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Droits du patient soigné sous contrainte

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par Noémie ROZANE
Paris XI - Faculté Jean Monnet - Master 2 droit de la responsabilité médicale 2011
  

Disponible en mode multipage

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Année universitaire 2010 -- 2011

Master II Droit de la responsabilite medicale

Mémoire de stage

« Droits du patient

soigné sous contrainte »

 

Noémie ROZANE

 

Directeur de mémoire Monsieur Grégory MAITRE Maitre de conferences

Faculté Jean Monnet

 

Maitre de stage

Madame Ange-Marie HERRER

Char~ie des droits des patients Hopital Paul Brousse

Je tiens à remercier Grégory MAITRE pour sa disponibilité, sa patience et ses conseils avisés.

Je remercie Ange-Marie HERRER pour sa compréhension, sa compétence et son aide précieuse.

Je remercie Martine GAUTHIER et Stéphanie COLAS pour leur gentillesse et leur bonne humeur, ainsi que Christine FRANSISCO et Brigitte MENTREL.

Je remercie les cadres de santé, infirmiers, soignants qui m'ont fait découvrir le fonctionnement et la réalité des services de l'hôpital Paul BROUSSE.

Je remercie mes « collègues stagiaires », Charles-Henri, Anaïs et Florian, que j'ai eu grand plaisir à connaitre davantage.

Merci à toutes ces personnes qui ont rendu ce stage enrichissant et qui ont contribué à mon épanouissement, tant personnel que professionnel.

Je tiens également à remercier ma mère pour son soutien et sa présence, malgré l'éloignement.

A la memoire de mon pere,

Présentation du stage

Le présent mémoire a été réalisé à l'occasion d'un stage de trois mois effectué au sein de la Direction de la Qualité et des Droits du Patient à l'hôpital Paul Brousse.

L'hôpital Paul Brousse, situé à Villejuif, est un établissement de santé relevant de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris. Suite à la réorganisation hospitalière imposée par la loi HPST, il a été regroupé au sein des Hôpitaux Universitaires Paris-Sud.

C'est un établissement rassemblant plusieurs spécialités médicales telles que les pathologies hépatobiliaires, la cancérologie, la gériatrie et soins palliatifs, l'addictologie et la psychiatrie.

Durant ce stage, j'ai eu la chance de m'imprégner du fonctionnement de l'hôpital et de ses services médicaux et administratifs, et de me familiariser avec la prise en charge des personnes vulnérables et notamment des patients hospitalisés dans le service de psychiatrie.

Cela a été possible grâce à la visite des services concernés, la communication avec les soignants et la rencontre avec les patients du service de psychiatrie, l'instauration d'une relation professionnelle avec la mandataire judiciaire à la protection des majeurs et l'élaboration d'un projet de staff hospitalier concernant la réforme de la protection des majeurs vulnérables.

Par ailleurs, il m'a été confié la rédaction du rapport annuel de la Commission des Relations avec les Usagers et de la Qualité de la Prise en Charge, ainsi que des missions ponctuelles d'information des patients et de leur famille, de traitement des réclamations et des demandes de dossiers médicaux.

J'ai également participé à des réunions diverses au sein de l'hôpital et du groupe hospitalier, ainsi qu'à des conférences en lien avec la qualité de la prise en charge des usagers.

PARTIE I. L'amenagement des droits du patient soigné sous contrainte

Section I. L'ajustement de l'information du patient en psychiatrie

A - Le droit fondamental à l'information

B - L'adaptation des informations de santé

Section II. L'absence de consentement du patient en psychiatrie

A - Le consentement limité du patient hospitalisé sous contrainte

B - Le consentement limité de la personne soignée en psychiatrie ambulatoire

PARTIE II. La protection du patient hospitalisé sous contrainte

Section I. La protection des droits de la personne hospitalisee sous contrainte, propre au fonctionnement hospitalier

A - La protection juridique des patients en psychiatrie

B - Les instances hospitalières de protection des patients en psychiatrie

Section II. La protection de la personne, propre aux hospitalisations psychiatriques

A - La protection de l'intégrité du patient souffrant de troubles mentaux

B - La volonté de se prémunir contre les comportements maltraitants

INTRODUCTION

L'hospitalisation sous contrainte trouve ses fondements dans la loi sur les aliénés du 30 juin 1838. Deux modalités d'internement ont été créées : le placement volontaire s'appliquait sur demande des proches lorsque les soins étaient rendus nécessaires par l'état de la personne. En cas de dangerosité avérée du malade, le Préfet décidait de la mise en oeuvre d'un placement d'office.

Cette loi ne prévoyait pas l'hospitalisation libre, qui a été instaurée par la réforme du 27 juin 1990 relative aux droits et à la protection des personnes hospitalisées en raison de troubles mentaux et à leurs conditions d'hospitalisation, aujourd'hui encore en vigueur.

Ce n'est qu'à la fin du XXème siècle que l'on commence à parler de « droits » et de « protection ». Il s'agit d'une loi précurseur dans le domaine de la protection des droits du patient, dont la consécration est intervenue le 4 mars 2002 avec la loi Kouchner relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé. Cette loi générale crée des droits pour tous les patients et renforce la protection des personnes hospitalisées sous contrainte.

Aujourd'hui l'hospitalisation libre est devenue le principe. Le malade consent aux soins psychiatriques et son hospitalisation constitue une démarche volontaire. Cette modalité d'hospitalisation n'est applicable que lorsque le patient est capable de discernement. Elle ne pose aucune difficulté, et ne sera donc pas traitée, car le patient en hospitalisation libre bénéficie en principe des mêmes droits que tout autre patient.

En revanche, il est parfois nécessaire de recourir à des modalités spécifiques d'hospitalisation propres à la psychiatrie en raison de la rupture de dialogue, de troubles comportementaux voire de dangerosité entrainés par la pathologie psychiatrique. Ainsi, pour préserver l'intégrité du patient lui-même et des tiers, il peut s'avérer indispensable de procéder à une hospitalisation sous contrainte, qui peut prendre la forme d'une hospitalisation à la demande d'un tiers ou d'une hospitalisation d'office, au cours desquelles les droits du patient sont limités.

Le projet de loi relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge introduit une nouveauté dans le paysage des soins sous contrainte puisqu'il prévoit la mise en oeuvre de soins psychiatriques en ambulatoire sans consentement.

Il apparait que la psychiatrie est une discipline médicale particulière, où l'on peut être soigné contre sa volonté, et voir ses droits et libertés limités voire anéantis.

De telles restrictions de libertés ne sont acceptables que si elles restent exceptionnelles et conditionnées à la nécessité de soigner une personne qui ne peut plus prendre soin d'ellemême et qui risque de porter atteinte à son intégrité physique ou à celle des autres.

Ce type de privations de liberté n'est justifié qu'à la condition que la protection des patients psychiatriques soit assurée efficacement. Cette problématique présente un intérêt tout particulier au moment où se développe la volonté de protéger encore plus efficacement les droits du patient et de réformer le système de soins psychiatriques.

A l'heure actuelle, la protection est prévue par les lois du 27 juin 1990 et du 4 mars 2002, et la question qui se pose est celle de l'étendue de la protection des patients soignés en psychiatrie par la combinaison de ces deux textes.

La loi de 1990, en plus de déterminer les conditions d'hospitalisation dans un service psychiatrique, commence à offrir des garanties aux patients qui y sont hospitalisés.

La loi Kouchner, quant à elle, réaffirme des droits fondamentaux et met en oeuvre des mécanismes de protection à destination de toute personne malade.

Il en résulte que le patient suivi en psychiatrie, qui bénéficie d'une protection minimale prévue par la première loi, n'est pas un patient ordinaire puisque la plupart des dispositions créatrices de droits de la loi du 4 mars 2002 lui sont inapplicables en l'état en raison de son incapacité de discernement et ne lui offrent pas une protection similaire à tout autre patient.

En conséquence, il est nécessaire de prévoir des aménagements aux droits fondamentaux en cas de pathologie psychiatrique qui retire au patient ses capacités personnelles (Partie I) ainsi qu'une protection spécifique à ce patient particulièrement vulnérable (Partie II).

Bien qu'une grande partie de ce travail se concentre sur l'hospitalisation d'une personne souffrant de troubles mentaux sans son consentement, il a été jugé nécessaire d'utiliser la notion de « soin » dans son intitulé. Le remplacement du mot « hospitalisation » par celui de « soin » dans le domaine psychiatrique est en effet d'une grande actualité puisque le projet de loi, en cours de discussion, relatif à la réforme de la psychiatrie, attache une importance toute particulière à la création de soins ambulatoires sous contrainte, en dehors d'une structure hospitalière.

PARTIE I

L'aménagement des droits du patient soigné sous

contrainte

Les patients disposent désormais de droits issus de la loi du 4 mars 2002. Mais pour certains d'entre eux, ces droits n'ont que peu d'effectivité en raison de la particularité de leur pathologie.

On ne peut prétendre appliquer à la lettre la loi Kouchner de 2002 au patient psychiatrique, parce qu'elle ne lui garantirait pas une protection effective. En effet, dans ce texte, priorité est donnée à l'information et au consentement du malade ; mais demander son consentement à un patient qui n'est pas capable de l'exprimer valablement reviendrait à nier son état de vulnérabilité et à ne pas lui apporter la protection particulière dont il a besoin.

Ainsi, l'information qui est donnée aux patients soignés en psychiatrie est ajustée à leur état de santé (Section I). Tel est le cas dans la situation où le malade n'est pas apte à recevoir l'information parce que son discernement est altéré.

De manière générale, l'objectif de l'information est de permettre au patient de comprendre son état de santé ainsi que les soins proposés afin qu'il puisse y consentir.

La contrainte en psychiatrie n'est en effet acceptable que si l'on a vainement tenté d'informer la personne pour recueillir son consentement, et si son refus ou son silence résultant de sa maladie est susceptible de le mettre en danger. On comprend bien que lorsque le malade ne dispose pas de toutes ses facultés mentales, son consentement est lui aussi sujet à un aménagement indispensable (Section II).

Section I. L'ajustement de l'information du patient en psychiatrie

L'obligation d'information du médecin est non seulement une obligation professionnelle posée par le Code de déontologie médicale, mais également un devoir légal.

Il s'agit d'une obligation très large qui a fait l'objet de nombreuses décisions jurisprudentielles. L'information doit porter tant sur le diagnostic et la maladie dont est atteint le patient, que sur les traitements et soins envisagés ainsi que sur leurs risques.

Depuis la loi Kouchner, l'obligation d'information du médecin à son patient s'est déployée pour devenir un droit fondamental du patient (A) à laquelle on ne peut déroger que dans des cas très précis, notamment en psychiatrie (B).

A -- Le droit fondamental a l'information

L'information est un droit affirmé dans de nombreux textes, nationaux et internationaux : elle est consacrée notamment dans la déclaration des droits des patients en Europe, la Convention de bioéthique du Conseil de l'Europe, le Code de déontologie médicale et le Code de la santé publique.

Au fil du temps, l'information médicale est devenue un droit fondamental auquel on ne peut déroger que dans de rares cas. Il s'agit donc d'un principe général applicable dans toute relation médicale (1) et certains patients, tels que les personnes hospitalisées sous contrainte, bénéficient d'ailleurs d'une information particulière (~).

1) Le principe de l'obligation d'information

L'obligation d'information est prévue par l'article L.1111-2 du Code de la santé publique : « toute personne a le droit d'être informée sur son état de santé ».

Cette information est très large puisqu'elle « porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ». Il résulte de cet article que le patient est devenu un véritable coauteur des décisions concernant son état de santé, grâce à son droit à l'information qui lui permet de comprendre sa pathologie et de connaitre les thérapeutiques possibles.

L'information est donnée au patient dans le cadre d'une relation de soins et de confiance entre le médecin et son patient. Elle prend la forme de renseignements, d'appréciations ou de réponses à des interrogations.

Il résulte de l'article 35 du Code de déontologie médicale que l'information doit être donnée de manière « loyale, claire et appropriée ».

L'exigence de loyauté induit que le médecin doit donner l'information dans l'intérêt exclusif du patient ; elle ne doit pas être volontairement orientée par incitation, dissimulation ou mensonge.

De même, l'information doit être claire, c'est-à-dire intelligible pour le patient. Le médecin ne doit pas utiliser de termes techniques en informant un patient qui n'est pas capable de les comprendre. L'information donnée dans un langage trop complexe équivaut à une absence d'information car l'enjeu est la compréhension du patient.

Enfin, et c'est ce qui nous intéresse plus particulièrement, le médecin doit apprécier les facultés de compréhension de son patient et tenir compte de sa personnalité pour lui communiquer une information adaptée.

Il devra notamment informer le mineur et le majeur sous tutelle de manière adaptée à leur degré de maturité ou à leurs facultés de discernement.

Il en est de même pour le patient soigné sous contrainte qui recevra une information adaptée à ses facultés mentales.

En raison de la contrainte qu'il subit, celui-ci recevra même une information spécifique et renforcée.

2) Une information specifique donnee au patient hospitalise sous contrainte

L'hospitalisation sous contrainte étant une modalité de soins particulière, il convient de donner toutes les informations nécessaires au patient concerné. Il ne s'agit pas des informations relatives à la santé du patient, mais de celles concernant sa situation juridique et ses droits.

Comme dans tout service hospitalier, le patient a accès aux informations relatives à l'établissement de santé, notamment par voie d'affichage, y compris au sein du secteur fermé.

La question qui se pose est l'applicabilité des textes protecteurs des droits de l'homme à la situation du patient hospitalisé sans son consentement, et notamment de l'article 5 §2 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme1 et de l'article 9 §2 du Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques2, qui prévoient l'information des personnes « arrêtées ».

A priori, le vocabulaire utilisé suggère que ces dispositions ne concernent que le cas d'une arrestation pour un motif pénal, mais on peut valablement estimer qu'elles sont applicables dans la situation d'hospitalisation sous contrainte.

1 Article 5 §2, Convention Européenne des Droits de l'Homme : « Toute personne arrêtée doit être informée, dans le plus court délai et dans une langue qu'elle comprend, des raisons de son arrestation et de toute accusation portée contre elle ».

2 Article 9 §2, Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques : « Tout individu arrêté sera informé, au moment de son arrestation, des raisons de cette arrestation et recevra notification, dans le plus court délai, de toute accusation portée contre lui ».

En effet, la Cour Européenne des Droits de l'Homme a approuvé le fait que, sur le fondement de l'article 5 §2 de la Convention, « le requérant [ayant] dû faire face à un refus de la direction de l'établissement public de santé mentale où il avait été hospitalisé d'office de lui communiquer les documents administratifs le concernant, violant ainsi l'article susmentionné, les juridictions administratives ont condamné pécuniairement l'établissement et le gouvernement français a proposé un règlement amiable »3.

Cette application résulte de l'arrêt Van der Leer c/ Pays-Bas4, dans lequel la Cour de Strasbourg avait conclu à l'applicabilité de l'article susvisé aux personnes privées de liberté pour cause d' « aliénation ».

Ainsi, la personne hospitalisée sans son consentement doit être informée, dans le plus bref délai, des raisons de son hospitalisation.

En droit français, l'alinéa 2 de l'article L.3211-3 du Code de la santé publique dispose que la personne atteinte de troubles mentaux hospitalisée sans son consentement « doit être informée dès l'admission et par la suite, à sa demande, de sa situation juridique et de ses droits ».

Elle est notamment informée de la possibilité de former un recours contre la mesure d'hospitalisation dont elle fait l'objet et de formuler ses réclamations à la Direction de l'hôpital.

Ce droit à l'information constitue une garantie minimale qui compense, ou du moins relativise les désagréments de l'hospitalisation sous contrainte, car il permet au patient de connaître sa situation et de s'y opposer. Cela lui laisse la possibilité de s'exprimer et montrer son désaccord malgré ses troubles mentaux constatés médicalement, et constitue la preuve que l'internement n'est jamais une situation définitive et qu'il est possible de ?sortir? d'un hôpital psychiatrique.

Mais si le patient hospitalisé sous contrainte se voit remettre toutes informations utiles concernant son hospitalisation et ses droits, il en va autrement s'agissant des informations concernant sa santé.

3 CEDH, 30 septembre 2003, Loyen c/ France, n° 46022/99

4 CEDH, 21 février 1990, Van der Leer c/ Pays-Bas, n° 11509/85

B -- L'adaptation des inforrnations de santé

L'obligation d'information existe dans de nombreux domaines, tels que les relations contractuelles de vente, le secteur bancaire, et les rapports entre un avocat et son client. Elle est également présente dans la relation médicale entre un praticien et son patient. Même si elle s'est renforcée de manière générale, la particularité de l'obligation d'information médicale réside dans son adaptabilité. Le médecin pourra, s'il le juge nécessaire pour la bonne prise en charge de son patient, adapter les informations qu'il lui donne (1). C'est d'autant plus fréquent dans le domaine de la psychiatrie en raison de l'incapacité de discernement des patients. On retrouve également cette restriction de l'information à la suite des soins, lorsque le patient demande communication de son dossier médical (~).

1) La nécessité thérapeutique d'adapter ,'inforrnation

'Dire la vérité, ici comme ailleurs, ce n'est pas transmettre sau vagement une information exacte ou probable dont on serait quitte une fois pour toutes, dire la vérité, c'est aussi évaluer les effets que son dire produit dans une situation donnée pour les sujets nécessairement singuliers. Faute de quoi le praticien se destituerait de sa fonction thérapeutique et de la dimension éthique de son acte »5.

L'article L.1111-2 du Code de la santé publique, relatif à l'obligation d'information médicale, ne prévoit pas le cas particulier du patient hospitalisé sans son consentement. On y trouve néanmoins une disposition concernant les majeurs sous tutelle qui précise que ces personnes ont le droit de recevoir elles-mêmes une information et de participer à la prise de décision les concernant. Mais il est impossible d'assimiler le majeur juridiquement protégé et le patient soigné sous contrainte, car bien que ce dernier soit incapable de discernement, il est fréquent qu'il ne soit pas placé sous une mesure de protection juridique.

5 Roland Gori, Marie-José Delvolgo

La question est alors celle de savoir si le patient psychiatrique peut réellement recevoir toute l'information qui concerne son état de santé.

Lors du colloque de lancement sur le thème « 2011, année des patients et de leurs droits », qui a eu lieu le 4 mars 2011, a été diffusée une vidéo dans laquelle Bernard Kouchner disait que toute vérité n'est pas bonne à entendre, qu' « on ne peut pas dire à un fou qu'il est fou ».

C'est une manière abrupte d'affirmer que le patient soigné en psychiatrie n'est parfois pas apte à recevoir l'information, simplement parce qu'elle ne lui serait pas supportable.

Selon la jurisprudence, l'information médicale doit être « appropriée »6. Il convient parfois de limiter son étendue lorsque le patient n'est pas en mesure de supporter l'information donnée et que celle-ci empêcherait la bonne efficacité des soins. Cette limitation thérapeutique est prévue à l'article 35 alinéa 2 du Code de déontologie médicale, qui dispose que « dans l'intérêt du malade et pour des raisons légitimes que le praticien apprécie en conscience, un malade peut être tenu dans l'ignorance d'un diagnostic ou d'un pronostic grave ». L'application de ce texte est d'autant plus justifiée dans le domaine de la psychiatrie, en raison des troubles particuliers dont souffrent les patients.

Ainsi, cette exception a été consacrée, en matière psychiatrique, par un arrêt de la première chambre civile du 23 mai 20007.

Dans cette affaire, un patient maniaco-dépressif reprochait à son psychiatre de ne pas lui avoir fait part de son diagnostic. Il a été débouté, au motif que le médecin est autorisé « à limiter l'information de son patient sur un diagnostic ou un pronostic grave » pour des motifs légitimes et dans l'intérêt du patient. En l'espèce, « la révélation de ce diagnostic devait être faite avec prudence compte tenu de l'alternance des phases mélancoliques et d'excitation maniaque ; qu'ayant ainsi souverainement estimé que l'intérêt du patient justifiait la limitation de son information quant au diagnostic, la cour d'appel a pu décider que le praticien n'avait pas commis de faute ».

6 Cass, Civ. 1ère, 14 octobre 1997, n° 95-19609

7 Cass, Civ. 1ère, 23 mai 2000, n° 98-18513

Il s'agit d'une limitation thérapeutique de l'information qui est totalement justifiée pendant la période des soins pour assurer l'efficacité de la prise en charge du patient.

Mais il existe également une spécificité concernant l'information après les soins, lorsque le patient demande la communication de son dossier médical.

2) L'acces encadré du patient en psychiatrie a son dossier medical

Depuis la loi du 4 mars 2002, le principe, affirmé à l'article L.1111-7 du Code de la santé publique, est l'accès direct du patient à ses documents médicaux8.

En revanche, le même article prévoit une exception dans son alinéa 4 : « la consultation des informations recueillies, dans le cadre d'une hospitalisation sur demande d'un tiers ou d'une hospitalisation d'office, peut être subordonnée à la présence d'un médecin désigné par le demandeur en cas de risques d'une gravité particulière ».

Il convient de saluer cette initiative législative d'introduire une exception dans ce domaine puisqu'en psychiatrie, l'accès direct aux informations, sans explications ni interprétations, peut être néfaste. Elle est en effet susceptible de freiner le processus de guérison en générant une incompréhension de la part du patient, déjà vulnérable.

Encore une fois, cette limitation de l'accès aux informations médicales constitue une mesure protectrice du patient, qui n'est concevable que lorsque la personne est réellement malade et qu'il en va de son intérêt de ne pas recevoir l'information.

Des interrogations apparaissent, et notamment celle de l'appréciation du risque. A partir
de quel moment l'accès aux informations médicales constitue-t-il un « risque d'une gravité
particulière » ? La réponse est donnée par une circulaire du 14 février 20059, qui indique

8 Art. L.1111-7, CSP : « Toute personne a accès à l'ensemble des informations concernant sa santé détenues [...] par des professionnels et établissements de santé, qui sont formalisées ou ont fait l'objet d'échanges écrits entre professionnels de santé. [...] Elle peut accéder à ces informations directement ou par l'intermédiaire d'un médecin qu'elle désigne et en obtenir communication ».

9 Circulaire DGS/SD6 n°2005-88 du 14 février 2005 relative à la commission départementale des hospitalisations psychiatriques

que « la gravité particulière s'apprécie en liant la nature des informations de santé présentes dans le dossier médical à l'état de santé de la personne ».

Il s'agit donc de porter une appréciation médicale sur l'état du patient. Dès lors, n'existe-til pas un risque de développement d'une pratique consistant à invoquer, dans tous les cas d'hospitalisation sous contrainte, l'existence d'un danger, et donc conditionner l'accès aux données médicales à la présence d'un médecin ? Ce comportement abusif pourrait en effet prémunir les médecins contre les risques de procédure judiciaire à leur encontre, qui seraient en mesure de dissimuler d'éventuelles fautes.

Toutefois, ce risque est à nuancer puisque la psychiatrie reste un domaine dans lequel le nombre de recours juridictionnels reste faible par rapport à d'autres disciplines médicales en raison de l'absence presque totale des gestes techniques dommageables.

Les spécificités de la psychiatrie existent non seulement en matière d'information, mais également - et surtout - s'agissant du consentement du patient.

Section II' L'absence de consentement du patient en psychiatrie

Nous l'avons vu, l'information donnée au patient lui permet avant tout de comprendre son état de santé et les traitements possibles pour y consentir.

Même si les soignants mettent tout en oeuvre pour donner une information adéquate au patient hospitalisé dans un service psychiatrique, il en va autrement s'agissant de son consentement qui se verra limité non seulement avant l'hospitalisation mais également au moment des soins (A). Cette conception résulte de la loi de 1990 qui permet de passer outre le consentement d'une personne souffrant de troubles mentaux à certaines conditions.

Un projet de loi déposé en mai 2010 a vocation à faire évoluer les modalités de soins apportés aux patients psychiatriques, qui pourront être également contraint d'accepter des soins en ambulatoire, en dehors d'une structure hospitalière ( ).

A -- Le consentement limité du patient hospitalisé en psychiatrie

La psychiatrie est une discipline médicale à part, en ce sens que toute personne risque d'être hospitalisée sans son consentement.

Il existe bien évidemment un encadrement à ces hospitalisations sous contrainte afin d'éviter les internements abusifs. Mais malgré cette protection, il s'agit d'un mode d'hospitalisation portant atteinte à la liberté de la personne, qui peut être hospitalisée sans son consentement y compris dans le cas où elle ne présente un danger que pour ellemême (1).

Par ailleurs, durant l'hospitalisation, pour assurer le traitement médical d'une personne hospitalisée sous contrainte, qui est par définition réticente à se soigner, il convient le plus souvent de lui imposer les soins que son état de santé nécessite (~).

1) L'absence de recueil du consentement en vue des soins : les hospitalisations sous contrainte

L'hospitalisation d'une personne sans son consentement peut intervenir soit d'office, soit à la demande d'un tiers. Il s'agit de l'exception la plus importante au consentement aux soins, qui n'est concevable que dans des cas bien particuliers.

L'hospitalisation sur demande d'un tiers (HDT) ne peut intervenir que si les troubles de la personne rendent impossible son consentement et si son état impose des soins immédiats assortis d'une surveillance constante en milieu hospitalier10.

L'hospitalisation d'office (HO) n'est prononcée par l'autorité administrative qu'à l'encontre des « personnes dont les troubles mentaux nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l'ordre public »11.

10 Article L.3212-1, Code de la santé publique

11 Article L.3213-1, Code de la santé publique

Ces hospitalisations n'interviennent que si la personne internée est susceptible de porter atteinte à son intégrité physique ou à l'ordre public, ces éléments étant appréciés par un médecin.

En plus d'être justifiée par des motifs médicaux précis, l'hospitalisation d'une personne sans son consentement est soumise à des formalités particulières : doivent être valablement établis soit la demande du tiers, soit l'arrêté préfectoral, en vue de l'hospitalisation sous contrainte, ainsi que des certificats médicaux constatant l'existence du trouble mental et la nécessité d'un internement.

Mais ces règles procédurales sont susceptibles d'évoluer dans les mois à venir car le projet de réforme des soins psychiatriques tend à faciliter l'internement des malades en prévoyant qu'une personne serait susceptible d'être hospitalisée sans son consentement « en cas de péril imminent pour [sa] santé », sur la base d'un seul certificat médical, et sans intervention d'un tiers.

Il s'agit d'une mesure encore plus restrictive du consentement de la personne, critiquable en raison du rôle discrétionnaire d'un seul médecin dans la décision d'internement.

Il apparait, en cas d'HO et d'HDT, qu'à aucun moment le consentement de la personne concernée n'est recherché. Mais, conformément à la Convention Européenne des Droits de l'Homme, cette privation de liberté est légitime puisqu'elle est destinée à prodiguer des soins nécessaires. En effet, « nul ne peut être privé de sa liberté, sauf [...] s'il s'agit de la détention régulière d'un aliéné [...] »12.

La question qui se pose alors est celle d'un refus du patient d'être acheminé vers l'établissement d'accueil. Les ambulanciers ont-il le pouvoir de le déplacer malgré sa résistance ? Faut-il faire appel aux forces de l'ordre qui useront des moyens à leur disposition ?

12 Article 5 §1, Convention européenne des droits de l'Homme

A priori, cela est susceptible de constituer un traitement inhumain et dégradant au sens de l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'Homme. Mais la Cour de Strasbourg nous éclaire en considérant que « le port des menottes ne pose normalement pas de problème [...] lorsqu'il est lié à une détention légale et n'entraîne pas l'usage de la force, ni l'exposition publique, au-delà de ce qui est raisonnablement considéré comme nécessaire »13. Le Code de procédure pénale français nous permet de penser que peut être « considéré comme nécessaire », l'usage des menottes sur une personne dangereuse pour elle-même14.

Ainsi, on en déduit que le recours aux forces de l'ordre peut être légitime lorsque l'hospitalisé sous contrainte refuse son transfert.

On constate que la contrainte en vue des soins est très large et que la nécessité d'une hospitalisation pour motif psychiatrique permet même de justifier l'intervention de la police ou la gendarmerie.

Mais la contrainte n'existe pas uniquement en amont des traitements. Dans cette spécialité médicale, la réussite des soins est parfois subordonnée à l'absence de recueil du consentement au cours des soins.

2) L'absence de recherche du consentement au cours des soins : une particularite des soins psychiatriques

Le principe est celui du consentement du patient pour chaque acte médical.

Conformément à ce principe, certains soins psychiatriques ne peuvent pas être prodigués sans l'accord du patient, même en cas d'hospitalisation sous contrainte.

13 CEDH, 14 novembre 2002, Mouisel c/ France, n° 67263/01

14 Article 803, Code de procédure pénale : « Nul ne peut être soumis au port des menottes ou des entraves que s'il est considéré soit comme dangereux pour autrui ou pour lui-même, soit comme susceptible de tenter de prendre la fuite ».

C'est notamment le cas de la sismothérapie, traitement par électrochocs de la dépression résistante aux médicaments traditionnels. Le consentement est systématiquement recherché en raison de la particularité de tels traitements.

Mais concernant les soins les plus nécessaires, le refus de soin, pourtant consacré par la loi Kouchner, n'existe pas pour le patient hospitalisé sous contrainte en raison de ses troubles mentaux, et des médicaments pourront lui être administrés contre sa volonté.

De même, ce patient pourra être placé en chambre d'isolement et faire l'objet d'une contention physique, « lorsque l'hospitalisation dans une unité fermée et les traitements médicamenteux ne suffisent pas à réduire le risque lié à ses symptômes »15.

Il s'agit d'une réduction considérable de la liberté de la personne par la restriction ou la maîtrise de ses mouvements au moyen d'un dispositif mécanique, qui nécessite un cadre médical, législatif et institutionnel. En tant qu'acte thérapeutique, la contention doit être réalisée sur prescription médicale après appréciation du rapport bénéfice/risque, pour une durée limitée. Une surveillance médicale doit être mise en oeuvre et la sécurité du patient assurée.

Là encore, le patient et sa famille seront informés de la mesure qui va être mise en place.

La contention ne peut intervenir que lorsque le patient est hospitalisé sous contrainte. Elle est donc impossible pour un patient en hospitalisation libre, et inconcevable lorsque le patient est soigné par son psychiatre « de ville ».

En effet, à l'origine, la personne souffrant de troubles mentaux, si elle n'est pas hospitalisée, est libre de prendre ou non son traitement médical.

Désormais, un projet de loi, qui est encore en discussion au Parlement, prévoit l'instauration de soins sans consentement en ambulatoire.

15 Dr D. Touitou et Mme C. Lavault-Bouette, Bonnes pratiques de la contention en unité fermée

B -- Le consentement limits de la personne suivie en psychiatrie ambulatoire

Le projet de loi relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge, déposé devant le Parlement au printemps 2011, a introduit un nouveau mode de soins psychiatriques : les « soins sans consentement » en ambulatoire (1). Il a suscité de vives critiques car il est considéré comme un projet qui prévoit un « traitement sécuritaire des malades mentaux »16 (~).

1) De l)hospitalisation sans consentement aux soins sans consentement

Le projet de loi relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge a été proposé en Conseil des Ministres en mai 2010 et la navette parlementaire a été initiée au mois de mars 2011.

Il réforme les soins psychiatriques et a vocation à renforcer les droits des patients souffrant de troubles mentaux.

Il est prévu qu'au cours d'une hospitalisation sous contrainte « classique », le dispositif des sorties d'essai disparait ; seules des sorties de courte durée subsistent, notamment pour effectuer des achats personnels ou assister à un évènement familial.

L'innovation la plus importante réside dans le fait qu'on ne parle plus d'hospitalisation mais de « soin » psychiatrique. Il s'agit d'un élargissement de la prise en charge des personnes souffrant de troubles mentaux sans leur consentement, puisqu'il permet d'imposer des traitements aux malades psychiatriques contre leur volonté en dehors d'une structure hospitalière.

Lorsqu'une personne se voit imposer des soins psychiatriques en ambulatoire sans son consentement, elle fait d'abord l'objet d'une période d'observation et de soins initiale sous la forme d'une hospitalisation complète d'une durée de 72 heures.

16 Appel du Collectif des 39 contre la Nuit Sécuritaire. Réforme de la psychiatrie : une déraison d'Etat.

Durant cette période, deux certificats médicaux « constatant l'état mental de la personne et confirmant ou non la nécessité de maintenir les soins » sont établis, et un protocole de soins est proposé lorsque ces certificats ont conclu à la nécessité de prolonger les soins.

Il s'agit d'une modalité de soins très liberticide, dans le sens où un seul médecin pourrait décider de la contrainte dans le soin pour son patient. En effet, le texte entend « simplifier l'entrée dans le dispositif » en exigeant non pas deux certificats médicaux mais un seul et en ouvrant l'admission sans qu'il y ait de trouble grave à l'ordre public ni de tiers la demandant.

On peut dès lors s'interroger sur le fait de savoir si cela ne constitue pas une atteinte abusive à la liberté individuelle.

2) Une nouvelle modalité de soins psychiatriques critiquable

La première crainte suscitée par le projet de réforme des soins psychiatriques est le tournant sécuritaire que ces derniers sont susceptibles de prendre. Certains psychiatres et associations voient les soins sous contrainte en ambulatoire comme un nouvel outil de contrôle social des malades mentaux.

Cette peur est justifiée puisque le projet de loi est apparu dans un contexte où les malades psychiatriques semblent être stigmatisés et vus comme dangereux du fait de récents faits divers17. Nora Berra le dit elle-même dans son discours à l'Assemblée Nationale le 18 mars 2011 : « ce texte et les dispositions qu'il comprend poursuivent [...] un objectif de sécurité ». Cet objectif de sécurité vise-t-il à protéger le patient ou uniquement la société ? La Commission Nationale Consultative des Droits de l'Homme s'est prononcée et elle aussi fait état d'une crainte selon laquelle la réforme renforce au-delà de l'indispensable la contrainte pesant sur les malades.

17 Notamment, le « drame de Pau » survenu en décembre 2004 à l'hôpital psychiatrique de Pau où une aidesoignante et une infirmière ont été tuées par un patient.

Mais au regard de l'échec de certains traitements et du nombre croissant de suicides, et pour espérer assurer un suivi plus efficace des patients, une réforme est nécessaire. Le projet de loi discuté actuellement est bien fait en ce sens que les soins ambulatoires « forcés » constituent un outil thérapeutique efficace pour accompagner des patients en rupture de soins.

En revanche, son application pose des difficultés.

Le projet n'est pas abouti sur la question de la mise en oeuvre et la gestion de la contrainte en dehors d'un hôpital. En effet, comment forcer une personne à prendre ses médicaments et à se soigner alors qu'elle est « en liberté » ? Il semble impossible d'assurer une surveillance permanente des patients soignés sans leur consentement en ambulatoire. Pourraient leur être imposées la venue régulière de soignants à leur domicile et l'obligation de se présenter à des consultations très fréquentes, mais cela ne garantirait pas le respect, à la lettre, du traitement qui leur serait imposé. Le projet de loi présente des lacunes à ce niveau puisqu'il ne se prononce pas sur ces modalités pratiques.

En outre, une telle contrainte serait susceptible d'altérer le lien de confiance nécessaire entre le psychiatre et son patient, puisque ce dernier se sentirait épié en permanence. De plus, il n'est pas certain que cette modalité de soins soit véritablement efficace puisqu'ici ne serait imposée que la prise de médicaments et non la thérapie par la parole, indispensable en psychiatrie.

Or il est évident que la contrainte n'est acceptable que si elle a pour but de soigner le malade incapable de prendre soin de lui-même.

Si la contrainte ne produit pas l'effet attendu, pour quelles raisons appliquer un texte susceptible d'avoir une efficacité thérapeutique moindre et allant à l'encontre des droits du malade ?

Même si la protection du patient soigné sous contrainte est avant tout assurée grâce à la stricte délimitation du champ de l'internement par la mise en oeuvre de règles procédurales encadrées et l'existence d'une nécessité thérapeutique, il convient de renforcer ses droits et sa protection en lui apportant des garanties spécifiques.

PARTIE II

La protection du patient hospitalisé sous contrainte

On a bien conscience que le patient souffrant d'un trouble mental est une personne vulnérable. Vulnérable parce qu'il ne dispose pas de toutes ses facultés mentales et qu'il risquerait de se blesser, vulnérable parce qu'il a peut-être décidé d'abandonner et de s'ôter la vie, mais également vulnérable parce qu'il est incapable de distinguer le bien et le mal et donc susceptible de porter atteinte à la sécurité d'un tiers.

Si les soins psychiatriques sous contrainte constituent une exception au respect du droit fondamental qu'est la liberté, on a vu qu'ils pouvaient être nécessaires pour protéger la société ainsi que le patient lui-même.

Il ne conviendra pas de développer la protection de la société par le biais des internements psychiatriques, mais de se cantonner à la question du respect des droits du patient soigné en psychiatrie. Il s'agit de droits bien souvent bafoués, non pas uniquement par le nécessaire aménagement du consentement et de l'information, mais surtout par les risques liés au fonctionnement hospitalier lui-même. En effet, le danger provient des éventuelles dérives maltraitantes de la part des soignants mais aussi de la proximité avec d'autres patients psychiatriques.

Il convient donc de les protéger contre les dérives hospitalières amplifiées par l'enfermement et la contrainte, en leur garantissant l'application de procédures spécifiques destinées à combattre ces risques.

Il est donc évident que l'adaptation des droits du patient aux personnes souffrant de troubles mentaux n'est pas suffisante pour leur assurer une protection efficace. Ainsi, l'hôpital apporte aux droits des personnes hospitalisées sous contrainte une protection efficace grâce à la mise en place de procédures et instances spécifiques (Section I). Les soins psychiatriques permettent également de protéger la personne elle-même (Section II) en lui imposant des soins, et c'est bien souvent le propre de la psychiatrie sous contrainte.

Section I. La protection des droits de la personne hospitalisee sous contrainte, propre au fonctionnement hospitalier

L'hôpital n'est pas qu'un lieu de soins. Il s'agit d'un lieu de vie où la prise en charge du patient est assurée non seulement au plan médical mais également au niveau administratif. En effet, on ne traite pas un patient vulnérable de la même manière qu'un patient qui a conservé toutes ses capacités mentales. De fait, l'hôpital assure une protection juridique des patients soignés dans un service psychiatrie (A) et garantit leur accès à des instances protectrices adaptées ( ).

A -- La protection juridique des patients en psychiatrie

Les patients hospitalisés en psychiatrie sont des personnes vulnérabilisées par leur trouble mental mais aussi du fait de leur prise en charge particulière, qui leur est contraignante.

Il existe donc au sein de l'hôpital des procédures administratives et médicales particulières afin d'assurer leur protection (~). De plus, ils bénéficient de garanties qui leur permettent, malgré leurs troubles, de faire valoir leurs droits (~).

1) Les garanties apportees aux droits des patients hospitalises en psychiatrie

Le patient hospitalisé sous contrainte bénéficie de "droits minimums" définis à l'article L.3211-3 du Code de la santé publique. Il dispose notamment du droit « de prendre conseil d'un médecin ou d'un avocat de son choix, d'émettre ou de recevoir des courriers, de consulter le règlement intérieur de l'établissement et de recevoir les explications qui s'y rapportent, d'exercer son droit de vote, de se livrer aux activités religieuses ou philosophiques de son choix ».

En plus de ces "droits minimums", les hospitalisations sans consentement étant des mesures attentatoires à la liberté de la personne, des garanties doivent être mises en place pour permettre au patient de s'y opposer.

A cette fin, les patients hospitalisés sous contrainte sont informés de la possibilité de former un recours devant les tribunaux ou la commission départementale des hospitalisations psychiatriques visant à faire annuler la mesure d'hospitalisation ou y mettre fin.

Cette question est d'une actualité brûlante puisque lors de l'examen du projet de réforme des soins psychiatriques en 1ère lecture au Sénat, a été proposée l'introduction d'une disposition permettant l'unification du contentieux dans le domaine des hospitalisations psychiatriques. Le contentieux ne sera plus réparti entre le juge administratif, compétent pour apprécier la régularité de la procédure, et le juge judiciaire, qui se prononce sur le bien-fondé de la mesure d'hospitalisation ; seule l'autorité judiciaire pourra connaître du contentieux relatif aux soins psychiatriques18.

De plus, pour s'assurer des bonnes conditions de vie à l'intérieur du service, un magistrat est tenu de visiter périodiquement les établissements accueillant des personnes soignées pour des troubles mentaux.

18 Examen à l'Assemblée Nationale du projet de loi relatif aux soins psychiatriques - Compte rendu intégral de la première séance du 23 mai 2011 ( http://www.assemblee-nationale.fr/13/cri/2010-2011/20110186.asp)

Mais le Conseil constitutionnel, saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité en novembre 201019, a considéré que ces mesures n'assurent pas une protection suffisante des personnes hospitalisées sous contrainte et qu'il convient d'instaurer une protection supplémentaire.

En effet, « en prévoyant que l'hospitalisation sans consentement peut être maintenue audelà de quinze jours sans intervention d'une juridiction de l'ordre judiciaire, les dispositions de l'article L.33720 méconnaissent les exigences de l'article 66 de la Constitution », qui impose que toute privation de liberté soit placée sous le contrôle de l'autorité judiciaire.

Il conviendrait donc que le juge se prononce sur le bien-fondé du maintien du patient en hospitalisation sous contrainte dès lors que celle-ci se prolonge au-delà de quinze jours ; cette intervention judiciaire est prévue par le projet de réforme de la psychiatrie sous contrainte.

De même, lorsque le patient saisit le juge d'une demande de sortie ou d'annulation de la mesure d'internement, les textes internationaux protecteurs des droits de l'Homme prévoient que le tribunal doit statuer « sans délai sur la légalité de sa détention, et ordonne sa libération si la détention est illégale »21.

Cette exigence résulte également de la Convention européenne des droits de l'Homme, mais n'y est pas non plus définie.

Toutefois, la Cour européenne des droits de l'homme22 s'est prononcée sur la notion de bref délai, et a considéré qu'un délai de 24 jours ne répondait pas à l'exigence de « bref délai » exigé par l'article 5 §4 de la Convention.

Une partie de la protection de la personne est assurée par le biais de ses droits de recours devant le juge, mais également grâce à des pratiques institutionnelles adaptées à son état de santé et à sa prise en charge.

19 Conseil constitutionnel, 26 novembre 2010, n° 2010-71 QPC

20 Nouvel article L.3212-7 du Code de la santé publique : « Au-delà [de quinze jours], l'hospitalisation peut être maintenue pour des périodes maximales d'un mois ».

21 Article 9 §4, Pacte international relatif aux droits civils et politiques

22 CEDH, 27 septembre 2002, L.R c/ France, n° 33395/96

2) L'existence de procedures hospitalieres adaptees au mode d'hospitalisation

L'une des préoccupations majeures des patients hospitalisés en psychiatrie sans leur consentement concerne la gestion de leur argent et de leurs biens.

Un inventaire a lieu au moment de leur admission et le personnel de l'établissement invite les patients à déposer leurs valeurs à la régie de l'hôpital.

Ces mesures sont mises en oeuvre notamment pour protéger les biens du patient contre les vols, fréquents dans une unité psychiatrique.

Mais la procédure la plus dérogatoire en psychiatrie concerne la sortie du patient hospitalisé sans son consentement. L'objet de la psychiatrie sous contrainte est d'enfermer le patient afin de mieux le soigner. Mais parfois, ces personnes bénéficient d'une permission de sortie visant à favoriser leur réinsertion sociale.

Les patients peuvent demander une autorisation de sortie de courte durée « pour motif thérapeutique ou si des démarches extérieures s'avèrent nécessaires », prévu par l'article L.3211-1-1 du même code. Les patients qui bénéficient d'une telle autorisation doivent être accompagnés par un ou plusieurs membres du personnel soignant pendant toute la durée de la sortie.

Il existe un autre type de sortie, d'une durée plus longue et dans un but de réintégration. Les sorties d'essai sont prévues à l'article L.3211-11 du Code la santé publique, qui dispose : « afin de favoriser leur guérison, leur réadaptation ou leur réinsertion sociale, les personnes qui ont fait l'objet d'une hospitalisation sur demande d'un tiers ou d'une hospitalisation d'office peuvent bénéficier d'aménagements de leurs conditions de traitement sous forme de sorties d'essai », qui ne peuvent pas dépasser trois mois.

C'est le psychiatre qui prend la décision d'une sortie d'essai, cette décision devant être autorisée par le préfet en cas d'hospitalisation d'office.

Traditionnellement, la décision administrative relative à la sortie d'essai n'était pas susceptible de recours et le patient ne pouvait donc pas l'attaquer. Mais le Conseil d'Etat a opéré un revirement de jurisprudence le 24 septembre 201023 en estimant que les décisions autorisant ou refusant les sorties d'essai pouvaient être contestées par la voie du recours pour excès de pouvoir par les personnes qui ont un « intérêt à en demander l'annulation ».

On peut saluer cette décision qui contribue à accroître les garanties et les droits de la personne hospitalisée sans son consentement.

Ces sorties très réglementées peuvent paraitre attentatoires à la liberté d'aller et venir du malade, et on constate que le patient hospitalisé sous contrainte est traité bien différemment des autres patients.

On a le sentiment qu'une telle sortie temporaire s'apparente aux permissions accordées aux détenus, et que l'hospitalisation sous contrainte constitue une incarcération.

Mais là encore, il est inutile de procéder à des comparaisons inopportunes puisque l'enfermement dans un service psychiatrique intervient dans un contexte thérapeutique et n'a en aucun cas une vocation punitive, et les sorties ont pour objectif la réintégration du malade.

Au-delà de ces procédures spécifiques aux patients vulnérables du fait de leur trouble mental, il existe également des organes protecteurs des droits des patients hospitalisés sous contrainte intégrés dans le fonctionnement hospitalier. Il s'agit d'organes dont le seul but est de faire en sorte que les droits de ces personnes soient respectés.

23 CE, 1ère et 6ème sous-sections réunies, 24 septembre 2010, n° 329628

B -- Les instances hospitalieres de protection des patients en psychiatrie

Le juge est le premier protecteur des droits du patient en psychiatrie en contrôlant la régularité des procédures d'hospitalisation sans consentement.

La Cour Européenne des Droits de l'Homme, elle aussi, est intervenue sur la question et a notamment posé trois conditions minimales à la légitimité de l'internement, qui sont la réalité, l'ampleur et la persistance du trouble mental24.

Il existe également des instances hospitalières protectrices : il s'agit du Mandataire Judiciaire à la Protection des Majeurs (1), dont le rôle est d'assurer la protection de la personne vulnérable et de ses biens, et la Commission Départementale des Hospitalisations Psychiatriques (~) qui est chargée d'examiner la situation des personnes hospitalisées en raison de troubles mentaux au regard du respect des libertés individuelles et de la dignité des personnes.

1) Le Mandataire Judiciaire a la Protection des Majeurs

La loi du 5 mars 2007 a unifié le statut juridique des personnes pouvant être désignées par le juge des tutelles pour exercer une mesure de protection à titre professionnel. Ces intervenants sont soumis au statut du mandataire judiciaire à la protection des majeurs. Cette fonction peut être exercée par un préposé de l'établissement d'accueil inscrit sur la liste des mandataires judiciaires à la protection des majeurs.

Le mandataire exerce « à titre habituel » les mesures de protection des majeurs et assure la protection de la personne et de ses biens25.

24 CEDH, 24 octobre 1979, Winterwerp c/ Pays-Bas : « pour priver l'intéressé de sa liberté on doit, sauf dans des cas d'urgence, avoir établi son "aliénation" de manière probante. La nature même de ce qu'il faut démontrer devant l'autorité nationale compétente - un trouble mental réel - appelle une expertise médicale objective. En outre, le trouble doit revêtir un caractère ou une ampleur légitimant l'internement. Qui plus est, ce dernier ne peut se prolonger valablement sans la persistance de pareil trouble ».

Il représente ou assiste le majeur protégé dans les actes juridiques dont peuvent faire l'objet les biens du majeur.

Il doit également veiller à ce que la personne ait accès aux soins et bénéficie d'un suivi médical adapté, et s'assurer que le majeur protégé a bien reçu et compris l'information médicale. Il prend en compte la volonté du patient quel que soit le régime de protection mis en place et lui donne une information adaptée pour l'aider à prendre des décisions ou comprendre les choix effectués.

Il doit garantir le respect des droits fondamentaux de la personne, et notamment sa dignité, son intimité et sa vie familiale.

Le mandataire a l'interdiction de bénéficier des dispositions entre vifs ou testamentaires que les personnes dont ils assurent la protection auraient faites en leur faveur.

Ainsi, par son existence-même, cette institution est protectrice des patients juridiquement protégés, d'autant que l'existence de cette fonction au sein de l'établissement de santé dans lequel est hospitalisé le majeur protégé lui permet de remplir ses missions de manière plus efficace grâce à la proximité géographique.

Les majeurs protégés bénéficient également d'une protection renforcée, notamment grâce aux contrôles dont les mandataires judiciaires à la protection des majeurs font l'objet.

En effet, les textes prévoient une évaluation et un contrôle de leur activité par l'autorité judiciaire ; ils peuvent être dessaisis de leur mission en cas de manquement caractérisé à l'exercice de leurs fonctions et radiés de la liste des mandataires judiciaires.

Le Mandataire Judiciaire n'intervient que si le patient est placé sous tutelle, curatelle ou sauvegarde de justice. Or certains patients hospitalisés sous contrainte ne font pas l'objet d'une telle mesure de protection juridique.

Pour garantir le respect de leurs droits, il existe une autre institution qui a vocation à protéger tout patient hospitalisé sous contrainte dans un établissement de santé.

25 Article 415, Code civil

2) La Commission Départementale des Hospitalisations Psychiatriques

La Commission départementale des hospitalisations psychiatriques a été instaurée par la loi de 1990, et la loi Kouchner de 2002 a renforcé ses compétences.

Le patient hospitalisé sans son consentement dispose du droit de saisir cette commission qui est « chargée d'examiner la situation des personnes hospitalisées en raison de troubles mentaux au regard du respect des libertés individuelles et de la dignité des personnes »26.

Pour ce faire, la commission départementale des hospitalisations psychiatriques confère à ses membres le pouvoir de visiter les établissements accueillant des malades souffrant de troubles mentaux.

Elle est informée de toutes les hospitalisations sans consentement, de leur renouvellement et de leur levée, par le directeur d'établissement ou par le préfet. Au vu de ces informations, elle peut ordonner la levée d'une hospitalisation sur demande d'un tiers si celle-ci est injustifiée ou irrégulière.

Depuis la loi du 4 mars 2002, elle peut également obtenir « toutes données médicales nécessaires à l'accomplissement de ses missions ».

La circulaire du 31 mai 2002 relative au rapport d'activité de la commission départementale des hospitalisations psychiatriques dénonçait une activité marginale, ce qui faisait d'elle un outil à l'efficacité amoindrie.

Mais désormais, il ressort du rapport d'activité des commissions départementales, établi chaque année, que les commissions sont de plus en plus actives et efficaces.

Outre la protection des droits du patient, le domaine psychiatrique a vocation à protéger la personne elle-même.

26 Article L.3222-5, Code de la santé publique

Section II' La protection de l'integrite de la personne, propre aux hospitalisations psychiatriques

Le propre de la psychiatrie est de protéger la personne contre ce qu'elle pourrait s'infliger. Mais ce faisant, l'hospitalisation crée un risque pour le patient. De la même manière que le patient qui subit une intervention chirurgicale risque de contracter une infection nosocomiale, le patient hospitalisé en psychiatrie est confronté bien évidemment à ses démons intérieurs mais également aux troubles mentaux des autres patients.

Le risque de violence est accru dans un tel service médical. Il convient donc de protéger sa personne (A) et de mettre en place des procédures de lutte contre la maltraitance hospitalière (B).

A -- La protection de l'integrite du patient souffrant de troubles mentaux

La psychiatrie hospitalière présente des particularités par rapport à la psychiatrie ambulatoire. Les personnes qui consultent un psychiatre de ville ne subissent aucune contrainte dans leur démarche médicale. Au contraire, les patients hospitalisés sous contrainte le sont car ils présentent un risque soit pour la société ou leurs proches, soit pour eux-mêmes.

S'ils étaient considérés comme vulnérables à l'extérieur, ils le sont également à l'intérieur car ils côtoient d'autres patients eux aussi hospitalisés sans leur consentement et qui peuvent être dangereux.

Par conséquent, des mesures spécifiques sont prises pour protéger la personne hospitalisée en psychiatrie contre elle-même (1) et contre les tiers (~).

1) La protection de la personne contre elle-méme

Avant d'être un usager du système de soins, le patient hospitalisé sous contrainte est un être humain qui souffre. C'est du fait de sa pathologie psychiatrique qu'il souffre et du fait de sa souffrance qu'il est parfois incapable de prendre soin de lui-même.

C'est bien le propre de la psychiatrie que de soigner les maux de l'âme, mais peut-on réellement empêcher une personne de disposer de son corps et de sa vie alors qu'elle ne consent pas aux soins ?

C'est en tout cas l'objet des soins sous contrainte, qui interviennent lorsque les troubles mentaux rendent la personne incapable de discernement. On constate que cette modalité de prise en charge n'intervient que s'il en va de l'intérêt du malade.

Ainsi, au cours de l'hospitalisation, tous les moyens médicaux sont mis en oeuvre pour protéger la personne contre elle-même, alors même qu'elle n'y a pas consenti. Il s'agit des traitements médicamenteux mais également des mesures plus contraignantes qui peuvent aller jusqu'à la contention physique ou l'isolement.

Il est fait interdiction aux patients d'avoir à leur disposition certains objets qui peuvent être dangereux compte tenu de leur état mental, tels que les ceintures, lacets de chaussures ou les rasoirs.

Mais si la contrainte est parfois indispensable pour le bien du patient, il ne s'agit pas d'un acte anodin exempt de risques.

Ces risques proviennent bien évidemment de l'enfermement et de la cohabitation avec d'autres patients souffrant de troubles mentaux.

Ils sont également susceptibles de résulter de pratiques soignants négligentes, fréquentes dans un tel service hospitalier. Il s'agit donc de mettre en place des mesures de lutte contre des dérives et abus.

2) La protection du patient face aux éventuelles derives hospitalieres

De fait, la contrainte en psychiatrie est maltraitante. Elle va à l'encontre de la Charte de la personne hospitalisée qui reprend les principes de l'information et du consentement, sans prévoir l'exception de la contrainte.

Les soins psychiatriques sous contrainte sont également maltraitants du fait de certaines interdictions faites au patient pour des motifs thérapeutiques telles que l'interdiction de visite et de téléphone.

De même, les patients sont tenus de porter une tenue spécifique et vivent dans un environnement placé constamment sous vidéosurveillance. Leur droit à la vie privée et à l'intimité est donc presque nul au cours d'un séjour hospitalier.

Au sein de l'hôpital Paul Brousse et des autres hôpitaux de l'Assistance Publique - Hôpitaux de Paris, chaque patient sera bientôt tenu de porter un bracelet d'identification ; si cette mesure est presque unanimement acceptée par d'autres services, cela est très mal vécu par les malades soignés en psychiatrie, qui se sentent assimilés à la population carcérale. En effet, si le port d'un bracelet est tout à fait nécessaire pour un patient qui doit subir une intervention chirurgicale afin d'éviter les erreurs d'identification, cela est plus discutable au sein d'un service psychiatrique dans lequel les patients séjournent souvent pour des durées assez importantes et où le risque d'erreur est réduit.

Dans un tel service, des tensions apparaissent rapidement et la violence entre patients, amplifiée par l'enfermement et la vulnérabilité, n'est pas rare. De plus, il n'est pas aisé pour une personne atteinte d'une maladie psychiatrique de se retrouver face à d'autres patients souffrant de troubles mentaux bien différents des siens ; en effet, du fait de la tradition médicale française et des contraintes matérielles, « il n'y a pas de services par maladie, les schizophrènes dans un pavillon spécial, les déprimés dans un autre, les paranoïaques dans un autre encore »27.

27 Serge Blisko, député : intervention du 23 mai 2011 à l'occasion la 1ère lecture du projet de loi relatif aux modalités de soins psychiatriques à l'Assemblée Nationale

Pour palier à ces risques, il existe souvent au sein des services des ateliers d'art et des salles de sports destinés à améliorer leur qualité de vie et leur perception du secteur psychiatrique souvent vu comme hostile, froid et dangereux.

De plus, les patients psychiatriques peuvent être victimes du ?phénomène de contretransfert?. Il s'agit d'une réaction, par le thérapeute, aux actes commis par le patient, qui peut avoir des effets négatifs et maltraitants : par exemple, il est probable de voir un soignant réagir violemment ou négliger un criminel hospitalisé pour cause de troubles mentaux.

Ces patients peuvent également être victimes de comportements maltraitants du fait de leurs réactions imprévisibles, incomprises par le soignant et qui trouveront une réponse inappropriée.

Pour prévenir la maltraitance, des formations locales à destination des soignants en psychiatrie sont mises en place, notamment sur les thèmes de l'accueil des familles, de la gestion du stress et de leur propre agressivité.

Mais la lutte contre la maltraitance constitue également un objectif national et commun à tous les établissements de santé.

B -- La volonté de se prémunir contre les comportements maltraitants

La lutte et la prévention de la maltraitance à l'hôpital est devenue l'une des priorités de la Haute Autorité de Santé. Il s'agit d'un critère principal figurant dans son manuel de certification des établissements de santé rédigé en vue d'améliorer la qualité et la sécurité des soins.

La Direction des droits du patient des hôpitaux ainsi que la Commission de Relations avec les Usagers et de la Qualité de la Prise en Charge sont elles aussi sensibles à cet engagement contre les pratiques maltraitantes.

Dans cette optique, des procédures ont été instaurées pour lutter contre cette situation de fait (/). Pour renforcer cette démarche d'endiguement de la maltraitance et de promouvoir la qualité de la prise en charge des patients, est également apparue la notion de bientraitance (~).

1) Les procedures de lutte contre la maltraitance institutionnelle

Dans la circulaire du 23 juillet 2010 relative au renforcement de la lutte contre la maltraitance des personnes âgées et des personnes handicapées, il est écrit que « tout acte de maltraitance est intolérable, d'autant plus s'il est exercé sur une personne fragile [...] qui ne dispose pas nécessairement de la possibilité de se défendre ou de le dénoncer ».

Même si cette circulaire ne semble concerner que les personnes âgées et handicapées, il est évident qu'on peut la transposer aux personnes vulnérables du fait de leur trouble mental, certaines maladies psychiatriques étant d'ailleurs considérées comme un handicap.

Il est donc nécessaire de prévoir des procédures afin de dénoncer les pratiques maltraitantes.

Au sein de l'Assistance Publique - Hôpitaux de Paris, les évènements indésirables sont signalés sur l'Intranet de chaque hôpital par le biais du logiciel Osiris. Le signalement est obligatoire pour les membres du personnel qui sont témoins de maltraitances.

En plus de cette procédure locale peuvent être intentées des actions pénales ou disciplinaires à l'égard du ?maltraitant?.

« Le responsable de l'établissement peut engager une action disciplinaire face à une révélation d'une situation de maltraitance causée par un salarié de l'établissement »28.

La maltraitance peut être également sanctionnée sur le terrain pénal. En effet, la circulaire du 30 avril 2002 relative aux signalements de maltraitances envers les enfants et les adultes vulnérables oblige les établissements à signaler sans délai toute situation de maltraitance auprès du Procureur de la République.

La maltraitance est susceptible de diverses qualifications pénales, telles que l'omission de porter secours à personne en péril, les violences volontaires, l'abus de faiblesse, l'abus de confiance ou encore les agressions sexuelles ou les homicides volontaires. Concernant les atteintes à l'intégrité corporelle de la personne, la vulnérabilité du patient soigné en psychiatrie constitue une circonstance aggravante.

28

Fédération Hospitalière de France, Guide pratique Bientraitance/Maltraitance à usage des établissements et institutions

La question qui se pose en matière de signalement est celle du secret professionnel, dont sont tenus les membres du personnel soignant.

Mais le secret professionnel n'empêche pas le signalement d'un acte maltraitant à l'encontre d'un patient hospitalisé en psychiatrie, puisque l'article 226(14 du Code pénal prévoit expressément la possibilité pour une personne tenue au secret professionnel de dénoncer aux autorités judiciaires des faits de maltraitance commis sur une personne vulnérable. A l'article 434(3, on apprend qu'il s'agit d'une obligation : « le fait, pour quiconque ayant eu connaissance de mauvais traitements ou privations infligés [...] à une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison [...] d'une maladie ou d'une déficience physique ou psychique [...], de ne pas en informer les autorités judiciaires ou administratives est puni de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende ».

Toute personne témoin d'un fait de maltraitance à l'encontre d'une personne soignée en psychiatrie est donc dans l'obligation de le signaler.

Depuis quelques années a émergé la notion de bientraitance au sein des établissements de santé. Il ne s'agit plus seulement de lutter contre les maltraitances, mais on veut désormais promouvoir le respect du patient en tant que personne humaine.

2) L'essor de la notion de bientraitance

Ce mot, encore inconnu des dictionnaires, ne constitue pas le simple contraire de la maltraitance.

« La bientraitance, démarche volontariste, situe les intentions et les actes des professionnels dans un horizon d'amélioration continue des pratiques tout en conservant une empreinte de vigilance incontournable » : c'est un comportement qui vise à promouvoir le bien-être de l'usager en gardant à l'esprit le risque de maltraitance. Elle « trouve ses fondements dans le respect de la personne, de sa dignité et de sa singularité »29.

29 ANESM, La bientraitance : définition et repères pour la mise en oeuvre

Il s'agit de l'un des objectifs gouvernementaux dans le cadre du label « 2011, année des patients et de leurs droits ».

Pour définir ses contours, une mission ministérielle a travaillé sur la promotion de la bientraitance dans les établissements de santé. La Haute Autorité de Santé, elle aussi, a inscrit la bientraitance dans le manuel de certification des établissements de santé.

La bientraitance suppose la prise de conscience par les soignants de l'asymétrie de la relation entre le patient et l'équipe soignante, des besoins fondamentaux de la personne malade et de la souffrance qu'engendre la maladie.

Elle suppose également d'être à l'écoute des besoins et des demandes de l'usager, de garantir sa sécurité, de veiller au respect de son intimité.

Chaque personnel de l'établissement de santé est intégré dans cette démarche, qui ne concerne pas uniquement les soins mais également la prise en charge administrative du patient. Afin de diffuser une culture de la bientraitance, il convient de développer la formation de tous les professionnels.

Pour faire évoluer les pratiques, la Haute autorité de santé a décidé de renforcer les mesures visant à mieux prendre en compte les réclamations des usagers. Selon le docteur Yves Mocquard, neurologue et médecin médiateur, « il est essentiel de réagir à toutes les doléances écrites ou orales, exprimées par les patients ou leurs proches. Et d'apporter une réponse rapide à leurs interrogations ». C'est également ce que pense le directeur des affaires juridiques de l'hôpital de Colmar, qui ajoute que « bien souvent, ils ne sont pas dans une démarche contentieuse. [...] Ce qu'ils veulent, c'est savoir ce qui s'est passé et le simple fait de montrer qu'on écoute cette parole est déjà un facteur d'apaisement ».

CONCLUSION

La protection des patients hospitalisés sans leur consentement est subordonnée au respect de certaines exigences.

La mesure d'hospitalisation doit être régulière, c'est-à-dire soit demandée par un tiers y trouvant un intérêt soit ordonnée par l'autorité administrative. Elle doit également être accompagnée de certificats médicaux faisant état de la nécessité de soigner la personne contre son gré en raison de son incapacité de prendre soin d'elle-même ou dans un but de protection de la société.

En effet, une hospitalisation sous contrainte n'est possible que si l'état de la personne incapable de discernement impose des soins immédiats assortis d'une surveillance constante en milieu hospitalier ou si les troubles mentaux nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte de façon grave à l'ordre public.

Certains droits des patients doivent être adaptés dans le cas précis de l'hospitalisation sous contrainte : la personne ainsi hospitalisée l'est parce qu'elle est incapable de discernement et parce qu'elle doit être soignée. Elle n'est donc pas en mesure de recevoir l'information due à tout patient ni de consentir aux soins qui lui sont prodigués.

Toutefois, ce patient bénéficie de droits rendus spécifiques par la particularité de sa prise en charge, ainsi que de recours lui permettant de s'opposer à l'hospitalisation sous contrainte.

On voit également se développer des pratiques hospitalières protectrices du patient soigné contre sa volonté, telles que la lutte contre la maltraitance et la promotion de la bientraitance.

Les nombreux textes existant en cette matière font tous preuve de la volonté d'assurer une protection efficace de leurs droits et de leur personne. Pourtant, on constate d'importantes divergences entre cette volonté protectrice et les situations pratiques.

En outre, même si la contrainte est parfois nécessaire, on peut se poser la question de son efficacité. De nombreux psychiatres et soignants pensent à juste titre qu'un traitement n'est efficace que s'il est pris intentionnellement par le malade. Certains considèrent que si le patient ne s'intègre pas volontairement dans la démarche de soins, il ne parviendra pas à guérir de sa maladie et finira parfois par commettre l'irréparable.

Quelle légitimité avons-nous de contraindre un être humain à se soigner contre sa volonté et l'empêcher de disposer de son corps ? Le droit primordial n'est-il pas le droit à la liberté, cette liberté qui permet à l'Homme de faire ce qu'il entend de sa propre vie ? Henry de Montherlant30 disait à propos du suicide que c'est « le dernier acte par lequel un homme puisse montrer qu'il a dominé sa vie ».

30 Ecrivain et académicien français

TABLE DES MATIERES

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Introduction

PARTIE I. L'aménagement des droits du patient soigné sous contrainte

Section I. L'ajustement de l'information du patient en psychiatrie ..

A - Le droit fondamental à l'information

1) Le principe de l'obligation d'information

2) Une information spécifique donnée au patient hospitalisé sous contrainte

B - L'adaptation des informations de santé

1) La nécessité thérapeutique d'adapter l'information

2) L'accès encadré du patient en psychiatrie à son dossier médical

Section II. L'absence de consentement du patient en psychiatrie

A - Le consentement limité du patient hospitalisé sous contrainte

1) L'absence de recueil du consentement en vue des soins : les hospitalisations sous contrainte

2) L'absence de recherche du consentement au cours des soins : une particularité des soins psychiatriques .

B - Le consentement limité de la personne soignée en psychiatrie ambulatoire ...

1) De l'hospitalisation sans consentement aux soins sans consentement ..

2) Une nouvelle modalité de soins psychiatriques critiquable ...

PARTIE II. La protection du patient hospitalisé sous contrainte 25

Section I. La protection des droits de la personne hospitalisée sous contrainte, propre au fonctionnement hospitalier 26

A - La protection juridique des patients en psychiatrie 26

1) Les garanties apportées aux droits des patients hospitalisés en psychiatrie ... 27

2) L'existence de procédures hospitalières adaptées au mode d'hospitalisation 29

B - Les instances hospitalières de protection des patients en psychiatrie . 31

1) Le Mandataire Judiciaire à la Protection des Majeurs ... 31

2) La Commission Départementale des Hospitalisations Psychiatriques .. 33

Section II. La protection de la personne, propre aux hospitalisations psychiatriques 34

A - La protection de l'intégrité du patient souffrant de troubles mentaux 34

1) La protection de la personne contre elle-même 35

2) La protection du patient face aux éventuelles dérives hospitalières ... 36

B - La volonté de se prémunir contre les comportements maltraitants 37

1) Les procédures de lutte contre la maltraitance institutionnelle . 38

2) L'essor de la notion de bientraitance 39

Conclusion . 41

Table des matières 43

Bibliographie .. 45

Liste des annexes 49

Bibliographie

Textes officiels

- Loi sur les aliénés n° 7443 du 30 juin 1838

- Loi n° 90-527 du 27 juin 1990 relative aux droits et à la protection des personnes hospitalisées en raison de troubles mentaux et à leurs conditions d'hospitalisation

- Loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé

- Projet de loi relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge

- Loi n° 2007-308 du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs

Manuels et ouvrages

- Gilles DEVERS, Code des soins en santé mentale, Edition Lamarre, 2008

- Olivier DUPUY, L'information médicale. Information du patient et information sur le patient, 2e édition, Tout savoir - Les Etudes Hospitalières

- Francis Descarpentries, Le consentement aux soins en psychiatrie, L'Harmattan, 2007

- J.-L. SENON et C. JONAS, Droit des patients en psychiatrie, EMC-Psychiatrie, Elsevier, 2004

- J.-L. SENON, C. JONAS, Y. THORET et N. HORASSIUS-JARRIE, Responsabilité médicale et droit du patient en psychiatrie, Elsevier, 2004

- Olivier MOLIN, Les tutelles. La protection juridique des majeurs, Sofiac, 2009 - Laurent FRIOURET, Le droit de l'hospitalisation sous contrainte, 2008

Recommandations, rapports et avis

- Médiateur de la République, Pôle Santé Sécurité Soins, Droit et psychiatrie. Hospitalisation sans consentement des malades psychiatriques

- ANAES, Information des patients - Recommandations destinées aux médecins, mars 2000

- HAS, Modalités de prise de décision concernant l'indication en urgence d'une hospitalisation sans consentement d'une personne présentant des troubles mentaux, 2005

- Fédération Hospitalière de France, Guide pratique Bientraitance/Maltraitance à usage des établissements et institutions. « Que faire face à la révélation d'une situation de maltraitance ? », 2007

- ANESM, Recommandations de bonnes pratiques professionnelles. La bientraitance : définition et repères pour la mise en oeuvre, 2008

- Rapport de la mission ministérielle « Promouvoir la bientraitance dans les établissements de santé », janvier 2011

- Commission Nationale Consultative des Droits de l'Homme, Avis sur le projet de loi relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge, 31 mars 2011

Conférences, coioques et discours

- Colloque « 2011, année des patients et de leurs droits », Palais d'Iéna, 4 mars 2011

- Colloque « Bientraitance et psychiatrie : une grande claque aux idées reçues ! », Assemblée Nationale, 22 mars 2011

- Nora BERRA, Discours à l'Assemblée Nationale, Examen du Projet de loi « soins psychiatriques », 16 mars 2011

- Alain NICOLET, Psychiatre et Vice-président de l'UNCPSY, Bientraitance : la particularité de la psychiatrie

Documents institutionnels

- Charte de la personne hospitalisée

- Les Guides de l'AP-HP, Personnes vulnérables et domaine médical. Quels sont leurs droits ?

- Direction de la Qualité et des Droits du Patients, Hôpital Paul Brousse, Procédures d'hospitalisation sans consentement, août 2010

- Dr D. Touitou et Mme C. Lavault-Bouette, Bonnes pratiques de la contention en unité fermée, CHU Paul Brousse

Entretiens

- Entretien avec la Mandataire Judiciaire à la Protection des Majeurs de l'hôpital Paul Brousse - Visite du service de psychiatrie et entretien avec une cadre de santé

Décisions de justice

- Cour de cassation, Première chambre civile, 23 mai 2000

- Conseil d'Etat, 1ère et 6ème sous-sections réunies, 24 septembre 2010

- Conseil constitutionnel, décision n° 2010-71 QPC du 26 novembre 2010 - CEDH, 30 septembre 2003, Loyen c/ France

- CEDH, 21 février 1990, Van der Leer c/ Pays-Bas

Doctrine et articles de presse

- Assia Boumaza, avocate, Les lacunes de l'hospitalisation forcée, La Gazette Santé-social, juin-juillet 2006

- Info-sécu-santé, Psychiatrie, un projet de loi oublie « le droit des malades », Médiapart, 22 septembre 2010

- Alain Nicolet, Psychiatre et Vice-Président de l'UNCPSY, « Pour l'entourage des patients, le projet de loi est bien fait », Métro, 14 mars 2011

- Sophie Théron, Maître de conférences, De quelques remarques sur une évolution attendue de la prise en charge de la maladie mentale : l'instauration de soins ambulatoires sans consentement, Revue de droit sanitaire et social 2010 p. 1088

- Alexandre Graboy-Grobesco, Maître de conférences Les séjours psychiatriques sous contrainte et l'évolution des droits des malades, AJDA 2004 p.65

- Yann Favier, Maître de conférences, Les mandataires judiciaires à la protection des majeurs : une nouvelle profession sociale, Revue de droit sanitaire et social, sept-oct. 2008

- Laurent Friouret, Avocat, De nouvelles perspectives de recours contre les décisions relatives aux sorties d'essai des personnes hospitalisées d'office, AJDA, janvier 2011

Mémoires

- Saliha BOUKELLA, Hospitalisation sans consentement, Université d'Evry Val d'Essonne, 2010

- Sandra MONOD, Le juge administratif et l'hospitalisation sous contrainte, Université de Rennes I, 2008

- Clara DUBOIS, La sortie du patient hospitalisé en établissement public de santé, Université Paris XI, 2010

- Charlotte ARNAUD, Le droit à la sûreté personnelle en matière d'hospitalisation d'office, Université de Perpignan, 2010

Liste des annexes

Annexe 1. Document statistique : les mesures d'hospitalisation sans consentement en psychiatrie

http://www.sante.gouv.fr/IMG/pdf/etabsante2010-quelques-mesures.pdf

Annexe 2. Charte de la personne hospitalisée

http://www.sante.gouv.fr/IMG/pdf/charte_a4_couleur.pdf

Annexe 3. Charte de l'usager en santé mentale

http://www.serpsy.org/psy_levons_voile/droit/charte_usager.html

Annexe 4. Témoignages : les abus de la psychiatrie

http://www.ccdh.fr/Temoignages_r55.html http://www.lepost.fr/article/2007/10/09/1033451_psychiatrie-j-ai-eu-droit-a-l-humiliation-ultime.html

ANNEXE 1

Document statistique : les mesures d'hospitalisation sans

consentement en psychiatrie

ANNEXE 2

Charte de la personne hospitalisée

Universite Paris XI

Master 2 Responsabilite medicate

ANNEXE 3

Charte de l'usager en santé mentale

FEDERATION NATIONALES DES ASSOCIATIONS D'(EX) PATIENTS EN PSYCHIATRIE

FNAPSY

CONFERENCE NATIONALE DES PRESIDENTS DES COMMISSIONS MEDICALES D'ETABLISSEMENT
DES CENTRES HOSPITALIERS

CHARTE DU L'USAGER EN SANTE

MENTALE

Une personne à part entière

L'usager en santé mentale est une personne qui doit être traitée avec le respect et la sollicitude dus à la dignité de la personne humaine.

C'est une personne qui a le droit au respect de son intimité (effets personnels, courrier, soins, toilettes, espace personnel, etc.), de sa vie privée, ainsi qu'à la confidentialité des informations personnelles, médicales ou sociales la concernant.

Le secret professionnel lui est garanti par les moyens mis en oeuvre à cet effet. Tout ce que le malade a dit au psychiatre et tout ce que celui-ci a remarqué pendant son examen ou le traitement, doit être couvert par le secret, à moins qu'il ne lui apparaisse nécessaire de rompre le secret pour éviter des dommages graves au malade lui-même ou à des tiers. Dans ce cas, toutefois, le malade doit être informé de la rupture du secret.

C'est une personne qui ne doit pas être infantilisée ou considérée comme handicapée physique ou mentale.

C'est une personne dont on doit respecter les croyances et qui peut faire appel au ministre du culte de son choix.

Une personne qui souffre

L'usager en santé mentale est une personne qui ne se réduit pas à une maladie, mais qui souffre de maladie.

Cette maladie n'est pas une maladie honteuse mais une maladie qui se soigne et se vit.

La prise en compte de la dimension douloureuse, physique et psychologique des usagers en santé mentale doit être une préoccupation constante de tous les intervenants.

Le psychiatre doit proposer aux usagers la meilleure thérapeutique existant à sa connaissance.

[...]

L'accessibilité aux soins doit être assurée et l'usager doit être accueilli chaleureusement dans des délais raisonnables et dans des locaux aménagés pour son bien-être.

En cas d'hospitalisation, l'usager dispose de ses effets personnels durant son séjour sauf si des raisons de sécurité s'y opposent.

Il doit lui être remis un livret d'accueil exposant les informations pratiques concernant son séjour et le lieu de son hospitalisation, et l'informant de ses droits et de ses devoirs.

Les consultations téléphoniques, les visites et les sorties dans l'enceinte de l'établissement feront l'objet d'un contrat qui sera discuté régulièrement entre le patient et le médecin, et devront se faire dans le respect de l'intimité des autres patients.

Une attention particulière sera accordée à l'organisation de soins de qualité lorsqu'ils seront nécessaires après une hospitalisation.

Une personne informée de façon adaptée, claire et loyale

L'usager à le droit au libre choix de son praticien et de son établissement, principe fondamental dans notre législation sanitaire de libre engagement réciproque dans une relation contractuelle, hors le cadre d'urgence et celui où son médecin manquerait à ses devoirs (article L.-1111-1 du code de la santé publique et article 47 du code de déontologie médicale)

[...]

Toute personne peut avoir accès aux informations contenues dans ses dossiers médical et administratif, selon les modalités définies par la loi.

Le secret médical ne peut s'exercer à l'égard du patient ; le médecin doit donner une information simple, loyale, intelligible et accessible sur l'état de santé, les soins proposés (notamment sur les effets dits" secondaires" du traitement appliqué et sur les éventuelles alternatives thérapeutiques). Hors situation d'urgence, tout usager peut estimer ne pas être suffisamment informé, souhaiter un délai de réflexion ou l'obtention d'un autre avis médical.

[...]

Les patients donnent leur consentement préalable s'ils sont amenés à faire l'objet d'action de formation (initiale ou continue) du personnel soignant. Il ne peut être passé outre à un refus du patient.

[...]

Avec l'accord préalable du patient si son état de santé le permet, et si possible en présence des proches de celui-ci, les proches doivent pouvoir disposer d'un temps suffisant pour avoir un dialogue avec le médecin responsable et les soignants.

[...]

Si une hospitalisation s'avère nécessaire, les patients reçoivent aussitôt une information claire et adaptée sur les modalités de cette hospitalisation et les voies de recours. Cette information qui risque d'être mal comprise en raison de la gravité du tableau clinique initial sera reprise ultérieurement autant que nécessaire.

L'usager reçoit une information claire, compréhensible et adaptée sur les conditions d'accueil et de séjour.

Une personne qui participe activement aux décisions la concernant

La participation active de l'usager à toute décision le concernant doit toujours être sollicitée en le resituant au centre de la démarche de soins dans un processus continu d'adhésion.

Hors les cas d'hospitalisation sous contrainte définis par la loi, un patient hospitalisé peut, à tout moment, quitter l'établissement après avoir été informé des risques possibles pour son état et après avoir signé une décharge.

Aucune démarche ne doit être engagée et aucun traitement donné contre ou sans la volonté, à moins que, en raison de sa maladie mentale, il ne puisse porter un jugement sur ce qui est de son intérêt, ou à moins que l'absence de traitement puisse avoir des conséquences graves pour lui ou pour des tiers.

Le patient ne peut être retenu dans l'établissement, hormis les cas de la législation où son état nécessite des soins sans son consentement. Il doit alors être informé de sa situation juridique et de ses droits.

Compte tenu des enjeux liant (particulièrement en santé mentale) efficacité et adhésion au traitement, même dans ce cas où son état nécessite des soins sans son consentement, sera néanmoins toujours recherché le plus haut degré d'information et de participation à tout ce qui le concerne dans ses soins et sa vie quotidienne.

[...]

Dès que disparaissent les circonstances qui ont rendu nécessaire l'hospitalisation de l'usager contre sa volonté, le psychiatre doit interrompre les mesures appliquées contre cette volonté.

[...]

Une personne responsable qui peut s'estimer lésée

[...]

S'ils souhaitent se plaindre d'un disfonctionnement ou s'ils estiment avoir subi un préjudice, ils peuvent saisir le directeur de l'hôpital, les commissions départementales des hospitalisations psychiatriques, les commissions locales de conciliation chargées de les assister et de les orienter en leur indiquant les voies de conciliation et de recours dont ils disposent (dans des délais suffisamment rapides pour ne pas les pénaliser).

Une personne dont l'environnement socio-familial et professionnel et pris en compte

Les actions menées auprès des usagers veillent à s'inscrire dans une politique visant à véhiculer une image moins dévalorisante de la maladie mentale afin de favoriser leur insertion en milieu socioprofessionnel, où ils sont encore trop souvent victimes de discrimination.

Les équipes soignantes ont le souci tout au long du traitement, de mobiliser le patient de façon positive autour de ses capacités, ses connaissances, savoir faire pour les exploiter afin qu'il puisse se reconstruire, en favorisant une réinsertion sociale par paliers. Chaque étape sera discutée avec le patient, pour respecter ainsi le rythme de chacun.

Dans le strict respect de l'accord du patient, la famille peut-être associée au projet thérapeutique, informée de la maladie afin d'adopter l'attitude la plus juste et être soutenue dans ses difficultés.

[...]

Cette charte a été signée à Paris le 8 décembre 2000
Par :

- Mme Claude Finkelstein (Présidente de la FNAPSY) - Docteur Alain Pidolle (Président de la conférence)

- Mr Jacques Lombard (Président d'honneur de la FNAPSY) - Docteur Yvon Haumi (Vice Président de la conférence)

CONFERENCE DES PRESIDENTS DE CME DE CHS
CLINIQUE DE PSYCHOLOGIE MEDICALE
57370 PHALSBOURG

FNAPSY

24 RUE DE MAUBEUGE
75009 PARIS

ANNEXE 4

Témoignages : les abus de la psychiatrie

Le temoignage d'une éléve infirmiére en stage en psychiatrie :

« Je suis actuellement en stage en psychiatrie dans un CHS dans le cadre de mes études d'infirmière et grande est ma tristesse et mon incompréhension devant les traitements utilisés en psychiatrie. [...] Quelle dignité reste-t-il à des hommes enfermés comme des bêtes à longueur de journée dans des locaux de 10m2. Si l'on n'est pas "fou" (qu'est-ce que la folie???) en entrant à l'hôpital, je pense que l'on n'a pas d'autre choix que de le devenir tellement la réalité de la nature humaine est dure à tolérer.

Les gens en souffrance psychique sont déjà tellement blessés par la vie qu'il me parait bien inhumain de rajouter encore à leur souffrance.

Les traitements, s'ils peuvent soulager des symptômes, n'ôtent en rien la souffrance tapie dans l'ombre et contribue à mon avis à la chronicisation du mal de vivre.

Tant de réalités qui sont bien difficiles pour moi à supporter : je me sens bien seule quand tous les gens rencontrés ont l'air d'être convaincus des bienfaits de l'enfermement et de l'effacement des émotions. Je pleure, je pleure face à toute cette douleur et je me sens bien désarmée. »

Le temoignage d'une victime de l'enfermement dans un hôpital psychiatrique :

« En guise d'accueil, deux molosses barbus m'ont littéralement jetée, après déshabillage forcé et sans me prévenir, dans une pièce ressemblant à un mitard : un lit scellé au sol, une minuscule fenêtre à barreau en hauteur et un seau en guise de toilette.

Une porte blindée fermée de l'extérieur avec une ouverture permettant aux "soignants" de
surveiller le dépressif, et de le voir dormir, faire ses besoins, comme on regarde un chien...

J'ai hurlé et frappé pour sortir, j'ai eu droit à la camisole chimique et aux brimades de l'infirmier qui me parlait comme on parle à un prisonnier qui aurait commis un crime, moi qui ai un bac plus cinq. J'étais à l'époque et suis toujours cadre dans une profession intellectuelle.

J'ai eu droit, comme tous les gens en dépression, à l'humiliation ultime, l'enfermement comme on enferme les prisonniers.

Et plusieurs mois d'hospitalisation que j'ai vécu comme une punition dans un hôpital public glauque : 2 à 3 lits par chambre, des dépressifs mêlés à des schizophrènes et à des fous dangereux (l'un d'eux mordait), des sanitaires dans un état d'hygiène déplorable, des flaques d'urine à terre, des excréments, des douches accessibles une fois par semaine, des gens nus qui se baladent devant vous et des infirmières qui rigolent, des femmes de ménage qui vous traitent de "bande de tarés".

Des soignants sympas, d'autres pires que des geôliers, qui parlent aux gens comme à des débiles mentaux, l'obligation de prendre des médocs de force (si vous ne les avalez pas, on vous attache au lit comme un fou dangereux et on vous pique).

Ce que j'ai vécu dans cet hôpital psychiatrique, je l'assimile aujourd'hui, 7 ans après, à une véritable torture psychique et à un emprisonnement.

Deux mois de plus dans cet univers et j'aurais fini par réellement cette fois, me suicider d'une manière ou d'une autre. »






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"I don't believe we shall ever have a good money again before we take the thing out of the hand of governments. We can't take it violently, out of the hands of governments, all we can do is by some sly roundabout way introduce something that they can't stop ..."   Friedrich Hayek (1899-1992) en 1984