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La politique budgétaire et la lutte contre la pauvreté en Côte d'Ivoire

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par Elisee Borid Barnard Gnamoy GNAMOY
Université d'Abomey Calavi - Maitrise en sciences économique 2004
  

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1.3) REVUE DE LITTERATURE ET METHOLOGIE

1.3.1) Une revue de littérature

La lutte contre la pauvreté est l'une des préoccupations des économistes. Depuis l'application des Programmes d'Ajustement structurel (PAS) et leurs échecs, lutter contre la pauvreté est devenu la priorité pour les Institutions de Bretton Woods. Cette revue de littérature s'attachera à présenter les concepts de la politique budgétaire et son rôle dans la réduction de la pauvreté, ensuite montrer la pauvreté sous toutes ses formes, et les stratégies pour la combattre.

La politique budgétaire constitue avec la politique monétaire, les principaux leviers de la politique économique. La politique budgétaire consiste à utiliser certains instruments tels que les dépenses publiques, l'endettement public et les prélèvements fiscaux pour influer sur la conjoncture économique. Elle s'appuie sur l'élaboration du budget de l'Etat qui n'est autre que la prévision de l'ensemble des recettes et dépenses de l'Etat pour l'année. De cette présentation succincte de la politique budgétaire, il ressort deux notions principales et importantes, que sont les recettes et les dépenses publiques. La règle veut que les recettes et les dépenses s'égalisent afin que le budget soit équilibré, un excédent ou un déficit selon les courants de pensée est applaudi ou décrié. Ces différentes conceptions ont donné naissance à une politique budgétaire qui utilise le solde budgétaire comme un instrument de politique économique en ce sens qu'il donne un reflet de l'activité économique. Ces différentes conceptions ont donné quatre approches de la politique budgétaire :

- le budget cyclique (G. MYRDAL) : le solde budgétaire déficitaire est souhaité s'il est étalé sur plusieurs années afin que les années excédentaires comblent les années déficitaires ;

- le budget compensatoire (A. LERNER) : le budget doit compenser un écart (permanent), entre l'épargne et l'investissement d'une insuffisance chronique de l'investissement privé ;

- la politique budgétaire anticyclique utilise le rôle régulateur du budget et se repose sur le jeu des stabilisateurs automatiques publics en vue d'agir sur l'activité économique. Cette politique tend à se transformer en une politique conjoncturelle discrétionnaire ;

- l'approche Keynésienne attribue un rôle au budget. Le solde budgétaire doit servir à la politique économique et selon les orientations politiques du moment, le budget doit relancer l'économie (budget en déficit) et budget d'austérité pour freiner l'activité économique.

Jusqu'à la crise de 1930, la gestion des finances publiques a eu pour principal objectif d'assurer le financement des services publics. Le volume des dépenses de l'Etat n'était considéré comme une variable susceptible d'influencer le niveau d'activité de l'économie. L'analyse de l'économiste britannique J. M. KEYNES a modifié cette conception soulignant l'impact de la politique budgétaire sur le niveau d'activité économique d'un pays.

Les recettes publiques proviennent de la politique fiscale. La fonction de la fiscalité est d'assurer le financement de la production des services traditionnels. Elle sert également à la redistribution du revenu. Elle est utilisée pour réduire les disparités sociales grâce au recours à la progressivité des taux d'imposition, à divers abattements et déductions pour les charges personnelles et familiales. Ainsi, l'Etat doit utiliser son pouvoir de taxation, de dépense et d'endettement pour réaliser une allocation des ressources.

Les recettes publiques financent les dépenses de l'Etat, qui sont les dépenses du secteur public engagées en vue d'un intérêt public. Les dépenses publiques sont les dépenses effectuées par l'Etat pour son fonctionnement et celles orientées vers les secteurs prioritaires (sociaux, sécurité) pour l'amélioration du bien-être des populations.

De JANVRY et al. (1991), D et L. DEMERY (1992), LIPTON et RAVALTON (1993) et AHO et al. (1997) ont tous montré l'impact social des dépenses publiques. Ils ont montré que les dépenses publiques permettent d'accroître la productivité et les profits des facteurs et par conséquent d'augmenter les revenus des ménages. Il ne faut surtout pas omettre de préciser que la dépense publique dépend de la politique budgétaire. Le budget devient donc un instrument d'exécution de la politique gouvernementale, principalement dans le domaine économique et social, car l'Etat par l'intermédiaire de son budget essaie de réduire l'inégalité de richesse, mais aussi de régulariser la croissance économique. La liaison ainsi ressortie permet de voir que la politique budgétaire a son rôle dans la lutte contre la pauvreté. Les dépenses publiques jouent un rôle majeur dans la lutte contre la pauvreté. Les effets de la politique budgétaire peuvent être appréhendés à travers ce schéma ci-dessous.

Schéma 1 : Effets de la politique budgétaire sur les ménages

Politique budgétaire

Niveau

Macroéconomique

Infrastructure économique

Dépenses sociales

Marché des biens et services

Niveau

Mésoéconomique

Marché des facteurs

Capital humain

Revenu des ménages

Niveau

microéconomique

Consommation

Accumulation des actifs produits

Source : D. et L. DEMERY (1992) et AHO et al. (1997)

En effet, ces dépenses publiques sont, avant tout, insérées dans une politique budgétaire qui a des effets sur les conditions de vie des ménages, lesquelles conditions de vie déterminent la catégorie sociale des ménages et les classent pour la grande majorité chez les pauvres.

Complexe dans ses déterminants et dans sa mesure, la pauvreté revêt de multiples facettes (économique, politique, sociale, culturelle, etc.) d'où les difficultés d'une définition standard satisfaisante. La pauvreté humaine recouvre l'idée d'insuffisance ou de manque bien plus divers que l'insuffisance de revenu.

La pauvreté se définit comme étant une insuffisance de ressources, matérielles ou immatérielles, nécessaires à la satisfaction des besoins essentiels d'un ménage ou d'individu. La plus connue est la pauvreté monétaire qui est l'absence ou l'insuffisance de revenu monétaire ou de moyens de communication. Il en découle donc deux notions : pauvreté absolue et pauvreté relative.

La pauvreté absolue renvoie à un seuil de pauvreté exprimé en valeur absolue et correspond à la non-satisfaction des besoins minimaux, alors qu'on parle de pauvreté relative pour des personnes qui sont bien loties que la majorité des autres membres de la même communauté. Par rapport au revenu, une personne se trouve dans la pauvreté absolue si son revenu est en deçà d'un seuil défini, mais elle est relativement pauvre si elle appartient à un groupe à faible revenu (AHOYO Adjovi, 2002). Un ménage ou un individu est frappé d'ultra pauvreté lorsqu'il consacre plus de 80% de ses revenus à l'achat de produits alimentaires pour sa consommation (PNUD, 1997).

D'un point de vue économique, la pauvreté se traduit par une faible dotation en capital physique, humain et financier, l'exclusion d'une frange importante des forces de travail de la nation, une productivité du travail réduite, une déperdition des capacités de production. L'inégalité ou l'absence d'accès aux connaissances technologiques nécessaires à l'utilisation de ce capital  du choix individuel des gens, quant à l'allocation du temps entre le travail et le loisir, entre la consommation et l'épargne et enfin l'inégalité des chances de s'en sortir (Z. MAÏGA, 1999).

Le combat de la pauvreté s'est engagé depuis longtemps avec d'illustres économistes et des institutions internationales. Des plans et stratégies de lutte ont été créés, certains des points convergent tandis d'autres se contredisent.

Selon R. MALTHUS, secourir les pauvres, c'est multiplier la pauvreté. En effet, pour lui, la réduction de la pauvreté est difficile puisque les hommes augmentent de façon géométrique tandis que la progression des ressources suit un rythme arithmétique. Par conséquent, les lois sur les pauvres et l'assistance sont condamnées à un échec car elles favorisent la multiplication des plus pauvres. Il reconnaîtra plus tard que le progrès technique s'accompagne de revenus élevés. Sa stratégie de lutte est la limitation des naissances. Toutefois, il défend l'idée de l'école gratuite et obligatoire car les lumières apportées au peuple sont la meilleure façon de lutter contre la pauvreté.

A. SMITH a fait une importante contribution en expliquant la relation entre croissance et la pauvreté. Il prétend que celle-ci pourrait se résorber en adoptant des politiques appropriées et en favorisant la croissance économique. Il pense que l'économie moderne a besoin de division de travail, mais qu'elle risque de diminuer les opportunités d'emploi des travailleurs pauvres et d'aggraver la pauvreté. Pour éviter cela, il a suggéré à l'Etat de fournir des moyens permettant d'adapter la main d'oeuvre au marché du travail (AHO et Al, 1997).

D. RICARDO a pour sa part soutenu que le progrès technique s'accompagne de salaires élevés et d'un déplacement de la main d'oeuvre de l'agriculture vers d'autres secteurs de l'économie, permettant de ce fait l'amélioration des conditions de vie des populations pauvres.

Pour SAMUELSON, les politiques de lutte contre la pauvreté s'articulent autour de deux points : l'Etat providence (pour assurer un niveau de vie minimum) et les programmes de garantie des revenus.

La plupart des débats sur la lutte contre la pauvreté mettaient l'accent sur le capital humain. SMITH considérait que de meilleurs soins permettent d'élever et la capacité de travail et le niveau des salaires qui améliorait la condition de vies des travailleurs. Les classiques préconisent des subventions à l'éducation de base qui permettent une meilleure formation et qui font croître la productivité et les initiatives privées.

A partir des années 40, les stratégies de lutte contre la pauvreté ont pris une nouvelle tournure tout en ayant des similarités avec les anciennes. Ces politiques préconisaient nécessaire de faire jouer à l'Etat un rôle dans la redistribution des richesses entre les agents économiques. Cette fonction de l'Etat s'est traduite par l'apparition du concept d'Etat-providence.

Dans les années 60, les actions de lutte contre la pauvreté portaient entre autres sur les réformes financières, l'éducation de masse, l'amélioration des soins de santé. A cette époque, on accordait peu d'attention à la croissance agricole comme moyen de lutte contre la pauvreté. Jusqu'au milieu des années 70, les objectifs des programmes de lutte contre la pauvreté tournaient autour du concept de redistribution des richesses.

A NAÏROBI en 1973, il a été demandé de revoir les priorités en matière d'aide au développement. L'aide au développement doit maintenant se tourner vers les projets de développement rural pour aider les plus démunis. Ces interventions doivent cibler l'éducation, la santé, etc.

Cette orientation stratégique opérée par les Institutions de Bretton Woods est le fruit d'une réflexion en profondeur dont l'origine tient à l'aggravation de la pauvreté dans de nombreux pays en développement dans un contexte marqué par l'échec des Programme d'Ajustement Structurel remettant en cause la légitimité de ces institutions. Face aux critiques, un saut qualitatif a été fait pour mieux lutter contre la pauvreté. De cette réorientation découle deux courants de pensée qui ont leurs forces et faiblesses.

La première de ces approches est celle de la Banque Mondiale, qui est l'approche de la croissance du revenu. Cette approche suggère de se concentrer sur l'augmentation des revenus et de laisser les individus choisir librement l'allocation optimale des ressources selon leurs préférences. Elle est fondée sur le développement humain (DH), la promotion de la croissance et la mise en place de filets de sécurité. L'investissement et le filet de sécurité sont au centre de la lutte car ils permettent d'atténuer les conséquences les plus graves de la pauvreté. La croissance est la clé de voûte d'une politique de lutte contre la pauvreté. La croissance passe par l'accès des pauvres aux facteurs de production à des conditions simples, l'accroissement des facteurs de l'agriculture et du secteur informel. La limite de cette approche est que l'augmentation du revenu des ménages ne se traduit pas nécessairement par une amélioration des conditions de vie et par un meilleur accès aux services de base.

La seconde approche, est celle du PNUD, qui est une approche en terme de besoins essentiels qui privilégient la fourniture des services sociaux de base. Elle se fonde sur le développement humain qui est un processus qui conduit à élargir la gamme des possibilités d'épanouissement qui s'offrent à chacun dans la société. Trois possibilités revêtent une importance capitale pour la réalisation de nombreuses autres, à savoir : vivre longtemps et en bonne santé, acquérir un savoir et avoir accès aux services nécessaires pour jouir d'un niveau de vie convenable. L'indicateur du développement humain qui est l'Indice du Développement Humain (IDH), est meilleur que les autres indicateurs. Mais, il n'en demeure pas moins qu'il reste déficient et imparfait puisqu'il ne capte pas la réalité et il ne prend pas en compte certains éléments d'appréciation tels que le niveau de démocratisation, la bonne gouvernance, etc. Cette approche a le mérite de promouvoir l'accès des populations aux services sociaux de base, mais ne tient pas compte des préférences de celles-ci. Elle est aussi coûteuse à mettre en place.

Les deux approches précédemment abordées (celles des Institutions de Bretton Woods) seront celles sur lesquelles notre étude s'appuiera, les autres analyses développées plus haut viendront en soutien à notre étude.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand