WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Les enjeux environnementaux, économiques, sociaux et politiques de l'accès à l'eau dans l'agglomération de Lima et plus spécialement dans les quartiers dits « asentamientos humanos », quel avenir pour une ville assoifée ?

( Télécharger le fichier original )
par Claire Gaillardou
UFR de Géographie Bordeaux III - DEA de géographie, mention développement, sociétés et cultures 2007
  

Disponible en mode multipage

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

Claire GAILLARDOU

Université Michel de Montaigne, Bordeaux III

LES ENJEUX ENVIRONNEMENTAUX, ECONOMIQUES, SOCIAUX ET POLITIQUES DE L'ACCES A L'EAU DANS L'AGGLOMERATION DE LIMA, ET PLUS SPECIALEMENT DANS LES QUARTIERS DITS

« ASENTAMIENTOS HUMANOS »

QUEL AVENIR POUR UNE VILLE ASSOIFFEE ?

 

Rapport de stage de recherche de Master 2 de Géographie, mention Territoires, Développement et cultures, gestion environnementale, sous la direction de José Manuel Lazcano.

Année 2006"2007

REMERCIEMENTS

Avant toute chose, je tiens à remercier José Manuel LAZCANO, mon professeur référent, directeur de l'UFR de Géographie et d'Aménagement de l'Université Michel de Montaigne, Bordeaux III, pour ses conseils et ses idées enrichissantes lors de mon étude au Pérou et de ma rédaction en France.

Je remercie également Jean Paul DELER, géographe spécialiste de la Bolivie, de l'Equateur et du Pérou, directeur de recherche au CNRS à Bordeaux, pour m'avoir conseillé et recommandé à l'Institut Français d'Etudes Andines à Lima.

Toute ma reconnaissance va à l'Institut Français d'Etudes Andines de Lima (IFEA) et à son directeur Henri GODARD, géographe spécialiste de l'organisation spatiale et des dynamiques territoriales dans les pays andins, pour son accueil.

Je remercie également Mathieu DURAND, géographe doctorant à l'IFEA pour ses conseils et son amitié.

Sur le terrain, rien n'aurait été possible sans l'aide d'Ana Kariña HUAMAN, chargée de projet pour l'ONG CESAL, qui m'a permis de rencontrer les acteurs locaux du développement et de suivre la réalisation des projets en continu avec les habitants.

Je tiens aussi à assurer toute ma reconnaissance à Silvia de Los RIOS BERNARDINI et à Samuel YANES TORNES, architecte et directeur de l'ONG CIDAP, pour les rencontres qu'il m'ont permis de faire chez les acteurs politiques locaux et pour m'avoir fait participé à de nombreuses réunions et débats des comités de quartiers de Carabayllo.

Enfin je tiens à remercier mes frères et mes amis pour leur soutien et leur présence pendant mon travail de terrain et la rédaction de ce rapport de stage.

TABLE DES MATIERES

Première partie : La problématique de l'eau à Lima : les bases d'une équation négative

I-Une ville macro céphalique en milieu aride, description des défis et enjeux de la ville de Lima

I-1 Un site aux conditions géomorphologiques et climatiques significatives de l'aridité

- Données climatiques - Etude géologique

I-2 Ressources hydrologiques

- L'aquifère

- Sources de surface

I-3 Croissance démographique et évolution de la demande face au déficit des ressources

- Historique et profil de la croissance, un site marqué par son passé et sa vocation portuaire

-Une évolution urbaine et démographique incontrôlable

- Les « asentamientos humanos », marqueurs des inégalités

- La demande actuelle des consommateurs en matière d'eau potable

I-4 Enjeu politique

- Cadre juridique des politiques en matière d'eau et d'assainissement - Organisation sectorielle

- Le programme « Agua para todos »

- Les autres acteurs et la problématique du manque de concertation intra sectoriel

II- Conclusion partielle

Deuxième partie : L'accès à l'eau pour 8 millions d'habitants, un défi à plusieurs niveaux

I- Le capital « eau » liméen, état de la production d'eau actuelle

I-1 Système de distribution

- Le système d'emmagasinage d'eau potable

- Les systèmes de réseaux primaires et secondaires de distribution de l'eau potable

I-2 Description des différentes modalités d'accès à l'eau à Lima

II- La SEDAPAL, une entreprise nationale prise entre l'étau de la rentabilité et de l'intérêt social

II-1 Création et statuts de l'entreprise

- Statuts et fonction de l'entreprise

- Construction historique du statut de la SEDAPAL

II-2 Projets et politiques de la compagnie

- Une plus grande préservation des ressources souterraines... - ...Passant par la potabilisation des eaux de surface

- A plus long terme, de grands projets en marche

III- L'accès à l'eau, stigmate et facteur des inégalités sociales III-1 Les « asentamientos humanos » exclus du partage de l'eau

III-2 Le prix de l'eau

- Les prix du réseau de la SEDAPAL - Les prix des entrepreneurs privé

III-2 Qualité de l'eau

- Situation de la qualité de l'eau - Conséquences sanitaires

IV Manque de constance du service et impact environnemental, un réseau d'eau « malade »

IV-1 Le manque de constance du service

IV-2 Impact environnemental

-La contamination des eaux souterraines:

-Pollution et essoufflement des eaux de surface

- Le manque de traitement des eaux usées ; conséquence de la pollution de la côte

V Conclusion partielle

Troisième partie : Les alternatives d'accès à l'eau potable, à la

recherche de nouveaux projets

I- ONG, municipalités locales, et comités de quartier : les acteurs à la recherche de solutions

II-1 Présentation des ONG étudiées

II-2 Stratégies d'intervention

II-3 Organisation publique-privée : quel type de collaboration ?

II- A l'échelle locale, étude de projets de réduction des coûts et de la consommation inscrits dans une démarche participative

II-1- Huachipa et Lomas de Carabayllo, étude de deux « asentamientos humanos » distincts

-Contraintes géographiques

-Du quartier spontané à la planification, deux « asentamientos humanos » historiques

-Situation socio-économique actuelle

II-2 A la rencontre de projets alternatifs, les techniques de réduction des coûts et de la consommation à Huachipa et Carabayllo

- La construction de réservoirs de quartier permettant une connexion domiciliaire ou par borne-fontaine

- Le système condominial

- Les systèmes d'assainissement écologique

II-3 L'utilisation de la démarche participative dans les projets de

développement

- Qu'est-ce que la démarche participative ?

- Enjeux de la démocratie participative

- Etude de l'impact de la stratégie participative dans l'étude d'un projet - La démocratie participative au service du développement durable

III- D'autres projets définitifs d'accès à l'eau à l'échelle nationale

III-1 Stratégies mondiales d'accès à l'eau en milieu aride et hypothèses d'application au Pérou

III-2 La révolution hydraulique en Espagne : un exemple à suivre ?

IV Conclusion partielle

Conclusion générale

Annexes

RESUME DE L'ETUDE

Cette étude a pour objectif l'appréhension des difficulté d'accès à l'eau dans la capitale d'un pays en développement, afin de cerner les causes de disfonctionnements actuels et pouvoir envisager des solutions de développement réalisables.

La ville de Lima est située sur un désert côtier ou les ressources en eau sont restreintes, et l'évolution croissante de sa population ne permet actuellement plus de garantir un accès à l'eau pour tous dans des conditions environnementale et égalitaire soutenables.

Face à cette situation on assiste aujourd'hui à une incapacité des pouvoirs publics à la réaction.

Devant l'urgence de la situation dans les quartiers périurbains qui sont les plus défavorisés (dits « asentamientos humanos ») les ONG et les collectivités locales développent des projets alternatifs d'accès à l'eau.

Aujourd'hui, la prise en compte de ces nouveaux acteurs et de leur stratégie d'action est nécessaire à l'élaboration des politiques de développement étatiques tant à l'échelle locale que nationale.

Mots clefs : développement, périurbanisation, gestion de l'eau, accès à l'eau politique, démocratie participative, asentamientos humanos, autogestion, réseau, bidonville, pays du sud, Pérou.

TABLES DES ILLUSTRATIONS

Cartes :

- Carte 1 : Situation de la capitale sur la cote désertique péruvienne

- Carte 2: Diminution des niveaux de l'eau souterraine (en mètres) dans la région environnante de Lima entre 1969 et 1985

- Carte 3 : Processus d'expansion de la ville de Lima entre 1981 et 2000

-Carte 4 : Couverture du service d'eau selon les chiffres actuels donnés par la SEDAPAL

4 Tableaux, schémas et graphiques :

-Schéma 1 : Fonctionnement de l'intervention

-Schéma 2 : Différents niveaux de relations

-Schéma 3 : Economie en matière de canalisation, la comparaison d'un système classique de réseau d'égouts avec le système condominial :

-Schéma 4 et 5 : Système de toilettes sèches combinées à la technique de la phytorestauration, utilisé à Los Topacios, Huachipa :

4 Photos :

- Photo 1 : Cassure du niveau du Rímac crée par la SEDAPAL1, afin d'aider au processus de réalimentation des eaux souterraines

-Photos 2, 3 ,4 et 5 : Entre bidonvilles, centre-ville colonial et quartiers internationaux, une ville aux multiples visages

1 Cf. Deuxième partie, II-1, et Table des abréviations.

-Photos 6 et 7: première étape d'invasion au bord de la Panaméricaine Sud, abris d'esteras1 et de tôle

-Photos 8 et 9: De la cuve du camion-citerne aux bidons personnels de conservation, un manque d'hygiène flagrant

-Photo 10: Le quartier de Lomas de Carabayllo marque ses exigences politiques avant les élections

-Photo 11: Logo du Programme « Agua para todos »

-Photo 12 : Château d'au dans le district de Callao, «Aujourd'hui tout le monde a besoin d'eau »

-Photos 13 et 14 : Approvisionnement par borne fontaine à Huachipa, et camion-citerne -Photo 15: Usine de traitement de La Atarjea

- Photo 16: Dans le district de Miraflores, irrigation à grande eaux d'une terre plein centrale

-Photos 17 et 18 : Chargement d'un camion-citerne privé à Ventanilla, et livraison dans l'asentamientos humanos de Lomas de Carabayllo

- Photos 19 et 2O: Des conditions sanitaires en matière d'eau insuffisantes, le lavage du linge et le stockage de l'eau à San Francisco, Huachipa

-Photos 21 et 22 : Inauguration du réseau d'eau de Nuevo Paraiso, Huachipa, ONG CESAL -Photo 23 : deux membres du Comité d'oeuvres de Lomas de Carabayllo utilisant la nouvelle installation, ONG CIDAP

-Photo 24: Lomas de Carabayllo

-Photo 25 : Quartier de San Francisco à Huachipa

-Photo 26: Réservoir de quartier à Lomas de Carabayllo

-Photo 27 : A San Francisco, première phase du projet de construction de réseau domiciliaire -Photos 28 et 29 : Système condominial et station de traitement à Huachipa

-Photos 30, 31 et 32 : Système de toilettes sèches avec permettant la séparation des eaux sales et des excréments solide, et consignes d'utilisation

-Photos 33 et 34 : Plante de Phytorestauration à différents niveaux de croissance, utilisées dans le secteur de Los Topacios, à Huachipa

-Photo 35: Comité d'oeuvre de Las Flores à Huachipa, lors d'une séance de formation à la gestion

1 Mur de palmes végétales tressés.

LISTE DES ABREVIATIONS

APPJ : Proyecto de Alimentacion de Agua Potable para los Pueblos Jovenes de la Ciudad de Lima : Projet d'Alimentation en Eau Potable pour les Quartiers Spontanés de la ville de lima.

CIDAP : Centro de Investigaciòn, Documentaciòn y Asesoria Poblacional, ONG péruvienne établie à Lima.

CENCA : Instituto de Desarollo Urbano, ONG péruvienne établie à Lima.

CESAL : ONG espagnole de coopération au développement, travaille à Lima sur l'eau potable et l'assainissement avec les systèmes ECODESS et condominial.

DGS : Direccion General de Saneamiento : Direction Générale de l'Assainissement.

ECODESS : (Ecology and Development with Sustainable Sanitation): Système de gestion intégrale d'assainissement durable, développé par CENCA.

FMI : Fond Monétaire International.

IMP : Instituto Metropolitano de Planificacion : Institut métropolitain de planification de la ville de Lima. ING : Instituto Nacional de Geografia.

OMD : Objectifs du Millénaire pour le Développement.

OMS : Organisation Mondiale de la Santé.

ONU : Organisation des Nations Unies.

PIB : Produit Intérieur Brut.

PNUD : Programme des Nations Unies pour le Développement.

SEDAPAL : Servicio de Agua Potable y Alcantarillado de Lima (Service d'Eau Potable et d'Egout de Lima), Compagnie des eaux de la métropole de Lima.

SENAPA : Servicio Nacional de Agua Potable y Alcantarillado (Service National de l'Eau Potable et des Egouts).

SUNASS : Superintendencia Nacional de Servicios de Saneamiento (Direction Nationale des Services d'Assainissement).

INTRODUCTION

La gestion de l'eau s'annonce comme le problème géopolitique le plus important du 21ème siècle. Aujourd'hui, la moitié de la population mondiale vit dans les villes. Au cours de ces prochaines décennies, l'urbanisation devrait augmenter à un rythme élevé dans les pays en développement. A Lima, capitale du Pérou, qui concentre un tiers de la population du pays, dans un milieu aride où les ressources en eau sont limitées la question de l'accès à l'eau est plus qu'urgente. Faire face aux besoins croissants dans les domaines de l'approvisionnement en eau et de l'assainissement dans les villes est donc l'un des enjeux majeurs de ce nouveau siècle pour le gouvernement péruvien.

Deux grands objectifs internationaux liés à l'approvisionnement en eau et à l'assainissement ont été fixés, respectivement, en 2000 et 2002:

D'une part, les Objectifs de Développement pour le Millénaire (2000): "Réduire de moitié, d'ici 2015, le pourcentage de la population qui n'a pas accès à de l'eau potable."1 D'autre part, le Sommet mondial sur le développement durable, Plan d'action (2002) : "... nous convenons de réduire de moitié, d'ici à 2015, la proportion de personnes qui n'ont pas accès à l'eau potable ou qui n'ont pas les moyens de s'en procurer (comme énoncé dans la Déclaration du Millénaire) et la proportion de personnes qui n'ont pas accès à des services d'assainissement de base." 2

Pour que ces objectifs soient atteints dans les zones urbaines, plus d'un milliard de personnes supplémentaires devront accéder à des services d'approvisionnement et d'assainissement appropriés, d'ici à 2015.

Au Pérou, 33% de la population était privée de l'accès à l'eau en 1998.

Le problème de l'eau au Pérou réside en partie dans la géographie particulière du pays. Une grande partie de la côte Pacifique est établie sur un désert et plus de 70% de la population vit le long de la côte, où on trouve moins de 2% des ressources hydrauliques du pays.

1 Les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) sont huit objectifs que les États membres de l'ONU ont convenus d'atteindre d'ici à 2015. La déclaration fut signée en septembre 2000.

2 Sommet Mondial sur le développement durable, Johannesburg, 2002.

A cela s'ajoute un problème démographique énorme, doublé d'une incapacité politique de faire face aux crises économiques qui ont secouées le pays depuis plusieurs décennies.

La capitale, Lima, accueille aujourd'hui plus de huit millions d'habitants, et la croissance urbaine ne cesse d'augmenter dans une zone désertique où les ressources sont limitées (en 30 ans, Lima a vu son taux de croissance passer de 5,1 à 3,9 %1). Devant ce schéma d'évolution persistant, il n'est aujourd'hui plus possible de permettre un accès à l'eau pour tous.

Pour Jean-Marc FOURNIER, « le fonctionnement de l'eau dans la ville reflète finalement celui de la société qui lui correspond »2 . Il s'agit ainsi de rechercher constamment l'explication des paradoxes liés à l'eau en s'intéressant aux mécanismes sociaux qui produisent les inégalités de distribution.

Afin de répondre à ce problème trois acteurs principaux cohabitent à Lima à différentes échelles de pouvoir et d'action : l'Etat, la compagnie municipale de l'eau (La Sedapal) et les ONG. Le plus souvent sans communication entre leurs différentes actions et parfois même en concurrence technique ou organisationnelle sur certains projets locaux, ces différents acteurs mettent en place des projets extrêmement divers et avec des moyens variables pour résoudre la problématique de l'accès à l'eau.

Dans notre projet de recherche, dès le début, puis également pendant le travail de terrain face aux mécanismes de rétention d'information, nous avons été convaincus que ces rapports parfois conflictuels entre les différents acteurs étaient les clés du développement local. Ces différentes institutions, quelles soient privées ou publiques ne devraient pas s'exclure et évoluer dans une dynamique de concurrence, mais plutôt travailler main dans la main devant l'urgence des besoins.

C'est dans ce contexte de conflits, et parfois même de divisions, des politiques de développement que nous avons voulu savoir quelles étaient aujourd'hui les alternatives d'accès à l'eau dans les quartiers défavorisés de Lima, et en quoi elles pouvaient être améliorées.

1 Chiffres issu des données de l'INEI et du site de l'UNESCO sur la recherche urbaine en Amérique Latine (cf. : webographie).

2 FOURNIER, Jean-Marc, 2003, L'eau dans les villes d'Amérique Latine, Inégalités sociales et concurrences des usages, Paris : L'Harmattan, Collection géographie sociale, 203 pages.

Pour ce faire, nous nous sommes demandé quels étaient les enjeux politiques, environnementaux, sociaux et économiques de l'accès à l'eau à Lima, étendant ainsi nos recherches à différentes échelles : de l'étude des ressources aquifères, à l'intégration des projets locaux d'adduction à une politique de développement plus globale, et à la conciliation entre les différents acteurs.

Pour répondre à ces questions, il fallait avoir une connaissance préalable des différents projets existants et des situations diverses sur le terrain.

En travaillant avec des institutions aux valeurs et procédés différents, nous avons ainsi tenté de recueillir les points de vue de chacun dans le but de réaliser une analyse comparative des procédés techniques et des stratégies d'application.

Dans le cadre de l'instauration d'une nouvelle communication entre les différents acteurs locaux, nous voulions également, par l'observation et peut être la comparaison des modes d'opération de chaque projet, savoir lesquelles de ces solutions pouvaient être généralisées, et peut être ainsi plus tard être intégrées en partenariat dans la ligne politique de l'Etat.

Ainsi, notre hypothèse de départ a été de considérer que face à un problème dépendant d'un système géographique complexe, relevant à la fois de contextes physique, démographique et politique donnés, les solutions envisagées devraient prendre en compte l'ensemble des acteurs et de leurs relations. Notre enjeu principal étant de remettre à plat le problème et d'envisager non pas une solution globale mais un ensemble de solutions multiples prenant en compte la totalité du système qui serait capable de répondre le plus pertinemment aux obstacles d'exécution. Pour cela, nous avons envisagé ce rapport comme un moyen de lier les différentes politiques d'action actuelles pour réunir une base de données n'excluant aucun acteur, en retirer les grandes lignes directrices de conception de projet et les rendre plus efficaces notamment en imaginant comment elles pourraient être intégrées, à terme, à une politique étatique.

La problématique directrice de ce rapport est en continuité avec ce travail comparatif: quelles sont dans le contexte des « asentamientos humanos »1 de Lima, les meilleures solutions de développement en termes d'accès à l'eau?

Pour y répondre nous avons organisé ce rapport en trois parties:

1 Ce terme fera l'objet d'une définition au cours de notre première partie.

Nous développerons tout d'abord la problématique environnementale de la hausse de consommation en eau à Lima. Apres une étude des données hydrogéologiques et morphologiques, nous aborderons les problèmes liés à la croissance démographique exponentielle de la capitale, en les recadrant dans le cadre national des politiques de développement en matière d'accès à l'eau et de préservation des ressources.

Puis nous verrons quelles sont les réponses apportées aujourd'hui au problème de l'eau à Lima, et en quoi elles ne permettent actuellement pas de subvenir de manière adéquate aux demandes.

Enfin, nous essaierons d'envisager les meilleures propositions actuelles de conception de projet en matière d'eau potable et d'assainissement, grâce à l'étude comparative de trois projets dans les cônes d'urbanisation de Lima.

Méthodologie et démarche entreprise :

Afin de répondre à notre problématique et vérifier les hypothèses de départ, il convient d'articuler la démonstration autour d'une démarche scientifique dotée d'outils et de méthodes (entretiens, observations, documents bibliographiques, cartes...).

L'investigation s'est appuyée sur une approche qualitative destinée à une compréhension plus détaillée et globale du terrain étudié.

Cette démarche s'est déroulée en trois temps :

1. Dans un premier temps, nous avons réalisé une recherche bibliographique sur le Pérou, Lima, les « asentamientos humanos », ainsi que sur les projets de développement, les politiques de développement... Cette étape visait une compréhension globale du contexte du projet étudié. Les outils étaient principalement des livres, cartes, d'autres projets entrepris... Une recherche bibliographique a été également entreprise après l'investigation et visait plus l'interprétation et l'analyse des données récoltées.

2. Dans un deuxième temps, nous avons réalisé, pour l'étude empirique, de
nombreuses visites de terrain, des observations et entretiens informels des habitants des « asentamientos humanos », et des acteurs du projet. Cette démarche consistait à passer du temps avec les bénéficiaires du projet afin de se familiariser avec ce contexte, et pour que les habitants s'habituent à notre présence. La position de chercheuse et d'étrangère peut empêcher l'accès à certaines informations ou nous confronter à la déformation de ces données.

Il est donc nécessaire de créer un climat de confiance réciproque entre les personnes investiguées et les investigateurs.

3. Suite à cette première approche, nous avons pu réaliser, dans un troisième

temps, des entretiens de type semi-directif, basés sur une série de questions, de thèmes généraux servant de guide à la conversation. C'est un outil plus flexible que les questions fermées et plus facile à mettre en place lorsque la langue parlée n'est pas la sienne. Ces entretiens s'articulaient autour de thèmes comme l'environnement, les relations sociales, les conflits, l'organisation... Ils ont été réalisés auprès d'un échantillon d'une trentaine de personnes, dont les rôles dans le projet, les milieux et institutions différents.

Cet échantillon se compose:

- d'un ingénieur en systémique et cartographie de l'entreprise SEDAPAL;

-d'un conseiller municipal de la ville de Lima, travaillant sur le projet « Agua para todos » ; -de 4 chargés de projet dans des ONG (CIDAP, CESAL);

- de 12 habitants des asentamientos humanos de Huachipa, Carabayllo et Villa Maria del

Triunfo;

-des discussions issues des comités de quartier de Lomas de Carabayllo, à Carabayllo et San Francisco et Los Jardines à Huachipa.

Première partie :

La problématique de l'eau à Lima ; les bases d'une

équation négative

I- Une ville macro céphalique en milieu aride, description des

défis et enjeux de la ville de Lima

Lima, capitale du Pérou, est située dans le désert côtier brumeux de la façade du Pacifique de l'Amérique du Sud à une latitude de 11°S (Cf. Carte 1). Avec une superficie de 2 664,67 km2, Lima est considérée comme étant la ville la plus étendue sur un désert, avant Le Caire. Dans ces conditions de site et de situation extrêmement prégnantes, tout travail de recherche géographique doit au préalable se baser sur une étude géomorphologique et climatique de la zone afin de mettre en exergue les ressources en présence, les risques et les enjeux d'un développement humain, en particulier pour ce qui se rattache à la ressource vitale qu'est l'eau potable.

Carte 1 : Situation de la capitale sur la cote désertique péruvienne :

Source : ING.

I-1 Un site aux conditions géomorphologiques et climatiques significatives de l'aridité - Données climatiques

Le désert péruano-chilien sur lequel est implanté la ville, est caractérisé par la présence quasi permanente d'une couverture nébuleuse de stratocumulus, formée lorsque les couches inférieures de l'atmosphère se rafraîchissent au contact des eaux froides du Pacifique. La température de l'océan le long de la côte, du Chili au Pérou, subit la puissante influence du courant froid de Humboldt1 et de la remontée vers la surface des eaux plus froides des profondeurs. Conséquence de ces phénomènes, le climat de Lima est plus frais que celui de villes sises à la même latitude et à la même altitude dans d'autres parties du monde. Son régime pluviométrique est également l'un des plus faibles du continent (environ 10 mm par an). Malgré cela, l'air y est relativement humide, en raison de brumes fréquentes et de fortes rosées, contribuant à donner à Lima le surnom de « ville grise ».

Ces données climatiques sont caractéristiques de l'aridité, définie comme une « situation résultant du manque d'eau par suite de l'insuffisance des précipitations »2. En effet, même si la ville est souvent baignée par la brume, qui crée une condensation non négligeable, la notion d'humidité est très différente de celle d'apport en eau dans le cas du désert côtier aride liméen.

-Etude géologique :

Les caractéristiques géomorphologiques de la zone de Lima sont la conséquence du développement géologique, construit au mésozoïque (100 Ma approximativement) quand la mer intérieure couvrait une grande partie du territoire péruvien. En ces temps se sont formées les roches sédimentaires qui entourent la grande capitale (Vallées de Criard, Rímac et Lurín) dans lesquelles on trouve des fossiles caractéristiques de cette période. L'activité magmatique, induite par le processus de subduction, a donné alors lieu aux roches volcaniques et au placement de roches intrusives (Batholite de la Côte) que nous trouvons dans le secteur Est de la ville et qui sont étendues jusqu'aux butées de la Cordillère Occidentale. Les mouvements tectoniques dont elles ont souffert (de nature Cénozoïque), ont donné lieu à des failles et des fractures qu'on peut observer dans les roches des alentours de Lima. Sur les roches mésozoïques (sédimentaires et ignées3) s'affirment alors les grands réservoirs alluviaux

1 Courant marin de surface, parcourant l'océan Pacifique. Prenant naissance près de l'Antarctique, il est froid, environ 7 à 8 degrés inférieur à la température moyenne de la mer à la même latitude; il longe les côtes du Chili et du Pérou et, riches en plancton, ses eaux sont très poissonneuses.

2 GEORGES, Pierre, VERGER, Fernand, 2000, Dictionnaire de la géographie, Paris : Presses Universitaires de France, 500 pages.

3 Roches ignées : roches produites par l'action du feu, provenant du refroidissement du magma.

entraînés par les rivières Rímac, Criard et Lurín, ceux qui ont donné lieu à une couverture quaternaire observable, épaisse dans les falaises de la Côte Verte (Costa Verde). Dans ces pentes, on peut observer les processus de sédimentation produits par la rivière Rímac (Cf. Annexe 2: Carte géologique).

Ces particularités géologiques entraînent dans certaines zones de la ville des risques importants d'érosion et de friabilité des falaises ou des pentes, notamment dans les « cerros », nom donné aux reliefs collinaires qui ceinturent les limites de la ville. L'étude géologique structurelle des fondations de Lima est également importante pour la zonification sismique de la grande capitale située dans la zone d'affrontement des plaques tectoniques du pacifique et de l'Amérique du Sud. Ces facteurs de risques jouent un rôle prépondérant au coeur de la problématique de croissance urbaine de la ville.

Les études géologiques et géo environnementales sont donc aujourd'hui par leurs particularités, plus que nécessaires à la planification du développement et de l'expansion urbaine.

I-2 Ressources hydrologiques

-L'aquifère

La zone aquifère de Lima couvre 390 km2, y compris les bassins alluviaux inférieurs du Rímac et du Chillón et les dépôts côtiers connexes. L'eau est contenue dans une formation de sables et d'agglomérats à granularité grossière d'une épaisseur qui varie de zéro à certains endroits à probablement quelque 500 m, bien que l'on ne dispose pas de chiffres précis. Les 100 m du dessus sont constitués de sables et de graviers relativement propres et très perméables, avec quelques éléments plus fins. De 100 à 200 m environ de profondeur et, jusqu'au fond de l'aquifère, la perméabilité générale de la formation diminue, bien que, là encore, on dispose de très peu d'information sur la structure en dessous de 200 m.

Le pompage excessif a fait en sorte que les niveaux de l'eau dans la plupart des puits ont chuté de 1 à 2 m/an. Un certain nombre de puits près de la côte ont dû être condamnés à cause de la salinité élevée ; d'autres, plus loin dans les terres, ont cessé de produire. Afin de compenser la diminution de l'eau disponible, de nouveaux puits ont dû être forés et les taux de pompage ont augmenté dans un certain nombre de puits existants. Entre 1969 et 1985, les niveaux de l'eau souterraine dans la zone côtière ont chuté d'au moins 10 m et jusqu'à 30 ou 40 m dans la plaine élevée près des contreforts (cf. carte 2).

Carte 2: Diminution des niveaux de l'eau souterraine (en mètres) dans la région
environnante de Lima entre 1969 et 1985 :

Source : Binnie et al. (1987)

Parmi les problèmes opérationnels qu'implique l'exploitation de l'eau de l'aquifère de Lima (Binnie and Partners, 1987), mentionnons que :

· Les coûts du pompage ont augmenté du fait de la chute des rendements des puits ;

· Les puits sont taris ou sont en cours de tarissement, même si le forage atteint la roche de fond ;

· La salinité de l'eau souterraine augmente près de la côte à cause de la chute des niveaux de l'eau, et de l'intrusion d'eaux saumâtres du Pacifique.

· Les pompes sont trop grandes pour les rendements actuels (ou le sont devenues), ainsi leur coût d'exploitation est plus élevé qu'il serait nécessaire ;

· Les niveaux dynamiques de l'eau ont chuté en dessous de la limite supérieure des tubages des puits filtrants, ce qui occasionne un encroûtement de ces tubages et réduit ainsi le rendement des puits.

Le taux de renouvellement de l'aquifère est considérablement inférieur au rythme auquel l'eau est en train d'être prélevée. "Nous sommes la seule ville en Amérique du Sud avec tellement peu de réserves, moins d'une année d'approvisionnement. Nous sommes très vulnérables", indique Carlos Silvestri, l'ex-président de la compagnie des eaux de la ville, la SEDAPAL1.

La réalimentation des eaux souterraines à partir de la surface, ce qui représente la principale voie de renouvellement, provient de plusieurs sources :

· Les lits de cours d'eau, principalement le Rímac, mais en partie aussi du Chillón (Cf. Photo 1) ;

Photo 1 : Cassure du niveau du Rimac crée par la SEDAPAL2, afin d'aider au processus
de réalimentation des eaux souterraines :

Source : Auteur.

· Les marécages et autres zones naturelles de végétation au nord de la ville ;

· L'irrigation agricole dans les zones rurales de la plaine côtière ;

1 Cf. Table des abréviations.

2 Cf. Deuxième partie, II-1, et Table des abréviations.


· L'irrigation des jardins dans les zones urbaines;

· Les fuites dans le système de distribution de l'eau;

· Les fuites dans le système d'égouts et les effluents d'eaux usées domestiques non traitées.

Il ne se produit presque plus de recharge directe, que ce soit du fait de la pluie ou du ruissellement local et ce, à cause du faible régime pluviométrique dans la région de Lima (10 mm/an) et du type de précipitations dont il s'agit (bruine et rosée). Le ruissellement le long des pentes, qui entourent la ville, et l'infiltration dans les contreforts et dans les formations locales en éventail sont extrêmement rares.

Des sources de réalimentation en eau énumérées ci-dessus, les plus importantes sont les quatre premières. Le taux actuel de recharge à partir de ces sources est d'environ 11 m3/seconde : soit quelques 4 m3/seconde provenant des lits de cours d'eau ; 3 m3/seconde des fermes, parcs et jardins ; et 4 m3/seconde des fuites dans le système de distribution des eaux. Si l'on compte l'écoulement de l'eau souterraine provenant des régions alluviales en amont, l'apport total à l'aquifère est d'environ 13 m3/seconde.

Plusieurs de ces sources de réalimentation sont actuellement menacées par la croissance urbaine. Nombre de fermes et de parcs irrigués dans les environs de la ville ont été déplacés. Si la tendance actuelle se poursuit, la recharge à partir de ces sources pourrait être réduite de moitié au cours des 20 prochaines années. La ville est également en train d'empiéter sur les lits de cours d'eau où a lieu une appréciable proportion de l'infiltration. Par exemple, une nouvelle route est en train d'être construite le long du Rímac, ce qui rendra imperméables plusieurs dizaines d'hectares de la surface de la vallée.

Actuellement, le solde hydrologique de l'aquifère est négatif; au moins 1 m3/seconde de plus est prélevé -- ou est perdu au profit de la mer en raison de l'écoulement souterrain -- qu'il n'y a de recharge à partir des diverses sources de réalimentation. Le taux d'extraction n'a pas été réduit en dépit de la diminution du volume de recharge. À mesure que les niveaux de l'eau continuent à baisser et que l'intrusion saline se poursuit, les coûts du pompage vont augmenter et de nombreux puits plus anciens deviendront secs ou salins.

Concernant un aspect positif, un projet est actuellement en cours en vue d'injecter artificiellement de l'eau dans l'aquifère pour rétablir l'équilibre.

-Sources de surface

L'eau de surface répond à 55 % des besoins urbains dans la région de Lima. Le débit moyen actuel du Rímac est de 32,3 m3/seconde à Chosica, en amont de Lima ; celui du Chillón est de 7,5 m3/seconde à Larancocha près de son embouchure sur la plaine côtière. Près de 10 m3/seconde sont perdus dans la mer lors des inondations du Rímac ; durant ces périodes de crue, une quantité excessive d'eau, chargée de sédiments, finit dans la mer. Pour ce qui est du Chillón, de telles pertes comptent pour environ 2 m3/seconde. Quelques 12 m3/seconde du Rímac sont utilisés par la ville et 4 m3/seconde pour l'irrigation. Environ 5 m3/seconde s'infiltrent dans l'aquifère. Les eaux du Chillón servent presque exclusivement aux fins de l'irrigation agricole (4,4 m3/seconde).

De plus, le régime des sources de surface est aussi tributaire de l'aspect temporel, les régimes des rivières étant caractérisés par leur irrégularité; présentant de courtes périodes d'abondances (3 à 5 mois), suivies par des périodes d'étiage de 7 à 9 mois. Sur des périodes plus brèves, les rivières peuvent également accuser des périodes de sécheresse pouvant s'éterniser dans le pire des cas à plus de deux années consécutives. Il faut donc également tenir compte de ces irrégularités de régime dans la gestion des ressources en eau.

Lima utilise la majeure partie de l'eau disponible dans les deux cours d'eau ; seul un volume relativement restreint (12 m3/seconde) est perdu durant les inondations les plus intenses. Bien que cette eau de crue soit difficile à utiliser en raison de l'importante quantité de matières en suspension et de son débit rapide, elle pourrait représenter un volume additionnel pour l'approvisionnement urbain.

Le risque de contamination, tant de l'eau de surface que souterraine, représente un problème croissant. L'activité humaine dans le bassin moyen et supérieur du Rímac a des incidences sur la qualité de l'eau. Toutes les eaux usées provenant des collectivités et des villes situées en amont de Lima finissent dans le cours d'eau.

Deuxièmement, les effluents des mines et de l'industrie sont aussi déversés dans la rivière. À Lima même, la pollution du cours d'eau s'amplifie à cause de l'absence de contrôles sur la manière de disposer des déchets. Par conséquent, la concentration des métaux lourds et d'autres substances toxiques constitue déjà un danger potentiel pour l'approvisionnement en eau de la ville. L'aquifère de Lima est également menacé. Les alluvions sont perméables sur toute leur profondeur et des déchets dangereux pourraient s'infiltrer dans les réservoirs souterrains.

I-3 Croissance démographique et évolution de la demande face au déficit des ressources

L'agglomération de Lima est un cas particulier au Pérou. Elle en est la plus grande ville et dépasse de dix fois Arequipa, deuxième ville du pays. Cette hypertrophie est due principalement à une évolution démographique et urbaine spontanée, déséquilibrée et surprenante que les pouvoirs publics n'ont pas pu contrôler. La ville s'est donc développée de manière anarchique sans aucune planification, menaçant la qualité de vie de ses habitants.

En 1993, Lima contait 6 221 000 habitants. Aujourd'hui, avec plus de 7 200 000 habitants, soit près d'un tiers de la population nationale (29% de la population totale du Pérou) elle est la proue des politiques démographiques péruviennes.

- Historique et profil de la croissance ; un site marqué par son passé et sa vocation ortuaire

La ville s'est développée près des contreforts des Andes, sur les anciens cônes alluviaux du Rímac, petit cours d'eau torrentueux qui se précipite des montagnes environnantes. Récemment, la banlieue nord s'est étendue jusqu'aux cônes alluviaux d'un autre cours d'eau ayant les mêmes caractéristiques, le Chillón (Cf. Carte 2).

Photo 2, 3 ,H et 5 : Entre bidonvilles, centre-ville colonial et quartiers internationaux, une

ville aux multiples visages :

Source : Auteur.

L'agglomération a été fondée par les Espagnols en tant que port destiné principalement à servir pour l'exportation des métaux précieux du Pérou supérieur (par exemple, Cuzco et Potosí). La ville portuaire elle-même était en fait El Callao; quant à la ville coloniale (Cf. Photo 2) de Lima, elle a été

installée à une distance prudente, soit à 10 km de la côte. Lorsque le Pérou a déclaré son indépendance au début du XIXe siècle, Lima est devenue la capitale du pays.

Sa croissance s'est faite lentement jusqu'aux années 1940, lorsque la population a atteint 300 000 personnes. Depuis lors, elle s'est accélérée et, aujourd'hui, la population du Lima métropolitain est bien près d'atteindre les 8 millions d'habitants. Selon Olivera (1991), Lima abrite à présent 28 % de la population du Pérou (45 % de la population urbaine), elle compte pour 69 % de la production industrielle interne, 70 % des entreprises industrielles y sont situées, 87 % des ressources fiscales de l'État en proviennent et on y retrouve 83 % des dépôts bancaires et 98 % des investissements privés.

Carte 3 : Processus d'expansion de la ville de Lima entre 1981 et 2000 :

Source : Auteur, d'après l'Atlas Environnemental de Lima.

Cette croissance persistante est la raison d'un ensemble de déficiences, et avant tout dans le Secteur des services vitaux. La migration interne est continue, principalement en provenance des Andes. 64% de la population de Lima Métropolitaine bénéficie de l'accès à l'eau potable personnel et seulement 60%, de services hygiéniques basiques.

-Une évolution urbaine et démographique incontrôlable

La ville et le mode de vie urbain de la capitale séduisent les populations rurales, le plus souvent issues de la région andine, en situation de paupérisation. En milieu tout parait plus simple (santé, emploi, logement, éducation). Les difficiles conditions de vie des campagnes refoulent une multitude de ruraux à l'abandon vers la ville. Or, la tendance est avant tout à la constitution de mégapoles fortement dualisées entre des quartiers à fort pouvoir d'achat et des zones sous-intégrées aux infrastructures publiques urbaines. De toute part des périphéries urbaines dites « spontanées » surgissent du désert souvent selon un processus invasif désordonné, comme on peut le voir sur les photos 6 et 7.

Photo 6 et 7 : première étape d'invasion au bord de la Panaméricaine Sud, abris d'esterasi et de
tôle:

Source : Auteur.

La plupart de ces périphéries ont pu être qualifiées de « spontanées », car elles sont construites sans planification de l'espace, ni aménagements (sans viabilisation, sans infrastructures d'adduction d'eau ou d'électricité, par exemple), parfois en toute illégalité sur des terres périurbaines. Au Pérou, les résultats de ces invasions donnent lieux à des quartiers périphériques pauvres présentant des logements familiaux allant du simple abris fait d' « esteras » (mur de palme végétales tressés ,

1 Mur de palmes végétales tressés.

comme sur la photo 6), à de minuscules maisons individuelles de briques ou de parpaings, en dur, mais sans confort moderne. D'abord qualifiés de Barriadas (quartiers) puis de Pueblos Jovenes (quartiers jeunes) ces appellations ont étés abandonnées par soucis de partialité et on les appelle aujourd'hui plus simplement « Asentamientos Humanos » (littéralement : établissements humains).

Ces villes non officielles dans la ville, installées dans les espaces délaissés (notamment sur les cerros ceinturant Lima, qui sont des collines sablonneuses à forte déclivité et en perpétuelle érosion, rendant l'habitat précaire et insécuritaire), parfois en une nuit, s'opposent au centre d'affaires et les problèmes urbains y sont légions. Ils sont dus au surpeuplement, au manque d'emplois et d'équipements, à l'insalubrité, aux déficiences ou à l'inexistence des réseaux d'eau, d'électricité et d'assainissement. Ces défaillances se caractérisent par les problèmes sociaux, la surmortalité, le sous" emploi.

Comme le souligne Florence Tourette : « Promiscuité et grande pauvreté se mêlent à une violence endémique dans des villes géantes qui ont du mal à digérer ce trop plein de tout »1. En même temps, les conditions de vie dans ces quartiers spontanés sont supérieures à celles du milieu rural abandonné. On y retrouve une prise d'assaut de chaque zone laissée pour compte par la ville, pour s'installer et y tirer profit. Peu importe s'il s'agit d'un habitat spontané et précaire qui finit par s'inscrire dans la durée.

Marginalisés et rejetés aux périphéries de la ville, ces habitats sont aussi des marqueurs des ségrégations et des inégalités urbaines à l'échelle de l'agglomération.

-Les « asentamientos humanos » : marqueurs des inégalités

« La situation d'accès à l'eau et à l'assainissement dans le pays continue à être une barrière fondamentale à la réduction de la pauvreté et des inégalités, même si les chiffres officiels indiquent une couverture intégrale » (Agence Canadienne pour le Développement International).

Comme nous venons de le voir dans l'étude de la croissance urbaine liméenne, les « asentamientos humanos » sont des espaces de promiscuité, de grande pauvreté et qui manquent cruellement d'infrastructures pour leur développement. Cependant, nous sommes venus à la conclusion que dans ces espaces le manque d'eau potable et d'assainissement pouvait également être un facteur aggravant des inégalités sociales. En effet, comme nous en ferons la preuve plus loin, les

1 TOURETTE, Florence, 2005, Développement social urbain et politique de la ville, Pour comprendre le malaise urbain et pour mieux appréhender la politique de la ville, Paris : Gualino Editeur, 167 pages.

« asentamientos humanos » ne bénéficient pas des mêmes conditions d'accès à l'eau. Tout d'abord, d'un point de vue financier, l'eau potable est parfois payée jusqu'`à 10 fois plus cher dans les périphéries que dans les quartiers à fort pouvoir d'achat du centre comme Miraflores ou Surco. De plus, la qualité de cette eau est bien moindre puisqu'elle est tributaire bien souvent d'un réseau de camions citernes qui ne respecte guère en pratique les contrôles d'hygiène imposés pour le nettoiement des cuves.

Photo 8 et 9 : De la cuve du camion-citerne aux bidons personnels de conservation, un

manque d'hygiène flagrant.

Source : Auteur.

De même, la situation à risque des asentamientos humanos dans des lieux ne bénéficiant pas d'un système de voierie adéquate et parfois même perchés à flanc de cerros, implique un difficile acheminement de la ressource, donc un temps et des efforts précieux nécessaires qui occupent une place importante dans le quotidien des habitants. Enfin, la faible qualité de l'eau et le manque de services d'hygiènes spécifiques sont responsables de taux de maladies importants, stigmates des pays du sud comme le choléra. A la fois cause et conséquence des inégalités, la recherche en eau est donc un enjeu crucial dans la lutte contre la pauvreté lancée par l'Etat péruvien.

-La demande actuelle des consommateurs en matière d'eau potable

La consommation totale d'eau dans la zone métropolitaine en 1986 était estimée à environ 21 m3/seconde, soit 11,35 m3/seconde provenant du Rímac et 9,45 m3/seconde de sources souterraines. En 1990, la demande était passée à environ 25 m3/seconde et elle continuera à s'accroître à un rythme d'à peu près 4 % par an pour atteindre 33 m3/seconde en l'an 2000 et 45 m3/seconde en 2010.

Le réseau de distribution principal dessert quelque 60 % de la population avec l'eau tirée du Rímac ainsi que de 106 (42 %) des 253 puits productifs. En 1985, on avait estimé qu'environ 70 % de la population était légitimement raccordée au principal système municipal, 16 % y était illégalement raccordée et enfin 14 % devait s'approvisionner à des robinets publics ou à des citernes. Avec la croissance récente, il est probable que le pourcentage réel des personnes qui n'ont pas l'eau courante ou qui sont illégalement raccordées au réseau soit supérieur à 40 % (2,8 millions de personnes).

Les 147 puits qui restent sont reliés aux réseaux de distribution locaux. C'est de ces puits que les industries, entreprises commerciales et fermes qui recourant à l'irrigation reçoivent la majeure partie de leur eau. Or nous avons vu dans l'état des lieux des ressources aquifères souterraines que leur utilisation n'est actuellement plus envisageable de manière durable, et n'est donc pas une solution à terme à la recherche de la ressource hydrique.

Ainsi aujourd'hui, face à cette croissance démographique démesurée qui se heurte aux limites physiques du site, il est important d'envisager des politiques de développement, visant à anticiper les facteurs du problème et à éviter les erreurs du passé.

I-4 Enjeu politique

Photo 10 : Le quartier de Lomas de Carabayllo marque ses exigences politiques avant les
élections :

Source : Auteur.

Durant la décennie 90, le Pérou a appliqué un programme d'ajustement structurel basé sur la croissance macroéconomique et la compensation sociale, orientée vers la stabilité du pays. Cependant,

malgré certaines améliorations ciblées, les problèmes de la pauvreté, du manque d'emplois et du chômage persistent. Avec la mise en place du nouveau régime, l'agenda du pays aborde entre autre dans ses thèmes d'attentions prioritaires la lutte contre la pauvreté, la décentralisation, la génération d'emplois de qualité et le renforcement des institutions.

Dans ce cadre, les secteurs de l'accès à l'eau et à l'assainissement peuvent être des clefs de lutte contre la pauvreté et de consolidation du processus de décentralisation, avec la participation des municipalités des districts et des municipalités provinciales dans l'organisation et l'application auto soutenue de ces services.

-Cadre juridique des politiques en matière d'eau et d'assainissement

Dans les années 70, le secteur de l'eau et de l'assainissement était à la charge du gouvernement central, mené par le Ministère de l'Habitat dans l'aire urbaine et de la Santé dans l'aire rurale. Durant la décennie suivante, le gouvernement a réorganisé les services de l'aire urbaine, en donnant plus de pouvoir décisionnel aux entreprises tout en maintenant leur direction, leur contrôle et leur propriété dans les mains de l'Etat. Durant cette période a été crée le Service national de l'Eau Potable et des Egouts (SENAPA), propriété du gouvernement, rattaché au Ministère de l'Habitat, dont la fonction était la prise en charge de ces services dans le milieu urbain au travers d'unités d'opérations et d'entreprises filiales, propriétés du SENAPA. Le ministère de la Santé reste en charge de l'aire rurale du pays.

Dans les années 90, le gouvernement a réorganisé la gérance des services d'assainissement en les transférant aux gouvernements municipaux provinciaux ; les unités d'opération et les entreprises filiales passant à la propriété des municipalités, désactivant l'organe du SENAPA. Dans l'aire rurale, le Ministère de la Santé continua de porter la responsabilité des services. Cette prise en charge par les municipalités provinciales fut entérinée par la loi 26338.

A son tour, le PRES fut désigné comme institution directrice et la SUNASS comme institution régulatrice. En outre, se formèrent des institutions canalisatrices de redistribution des investissements pour l'aire urbaine (Fondo Nacional de Vivienda-FONAVI) et l'aire rurale (FONCODESS). Ainsi, se créèrent des projets d'inversion nationaux spéciaux comme le PRONAP.

Le Ministère de l'Economie et des Finances établit un bureau d'inversions, responsable d'orienter les ressources issues de l'inversion pour ce secteur. Ainsi on se trouve devant trois niveaux d'organisation sectorielle autonomes : le niveau macro, en charge du Gouvernement Central ; le niveau

intermédiaire, ou s'organisent les services et agissent les gouvernements locaux ; le niveau opérationnel, ou s'offrent les services et se rencontrent les entités concernées.

Cependant, la décentralisation reste seulement juridique. Les entités du Gouvernement Central et les prestataires urbains formés sous l'égide du SUNASS accédèrent à un renforcement institutionnel pour le développement de leurs fonctions. Mais les services des municipalités locales et les usagers des petites villes (plus de quatre millions d'habitants) ont été étrangers aux programmes d'appui et de formation se référant à l'organisation et la maintenance de la prestation, à la fiscalisation de la qualité du service et à la culture de paiement des usagers. Les organismes sectoriels ont leur siège à Lima, avec une majoration des interventions dans la direction, le contrôle, l'inversion et le financement, mais avec une faible relation avec le développement des capacités des gouvernements locaux, qui participent comme prestataires de service.

Dans la dernière décennie, depuis le siège central se sont crées un ensemble de normes directives et d'actions qui n'ont presque jamais été débattues avec les acteurs locaux, qui sont très peu connues et prises en compte.

-Organisation sectorielle

L'organisation du secteur présente trois niveaux avec les acteurs suivants :

Le niveau macro sectoriel ; depuis lequel se conduit le secteur, s'établissent les politiques, s'effectue le contrôle, le suivi et la formation et s'orientent et se financent les inversions, avec l'intervention des entités suivantes :

Le PRES, au travers de la Direction Générale de l'Assainissement (DGS), est l'entité directrice de l'Etat dans les services d'eau et d'assainissement. Elle établit les politiques et les objectifs stratégiques pour le développement et la maintenance des services.

Ainsi, elle donne la priorité aux projets d'inversion et l'assignation des ressources pour le secteur en accord avec la loi 27293. Cette loi est la Loi du Système National d'Inversion Publique, elle autorise la conformation et établit les règles de fonctionnement des organismes opérateurs des services, quelles soient entreprises prêteuses, unités de gestion ou ensemble d'administrateurs.

Schéma 1 : Fonctionnement de l'intervention :

Source : Pronasar.

- La SUNASS est l'entité de régulation et de contrôle de la prestation des services à l'échelle nationale, et il a pour mission que ceux-ci soient offerts dans des conditions adéquates de qualité, de couverture et de tarif pour contribuer à préserver la santé de la population et de l'atmosphère. Le cadre de la SUNASS est celui des EPS1 publiques, privées ou mixtes dédiées à la prestation des services d'assainissement. Dans la pratique, il intervient dans les entreprises qui administrent les services dans le cadre urbain.

-La COPRI est chargée de la promotion de l'inversion privée dans les entreprises et les projets de l'Etat et dans les oeuvres publiques d'infrastructure et de services.

-Le MINSA est lui compétent en matière d'assainissement environnemental. Il doit formuler les politiques et les normes de qualité sanitaire de l'eau et de protection de l'environnement.

1 EPS : Empresas Prestadoras de Servicios : Entreprises Prestataires de Services.

-Le PRONAP est un organisme déconcentré du PRES. Il a pour finalité l'exécution du programme d'appui au secteur de l'eau et de l'assainissement, pour l'aire urbaine et les petites et moyennes localités.

-Le FONCODES, qui oriente ses activités dans le secteur de l'eau et de l'assainissement vers le financement de l'aire rurale au travers des « Noyaux Exécuteurs » (NE).

- Le FONAVI, crée en 1979 au moyen du Décret de Loi 22591, a pour finalité de satisfaire de manière progressive à la nécessité de logement des travailleurs. Ses fonctions se sont étendues postérieurement au financement d'oeuvres dans les domaines de l'eau, l'écoulement et l'énergie électrique administrés par l'ex UTE FONAVI. Cette fonction est en désamorçage et son administration est restée actuellement à charge d'une commission liquidatrice appelée COL-FONAVI, qui continue à financer des projets eau et assainissement.

-Les CTAR et autres institutions ( ALA-PP.JJ. et PRONAMACHCS) visent à fournir de l'eau et de l'assainissement dans des zones frontières et des zones touchées par le terrorisme.

4 Le niveau intermédiaire, qui correspond aux municipalités provinciales et de districts (194 provinciales et 1821 pour les districts). Les municipalités provinciales sont responsables d'assurer la prestation des services d'assainissement dans la zone géographique de leurs compétences et de conclure le contrat de concession avec les entreprises prestataires de service (règlement de la Loi 26338). Les municipalités des districts, dans les petites villes, peuvent administrer le service directement ou promouvoir et organiser des unités de gestion publiques, privées ou mixtes pour assurer la prestation du service. En ce qui concerne Lima, ce niveau est assuré par l'IMP, conjointement avec les petites municipalités des districts. L'Institut Métropolitain de Planification est l'organe consultatif du plus haut niveau du Conseil Métropolitain de Lima en matière de planification du développement de la métropole. Son activité enrichie par les nouvelles perspectives, technologies et expériences, est en vigueur depuis quatorze années.

4 Le niveau micro sectoriel ou opérationnel, dans lequel on développe la prestation du service.

-Le Programme « Agua para todos »

Le programme « Agua para Todos» -Eau pour Tous-, est un projet de lutte contre la pauvreté par l'accès à l'eau et à l'assainissement dans les bidonvilles de Lima, initié en 2006 par le Ministère de l'Habitat, de la Construction et de l'Assainissement.

Photo 11 : Logo du Programme « Agua para todos » :

Source : Pronasar.

Ce programme vise à respecter la déclaration de l'ONU au Sommet du Millénaire1 ainsi que le compromis promis par la politique de l'Etat en la matière, qui vise à étendre l'accès à l'eau potable et à l'assainissement de base, accordant sa priorité à l'infrastructure d'assainissement.

Pour atteindre ces objectifs, l'Etat propose une inversion de plus de 4 millions de dollars américains, répartie entre 3 domaines : l'eau potable, l'assainissement et le traitement, comme nous le montre le tableau (insérer). Pour se faire, les experts se basent sur une viabilité financière assurée par la récupération de la dette du FONAVI, la récupération de la valeur réelle du tarif et les précisions fiscales. La rapidité et la transparence dans l'atteinte de ces objectifs sont soulignées (ceci forme la base de la loi d'optimisation).

Le programme « Agua para Todos» sera ainsi régi par trois grands ensembles : un plan national d'assainissement, un plan financier et un fond d'inversion sociale d'assainissement (INVERSAN) ainsi que par une réforme juridique du secteur (loi d'optimisation, loi INVERSAN).

Le ministère a dressé pour l'année 2006 des mesures d'urgences afin de dynamiser le lancement du programme, cependant devant de timides premiers résultats, ces mesures sont toujours actuellement à l'ordre du jour :

-Une participation qui se veut importante dans le choc d'inversion consistant au financement de 185 projets viables priorisés, grâce au crédit supplémentaire 2006 (loi 28880) ;

1 Objectif numéro dix de la Charte du Millénaire exposée par l'ONU au Sommet du Millénaire en 2000 à New York :

« Réduire de moitié pour l'année 2015 (année de base :1990), le pourcentage de personnes qui manquent d'un accès soutenable à l'eau et à l'assainissement ».

-9 schémas de développement dressés par l'entreprise d'eau et d'assainissement de Lima, la SEDAPAL (2 déjà lancés et 6 en processus) ;

-La création d'un processus de sélection simplifié des projets (décrets : 024-2006-VIVIENDA et 024-2006) ;

- La préparation de nouvelles opérations avec les institutions suivantes : BID, BM, KfW, JBIC, CAF et OBA ;

-Création d'une nouvelle politique financière pour le projet ;

-Création de l'INVERSAN.

De manière concrète, depuis la création de ce programme, deux convocations publiques ont été réalisées par le chef d'État, Alan Garcia, pour doter des habitants de faibles ressources d'eau potable et d'égouts. La première convocation date du 2 septembre 2006 et concernait le district de Carabayllo, où le programme « Agua para todos » profitera à 160 000 habitants de ce secteur.

L'investissement total des oeuvres monte à 44 millions de nouveaux sols et comprend la construction et l'équipement de quatre puits tubulaires, de réservoirs et du collecteur l'Espoir, ainsi que l'amélioration de réservoirs existants, l'installation de réseaux de distribution et d'un collecteur principal et installation de réseaux secondaires et d'égouts, entre autres oeuvres qui permettront d'améliorer la qualité de vie de plus de 37 000 habitants de faibles ressources.

Cependant, il est trop tôt aujourd'hui pour pouvoir mesurer les avancées de ce programme. De plus, depuis décembre 2006, aucun autre plan d'action n'a encore vu le jour et les premiers résultats sont encore attendus dans les premières zones touchées.

-Les autres acteurs et la problématique du manque de concertation intra sectorielle

Face à la lenteur et à l'ingérence du système politique, d'autres acteurs tentent aujourd'hui d'apporter des solutions au problème de l'eau et de l'assainissement liméen.

Il s'agit sur le terrain des Organisations Non Gouvernementales, quelles soient nationales ou internationales, ainsi que de l'action de certaines municipalités locales qui devant l'ingérence étatique décident de prendre les devants de l'action de développement, et enfin, à une échelle encore plus grande, de l'action de comités de quartiers, rassemblant des riverains des quartiers spontanés dans une démarche d'aménagement participatif du territoire.

Notre travail de terrain nous a très vite permis de comprendre qu'il était difficile de concilier les attentes et les modes d'opération de chacun de ces acteurs. Ces mésententes sont souvent liées du coté des ONG à un refus en bloc de toute action étatique car celle-ci serait assimilée à l'acceptation du gouvernement d'Alan Garcia, toujours responsable dans les esprits de la grave crise économique qui a touché le Pérou à la fin des années 80.

D'autre part, les municipalités locales et les comités de quartiers à l'origine de projets de développement appartiennent majoritairement à une population de migrants, responsable historiquement des invasions des années 70 et 80, et par la même ne recevant à la base aucune légitimité de la part de la Municipalité liméenne. Dans cette optique, ces groupes ont lancés des projets extrêmement locaux de développement, comme ce fut le cas à Villa El Salvador, dans le cône sud de Lima, qui ont souvent connus de très bons résultats puisque réalisés en concertation et avec l'aide de la population.

Enfin, il faut relever que toutes les concurrences ne sont pas originaires des oppositions formulées à l'encontre de l'Etat ou de sa politiques. Il existe aussi de manière pernicieuse et sous forme de non-dit, un certain rapport concurrentiel avec les techniques de développement sur le terrain entre les différentes ONG ou au travers des entreprises privées lors des offres de projets, afin de gagner les subventions qui leur seront nécessaires. Ce rapport est évidement légitime dans le cadre d'un effort de rentabilité et de fonctionnalité technique, cependant il est souvent ici faussé à cause de la corruption du système décisionnel péruvien, encore bien trop souvent à la main de quelques puissants et des entreprises dont ils sont actionnaires.

Un effort de concertation et d'échange des connaissances et des données techniques est aujourd'hui nécessaire à la réalisation des projets de développement sur le terrain.

Il Conclusion partielle

La croissance continue de la ville de Lima et le manque de ressources financières pour mettre en oeuvre des mesures de contrôle environnemental contribuent à la dégradation de la qualité de l'eau. La ville est en croissance accélérée et les ressources en eau sont fragiles et restreintes. Si la croissance actuelle se poursuit, Lima aura une population de plus de 10 millions d'habitants d'ici à l'an 2000 et de près de 15 millions d'ici à 2010. Alors, le Rímac et le Chillón, ainsi que l'aquifère, ne seront plus en mesure de répondre aux besoins domestiques, industriels et environnementaux de la région urbaine.

Il est difficile de trouver d'autres sources d'eau. Les meilleures options sont probablement dans la région montagneuse, surtout au-delà de la ligne de partage des eaux, dans les cours supérieurs des tributaires de l'Amazone. Toutefois, tout projet qui aurait pour but d'acheminer de l'eau sur de telles distances et à partir de lieux aussi inaccessibles sera extrêmement coûteux, de l'ordre de plusieurs centaines de millions de dollars.

La dette nationale du Pérou est importante et sa côte de crédit est faible dans le système financier international. Le niveau d'investissements requis pour exploiter de nouvelles sources d'eau n'est sans doute pas réalisable dans un avenir prévisible. Par conséquent, la solution immédiate au problème doit comporter une meilleure gestion et la protection des bassins du Rímac et du Chillón ainsi que de l'aquifère de Lima, la réutilisation des eaux usées (du moins aux fins de l'irrigation et de l'industrie) et un effort de rénovation du réseau de distribution pour limiter les pertes d'eau.

La solution définitive consisterait à réévaluer le potentiel environnemental de croissance de la ville de Lima en l'intégrant dans une politique nationale démographique et économique. Le milieu ambiant est fragile et il y a une limite au degré d'urbanisation qui serait supportable. Il y a déjà longtemps que cette limite a été dépassée. La plaine côtière ne peut pas supporter une population de 7 millions d'habitants (encore moins une population de 10 millions comme l'indiquent les projections pour la prochaine décennie) sans subir des effets préjudiciables irréversibles. Cependant, aujourd'hui il est plus raisonnable de se baser sur une trame de projets de développement des infrastructures au niveau local pour faire face à l'urgence sans aggraver les processus actuels de dégradation de la qualité de l'eau.

Deuxième partie : L'accès à l'eau pour 8 millions

d'habitants : un défi à plusieurs niveaux

Assurer l'accès à l'eau pour tous dans une mégalopole de près de 8 millions d'habitants et en croissance permanente, avec des ressources naturelles qui elles ne sont pas extensibles, est un défi important. A Lima, cette tache à été attribuée depuis plus de quatre siècles à une entreprise étatique : la SEDAPAL1 dont la mission est la connexion de chaque foyer de Lima métropolitaine aux services d'eau et d'assainissement. Cependant, aujourd'hui, plus d'un million de liméens ne reçoivent pas l'eau à leur domicile, selon différentes enquêtes réalisées sur le terrain par les ONG, et contrairement aux chiffres donnés par la municipalité de Lima qui fait état d'une couverture de 89%2 (Cf. Carte 4).

Cette différence de chiffres s'explique par la définition donnée par les autorités liméennes de la notion de citoyen. En effet, on considère que les personnes établies sur des terrains sans titre de propriété sont en situation d'irrégularité et ne sont donc pas citoyens. Cela implique qu'ils ne bénéficient pas du droit au logement, au service public et au statut de citadin à part entière. Dans ces conditions, ces personnes se retrouvent dans une situation de clandestinités et de non-droit totalement occultée par les pouvoirs publics, ne rentrant pas à cet égard dans les chiffres officiels.

Afin d'avoir un regard plus réel sur l'approvisionnement en eau à Lima, nous allons ici faire un état des lieux global de la situation actuelle pour analyser les différents paramètres qui interviennent dans le bon fonctionnement d'un réseau d'eau, et mettre en avant les dysfonctionnements.

I- Le capital « eau » liméen ; état de la production d'eau

actuel

I-1 Système de distribution

La distribution de l'eau potable à la population est réalisée au travers d'un ensemble de systèmes. On dénombre les systèmes : d'emmagasinage (réservoirs), de distribution (réseaux), les stations de pompage et les chambres de pression.

1 SEDAPAL : Servicio de Agua Potable y Alcantarillado de Lima (Service d'Eau Potable et d'Egout de Lima), Compagnie des eaux de la métropole de Lima.

2 Source : Atlas Ambiental de Lima.

-Le système d'emmagasinage d'eau potable :

Le système d'emmagasinage d'eau potable se compose de 475 réservoirs en opération qui représentent une capacité d'emmagasinage de 420 000 m3. Ces réservoirs sont situés à l'intérieur de l'aire de service de la SEDAPAL. En complément, se trouvent les réservoirs de la station de La Atarjea, avec une capacité de 231 000 m3, qui contiennent l'eau traitée avant sa distribution.

- Les systèmes de réseaux primaires et secondaires de distribution de l'eau potable :

Ils comptent en 2005, 10 342 kilomètres de canalisation ; 627 correspondant au réseau primaire et 9715 kilomètres au réseau secondaire. Le système de distribution comprend aussi les dispositifs d'acheminement au consommateur, les connexions à domicile, les fontaines publiques et les bornes incendies.

I-2- Description des différentes modalités d'accès à l'eau à Lima

Selon les chiffres dressés par l'Etat, ce système de distribution permet aujourd'hui un accès au réseau d'eau pour 89% de la population et au réseau d'évacuation des eaux usées pour 84% de la population.

Photo 12 : Château d'au dans le district de Callao, « Aujourd'hui tout le monde a besoin d'eau ».

Source : Auteur.

Cependant, il est évident que les personnes n'ayant pas accès à l'eau par le biais du réseau de la SEDAPAL, ont recours à d'autres systèmes d'approvisionnement pour leur subsistance.

Nous en relevons six, du plus primaire au plus élaboré :

- l'approvisionnement à une source ;

- l'approvisionnement à un cours d'eau ou à un canal d'irrigation ; - l'approvisionnement à un puits personnel ;

- l'achat à des camions-citernes ;

- l'approvisionnement à un réseau de bornes fontaines publiques ; - l'approvisionnement personnel domiciliaire connecté au réseau.

Photo 13 et 14 : Approvisionnement par borne fontaine à Huachipa, et camion-citerne.

Source : Auteur.

Parmi ces modalités, il faut distinguer celles qui sont dépendantes d'un tiers (SEDAPAL, entreprises privées de camions-citernes) de celles qui, après installation, permettent une autonomie de l'utilisateur, tant dans l'utilisation que dans la maintenance des infrastructures _s'il y'en a.

De plus, dans cette dernière catégorie, il faut aussi faire une distinction entre celles qui fonctionnent en circuit fermé et celles qui ne présentent aucune stratégie de fonctionnement durable.

En effet, en vue de la situation actuelle de stress hydrique de la capitale, ces dernières seront à privilégier dans la création de futurs projets. Intéressons nous tout d'abord à la situation majoritaire, le raccordement au réseau de la SEDAPAL.

Carte 4 : Couverture du service d'eau selon les chiffres actuels donnés par la SEDAPAL:

Source : SEDAPAL.

Il-La SEDAPAL, une entreprise nationale prise entre l'étau

de la rentabilité et de l'intérêt social

II-1 Création et statuts de l'entreprise

-Statuts et fonction de l'entreprise :

La SEDAPAL -Servicio De Agua Potable y Alcantarillado de Lima- est une entreprise étatique de droit privé, propriété intégrale de l'Etat, à la charge du Ministère du Logement, de la Construction et de l'Assainissement. Elle bénéficie d'une autonomie totale tant au niveau technique, administratif et économique que financier. Ses services sont de nécessité et d'utilité publique et d'intérêt social. Actuellement, la zone géographique de responsabilité de la société pour la prestation des services d'assainissement regroupe la Province de Lima et la Province Constitutionnelle de Callao. Officiellement, sa mission consiste à l'amélioration de la qualité de vie de la population de Lima, à l'administration efficace des ressources en eau, et au traitement adapté des eaux usées afin de préserver l'environnement de la capitale péruvienne.

-Construction historique du statut de la SEDAPAL :

C'est le 21 décembre 1578 que l'eau arrive pour la première fois à la fontaine de la Plazza Mayor, mais il faut attendre 1855 pour voir la création d'une entreprise d'eau potable à Lima. SEDAPAL a beau naître officiellement au lendemain du retour à la démocratie sous la présidence de Fernando Belaunde, le 12 juin 1981 (et former avec les autres entreprises existantes à Arequipa et Trujillo, et la Direction Générale des Travaux Sanitaires du Ministère du Logement SENAPA, l'entreprise mère propriétaire des actions et des trois filiales), il nous faut retenir essentiellement la date de 1962, année de formation de la première entreprise d'assainissement avec une autonomie administrative et financière. En conséquence, aujourd'hui, la mission de SEDAPAL est d'étendre le réseau d'eau à l'ensemble de la communauté liméenne, et ce, tout en essayant d'avoir une balance économique la plus saine possible, ce qui n'est pas chose aisée vu les conditions de crise économique que traverse le Pérou depuis quelques décennies.

II-2 Projets et politiques de la compagnie

- Une plus grande préservation des ressources souterraines...

Comme nous l'avons vu dans la première partie, la santé des nappes phréatiques liméennes est loin d'être bonne. C'est pour cette raison que la SEDAPAL n'a pas eu d'autre choix que d'adapter sa politique d'approvisionnement à ce problème, en privilégiant les eaux de surfaces.

Depuis 1970, la quantité d'eau acheminée à Lima a plus que doublé, passant d'un peu moins de 300 millions de m3 à plus ou moins 650 millions par an. Mais alors que pendant les années 70 et 80, le but essentiel était la production d'eau, celui-ci s'est légèrement infléchi dans la décennie suivante. Certes la mission première est l'acheminement toujours plus important du liquide vital mais l'idée de développement durable a fait son chemin dans les têtes, et les conséquences pour l'avenir des politiques présentes sont prises en compte. Ainsi, l'exploitation des sources de surfaces est préférée aux autres alternatives qui ne doivent être utilisées que comme compléments ou en cas de crise du système principal d'acheminement. En effet, alors que plus de 40% de l'eau acheminée dans la capitale provenait de l'exploitation des galeries d'infiltration ou des pluies en 1980, ce chiffre est retombé à 25% en 2002. Le rapport des forces évolue en faveur des sources de surface, mais il est bien plus significatif de montrer que la production via les sources alternatives diminue même en absolu. Aujourd'hui ; seulement 165 millions de m3 d'eau par an sont prélevés des galeries d'infiltration, et des puits, représentant un peu moins de 80% des prélèvements opérés sur les mêmes sources deux décennies plus tôt.

- ...passant par la potabilisation des eaux de surface

La production d'eau potable issue des eaux de surfaces concerne deux cours d'eaux : le Rio Chillon et le Rio Rímac.

Le processus de traitement du Rio Rímac est réalisé dans deux usines de traitement, localisées sur le site de La Atarjea. La Atarjea signifie le « conduit qui porte les eaux au réservoir fournissant la population ». Ce site, situé à l'est de la ville, entre les districts de San Agustino et Santa Anita, proche des rives du Rímac, à 6 kilomètres de La Plaza Mayor de Lima et au pied des cerros Santa Rosa et Quiroz. Historiquement, c'est dans ce lieu où la nature offrait à l'homme une eau cristalline, que venaient s'approvisionner en eau les premiers habitants de Lima. Depuis son existence la compagnie

des eaux de la ville s'appui principalement sur ce site, et on y trouve les deux usines de traitement, construites entre 1955 et 1994, à l'intérieur d'une aire de 315 hectares, hautement surveillée et qui fait la fierté de la SEDAPAL.

La première usine est constituée de 36 filtres de type Aquazur de 100m2 chacun. Ces filtres sont lavables (au moyen de pulvérisation d'eau et d'air comprimé) et sont équipé de régulateurs qui réalisent la distribution d'eau de manière automatique. L'usine est composée de deux batteries de filtres et d'un réservoir en béton armé d'une capacité de 1000 m3.

La seconde usine a été crée en 1980 à coté de la première et sur le même modèle et dans un but de réduction du captage des eaux souterraine puisque l'eau qu'elle produit couvre certaines zones initialement desservies par des puits. Devant la croissance démographique et urbanistique énorme des années 90, ces usines n'ont plus assuré une production suffisante. Conséquemment, des travaux ont été réalisé, financés par la SEDAPAL (à 60%), par des donations du gouvernement français (7.3%), un apport du Fond National de l'Habitat -FONAVI- (8.5%) et du Trésor Public (24.2%). Ainsi actuellement la capacité totale de ces deux usines est de 20m3 par seconde (hors de la période d'étiage ou elle est considérablement réduite) et bénéficie selon la SEDAPAL à 6 386 308 millions d'habitants (selon les données du 9ème recensement de la population et de l'habitat de 1993).

Photo 15 : Usine de traitement de La Atar4ea :

Source : SEDAPAL.

- A plus long termes, de grands projets en marche :

« Lima a un déficit énorme entre l'approvisionnement et la demande ; les projections officielles disent que celui-ci sera plus grand dans le futur ». Juan Carlos Barandiaran, ex chef de projets de Sedapal.

Pour faire face à cette constatation inquiétante, la SEDAPAL souhaite mettre en oeuvre une série de projets titanesques afin d'acheminer l'eau en plus grande quantité vers la capitale. Pour aborder le problème, l'entreprise SEDAPAL a prévu divers projets de transvasement d'eau entre des bassins situé au pied des Andes. Il est traité dans sa majorité de transvasements d'eau du bassin de la Rivière Mantaro vers celle du Rímac, ainsi que de Jacaybamba, dans le bassin ce qui est Criard, et d'un barrage de Manchay dans le bassin du Lurín. Ces travaux coûtent des sommes astronomiques qui accroîtront un peu plus la dette de l'entreprise. Le Gouvernement d'Alan García essaye par conséquent d'obtenir les fonds nécessaires du secteur privé à travers des participations des projets spécifiques, sans que son discours contre les privatisations des services essentiels soit altéré. C'est en effet la Japan Bank for International Cooperation (JBIC) qui avancera les deniers à l'entreprise publique péruvienne. Cependant ces dépenses semblent être la meilleure alternative à la surexploitation de l'aquifère liméen.

III L'accès a l'eau, stigmate et facteur des inégalités

sociales

"La bataille pour l'eau et l'assainissement devra être livrée dans les établissements humains, notamment dans les bidonvilles et quartiers d'habitats précaires qui ne cessent de progresser dans les zones urbaines des pays en développement." (Mme Anna Tibaijuka, directeur exécutif du programme des Nations Unies pour les établissements humains)

III-1 Les asentamientos humanos exclus du partage de l'eau

Lorsque l'on parle d'inégalités par rapport à l'accès à l'eau à l'échelle de la capitale, on se pose la question suivante : qui a de l'eau et qui n'en a pas ? Dans quels quartiers peut-on se permettre d'arroser de manière démesurée les espaces verts et terre-pleins (Cf. Photo 16), et dans quels quartiers

doit-on économiser la moindre goutte pour sa consommation et son hygiène personnelle ? Afin de répondre à cette question nous allons étudier la consommation quotidienne par personne et par district à l'échelle de Lima Métropolitaine. Tout d'abord, on remarque qu'une logique centre-périphérie domine nettement sur les degrés de consommation d'eau de chaque habitant dans les districts. De manière exponentielle, plus on s'éloigne vers les périphéries des cônes d'urbanisation Est, Nord et Sud, et plus la consommation chute. Plusieurs couronnes quasi-homogènes se distinguent. La première correspond aux districts les plus aisés et dynamiques du centre, Miraflores, Jésus Maria, San Isidro, qui sont des quartiers internationaux et d'affaire mais aussi résidentiels pour les classes les plus aisées. En moyenne, la consommation quotidienne d'un habitant de ces quartiers dépasse aisément les 300 litres d'eau par jours.

Photo 16 : Dans le district de Miraflores, irrigation à grande eaux d'un terre plein central :

Source : Auteur.

Puis se forme une seconde couronne qui intègre tous les districts du centre ainsi que les districts de Santiago de Surco et La Molina. La consommation quotidienne y est comprise entre 150 et 300 litres par habitants.

Le troisième groupe de districts, dont les habitants consomment entre 80 et 150 litres par jour est composé des districts les moins excentrés des trois cônes périphériques, ainsi que du district de Santa Rosa au Nord. Enfin, une dernière couronne réunit tous les districts périphériques de l'agglomération métropolitaine de Lima. Leurs habitants ont une consommation réduite, comprise entre

4 et 80 litres par jours. Ce sont donc à l'évidence, les « asentamientos humanos» qui ont la consommation la plus moindre.

Le degré de consommation de la population est en évidente relation avec le raccordement ou non de leurs districts au système d'approvisionnement en eau du réseau de la SEDAPAL. Ainsi, comme on pouvait s'en douter, les districts desservis par le réseau SEDAPAL sont ceux qui consomment le plus d'eau.

Les habitants du centre, presque tous reliés au réseau de l'entreprise publique sont les plus grands consommateurs alors que les populations des districts en marge du réseau ont une des consommations les plus basses de la métropole.

Il y a donc une corrélation importance entre l'accès au réseau et la consommation en eau, cependant elle n'est évidement pas suffisante pour expliquer le phénomène d'inégalité d'accès. Pour cela, il faut se pencher sur les particularités socio économiques des quartiers périphériques ainsi que sur la question du prix de l'eau, que nous allons aborder maintenant.

III-2 Le prix de l'eau

Les personnes qui vivent dans des habitats précaires sont les premières à être frappées par les maladies liées à l'eau Souvent, le seul moyen dont disposent ces populations pour se procurer de l'eau potable consiste à en acheter auprès de fournisseurs privés, à un coût jusqu'à dix fois supérieur à celui de l'eau courante.

- Les prix du réseau de la SEDAPAL :

La SEDAPAL s'occupe de plus de 1 000 000 d'usagers. Pour effectuer l'établissement et l'application des tarifs, elle classifie ces usagers en cinq catégories : sociale, domestique, commerciale, industrielle, et étatique. 94% des usagers sont considérés comme « résidentiels » et inclus dans les catégories sociale et domestique, les 6% restant forment la catégorie non- résidentielle.

En accord avec son cahier des charges, la SEDAPAL a établi à Lima une politique de subvention de l'eau consistant en théorie à faire payer plus cher aux industriels et aux entreprises qu'aux particuliers. En effet, alors que le coût moyen pour un mètre cube d'eau peut être chiffré à

1.5487 sol en 2002, soit 0.4407 dollar, les entreprises commerciales et les industriels payent 3,238 soles (0,9225 dollars) et l'Etat 1,614 sol, soit 0.4598 dollar1. Les volumes d'eau consommés par l'Etat et les particuliers sont donc subventionnés par les industriels et les entreprises commerciales.

L'entreprise publique assure également des prix plus modérés pour ses plus faibles consommateurs, jugés raisonnablement comme étant les plus démunis. Ainsi à Lima, plus on consomme d'eau, plus on paie cher le litre supplémentaire.

La SEDAPAL pénalise ainsi les gros consommateurs au nom de deux principes : une politique de rationnement de l'eau dans les contextes actuels de pénurie, et une politique de subvention envers les consommateurs les plus pauvres qui sont reliés au réseau. Les politiques de l'entreprise fonctionnent parfaitement l'une avec l'autre mais peuvent se révéler dangereuses pour l'entreprise elle-même.

Ce serait le cas si ces mesures de pénalisation financière de la surconsommation avaient un effet coercitif, le prix de l'eau pour les plus petits consommateurs augmentant parallèlement pour retrouver la plus-value manquante.

De plus, une autre mesure de subvention concerne cette fois ci les consommateurs s'approvisionnant aux bornes-fontaines. Elles bénéficient en effet d'un tarif régulier au litre quel que soit le volume consommé. Celui-ci est équivalent au coût des vingt premiers litres du système particulier, soit 0.894 sol.

Cependant, parallèlement à ces mesures, le prix de l'eau à Lima connaît depuis quelques années une hausse significative.

-Le prix des entrepreneurs privés de l'eau :

Comme nous l'avons vu lors de l'étude des différentes modalités d'accès à l'eau, à coté de l'approvisionnement offert par le réseau de la SEDAPAL, on trouve aussi dans les quartiers les plus démunis, un approvisionnement par camions-citernes issus de petites entreprises privés.

1 Chiffres issus du Memoria 2002 de la SEDAPAL.

Photos 17 et 18 : Chargement d'un camion-citerne privé à Ventanilla, et livraison dans l'asentamientos humanos de Lomas de Carabayllo.

Source : Auteur.

Ceux-ci profitent du désengagement de la SEDAPAL dans des quartiers résultants d'invasion et souvent au statut foncier illégal, pour développer leur commerce.

Le prix ne cherche évidemment pas à être compétitif, car les conducteurs de camion savent pertinemment qu'ils sont la seule alternative viable.

Ces camions citernes livrent l'eau à l'échelle d'un bidon de 200 litres au prix de 1.5 sol, à des fréquences diverses selon les diverses situations familiales.

Etant donné que ces 200 litres équivalent à 1/5 de mètre cube, cela signifie que ces opérateurs privés font payer le mètre cube d'eau 7,5 soles, soit plus de 8 fois plus cher que les tarifs que propose la SEDAPAL.

III-3 Qualité de l'eau et questionnement sur la potabilité, la contribution de la qualité de l'eau et de l'assainissement aux risques sanitaires et à l'inégalité.

-Situation de la qualité de l'eau :

Face à la question épineuse de la qualité de l'eau dans une ville qui a compté d'importantes épidémies de choléra et de diarrhées dans les dernières décennies ; la SEDAPAL se veut garante de la potabilité de l'eau fournie par son réseau.

Pour cela, les usines de traitement de La Atarjea bénéficient de procédés de haut niveau technologique et opérationnel qui garantissent le respect des certificats ISO 9001 sur le traitement de l'eau et ISO 14001 qui contribue à la préservation de l'environnement. Ces processus de traitement permettent de transformer l'eau tirée du Rio Rímac en eau «propre à la consommation humaine », complètement compatible avec les normes de qualité proposées par l'OMS1 et les normes nationales.

La qualité de l'eau est surveillée électroniquement au cours des différentes étapes du processus de traitement, 24 heures sur 24, dans des laboratoires chimiques et biologiques, dans le but de vérifier le bon fonctionnement du procédé. De plus, elle dispose d'un plan annuel de production pour les différentes périodes (étiage ou montée des eaux), permettant une utilisation adéquate des réactifs chimiques.

La qualité du Rio Rímac est elle-aussi contrôlée informatiquement, dans le but d'être averti de la qualité de l'eau qui afflue par les bouches d'entrée de l'usine, et en conséquence de pouvoir prendre des décisions pour protéger et optimiser le processus de traitement.

Cependant, à la vue des analyses microbiologiques2 du Rio Rímac au niveau des bouches d'entrée des usines de traitement 1 et 2, on peut s'interroger sérieusement sur la qualité réelle de cette eau. En effet, selon les tests biochimiques effectués par l'équipe gérante de la production de l'eau, le taux de coliforme y est parfois plus de dix fois plus élevé que la limite maximum fixée par la Loi Générale de l'eau, représentant un danger évident pour la santé des populations en situation de pauvreté qui vivent aux abords de ce cours d'eau et s'approvisionnent directement sur les rives du Rímac.

1 OMS : Organisation Mondiale de la Santé.

2 SEDAPAL, 2001-2002, Analyses microbiologiques du Rio Rímac et du processus de traitement des usines 1 Et 2, en moyenne mensuelle.

De plus, à la sortie du robinet, l'eau peut être aussi confrontée à une autre source de contamination. En effet, en raison du stockage dans les citernes sous-terraines et les réservoirs en hauteur, on peut voir se développer un autre type de pollution. Les plus grands facteurs de risque sont l'absence de couvercle hermétique et de rebord de protection (intrusion directe d'agents contaminants), la mauvaise qualité des canalisations internes (corrosion qui contribue à la formation de micro-organismes), et la saleté des réservoirs (facilite l'établissement de colonies de microorganismes).

Cette contamination est un facteur d'inégalité supplémentaire devant la qualité de l'eau car elle concerne une fois de plus les populations les plus démunies. En effet, ce sont elles qui sont le plus souvent soumises aux problèmes d'intermittence lorsqu'elles sont reliées au réseau, ou qui faute de connexion utilisent des stratégies de stockage propices à la contamination (bidons de plastiques ou dans le pire des cas de métal, le plu souvent à l'air libre). Enfin, les populations desservies par les camions citernes cumulent le double poids d'une contamination à l'intérieur des cuves des camions puis d'une contamination lors du stockage âpres livraison. En effet, non seulement, l'eau achetée par les camions provient le plus souvent des réseaux de SEDAPAL et elle n'est donc pas d'une qualité irréprochable, mais en plus ces camions ne sont soumis à aucun contrôle sanitaire.

-Une solution de sécurité inadaptée aux plus démunis : le marché de l'eau en bouteille :

La plus grande sécurité face au problème de la qualité de l'eau est finalement réservée aux populations les plus aisées, il s'agit de l'achat systématique d'eau embouteillée comme eau de boisson. Devant la mauvaise presse accordée à l'eau issue du réseau de la SEDAPAL, ce marché est en pleine expansion comme on peut le constater par la place de plus en plus importante qu'occupe le rayon « eau » dans les supermarchés liméens.

Il reste une solution plus simple et relativement peu coûteuse : faire bouillir l'eau pendant au moins trois minutes.

-Conséquences sanitaires :

Les fortes épidémies de choléra survenues en 1991 et 1992 à Lima sont révélatrices de l'importance des conséquences sanitaires de l'absorption d'eau contaminée par les populations. L'absence d'eau potable et de système correct d'assainissement et d'hygiène entraînent notamment en plein été, d'innombrables infections gastro-intestinales. Selon les chiffres des ONG et de la Banque

Mondiale, en 1992, ce sont plus de 300 000 cas de choléra qui avaient été détectés dans la métropole liméenne, dont plus de 3000 avaient été mortels.

Pourtant, aujourd'hui le choléra est une maladie qui se soigne très correctement si on dispose des moyens hospitaliers nécessaires (mesures de réhydratation et traitement anti-bactériologique), et d'une hygiène et d'un contrôle antérieur de l'eau suffisant. C'est pour cette raison que cette maladie a été éradiquée des pays dits développés aujourd'hui, et qu'elle est un des témoins des mauvaises conditions sanitaires inhérentes aux pays en développement.

Photo 19 et 20 : Des conditions sanitaires en matière d'eau insuffisantes, le lavage du

linge et le stockage de l'eau à San Francisco, Huachipa :

Source : Auteur.

Selon les recherches de l'Institut Pasteur1, « Le moyen le plus efficace pour éradiquer le choléra, transmis par voie oro-fécale (eau, aliments contaminés), est d'élever le niveau d'hygiène ».

Cependant, même si elle est la plus grave de ces affections dues à la qualité de l'eau, le choléra est loin d'être la seule maladie relevée. Ainsi, certaines maladies comme les diarrhées aigues et la poliomyélite sont aussi imputables à l'eau de boisson souillée par les matières fécales. D'autres maladies gastro-intestinales, cette fois-ci d'ordre parasitaires, peuvent aussi apparaître, comme l'amibiase et la bilharziose, de graves maladies dont la récession n'est jamais complète.

Dans la capitale péruvienne, la provenance de ces patients est très significative car elle touche le plus fréquemment les habitants des cônes périphériques de la ville. En effet, selon les chiffres de

1 http://www.pasteur.fr/externe.

l'IN EI1, en moyenne en 1999, les maladies dues à l'eau ont touchées 20 pour 1000 habitants du centre alors que près de 6 personnes sur 100 habitants dans le seul cône Nord ont subi un traitement pour lutter contre ces maladies. De plus, il faut relever que ces chiffres ne concernent que les malades qui sont passés par un centre de santé ou un hôpital, ce qui peut aussi signifier que les chiffres réels sont bien plus importants, le système de santé péruvien étant payant et donc pas systématiquement abordable pour les plus démunis.

IV Manque de constance du service et impact environnemental,

un réseau d'eau « malade»

IV-1 Le manque de constance du service:

Selon le dernier rapport de l'Organizacion Panamericana de la Salud sur les services d'eau et d'assainissement au Pérou, datant de 20002, on note que dans le milieu urbain, presque tous les systèmes d'approvisionnement (99%) offrent des services en manière discontinue : le nombre moyen d'heures de service est de 13.7. À Lima, le pourcentage de la population approvisionnée de manière intermittente est de l'ordre de 70%. Cette situation constitue un facteur de risque pour la détérioration de la qualité de l'eau sur le plan domiciliaire, puisque le manque de continuité oblige à la population à construire des moyens de stockage intra domiciliaire (citernes et réservoirs en hauteur) qui ne sont pas suffisamment protégés et qui ne reçoivent pas propreté et désinfection périodiques. D'après Silvia de Los Rios (CIDAP), 50% de l'eau est perdue dans les « asentamientos humanos » à cause de la mauvaise qualité des canalisations et de l'inadéquation de l'installation du réseau par rapport à la pente.

IV-2 L'impact environnemental:

Moins de 5 % des eaux d'égout dans les villes d'Amérique Latine reçoivent un traitement (World Bank). Au Pérou, ces problèmes environnementaux ont été très tardivement pris en compte par les autorités publiques, comme en témoigne la création en 2003, d'un Service de Gestion de l'Environnement et des Ressources Naturelles au Gouvernement Régional de Callao.

La pollution de l'eau concerne aussi bien les eaux souterraines que les eaux en surface.

1 INEI, 2000, Anuario estadistico, Peru en numeros 2000.

2 Organizacion Panamericana de la Salud, 2000, Evaluacion global de los servicios de abastecimiento de agua y sanéamiento 2000: Informe analitico, Resumen Peru, Lima : OPS, 50 pages.

-La contamination des eaux souterraines:

Une grande partie de la population de Lima dépend de l'eau souterraine ou des puits privés ou collectifs. La qualité est particulièrement mauvaise dans les puits où le taux de nitrates dépasse largement les concentrations permises. Le plus inquiétant, sont les activités urbaines générant la présence d'autres contaminants comme les pesticides, métaux lourds, hydrocarbures. L'extraction excessive de l'eau provoque également la diminution des nappes phréatiques et la salinisation de l'eau.

Dans les dernières décennies, on a réduit les secteurs cultivés sous irrigation étant donné le changement d'utilisation de la terre, d'agricole à urbain, ce qui est à l'origine de la diminution significative de la charge de l'aquifère. En même temps, des problèmes de surexploitation des eaux souterraines se sont présentés autour de 1997, caractérisés par la tendance à la diminution permanente du niveau la nappe et la présence de zones critiques avec détérioration de la qualité de l'eau. Toutefois, ce processus de surexploitation a été contrôlé avec l'exécution des projets mentionnés précédemment. Le rythme de rénovation de l'eau souterraine est très lent. Il peut couler, par exemple, entre 1 et 100 mètres à l'année. En extrayant l'eau souterraine au moyen de puits, on crée une zone sans eau en forme de cône autour du point d'extraction. Tout polluant qui est déchargé au-dessus de ce lieu est porté par le cône directement à la zone du puits et peut affecter de manière très importante la qualité de l'eau extraite. D'autre part, quand l'extraction dépasse la charge dans un aquifère, un déséquilibre hydraulique se produit et le niveau de la nappe peut diminuer aux niveaux critiques, mettant en risque les réserves d'eaux souterraines et sa qualité. Pour que toute la population dispose d'une quantité d'eau suffisante, de qualité appropriée et de manière soutenable, il est nécessaire d'effectuer une gestion efficace de la ressource hydrique souterraine.

-Pollution et essoufflement des eaux de surface

Pollution des eaux en surface : Des 3 rivières existantes à Lima, la rivière RIMAC est la plus importante et fournit 61% de l'eau potable distribuée par SEDAPAL, servant à environ 75% de la population. Dans la station d'épuration de l'Atarjea administrée par SEDAPAL, la rivière contient un haut niveau de pollution d'origine bactériologique et chimique, provenant des « asentamientos humanos » et des mines situées en amont.

Le processus de traitement permet de diminuer une partie de la pollution mais il reste deux préoccupations majeures:

o La concentration de métaux (plomb) dans les robinets,

o L'exposition directe des classes défavorisées aux eaux polluées :

beaucoup d'habitants utilisent directement l'eau de la rivière pour la consommation

humaine, le nettoyage des aliments, des outils, l'irrigation des zones agricoles...

Selon le Ministère de la Santé et la Direction Générale de la Santé Environnementale1 , à cause de ces agents contaminants, les Rios Rímac et Chillon sont aujourd'hui en perte d'équilibre écologique, et l'avenir n'annonce pas une inversion immédiate de cette tendance par faute de traitement des eaux usées.

- Le manque de traitement des eaux usées ; conséquence de la pollution de la côte

Lima Métropolitaine a plus de 8 millions d'habitants, et l'eau utilisée se transforme en eaux d'égout ou en eaux usées. Par manque de traitement de ces eaux usées, on déverse quotidiennement aux rivières et à la mer presque 2 millions de mètres cube. Étant donné la présence de micro-résidus hydro biologiques contaminées, la décharge des eaux usées au niveau de la plage est à l'origine d'une série de problèmes associés à la santé publique (constatations de maladies de la peau et des yeux après s'être recrée sur dans des plages contaminées), perte de l'esthétique des plages et détérioration et/ou perturbation des ressources marines en général. Cette situation affecte particulièrement à la baie de Miraflores, et spécialement les plages de la Costa Verde, principal centre de dissémination de la population métropolitaine.

SEDAPAL, conscient de ce problème, développe de grands projets dans les zones sud et nord de Lima pour récolter toutes les eaux servies d'utilisation domestique et industrielle et leur donner le traitement adéquat. En accord avec le plan d'assainissement de l'entreprise, les excédents d'eaux d'égout et usée « disparaitront », à travers 2 futurs canalisations sous-marines, dans le sud et dans le nord, après un « traitement spécial ».

La situation actuelle de l'agglomération de Lima est préoccupante, en particulier dans les zones de grande pauvreté. Elle s'est construite et continue à évoluer en dehors des principes de développement durable ce qui peut menacer son futur

1 Ministerio de Salud et Direccion General de Salud Ambiental (DIGESA), 2000, Peru aspectos ambientales y opciones estrategicas, Documento del Banco Mundial.

V Conclusion partielle

La SEDAPAL produit aujourd'hui une partie du capital « eau » présent dans le secteur aride ou s'est établi la ville macro céphalique de Lima. Cependant, malgré l'expérience et la pérennité de cette entreprise étatique, aujourd'hui à Lima, tous les citoyens ne peuvent pas disposer d'eau dans les mêmes quantités et avec une qualité équivalente. Ce sont les asentamientos humanos, stigmates de la croissance démographique démesurée de la ville et de l'exode rural du pays, qui souffrent de ces différences de quantité et de qualité de la ressource vitale qu'est l'eau.

Ce poids démographique pèse de plus en plus fortement sur l'environnement, rendant la tache plus difficile à la SEDAPAL pour trouver une eau de bonne qualité. De plus, devant le manque criant de systèmes d'assainissement, l'équilibre environnemental est rompu.

On se trouve donc dans la nécessité immédiate aujourd'hui, face à ces urgences sociale et environnementale, de fournir un accès à l'assainissement et à l'eau, sans distinction foncière ou de citoyenneté, au risque de mettre en péril l'ensemble de l'agglomération de manière irrémédiable.

Or, la SEDAPAL se veut une compagnie d'intérêt social, cependant c'est avant tout une entreprise qui doit respecter des budgets pour sa survie, et qui est donc aujourd'hui en incapacité financière de relever les défis de l'eau à l'échelle d'une capitale de 8 millions d'habitants.

A ce niveau d'impasse, la solution doit venir de l'Etat, une réponse politique qui permette de nouveaux choix d'investissement budgétaires afin de concentrer ses priorités d'actions sur la question de l'eau.

Cependant, face à l'urgence aujourd'hui, des réponses alternatives pour permettre l'accès à l'eau naissent aux coeurs même des foyers d'inégalité, dans les asentamientos humanos de la périphérie, menées de front par d'autres acteurs du développement.

Ce sont ces réponses alternatives qui offrent de nouvelles réponses à une échelle plus locale mais peut être inscrite plus efficacement dans la durée, que nous allons analyser dans notre troisième partie.

Troisième partie : Les alternatives de l'accès à l'eau

potable et à l'assainissement :

II-ONG, municipalités locales et comités de quartier : les

acteurs à la recherche d'une alternative

Durant le dernier semestre de 2006, se sont produit au Pérou un ensemble de processus sociaux et politiques qui, en termes généraux, ont réaffirmé la démocratie et la transition d'un gouvernement civil à un autre, tant au niveau national que régional et municipal. La démocratie est une valeur que les citoyens doivent réaffirmer en permanence, et c'est cette valeur que les ONG, que nous avons suivies sur le terrain, essaient de faire passer dans un processus de démarche participative, au travers de l'élaboration de leur projet de développement.

En 1991, après les ravages de l'importante épidémie de choléra, les autorités locales ont instauré l'APPJ : Proyecto Alimentation de Agua Potable para los Pueblos Jovenes de la Ciudad de Lima. Ce projet, précurseur du projet Agua Para Todos, a pour effet la construction de réservoirs approvisionnés par camions citernes qui vendaient l'eau à l'unité administrative des systèmes autonomes. A partir de ces systèmes de réservoirs, les ONG ont envisagé la reproduction de ce modèle dans les quartiers marginalisés qui ne pouvaient pas bénéficier d'une ressource direct de pompage des nappes phréatiques souterraines, ou la création de nouvelles unités d'adduction d'eau dans les quartiers ou la création d'un captage souterrain était envisageable. Mais avant de comprendre en quoi consiste ces projets, il est intéressant de présenter les ONG qui nous ont permis de suivre l'évolution de projet de développement sur le terrain, et de saisir leur statut, leur stratégie d'intervention, et le niveau de relation qu'elles ont avec les institutions publiques et étatiques.

I-1 Présentation des ONG étudiées :

-Le CIDAP :

Le CIDAP est une institution non gouvernementale sans but lucratif qui se propose de contribuer à dépasser les problèmes de pauvreté urbaine, en produisant des propositions de développement soutenable et en créant des formations pour les autorités ou les citoyens : « Pour

qu'ils soient constructeurs de villes, afin de s'engager dans un compromis entre les politiques actuelles et le secteur social du pays »1.

Objectif de l'association : En étant une institution spécialisée dans le domaine de la lutte contre la pauvreté urbaine et dans la promotion des droits sociaux, économiques, politiques et culturels liés à la vie urbaine, le CIDAP a pour objectif de :

* Contribuer à reconstruire et/ou à développer des formes d'actions sociales en coopération avec des habitants pauvres des secteurs centraux et périphériques des villes. Ces actions étant liées à l'amélioration des conditions de logement et d'habitat à l'échelle du quartier, du district et de la ville. Afin de concrétiser cet objectif, le CIDAP organise la formation de nouveaux dirigeants, la reconnaissance légale et la concrétisation des organisations, le développement de systèmes institutionnels de participation au sein de l'organisation et d'intégration de ces organisations à la vie urbaine.

* Contribuer à formuler et/ou à exécuter avec la participation active de la population : des oeuvres, des programmes, des plans, des projets et autres actions et services qui à l'échelle quartier, zone ou ville, améliorent les conditions de vie de leurs habitants.

* Développer une connaissance plus précise des facteurs ayant un impact de manière positive et/ou négative dans les conditions de vie des habitants, pour contribuer à la recherche d'alternatives à moyen et long terme.

« Le travail que nous effectuons est défini par l'intersection et l'interaction de trois dimensions :

* L'habitat des villes ; de manière spéciale la recherche pour l'amélioration des conditions de vie des secteurs populaires, en analysant leur problématique interne et les relations avec l'ensemble de la ville.

* L'organisation de ses habitants, qui sont celle qui leur permet d'agir comme sujets acteurs de leur développement propre.

* Le gouvernement des espaces urbains, qui dans un vaste sens est compris comme le caractère institutionnel dont on dote les villes pour être régies, et le système droits et devoirs de leurs citoyens. Les sujets avec lesquels nous travaillons sont préférentiellement des hommes et des jeunes femmes qui résident dans ces secteurs populaires, et qui sous diverses modalités, sont organisés et s'associent pour chercher des solutions à leurs problèmes. Ils font partie d'un secteur social ou le droit

1 , .

D apres la définition des objectif du CIDAP, sur le site internet http://www.cidap.org.pe/, site internet du CIDAP : Centro de

Investigaciòn, Documentaciòn y Asesoria Poblacional.

de disposer d'un logement digne et de vivre dans un environnement urbain avec des conditions de vies adéquates sont de façon permanente menacé.

Notre analyse CIDAP aborde les problèmes associés à la pauvreté urbaine et ses causes depuis le regard et les intérêts des habitants urbains pauvres. Et il cherche à le faire avec la plus grande solvabilité technique et professionnelle qui lui est possible. Cette entrée technique et professionnelle nous donne une position critique face à l'ensemble de la situation existante, mais aussi face à quelques discours et aux pratiques du monde populaire ou des secteurs qui à partir de propositions populistes, disent travailler pour leurs intérêts. »Témoignage de Samuel Yañes Tornes, directeur du CIDAP à Lima, spécialiste sur le thème de la pauvreté urbaine et du développement.

-Le CESAL :

Le CESAL est une organisation non gouvernementale de coopération internationale née en 1988, enregistrée par le Ministère de l'Intérieur comme association sans but lucratif et déclarée Organisme d'Utilité Publique le 24 avril 2001. CESAL est une organisation indépendante d'autres organismes à caractère économique ou politique. Il est né d'une expérience chrétienne vécue communautairement et ouverte au monde. La Mission de CESAL est de travailler pour améliorer les conditions de vie des destinataires des projets de développement, en tenant compte de tous les facteurs qui influencent la réalité, en partant du ressenti et de l'expérience des bénéficiaires eux-mêmes et, par conséquent, en les impliquant dans le développement des projets comme véritables protagonistes de leurs vies. CESAL est enregistré dans l'Agence espagnole de Coopération Internationale, qui constitue une source importe de financements de ses actions dans les pays en voie de développement. En outre, cette ONG bénéficie du financement de l'Union Européenne dans de nombreux projets ainsi que de plusieurs Communautés Autonomes, de Députations et de Mairies espagnoles. Ces institutions constituent, avec leurs partenaires et collaborateurs, la base qui permet la présence de l'organisation dans le monde.

I-2 Stratégies d'intervention :

Le CESAL développe une stratégie intégrale tournée vers la transmission des principes de l'éducation pour le développement. Cette méthode de travail exige comme point de départ la promotion d'une activité à long terme qui suit un itinéraire éducatif. Cette proposition éducative a pour thème central l'homme, seul capable de répondre à l'amélioration de ces conditions de vie. La stratégie d'éducation pour le développement de CESAL comporte cinq domaines d'activités :

L'approche du développement par la communication : créer des espaces de rencontres et d'échanges avec les populations afin d'approcher le thème du développement et adapter les réalités du terrain aux partenaires, institutions financières publiques ou privées, et autres institutions de développement.

"Relations institutionnelles : CESAL est une institution d'apprentissage continu, ouverte au monde et par conséquent elle a besoin de relations avec d'autres institutions sociales, publiques et privées. L'objectif de ce contact avec d'autres institutions est d'ouvrir des voies de dialogue et des alliances stratégiques avec des institutions de développement et d'autres secteurs sociaux, pour articuler de manière cohérente différentes initiatives en matière de coopération

"Campagne de sensibilisation : Alerter et sensibiliser les populations sur des situations connectes pour sortir du cadre de « l'ignorance/indifférence ».

Photo 21 et 22 : Inauguration du réseau d'eau de Nuevo Paraiso, Huachipa, ONG CESAL.

Source : Auteur.

"Analyse et investigation : récupération d'apprentissages significatifs sur notre pratique et celle des personnes avec lesquelles nous travaillons. À travers des processus évaluation et systématisation nous connaissons l'impact de notre travail, mais surtout construisons une méthode d'intervention en développement sur la base des différentes expériences avec lesquelles nous nous trouvons. À cet effet, CESAL effectue des publications qui rassemblent ces apprentissages, dans chacun des projets plus significatifs que nous effectuons. Les publications disponibles peuvent gratuitement être sollicitées par courrier électronique ou par téléphone.

-Education formelle : Un des objectifs primordiaux de CESAL est d'incorporer l'éducation pour le développement dans le système éducatif de sorte que depuis l'étape scolaire : on forme un jugement vrai sur les situations pauvreté et exclusion dans les pays en développement et on promeuve attitudes et conduites favorables qui poursuivent l'idéal de justice sociale humaine.

-Le CIDAP :

Pour la réalisation de ses objectifs, le CIDAP organise son travail autour des secteurs et lignes d'action suivantes :

-La formation : À travers cette ligne d'action on cherche à élever les capacités des dirigeants, des fonctionnaires et des autorités locales, pour une gestion et un gouvernement démocratique des villes ;

-Aspect juridique : Par cette ligne d'action, le CIDAP cherche à développer une réflexion sur le cadre légal urbain et développer des stratégies pour que les dirigeants, les autorités et les fonctionnaires apprennent à manier ces outils de manière adéquate.

-Développement urbain : À travers cette ligne d'action, le CIDAP cherche à mettre en oeuvre des propositions de développement urbain qui rassemblent les espoirs et les demandes de la population tout en respectant les caractéristiques de l'environnement.

-OEuvre et équipement urbain : Le CIDAP cherche également à soutenir les processus de constructions entrepris par les habitants, la plupart étant effectués initialement sans accompagnement technique sérieux.

Photo 23 : deux membres du Comité de Obras de Lomas de Carabayllo utilisant la

nouvelle installation, ONG CIDAP.

Source : Auteur.

-Promotion et renforcement des organisations : Enfin, une part majeur dans la stratégie d'intervention du CIDAP, est de soutenir les processus de regroupement en organisations et comités, entrepris par les citoyens pour s'occuper des problèmes urbains.

I-3 Organisation publique-privée : Quel type de collaboration ?

- Quelques définitions préalables:

Avant de continuer l'analyse du jeu des acteurs, il convient de revenir sur quelques définitions permettant de recadrer la recherche. Ces définitions sont basées sur une étude du F3E (Fonds pour la promotion des études préalables, études transversales, évaluations)1 concernant la concertation entre acteurs privés et publics.

Il faut différencier un certain nombre de notions pour distinguer certaines formes de collaboration avec les pouvoirs publics. La concertation, le partenariat n'auront pas le même sens que consultation, information... Ces définitions peuvent être rassemblées autour d'un axe gradué, symbolisant le degré d'intensité du rapprochement entre les acteurs. Ici, la concertation apparaît comme un point d'équilibre entre toutes les formes de collaboration et donc l'approche la plus favorable pour une gestion intégrée d'un projet où les acteurs « préparent en commun » les actions et les méthodes du projet. En fin de compte, elle apparaît comme « un idéal » à atteindre.

Schéma 2 : Différents niveaux de relations :

Information Coordination Coopération Cogestion

Sans

Consultation

collaboration

Concertation

Partenariat

Fusion

Source : Auteur.

1 Totté (Marc), Dahou (Tarik), Sawadogo (Raogo Antoine), Billaz (René), la concertation entre acteurs privés et publics : pratiques et normes des OSI françaises, F3E, janvier 2004

> Sans collaboration : Cela ne suppose aucune relation entre les acteurs

> Information : Elle permet simplement d'aviser les autres acteurs du travail effectué.

> Consultation : elle constitue une simple prise d'avis ;

> Coordination : elle suppose un partage des rôles et une définition des tâches mais pas forcément de définition conjointe ;

> Concertation : Elle se rapporte communément au fait de s'entendre pour définir ensemble un projet ou une action ou pour agir ensemble ;

> Coopération : elle implique des échanges et des entraides signifiants dans le cadre d'un programme commun concerté ;

> Partenariat : il institutionnalise une coopération et exige un certain nombre de principes : intérêt mutuel des partenaires, principe d'égalité, principe d'autonomie, principe de coopération et principe d'évolution

> Cogestion : elle suppose un partage des tâches et responsabilités de manière égale ;

> Fusion : elle représente le stade ultime.

-Des relations entre les ONG et le Gouvernement Régional qui tendent plus vers le artenariat :

Le projet que nous avons suivi sur le terrain à Lomas de Carabayllo a permis le rapprochement des 2 acteurs : l'ONG CIDAP et le Gouvernement Régional de Callao, l'un et l'autre s'occupant ensemble de la mise en application de la démarche participative.

Ces 2 acteurs ont travaillé ensemble et ont coordonné leurs actions pour atteindre un but commun.

Au fur et à mesure, leurs relations ont évolué vers un échange de connaissances. Il ne s'agissait plus de travailler ensemble mais d'apprendre ensemble en échangeant son savoir-faire.

Un membre du Gouvernement Régional raconte : « le Gouvernement Régional avait un retard au niveau environnemental. Avec le projet et plus particulièrement l'appui du CIDAP, le Gouvernement Régional a appris beaucoup sur le problèmes environnementaux et la démocratie participative ».

Ces 2 acteurs ont donc établi des relations de proximité. Ils ont pris conscience de l'importance et des avantages à travailler ensemble et, par ce projet, développer des relations de confiance entre eux. Ils ont donc coopéré ensemble de manière intensive et ont développé une certaine forme d'autonomie par rapport aux autres organisations (gouvernement local, population-bénéficiaire), où chaque acteur devient responsable vis-à-vis de l'autre.

Ils projettent également d'étendre leur participation commune à d'autres « asentamientos humanos ».

Les principes de base du partenariat définis plus haut (intérêt mutuel des partenaires, principe d'égalité, principe d'autonomie, principe de coopération et principe d'évolution) s'illustrent donc dans cette forme de collaboration, ce qui permet d'affirmer que leur collaboration, qui était de l'ordre de la concertation, s'est transformée en partenariat supposant des relations beaucoup plus proches.

Cependant, bien que leur méthodologie et leur philosophie d'action s'avèrent efficace, on peut noter une défaillance dans les procédures de suivi du projet. Il a été décidé lors du projet de charger le Comité de quartier du suivi et de la maintenance du projet. Cependant, cette procédure est un échec et les visites sporadiques de ces 2 acteurs ne suffisent pas à améliorer la situation.

Il- A l'échelle locale, étude de projets de réduction des

coûts et de la consommation inscrits dans une démarche participative

II-1 Huachipa et Carabayllo, deux « asentamientos humanos » distincts

Deux quartiers marginalisés, face à des contraintes et des caractéristiques différentes. - Contraintes géographiques

-Lomas de Carabayllo :

Lomas de Carabayllo appartient au district de Carabayllo. Comme son nom l'indique (Lomas signifiant collines), ce village se situe sur les hauteurs du district, dans un bosquet sec et aride. Le district de Carabayllo appartient à la province de Lima. Il fait partie du cône Nord d'urbanisation de la ville, et son expansion est récente. Carabayllo se situe à une altitude de 238 mètres au-dessus du niveau de la mer et s'étend approximativement sur 345 88 km2.

Lomas de Carabayllo est un secteur très aride, situé sur un sol sablonneux et à flanc de cerros, dans une zone à risque de tremblement de terres et d'éboulement de terrain.

Il existe des ressources souterraines en eau potable mais les plus accessibles se trouvent dans d'autres quartiers de Carabayllo, la situation de Lomas sur les hauteurs, rendant la nappe phréatique bien trop profonde à cet endroit pour le forage de puits à moindre coût.

Photo 24 : Lomas de Carabayllo :

Source : Auteur.

-Huachipa :

La municipalité de Huachipa se situe dans le cône Est d'urbanisation de la capitale, dans le district de Ate-Vitarte. A une altitude variant autour des milles mètres, cet « asentamientos humanos» bénéficie d'un climat un peu différent de celui du centre de Lima. En effet, contrairement au reste de la ville, il dispose d'un ciel découvert et d'un climat légèrement plus frais en raison de l'altitude. De plus, ce secteur peut être considéré comme semi-urbain car on y retrouve de nombreux jardins et d'immenses ladrillas (fabriques de briques en terre). Dans ces ladrillas, sont souvent employés des enfants en dessous de la limite légale d'âge pour travailler, en raison de leur poids léger qui leur permet de se déplacer sur les briques encore molles sans les abîmer. Ce travail juvénile illégal a initialement entraîné le choix de ce quartier pour lancer un programme d'éducation et de formation par l'ONG CESAL.

Photo 25 : Quartier de San Francisco à Huachipa :

Source : Auteur.

Dans la recherche de solutions pour l'accès à l'eau potable, ce qui différencie grandement ces deux quartiers, c'est la ressource aquifère sous-terraine. En effet, à Huachipa, les ressources se

trouvent environ en moyenne de 50 à 80 mètres sous la surface du sol, alors qu'à Lomas de Carabayllo la profondeur atteint parfois 150 mètres.

- Du quartier spontané à la planification, deux « asentamientos humanos » historiques :

Le schéma le plus classique de la création des « asentamientos humanos » est celui des invasions massives autour de Lima à la fin des années 40 et au début des années 50 et c'est celui de la constitution de Huachipa et Lomas de Carabayllo. Ces invasions étaient soigneusement préparées, presque planifiées, avec parfois la complicité d'étudiants et ingénieurs pour établir la taille des parcelles, l'alignement des rues et l'esquisse sommaire d'un plan masse. Une zone particulière était choisie à l'avance parmi les terrains publics puis l'invasion se produisait durant la nuit puisque le jour les forces de l'ordre s'y seraient opposées. Le lendemain, les autorités ne peuvent que constater le fait accompli, l'éviction ne pouvant se faire que dans un bain de sang.

Le lot commun de toutes les zones d'habitats spontanés est la pauvreté, le manque d'hygiène, un toit fragile, une surpopulation, bref des conditions de vie extrêmement difficiles. Néanmoins il me semble que l'on peut distinguer deux types de regroupement d'habitats précaires. Le premier que l'on nommera taudis est un lieu de décrépitude où les désoeuvrés s'entassent sans une réelle conscience de groupe et sans beaucoup d'espoir. La misère y est d'autant plus grande qu'un laisser-aller règne partout.

Le deuxième type d'habitat précaire est habité par une population qui a une conscience de groupe, qui a la volonté de vivre et d'améliorer son quotidien. L'homme du bidonville s'insère dans une certaine dynamique sociale, avec la conscience d'appartenir à une culture, à un mouvement. Il sera par conséquent bien plus facile d'intervenir dans un bidonville plutôt que dans un taudis car la population peut fournir un engagement bien plus important.

Ce qui différencie beaucoup les quartiers d'habitat spontané de la ville, c'est qu'ils ne sont pas, ou peu, dotés d'équipements et services urbains qui permettent à la ville d'être un lieu confortable. Pas d'égout, pas de raccordement à l'eau, pas d'électricité, pas de voie carrossable, pas de ramassage d'ordures, pas de police, pas d'équipements sanitaires, pas d'équipement éducatif, etc.... Ce sont pourtant des équipements élémentaires.

L'eau est un des éléments les plus importants et est évoqué dans tous les bidonvilles du monde. L'eau,
c'est la corvée de tous, femmes, hommes, enfants. Il faut souvent aller la chercher à plusieurs

centaines de mètres à une fontaine où il faut ensuite faire la queue. Ou bien dans certains endroits les habitants des bidonvilles doivent payer leur eau et elle revient parfois deux fois plus chère que pour les gens habitants les quartiers riches.

D'autre part, l'absence de mobilier urbain peut paraître un détail mais c'est un signe très marquant du statut de non-ville.

Ces carences font du bidonville un lieu inconfortable au quotidien, et le rendent de jour en jour, de plus en plus insalubre. Les barrières qui séparent le bidonville de la ville sont de plusieurs types mais toutes participent à l'isolement des habitants des bidonvilles.

On trouve tout d'abord des limites physiques telles qu'une autoroute, une voie ferrée, une rivière ou même un mur. Elles sont rendues d'autant plus pénalisantes par le fait qu'il n'existe pas d'infrastructure permettant de les franchir. Il n'y a pas de ponts ni de passerelles suffisamment nombreux pour permettre un lien entre bidonville et ville. En fait, réseaux et infrastructures ne desservent pas le bidonville, ce qui isole ce dernier de son environnement.

Les habitants des bidonvilles, qui doivent se rendre en ville pour le travail, souffrent aussi d'un manque de transports en commun. En effet, les zones d'habitat spontané sont toujours peu ou très mal desservies, éloignant encore plus le bidonville des centres d'activités. D'autre part, le bidonville est psychologiquement écarté de la ville dans la mesure où il n'a pas du tout le même langage qu'elle. Même s'il se situe contre la ville, il n'est pas construit avec la même logique, le tissu urbain est extrêmement différent, les équipements et le mobilier urbain sont inexistants, il y a peu d'éclairage la nuit, etc. Le bidonville se démarque visuellement, on sait immédiatement lorsqu'on s'y trouve et ses frontières sont très nettes. La société qui y vit ne peut donc que se sentir marginalisée, le bidonville étant à la fois placé "loin" de la ville et stigmatisé.

Selon Albert Camus, "la pauvreté devient une forteresse sans pont-levis". Le bidonville, foyer de misère, est un exemple frappant de cette forteresse repliée sur elle-même. Aux urbanistes et architectes de savoir l'ouvrir en créant des ponts vers la ville, au sens propre et au sens figuré. Comme beaucoup, il s'est tout d'abord installé aux franges de la ville, sur des terrains vagues. Puis, il s'est développé en suivant sa propre logique, c'est-à-dire autour d'une voie piétonne centrale. De son côté la ville a aussi grandi, elle a rejoint la zone d'habitat spontané et elle l'a totalement cernée en

suivant elle aussi sa propre trame urbaine. Ni le bidonville, ni la ville n'a tenu compte de l'autre. On a assisté à un développement parallèle mais totalement séparé.

Les conséquences urbaines sont très nettes. Le bidonville est devenu un îlot dans la ville et pourtant il semble complètement hors de la ville. Le tissu urbain et le tissu du bidonville se font face mais ne communiquent pas. La limite entre les deux est très franche sur la photo et elle est totalement palpable sur le terrain. Le bidonville est à l'image d'une île au coeur de la ville. Il ne peut plus s'accroître, il est comme enkysté dans le tissu urbain.

Le développement de cette ville est une caricature d'une non intégration des zones d'habitats spontanés. Plutôt que de tenter de faire participer les habitants des bidonvilles à la ville et de leur faire profiter des équipements urbains, la ville a grandi en niant le bidonville. Ce qui aurait pu être une richesse urbaine, un quartier qui anime la ville (ainsi que sa trame), est resté un ghetto de misère ostensiblement délaissé.

- Situation socio-économique actuelle

Ces deux quartiers souffrent de nombreuses difficultés d'accès aux services d'eau et d'assainissement, de manque d'infrastructures routières, de santé et d'éducation. Leur position périphérique, parfois à plus de deux heures du centre ville en combi, les isole de tout pôle de développement. Sur le plan socio-économique, la population est en majorité sans emploi et/ou exerce des emplois précaires et/ou informels. Cette situation de sous-emploi et de chômage est cependant atténuée à Huachipa grâce à l'existence de l'exercice du maraîchage et de la fabrique des briques.

Le parc de logements est très dégradé, situé sur des zones à haut risque (tsunamis, tremblement de terre...). Les logements sont de type précaire, construits en bois et en tôle.

Cette zone très défavorisée concentre une grande part des problèmes que connaît l'agglomération de Lima :

-Un manque cruel des services urbains de base :

Aucun accès aux services d'eau et d'assainissement, les habitants ont recours au camion-citerne, service coûteux, limité et de basse qualité. Il existe un commerce illégal d'eau : les habitants achètent des bidons d'eau aux habitants de l' « asentamiento humano » voisin doté de fontaines publiques.

Environnement:

-Manque d'attention aux problèmes de ramassage des déchets (service de nettoyage déficitaire, manque de moyens financiers de la population pour financer le service, faiblesse des stratégies d'organisation et de participation sociale dans la gestion des déchets, déficience dans la législation nationale, provinciale, et du district au niveau opératoire comme de la gestion)

-Formation de points critiques d'amoncellement des ordures

-Manque de contrôle des établissements industriels pour l'élimination des gaz toxiques -Absence de programmes massifs d'éducation sanitaire

-Pollution de l'eau, l'air et du sol

Infrastructures:

-Déficience du réseau viaire: absence de routes goudronnées, manque de contrôle dans l'usage du sol, peu de transports publics

-Manque d'infrastructures concernant la santé: il n'existe qu'un seul centre de santé dans tout le quartier.

-Manque d'infrastructures concernant l'éducation : peu d'écoles

-Manque d'aires récréatives

-Manque d'infrastructures sportives

-Pas d'espaces verts

Logements:

-Déficience des normes de sécurité (zone sismique) -Logements de type précaire: construction en bois et en tôle -Occupation non-planifiée

-Absence de programmes de réhabilitation urbaine

Secteur économique:

-Manque de commerce

-Insalubrité du marché

-Manque d'activités économiques et de pôles de développement -Fort taux de chômage

-Forte présence du secteur informel

Secteur social:

-Existence d'une grande pauvreté -Fort taux de délinquance

-Présence de violence familiale

II-2 A la rencontre des projets alternatifs, les techniques de réduction des coûts et de la consommation

Les deux ONG dont nous avons suivi le travail sur le terrain ont développés 4 techniques principales de réduction des couts et/ou de la consommation, que nous allons étudier ici. Grace à l'observation de ces projets sur le terrain et à la collection de témoignages recueillis nous allons ici essayer de voir quels en sont les principaux avantages et les principaux inconvénients. Il s'agit des techniques:

-de la construction de réservoirs de quartiers permettant une connexion domiciliaire; --du système condominial ;

-des systèmes d'assainissement écologique;

-de la réutilisation des eaux pour l'irrigation.

Ces systèmes ont été employés sur différentes phases de projet par le CESAL et le CIDAP, et parfois combinés, c'est pourquoi nous allons donner systématiquement pour chaque technique des exemples d'application que nous avons pu constater sur le terrain qui correspondent à des périodes et des projets différents des ONG.

Le CESAL est arrivé au début des années 1990 au Pérou dans le but d'implanter des projets de développement sociaux et urbains. L'action a été entreprise à Nieveria en raison de l'extrême pauvreté et de l'abandon de cette partie du district de Huachipa, par les autorités.

Le CESAL est parti d'une constatation simple: l'eau distribuée dans ce village est extrêmement chère et ne répond pas aux critères de potabilité attendus. Devant ce constat l'ONG a essayé de se mettre en relation avec la SEDAPAL et les municipalités mais les problèmes d'ingérence politique et le désintéressement de la compagnie des eaux pour ces quartiers marginalisés n'ont pas permis d'entamer un début de projet commun.

Il fallait donc chercher une alternative, afin de pallier le manque d'eau.

Comme nous l'avons vu dans les spécificités géographiques de ce district, Huachipa a la chance de bénéficier de ressources souterraines en eau. Leur projet a donc été d'utiliser cette eau

souterraine pour apporter de l'eau aux habitants dans le cadre d'une administration autogérées par les riverains

A Lomas de Carabayllo, en raison de la profondeur de la ressource souterraine en eau trop important, les projets n'ont pas été tournés vers l'approvisionnement en eau à la base mais plutôt vers la création de connexions domiciliaires et l'accès à l'assainissement, ainsi que vers le traitement et la réutilisation des eaux usées.

-La construction de réservoirs de quartier permettant une connexion domiciliaire ou par bornes fontaines :

Il s'agit avec ce type de projet de permettre une connexion domiciliaire aux habitants des « asentamientos humanos », afin de remplacer le système de livraison par les camions-citernes. Cette technique est la principale employée par le CI DAP et c'est celle qu'il nous a été donné de découvrir sur le terrain à Lomas de Carabayllo. Il s'agit dans cette zone ou le forage de puit est difficile (cf. . I-2 Contraintes géographiques) en raison de la profondeur de la nappe phréatique, d'acheminer de l'eau depuis d'autres forages pour la collecter dans de grands réservoirs bétonnés de 50 mètres cubes, puis de la redistribuer aux habitants soit de manière individuelle grâce à un système en réseau de connexions domiciliaires, soit à l'aide de bornes fontaine qui assurent l'eau pour une portion donnée de population (en général 10 habitations).

Photo 26 : Réservoir de quartier à Lomas de Carabayllo :

Source : Auteur.

Ce système a un double avantage. Il permet tout d'abord une réduction du coût de l'eau en évitant de passer par les entreprises privées de camions-citernes qui font des marges considérables sur le prix des cylindres d'eau livrés (cf. Première partie, -Le prix des entrepreneurs privés de l'eau). De

plus, ce système permet d'éviter les pertes importantes en eau dues aux nombreux transferts des camions-citernes aux usagers.

Il concerne les quartiers de Los Topacios, Los Jardines et La Huerta, sur la commune de Nieveria et a débuté en 2001. Ce projet a été financé par la communauté de Madrid, en étroit partenariat avec le CESAL. L'encadrement de toute la partie technique a été réalisé avec l'aide d'ingénieurs de l'ONG CENCA, et les travaux ont été réalisés par les habitants. « Toute la maind'oeuvre venait de la communauté », témoigne Sara Flores, coordinatrice du projet au CESAL. Afin d'assurer la pérennité du projet par la population, un Comité d'Ouvre (Comité de Obra), a été nommé, comprenant une dizaine de membres volontaires de la communauté. Ces membres ont été formés sur l'aspect technique par le CENCA pour toutes les questions de maintenance, et par le CESAL sur les mesures de gestion et de fonctionnement du comité.

De plus, récemment une dernière étape à laquelle nous avons assisté, a consisté en un projet d'approvisionnement en eau pour les quartiers de Las Flores, Nuevo Paraiso et San Francisco. L'inauguration a eu lieu en mars 2007 en ce qui concerne Las Flores et Nuevo Paraiso, et il reste en cours de réalisation à San Francisco.

Photo 27 : A San Francisco, première phase du projet de construction de réseau

domiciliaire :

Source : Auteur.

Ce projet est toujours financé grâce à l'appui de l'Espagne, cette fois à l'aide des fonds offerts par la Generalitat Valenciana. En plus de la réalisation d'un puit tubulaire et d'un réservoir élevé permettant de donner de l'impulsion au système, ce projet implique aussi des travaux plus théoriques de renforcement de la gestion communautaire et de l'éducation à l'hygiène. Il permet une extraction d'eau de 25 mètres cubes par jours. L'approvisionnement est réalisé à l'aide de canalisations qui apportent l'eau à un réseau de bornes fontaines publiques. Chaque borne fontaine permet l'approvisionnement en eau de 10 habitations familiales.

-Le système condominial

Dans un système dit " condominial ", un réseau local relié au réseau principal par un branchement collectif permet de desservir tout un îlot d'habitations. Cette technique permet non seulement de réduire le diamètre et la quantité des canalisations, mais aussi la profondeur des tranchées. De plus, les usagers doivent assurer l'entretien des installations.

Photo 28 et 29 : Système condominial et station de traitement à Huachipa :

Source : Auteur.

Quels sont les avantages du système condominial ?

- Économie jusqu'à 50% dans le coût total du projet, en comparaison avec le système conventionnel ;

- Diminution du temps de construction jusqu'à 60% ;

- Diminution du nombre des inspections ;

- Réduction des coûts par connexion domiciliaire (tuyauteries enterrées à de plus petites profondeurs et de longueur plus réduite) ;

- De plus, ce système promeut la participation et l'intégration communautaire. Il exige une main d'oeuvre moins experte, ce qui rend propice la génération d'emploi à l'intérieur de la Communauté.

Schéma 3: Economie en matière de canalisation, la comparaison d'un système classique de réseau d'égouts avec le système condominial :

Tracé d'un système classique de réseau d'égouts :

Tracé d'un système condominial :

Source : Auteur, d'après des croquis du CIDAP.

Coût approximatif d'un système CONDOMINIAL par habitant: 55 - 75 USS.

Coût approximatif d'un système CONVENTIONNEL par habitant: 88 - 188 USS.

-Quels sont les inconvénients du système condominial?

- Exigence de travaux préliminaires et permanents Éducation sanitaire.

- Assistance sociale pour la formation de la Communauté dans le processus constructif, de l'opération et du maintien de ses égouts condominiaux. (Cependant, selon les ONG consultés, cela ne devrait pas être inclus comme un inconvénient à leur charge, mais comme une obligation du Gouvernement).

-Principales Innovations Effectuées:

La conception des canalisations condominiales est techniquement différente de celle de canalisations communes. Elle implique la modification du paramètre de base des dimensions hydrauliques, vitesse minimale, par la tension tractive. Selon des recherches effectuées, la tension tractive de 1 Pa (Pascal) ou 1 N/m2 peut décaler des particules suspendues dans les ponceaux de jusqu'à 1.5 mm de diamètre. Le critère de tension tractive permet la réduction des excavations dans des collecteurs construits dans des terrains plats avec des particules en suspens et des diamètres plus petits, ce qui est un inconvénient du point de vue du maintien, lequel devra être effectué avec des soins spéciaux ou des équipements totalement manuels. Ce facteur est extrêmement important car l'excavation est le facteur qui contribue le plus au coût des égouts.

La troisième phase du projet du CESAL, consistait à la création d'un système d'assainissement condominial pour les quartiers de Los Jardines et de La huerta à Nieveria. Ce système a été inauguré en avril 2005 et concerne l'assainissement de 96 familles. Encore une fois l'implantation de ce système a été réalisée grâce à la main d'oeuvre non qualifiée issue de la population et à l'aide d'ingénieurs qui ont mis en pratique le modèle brésilien. Ce système fonctionne au moyen d'un réseau principal de canalisations qui fonctionnent selon le principe condominial, d'une usine de traitement et d'un réservoir élevé.

Plus petites et enterrées à une profondeur de 70 à 80 centimètres seulement, les canalisations sont rationnellement utilisées et donc moins nombreuses et plus petites, ce qui permet de baisser considérablement les coûts d'installation et d'entretien. L'usine de traitement est composée d'un système qui permet de séparer les résidus solides et les eaux usées, celles-ci passant ensuite dans une lagune de décantation qui permet de récolter une eau décontaminée. Au final, cette eau est réutilisée dans l'irrigation des champs environnants.

-Les systèmes d'assainissement écologiques :

-L'ECODESS1

Il est défini comme un Système de Gestion Intégrale d'Assainissement soutenable, c'est-à-dire que c'est un système d'assainissement qui se veut écologique car il permet une réduction de la consommation en eau, un traitement de l'eau et production de fertilisant naturel. Ce système a été crée et appliqué par l'Institut de Développement Urbain CENCA depuis 1998. A l'intérieur de ce système on trouve l'invention des toilettes sèches, créée par le Dr. Nguyen Dang Duc, qui utilisent des compartiments séparés pour les urines et les excréments. Ce système a été utilisé par le CESAL en partenariat avec CENCA.

Photo 30, 31 et 32 : Système de toilettes sèches avec permettant la séparation des eaux

sales et des excréments solide, et consignes d'utilisation :

Source : Auteur.

Sur un plan technique, le systèmes d'assainissement écologique comporte la construction de toilettes sèches qui permettent de séparer les excréments solides des excréments liquides afin de réutiliser les excréments solides compacté comme fertilisant pour les jardins, et de traiter les eaux usées grâce à un double système de traitement réalisée dans l'enceinte de chaque domicile. L'intérêt principal de ces toilettes sèches est qu'elles permettent d'économiser jusqu'à 50% d'eau en plus car elle ne comporte pas de système de chasse d'eau, et de permettre une décontamination de l'eau a la sortie du domicile.

La deuxième phase de projet du CESAL consistait en l'installation d'un système d'assainissement écologique et à la connexion domiciliaire à l'eau courante pour les habitants du

1 Cf. Table des abréviations : (Ecology and Development with Sustainable Sanitation): Système de gestion intégrale d'assainissement durable, développé par CENCA.

secteur des Topacios. Il a été inauguré en décembre 2003 et concerne 44 familles. La réalisation du projet a suivi les mêmes principes de participation de la population volontaire que lors de la première phase.

Sur un plan technique, le système d'assainissement écologique comporte la construction de toilettes sèches qui permettent de séparer les excréments solides des excréments liquides afin de réutiliser les excréments solides compactés comme fertilisant pour les jardins, et de traiter les eaux usées grâce à un double système de traitement réalisé dans l'enceinte de chaque domicile.

L'intérêt principal de ces toilettes sèches est qu'elles permettent d'économiser jusqu'à 50% d'eau en plus car elle ne comporte pas de système de chasse d'eau, et de permettre une décontamination de l'eau à la sortie du domicile.

Schéma 4 et 5 : Système de toilettes sèches combinées à la technique de la

phytorestauration, utilisé à Los Topacios, Huachipa :

Sources : CESAL.

« Ces toilettes sont dites écologiques car, premièrement elles ne contaminent pas l'environnement. Les eaux usées provenant de la douche et des lavabos ainsi que du compartiment des toilettes réservé à l'urine, se rejoignent par un système de canalisation et passent dans un système de traitement par filtre puis dans un second système de traitement par les plantes où se termine la purification. Apres cela, ces eaux permettent l'irrigation d'un parc, d'un terrain de football, et peuvent librement retourner au canal d'irrigation ou à la nappe phréatique sans risques aucun » affirme l'Ingénieur Hercilia Antuñez de Mayolo, responsable de l'exécution des oeuvres sur ce projet, et appartenant à l'ONG CENCA.

-La phytorestauration :

Soutenue par plusieurs grands programmes de recherche à travers le monde depuis les années 90, la phytorestauration (ou phytorémediation) est l'ensemble des technologies qui utilisent les plantes comme principal agent de traitement des pollutions.

La phytorestauration vise à préserver les ressources essentielles que sont l'eau, les sols et l'air

mais aussi la valeur sociale, économique, écologique et paysagère des sites traités.
Testée sur des cas de plus en plus difficiles (sols contaminés aux métaux lourds ou aux déchets
radioactifs), la phytorestauration progresse chaque jour en termes d'efficacité et de traitement paysager.

Les technologies de phytorestauration sont rentables économiquement dans leur construction et leur utilisation. Il s'agit de solutions durables puisqu'elles permettent de faire disparaître la pollution d'un environnement, voire même d'en renouveler les ressources.

Elles sont bénéfiques pour la santé de l'homme et la préservation de l'environnement car elles éliminent la biodisponibilité des polluants.

Elles sont plus esthétiques que les solutions industrielles traditionnelles:

elles se concrétisent par des espaces jardinés et bénéficient du soutien des populations.

Photo 33 et 34 : Plante de Phytorestauration à différents niveaux de croissance, utilisées

dans le secteur de Los Topacios, à Huachipa :

Source : Auteur.

Cette technique a été utilisée par le CESAL en combinaison avec le système ECOSAN lors de la seconde phase de leurs projets à Huachipa, dans le secteur de Los Topacios, en 2003. Ce projet a utilisé la technique de la phytorestauration et combinaison avec le système d'assainissement par toilettes sèche ECOSAN (Cf. Les systèmes d'assainissement écologiques).

Ici, cette technique est facilement observable puisqu'elle consiste à créer un espace long d'environ deux mètres sur 80 centimètre de largeur, le long de la façade de l'habitation, qui sera entièrement planté de roseaux propres à l'assainissement de l'eau (Cf. Photo).

II-3 L'utilisation de la démarche participative dans les projets de développement

-Qu'est ce que la démarche participative ?

La démocratie participative se définit comme l'implication des habitants dans les processus de préparation, de conception et de réalisation d'un projet urbain. Cependant, intégrer un nouvel acteur dans les prises de décision nécessite une réflexion sur l'articulation entre les idées, les avis et les actions des différents protagonistes, afin de garantir la cohérence des actions. Cette notion concerne donc à la fois la participation des habitants mais également la coordination des acteurs. Actuellement, la gestion des projets urbains est impensable sans une démarche participative alliant organisations privées, publiques et population. Selon, Guy BESSETTE1, la communication participative est un outil de travail efficace qui peut faciliter les processus de développement communautaire et de recherche pour le développement. Elle vise à faciliter la participation de la communauté à leu propres initiatives de développement grâce à l'utilisation de diverses stratégies de communication.

Elle permet aux habitants de se sensibiliser aux problèmes urbains, d'acquérir des compétences et aux acteurs - initiateurs du projet de communiquer avec les autres acteurs et de coordonner leurs actions.

Elle se compose d'une multitude d'enjeux qu'il est utile de présenter avant de poursuivre la recherche :

-Enjeux de la démocratie participative :

> Démocratie participative et gestion des conflits : impliquer les habitants dans

l'aménagement du territoire permet souvent de gérer des conflits pouvant exister entre divers groupes, associations, habitants. L'utilisation de la démarche participative a contribué à la diminution les tensions entre les individus.

Cependant, elle peut également créer d'autres désaccords jusque là inexistants qu'il s'agit de régler.

1 BESSETTE, Guy, 2004, Communication et participation communautaire, Guide pratique de communication participative pour le développement, Laval : Les Presses de l'Université Laval, centre de recherche pour le développement international, 131 pages.

> Démocratie participative et coordination des actions : la démocratie participative suppose la coordination des interventions entre une multitude d'acteurs. Parfois, les actions et les compétences se superposent et s'enchevêtrent. Une bonne définition des compétences est donc nécessaire pour mener à bien le projet.

> Démocratie participative et implication des citoyens : L'implication des citoyens est le point clef de la démocratie participative. Le citoyen n'est plus considéré comme un agent, déterminé par des structures supérieures mais comme acteur de la ville, de son propre développement. Il faut savoir comment l'impliquer et quel degré donner à son intervention. En effet, dans un projet, on peut choisir seulement d'informer la population, la sensibiliser, la consulter ou encore de la faire participer pleinement.

Photo 35 : Comité d'oeuvre de Las Flores à Huachipa, lors d'une séance de formation à la
gestion :

Source : Auteur.

> Démocratie participative et capital social : La démocratie participative permet souvent d'augmenter considérablement le capital social de chacun des acteurs. Le « capital social » s'appuie sur l'existence de relations sociales qui permettent d'obtenir, individuellement ou collectivement des bénéfices importants. L'interaction d'un grand nombre d'acteurs lors des projets urbains permet à chaque acteur d'accroître son volume de connaissances relationnelles.

> Démocratie participative et élus: La démocratie participative devient un enjeu

primordial pour les élus car elle leur permet d'accroître leur visibilité auprès des citoyens. Elle participe fortement au rapprochement des élus avec les citoyens. Elle accompagne toutes les actions des collectivités locales et a pour but d'améliorer les relations entre ces 2 acteurs. Cependant, elle se traduit généralement, et comme on va le voir plus loin par une perte de légitimité des représentants d'institutions publiques.

> Démocratie participative et ONG: Les ONG se montrent souvent beaucoup

plus compétentes pour mettre en marche une démarche participative dans les projets de développement. Cela est un avantage des ONG par rapport aux institutions publiques. En outre, ces 2 acteurs n'ont pas les mêmes enjeux territoriaux, la position neutre des ONG facilite la communication avec la population contrairement aux élus qui se heurtent à des problématiques plus politisées.

> Démocratie participative et la notion de temps: Mettre en place une démarche

participative demande du temps. Elle nécessite une certaine disponibilité des habitants et des acteurs, ce qui n'est pas toujours facile. Le succès de ce genre de projet est du en partie à la grande disponibilité de la population, en particulier des femmes.

En outre, il est plus aisé d'impliquer les populations dans les projets à court terme où le résultat est rapidement et concrètement observable que sur des projets à long terme dont les effets sont diffus et complexes.

> Démocratie participative et échelle territoriale: Il existe une corrélation entre les

échelles spatiales et temporelles. De manière générale, le niveau d'implication du public dans les projets, programmes ou politiques dépend de l'échelle territoriale à laquelle ils se situent. Sur les projets régionaux, les pratiques dépassent rarement l'information du public, tandis qu'au niveau de leur quartier, la participation active des habitants n'est pas si rare.

> Démocratie participative et « bonne gouvernance »: La démocratie

participative est le fondement même de la « bonne gouvernance » des villes. Cette notion se base sur l'idée centrale que la ville ne doit plus être gérée par une communauté d'experts mais par l'interaction de ces experts avec la société civile. En effet, l'implication des habitants et l'intervention d'une multitude d'acteurs permettent un plus grand contrôle des décisions politiques. Elle limite les abus politique et la gestion clientéliste de beaucoup des

gouvernements locaux. La société civile devient alors un nouveau partenaire de développement. En réalité, la « bonne gouvernance » des villes est difficilement applicable au concret. Elle doit être considérée comme un idéal autour duquel toutes les actions et décisions doivent converger. Elle assure la durabilité d'une action et/ou d'un projet.

-Etude de l'impact de la stratégie participative dans l'élaboration d'un projet:

Elle concerne les quartiers de Los Topacios, Los Jardines et La Huerta, sur la commune de Nieveria et a débuté en 2001. Ce projet a été financé par la communauté de Madrid, en étroit partenariat avec le CESAL. Il a consisté à la construction d'un puit tubulaire de 70 mètres de profondeur et d'un réservoir élevé de 50 mètres cubes. L'encadrement de toute la partie technique a été réalisé avec l'aide d'ingénieurs de l'ONG CENCA, et les travaux ont été réalisés par les habitants. « Toute la main-d'oeuvre venait de la communauté », témoigne Sara Flores, coordinatrice du projet au CESAL. Afin d'assurer la pérennité du projet par la population, un Comité d'Ouvre (Comité de Obra), a été nommé, comprenant une dizaine de membres volontaires de la communauté. Ces membres ont été formés sur l'aspect technique par le CENCA pour toutes les questions de maintenance, et par le CESAL sur les mesures de gestion et de fonctionnement du comité.

-Démocratie participative au service du développement durable :

La durabilité est une composante importante de la définition de développement participatif. Une gestion concertée et transparente d'une ville et/ou d'un projet urbain permet la pérennisation de l'équipement mis en en place et la reproductibilité du projet.

Dans le contexte du développement participatif, la durabilité n'implique pas qu'une activité donnée puisse être poursuivie indéfiniment sans changement. Au contraire, elle signifie que des populations (individus ou groupes) atteignent un stade d'indépendance qui leur permet de poursuivre leurs activités courantes et d'affronter les changements avec une autonomie relativement grande.

La durabilité nécessite donc des ressources, du savoir-faire, des qualifications, une certaine façon d'envisager l'avenir, de la confiance en soi et la possibilité de favoriser des relations sociopolitiques et économiques.

Ces objectifs sont au coeur du travail de terrain à la fois du CIDAP à Lomas de Carabayllo et du CESAL à Huachipa, et c'est en cela que l'on peut dire que leur démarche d'action est au service d'un

développement durable, dans le sens ou les projets ont été totalement appropriés par les habitants, de la prise de décision à la maintenance, dans un respect de leur environnement et de leurs culture.

III- D'autres projets définitifs d'accès à l'eau à l'échelle

nationale et internationale

III-1 Stratégies mondiales d'accès à l'eau en milieu aride et hypothèses d'application au Pérou :

Afin de pallier la déficience en eau de la capitale liméenne et résoudre les pénuries, différentes techniques, qui ont été expérimentées à travers le monde, ont été évoquées par des chercheurs. Nous allons ici voir à travers l'étude de quatre exemples si ces techniques sont concrètement applicables à la situation de Lima.

-Dessaler la mer, un projet ambitieux qui ne cadre pas avec les réalités économiques du

ays :

C'est une réalité dans les pays qui ont les moyens de s'offrir cette technologie (Arabie Saoudite, Emirats Arabes Unis, Israël). Plus de 12500 unités produisent 1% de l'eau consommée dans le monde. Le procédé thermique, gourmand en électricité, a la faveur des pays riches.

Mais une autre méthode, par filtration, deux fois moins coûteuse, est possible. Elle rend le dessalement envisageable par des pays moins aisés comme l'Algérie, ou plusieurs usines sont en construction. Mais transformer l'eau de mer en eau douce reste une opération coûteuse : environ trois fois plus cher (0,8 euros par mètres cubes) que de la puiser dans des nappes souterraines ou de la capter dan des rivières.

En dépit du coût de production, la publication britannique Global Water Intelligence prévoit un doublement des capacités de dessalement au cours des dix années à venir (de 30 à 60 millions de mètres cubes par jours). Sur les soixante dix villes de plus de 1 million d'habitants situées en bord de mer ne disposant pas de suffisamment de ressource, Lima entrant dans cette catégorie, 42 sont susceptibles d'accueillir des installations de ce type.

Cependant au Pérou ce projet reste utopique devant l'importance de la dette internationale et les facteurs de crise économique du pays, elle est donc pour le moment à écarter radicalement dans la liste des solutions pour subvenir aux besoins en eau de la capitale.

-Capter les brumes et la rosée :

Cette technique a été inaugurée dans les années 1970 au Chili, l'une des régions les plus arides du monde. Elle consiste à tendre des filets en polypropylène entre deux poteaux. La nuit, les gouttelettes de brouillard, poussées par le vent, se prennent dans les mailles, tombent dans des gouttières et alimentent un réservoir. La technique, valable dans des conditions climatiques particulières, s'est développée à Hawaï, aux îles Canaries, en Croatie, et des projets existent aussi au Pérou. Un rapport de projet de 1982 existe concernant la zone côtière du Pérou, validé par l'UNESCO1. Cependant elle est encore très peu développée au Pérou, et pas encore dans la Métropole liméenne et nous n'avons pu, de ce fait en mesurer sur le terrain les touts et inconvénients.

-Faire tomber la pluie :

Dans d'autres pays (Chine, Grèce, Israël, Maroc), on a apprit à faire tomber artificiellement la pluie. Les météorologues repèrent les nuages au radar, envoient des avions qui libèrent des vapeurs d'iodure d'argent, faisant condenser les goûtes et pleuvoir la ou le besoin se fait sentir. Cependant, ce procédé est coûteux et très peu écologique. Il n'est donc pas non plus adaptable aux réalités péruviennes.

-Remorquer l'eau :

Certaines résidences de tourisme de la côte chypriote sont approvisionnées par voie maritime. Capté en Turquie, l'eau douce est conditionnée dans d'immenses poches de plastique et acheminée par bateau. L'idée de remorquer des icebergs de l'Arctique à l'Arabie Saoudite, évoquée dans les années soixante, n'a jamais été mise en pratique : le glaçon aurait perdu 20% de son volume au cours du voyage. Encore une fois, dans le cas du Pérou, ce système se révèle plutôt anecdotique en raison des coûts qu'un tel projet impliquerait ainsi que des réalités climatiques actuelles de réchauffement de la planète, entraînant la fonte des glaciers.

1

BELAUNDE SUAREZ, Manuel, VALVERDE TORRES, Alfonso, 1982, Proyecto Especifico binacional « Aprovechamiento de las nieblas costeras (camanchacas) en las zonas aridas del pacifico sur », Lima : Universidad Nacional Federico Villareal, Proyecto Pasamayo, UNESCO/ROSTLAC, 35 pages.

Cette fonte s'observe aujourd'hui dans les Andes et elle est un enjeu important, car on parle de récupération de l'eau issue de cette fonte, ce qui pourrait orienter les développeurs vers des projets techniques plus crédibles.

III-2 L'exemple de la révolution hydraulique en Espagne : un exemple à suivre ?

L'Espagne a longtemps été considérée comme un extrême Sud dans l'imaginaire européen, fréquemment comparée à un " morceau d'Afrique " et en tant que telle en proie à des difficultés économiques spécifiques que l'on analyse, au cours du XIXe siècle, comme la conséquence de l'ingratitude de la géographie espagnole. La représentation dominante du territoire espagnol est alors celle d'un " mauvais pays " caractérisé par des sols globalement peu fertiles et un climat semi-aride. La réflexion sur les causes de la crise espagnole débouche sur la formulation d'une série de solutions qui toutes s'accordent à considérer la maîtrise de la nature comme une priorité et font de l'État le promoteur d'une politique active de mise en valeur des ressources nationales1.

Géologue et paléontologue, l'ingénieur des mines Lucas Mallada, dans un livre devenu célèbre Les maux de la patrie et la future révolution espagnole (1890)2, est l'un des premiers à envisager des mesures en faveur de la " renaissance " de son pays. Il attribue la responsabilité de l'intense vague d'émigration que connaît l'Espagne à la pauvreté des sols ibériques et à l'inégale distribution des ressources en eau. Cette émigration tant intérieure (vers les foyers catalans et basques) qu'extérieure (vers la France, l'Amérique latine ou l'Afrique du nord) d'une partie de la population rurale contrainte à l'exode par la misère faute de pouvoir tirer de l'agriculture sa subsistance est clairement associée à l'indigence des ressources du milieu.

À la suite de ce constat particulièrement négatif, Lucas Mallada propose quelques lignes d'action en faveur de la " régénération " d'une agriculture handicapée par des conditions naturelles extrêmement défavorables (pauvreté des sols accentuée par le " déboisement des montagnes ", sécheresse et autres " fléaux naturels "). Ses propositions se veulent générales, applicables à l'ensemble du territoire national et centrées principalement sur une réorientation administrative (une " réorganisation générale de tous les services de l'État ") assortie d'une réduction de la fiscalité.

Plus tard, au début du 2Oème siècle, d'autres géographes et politiques commence à défendre la mise

1 CLARIMONT, Sylvie, 2001, L'aménagement hydraulique au service de l'Espagne (XIXe -XXe siècle), intervention lors du 126ème Congrès national des sociétés historiques et scientifiques, Terres et Hommes du Sud, Thème 1 : Paysages, peuplement et habitat, Milieu naturel, Toulouse.

2 MALLADA, Lucas, 1890, Les maux de la patrie et la future révolution espagnole, Paris : bibliothèque nationale.

en oeuvre par l'État d'une politique hydraulique destinée à rééquilibrer, moderniser et démocratiser l'agriculture et, à travers elle, l'ensemble de la nation. Soucieux de " refaire rapidement la géographie de la patrie 1" grâce à la maîtrise de l'eau, on jette alors les bases d'une géographie volontariste qui ne se cantonne pas à l'observation des phénomènes mais s'oriente résolument vers l'action.

Sont alors formulés les fondements d'une politique hydraulique volontariste, prise en charge par l'État et d'une remarquable continuité en dépit des changements de régime parfois brutaux que connaît l'Espagne contemporaine. La réalisation des infrastructures hydrauliques s'inscrit désormais dans un schéma de pensée qui associe étroitement maîtrise de l'eau et développement économique.

« Longtemps consensuelle, une telle façon de concevoir l'aménagement hydraulique est désormais au centre d'une vive polémique relative au devenir des espaces irrigués dans une Europe "surproductrice "que nous présenterons succinctement, l'objet de notre propos étant surtout de souligner l'originalité de l'interventionnisme étatique dans le domaine hydraulique en Espagne et son caractère précurseur par rapport à la France voisine. De fréquentes comparaisons seront établies entre Espagne et France où existe également une longue tradition dans le domaine hydraulique mais où l'intervention de l'État en faveur de l'irrigation a semble-t-il été moindre, plus ponctuelle, plus tardive aussi. »2

La gestion de la demande suppose également des innovations tarifaires qui, d'ailleurs, servent également à la politique de l'offre. En effet, l'absence de tarifs clairement établis, ne facilite pas le financement de l'entretien des anciennes installations et des nouvelles, qui ne peut pas pour autant être déserté par les systèmes d'aide publique internationaux. La tarification peut apporter des ressources supplémentaires pour financer ces travaux tout en induisant des comportements économes chez les utilisateurs.

Cependant se pose là la question fondamentale du droit d'accès à l'eau qui oblige à tenir compte d'objectifs sociaux dans les calculs tarifaires. Dans le secteur agricole, pour lequel le gisement d'économie d'eau est le plus évident, la politique de tarification ne peut s'exonérer du fait que nombre de paysans pauvres du Sud et de l'Est de la Méditerranée, voient leur salut dans l'agriculture irriguée. Quant à l'eau potable, elle est évidemment un bien vital dont la tarification ne peut pas empêcher l'accès. Toutefois, des systèmes de tarification par paliers de consommation peuvent être une réponse.

1 CLARIMONT, Sylvie, 2001, L'aménagement hydraulique au service de l'Espagne (XIXe-XXe siècle), intervention lors du 126ème Congrès national des sociétés historiques et scientifiques, Terres et Hommes du Sud, Thème 1 : Paysages, peuplement et habitat, Milieu naturel, Toulouse.

2

Idem.

Outre les évolutions politiques, techniques et tarifaires, si on continue à explorer le modèle espagnol, la nouvelle révolution hydraulique doit être également sous-tendue par des changements institutionnels et juridiques. A ce propos, il apparaît évident que les réglementations souvent venues de très loin dans l'histoire doivent être mises à jour afin de préserver une ressource menacée.

Du point de vue institutionnel, la réorganisation du « pouvoir hydraulique » est également au coeur de la gestion de la demande. Les solutions globales tant en terme de gestion de l'offre que de la demande ne semblent plus permettre une durabilité des systèmes. Ainsi à l'heure actuelle, une certain ré-échelonnage du pouvoir décisionnel tend à se mettre en place, avec la mise en place d'unités de gestion à l'échelle d'un bassin ou d'une nappe, ainsi qu'avec la promotion des associations d'usagers.

Ainsi, la prise de conscience et la mise en oeuvre de pratiques de régulation locale par les acteurs de terrain semble une voie à privilégier tant les situations peuvent être diverses.

IV Conclusion partielle

Devant la situation que l'on pourrait qualifier d' « apartheid hydrique », des asentamientos humanos »de Lima, les autorités publiques sont quasi invisibles et inopérantes.

Pour accéder à un accès à l'eau, les habitants de ces périphéries n'ont pas d'autre choix que de se tourner vers des entrepreneurs privés, parmi les seuls à pénétrer sur les routes délabrées menant aux quartiers périphériques, comme les compagnies privés de camions-citernes, qui profitent de leur statut privilégié pour hausser toujours plus leurs tarifs dans des conditions de salubrité qui ne se soumettent pas aux réglementations sanitaires.

Devant l'absence du pouvoir public ce sont aujourd'hui deux acteurs majoritaires qui tentent de contrer ces phénomènes créateurs d'inégalité : les habitants eux-mêmes, réunis en collectifs et comités e quartiers, et les ONG et associations.

Pour résoudre, le problème de l'accès à l'eau à l'échelle locale, ces acteurs se fondent sur un maillage participatif, et gèrent les projets de la conception à la maintenance. Ainsi, totalement ancré dans un processus de démocratie participative, ces projets sont soutenables et valide dans des échelles de temps très longues, en accord avec les caractéristiques sociaux-économiques de ces populations.

A plus petite échelle, sur le plan national, il existe également des plan de développement qui pourrait être appliques, à l'image de la révolution hydrique espagnole, en faisant de l'accès à l'eau une politique national et en investissant le budget de l'Etat vers cette voie.

Il n'y a pas une, mais des réponses au problème de l'accès à l'eau dans un pays à Lima.

Grace à cette analyse de projets a plusieurs échelles spatiales et directives, il s'avère évident que les efforts futurs ne doivent négliger aucune pistes, en allant vers une concertation et une coopération des politique privées et publiques existantes.

CONCLUSION GENERALE

La problématique de l'eau dans les pays en développement est aujourd'hui celle des échecs des politiques et du manque de concertation entre secteur privé, secteurs public et population, à la recherche d'un projet commun.

Nous avons ici essayé de faire un état des lieux de la situation actuelle de l'accès à l'eau à Lima, afin de comprendre quels étaient les facteurs qui étaient responsables aujourd'hui d'une distribution inégalitaire des ressources et quelles étaient les solutions envisagés pour contribuer à un accès à « l'or bleu » pour tous.

A Lima, nous avons pu analyser que les bases du problème hydrique résultaient d'un contexte d'aridité, doublé d'un accroissement démesuré de la population ne permettant pas d'assurer dans les conditions actuelles un accès à l'eau potable pour tous. De plus cette situation qu'on pourrait qualifier de « stress hydrique », doublée du poids démographique et des conséquences sanitaires qui entourent les « asentamientos humanos », pèse sur l'environnement de la capitale, mettant en danger de contamination les ressources existantes.

Il est donc urgent de trouver des solutions permettant un accès à l'eau inscrit dans un processus de développement durable.

A partir de cette situation intervient l'Etat, au travers de l'entreprise d'eau de la métropole, la SEDAPAL, qui malgré des projets d'approvisionnement existants, ne peut les réaliser, par faute d'une réelle possibilité et volonté d'investissement budgétaire dans ce domaine.

La dette nationale du Pérou est importante et sa côte de crédit est faible dans le système financier international. Le niveau d'investissements requis pour exploiter de nouvelles sources d'eau n'est sans doute pas réalisable dans un avenir prévisible. Par conséquent, la solution immédiate au problème doit comporter une meilleure gestion et la protection des bassins du Rímac et du Chillón ainsi que de l'aquifère de Lima, la réutilisation des eaux usées (du moins aux fins de l'irrigation et de l'industrie) et un effort de rénovation du réseau de distribution pour limiter les pertes d'eau.

A travers l'étude de différents projets alternatifs, nous avons pu constater qu'il suffit parfois d'installations simples et peu couteuses pour utiliser dans de bonnes conditions toute l'eau potentiellement disponible. Mais on peut également, en certains cas, être amené à envisager la réalisation d'ouvrages plus importants, plus complexes et plus chers, tels que les projets de détournement de lagunes andine envisagés par la SEDAPAL, que nous avons pu détailler dans notre deuxième partie.

S'il est établi, en effet, que, dès les civilisations les plus anciennes, l'homme s'est efforcé de mettre en valeur les ressources hydrauliques qu'il trouvait sur son territoire, ces travaux répondaient généralement à un besoin immédiat unique, les autres utilisations n'intervenant qu'accessoirement. C'est seulement au cours de ces dernières décennies qu'est apparue la notion du « développement intégré des grands bassins fluviaux », c'est-à-dire selon Louis SERRA1, de l'utilisation méthodique des ressources hydriques à des fins multiples en vue de la satisfaction et de l'intérêt du plus grand nombre.

Cette vision est cruciale. C'est par le développement simultané de tous les enjeux et les acteurs du problème, orchestrés dans un plan d'ensemble, qu'on en obtiendra le rendement maximal.

La solution définitive consisterait à réévaluer le potentiel environnemental de croissance de la ville de Lima en l'intégrant dans une politique nationale démographique et économique.

Le milieu ambiant est fragile et il y a une limite au degré d'urbanisation qui serait supportable. Il y a déjà longtemps que cette limite a été dépassée. La plaine côtière ne peut pas supporter une population de 8 millions d'habitants (encore moins une population de 10 millions comme l'indiquent les projections pour la prochaine décennie) sans subir des effets préjudiciables irréversibles. Cependant, aujourd'hui il est plus raisonnable de se baser sur une trame de projets de développement des

1 Page 364 de l' Encyclopaedia Universalis (139 auteurs, dont BARBAULT, Robert, BLANDIN, Patrick, CHABOT, Bernard, DAUTRAY, Robert, DELEAGE, Jean-Paul, DORST, Jean, DUPLESSY, Jean-Claude, EWALD, François, JUBERTHIE, Christian, KHAN, Axel, KANDEL, Robert, LAUBIER, Lucien, PERES, Jean-Marie, RAFFIN, Jean-Pierre), 2001, Dictionnaire de l'écologie, Paris : Albin Michel, 1399 pages.

infrastructures au niveau local pour faire face à l'urgence sans aggraver les processus actuels de dégradation de la qualité de l'eau.

. Pour résoudre le problème de l'accès à l'eau à l'échelle locale, les acteurs que nous avons côtoyé au cours de ce travail de recherche, se fondent sur un maillage participatif, et gèrent les projets de la conception à la maintenance. Ainsi, totalement ancré dans un processus de démocratie participative, ces projets sont soutenables et valides dans des échelles de temps très longues, en accord avec les caractéristiques sociaux-économiques de ces populations.

A plus petite échelle, sur le plan national, il existe également des plan de développement qui pourrait être appliques, à l'image de la révolution hydraulique espagnole, en faisant de l'accès à l'eau une politique nationale et en investissant le budget de l'Etat vers cette voie.

Il n'y a pas une, mais des réponses au problème de l'accès à l'eau à Lima. L'approche systémique que nous avons retenu dans ce travail de recherche est la seule qui tienne la route tant le sujet est complexe. Comme le souligne pertinemment Michel CAMDESSUS1, « L'eau est au coeur de notre système Terre. Si l'eau va mal, la Terre va mal et la Terre c'est nous. C'est donc sur tous ces fronts macro ou microéconomiques, locaux ou universels qu'il nous faut agir, la où nous somme les mieux placés pour provoquer un changement, aussi minime soit-il. ».

Grace à cette analyse de projets à plusieurs échelles spatiales et directives, il s'avère évident que les efforts futurs ne doivent négliger aucune piste, en allant vers une concertation et une coopération des politiques privées et publiques existantes.

On estime qu'il faut disposer de 36 milliards de dollars pour procurer de l'eau potable et un assainissement adéquat à toute l'humanité, soit 4% des dépenses militaires et d'armes dans le monde. Fournir l'eau à l'humanité dépend donc en réalité des priorités que les hommes s'assignent, car « ce que nous faisons de notre eau reflète au final nos valeurs les plus profondes »2. A nous de prendre aujourd'hui les meilleurs choix de développement.

1 CAMDESSUS, Michel, BADRE, Bertrand, CHERET, Ivan, TENIERE-BUCHOT, Pierre-Frédéric, 2004, Eau, Paris : Editions Robert Laffont, 289 pages.

2 BOUGUERRA, Mohamed Larbi, 2003, Les batailles de l'eau, Pour un bien commun de l'humanité, Paris : Editions Charles Léopold Mayer et Les Editions de l'Atelier, collection Enjeux Planète, 239 pages.

BIBLIOGRAPHIE

Sources :

INEI, 2000, Anuario estadistico, Peru en numeros, 2000.

Instituto Nacional de Estadistica e Informatica, Peru, compendio estadistico 2006, d'après les données du recensement 2006.

Ministerio de Vivienda, Construccion y Saneamiento, Décembre 2006, Resultados Encuesta « Agua para Todos », réalisée à partir des informations statistiques de « Impacto Social y de Consumo en Zonas Conectadas a la Red Publica de Agua », Lima.

Actes de colloques et congres :

Ciudagua Andina, 22 au 26 février 1990, Actas de Coloquio, « Empresas prestatarias de servicios de agua y alcantarillado y usarios : &Pueden tener y desarollar proyectos comunes ? &Cuales? &Como? » Quito, Ecuador : Ciudades Unidas, Federaciòn Mundial de Ciudades Unidas.

CLARIMONT, Sylvie, 2001, L'aménagement hydraulique au service de l'Espagne (XIXe-XXe siècle), intervention lors du 126ème Congrès national des sociétés historiques et scientifiques, Terres et Hommes du Sud, Thème 1 : Paysages, peuplement et habitat, Milieu naturel, Toulouse.

Articles:

COURIVAUD, Alix, FAYSSE, Nicolas, BUSTAMENTE, Rocio, 2006, El papel de los comunitarios de agua potable en las zonas periurbanas, issu de : Revista del comité sectorial de agua y sanéamiento, numéro 21.

ORDOÑEZ, Juan Julio, VERA, Hector, 2006, La crisis del agua, Lima, issu de : Revista del comité sectorial de agua y sanéamiento, numéro 21.

Rapports et études :

Banco Interamericano de Desarollo, 2006, La politica importa, Democracia y desarollo en America Latina, Washington : édition de la Banque Interaméricaine de Développement.

Banco Mundial, 2001, Los servicios de agua y sanéamiento en el Peru, Lima : Editions de la Banque Mondiale, 78 pages.

Banco Mundial, 2002, Nuevos enfoques para la estructuracion de negocios en el sector de agua y sanéamiento : como asegurar la participacidn del sector privado en beneficio de los pobres, Lima : Editions de la Banque Mondiale, 67 pages.

BAZOBERRY, Oscar, SALIZ, Lorenzo, ROJAS, Juan-Carlos, 2006, Vivencias y miradas sobre la participacidn populare, La Paz : Editions du CIPCA, 160 pages.

BELAUNDE SUAREZ, Manuel, VALVERDE TORRES, Alfonso, 1982, Proyecto Especifico binacional « Aprovechamiento de las nieblas costeras (camanchacas) en las zonas aridas del pacifico sur », Lima : Universidad Nacional Federico Villareal, Proyecto Pasamayo, UNESCO/ROSTLAC, 35 pages.

BOELENS, Rutgerd, GETCHES, David, GUEVARA GIL, Armando, 2006, Agua y derecho : politicas hidricas, derechos consuetudinarios e identidades locales, Lima: IEP, Walir, 435 pages.

CAHU, Etienne (sous la direction de Jean-Louis CHALEARD), 2004, Lima : Une ville assoiffée, l'eau : reflet et cause des inégalités sociales, mémoire de maitrise de géographie, Université de Panthéon- Sorbonne Paris 1, 264 pages.

CALDERON MONCLOA, Luis Felipe, 2006, Todos somos humanos ... Pero unos somos màs humanos que otros, Lima : Editions de l'ESAN, 191 pages.

CARDENAS, Nora, MAKOVSKI, Pedro, RODRIGUEZ, Enrique, VARGAS, Lita, VARGAS, Rosana, 2005, Construyendo ciudadania : el derecho humano al agua, Lima : CIES, CEDEP, 260 pages.

CIDAP, 2000, Instalacion de bomba de impulsion de agua, colocacion de red de distribucion de agua y desague del Comedor La Estrellita, Lima : CIDAP et Pana 2000, 15 pages.

FOVIDA Fomento de la Vida, 2004, « Queremos agua limpia », Diagnostico del sistema de abastecimiento de agua mediante camiones cisternas en las zonas periurbanas de Lima Metropolitana, Lima : FOVIDA, avec l'appui de CARE-USAID, Fondo de las Americas, DIGESA, 87 pages.

GUTIERREZ YRIGOYEN, Raul, Programa de especializacion Geografica, curso intensivo de geografia, 1989, Los recursos hidricos del Peru y su problemetica, Lima : Sociedad Geografica de Lima, 6 pages.

MARCHAND, Daniel, Programme interministériel REXCOOP, 1986, Proyecto Lima, Programa especial Huaycan, Informe de mission sanéamiento, Paris: Ministère des Relations Extérieures, Ministère de l'Urbanisme, du Logement et de Transports, Ministère de la Recherche et de la Technologie, 38 pages.

Ministerio de Vivienda, Construccion y Saneamiento, 2006, Plan Nacional de desarollo urbano « Perù : territorio para todos », linéamientos de politica 2006-2015, Lima : Editions du Ministerio de Vivienda, Construccion y Saneamiento, 113 pages.

Ministerio de Vivienda, Construccion y Saneamiento, 2006, Plan Nacional de Saneamiento 2006-2013, Lima : Editions du Ministerio de Vivienda, Construccion y Saneamiento.

Organizacion Panamericana de la Salud, 2000, Evaluacion global de los servicios de abastecimiento de agua y sanéamiento 2000 : Informe analitico, Resumen Peru, Lima : OPS, 50 pages.

Programa de agua y sanéamiento, La contratacion por la comunidad, 2001, Lima, 52 pages.

Programa de agua y sanéamiento, Region Andina, avec l'appui de l'agence canadienne de développement international, 2001, Los servicios de agua y sanéamiento en el Peru, Un diagnostico y estadisticas, Lima : Banque Mondiale, 31 pages.

PROPOLI, Programa de lucha contra la pobreza en Lima Metropolitana, 2006, Emprendedores : 15 historias de esfuerzo y exito, Lima : Editions du PROPOLI, 67 pages.

RUIZ, Albina, ESCALANTE, Carlos, ESPINOZA, Nestor, CERRON, Cesar, LLONA, Mariana, 1994, Agua potable y sanéamiento en los asentamientos urbanos de Lima Metropolitana, Peru, cinco estudios de caso, Mexico : HIC Coalition International para el Habitat, 111 pages.

SEDAPAL, WSP, Banque Mondiale, 2006, Agua para las zonas periurbanas de Lima Metropolitana, Leciones aprendidas y recomandaciones, Lima.

VASQUEZ HUAMAN, Enrique, 2006, Programas sociales de lucha contra la pobreza : casos emblemeticos, Lima : CIES, 55 pages.

WIENER FRESCO, Raùl, 2005, Agua para vivir y agua para lucrar, Centro de Estudios de la Realidad Nacional Alberto Flores Galindo, Lima, 101 pages.

Ouvrages bibliographiques :

-Sur Lima :

ANC, Associacion Nacional de Centros de Investigacion, Pomocion Social y Desarollo, 1986, Descentralizacion y desarollo regional, Lima : Fundacion Friedrich Ebert.

ABUID NAZAL, Hilda, SEDAPAL, 1997, Historia del abastecimiento de agua potable de Lima 1535- 1996, Lima : Ministerio de la Presidencia, 262 pages.

DAVID SOLON, 1998. Villa El Salvador, la ville née du désert. Paris : Les Editions de l'Atelier/Editions Ouvrières, Collection : Les acteurs du développement. 157 pages.

-Sur le Pérou :

BANCO INTERAMERICANO DE DESAROLLO, 2004, BID en el Peru, Construyendo progreso, Lima : Oficina del Banco Interamericano de Desarollo en el Peru, 71 pages.

BERNEX, Nicole (sous la direction de), Hacia una Gestiôn Integrada de los Recursos Hidricos en el Perû, Lima.

DIAZ SUAVEZ, Placido, 1978, Recursos naturales del Peru, Lima : retablo de papel ediciones.

DOLLFUS, Olivier, 1983, Le Pérou, Paris, Presses Universitaires de France, Collection : « Que Sais- je ?», 127 pages.

-Sur l'Amérique du sud :

DABÈNE, Olivier (sous la direction de), 2006, Atlas de l'Amérique Latine, Violences, démocratie participative et promesses de développement, Paris : Editions Autrement, collection Atlas/Monde, 79 pages.

FOURNIER, Jean-Marc, 2003, L'eau dans les villes d'Amérique Latine, Inégalités sociales et concurrences des usages, Paris : L'Harmattan, Collection géographie sociale, 203 pages.

GALEANO, Eduardo, 1981, Les veines ouvertes de l'Amérique Latine, Une contre histoire, Paris : Editions Pocket, Collection : Terre humaine poche, 447 pages.

PAYNE, Mark J., ZOVATTO, Daniel, MATEO DIAZ, Mercedes, 2006, La Politica Importa, Democracia y desarollo en America Latina, Washington D.C. : Publicado por el Banco Interamericano de Desarollo y el Instituto para la Democracia y la Asistencia Electoral, 364 pages.

ROUQUAYROL GUILLEMETTE, Léda, HERRERO VILLA, Santiago, 2006, Guia sobre la cooperacion, Union Europea - America Latina 2006, Le Havre : édité par l'Associacion Ceficale, 89 pages.

- Autres ouvrages sur la thématique de l'eau, de l'environnement, de l'urbanisation et du développement:

BESSETTE, Guy, 2004, Communication et participation communautaire, Guide pratique de communication participative pour le développement, Laval : Les Presses de l'Université Laval, centre de recherche pour le développement international, 131 pages.

BOUGUERRA, Mohamed Larbi, 2003, Les batailles de l'eau, Pour un bien commun de l'humanité, Paris : Editions Charles Léopold Mayer et Les Editions de l'Atelier, collection Enjeux Planète, 239 pages.

CAMDESSUS, Michel, BADRE, Bertrand, CHERET, Ivan, TENIERE-BUCHOT, Pierre-Frédéric, 2004, Eau, Paris : Editions Robert Laffont, 289 pages.

DORIER-APPRILL, Elisabeth (sous la direction de), 2001, Vocabulaire de la ville, Notions et références, Nantes : Editions du Temps, collection Questions de Géographie, 191 pages.

Encyclopaedia Universalis (139 auteurs, dont BARBAULT, Robert, BLANDIN, Patrick, CHABOT, Bernard, DAUTRAY, Robert, DELEAGE, Jean-Paul, DORST, Jean, DUPLESSY, Jean-Claude, EWALD, François, JUBERTHIE, Christian, KHAN, Axel, KANDEL, Robert, LAUBIER, Lucien, PERES, Jean- Marie, RAFFIN, Jean-Pierre), 2001, Dictionnaire de l'écologie, Paris : Albin Michel, 1399 pages.

GEORGES, Pierre, VERGER, Fernand, 2000, Dictionnaire de la géographie, Paris : Presses Universitaires de France, 500 pages.

HADZICH, Miguel, Grupo de Apoyo al Sector Rural, 2006, La isla de cristal, Cuento ecologico, Lima : Editions de la Pontificia Universidad Catolica del Peru, 23 pages.

LABORDE, Pierre, 2001 (2ème Edition), Les espaces urbains dans le monde, Pour mieux comprendre en quoi le développement des villes est un des faits les plus marquants du )()(ème siècle, Paris : Editions Nathan Universités, collection Géographie, 239 pages.

MALLADA, Lucas, 1890, Les maux de la patrie et la future révolution espagnole, Paris : bibliothèque nationale.

TOURETTE, Florence, 2005, Développement social urbain et politique de la ville, Pour comprendre le malaise urbain et pour mieux appréhender la politique de la ville, Paris : Gualino Editeur, 167 pages.

TREILLET, Stéphanie, 2005 (2ème édition refondue), L'économie du développement, De Bandoeng à la Mondialisation, Paris : Armand Colin, Collection CIRCA, 231 pages.

VENNETIER, Jean-Pierre (sous la direction de), 1990, Eau et aménagement dans les régions intertropicales, tome 1, Bordeaux : CNRS.

WACKERMANN, Gabriel, 2005, Géographie du développement, Paris : Editions Ellipses, Collection Universités Géographie, 357 pages.

Revues :

AGUA, Revista del Comité Sectorial de Agua y Saneamiento, Février 2007, Lima : Edité par le Comité Sectorial de Agua y Saneamiento, Comité éditeur : PAS, CEPIS-OPS, SER, SUM-CANADA, CENCA, 47 pages.

Centro de Investigacion y Gestion del Agua, décembre 2005, Revista de Investigacion del Agua, numéro 7, Yachay Yacu, El saber del agua, Lima : Universidad Nacional Frederico Villareal Facultad de Ingéniera Geografica y Ambiental, 53 pages.

Sites internet :

http://www.agualatina.net/, site internet du Water and Sanitation Program (WSP), en Amérique Latine.

http://www.cenca.org.pe, site internet de CENCA : Instituto de Desarollo Urbano.

http://www.cesal.org/, site internet de l'ONG espagnole Cesal, Cooperaciòn al Desarollo.

http://www.cidap.org.pe/, site internet du CIDAP : Centro de Investigaciòn, Documentaciòn y Asesoria Poblacional.

http://www.desco.org.pe/, site internet de DESCO : Centro de Estudios y Promoción del Desarrollo.

http://www.ecosan.org.pe/, site de promotion du système d'assainissement ECOSAN.

http://www.pasteur.fr/externe, site internet de l'Institut Pasteur.

http://www.sedapal.com.pe/, site internet de la compagnie des eaux de la Métropole de Lima.

http://www.unesco.org/water/, site internet de l'UNESCO, offrant des renseignements sur le 2ème Rapport mondial des Nations Unies sur la mise en valeur des ressources en eau.

http://www.wateryear2003.org/, site de l'année internationale de l'eau douce.

ANNEXES

Annexe 1 : LES RECOMMANDATIONS DE LA TABLE RONDE SUR L'EAU ET LA SANTE

DANS LES QUARTIERS URBAINS DEFAVORISES

Cette table ronde a réuni une centaine d'acteurs et de décideurs à Sophia Antipolis du 21 au 23 février 1994 (12).

1. Toute personne, quelles que soient ses conditions de vie ou ses ressources, a le droit imprescriptible de boire une eau saine.

2. La satisfaction des besoins essentiels des populations des quartiers urbains défavorisés en matière d'eau potable et d'assainissement doit être intégrée dans les politiques de développement urbain et de santé publique mises en oeuvre par les pouvoirs publics.

3. Seuls un engagement résolu des gouvernements et la participation active des citoyens eux- mêmes peuvent apporter à ces problèmes les solutions urgentes qu'ils requièrent. A cette fin un grand effort de communication et de sensibilisation doit être entrepris sans tarder.

4. L'accès à l'eau potable et à l'assainissement comprend des droits et des devoirs pour garantir une juste répartition de cette ressource rare comme des investissements et de leur financement, ainsi que la maintenance des équipements afin de lutter contre les phénomènes d'exclusion.

5. La valeur économique de l'eau doit tenir compte de sa valeur d'usage. La pérennité des investissements du secteur eau et assainissement requiert une prise en charge par les bénéficiaires des coûts correspondants. Des mécanismes de péréquation entre les différentes couches de population urbaine doivent être mis en place. Une part de subvention peut cependant s'avérer nécessaire.

6. Pour optimiser les objectifs de santé, l'approvisionnement en eau et l'assainissement doivent relever d'une approche intégrée, réaliste et participative.

7. Les prestations offertes devront couvrir les besoins essentiels tout en garantissant une protection sanitaire satisfaisante.

8. Les solutions aux problèmes évoqués doivent tenir compte d'un contexte en évolution, caractérisé par une plus grande décentralisation et la responsabilisation des acteurs locaux: municipalités, prestataires de services, entreprises privées et publiques grandes et petites, membres des communautés et leurs dirigeants hommes et femmes ainsi que les organisations non- gouvernementales. Ce nouveau partage des tâches ne doit pas enlever à l'Etat sa responsabilité générale et régulatrice.

9. Les partenariats reliant ces acteurs constituent des instruments essentiels pour l'accès équitable de toutes les composantes de la population des quartiers défavorisés à une eau saine et à l'assainissement. Leurs relations et la définition de leurs compétences respectives devront être clarifiées et organisées, notamment sous forme de contrats, en tenant compte du contexte social et culturel de chaque région.

10. Les solutions techniques ne doivent pas être considérées comme point de départ mais comme résultat d'un processus intégrant d'autres dimensions sociales, environnementales, culturelles, économiques et institutionnelles et impliquant tous les acteurs.

11. L'animation, la formation et l'information doivent accompagner l'identification et la mise en oeuvre de technologies adaptables.

12. Un effort important doit être fait dans le domaine de l'évaluation, de la recherche, de la production et de la diffusion (grâce à une approche réellement participative) de données de base de bonne qualité, notamment dans les pays du Sud.

13. La tendance actuelle des bailleurs de fonds à financer en priorité les équipements lourds des centres ville doit être rééquilibrée au profit des quartiers périphériques et des villes secondaires. Des financements complémentaires significatifs doivent être mobilisés pour répondre aux besoins des plus pauvres et engendrer un développement durable.

14. Concernant les formes que peut revêtir la coopération internationale, il convient de susciter la multiplication des partenariats entre collectivités territoriales, organisations professionnelles, associations de solidarité, qui complètent la coopération intergouvernementale et lui donnent une dimension particulièrement proche des préoccupations des citoyens des communautés du Sud et de l'Est.

Annexe 2 : Carte géologique de la province de Lima :

Source : SEDAPAL.

Annexe 3 : Carte des puits et du réseau de canalisations dans la métropole liméenne :

Source : At~as Ambiental de Lima.

Annexe 4 : Projet Marcapomacocha III :

Source : SEDAPAL.

Annexe 5:
Ficha de entrevista para los habitantes beneficiarios de los proyectos
:

Nom du district, du quartier, localisation, remarques:

Datos generales:

Nombre, apellido, dirección, género

Desde cuando eres en este asentamiento humano? Porque aceptaste participar a este proyecto? Desde cuando tienes tu nueva instalacion? Funciona bien? Que problemas tienes?

Medio Ambiente:

En el caso de los proyectos de bailo saludable:

Piensas que el equipamiento (baño) mejore tu vida?

Por qué?

Que ha cambiado?

Cómo hacías antes para asearte, limpiar a los niños...?

Y ahora?

Esta feliz de este nuevo baño?

Te sirve mucho? A tu familia también?

La capacitaciôn:

Para ti, a que servían las charlas de capacitación?

Aprendiste mucho durante las charlas de capacitación?

Que aprendiste?

Te gustaban estas charlas?

Por qué?

Piensas que este proyecto colectivo es más eficiente que un proyecto personal?

Vivienda saludable

Piensas que el nuevo baño permite tener una vivienda más saludable que antes? Porque? Piensas que mejore tu higiene, tu salud? Por qué? Tienes menos enfermedades que antes? Y tu familia también?

Para ti, que es una vivienda saludable? Un barrio saludable?

Que haces para que tu vivienda sea saludable? Tu barrio? Antes que hacías?

Annexe 6 : Incitation à la dénonciation des usagers qui piratent les connexions de la SEDAPAL :

Source : Auteur.

Annexe 7 : inauguration du réseau d'eau de Nuevo Paraiso, danse de l'eau en costumes
traditionnels andins :






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand