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Sagesse et destinée tragique dans la philosophie de Schopenhauer

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par Sylvain Sella
Université Paul Valéry Montpellier III - Master 1 2011
  

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I/ La découverte de l'essence ;la Volonté

I,1 Le besoin métaphysique et la philosophie.

A l'inverse de l'animal ,l'homme est doté d'une conscience particulière,suffisamment éveillée pour se demander quel est le sens de l'existence du monde et de la sienne propre .L'homme est donc double par nature;pleinement volonté de vivre comme l'animal, s'efforçant de suivre ce que la nature a prévu pour lui et en même temps , représentation, en ce qu'il prend conscience de lui-même et de sa situation dans l'existence .Une simple conscience témoin ne poserait aucun problème mais l'être humain s'interroge sur la valeur de ce qu'il vit. On ne peut dater cette forme d'inquiétude mais elle l'accompagne depuis fort longtemps. Voici ce que nous dit Schopenhauer à propos de cet avènement de la conscience: « Ce n'est qu'une fois que l'essence intime de la nature (la volonté de vivre dans son objectivation) a traversé les deux règnes des êtres dépourvus de conscience puis a remonté d'un pas assuré et hardi la vaste série des animaux, ce n'est qu'au moment où elle arrive enfin au seuil de la raison ,dans l'homme donc,qu'elle accède pour la première fois à la réflexion ,et là ,elle se prend à s'étonner de sa propre oeuvre et se demande ce qu'elle est elle même »(1) ;on voit qu'il s'agit bien là d'un mouvement de la Volonté elle même et que, en ce sens ,la métaphysique est le destin de l'homme. L'idée courante concernant Schopenhauer, est qu'il est le philosophe de l'absurde et ne peut que nous conduire au découragement. En réalité,ce moment métaphysique est essentiel ,et le bouddhisme parle à ce propos de « précieuse existence humaine » ;les dieux tout autant que les animaux et

les démons sont incapables de prendre conscience du véritable sens de la vie et c'est un privilège humain dans cette philosophie religieuse. Chez Schopenhauer ,une conscience supérieure à l'homme serait proprement insoutenable eu égard à la souffrance qui règne dans le monde. Dans les deux cas,la survenue de l'homme ,par ce retour de la nature sur elle même ,est le lieu où se joue vraiment le drame,mais nous devrions dire déjà ,la tragédie de l'univers. Il y a bien là un enjeu formidable,justifiant pleinement cette importance universelle de la métaphysique ;Existe t-il dans l'univers un dessein mystérieux,une Fin,à laquelle l'homme participe sans s'en rendre pleinement compte au départ? . Notre auteur se rattache bien à la tradition philosophique et fait du questionnement sur notre propre existence le début et le coeur de la métaphysique ainsi qu'Aristote le faisait remarquer: « Ce fût en effet l'étonnement qui poussa, comme aujourd'hui,les premiers penseurs aux spéculations philosophiques »2 . Pour le philosophe de Francfort,la curiosité étonnée de l'homme en ce qui concerne sa propre existence porte sur trois choses essentielles;le fait même d'être,que le monde soit,et la mort qui vient mettre un terme à cette vie. Ceci dit,pour Schopenhauer,quand on dit que l'homme s'interroge,il s'agit en fait d'une potentialité car l'homme ordinaire ne se préoccupe ,en réalité, pas beaucoup de ces questions. Les hommes ,en grande majorité,sont en fait très largement mûs par les motifs de leur vouloir particulier et n'ont pas le loisir,au sens grec ancien et philosophique de vie contemplative,ainsi qu'au sens plus moderne ,de temps disponible en dehors du travail. On voit déjà là poindre le thème qui nous occupe en particulier ici,à savoir;la destinée tragique et l'élection,la vocation toute particulière de certains. Qu'il y ait eu « quelque chose plutôt que rien » comme le disait Leibniz,cela a pu interpeller chacun d'entre nous à différents degrés, voire nous amuser ,mais l'existence en soi ne nous révolte pas ,alors que la mort nous blesse,nous attriste et nous prive des bribes de sens qui constituaient comme autant de points d'ancrage sur le chemin de notre vie. Le spectacle du monde pourrait être un motif de curiosités et d'expériences sans cesse renouvelées malgré les hauts et les bas de nos destins particuliers, mais la « grande faucheuse » n'a jamais fait d'exception jusqu'ici.« Si notre vie était infinie et exempte de douleur,il ne viendrait sans doute à l'esprit de personne de demander pourquoi le monde existe et pourquoi précisément il est doté de cette nature,tout irait de soi »3 . L'auteur nous précise aussi que l'homme est le seul être à savoir avec certitude qu'il est mortel. Dans l'animal,la Volonté s'acharne principalement à la conservation de la vie et il peut continuer d'avancer en

toute confiance car il ne se sent pas différent d'elle. Mais la situation de l'homme génère un nouvelle tension;c'est la vie individuelle qui veut être préservée à tout prix et depuis le départ,l'homme cherche à fuir la mort,la personnifie sous des traits terribles et impitoyables,tente de l'amadouer,et se révolte contre cette sanction qui ne devrait plus être. En effet,pourquoi la volonté dans la nature a-t-elle produit un être individualisé et conscient pour s'en débarrasser presque aussitôt sans qu'il ait pu comprendre le sens de son passage?L'individu,malgré tout, reste membre de l'espèce et « appartient »à la Volonté,c'est la raison pour laquelle,il ne vit presque jamais en présence de l'idée de sa mort d'où le caractère inauthentique de notre vie dont parlera Heidegger. La philosophie de Schopenhauer reste dans le sillage de la tradition philosophique inaugurée par Socrate où philosopher c'est apprendre à mourir mais pour le penseur allemand ,il s'agit d'accepter vraiment sa finitude et sa disparition comme une libération. La mort n'est pas un problème mais au contraire le but de la vie car l'attachement à la volonté de vivre est irrationnel. Si la mort nous interpelle,la réflexion philosophique doit nous révéler la seule solution envisageable,la suppression de la conscience individuelle;mais le désir d'être se poursuit et le monde avec lui,ce que l'auteur appelle la palingénésie,présence d'une soif d'exister qui se recycle éternellement. Il ne s'agit pas de déjouer les pièges de l'autre monde qui nous empêchent de gagner le salut de l'âme ,comme dans l'antiquité, où il existe une affection toute particulière pour les « manuels »de survie dans l'au delà,livres des morts égyptiens,gnostiques,tibétains ,dont les religieux ou initiés possèdent la clé ,les formules magiques qui conduiront le défunt à bon port.

L'histoire atteste également d' un ars moriendi dans la spiritualité de l'occident médiéval. Le philosophe considère néanmoins le moment du trépas comme un jugement,car il devient ,pour beaucoup,la seule occasion véritable de renoncer tout à fait à la tentation d'exister. La part indestructible de notre être existe ,mais elle est celle de la volonté et non d'un principe conscient. Si, de cette façon nous pourrions dire avec

Spinoza que nous « sentons que nous sommes éternels »,ce n'est pas en vertu d'une âme immortelle,mais de la part éternellement volitive qui nous habite;la sagesse devient plutôt l'acceptation de la condition tragique d'un individu dont le destin est un appel à renoncer à lui-même et de dire ,avec le cynisme amusé d'un Voltaire « J'aime la vie mais le néant ne laisse pas d'avoir du bon. »C'est vraiment la compréhension du caractère vain et éphémère de l'existence qui peut nous réconcilier avec l'idée de la mort;notre vie n'est qu'un rêve éphémère survenu entre deux néants et celui

qui va suivre notre disparition n'est pas plus à craindre que celui qui l'a précédé. Schopenhauer approuve le raisonnement apaisant d'Épicure pour qui la mort n'est rien car nous n'en serons pas conscient au moment où elle se produira .L'homme du commun qui ne va pas consacrer son temps à la réflexion philosophique a cependant à quelque niveau une vocation métaphysique mais qu'il va exprimer surtout par l'intermédiaire de la pratique religieuse ,laquelle constitue pour Schopenhauer une allégorie plus ou moins parlante de la vérité. Ce besoin de religion est apparu en raison de notre situation limitée et souffrante,comme un espoir d'une vie autre, meilleure,une promesse de survie dans l'au-delà qui viendrait nous consoler de souffrances imméritées et sans nombre qui furent notre lot ici bas. « L'immortalité c'est la seule chose pour eux à proprement parler »4..Dans la conception platonicienne

« soma=sema », l'existence corporelle est assimilable à un tombeau. Toute spiritualité ,en ce sens,est un rappel de la situation tragique de l'homme en ce monde ;son esprit est habité par un désir d'éternité mais son corps clame sans cesse sa finitude. Ainsi,le besoin de justifier sa vie est primordial chez lui depuis des temps immémoriaux: « la présence de temples,d'églises,de pagodes et de mosquées,dans tous les pays et à toutes les époques,leur splendeur et leur magnificence sont autant de preuves du besoin métaphysique de l'homme »5 .Bien entendu,la religion ne peut parler de la vérité que de façon allégorique et seule la philosophie constitue le véritable exercice de la pensée,son exigence de rationalité. A ce propos notre auteur cite Platon: « Il est impossible pour la foule d'être philosophe » 6 .La religion vient combler un besoin et son existence est parfaitement justifiée pour Schopenhauer: « La religion est la métaphysique du peuple;il faut de toute façon la lui laisser,et par conséquent l'honorer extérieurement;la discréditer,c'est la lui enlever. De même qu'il y a une poésie populaire,il doit y avoir une métaphysique populaire,comme dans les proverbes une sagesse populaire »7

.Cependant ,cet aspect inoffensif de la religion ,ne doit pas nous faire oublier qu'elle est aussi un instrument de domination pour les puissants qui agitent dans leurs discours ,le spectre de la sanction divine en cas de mauvaise conduite. Ces deux aspects de la vérité religieuse,sont incarnés respectivement par les personnages de Philatète et Démophèle dans ses petits écrits philosophiques de 1851 Sur la religion.

Les prescriptions et les ordonnances religieuses ne sauraient avoir de réalité en elles-même et pas plus que les lois civiles n'ont de valeur absolue,il convient simplement de les admettre et de les tolérer: « Il faut

donc l'envisager comme un mal nécessaire résultant de la pitoyable faiblesse intellectuelle de la grande majorité des hommes,qui est incapable de saisir la vérité et qui a constamment besoin,dans un cas urgent,d'un succédané »8selon Schopenhauer, toutes les religions ne sont pas placées à égales distance de la vérité,laquelle peut être connue grâce à sa métaphysique de la volonté (sur laquelle nous reviendrons plus

tard).Ainsi ,le judaïsme est faux de par son réalisme(croyance en l'existence du monde indépendamment du percipient),son théisme et son optimisme. En revanche,les religions de l'Inde et bouddhisme en tête cherchant une libération de ce monde, ont bien perçu la vraie nature de l'existence. Par ailleurs,le Christ représente parfaitement la destinée tragique de l'élu parvenu au stade où la vie humaine pleinement consciente d'elle même,ne peut plus être qu'une expression de la compassion pour la souffrance universelle. Est-il nécessaire d'ajouter que le christianisme historique à afficher un tout autre visage ,montrant par là l'inanité de la recherche d'un salut historique et collectif? Cette dimension de la vie humaine ,c'est vraiment la philosophie qui peut y répondre pleinement car la religion fait appel au surnaturel afin d'asseoir son autorité et la science ne s'occupe que du lien que les phénomènes entretiennent entre eux. Seule la philosophie pourrait réellement expliquer le problème car grâce à elle,la raison peut déchiffrer l'énigme du monde et non justifier un système abstrait conçu en dehors de l'expérience réelle. Par essence,la philosophie est « contre -nature »car elle correspond justement à ce retour de la

Volonté sur elle même alors qu'auparavant elle n'était qu'expansion aveugle et inconsciente .En principe,la nature a doté « l'animal -humain » d'un intellect purement utilitaire et qui se consacre pour l'essentiel à assurer sa propre subsistance et ses propres intérêts: « L'intellect n'est fait que pour reconnaître les rapports des phénomènes au service d'une volonté individualisée,dont les objets sont ces phénomènes. Dans la philosophie,il est donc appliqué à une chose pour laquelle il n'est pas fait:L'existence en général et en soi »9 . La caractéristique majeure,alors,de l'intelligence philosophique,c'est d'être désintéressée,de considérer le monde non comme quelque chose dont on doit s'emparer mais un objet à contempler. En un certain sens ,on peut dire que la philosophie réalise le passage du monde comme « volonté au monde au monde comme représentation »Nous verrons plus loin que la philosophie implique une génialité particulière et le destin qui lui est conséquent. Schopenhauer a été très critique à l'égard de la philosophie de métier, à laquelle pourtant,il s'est lui-même exercé mais sans succès à Berlin de 1820 à1822.L'inconvénient majeur provient

non pas de l'enseignement en lui-même ,mais de la subordination de celui-ci aux autorités religieuses et politiques de son temps. Notre auteur parle de la « Période de déloyauté »10,en visant les « trois

sophistes »,Fichte,Hegel,et Schelling qui,malgré l'impossibilité de dépasser le champ de l'expérience ,démontrée magistralement par Kant,continuent de « jongler » avec les abstractions et de bâtir en toute impunité leurs systèmes. « Il ne sert à rien que Kant ait démontré,avec la pénétration et la profondeur les plus rares,que la raison théorique ne peut jamais s'élever à des objets en dehors de la possibilité de l'expérience. Ces messieurs ne se se soucient nullement de pareille chose:mais ils enseignent sans hésiter,depuis cinquante ans,que la raison a des connaissances directes absolues,qu'elle est une faculté tout naturellement fondée sur la métaphysique,et que,hors de toute possibilité de l'expérience ,elle reconnaît directement et saisit sûrement le suprasensible,le bon Dieu et tout le bataclan »11 . Ainsi ,la philosophie allemande de l'époque n'a plus de limites et ne tient plus compte de l'expérience. Aux sources de l'expérience philosophique,nous avions l'étonnement,lequel se trouve confirmé par la philosophie hindoue qui depuis toujours révèle le caractère le caractère illusoire du monde;destin tragique de l'homme qui tient tellement à quelque chose qui n'a pas de réalité substantielle, maya. Le bouddhisme enseigne que c'est notre soif d'exister,avidya,qui produit notre errance dans le labyrinthe du monde,samsâra,lequel n'est en fait que le produit de nos projections mentales,la solidité de l'univers même étant contestable et très relative. Schopenhauer fait souvent référence aux Védas,aux Upanishads et,à cet égard, on a pu aussi lui reprocher de ne pas avoir bien saisi leur sens car ils ne sont pas nihilistes et professent une certaine forme d'immortalité d'une âme impersonnelle(atman).Quelle est l'originalité de la métaphysique de Schopenhauer par rapport aux professeurs qu'il critique ? Il s'agit bien là aussi d'une pensée systématique,une explication globale du monde,du sens de l'existence humaine et de son devenir .Comment la métaphysique peut -elle encore exister quand on sait que Schopenhauer suit parfaitement Kant sur ce point capital? ;lorsque nous percevons le monde ,nous ne le percevons jamais tel qu'il pourrait être en lui-même,indépendamment d'un sujet qui le perçoit,mais bien tel qu'il nous apparaît d'après les catégories a priori de notre entendement que sont l'espace ,le temps et la causalité. Notre esprit n'ayant pas accès à la chose en soi,toute métaphysique est devenue impossible. Comment,dés lors,Schopenhauer peut-il à son tour proposer une métaphysique?Notre auteur s'en explique en précisant que sa

métaphysique n'est pas fondée sur l'emploi de concepts tels que Dieu,Substance,Absolu,mais s'en réfère seulement au domaine de l'expérience:" le devoir de la métaphysique n'est point de passer par dessus l'expérience,en laquelle seule consiste le monde,mais au contraire d'arriver à la comprendre à fond»12 . La philosophie va se présenter comme un art de l'interprétation du monde donné comme une totalité dans l'expérience et ceci est possible grâce à l'expérience immédiate,intérieure que nous pouvons faire de la Volonté ainsi que nous le verrons plus

précisément: « Le mode de considération authentiquement philosophique du monde,c'est à dire celui qui nous apprend à connaître son essence intime et nous conduit par ce biais au delà du phénomène,est précisément celui qui ne demande pas à partir de quoi(woofer),vers où(wohin),et pourquoi(warum),mais ce qu'est (was) le monde. Schopenhauer va s'orienter au fil du temps vers une conception de la philosophie comme une véritable pratique artistique: « Le philosophe ne doit jamais oublier qu'il pratique un art et non une science »14 . Cette matière va donc demander des aptitudes particulières dont seuls certains sont dotés: « Or tel il en sera de ma philosophie:ce sera une philosophie en tant qu'art. Chacun n'en comprendra que ce qu'il mérite d'en comprendre »15 .Mais,dés lors, nous pouvons nous demander si la philosophie peut nous apporter un savoir complet qui ferait de nous des sages de la même façon que dans la sagesse hindoue,à laquelle se réfère souvent notre auteur,on parle de sages réalisés ayant atteint le but de la vie. A ce sujet ,la réponse de Schopenhauer n'est pas aussi positive et sa philosophie constitue plutôt une démonstration quant au caractère vain et superflu de la vie elle-même. Le jeune Nietzsche,encore disciple du pessimiste de Francfort,affirmait « Par nature,l'homme n'est pas là pour la connaissance »16 . La philosophie ne peut que révéler l'aspect tragique de l'existence et ce douloureux paradoxe;de plus nous en savons et de plus nous comprenons que nous n'aurons pas accès à une connaissance totale ni à un vrai bonheur. La science ne parle que des phénomènes et la Volonté en elle-même reste insondable: « Cette perception intime de notre propre volonté est loin de fournir une connaissance complète et adéquate de la chose en soi »17 .Ne pouvant saisir cette ultime réalité , la vraie connaissance chez Schopenhauer,ne se trouve que du coté de l'art « objectif »,capable de nous faire saisir des réalités éternelles,les Idées platoniciennes. Quand on sait cependant ,que selon Schopenhauer ces Idées sont les formes archétypes,les espèces éternelles de la nature,il est difficile, eu égard à la position de la science contemporaine en ce qui concerne la théorie de

l'évolution des espèces vivantes,de considérer comme toujours valable cette conception. La réflexion sur l'esthétique contemporaine percevrait également cette définition de l'art comme tout à fait restrictive. La parenté de l'art et de la philosophie se conçoivent fort bien,en revanche, à les considérer comme actes de contemplation capables de nous élever au dessus des exigences volitives. « Je trouve que la vue qu'on embrasse du sommet d'une montagne contribue beaucoup à nous offrir des horizons sur le monde. Le monde regardé ainsi d'en haut est un spectacle si fantastique et si curieux qu'il doit pouvoir consoler celui qui est assailli de

soucis »18 .Ces moments contemplatifs sont la clé d'un bonheur et d'un savoir relatifs, des instants où la scission sujet-objet semble

abolie: « Absorbons nous donc et plongeons nous dans la contemplation de la nature,si profondément que nous n'existions plus qu'à titre de sujet connaissant...nous tirons ainsi toute la nature à nous »19 .Ces moments purs ne se produisent pas continuellement et tous ne goûtent pas ces instants privilégiés. Dans Les aphorismes sur la sagesse dans la vie,Schopenhauer nous rappelle que la recherche de la vie heureuse ne saurait être qu'un pis aller, car la non existence lui est préférable ,et il reste en cela

fidèle à la pensée exposée dans son grand ouvrage .La sagesse pratique de Schopenhauer ,de son propre aveu ,n'apporte rien de nouveau: « En somme, certainement les sages de tous temps ont toujours dit la même chose ... »20 .Nous verrons plus loin ,lorsque nous aborderons la question du déterminisme que cette sagesse toute relative,qui plus est, ne saurait être enseignée. Ainsi,la philosophie de Schopenhauer est incontestablement marquée par le tragique de notre condition;aspiration de l'homme au bonheur et à la connaissance mais à mesure qu'il progresse en ce sens,il s'aperçoit qu'il n'y parvient jamais vraiment. La philosophie tragique de Schopenhauer nécessite une intuition qui pénètre au coeur des choses et il n'existe pas vraiment d'enseignement pour ça. Le monde comme représentation ne pose pas de difficulté en ce sens qu'il s'accorde avec la vision kantienne de la réalité,en revanche ,il faut tourner son regard vers l'intérieur de soi pour y découvrir l'essence des phénomènes, la Volonté.

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"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus