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Comment les outils d'amélioration continue contribuent-ils à l'agilité de l'entreprise ?

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par Martin Letouvet
CESI Saint Nazaire - Mastère spécialisé RACPI 2015
  

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Chapitre 3 : À la croisée des deux concepts

I. Quels points communs à priori ?

Le Lean a considérablement marqué l'industrie du XXIe siècle avec ses nouvelles pratiques et ses succès avérés. La notion d'agilité dans l'entreprise a donc naturellement tiré les leçons du Lean pour les inclure dans sa vision cible de l'organisation agile. Pourtant, les deux concepts, dans leur définition et leur création, répondent à un contexte différent : à partir d'outils Lean, largement déployés et connus, voyons si certains principes, même si différemment abordés dans l'un ou l'autre, semblent converger vers une philosophie commune.

VI.1 Juste à temps

Le Lean prône la réception du produit à temps, dans la quantité souhaitée et sans défauts. En ce sens, le Lean rejoint l'agilité avec son principe d'introduire le client comme part entière de l'organisation. L'objectif de l'entreprise est fixé par le client auquel il faut donc adapter sa production. Dans le Lean, on déploie des outils pour identifier et corriger les noeuds qui empêchent de fournir le client dans les délais. Dans l'agilité, on intègre le client jusque dans la structure organisationnelle pour répondre à sa demande.

VI.2 Réactivité

La possibilité de produire des petites séries représente la finalité de certains outils Lean. On pense notamment au SMED qui, par l'optimisation du changement d'outillage, permet de passer d'un produit à l'autre en le moins de temps possible. Dans cette optique, on peut se rapprocher d'un comportement agile avec de la réactivité, de la rapidité pour répondre à une demande client changeante. Cependant, la demande changeante est ici cadrée : le client peut exprimer un nouveau besoin en termes de quantités, mais pas pour de nouvelles fonctionnalités produit (nous ne somme que dans de la réactivité).

VI.3 Management participatif

La boite à idée est un des outils clefs du Lean : elle permet de connaître les améliorations imaginées par n'importe quel collaborateur, concernant n'importe quel sujet. La boite à idée est donc, à priori, un outil tout à fait indiqué pour motiver l'intelligence collective et développer le management participatif. Dans le Lean, on considère que les bonnes idées viennent souvent du niveau opérationnel. Dans la structure agile, qui s'articule autour d'équipes poly-compétentes qui partagent leurs connaissances, on considère qu'elles peuvent venir de tout collaborateur.

VI.4 Kaizen

On retrouve bien évidemment dans les deux concepts la notion d'amélioration continue, de culture du changement. En termes d'outil, le Lean préconise l'utilisation de chantiers Kaizen. Ces chantiers sont très cadrés, mais c'est avant tout pour ne pas s'éparpiller et rester concentré sur l'objectif, ce n'est pas un cadre qui vise à limiter le champ de la réflexion. De

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plus, un chantier Kaizen doit être le plus rapide et visible possible, peu onéreux : il serait une sorte de « justinnovation », principe de l'entreprise agile.

VI.5 PDCA

Le PDCA est un autre outil d'amélioration continue au sens propre du terme : il structure pour permettre la durabilité des actions apportées pour la résolution d'un problème ou l'amélioration. Dans l'agilité, et notamment en ce qui concerne les SID, on cherche à décider à partir d'analyses du passé, de retour d'expérience, à condition qu'il soit accessible simplement. Le PDCA est donc un outil qui donne le cap d'une amélioration permanente, actée, donc ré-exploitable.

VI.6 Indicateurs

L'utilisation des indicateurs n'est pas forcément intrinsèque au Lean, mais reste un outil indispensable pour pouvoir le déployer. Dans l'agilité, on se sert des indicateurs, mais on évite toute interprétation court-termiste et on inclut dans la performance globale le partage du sens, non mesurable. Le Lean lui reste dans la logique « if you can't measure it, forget it » (si tu ne peux pas le mesurer, oublie-le).

VI.7 Management visuel

Dans tous les outils Lean, il est conseillé d'utiliser du management visuel (5S et tableaux de bords notamment). Dans l'organisation agile, on cherche à s'appuyer le plus possible sur du management visuel, plutôt que sur des bases documentaires.

II. Quelles incompatibilités à priori ?

Nous avons donc, à travers certains outils, aperçu quelques concordances dans les deux concepts. Cependant, il est plus intéressant de se pencher sur les principes à priori antagonistes : quels sont les aspects culturels et opérationnels sur lesquels les deux concepts divergent ?

Pour commencer, l'intégration du client est différente dans les deux : pour le Lean, le client dicte ses besoins et on déploie les outils en interne pour y répondre. Il dit ce qu'il veut, l'entreprise « se débrouille » pour lui fournir. Dans l'agilité, le client est partie intégrante : il fait partie du processus jusqu'au décisionnel, il interagit avec les équipes dans la recherche de solution.

Ensuite, le Lean tend à standardiser la production. Il se base sur l'existant, l'analyse et l'améliore pour enfin créer les modes opératoires adaptés. Alors, toute variation sur l'existant viendra remettre en question le mode opératoire. En cela, la démarche visant à standardiser concrètement par mode opératoire toute amélioration semble contradictoire avec l'idée d'agilité, qui a besoin de procédures souples et reconfigurables le plus rapidement possible.

De même qu'évoqué plus haut, le Lean participe à la réactivité, mais pas à la flexibilité. Au contraire même : le SMED permet de faire des petites séries mais concernant des produits

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dont les caractéristiques sont figées. Si le client souhaite apporter une modification/personnalisation, tout le travail effectué pour permettre un changement d'outil rapide aura alors été une perte de temps, puisque c'est le process entier qui risque d'être impacté par le changement de caractéristique produit.

La boite à idée a également quelques limites : si elle est parfaitement indiquée pour connaître des améliorations relatives aux procédés actuels, elle ne permet pas de connaître les nouveaux enjeux ou les nouveaux besoins client. On va peut-être se retrouver demandeur d'une amélioration qui sera incompatible avec la nouvelle expression de ce besoin.

Enfin toute technique nécessitant un déploiement long (3 mois à 1 an) semble contre-indiquée : on vise à perfectionner le procédé sur un produit pour obtenir le meilleur taux de qualité (on pense notamment au 6 sigma). Projets couteux et ciblés sur un procédé, ils conviennent à une production aux cycles longs.

III. Réflexion et échanges : un début de réponse ?

Dans ces conditions, doit-on abandonner ces techniques et laisser de côté les opportunités d'améliorer la performance sous la menace d'une modification ? Cette même réflexion semble incompatible avec l'idée d'agilité. L'entreprise agile est justement basée sur l'acceptation du changement et se construit avec, elle n'en a pas « peur ». Il est impensable de laisser la production parsemée de gaspillages dans une structure qui place le client au coeur de ses décisions et qui cherche sa satisfaction la plus juste en termes de service.

On peut citer Tony Davies qui publie un article au titre évocateur : « Leagility » [2]. Le principe est simple : adopter le Lean pour les cycles longs, l'agilité pour les cycles courts. En soit, aucune réponse pour adapter le Lean dans une structure agile, mais intéressante pour les entreprises en mesure de segmenter leur production comme ceci.

Pour Michel Benoit de Lean-Ergo®, l'agilité et le Lean convergent vers la même chose, soit la satisfaction du besoin client. Mais notre vision « occidentale » du Lean, normative et « pour éviter les erreurs » serait erronée : à la base, le système TPS cherche à produire avec le moins de ressources et le moins d'énergie possible, puisque c'était la condition sine qua non pour produire au Japon. Le manque d'espace disponible imposait le « zéro stock » au même titre que le manque de ressources imposait le « zéro défaut ». En revenant sur ce fondement, on sent une vraie convergence entre l'agilité et le Lean : on s'éloigne de la production de masse pour se rapprocher le plus justement du besoin client.

Pour lui, il n'est pas forcément question d'outil Lean agile ou non agile, mais plutôt d'une utilisation agile de l'outil, surtout à travers la formation du personnel et l'appréhension du contexte adapté. Si le personnel est bien formé à l'outil, il saura où et quand l'utiliser, en adaptation avec les changements dans son environnement.

Enfin il décrit l'agilité comme la suite logique du Lean : « Dans le modèle Tayloriste : on n'intègre que les dirigeants. Avec le Lean : on intègre tous les gens qui travaillent. Avec l'Agilité : on intègre les utilisateurs. On fait de la co-construction, même quand on met en place des outils d'amélioration de la performance avec les clients, les sous-traitants ou les fournisseurs ».

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Gérard Chambet estime lui que « tous les outils qui permettent de faire remonter et de répondre vite » sont adaptés dans une organisation agile. « On peut faire des réunions, des groupes de travail... Mais il faut que tout soit traité rapidement. Dans ce cas, il faut travailler en équipes poly-compétentes qui peuvent avoir toutes les réponses nécessaires rapidement ».

De même, il dit que, pour être agile, il ne faut pas chercher l'amélioration à tout prix. On peut faire du Lean mais pour un service qu'on doit valoriser auprès du client. « Notre taux de service est de 99.5% : le client ne désire pas plus, je ne vais donc pas chercher à l'améliorer ».

Enfin pour Jean-Claude Tessier, tous les outils Lean vont théoriquement dans le sens de l'agilité tant qu'ils se concentrent sur la valeur ajoutée et la suppression des gaspillages. Il faut surtout travailler l'aspect managérial pour rendre ces outils agiles, en prenant en compte les changements organisationnels qu'ils induisent. « Les entreprises ne comprennent pas que les collaborateurs doivent comprendre la finalité » et ce, quel que soit l'outil, Lean ou autre.

IV. Champ de l'étude

L'étude se concentrera sur des entreprises industrielles qui remplissent au moins l'une des conditions cycle de vie court ou demande imprévisible et qui emploient certains outils d'amélioration continue évoqués (ou en considèrent d'autres comme tel).

Les aspects marketing, financiers et système d'information propres à l'entreprise agile ne seront pas abordés, à moins qu'ils soient inclus dans les démarches d'amélioration continue de la production.

Synthèse

De prime abord, les deux concepts présentent des points de convergences évidents, notamment dans la philosophie, mais aussi des incompatibilités manifestes. C'est principalement l'aspect « figé » de l'application de certains outils, découlant d'une vision du Lean trop occidentale, qui semble fermer les portes à plus d'agilité.

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon