'enfant a été choisit parmi d'autres enfants dans des corpus sur le bilinguisme français/anglais de CHILDES. Nous avons essayé de prendre un enfant qui a été suivit longtemps, qui avait le plus de transcriptions et qui utilisait le plus le code mixing.

    1.1. Présentation de l'enfant et de la famille

    La famille vit à Montréal au Québec. La situation linguistique du Canada est particulière puisque c'est un pays bilingue le français et l'anglais cohabitent avec différents statuts selon la région. A Montréal, le français est la langue officielle, c'est-à-dire la langue utilisée dans l'administration. La moitié de la population ne parle que français, et un tiers des habitants sont bilingues. Les parents de l'enfant sont bilingues, avec pour la mère, l'anglais comme langue dominante, et pour le père, le français comme langue dominante. Mais nous ne savons pas s'ils sont bilingues de naissance. Ils ont un enfant, Olivier, qui sera le sujet de notre étude mais il ne sera mentionné que sous le terme neutre d'« enfant ». Il a été enregistré de 1;10.05 à 4;00.19. Le temps d'étude s'étale du 29 février 1992 au 15

    24 Le site du CHILDES http://childes.psy.cmu.edu.

    septembre 1994. Nous avons très peu de renseignements sur la famille mais nous savons que l'enfant passe ses journées à la crèche (« daycare ») où il n'est en contact qu'avec des enfants parlant français. La famille utilise la règle de « la langue unique » c'est-à-dire « un parent-une langue » ou en anglais « one parent-one language rule » autrement dit le parent ne s'adresse à l'enfant que dans sa langue maternelle et n'utilise pas la langue de l'autre parent.

    1. 2. L'enregistrement du corpus

    La famille a été filmée pendant 4 ans par deux chercheuses en bilinguisme dans trois situations différentes : lorsque l'enfant interagit avec ses deux parents (trois enregistrements), lorsqu'il n'est qu'avec sa mère (sept enregistrements) et lorsqu'il interagit avec son père (sept enregistrements). Sur ces 17 enregistrements un enregistrement a été fait avec le père pendant le repas de l'enfant, les autres se passent durant des moments de jeux dans le salon. Les séances varient de 20 min à 55 min pour celles qui ont été filmé mais ne sont pas communiquées pour celles enregistrées sur cassette25.Ce sont les seules informations dont nous disposons et nous manquons d'informations complémentaires quant aux modalités des enregistrements (notamment sur la régularité des enregistrements).

    1. 3. La transcription du corpus

    Les enregistrements sont transcrits avec non seulement les productions de l'enfant mais aussi celles des interlocuteurs. Les transcriptions peuvent être sous la forme de transcriptions simples ou accompagnées de vidéos.

    Le corpus que nous avons étudié est dit longitudinal car il suit l'évolution du langage chez un même enfant sur plusieurs années avec des enregistrements réguliers. Il n'est constitué que de transcriptions et s'ils existent, sur CHILDES nous n'avons pas les enregistrements vidéo correspondants. Les transcriptions ont été effectuées par une étudiante native du Québec français mais parlant couramment l'anglais. La transcription se fait avec le logiciel CLAN sous ce modèle :

    - Tous les dialogues sont retranscrits : MOT (mother) signifie que c'est la mère qui parle, FAT (father) signifie que c'est le père qui parle, l'enfant est transcrit sous le terme CHI (child) et la personne qui filme est l'expérimentateur ou EXP (experiment)26

    25 Cette partie est beaucoup plus détaillée dans l'analyse des résultats, premier tableau.

    26 Ce n'est pas forcément le transcripteur.

    - Les tours de parole des parents et de l'expérimentateur sont transcrits orthographiquement. Les tours de parole de l'enfant sont transcrits orthographiquement et phonétiquement. Pour les transcriptions phonétiques le code utilisé est le code Sampa.

    - Sous les lignes principales transcrites (orthographiques pour les parents et phonétiques pour l'enfant) est placée une ligne secondaire où est marqué « % COD : $LAN:E $ADD », c'est la référence du codage phonétique pour pouvoir décoder la transcription de l'enfant. Cela clarifie aussi à qui s'adresse la personne qui parle, par exemple : « *MOT: who's at the park ? %cod : $LAN:E $ADD:CHI», la mère (MOT) s'adresse à l'enfant (CHI).

    - La situation de l'interaction est décrite en début de corpus par exemple : « Parents playing with Olivier and toys in living room. » mais les actions des participants peuvent être codées « %com » sur une ligne secondaire si elles participent à la compréhension du discours. Le transcripteur peut aussi clarifier la prononciation de l'enfant ou de l'adulte, exemple « %com : the "r" is French, but he also noticeably pronounces the "k" at the end, like in English ».

    1. 4. Le codage

    Le codage du genre n'existant pas sur le corpus utilisé nous l'avons créé. Il sert à marquer les occurrences que nous étudions, et à se repérer dans le corpus pour établir des proportions. Notre codage se divise en trois parties :

    - Le signe @ (arobase) est une convention qui marque le début d'un codage.

    - La ou les deux lettres qui suivent l'arobase servent à définir la catégorie de l'unité grammaticale.

    - La lettre m, f, ou n sert à donner le genre (m=masculin, f=féminin, n= neutre)

    - Enfin, la dernière lettre code la validité ou pas de l'occurrence de l'enfant par rapport à la norme (v=valide, e=erroné). Par exemple : ame signifie article masculin erroné27.

    1. 5. Le contexte et l'interaction

    Etudier un enfant dans son contexte permet d'avoir une production naturelle : c'est de l'interaction que va naître la production. L'acquisition suis le même fonctionnement que l'apprentissage : de la rencontre entre le contexte et un enfant va émerger une interaction qui elle-même va provoquer la production de nouvelles compétences de communication ou va faire évoluer les compétences antérieures.

    27 Cf. la transcription en annexe avec des exemples de codage

    En effet, l'apprentissage est dépendant du contexte : s'est dans l'interaction qu'il se construit. Les processus interactionnels constituent les premières étapes des processus acquisitionnels. Pour qu'il y ait interaction de la part de l'enfant il faut provoquer le discours par le discours, et pour cela il faut maintenir une communication via une tâche communicative, comme des jeux (histoire, puzzles, lecture...).

    Hypothèse : En observant des adultes monolingues qui apprennent une langue étrangère nous avons remarqué que les erreurs de genre sont les plus fréquentes et sont celles qui persistent dans le temps. Les occurrences de genre prononcées, pour une même structure syntaxique, peuvent être aussi bien valides qu'erronées, ce qui est le signe d'une interlangue. Nous posons l'hypothèse que l'enfant bilingue précoce va suivre la même évolution, dans l'alternance des occurrences de genre valide et erroné, mais contrairement à un adulte, les erreurs vont se concentrer sur une courte période et ne vont pas perdurer.

    1. 6. La syntaxe française28

    Les déterminants :

    L'article défini

     

    Singulier

    Masculin

    le

    Féminin

    la

    Codage :

    @amv : article masculin valide @ame : article masculin erroné @afv : article féminin valide @afe : article féminin erroné

    L'article indéfini

     

    Singulier

    Masculin

    un

    Féminin

    une

    Codage :

    @aimv : article indéfini masculin valide @aime : article indéfini masculin erroné @aifv : article indéfini féminin valide @aife : article indéfini féminin erroné

    L'article partitif

     

    Singulier

    Masculin

    du

    Féminin

    de la

    Codage

    28 Les éléments de syntaxe qui n'apparaissent pas dans le corpus n'ont pas été retenus dans les classifications. La grammaire utilisée est celle de Riegel, Pellat, Rioul (1994).

    @apmv : partitif masculin valide

    @apme : partitif possessif masculin erroné @apmv : partitif possessif féminin valide @apme: partitif féminin erroné

    Le déterminant démonstratif

     

    Singulier

    Masculin

    ce

    Féminin

    cette

    Codage :

    @dmv : déterminant masculin valide @dme : déterminant masculin erroné @dfv : déterminant féminin valide @dfe : déterminant féminin erroné

    Déterminant Possessif

     

    Singulier

    Masculin

    mon

    Féminin

    ma

    Masculin

    ton

    Féminin

    ta

    Masculin

    son

    Féminin

    sa

    Codage :

    @dpmv : déterminant possessif masculin valide @dpme : déterminant possessif masculin erroné @dpfv : déterminant possessif féminin valide @dpfe : déterminant possessif féminin erroné

    Les pronoms :

    Rimbaud Sophie L'acquisition du genre et le code mixing chez le bilingue précoce 2009 Pronoms personnels :

     

    Singulier

    Pluriel

    Masculin

    il

    Ils

    Féminin

    elle

    elles

    Masculin

    lui

    eux

    Féminin

    elle

    elles

    Codage

    @pmv : pronom masculin valide @pme : pronom masculin erroné @pfv : pronom féminin valide @pfe : pronom féminin erroné

    Les noms :

    En français certains noms portent la marque du genre, comme les noms de métiers. Le codage vaut à la fois pour le singulier et le pluriel. Ils seront codés :

    @nmv : nom masculin valide

    @nme : nom masculin erroné

    @nfv : nom féminin valide

    @nfe : nom féminin erroné

    L'adjectif qualificatif :

    En français l'adjectif qualificatif s'accorde en genre avec le nom qu'il qualifie. Ils seront codés :

    @admv : adjectif masculin valide @adme : adjectif masculin erroné @adfv : adjectif féminin valide @adfe : adjectif féminin erroné

    1. 7. La syntaxe anglaise 29

    29 Larreya et Rivière (2005).33

    Dans la grammaire anglaise le genre n'est pas marqué dans la forme du nom lui-même

    (sauf pour certains noms de métier en -er : waiter/waitress) ni dans la forme du déterminant.

    Le genre en anglais est naturel c'est-à-dire que l'alternance des genres correspond à la

    distinction physique de sexe ou l'absence de sexe. Cependant il existe des exceptions :

    - pour les petits enfants et les grands mammifères, nous employons le neutre quand on ignore le sexe. Mais si les personnes connaissent le sexe ils emploieront le genre approprié pour les enfants et les animaux (si il y a un rapport affectif à l'animal).

    - dans certains cas on peut ignorer le sexe de la personne : il est possible de considérer que le masculin l'emporte et on utilise le « he », le choix peut être ouvert en employant la formule « he » ou « she », enfin on peut utiliser des termes neutres comme « person » ou « they ».

    - pour les animaux dits inférieurs (oiseux, insectes...) nous pouvons employer le neutre ou le sexe « he/she ».

    - pour les objets inanimés l'emploie du neutre est la règle générale, pourtant pour marquer de l'affection envers un objet on peut employer le genre masculin ou féminin.

    Remarque : dans cette étude nous ferons le choix d'une grammaire normée. Les objets et les animaux seront considérés comme neutre et une dérogation à cette règle de la part de l'enfant tiendra de l'erreur.

    Les pronoms :

     

    Singulier

    Masculin

    he

    Féminin

    she

    Neutre

    it

    Masculin

    him

    Féminin

    her

    Neutre

    it

    Codage :

    @ppemv: pronom personnel masculin valide @ppeme : pronom personnel masculin erroné @ppefv : pronom personnel féminin valide

    @ppefe : pronom personnel féminin erroné @ppenv : pronom personnel neutre valide @ppene : pronom personnel neutre erroné

    Pronoms possessifs :

     

    Singulier

    Masculin

    his

    Féminin

    her

    Neutre

    its

    Masculin

    his

    Féminin

    hers

    Codage

    @ppmv : pronom possessif masculin valide @ppme : pronom possessif masculin erroné @ppfv : pronom possessif féminin valide @ppfe : pronom possessif féminin erroné @ppnv : pronom possessif neutre valide @ppne : pronom possessif neutre erroné

    Rimbaud Sophie L'acquisition du genre et le code mixing chez le bilingue précoce 2009 2. Analyse des résultats

    2. 1. Présentation du corpus

    Age

    Contexte

    Durée*

    nbre produc.

    français

    anglais

    mixing

    Non linguistique

    1;10.05

    both

    45 min

    190

    92

    38

    1

    59

    1;11.10

    father

    40 min

    113

    68

    7

    2

    36

    1;11.13

    father

    55 min

    236

    157

    0

    1

    78

    1;11.15

    mother

    40 min

    115

    30

    51

    3

    31

    2;01.29

    mother

    55 min

    254

    77

    28

    15

    134

    2;03.13

    father

    40 min

    297

    214

    6

    3

    74

    2;03.20

    mother

    40 min

    206

    107

    23

    1

    75

    2;05.00

    both

    50 min

    213

    120

    17

    1

    75

    2;06.03

    mother

    NC

    198

    107

    30

    10

    51

    2;09.03

    father

    NC

    151

    98

    11

    2

    40

    2;09.07

    mother

    20 min

    282

    12

    186

    1

    83

    2;10.29

    father

    45 min

    361

    249

    4

    1

    107

    2;10.29 **

    mother

    45 min

    343

    4

    223

    0

    116

    2;11.15

    both

    45 min

    321

    130

    60

    0

    131

    3;06.09

    mother

    NC

    186

    10

    139

    0

    37

    3;06.14

    father

    NC

    265

    204

    17

    0

    44

    4;00.9

    father

    NC

    217

    183

    0

    1

    32

    Total

     
     

    3948

    1862

    840

    42

    1203

    Tableau 1:Tableau productions totales de l'enfant, en français, en anglais et avec le code mixing

    * Pour les enregistrements audio (« audio tape »), le temps n'est pas indiqué dans le corpus ** Il y a une erreur dans le corpus : la date, l'âge, l'heure, et la personne qui filme sont les mêmes dans les deux fichiers, seul le contexte et les dialogues montrent que ce sont deux enregistrements différents.

    Figure 2 : Histogramme représentant les productions de l'enfant

    Age

    Contexte

    Production

    Français

    % Français

    Anglais

    % Anglais

    Mixing

    % Mixing

    Non linguistique

    % Non linguistique

    1;10.05

    both

    190

    92

    48.42%

    38

    20%

    1

    0.53%

    59

    31.05%

    1;11.10

    father

    113

    68

    60.18%

    7

    6.19%

    2

    1.77%

    36

    31.86%

    1;11.13

    father

    236

    157

    66.52%

    0

    0%

    1

    0.42%

    78

    33.05%

    1;11.15

    mother

    115

    30

    39.40%

    51

    44.35%

    3

    2.61%

    31

    26.96%

    2;01.29

    mother

    254

    77

    30.31%

    28

    11.02%

    15

    5.10%

    134

    87%

    2;03.13

    father

    297

    214

    72.05%

    6

    2.02%

    3

    1.01%

    74

    24.92%

    2;03.20

    mother

    206

    107

    51.94%

    23

    11.17%

    1

    0.48%

    75

    36.41%

    2;05.00

    both

    213

    120

    56.34%

    17

    8%

    1

    0.47%

    75

    35.21%

    2;06.03

    mother

    198

    107

    54.04%

    30

    15.15%

    10

    5.05%

    51

    25.76%

    2;09.03

    father

    151

    98

    64.90%

    11

    7.28%

    2

    1.32%

    40

    26.49%

    2;09.07

    mother

    282

    12

    4.25%

    186

    65.96%

    1

    0.35%

    83

    29.43%

    2;10.29

    father

    361

    249

    68.98%

    4

    1.11%

    1

    0.28%

    107

    29.64%

    2;10.29 **

    mother

    343

    4

    1.17%

    223

    65.01%

    0

    0%

    116

    33.82%

    2;11.15

    both

    321

    130

    40.50%

    60

    18.69%

    0

    0%

    131

    40.81%

    3;06.09

    mother

    186

    10

    5.38%

    139

    74.73%

    0

    0%

    37

    19.90%

    3;06.14

    father

    265

    204

    76.98%

    117

    6.42%

    0

    0%

    44

    16.60%

    4;00.9

    father

    217

    183

    84.33%

    0

    0%

    1

    0.46%

    32

    14.75%

    Total

     

    3948

    1862

    49.92%

    840

    21.30%

    42

    1.06%

    1203

    30.47%

    Tableau 3 : Tableau en proportion des productions en français, anglais et en code mixing (%)

    Dans cette partie nous allons présenter le corpus. L'enfant a été suivi de 1;10,05 à 4;00,19 avec des séances irrégulières d'enregistrement. Les durées des séances varient de 20 min (1 fois) à 40 min (4 fois), 45 min (4 fois), 50 min (1 fois) et 55 min (2 fois). Plusieurs problèmes se sont posés pour étudier l'évolution de l'acquisition : nous ne savons pas de quelle manière a été récolté le corpus : même si le contexte qui semble régulier (7 fois avec le père, 7 fois avec la mère et 3 fois avec les deux), les vidéos ne sont pas aux mêmes intervalles et de même durée. S'il y avait des conventions pour la collecte du corpus nous n'y avons pas eu accès.

    Le premier tableau représente la classification des productions30 de l'enfant : elle se fait en fonction de l'âge, du contexte de l'interaction, de la durée de l'enregistrement et de la totalité des tours de parole par âge. A l'intérieur de ces productions ont été développées les productions dans les deux langues et dans l'utilisation du code mixing. La dernière colonne représente toutes les productions non linguistiques de l'enfant (babillage, rire, production non compréhensible...). Toutes les situations se passe dans le salon, l'enfant joue avec ses parents sauf à 1;11.10 où la séance se passe pendant le repas,

    La figure 2 représente un graphique qui illustre les productions de l'enfant dans les deux langues et dans le code mixing. La création d'un graphique permet une compréhension plus rapide des résultats mais exclu des données telles que le contexte et la durée des enregistrements.

    Le second tableau fait écho au premier dans le sens où il représente toutes les productions de l'enfant dans le corpus, mais pour mieux cibler l`évolution des productions nous avons fait calculé des proportions sous la forme de pourcentages. Par souci de clarté et de pertinence pour notre analyse, les pourcentages des productions par âge ont été calculés par rapport au nombre de tours de parole pour chaque âge. Il est plus facile pour nous de mener cette analyse en nous référent aux proportions, puisque la durée des séances varie ou ne nous est pas indiquée.

    Nous avons calculé le nombre total de production par âge pour arriver, à la fin du corpus, à un total de 3948 occurrences. Parmi ces 3948 occurrences nous observons 1862 occurrences en français, 840 occurrences en anglais et 42 formes de code mixing. Le reste correspond aux productions non linguistiques.

    Le français apparaît clairement comme la langue dominante31 :

    « Il est important de savoir si le français est la langue dominante de l'enfant, c'est-à-dire celle à laquelle il est le plus exposé. Il s'agit généralement [...] de la langue parlée dans le milieu de garde. » Paradis, Crago, Belanger, 2005, 28.

    30 Par production nous entendons le nombre de tour de parole de l'enfant.

    31 Nous rappellons que l'efant passe ses journées dans une crèche « daycare ».

    En effet sur 3948 productions il en produit un peu moins de la moitié en français (49.92%), et l'anglais est la langue dominée avec 840 occurrences, moitié moins que les productions en français avec 21.30%. Suivant le contexte dans lequel interagit l'enfant une langue peut être plus utilisée que l'autre. Le père interagit en français avec l'enfant et la mère lui parle en anglais. L'enfant ne parle pas beaucoup anglais avec sa mère, il montre une préférence pour le français pourtant il semble comprendre et parler anglais comme nous le montre les productions (réduites) dans cette langue.

    Les productions en anglais sont très limitée par exemple à 1;10.05 elles se limitent à un verbe « open », et des noms « baby » et « daddy » qu'il adresse indifféremment à son père ou à sa mère (il ne différencierait pas encore les langues puisqu'il n'a pas encore associé un interlocuteur à une langue lorsqu'il y a ses deux parents). Par contre, lorsqu'il interagit avec son père il parle essentiellement français (avec un minimum de 60% lorsqu'il n'a même pas deux ans et un maximum de 84.33% pour un âge plus avancé) et utilise très peu l'anglais (avec un maximum de 7.28% dans une période qui précède l'explosion lexicale en anglais). Nous remarquons que l'enfant utilise le code mixing très tôt avec son père, dès les première séances : si l'on s'en réfère à la définition du code mixing (nous parlons de code mixing lors que dans une même phrase est inséré un mot de l'autre langue, alors que le code switchnig qualifie l'alternance des langues dans un discours) sa présence serait le signe d'une incompétence en français, rattrapée par l'usage du français. Mais le code mixing avec le père est dominé par l'utilisation du terme « daddy ». Nous sommes dans une fonction pragmatique du code mixing telle qu'elle a été décrite par Genesee (cf. partie 3.5, p. 37). Cette explication est justifiée par le discours du père à 1;11.10 (cf. annexe 3. § 1).

    A cet âge, pour les mots familiers, nous somme déjà, au-delà d'une imitation, dans une pratique délibérée du code mixing.

    En présence de sa mère l'enfant utilise, jusqu'à un certain âge, utilise les deux langues avec une construction grammaticale beaucoup plus développée en français. Les mots anglais seront employés isolés, souvent par répétition du discours de la mère (cf. annexe 3 § 2). Il en va de même dans l'utilisation du code mixing : (cf. annexe 3. § 3).

    La répétition est un phénomène naturel dans l'acquisition, c'est dans la répétition que l'enfant apprend le vocabulaire, la phonétique etc.

    Alors que l'explosion lexicale est présente très tôt en français, elle se fait beaucoup plus tard en anglais puisque c'est la langue dominée. La première explosion en anglais à lieu 2;09.07 (dans le corpus) nous remarquons qu'à partir de cet âge les phrases sont syntaxiquement très développées et l`enfant ne va s'adresser à sa mère qu'en anglais. Lors des contextes où les eux parents sont présents il n'est pas évident pour nous de savoir quelle est la part de l'interaction avec les parents mais ces résultats montrent que, même si l'enfant a le français comme langue dominante l'anglais est très présent.

    2. 2. Présentation des productions de genre

    Age

    Contexte

    Total genre

    Genre français

    Genre anglais

    Genre dans
    le code mixing32

    1;10.05

    both

    9

    9

    0

    0

    1;11.10

    father

    4

    4

    0

    0

    1;11.13

    father

    64

    64

    0

    0

    1;11.15

    mother

    6

    5

    1

    0

    2;01.29

    mother

    21

    19

    0

    2

    2;03.13

    father

    95

    95

    0

    0

    2;03.20

    mother

    64

    60

     

    0

    2;05.00

    both

    56

    56

    0

    0

    2;06.03

    mother

    28

    22

    3

    3

    2;09.03

    father

    30

    30

    0

    0

    2;09.07

    mother

    28

    0

    28

    0

    2;10.29

    father

    26

    26

    0

    0

    2;10.29

    mother

    24

    0

    24

    0

    2;11.15

    both

    31

    29

    2

    0

    3;06.09

    mother

    27

    5

    22

    0

    3;06.14

    father

    59

    58

    1

    0

    4;00.9

    father

    64

    63

     

    0

    Total

     

    636

    545

    81

    5

    Tableau 4: Tableau des productions totales de genre en français, en anglais et dans le code mixing

    32 Il n'y a que des genres français dans les occurrences de code mixing.

    Figure 5 : Histogramme représentant les productions de genre en français et en anglais

    .

    Age

    Contexte

    Français*

    Genre français

    % Genre français

    Anglais*

    Anglais

    % Anglais

    Mixing*

    Genre dans
    le code mixing

    % code
    mixing

    1;10.05

    both

    92

    9

    9.78%

    38

    0

    0%

    1

    0

    0%

    1;11.10

    father

    68

    4

    5.88%

    7

    0

    0%

    2

    0

    0%

    1;11.13

    father

    157

    64

    36.57%

    0

    0

    0%

    1

    0

    0%

    1;11.15

    mother

    30

    5

    16.67%

    51

    1

    1.96%

    3

    0

    0%

    2;01.29

    mother

    77

    19

    24.68%

    28

    0

    0%

    15

    2

    13.33%

    2;03.13

    father

    214

    95

    42.22%

    6

    0

    0%

    3

    0

    0%

    2;03.20

    mother

    107

    60

    56.07%

    23

     

    0%

    1

    0

    0%

    2;05.00

    both

    120

    56

    46.67%

    17

    0

    0%

    1

    0

    0%

    2;06.03

    mother

    107

    22

    20.56%

    30

    3

    10%

    10

    3

    30%

    2;09.03

    father

    98

    30

    30.61%

    11

    0

    0%

    2

    0

    0%

    2;09.07

    mother

    12

    0

    0%

    186

    28

    15.05%

    1

    0

    0%

    2;10.29

    father

    249

    26

    17.45%

    4

    0

    0%

    1

    0

    0%

    2;10.29

    mother

    4

    0

    0%

    223

    24

    10.76%

    0

    0

    0%

    2;11.15

    both

    130

    29

    22.32%

    60

    2

    3.33%

    0

    0

    0%

    3;06.09

    mother

    10

    5

    50%

    139

    22

    15.83%

    0

    0

    0%

    3;06.14

    father

    204

    58

    55.77%

    17

    1

    5.88%

    0

    0

    0%

    4;00.9

    father

    183

    63

    24.43%

    0

    0

    0%

    1

    0

    0%

    Total

     

    1862

    545

    29.27%**

    840

    81

    9.64%%

    42

    5

    11.90%

    Tableau 6 : Tableau des proportions des productions de genre

    *Productions totales dans la langue

    **Comme pour le reste du tableau nous calculons les pourcentages par rapport aux productions totales.

    Dans cette partie nous allons faire une présentation générale des productions de genre, en français, en anglais et dans le code mixing. Nous ferons un parallèle entre les productions de genre de l'enfant et le contexte auquel elles sont associées. La figure 5 représente un graphique qui illustre les productions en genre de l'enfant dans les deux langues et dans le code mixing et cela à chaque âge. La création d'un graphique permet une compréhension plus rapide des résultats mais exclu des données telles que le contexte d'où la nécessité de faire un premier tableau. Dans le second tableau (figure 6) nous avons calculé les proportions de genre dans les tours de parole de l'enfant et pour chaque âge.

    L'enfant produit en français 29.27% de genre pour 1862 productions alors qu'il n'en produit que 9.64% en anglais et 11.90% en code mixing33. Le genre en français suit une évolution stable avec quelques fluctuations. L'enfant parle beaucoup avec son père (entre 30.61% à 2;09.03 et 56.07% à 2;03.20), le français étant sa langue dominante et le genre étant intrinsèque à cette langue c'est normal qu'il utilise beaucoup de genre. Néanmoins avec sa mère il utilise peu le genre que se soit en français ou en anglais (avec un maximum de 22 genres pour 139 occurrences ou 15.83%). D'où vient cette différence ? D'abord lors de la première séance l'enfant parle peu puisqu'il est jeune (1;11.05) ensuite il parle moins quand il est filmé avec ces deux parents, enfin dans la seconde séance il produit moins d'occurrences avec son père parce qu'il a été filmé pendant le repas.

    Cette différence de nombre de production entre le père et la mère est la conséquence directe de la manière dont le parent gère l'interaction : le père fait beaucoup d'exercices à base d'images, d'histoires ou de chansons où le discours l'enfant est très sollicité, surtout sur la syntaxe (cf. annexe 3. § 4). La mère n'interagit pas de la même manière, elle concentre son interaction sur les jouets de l'enfant, ce qu'il fait avec mais quand elle lui demande de raconter ce qu'il a fait la veille ou à la crèche nous observons une augmentation de les occurrences de genre : en français à 2;01.29, 2;03.20 et 2;06.03, alors que les occurrences de genre en anglais augmente en parallèle de l'explosion lexicale. Nous parlerons à la fois d'explosion lexicale et syntaxique à 2;09.07 : avec l'augmentation des occurrences augmente le genre en anglais. Nous verrons dans la partie suivante que cette augmentation est lié à l'acquisition du pronom neutre qui n'existe pas en français, est très présent en anglais au même titre que le genre français est intrinsèque à la langue.

    Le genre en code mixing n'apparait que deux fois, sur 13 séances où l'enfant produit du code mixing : Le genre est toujours employé dans les productions avec la mère. Nous allons voir, dans la partie suivante, de quelle langue dépend cette utilisation du genre.

    33 Proportionnellement il en produit plus en code mixing mais si nous comparons les données brutes, il ne produit que 5 tours de parole en code mixing.

    Rimbaud Sophie L'acquisition du genre et le code mixing chez le bilingue précoce 2009 2. 3. Analyse des occurrences de genre

    Age

    Contexte

    Français

    Genre français valide

    Genre français erroné

    Genre valide dans
    Code mixing

    Genre erroné dans
    code mixing

    1;10.05

    both

    9

    9

    0

     
     

    1;11.10

    father

    4

    3

    1

     
     

    1;11.13

    father

    64

    62

    2

     
     

    1;11.15

    mother

    5

    5

    0

     
     

    2;01.29

    mother

    21

    17

    2

    2

     

    2;03.13

    father

    95

    84

    10

     
     

    2;03.20

    mother

    60

    35

    25

     
     

    2;05.00

    both

    56

    46

    8

     
     

    2;06.03

    mother

    25

    19

    3

    2

    1

    2;09.03

    father

    30

    27

    3

     
     

    2;09.07

    mother

    0

    0

    0

     
     

    2;10.29

    father

    26

    26

    0

     
     

    2;10.29

    mother

    0

    0

    0

     
     

    2;11.15

    both

    30

    29

    1

     
     

    3;06.09

    mother

    5

    5

    0

     
     

    3;06.14

    father

    58

    50

    8

     
     

    4;00.9

    father

    63

    58

    5

     
     

    Total

     

    550

    472

    73

    4

    1

    Tableau 7 : Evolution du genre en français

    Figure 8 : Evolution des structures syntaxiques en français34.

    Pour une présentation plus détaillée de l'évolution des occurrences cf. annexes 12 et 13 p. 121.

    34

    Dans cette partie nous allons faire les analyses détaillées des occurrences de genre valides et erronées en français et dans le code mixing Dans la partie suivant nous nous concentrerons sur l'anglais.

    Nous avons fait le choix de ne pas mettre le code mixing dans un tableau séparé, d'une part parce que il y a trop peu d'occurrences et d'autre part il n'y a dans le code mixing que du genre français.

    Nous allons monter à quelle période chaque structure syntaxique apparait et si elle est liée à un emploi valide ou erroné, ce qui nous servira de comparaison avec le monolingue dans la discussion.

    Les trois premières séances se passent à 8 jours d'intervalles : l'article féminin et l'article indéfini masculin qui apparaissent les premiers, suivit du pronom masculin, féminin et de l'adjectif masculin et enfin de l'article masculin, l'article partitif masculin et le déterminant possessif masculin, et ce dans un même contexte (avec le père). A cette période, bien qu'il acquière beaucoup d'occurrences syntaxiques, certaines complexes dans leur utilisation (comme l'article partitif ou le déterminant possessif) il fait peu d'erreur. Elles se portent sur des occurrences qu'il va utiliser très souvent35, le pronom masculin à 1;11.10 et à 1;11.13, sur l'article féminin (1) et l'article indéfini masculin (1).

    A 2;03.13 et 2;03.20, à quelques jours d'intervalle et dans deux contextes différents : avec le père, à 2;03.13 l'enfant acquière l'article indéfini et le nom féminin, le déterminant et le déterminant possessif masculin. L'enfant va faire beaucoup d'erreurs sur l'article féminin et l'article partitif masculin, erreurs qu'il ne faisait pas lorsqu'il a acquit ces structures. En seulement quatre mois l'enfant connaît déjà la moitié des structures syntaxiques qu'il va apprendre en quatre ans.

    A 2;03.20, l'enfant va utiliser pour la première fois un adjectif féminin et sur 15 occurrences il va se tromper 12 fois. Nous remarquons que l'enfant n'acquière pas les deux genres (féminin et masculin) au même moment pour une même structure et que l'acquisition du féminin passe souvent par une erreur. Les dernières structures syntaxiques du corpus, vont être acquises plus tard et seront très peu utilisées le nom masculin (1) à 2;05.00 et l'article partitif féminin (1) à 2;09.03. Les emplois sont valides.

    L'enfant utilise cinq occurrences de genre dans le code mixing (cf. annexe 3. § 4) : il produit trois articles masculins et deux féminins dont un erroné. Il ne produit de genre en code mixing qu'en français.

    L'article féminin, l'adjectif féminin et le pronom féminin sont les trois occurrences où l'enfant fait le plus d'erreur. Il semble avoir des difficultés à acquérir le féminin

    35 Plus il va utiliser une occurrence, plus il a de chances de faire des erreurs. De ce fait il est difficile de dire si une structure syntaxique est acquise si elle n'est pas utilisée souvent.

    Age

    Contexte

    Anglais

    Genre anglais valide

    Genre anglais erroné

    1;10.05

    Both

     
     
     

    1;11.10

    Father

     
     
     

    1;11.13

    Father

     
     
     

    1;11.15

    Mother

    1

    1

     

    2;01.29

    Mother

     
     
     

    2;03.13

    Father

     
     
     

    2;03.20

    Mother

     
     
     

    2;05.00

    Both

     
     
     

    2;06.03

    Mother

    3

    3

     

    2;09.03

    Father

     
     
     

    2;09.07

    Mother

    28

    28

     

    2;10.29

    Father

     
     
     

    2;10.29

    Mother

    24

    24

     

    2;11.15

    Both

    2

    2

     

    3;06.09

    Mother

    22

    22

     

    3;06.14

    Father

    1

    1

     

    4;00.9

    Father

     
     
     

    Total

     

    81

    81

    0

    Tableau 9 : Tableau des productions de genre en anglais

    Figure 10 : Les structures syntaxiques en anglais

    Dans cette dernière partie des analyses de résultats, nous étudierons la part du genre en anglais dans les productions de l'enfant. Nous verrons non seulement à quel âge apparaissent les structures syntaxiques mais aussi dans quelles proportions l'enfant produit des occurrences valides et erronées.

    Tout d'abord nous pouvons établir plusieurs constats : l'enfant ne produit pas de genre anglais dans le code mixing, ensuite, il produit à deux reprises des occurrences de genre en anglais avec son père, qui parle français, enfin, sur 81 productions de genre, il ne fait pas d'erreur avec sa mère.

    Les premières occurrences de genre en anglais sont peu nombreuses : à 1;11.15 il produit une occurrence valide d'un pronom personnel neutre sous l'insistance et la répétion de ce pronom par sa mère :

    « *CHI: open the door .

    *MOT: open it .

    *CHI: open the (.) it

    *MOT: open it (.) please ! »

    Nous sentons une instabilité dans l'utilisation du pronom, mais à ce stade il est possible que l'enfant commence à comprendre que le pronom « it » sert à remplacer le nom « door ».

    Il commence à utiliser le pronom personnel masculin et féminin à 2;06.03 (3 occurrences) mais c'est à 2;09.07 que vont se produire les occurrences les plus importantes avec l'explosion lexicale et syntaxique : l'enfant produit 28 occurrences portant du genre avec, en plus des occurrences déjà acquises (les pronoms masculins et féminins) l'apparition du pronom possessif neutre (14), le pronom possessif neutre (8) et le pronom possessif féminin (1). Jusqu'à la fin des séances avec la mère, se seront les pronoms personnels (masculin, féminin et neutre) qui seront les plus utilisés, ce qui est normal puisqu'au même titre que les articles en français, ce sont les occurrences syntaxiques les plus courantes.

    Enfin, en interaction avec le père, l'enfant va produire une première occurrence de genre à 3;06.14 : la mère arrive dans le salon et l'enfant s'adresse spontanément à elle en anglais pour parler de son petit frère qui vient de naître.

    3. Discussion

    Pour vérifier l'hypothèse nous avons eu recours à une méthodologie bien précise pour analyser un corpus qui, dans l'argumentation logique d'une étude scientifique, s'inscrit en continuité avec les recherches théoriques préalables. Il s'avère alors que la partie expérimentale établit une relation directe avec la partie théorique.

    Dans une première partie nous allons situer le bilinguisme de l'enfant en fonction de l'âge d'acquisition des langues, puis sur des critères psychologiques et contextuels selon les définitions qui ont été données au préalable.

    3. 1. Le bilinguisme de l'enfant étudié dans le corpus

    L'enfant est né dans un environnement bilingue, en ce sens nous pouvons dire, qu'il se situe dans un bilinguisme précoce et simultané, ce qui signifie que dans le cerveau les informations des deux langues ne sont pas traitées séparément. L'âge d'acquisition est à mettre en relation avec des critères contextuels c'est-à-dire le contexte et l'usage des deux langues. L'enfant étant né au Québec, à Montréal avec un père ayant pour langue maternelle le français et une mère parlant anglais, le bilinguisme de l'enfant se place donc dans un bilinguisme exogène puisque la langue seconde (l'anglais) n'est pas présente dans la communauté36. Cela nous amène à évoquer le statut des deux langues, à la fois au sein de la communauté et au sein de la famille : pour cet enfant, la situation de la communauté est particulière, le Canada étant divisé en zones francophones et anglophones et à l'intérieur des ces zones l'autre langue est tolérée et comprise. Néanmoins, pour le contexte extérieur nous parlerons de bilinguisme à tendance hiérarchique puisque le français est plus valorisé et que l'enfant va aussi dans une crèche française.

    Au sein de la famille, comme nous le voyons tout au long des enregistrements, les parents essaient d'appliquer la règle de « la langue unique » c'est-à-dire « un parentune langue » ou en anglais le « one parent one language rule , autrement dit le parent ne s'adresse à l'enfant que dans sa langue maternelle et n'utilise pas la langue de l'autre parent ; Dans la famille le bilinguisme se situe alors dans une tendance neutre au sens ou les deux langues sont valorisées.

    36 Ce constat reste mitigé, par absence de la langue seconde dans la communauté nous voulons dire que la langue officielle de Montréal est le français, l'anglais est considéré comme une langue étrangère (ce qui est l'inverse à Vancouver).

    Pour finir cette partie sur la classification des différents types de bilinguisme de l'enfant nous allons nous concentrer sur les critères psychologiques autrement dit d'une part l'organisation cognitive de la langue, d'autre part la compétence dans les deux langues. Comme il a été dit dans la première partie sur les types de bilinguisme, la présence de ce code mixing / code switching est révélateur, dans l'organisation cognitive de la langue, d'un bilinguisme composé or en étudiant les productions de l'enfant nous n'observons qu'une proportion de code mixing trop faible pour que le type de bilinguisme de l'enfant soit dit « composé ». Nous arrivons à cette conclusion : le bilinguisme de cet enfant est dit coordonné puisque la représentation du monde se fait dans deux langues : il y a un signifiant pour un signifié dans chaque langue.

    Le dernier type de bilinguisme sur critères psychologiques dépend de la compétence de l'enfant dans les deux langues, analyse qui découle directement de notre étude sur les productions totales de l'enfant dans chaque langue et de la production de genre qui en résulte. D'une part de la production en français dans les productions totales montre une dominance de la langue française chez cet enfant. D'autre part, non seulement la dominance de la langue française mais la forte propension d'occurrences de genre en français et peu d'erreurs, par rapport à la langue anglaise, montreraient une compétence supérieure du français sur l'anglais. Bien que la compétence en anglais soit très basse en début de corpus, l'enfant la développe tout au long des enregistrements, pour arriver à une bonne compétence de communication en anglais, mais la situation contextuelle extérieure fait qu'il y a quand même une forte différence entre les deux langues.

    L'enfant ne développe que certaines structures syntaxiques qu'en relation avec la production des parents.

    Nous allons maintenant nous pencher sur le bilinguisme précoce de l'enfant, en essayant de caractériser à quel stade du développement syntaxique il se situe :

    Au début des enregistrements qui constituent le corpus, l'enfant semble se situer dans la seconde étape décrite par Volterra et Taeschner (1978)37 autrement dit il va avoir un répertoire lexical dans chacune des deux langues et un système syntaxique dans les deux langues. C'est à cette période que va apparaître la dominance langagière dans l'alternance des langues. Vers le milieu de l'étude l'enfant rentre dans la troisième phase : le système syntaxique se divise en deux ainsi l'enfant a développé deux systèmes linguistiques indépendants, cette différence de système n'apparaît que lorsqu'un enfant adapte sa langue à celle de l'interlocuteur.

    37 cité par Deuchar et Quay, 2000.

    C'est dans la seconde étape que va se manifester le plus souvent le code mixing : à ce moment le code mixing est le manifeste d'une syntaxe dominée par un modèle qui est celui de la langue dominante. Chez le bilingue précoce ce qui est appris plus tard dans une langue sera souvent l'objet du code mixing. Ainsi lorsque l'enfant entre dans la troisième étape, le code mixing n'est presque plus présent : d'une part l'anglais est presque aussi bien maîtrisé que le français et l'enfant n'a plus besoin de pallier un manque et d'autre part le code mixing deviendrait volontaire c'est-à-dire que ce n'est plus un simple automatisme mais une pratique volontaire qui n'est utilisée que dans certains cas (pour Genesee et Nicoladis, 2005, il a une fonction pragmatique).

    Nous sommes face à une enfant possédant un bilinguisme précoce simultané, puisqu'il évolue dans un contexte bilingue dès la naissance. Mais c'est aussi un bilinguisme exogène puisque la langue 2 n'est pas ou peu présente dans la communauté, le Québec étant une région francophone ; De ce fait nous allons observer à travers une dominance de la langue française par rapport à l'anglais, une tendance à un bilinguisme à tendance neutre dans la famille où il n'y a pas de hiérarchie des langues contrairement à la situation sociolinguistique du pays. Enfin, nous parlerons de bilinguisme dominant puisque le français est la langue dominante. Bien que la compétence de l'enfant dans la langue dominée va évoluer pour atteindre, à la fin de l'étude, un niveau proche de la langue dominante, il y aura toujours une langue dominante. C'est au niveau de l'organisation cognitive de la langue que le constat sera plus mitigé : puisque d'une part la compétence de l'enfant évolue graduellement selon les trois étapes de Volterra et Taeschner (1978)38 et d'autre part qu'il y aura toujours une langue dominante, le bilinguisme de l'enfant se place entre un bilinguisme coordonné et composé.

    La distinction entre les types composé et coordonné n'est pas exclusive pour Ervin et Osgood (1954) : ces types constitueraient les deux pôles du bilinguisme et les sujets bilingues se situeraient entre les deux, leur position variant en fonction des situations d'apprentissage et d'utilisation de la langue, ainsi que de l'âge de confrontation aux deux langues. Par conséquent le bilinguisme tiendrait plus à des stratégies cognitives adaptées à un contexte qu'à des modèles figés.

    Hypothèse de départ : En observant des adultes monolingues qui apprennent une langue étrangère nous avons remarqué que les erreurs de genre sont les plus fréquentes et sont celles qui persistent dans le temps. Les occurrences de genre prononcées, pour une même structure syntaxique peuvent être aussi bien valides qu'erronées, ce qui est le signe

    38 cité par Deuchar et Quay, 2000

    d'une interlangue (une langue se construit sur une seconde déjà établie). Nous posons l'hypothèse que l'enfant bilingue précoce va passer par le même processus d'apprentissage dans l'acquisition du genre, mais contrairement à un adulte, les erreurs vont se concentrer sur une courte période et ne vont pas perdurer.

    3. 2. Discussion des résultats

    Dans la seconde partie de notre travail qui constitue la partie expérimentale, nous avons codé et recensé toutes les tours de parole produits par l'enfant et nous y avaons placé la part des occurrences de genre.

    Ce paysage que nous allons décrire présente un traitement des données des plus générales aux plus particulières, du dénombrement des productions totales de l'enfant à la présentation du nombre de cas par âge pour chaque structure syntaxique. Nous allons d'abord étudier l'évolution générale des productions pour après y situer les productions de français, d'anglais et de code mixing. Ultérieurement ces résultats nous servirons à établir un parallèle entre les productions de genre en français et en anglais d'abord les occurrences valides puis les occurrences erronées. Après nous nous concentrerons sur quelques exemples de productions de genre erronées dans l'interaction pour finir sur une comparaison de l'acquisition du genre dans les deux langues et répondre à l'hypothèse.

    L'enfant vit à Montréal, ville dont la langue officielle est le français mais dont les habitants sont bilingues. L'étude d'un enfant bilingue pose d'abord la question de la langue dominante ; au vu des résultats, nous avons défini le français comme étant la langue dominante, puisque la moitié de ses tours de parole se fait en français. De plus l'enfant passe ses journées dans une institution françaises, ce qui facilite de développement d'une langue par rapport à l'autre :

    « Il est important de savoir si le français est la langue dominante de l'enfant, c'est-à-dire celle à laquelle il est le plus exposé. Il s'agit généralement [...] de la langue parlée dans le milieu de garde. » Paradis, Crago, Belanger, 2005, 28.

    L'enfant a été filmé à partir de 1;10.05 mais ses productions montrent qu'en français il a dépassé le stade du premier mot dans les deux langues. Le bilinguisme ne provoque donc pas un retard dans le développement lexical du langage chez l'enfant. Il n'y a pas non plus de retard dans le développement syntaxique de l'enfant en français : comme un enfant monolingue il commence à maîtriser les bases syntaxiques du français qui vont être suivies, vers 2 ans d'un l'explosion syntaxique. A ce stade nous pouvons dire que l'enfant suit, en français, le même développement qu'un monolingue alors que nous allons observer un

    retard dans le développement de l'anglais, qui est la langue dominée. Avec sa mère, qui a l'anglais comme langue dominante, l'enfant va parler très tard en anglais, au sens d'un discours syntaxiquement et lexicalement construit. C'est presque un an après le français que l'explosion lexicale et syntaxique se produisent. A partir de 2;09.03 il va non seulement parler en anglais durant les séances avec sa mère, mais il va aussi spontanément l'utiliser pour s'adresser à sa mère, si elle passe dans la pièce alors que la séance se passe avec son père.

    Durant cette phase de construction de la langue nous avons observé la présence de code mixing, dans deux utilisations différentes très spécifiques et liée au développement de l'enfant bilingue. Le code mixing a d'abord été définit comme le moyen qu'a l'enfant de pallier à un manque dans une langue par l'utilisation d'une autre. Ensuite, Genesse l'a définit comme une compétence pragmatique : l'enfant ayant une compétence suffisante dans une langue n'a plus besoin de recourir à l'autre langue. Ces deux phénomènes, typiques chez le bilingue, nous renseignent sur le développement des deux langues. Nous avons vu que lorsque l'enfant utilise l'anglais avec son père, dans l'emploi de la langue française, le code mixing aura une compétence pragmatique dans le sens où il est utilisé pour parler des être ou objets auxquels l'enfant à un affect très fort, par exemple « daddy ». En anglais nous n'observons pas la même utilisation du code mixing : non seulement l'enfant l'utilise beaucoup avec sa mère, mais à deux reprises, il va produire un grand nombre de phrase en code mixing : ces deux utilisations précèdent l'explosion lexicale et syntaxiques, et dans leur utilisation (le code mixing, avec la mère sert à pallier un manque en anglais) ils nous indique que l'anglais est encore à un stade intermédiaire, il n'est pas encore maîtrisé, l'enfant est au même stade de développement syntaxique et lexical où il était à 1;10.05 en français.

    Le français étant la langue dominante, il va produire non seulement beaucoup plus d'occurrences mais aussi beaucoup de genre. Nous allons retrouver du genre français dans le code mixing puisque le français étant la langue dominante, c'est elle qui va s'insérer dans les productions de la langue dominée. L'explosion syntaxique se situe, comme pour un enfant monolingue vers 2 ans. L'article définit et indéfini vont être les structures syntaxiques les plus présentes chez l'enfant, ce qui parait normal puisque se sont les srtucture les plus utilisée en français, de même que les pronoms (masculin, féminin et indéfinis) en anglais. Mais dans les deux langues, les fautes vont porter sur des fautes de genre féminin : l'enfant en français (et dans les deux contextes) maîtrise beaucoup mieux le genre masculin que le genre féminin. Peut être est-ce lié au contexte : l'enfant met plus d'occurrences de genre masculin parce que son père parle français ?

    3. 3. L'erreur de genre : étude de cas

    L'erreur de genre se porte surtout sur les structures féminines : l'enfant place un masculin au lieu d'un féminin. Dans le corpus, il est arrivé que sur un même nom, l'enfant alterne une production valide et une production erronée. Nous allons étudier deux exemples pour essayer de comprendre le phénomène en observant la méthode d'enseignement de la langue des parents. Les objets sur lesquelles vont porter les erreurs sont la bicyclette (interaction avec le père) et l'auto (interaction avec la mère).39

    Nous allons commencer par étudier la manière dont l'enfant parle de sa bicyclette, et si le genre valide se stabilise, comment cela se passe. Le dialogue sur la bicyclette va se faire sur trois âges :

    D'abord à 1 ; 11 . 13 : dans la première partie de l'échange l'enfant prononce trois fois une occurrence erronée avant d'être repris par son père. Sur les deux occurrences qui suivront cette reprise l'enfant ne fera pas d'erreur sur bicyclette. L'erreur de l'enfant peut être calquée sur celle du père : nous avons relevé une occurrence où le père se trompe lui aussi dans le genre. A cet âge-là, puisque le genre n'est pas encore stabilisé, la moindre erreur du parent peut être reprise par imitation. C'est ce même phénomène qui se passe quand l'enfant fait une production valide.

    Ensuite, à 2 ; 3. 13, nous avons cinq tours de parole de l'enfant où cette occurrence apparaît associée à une structure syntaxique qui implique le genre. La première occurrence, n'est pas erronée mais elle est importante dans notre argumentation pour comprendre pourquoi l'enfant fait une erreur sur le mot bicyclette : le mot « bicycle » est propre au vocabulaire québécois, le mot, de genre masculin, sert à désigner une bicyclette ; Il est alors fort possible que l'enfant calque le genre masculin sur le modèle du mot québécois. L'enfant est repris par le père dans le dernier tour de parole.

    1 ; 10. 29 : l'espace de temps entre cet enregistrement et le précédent est trop grand pour mesurer directement l'impact de la reprise du genre sur la bicyclette par le père, cependant il est fort possible, étant donné que l'enfant ne semble plus faire d'erreur, que dans cette période de sept mois le feedback du père ait eu un impact suffisamment fort pour que l'enfant ne fasse plus d'erreur sur cette occurrence.

    Le second dialogue que nous avons choisi tourne autour du mot « auto ». Cet exemple est très intéressant car il montre une approche différente de l'erreur. L'interaction se passe avec la mère : alors qu'elle lui parle l'enfant interagit en français ce qui va provoquer des complications dans la rectification de l'erreur.

    39 Les dialogues sont placés en annexe, fig. 14.

    L'échange se passe avec la mère à 2 ; 03. 20 et concerne une auto, à la fois le jouet de l'enfant et la voiture familiale. L'enfant fait des alternances entre des erreurs et des productions valides à la fois dans le même discours et dans la même phrase : le genre féminin est encore très instable (nous avons pu voir qu'il constitue quasiment l'ensemble des erreurs de l'enfant sur les 17 transcriptions). Sur ce discours l'enfant ne va pas faire une phrase entière sans faire d'erreur sur une occurrence (adjectif, article, pronom) et nous n'observons pas de retour négatif de la mère, puisqu'elle ne lui répond qu'en anglais. Dans la production « MOT: I don't know where the gros auto is . » la mère va valider l'erreur de l'enfant « gros auto » et cette erreur validée va se stabiliser dans les productions suivantes de l'enfant.

    Ces deux exemples montrent l'importance du rôle des parents dans l'acquisition du genre : l'enfant est très sensible à la production du père ou de la mère et va imiter lesdites productions. Ceci est entièrement valable pour l'exemple de l'auto. L'exemple de la bicyclette montre que l'enfant bilingue peut aussi être confronté à un parler régionnela auquel il doit s'adapter.

    Pendant le processus d'acquisition nous avons pu mettre en évidence qu'en français les étapes du monolingues sont retrouvées, il n'y pas de retard. Par contre nous avons observé un retard en anglais qui n'est sûrement pas dû à un trouble du langage chez le bilingue, mais à un contexte qui va faire que l'enfant est amené, hors de la maison à plus parler français. L'évolution du développement syntaxique est aussi liée à la manière dont les parents gèrent l'interaction : l'enfant utilisera beaucoup plus d'occurrences de genre avec son père qui lui fait raconter des histoires, reconnaître des images ou chanter, alors qu'avec sa mère il ne fera que s'amuser avec ses jouets et sera moins amener à parler. Au final le développement du langage se trouve toujours lié à l'interaction.

    C'est dans la langue dominante, le français, que vont se faire le plus d'erreurs mais le nombre d'occurrences erronées va être beaucoup moins important que le nombre de productions valides. Le français est bien la langue dominante puisque l'anglais ne fait pas interférence. L'enfant peut faire des erreurs non pas par interférence directe de l'anglais mais d'une part par imitation des parents et d'autre part, par interférence du dialecte régional, fortement influencé par l'anglais. L'enfant utilise le plus souvent les articles en français et le pronom neutre en anglais mais l'erreur de genre n'est pas forcément la preuve de la mise en place de deux systèmes, sinon l'enfant n'en ferait pas.

    Ce que l'on a mis en évidence chez l'enfant ne va pas durer dans le sens où la période transitoire est plus courte que chez l'adulte si le parent a une bonne pédagogie, c'est-à-dire qu'il reprend l'enfant en validant ses bonnes productions et en corrigeant les mauvaises. L'acquisition du bilinguisme chez l'enfant est plus rapide que chez l'adulte parce qu'elle se passe pendant les processus de myélinisation des fibres nerveuses. A ce moment-là le cerveau est beaucoup plus réceptif au développement bilingue. Le temps de transition est plus long chez l'adulte parce que ces procédures sont achevées : il y aura donc une seconde langue qui va se développer sur une première langue dite maternelle. La question est maintenant de savoir, étant donné que l'enfant et l'adulte suivent les mêmes processus à différents degrés, si l'enfant possède une ou deux langues maternelles.

    L'étude du bilinguisme est un univers au carrefour de beaucoup de discipline que nous avons pu évoquer dans ce mémoire. La sociolinguistique et la psycholinguistique nous ont servi à placer l'enfant que nous avons étudié dans un bilinguisme à plusieurs niveaux : précoce et simultané, à tendance neutre au sein de la famille, exogène, coordonné et dominant.

    Le cerveau nous a permis de comprendre le fonctionnement du cerveau bilingue : plus l'enfant est jeune, plus la plasticité du cerveau lui permet d'acquérir les langues de son environnement. Au contact de son environnement l'enfant va développer diverses stratégies dans ses productions.

    Parmi ces stratégies le code mixing tient une place important, car en début d'acquisition il est le signe de la dominance d'une langue, ici le français, pour devenir plus tard une production volontaire et contrôlée dans une intention pragmatique.

    Notre étude, pour laquelle un corpus important a été traité, c'est concentrée sur l'acquisition du genre : elle nous a permis de voir une évolution sur un peu plus de quatre années dans le développement de l'enfant. Celui-ci développe très rapidement des occurrences de genre français mais plus tardivement de l'anglais, ce qui parait normal puisque l'une est langue dominante et l'autre langue dominée. Les erreurs de genre se portent, dans les deux langues sur le féminin, genre qui semble le plus difficile à acquérir pour l'enfant.

    L'adulte est capable d'apprendre deux langues, que se soit en immersion ou par un enseignement. Mais cet apprentissage n'est pas de l'ordre de l'acquisition car les deux, pour une même finalité, ne suivent pas les même processus .L'évolution de l'acquisition des genres dans les deux langues suit les mêmes processus puisqu'à ce stade le cerveau traite les deux langues de la même manière, ce sont les contraintes sociales qui impliquent la dominance du français qui vont provoquer un retard en anglais. Autrement dit à cet âge l'enfant est tout à fait capable d'appréhender les deux langues comme maternelles.

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    ANNEXES

    Rimbaud Sophie L'acquisition du genre et le code mixing chez le bilingue précoce 2009

    Figure 1 : Article du Midi Livre, mars 2009

    80

    @Begin

    @Languages: en, fr

    @Participants: CHI Olivier Target_Child, MOT Cheryl Mother, FAT Bruno Father, EXP Elena Investigator

    @ID: en, fr|genesee|CHI|1;10.05||||Target_Child||

    @ID: en, fr|genesee|MOT|||||Mother||

    @ID: en, fr|genesee|FAT|||||Father||

    @ID: en, fr|genesee|EXP|||||Investigator||

    @Birth of CHI: 28-AUG-1990

    @Coder: Elena Nicoladis

    @Date: 03-JUL-1992

    @Location: Montreal

    @Situation: Parents playing with Olivier and toys in living room.

    @Time Duration: 18:50-19:45

    *CHI: oh !

    %cod: $LAN:B $ADD:MOT

    *MOT: are you gonna [: going to] crawl in the back ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: ooh .

    %pho: 3:

    %cod: $LAN:B $ADD:MOT

    *CHI: yy open .

    %pho: An6 opan

    %cod: $LAN:E $ADD:MOT

    *MOT: open ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: kay [: okay] open what ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: what do you say ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: what's the magic word ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: open .

    %pho: opEn

    %cod: $LAN:E $ADD:MOT

    *MOT: open ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: yy .

    %pho: d&

    %cod: $LAN:I $ADD:MOT

    *MOT: open ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: Olivier, qu'est ce que'on dit ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *MOT: what do you say after ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: qu'est ce qu'on dit, Olivier ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: qu'est ce qu'on dit ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: Olivier ?

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *CHI: yy yy yy .

    %pho: A bu: dEn

    %cod: $LAN:I $ADD:MOT

    *CHI: open .

    %pho: opEn

    %cod: $LAN:E $ADD:MOT

    *MOT: open (.) what's the magic word ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: Olivier, qu'est ce qu'on dit ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *MOT: what's the magic word ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: please ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: please .

    %pho: pi:z

    %cod: $LAN:E $ADD:MOT

    *MOT: there you go .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: say thank you merci .

    %cod: $LAN:M $ADD:CHI

    *CHI: yy yy .

    %pho: Aj6 jAj6

    %cod: $LAN:I $ADD:MOT

    *CHI: open .

    %pho: opEn

    %cod: $LAN:E $ADD:MOT

    *MOT: sorry, Mommy forgot to open (.) there .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: open .

    %pho: op

    %cod: $LAN:E $ADD:MOT

    *MOT: yeah .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: say merci .

    %cod: $LAN:M $ADD:CHI

    *MOT: hmm ?

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *MOT: merci .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: yy !

    %pho: Ap

    %cod: $LAN:I $ADD:MOT

    *MOT: is it stuck ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: is it stuck in there, honey ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: I think it's stuck .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: oh !

    %pho: o

    %cod: $LAN:B $ADD:MOT

    *CHI: yy !

    %pho: wa

    %cod: $LAN:I $ADD:MOT

    *FAT: Olivier ?

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *FAT: yé [= il est] où ton garage ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: uh !

    %pho: A

    %cod: $LAN:B $ADD:FAT

    *CHI: yy !

    %pho: A

    %cod: $LAN:I $ADD:FAT

    *CHI: yy (.) là^bas .

    %pho: AZ6Z6 # abA

    %cod: $LAN:I $ADD:FAT

    *FAT: amène ton garage ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *MOT: bring it over here .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: c'est quoi un garage ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: toutou .

    %pho: tutu

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: un toutou .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: yy .

    %pho: S6

    %cod: $LAN:I $ADD:FAT

    *FAT: un cheval !

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: Olivier ?

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *CHI: uh !

    %pho: A

    %cod: $LAN:B $ADD:FAT

    *FAT: c'est quoi ça ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: baby .

    %pho: bebi

    %cod: $LAN:E $ADD:FAT

    *CHI: ooh bobo .

    %pho: u: bobo

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: bobo ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *EXP: O@u .

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI $MOT $FAT

    *FAT: bébé un bobo ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: ah !

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *CHI: bobo .

    %pho: bobo

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: bobo !

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: bobo yy .

    %pho: bobo bebo

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: bobo bébé .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: bobo bébé .

    %pho: bobo bebe

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: qu'est ce t'as [: tu as] mangé comme souper ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: poulet .

    %pho: pulE

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: t'as [: tu as] mangé du [: de le] poulet ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: avec quoi ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: des patates ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: oh !

    %pho: o

    %cod: $LAN:B $ADD:FAT

    %com: whispered

    *FAT: du [: de le] poulet des patates ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *MOT: come here, honey .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: what's that ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: what's that ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: what's that ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: yy .

    %pho: Ado

    %cod: $LAN:I $ADD:MOT

    *MOT: huh ?

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *MOT: what's that over there ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: Daddy's bike ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: Olivier, where's Daddy's bike ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: ah !

    %pho: a

    %cod: $LAN:B $ADD:FAT

    *MOT: what's that ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: yy .

    %pho: ga uNg6

    %cod: $LAN:I $ADD:MOT

    *FAT: Oli(vier) +/.

    *MOT: you don't eat that .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: it's not for eating, honey .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: 0.

    %act: whines and stamps feet

    *MOT: this is not the time for a temper tamtrum !

    *EXP: 0.

    %act: laughs

    *FAT: oh !

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *CHI: oh !

    %pho: o

    %cod: $LAN:B $ADD:FAT

    *MOT: is that soft ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: balle ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: la@AFV balle .

    %pho: la ba

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: la balle .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: in [: elle est] quelle couleur la balle ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: balle .

    %pho: bal

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: in [: elle est] quelle couleur la balle ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: bleue !

    %pho: b3:

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: bleue .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *MOT: can you do something with it ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: booboo baby .

    %pho: bubu bebi

    %cod: $LAN:E $ADD:MOT

    *FAT: Olivier ?

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *CHI: yy .

    %pho: ai

    %cod: $LAN:I $ADD:FAT

    *CHI: yy .

    %pho: Anu

    %cod: $LAN:I $ADD:FAT

    *FAT: xxx Olivier ?

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *CHI: yy .

    %pho: AZu

    %cod: $LAN:I $ADD:FAT

    *CHI: uh ?

    %pho: A

    %cod: $LAN:B $ADD:FAT

    *CHI: uh ?

    %pho: A

    %cod: $LAN:B $ADD:FAT

    *CHI: encore ?

    %pho: AkO

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: encore ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *MOT: don't touch !

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: don't touch .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: dis bonjour .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: yy ?

    %pho: nA:

    %cod: $LAN:I $ADD:FAT

    *FAT: Olivier, dis bonjour .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: yy ?

    %pho: nA

    %cod: $LAN:I $ADD:FAT $EXP

    *FAT: Olivier, dis bonjour à Eléna .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: bonjour Eléna .

    %pho: bo~Z3 elena

    %cod: $LAN:F $ADD:EXP

    *CHI: bonjour yy .

    %pho: bo~Z3 na

    %cod: $LAN:F $ADD:EXP

    *MOT: that's a good boy, honey .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: bravo !

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *FAT: Olivier ?

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *FAT: y sont ou tes chaussures ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: chaussure .

    %pho: SoSu

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: chaussures ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: chau(ssure) .

    %pho: So

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: oh !

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *CHI: yy .

    %pho: A d6 A

    %cod: $LAN:I $ADD:FAT

    *MOT: where are your shoes ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: yy Daddy .

    %pho: rA d&di

    %cod: $LAN:B $ADD:MOT

    *MOT: huh ?

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *FAT: ça c'est parce que c'est le temps de parler .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: normalement là .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: yy .

    %pho: A s& A

    %cod: $LAN:I $ADD:FAT

    *FAT: Olivier, non .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: ooh .

    %pho: u:

    %cod: $LAN:B $ADD:FAT

    *FAT: Olivier, on le mange pas chéri .

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *FAT: qu'est ce que t'as [: tu as] mangé pour souper ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: hein ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: qu'est ce que t'as [: tu as] mangé pour souper ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: yy !

    %pho: 6dA

    %cod: $LAN:I $ADD:FAT

    *MOT: a carrot ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: qu'est ce que t'as [: tu as] mangé ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *MOT: carrot [>] ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: <du [: de le] poisson> [<] ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: yy !

    %pho: 6pA

    %cod: $LAN:I $ADD:MOT

    *CHI: yy .

    %pho: 6pA

    %cod: $LAN:I $ADD:MOT

    *CHI: yy .

    %pho: ka:

    *MOT: you want some juice, honey ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: no no .

    %pho: no no

    %cod: $LAN:E $ADD:MOT

    *MOT: no juice .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: open .

    %pho: obEn

    %cod: $LAN:E $ADD:MOT

    *MOT: open ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: open ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: close ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: yy ?

    %pho: do:

    %cod: $LAN:I $ADD:FAT

    *CHI: dodo ?

    %pho: do:do

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *EXP: 0.

    %act: laughs

    *CHI: yy .

    %pho: dodu

    %cod: $LAN:I $ADD:FAT

    *MOT: there .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: Olivier garde [: regarde] .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: c'est quoi Olivier ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: c'est du [: de le] yogourt ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: open .

    %pho: bEn

    %cod: $LAN:E $ADD:MOT

    *MOT: open ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: there .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: Olivier opened it all by himself .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: what's this ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: uh ?

    %pho: a

    %cod: $LAN:I $ADD:MOT

    *FAT: bonhomme ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: un bonhomme ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: bonhomme .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *MOT: xxx a little monster (.) I don't know .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: it's Gonzo .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: oh, Gonzo xxx .

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *MOT: Gonzo !

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *MOT: Gonzo !

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *MOT: eh ?

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *MOT: Gonzo .

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *MOT: can you say Gonzo ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: yy .

    %pho: A

    %cod: $LAN:I $ADD:MOT

    *EXP: qu'est ce tu vois ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: yy .

    %pho: nA

    %cod: $LAN:I $ADD:EXP

    *MOT: what is that ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: what is that ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: Olivier, il est où ton chapeau ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: uh ?

    %pho: A

    %cod: $LAN:I $ADD:FAT

    *FAT: ton chapeau ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: chamb(re) .

    %pho: Sa~m

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: il est où ton chapeau ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: chamb(re) .

    %pho: Sa~m

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: dans ta chambre ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: va le chercher .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: ton chapeau ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: caché .

    %pho: kEze:

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *MOT: go get your hat, honey .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: go get your hat .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: 0aux 0 subj wanna [: want to] put your hat on ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: oh .

    %pho: o

    %cod: $LAN:B $ADD:MOT

    *EXP: 0.

    %act: laughs

    *MOT: where's Daddy's car ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: ow !

    %pho: au

    %cod: $LAN:E $ADD:MOT

    *CHI: yy .

    %pho: goz3

    %cod: $LAN:I $ADD:MOT

    *MOT: chaussure !

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: yy gone .

    %pho: i gan

    %cod: $LAN:E $ADD:MOT

    *MOT: where's Daddy's car, honey ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: yyy done .

    %pho: a di da~

    %cod: $LAN:E $ADD:MOT

    *MOT: huh ?

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *CHI: là^bas !

    %pho: apa

    %cod: $LAN:F $ADD:MOT

    *FAT: là^bas ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *MOT: that's Daddy's bike .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: Olivier .

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *EXP: 0.

    %act: laughs

    *CHI: là^bas !

    %pho: apa

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT $MOT

    *FAT: tu parles bien d'habitude .

    %cod: $LAN:F $ADD:EXP

    *CHI: elle est là .

    %pho: Elela

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: elle est là ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: bike !

    %pho: bi:k

    %cod: $LAN:E $ADD:FAT

    *FAT: bike .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: bike no .

    %pho: bi:k6 no

    %cod: $LAN:E $ADD:FAT

    *FAT: c'est à qui la bicyclette Olivier ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: bicycle(tte) .

    %pho: bisibEt

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: y'é [= il est] où ton bike ?

    %cod: $LAN:M $ADD:CHI

    *CHI: uh !

    %pho: A

    %cod: $LAN:I $ADD:FAT

    *CHI: là^bas .

    %pho: a ba

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: là^bas .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *MOT: là^bas .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *MOT: what's your name ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: ah parti .

    %pho: O badi

    %cod: $LAN:F $ADD:MOT

    %com: his parents later explained that this meant "ah parti"

    *EXP: abadi@u [=! laughs] ?

    %cod: $LAN:I $ADD:FAT $MOT

    *FAT: comment [/] comment tu t'appelles ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: Olivier Lasalle ?

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *FAT: hein ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: oh !

    %pho: o

    %cod: $LAN:B $ADD:MOT

    *CHI: open .

    %pho: opEn

    %cod: $LAN:E $ADD:MOT

    *MOT: open, there .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: yy balle .

    %pho: 6ZA b&l

    %cod: $LAN:F $ADD:MOT

    *MOT: ball ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: are you gonna [: going to] throw the ball to Daddy ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: throw the ball to Daddy .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: ah bravo !

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *CHI: encore encore .

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: encore ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: okay .

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *FAT: attrape .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: mets tes mains .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: mets tes mains comme ça .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: (a)ttrappe .

    %pho: trap

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *MOT: oh, be nice .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: give me five ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: xxx Papa .

    %cod: $LAN:B $ADD:FAT

    *FAT: qu'est ce qu'on dit ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: uh please .

    %pho: A piz

    %cod: $LAN:E $ADD:FAT

    *FAT: please .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: Maman xxx yy .

    %pho: mama~ xxx na

    %cod: $LAN:B $ADD:FAT

    *FAT: Eléna ?

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *EXP: xxx vas^y .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: xxx .

    *EXP: 0.

    %act: laughs

    *FAT: Olivier, est ce que tu sautes ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: Olivier, est ce que tu sautes ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *MOT: all done .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: all done .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: all done .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: Olivier, gar [= regarde] .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: regar [= regarde] .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    %act: winds musical unicorn

    *MOT: unicorn !

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: 0.

    %act: audible intake of breath

    *MOT: xx music ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: xxx .

    *FAT: gar [= regarde] .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *MOT: wow !

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *MOT: xx music ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: yy !

    %pho: gE

    %cod: $LAN:I $ADD:MOT

    *CHI: yy .

    %pho: dYt

    %cod: $LAN:I $ADD:MOT

    *MOT: 0aux that a horse ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: is that a horse ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: est ce que tu dis bonjour ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: no bonjour .

    %pho: no bo~Z3

    %cod: $LAN:M $ADD:FAT

    *FAT: no bonjour !

    %cod: $LAN:M $ADD:CHI

    *MOT: how come ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: 0aux you want some milk ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: would you like some milk, Olivier ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: oh open .

    %pho: o opEn

    %cod: $LAN:E $ADD:MOT

    *MOT: it's open .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: 0aux you want me to take it out ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: do you want me to take it out for you ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: ou(t) .

    %pho: au

    %cod: $LAN:E $ADD:MOT

    *MOT: take out please ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: please .

    %pho: piz

    %cod: $LAN:E $ADD:MOT

    *FAT: <est ce qu'on joue au casse+tête> [?] ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: Olivier y'é [: il est ] où le casse+tête ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: oh .

    %pho: o

    %cod: $LAN:B $ADD:FAT

    *CHI: yy .

    %pho: gaip6

    %cod: $LAN:I $ADD:FAT

    *MOT: Olivier look !

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: it's broken .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: it's broken .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: yy !

    %pho: 6da

    %cod: $LAN:I $ADD:MOT

    @Comment: 10 minutes

    *MOT: Olivier look !

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: it's broken .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: see ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: it's broken .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: cassé, Olivier ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: ooh ?

    %pho: u

    %cod: $LAN:B $ADD:MOT

    *MOT: is it broken ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: is it broken , Olivier ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: xxx .

    *MOT: is it broken ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: (br)oken .

    %pho: okEn

    %cod: $LAN:E $ADD:MOT

    *FAT: he's always like this when you want him talking xxx .

    %cod: $LAN:E $ADD:EXP

    *EXP: xxx .

    *MOT: Olivier ?

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *EXP: xxx .

    100

    *MOT: it's broken again .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: it's broken .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: encore !

    %pho: a~kO

    %cod: $LAN:F $ADD:MOT

    *EXP: encore [=! laughs] !

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT $MOT

    *CHI: all done !

    %pho: O dAn

    %cod: $LAN:E $ADD:MOT

    *FAT: <all done> [>] .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: <all done> [<] .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: okay we'll put <it away> [>] .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: Olivier, Daddy fait dodo .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    %act: pretends to be asleep

    *CHI: non [=! whines] .

    %pho: no~

    %cod: $LAN:F $ADD:MOT

    *MOT: you said all done .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: all done .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: we put it away .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: all done .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: Daddy's sleeping honey .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: xxx .

    *MOT: Olivier go get +/.

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    101

    *MOT: <do we go get> [//] do you wanna [: want to] get your hat ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: go put your hat on .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: Olivier, est ce qu'on va au [: à le] parc ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: au parc ?

    %pho: o park

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    %com: the "r" is French, but he also noticeably pronounces the "k" at the

    end, like in English

    *MOT: who's at the park ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: who's at the park ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: est ce que tu joues au [: à le] ballon au [: à le] parc ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: au parc yy balo(n) +...

    %pho: o park i balo~

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: ballon ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: avec Georges ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: avec Georges ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: ballon pas Geo(rges) .

    %pho: balO~ pA Z6

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *CHI: open .

    %pho: obEn

    %cod: $LAN:E $ADD:MOT

    *MOT: open .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: open .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: dis ton chapeau ?

    102

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: il est où ton chapeau ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: yy bike .

    %pho: ake bEk

    %cod: $LAN:E $ADD:FAT

    *FAT: à Québec ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *MOT: 0.

    %act: laughs

    *EXP: 0.

    %act: laughs

    *FAT: oh !

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *FAT: Daddy's bike .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: oh !

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *MOT: the bike .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: prends ton chapeau .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *MOT: there .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: bring your hat over .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: chapeau ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: c'est à qui le chapeau ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: xxx .

    *FAT: Olivier .

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *FAT: comment tu t'appelles ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: Olivier .

    %pho: Olive

    103

    %cod: $LAN:B $ADD:FAT

    *FAT: Olivier Laselle ?

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *MOT: what's your name ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: comment tu t'appelles ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: encore .

    %pho: a~kO

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *CHI: au parc .

    %pho: o park

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *MOT: 0.

    %act: laughs

    *MOT: not now, honey .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: later .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: later .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: soon .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: we'll go soon, okay, Olivier [>] ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: < Olivier, tantôt> [<] .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: au parc ?

    %pho: o park

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: tantôt .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: yy ?

    %pho: d6di

    %cod: $LAN:I $ADD:FAT

    *FAT: l'auto Audi ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    104

    *FAT: elle est quelle couleur l'Audi ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: yy done .

    %pho: i dAn

    %cod: $LAN:E $ADD:MOT

    *CHI: yy done .

    %pho: i dAn

    %cod: $LAN:E $ADD:MOT

    *MOT: all done .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: Olivier, est ce qu'on a vu un camion cet après+midi ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: hein ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: un camion ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *MOT: xxx .

    *CHI: ah !

    %pho: a

    %cod: $LAN:B $ADD:FAT

    *FAT: is it broken ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: cassé .

    %pho: kase:

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: cassé .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: eh !

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *MOT: don't eat .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: don't eat .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: c'est [: ce n'est] pas bon .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *MOT: don't eat .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    105

    *CHI: eat .

    %pho: it

    %cod: $LAN:E $ADD:FAT $MOT

    *FAT: non .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: open .

    %pho: opEn

    %cod: $LAN:E $ADD:MOT

    *MOT: open .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: 0aux you want me to take it out ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: tu veux du [: de le] jus, Olivier ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: Olivier ?

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *FAT: tu veux du [: de le] jus ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *MOT: stuck !

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: it's stuck !

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: who's in the park, Olivier ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: au parc .

    %pho: o park

    %cod: $LAN:F $ADD:MOT

    *MOT: who's in the park ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: ah Nana .

    %pho: a n&na

    %cod: $LAN:B $ADD:MOT

    *MOT: Nana .

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *MOT: who else is in the park ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: Georges ?

    106

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *CHI: Georges ?

    %pho: ZAZ

    %cod: $LAN:B $ADD:FAT

    *FAT: Tim ?

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *CHI: parti Tim ?

    %pho: p6ti tIm

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: parti Tim ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: parti Tim .

    %pho: p6ti tIm

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *CHI: parti Tim .

    %pho: p6ti tIm

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *MOT: can you slide in the park, honey ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: 0.

    %act: laughs

    *MOT: do you slide in the park ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: tu glisses !

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: oh !

    %pho: o:

    %cod: $LAN:B $ADD:MOT

    *MOT: oh !

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *MOT: ah !

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *CHI: oh cassé .

    %pho: a kase:

    %cod: $LAN:F $ADD:MOT

    *MOT: passé .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    107

    *FAT: Olivier ?

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *CHI: tu glisses !

    %pho: ty glis

    %cod: $LAN:F $ADD:MOT

    *FAT: c'est qui ça, hein ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: hein ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: c'est qui ça ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: all gone !

    %pho: a gAn

    %cod: $LAN:E $ADD:FAT $MOT $EXP

    *MOT: all gone .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: c'est qui ça ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: ah cassé !

    %pho: a k&de

    %cod: $LAN:F $ADD:MOT

    *MOT: cassé .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: cassé .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: c'est qui ça ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: Caillou ?

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *FAT: Olivier ?

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *FAT: Olivier ?

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *FAT: regar [: regarde] !

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: Caillou ?

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    108

    *FAT: Caillou .

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    %com: Caillou is a character in French children's books

    *CHI: Caillou .

    %pho: kaiju

    %cod: $LAN:B $ADD:FAT

    *FAT: Caillou .

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *MOT: what's he doing ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: Caillou dans le bain ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: un bain ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: un@AMV bain .

    %pho: 8~ be~

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: un bain .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: un bain .

    %pho: 8~ be~

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: un bain .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: Caillou il est tout nu ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: tout nu Daddy .

    %pho: tu ny dadi

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *MOT: 0.

    %act: laughs

    *CHI: tout nu .

    %pho: tu ny

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: toute [*] nu ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    %err: toute = tout

    109

    *FAT: tout nu Caillou ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *MOT: 0.

    %act: laughs

    *CHI: oh !

    %cod: $LAN:B $ADD:MOT

    *CHI: bobo !

    %pho: bobo:

    %cod: $LAN:F $ADD:MOT

    *MOT: bobo ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *MOT: who's got a bobo ?

    %cod: $LAN:M $ADD:CHI

    *FAT: c'est qui ça ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: bobo !

    %pho: bobo:

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: mais non c'est pas un bobo .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: c'est quoi ça ici ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: un cancan .

    %pho: 8~ ka~ka~

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: un quoi ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: canard .

    %pho: kaina~

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: un canard .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: canard .

    %pho: kaina

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *MOT: a duck ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    110

    *FAT: canard .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: a duck .

    %pho: 6dA

    %cod: $LAN:E $ADD:MOT

    *MOT: a duck ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: a duck .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: a duck .

    %pho: 6dA

    %cod: $LAN:E $ADD:MOT

    *FAT: xx ?

    *FAT: fait pipi dans le pot .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: uh pipi pot .

    %pho: 6 pipi po:

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: pipi pot ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: pipi pot ?

    %pho: pibi po

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: pipi pot !

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: pipi pot .

    %pho: pibi po

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: pipi pot !

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: pipi pot .

    %pho: pipi po

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: pipi pot !

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: pipi pot .

    %pho: pipi po

    111

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: alors elle a fait un caca ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: un ca(ca) !

    %pho: in ka

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: un caca !

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: pot .

    %pho: po

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: c'est quoi ça ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: c'est un chapeau ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: yy chat !

    %pho: da Sa

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: un chat .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: des poissons ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: 0.

    %pho: hums to himself

    *FAT: Olivier ?

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *MOT: did you make a poopoo, honey ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: no poopoo .

    %pho: no pupu:

    %cod: $LAN:E $ADD:MOT

    *MOT: no poopoo .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: Olivier regar [: regarde] !

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: Olivier regar [: regarde] !

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    112

    *FAT: Olivier ?

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *FAT: les pommes !

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: chat !

    %pho: Sa

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: ça c'est un chien .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: dehors <le chat> [>] !

    %pho: d6Or l6 ta

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: <ça c'est un chien> [<] .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *MOT: that's right .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: dehors chat !

    %pho: d6Or Sa

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: <ça c'est un chat> [>] .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *MOT: xxx [<] puis dehors .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: chat ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: yy baby .

    %pho: b6 bebi

    %cod: $LAN:E $ADD:MOT

    *MOT: the dog is outside ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: des pommes ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: pommes ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: Olivier ?

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *FAT: est ce que t'aimes [: tu aimes] les pommes ?

    113

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: est ce que tu manges des pommes ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: est ce que tu manges des pommes ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: Maman !

    %pho: mama~

    %cod: $LAN:B $ADD:MOT

    *MOT: what, sweetie .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: elle est où Maman ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: oh !

    %pho: o

    %cod: $LAN:B $ADD:FAT

    *FAT: elle est où Maman ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: Olivier ?

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *CHI: there Mama .

    %pho: dEr mama

    %cod: $LAN:E $ADD:FAT

    *CHI: there pomme .

    %pho: dEr pO~m

    %cod: $LAN:M $ADD:FAT

    *FAT: c'est quoi ça ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: Olivier ?

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *FAT: Olivier ?

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *FAT: c'est quoi ça ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: yy (.) open .

    %pho: 6da obEn

    %cod: $LAN:E $ADD:MOT

    *FAT: Olivier ?

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *FAT: c'est un chien ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: chien ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: yy .

    %pho: 6du6

    %cod: $LAN:I $ADD:FAT

    *FAT: chien dehors .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *MOT: is Daddy's car outside, Olivier ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: a Daddy car outside +/.

    %pho: 6 d&di ka daudaid

    %cod: $LAN:E $ADD:MOT

    *MOT: outside .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: outside .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: is it outside, honey ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: is this your shoe ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: xxx .

    *MOT: whose are these ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: Maman .

    %pho: mama~

    %cod: $LAN:B $ADD:MOT

    *MOT: Mommy's shoes ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: shoes .

    %pho: Su:s

    %cod: $LAN:E $ADD:MOT

    *MOT: shoes .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: Olivier ?

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *FAT: il est où le chat ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: parti .

    %pho: pati

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: bien non le chat ici regarde .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: il est où le chat ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: yy .

    %pho: i&no

    %cod: $LAN:I $ADD:FAT

    *FAT: chat ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: il est où le chat ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: hein ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: chat ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: un chat .

    %pho: 8~ Sa

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: non .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: ça c'est une grenouille .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: c'est un cochon ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: je .

    %pho: Z6

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: un poussin .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: un poussin .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: regar [: regarde] le chat, Olivier .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: un chat !

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: pouce .

    %pho: pus

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: pouce .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: Olivier, il est où le canard ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: parti .

    %pho: pati

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: non bien non garde [: regarde] y'é [: il est] ici le canard .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: garde [: regarde] .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: Olivier who are your friends at the day+care ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: ah parti .

    %pho: a pati

    %cod: $LAN:F $ADD:MOT

    *MOT: no, <what are> [/] what are their names ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: Rémi ?

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *CHI: parti .

    %pho: pati

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: Rémi ?

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *FAT: y'é [: il est] où Rémi ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *MOT: don't eat , don't eat that Olivier .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *FAT: bon .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: okay .

    %cod: $LAN:B $ADD:CHI

    *FAT: tiens .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: au parc .

    %pho: o park

    %cod: $LAN:F $ADD:MOT

    *MOT: soon, Olivier .

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: soon, okay ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *MOT: we'll go in the park soon ?

    %cod: $LAN:E $ADD:CHI

    *CHI: park ?

    %pho: bark

    %cod: $LAN:E $ADD:FAT $MOT

    *FAT: tantôt .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: yy .

    %pho: bi

    %cod: $LAN:I $ADD:FAT

    *FAT: Olivier est ce que tu me donnes un beau bec ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: donne^moi un beau bec .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: donne^moi un beau bec .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: donne^moi un beau bec .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: yy !

    %pho: hi

    %cod: $LAN:I $ADD:FAT

    *CHI: yy (.) bye .

    %pho: bOk bai

    %cod: $LAN:B $ADD:FAT

    *FAT: on le met dans ta poche .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: dans ta poche ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: non .

    %pho: no~

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: dans ta poche ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: là (.) là là .

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: tu veux mettre le bonhomme dans ta poche ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: bonhomme dans ta poche ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: tiens .

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: il est où le bonhomme ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *FAT: il est où le bonhomme ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: 0.

    %act: whines

    *CHI: non (.) non là .

    %pho: no~ no~ la

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    *FAT: pas dans la poche ?

    %cod: $LAN:F $ADD:CHI

    *CHI: pas là (.) là (.) là .

    %pho: pa la la la

    %cod: $LAN:F $ADD:FAT

    @End

    Figure 2 : Pranscription du corpus Genesee, 1;10.05

    1. 1;11.10

    « *EXP: il t'appelle Daddy au [: à le] lieu de Papa ?

    *FAT: ça dépend ça dépend il faut dire .

    *FAT: quand (.) (.) Cheryl est ici il va plus m'appeler Daddy parce que Cheryl va dire +/. *EXP: Daddy .

    *FAT: puis moi xxx appeler Maman xxx Papa . »

    2. 2;1.29

    « *MOT: can you open it (.) and see what's inside ? *CHI: 0.

    *CHI: inside »

    3. 2;1.29

    « *MOT: what's in the bag ? *CHI: dans le bag ? »

    4. 2;10.29

    « *FAT: qu'est ce que c'est ? *CHI: le cheval !

    *FAT: oh !

    *FAT: et ici ?

    *CHI: ah oui ça .

    *CHI: ça c'est à la ferme .

    *FAT: c'est des choses qui sont dans la ferme, hein ?

    *FAT: qu'est ce que c'est ? *CHI: 0.

    *FAT: Olivier, qu'est ce que c'est ?

    *CHI: une mache !

    *FAT: une vache .

    *CHI: une vache . »

    4. 2;.6.03

    *CHI: conduit le fire engine .

    *CHI: <there ano(ther)> [//] there la man . *CHI: je veux push la neige

    2; 01.29

    *CHI: dans le bag ?

    *CHI: qu'est ce qu'y a dans le bag ?

    Figure 3 : exemples cités dans le texte

    100

    40

    60

    20

    90

    80

    70

    50

    30

    10

    0

    Total genre Anglais Français

    Figure 3 : Courbe de l'évolution du genre

    Figure 5 : Evolution de l'article en français

    Figure 6 : Evolution du déterminant en français

    Figure 7 : Evolution du pronom et de l'adjectif en français

     

    Article masc

    Article fem.

    Article
    ind.masc

    Article ind.
    Fém.

    article partitif
    masc.

    Article partitif
    fem.

    Déterminant
    masc.

    Déterminant
    fem.

    Déterminant
    poss. masc

    Déterminant
    poss.féminin

    Total

    1;10.05

     

    2

    7

     
     
     
     
     
     
     

    9

    1;11.10

     

    1

    1

     
     
     
     
     
     
     

    2

    1;11.13

    23

    13

    16

     

    4

     
     
     

    1

     

    59

    1;11.15

     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     

    2;01.29

    17

    1

    1

     
     
     
     
     
     
     

    21

    2;03.13

    34

    8

    6

     

    1

     

    3

     

    2

    3

    67

    2;03.20

    6

    17

     
     
     
     
     
     
     
     

    32

    2;05.00

    25

    4

    4

     

    1

     
     
     
     

    2

    39

    2;06.03

    10

    6

    3

     
     
     
     
     

    2

     

    23

    2;09.03

    13

     

    1

     

    6

    1

     

    1

     
     

    22

    2;09.07

     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     

    2;10.29

     

    8

     
     
     
     
     
     
     
     

    8

    2;10.29

     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     

    2;11.15

    6

    1

    8

    1

    1

     
     
     

    1

    4

    23

    3;06.09

    1

    1

     
     
     
     
     
     

    3

     

    5

    3;06.14

    14

    4

     
     
     
     
     
     

    5

    2

    33

    4;00.9

    6

    6

    8

     

    5

     
     
     
     

    3

    32

    Total

    163

    73

    75

    6

    12

     

    3

     

    14

    14

    405

    Tableau 8 : Déterminants valides en français

    40

    50

    30

    20

    10

    0

    Article masc Article fem. Article ind.masc

    Figure 9 : Illustration de l'évolution des occurrences valides les plus fortes

    Age

    Nom masculin

    Nom féminin

    Adjectif masculin

    Adjectif féminin

    Pronom masculin

    Pronom féminin

    Total

    1;10.05

     
     
     
     
     
     
     

    1;11.10

     
     

    1

     
     
     

    1

    1;11.13

     
     

    5

     
     
     

    5

    1;11.15

     
     
     
     

    5

     

    5

    2;01.29

     
     
     
     
     
     
     

    2;03.13

     
     

    9

     

    18

     

    27

    2;03.20

     
     
     

    3

    5

    4

    12

    2;05.00

    2

     
     

    1

    9

     

    10

    2;06.03

     
     
     
     
     
     
     

    2;09.03

     
     

    3

     

    3

    1

    7

    2;09.07

     
     
     
     
     
     

    1

    2;10.29

    2

     

    7

    1

    5

    3

    16

    2;10.29

     
     
     
     
     
     
     

    2;11.15

     
     

    1

    1

    4

     

    6

    3;06.09

     
     
     
     
     
     
     

    3;06.14

     
     

    5

     

    18

    2

    25

    4;00.9

     
     

    9

     

    16

    5

    30

    Total

    4

     

    40

    7

    83

    15

    145

    Tableau 10 : Pronoms et noms valides en français

    35

    30

    25

    20

    15

    10

    5

    0

    Adjectif masculin valide pronom masculin valide pronom féminin valide

    Figure 11 : Evolution des occurrences valides les plus fortes

    Age

    Article masc

    Article fem.

    Article
    ind.masc

    Article ind. Fém.

    Article partitif
    masc.

    Article partitif
    fem.

    Déterminant
    masc.

    Déterminant
    fem.

    Déterminant
    poss. masc

    Déterminant
    poss.féminin

    Total

    1;10.05

     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     

    1;11.10

     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     

    1;11.13

     

    1

    1

     
     
     
     
     
     
     

    2

    1;11.15

     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     

    2;01.29

    1

    1

     
     
     
     
     
     
     
     

    2

    2;03.13

     

    3

    1

    1

    5

     
     
     
     
     

    10

    2;03.20

    1

    7

     
     

    1

     
     
     
     
     

    9

    2;05.00

     

    3

     
     
     
     
     
     
     
     

    3

    2;06.03

    2

     
     
     
     
     
     
     
     
     

    2

    2;09.03

     
     

    1

    1

     
     
     
     
     
     

    2

    2;09.07

     

    1

    1

     
     
     
     
     
     
     

    2

    2;10.29

     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     

    2;10.29

     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     

    2;11.15

     
     
     

    1

     
     
     
     
     
     

    1

    3;06.09

     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     

    3;06.14

     

    4

    4

     
     
     
     
     
     
     

    8

    4;00.9

     

    1

     
     
     
     
     
     

    3

     

    4

    Total

    4

    21

    8

    3

    6

     
     
     

    3

     

    46

    Tableau 12 : Déterminants erronés en français

    Article masc Article fem.

    8

    7

    6

    5

    4

    3

    2

    1

    0

    Figure 13 : Evolution des occurrences erronées les plus fortes

    128

    Age

    Nom masculin

    Nom féminin

    Adjectif masculin

    Adjectif féminin

    Pronom masculin

    Pronom féminin

    Total

    1;10.05

     
     
     
     
     
     
     

    1;11.10

     
     
     
     

    1

     

    1

    1;11.13

     
     
     
     
     
     
     

    1;11.15

     
     
     
     
     
     
     

    2;01.29

     
     
     
     
     
     
     

    2;03.13

     
     
     

    1

     
     

    1

    2;03.20

     
     
     

    12

     

    4

    16

    2;05.00

     
     
     

    3

     

    2

    5

    2;06.03

     
     
     
     
     

    2

    2

    2;09.03

     
     
     
     
     

    1

    1

    2;09.07

     
     
     
     
     
     
     

    2;10.29

     
     
     
     
     
     
     

    2;10.29

     
     
     
     
     
     
     

    2;11.15

     
     
     
     
     
     
     

    3;06.09

     
     
     
     
     
     
     

    3;06.14

     
     
     
     
     
     
     

    4;00.9

     
     
     
     
     

    1

    1

    Total

     
     
     

    16

    1

    10

    27

    Tableau 14 : Pronoms et noms erronés en français

    14

    12

    10

    8

    6

    4

    2

    0

    Adjectif erroné pronom féminin erroné

    Figure 15 : Evolution des occurrences erronées les plus fortes

    Figure 15 : Evolution des occurrences de genre en anglais

    Age

    Pronoms perso. masc

    Pronoms perso. fem.

    Pronoms perso. neutre.

    Pronoms poss. masc

    Pronoms poss. fem.

    Pronoms poss. neutre

    total

    1;10.05

     
     
     
     
     
     
     

    1;11.10

     
     
     
     
     
     
     

    1;11.13

     
     
     
     
     
     
     

    1;11.15

     
     

    1

     
     
     

    1

    2;01.29

     
     
     
     
     
     
     

    2;03.13

     
     
     
     
     
     
     

    2;03.20

     
     
     
     
     
     
     

    2;05.00

     
     
     
     
     
     
     

    2;06.03

    2

     
     

    1

     
     

    3

    2;09.03

     
     
     
     
     
     

    15

    2;09.07

    3

    1

    8

    1

    1

    14

    13

    2;10.29

     
     
     
     
     
     
     

    2;10.29 **

    2

    3

    19

     
     
     

    24

    2;11.15

     
     

    1

     
     
     

    &1

    3;06.09

    6

    4

    10

    2

     
     

    22

    3;06.14

    1

     
     
     
     
     

    1

    4;00.9

     
     
     
     
     
     
     

    Total

    15

    8

    39

    4

    1

    14

    81

    Tableau 16 : Pronoms valide en anglais

    pronom personnel masculin valide pronom personnel neutre valide

    20 18 16 14 12 10 8 6 4 2 0

     
     
     

    Figure 17 : Evolution des occurrences valides les plus fortes

    133

    Age

    Pronoms perso. masc

    Pronoms perso. fem.

    Pronoms perso. neutre.

    Pronoms poss. masc

    Pronoms poss. fem.

    Pronoms poss. neutre

    total

    1;10.05

     
     
     
     
     
     
     

    1;11.10

     
     
     
     
     
     
     

    1;11.13

     
     
     
     
     
     
     

    1;11.15

     
     
     
     
     
     
     

    2;01.29

     
     
     
     
     
     
     

    2;03.13

     
     
     
     
     
     
     

    2;03.20

     
     
     
     
     
     
     

    2;05.00

     
     
     
     
     
     
     

    2;06.03

     
     
     
     
     
     
     

    2;09.03

     
     
     
     
     
     
     

    2;09.07

     
     
     
     
     
     
     

    2;10.29

     
     
     
     
     
     
     

    2;10.29 **

     
     
     
     
     
     
     

    2;11.15

     
     
     
     
     
     
     

    3;06.09

     
     
     
     
     
     
     

    3;06.14

     
     
     
     
     
     
     

    4;00.9

     

    1

     
     
     
     

    1

    Total

     

    1

     
     
     
     

    1

    Tableau 18 : Pronoms erronés en anglais

    pronom personnel féminin erroné

    4 3 2 1 0

     

    Figure 19 : Evolution des occurrences erronées les plus fortes

    *CHI: où il est la petite auto ?

    *CHI: là le gros l'auto ? *CHI: où il est le gros auto ?

    *CHI: xx le gros auto ?

    *CHI: où elle est la gros auto ?

    *CHI: où il est le gros auto ?

    *CHI: <où elle est> [<] la gros auto ?

    [*CHI: où elle est la gros auto ?

    *MOT: I don't know where the gros auto is .]

    *CHI: où elle est la gros auto, Elena

    *CHI: là le gros auto ? *CHI: là le gros auto ? *CHI: là gros auto ? *CHI: là la gros auto ?

    1 ; 11. 13

    *CHI: un bicyclette ! 40*CHI: un bicyclette ! *CHI: un bicyclette !

    41 [*CHI: un bicyclette ! *FAT: c'est une bicyclette !]

    *CHI: où est la bicyclette à Olivier ? *CHI: où la bicyclette à Olivier ? Remarque : *FAT: il est ici la bicyclette .

    2 ; 3. 13

    *CHI: il va ici le bicycle ? *CHI: il va ici (.) le bicyclette !

    *CHI: il va ici (.) le bicyclette

    *CHI: il va ici (.) le bicyclette !

    [*FAT: ma bicyclette .

    *CHI: ah xxx ma bicyclette !]

    2 ; 10. 29

    *CHI: avec ma grosse bicyclette xxx ! *CHI: à la bicyclette

    Figure 20 : Productions erronées

    2 ; 3. 20

    40 C'est une répétition de l'enfant non pas une erreur ;

    41 Lorsque les deux interagissent, le discours suit une mise en page spécifique.

    Rimbaud Sophie L'acquisition du genre et le code mixing chez le bilingue précoce 2009
    TABLE DES ILLUSTRATIONS
    Chapitre 1 : Partie théorique

    Tableau 1 : Tableau récapitulatif des différents types de bilinguisme sur critères psychologiques,

    contextuels et selon l'âge d'acquisition .15

    Illustration 2 : Lésions du cortex entraînant des troubles du langage 18

    Illustration 3 : Localisation des aires du cerveau 20

    Illustration 4 : Anatomie du cerveau ..21

    Chapitre 2 : Partie expérimentale

    Tableau 1 : Tableau des productions totales en français, en français, en anglias et en utilisant le code

    mixing 51

    Figure 2 : Histogramme représentant les productions de l'enfant 52

    Tableau 3 : Tableau des proportions des productions de l'enfant 53

    Tableau 4 : Tableau des productions totales de genre, en français, anglais et code mixing .56

    Figure 5 : Histogramme des productions de genre 57

    Tableau 6 : Tableau des proportions des productions de genre 58

    Tableau 7 : Evolution du genre en français 60

    Figure 8 : Evolution des structures syntaxiques en français 60

    Tableau 9 : Proportion des genres en anglais 63

    Figure 10 : Evolution des structures syntaxiques en anglais 64

    Annexes

    Figure 1 : Article du Midi Libre 80

    Figure 2 : Transcritpion du corpus Genesee 1;10.05 81-119

    Figure 3 : Exemples cités dans le texte 120

    Figure 4 : Courbe de l'évolution du genre 121

    Figure 5: Evolution de l'article en français .122

    Figure 6: Evolution du déterminant en français 122

    Figure 7 : Evolution du pronom et du déterminant en français ..122

    Tableau 8: Tableau des déterminants valides en français 123

    Figure 9 : Evolution des occurrences syntaxiques les plus

    fortes 124

    Tableau 10 : Tableau des pronoms er noms valides en français .125

    Figure 11 : Evolution des occcurences valides les plus fortes 126

    Tableau 12 : Tableau des déterminants erronés en français 127

    Figure 13 : Evolution des occurrences erronées en français 128

    Tableau 14 : Tableau des noms et pronoms erronés en français 129

    Figure 15 : Evolution des occurrences de genre en anglais 130

    Tableau 16 : Tableau des pronoms valides en anglais .131

    Figure 17 : Evolution des occurrences valides les plus fortes 132

    Tableau 18 : Tableau des pronoms erronés en anglais 133

    Figure 19 : Evolution des occcurrences erronées les plus fortes .134

    Figure 20 : Les productions erronées 135

    Table des matières

    : Partie théorique

    1. Différents types de bilinguisme .2

    1.1. Classification en fonction de la compétence dans les deux langues 2

    1.2. Classification en fonction de l'organisation cognitive de la langue 5

    1. 3. Classification en fonction du contexte d'acquisition 7

    1. 4. Classification en fonction du statut des langues 8

    1. 5. Classification en fonction de l'âge 10

    2. Les bases neurologiques dans le fonctionnement du langage 16

    2. 1. Les courants théoriques dans la relation langage/cerveau 17

    2. 1. 1. La localisation hémisphérique 17

    2. 1. 1 Une nouvelle approche du cerveau : la théorie unitaire ..19

    2. 2. Langage et cerveau 20

    2. 2. 1. Les zones du

    langage 20

    2. 2. 2. La myélinisation du système nerveux ...

    ....21

    2. 2. 3. Le fonctionnement du cerveau chez l'enfant bilingue 22

    2. 2. 3. 1. Changeux et la théorie épigénétique 22

    2. 2. 3. 2. La période critique pour une seconde langue 24

    2. 2. 3. 3. La latéralisation des hémisphères 25

    2. 3. Le traitement cognitif et neurologique du bilingue 26

    2. 3. 1. La cohabitation des deux langues 26

    2. 3. 2. L'impact de la seconde langue sur le système cognitif 27

    3. Le bilinguisme précoce 30

    3. 1. Le contexte du bilinguisme précoce simultané 30

    3. 2. Le système langagier en construction : un ou deux systèmes ? 29

    3. 3. Les premiers mots de l'enfant bilingue .30

    3. 4. Définition du code mixing 33

    3. 5. Le code mixing chez le bilingue précoce 36

    3. 6. Le code switching 39

    3. 7. Synthèse du développement langagier chez l'enfant monolingue 41

    : Partie expérimentale

    1. Méthodologie 42

    1.1. Présentation de l'enfant et de la famille 42

    1. 2. L'enregistrement du corpus 43

    1. 3. La transcription du corpus 43

    1. 4. Le codage 44

    1. 5. Le contexte et l'interaction 44

    1. 6. La syntaxe française 46

    1. 7. La syntaxe anglaise ..49

    2. Analyse des résultats 51

    2. 1. Présentation du corpus 51

    2. 2. Présentation des productions de genre 56

    2. 3. Analyse des occurrences de genre 60

    3. Discussion 66

    3. 1. Le bilinguisme de l'enfant étudié dans le corpus .66

    3. 2. Discussion des résultats 69

    3. 3. L'erreur de genre : étude de cas 71

    CONCLUSION 74

    Annexes 75

    Table des matières 137






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