3) Pas d'anticipation de « nouveaux aléas
»
Il n'y a pas non plus dans la politique d'adaptation lyonnaise
de prise en compte de « nouveaux aléas », c'est-à-dire
des impacts du changement climatique qui ne soient pas encore
avérés. "On n'a pas encore re-questionné les nouveaux
risques éventuels. On ne sait même pas s'il y aura des nouveaux
risques" (Chargé de mission Grand Lyon, 2012).
La diminution de la ressource en eau en période
estivale peut être considérée comme un nouvel aléa
attendu avec le changement climatique. La ressource en eau est abondante dans
l'agglomération lyonnaise et ne représente pas un problème
actuellement. Toutefois d'après une étude de l'Agence de l'eau,
les débits du Rhône pourraient baisser de 50 % à l'horizon
2050 (Fabre, 2012). Il existe donc un véritable enjeu sur la ressource
en eau avec le changement climatique. Pourtant, au niveau de
l'agglomération il n'est pas évoqué.
« Il y a des tas de risques qu'on ne maîtrise
pas. Donc, faire une stratégie où on est juste sur l'îlot
de chaleur, où on consacre tous nos moyens à cette question parce
qu'on trouve... on a identifié dans le programme AMICA que
c'était quand même un cas un peu important, et puis c'est
peut-être parce qu'on a été très traumatisé
par la canicule [de 2003] en France, c'est peut-être pour ça qu'on
est sur ces questions. Mais on n'a pas encore parlé d'enjeux liés
à l'eau, par exemple, qui risquent d'être un peu
problématique.»
Chargé de mission au Grand Lyon, 2012
Le réchauffement dans les communes périurbaines,
actuellement relativement préservées face au
phénomène d'îlot de chaleur urbain cantonné aux
espaces centraux denses et aux grandes zones d'activités, n'est pas non
plus évoqué. Comme l'affirme un responsable de la DDT du
Rhône : « Les grosses communes qui sont déjà
denses et qui ont déjà un îlot de chaleur urbain prennent
plus en compte que les autres qui ne sont pas directement confrontées...
Les autres tant qu'elles ne sont pas directement confrontées, j'ai
l'impression que ce n'est pas dans leur mode de raisonnement. »
Il n'y a donc pas de réflexions portant sur des
éventuels risques futurs liés au changement climatique. Cela peut
s'expliquer car le pas de temps est trop éloigné et
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Partie II : Étude du cas lyonnais et focus sur quatre
communes
donc la vulnérabilité face à ces
aléas parait trop lointaine et dans une certaine mesure, trop incertaine
(on ne connait pas bien les évolutions du climat, surtout concernant les
précipitations). De plus, le pas de temps des documents d'urbanisme
n'est pas adapté pour prendre en compte des échéances trop
éloignées : le SCOT se projette jusqu'en 2030, et les documents
d'urbanisme (PLU, PPRN) sont de l'ordre d'une dizaine d'années (Sbrava,
2012). Cela peut expliquer que des temporalités lointaines ne soient pas
intégrées.
Par ailleurs, les mesures de court et de long terme peuvent
être incompatibles, ce qui bloque les possibilités d'anticipation.
Par exemple sur la gestion de l'eau, les réseaux d'assainissement et de
distribution doivent être adaptés aux débits courants afin
d'assurer une vitesse d'écoulement des eaux optimale et d'éviter
le développement de bactéries dû à la
présence d'eau stagnante. Suivant l'hypothèse d'un changement
climatique, les débits de demain ne seront pas ceux d'aujourd'hui - les
prévisions vont dans le sens d'une augmentation des débits en
hiver avec la hausse des précipitations par exemple. Or, il est
impossible d'adapter les réseaux à une telle augmentation, car
ils seraient alors inadaptés à la situation actuelle (Sibeud,
2012). Une anticipation de long terme est donc impossible.
Dès lors, une politique d'adaptation de long terme
est-elle envisageable, ou bien l'urbanisme et l'aménagement sont-ils
dans l'incapacité d'anticiper les impacts du changement climatique ?
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