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Exploitations agricoles familiales et projets d'agrocarburants de proximité au Sénégal: cas du projet Jatropha dans le département de Foundiougne

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par Amadiane DIALLO
Université catholique de Louvain - Master 2 en politique économique et sociale finalité développement/ politique et gestion de projets 2011
  

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PREMIÈRE PARTIE : CADRAGE THEORIQUE ET

APPROCHE METHODOLOGIQUE DE L'ETUDE

CHAPITRE 1 : PROBLEMATIQUE ET CADRE CONCEPTUEL

1- Contexte de la recherche et question de départ

Développeur, conseiller agricole et rural de profession, thème de mémoire de master en développement et gestion de projets ne saurait plus intéressant pour moi que celui ayant trait aux rapports entre exploitations agricoles familiales et projets d'agrocarburants. La première raison tient du fait que l'essor des agrocarburants dans les pays du sud devient une matière à réfléchir. La seconde procède de la curiosité du développeur qui a toujours envie d'en savoir plus sur la perception d'un phénomène global par les « acteurs d'en bas ».

Sur le plan global, les alternatives aux réserves fossiles qui s'épuisent dans un horizon prévisible, l'adaptation aux changements climatiques et le respect du Protocole de Kyoto1 sur les émissions de gaz à effet de serre sont autant d'éléments qui sont évoqués pour justifier la mise en oeuvre des projets d'agrocarburants dans les pays du sud particulièrement. Dès lors, en attendant la fin de « l'or noir2 » prédite dans 40 ans par les spécialistes, c'est la ruée vers « l'or vert3 ». D'une part, les pays développés, dans le souci de perpétuer le modèle dominant du développement, cherchent à contrôler la production, la transformation et la distribution de

1 Détails donnés plus loin dans le texte

2 Jargon désignant le pétrole

3 Jargon désignant les agrocarburants

2

Mémoire Master Amadiane DIALLO

cette nouvelle énergie. D'autre part, les pays du sud, au nom du paradigme de développement durable, sont emportés de gré ou de force dans cette dynamique pour continuer à jouer leur rôle traditionnel de pourvoyeur de matières premières pour les pays occidentaux. La carte agricole mondiale change ainsi de visage car il faut aménager d'autres espaces pour cultiver les agrocarburants ou les substituer tout bonnement à d'autres cultures fussent-elles vivrières. Les institutions internationales balisent le chemin en taillant sur mesure des accords, des traités, voire des directives favorables à la mise en oeuvre de mégaprojets d'agrocarburants. Elles tiennent de nouveaux discours du même registre que celui-ci : " De grandes superficies de terre inexploitées pourraient être mises en cultures. Quelques 1,6 milliards d'hectares pourraient s'ajouter au 1,4 milliard de terre actuellement cultivée. Plus de la moitié des terres supplémentaires disponibles se trouve en Afrique et en Amérique Latine. La plupart des terres disponibles dont la pertinence serait la plus élevée pour la production de cultures sur surface non irriguée se trouverait dans ces régions. » (OCDE/FAO, 2009). Ainsi, l'idée d'une Révolution verte pour l'Afrique prend forme. Elle se matérialise à travers la mise en valeur des terres supposées inexploitées avec des investissements fonciers à grandes échelles. C'est ce qui est convenu d'appeler les " Land-grabbing ou accaparement des terres.» (Rapport FAO-OCDE, 2009). Avec toutes ces dispositions favorables, les multinationales s'activent dans l'acquisition de terres pour l'installation de monocultures d'agrocarburants afin de se positionner sur le marché de fourniture d'énergie verte aux grandes métropoles du monde occidental.

Cette fièvre des biocarburants qui a fini de gagner de nombreux pays du Sud n'a pas épargné l'Afrique. Le Sénégal aussi n'a pas échappé à cette mouvance. En effet, des projets d'agrocarburants commencent à s'installer dans ses zones rurales. Malgré les nombreux défis qui se posent à son agriculture notamment l'autosuffisance alimentaire, les enjeux d'une éventuelle résorption de son déficit énergétique semblent plus séduire son gouvernement qui a opté pour une politique agricole favorable aux agrocarburants. C'est pourquoi, un Programme national biocarburants a été lancé à côté de celui de la Grande Offensive pour l'Agriculture, la Nourriture et l'Abondance (GOANA). Il prévoit, entre autres, la plantation de Jatropha dans toutes les communautés rurales du pays. A la faveur de cette orientation de politique agricole, beaucoup d'investisseurs et de promoteurs de projets d'agrocarburants ont investi les zones rurales. D'aucuns s'adonnent à la monoculture d'agrocarburants en employant des ouvriers agricoles dans le défrichage, la mise en défens et la plantation tandis que d'autres se mobilisent à leur tour pour la mise en oeuvre de projets d'agrocarburants de proximité en

privilégiant la satisfaction des besoins locaux en énergie des populations rurales. Cependant, des organisations faitières paysannes appuyées par la société civile tirent la sonnette d'alarme sur cette situation qu'elles qualifient de tentative de déposséder les ruraux de leur terre et d'accentuer leur vulnérabilité.

Dès lors, en tant que agent de développement jouissant d'une petite expérience d'appuiconseil aux agriculteurs sénégalais dans la polyculture élevage, j'ai été interpellé par ces dynamiques globale et locale faites de jeu d'intérets. Je me suis demandé si les agropasteurs sénégalais pouvaient tirer leur épingle du jeu dans ces logiques d'acteurs complexes. J'ai suivi avec intérêt les rebondissements des grandes négociations internationales sur les stratégies d'atténuation et de mitigation à déployer face aux changements climatiques. Car les résolutions issues de cette planification du développement par les « acteurs d'en haut » deviennent, par la force de « l'économie monde », une voie impérative à suivre pour les pays du sud pour etre éligibles aux différents mécanismes d'aide. En effet, les acteurs supranationaux adoptent un mode de coordination par le marché global entretenu par une territorialité concurrentielle. Sous le prétexte d'une participation instrumentale, leurs décisions sont reprises par les dirigeants nationaux des pays en développement qui, par le biais de la territorialité politique, l'administrent aux acteurs infranationaux du 1èr et 2ème niveaux « néobraudeliens » dont les agriculteurs. (AMOUGOU, 2007). Pourtant, les logiques de mise en oeuvre des cultures d'agrocarburants confrontées aux défis de développement agricole et rural des pays du sud et aux réalités du terrain font apparaître des contradictions notoires. C'est pourquoi, la pertinence de ce nouveau modèle normatif de développement agricole et rural imposé aux pays du Sud est une question qui mérite d'être posée. Ainsi, beaucoup d'interrogations se font sur les rapports des projets d'agrocarburants aux défis de développement de la paysannerie des états pauvres du sud. Toutefois, la relative liberté d'exploitation de ses terres dont jouit la paysannerie de beaucoup de pays de l'Afrique subsaharienne contrairement à celle des pays de l'Amérique latine, constitue un point fort.

Au Sénégal, certains agropasteurs sont impliqués dans des projets d'agrocarburants de proximité. Les relations entre ces paysans sénégalais et les projets d'agrocarburants de proximité restent une énigme à élucider. Pour m'inscrire dans cet exercice de compréhension, je me suis posé une question de départ à savoir comment les exploitations agricoles familiales arrivent à s'impliquer dans les projets d'agrocarburants malgré tous les défis qu'elles doivent relever. Dans le souci d'une plus grande précision, cette question de départ a été transformée en question de recherche en ces termes : comment, à partir de leur assolement, des

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Mémoire Master Amadiane DIALLO

exploitations agricoles familiales parviennent-elles à connecter les stratégies de gestion de leur système de productions agricoles aux enjeux d'un projet de plantation de Jatropha?

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"Il existe une chose plus puissante que toutes les armées du monde, c'est une idée dont l'heure est venue"   Victor Hugo