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Approche des représentations du "participatif" des journalistes des sites indépendants d'information @rrêtsurimages et Médiapart

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par Claire PHILIPP
EAC - Master de Manager de projet culturel 2009
  

Disponible en mode multipage

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ESARTS
Ecole supérieur de gestion et de mediation des Arts
(Filière du Groupe EAC)

APPROCHE DES REPRESENTATIONS DU « PARTICIPATIF ~
DE JOURNALISTES DES SITES INDEPENDANTS D'INFORMATION :
®RRETSURIMAGES ET MEDIAPART

Mémoire présenté et soutenu publiquement par :

CLAIRE PHILI

Directeur de Recherche : annee de formation 2008/2009

M. Laurent Gago

JURY DE S0UTENANCE DU MEM0IRE DE :

CLAIRE PHILI PP

Promotion 2008-2009

3 Approche des représentations du . participatif . de journalistes des sites indépendants d'information : @rretsurimages et Médiapart. .

Président(e) du Jury : M. Nicolas Becqueret Coordinateur des études

Directeur de recherche :

Laurent Gago

Professeur de sociologie de la culture au groupe EAC,

Sociologue. Enseignant a l'Université Paris 3, Sorbonne Nouvelle, UFR Communication,

Chercheur au CREDAM, Centre de Recherches sur l'éducation aux Médias.

Membre du Jury

M. Vincent Truffy, Journaliste a Médiapart.fr

Mémoire soutenu vendredi 3 juillet 2009, 16h.

~ L'EAC n'entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions emises
dans les memoires de fin d'etudes. Elles sont propres a leurs auteurs. .

REMERCIEMENTS

J'adresse tous mes remerciements aux nombreuses personnes qui m'ont aidé et conseillé pour la rédaction de mon mémoire.

En particulier a Monsieur Laurent Gago, mon directeur de mémoire, pour m'avoir soutenue et guidée tout au long de l'année, ainsi qu'à Monsieur Nicolas Becqueret pour ses conseils méthodologiques.

A Monsieur Vincent Truffy, pour avoir accepté de parrainer ma recherche et pour m'avoir permis de mieux comprendre le fonctionnement de la rédaction de Médiapart.

Aux professionnels qui ont accepté m'accorder de leur temps pour s'entretenir avec moi et qui m'ont permis de mieux appréhender les enjeux de l'information sur Internet.

Je souhaiterais aussi remercier toutes les personnes (bloggeurs, forumeurs...) qui contribuent bénévolement sur Internet a la traduction et a la circulation d'information et de données au sujet d'Internet et du web 2.0, sans qui je n'aurais pas pu illustrer de la même manière mon mémoire.

On fait parfois comme si les gens ne pouvaient pas s'exprimer. Mais, en fait,
ils n'arrêtent pas de s'exprimer. 1...] Si bien que le problème n'est plus de
faire que les gens s'expriment, mais de leur m énager des vacuoles de solitude
et de silence a partir desquelles ils auraient enfin quelque chose a dire. Les
forces de répression n'empêchent pas les gens de s'exprimer, elles les forcent
au contraire a s'exprimer. Douceur de n'avoir rien a dire, droit ne n'avoir rien
a dire, puisque c'est la condition pour que se forme quelque chose de rare ou
de raréfi é qui m ériterait un peu d'être dit. Ce dont on crave actuellement, ce
n'est pas du brouillage, c'est des propositions.

Gilles Deleuze, . Les Intercesseurs ., in Multitudes, 27.05.2004.

AVANT PR0P0S

Ce travail consistant a appréhender les représentations véhiculées dans les discours de journalistes de sites indépendants d'information, nous avons choisi d'analyser de deux sites en particulier. Cette recherche n'a pas prétention a constituer un travail représentatif de la réalité des sites . collaboratifs .1 dans leur ensemble. Si nous avons choisi arrêtsurimages et médiapart pour des raisons méthodologiques dans le cadre de cette recherche, il ne s'agit pas pour autant de les isoler des autres sites.

Les . noeuds . récurrents (points problématiques) que nous avons dégagés du discours de leurs représentants ont une certaine résonance parmi les autres web journalistes, mais il s'agissait surtout pour nous de ne pas tomber dans un discours généralisant. Notre approche demeure avant tout exploratoire. Les thèses prospectivistes ont cette tendance et s'avèrent très attractives, car elles parviennent en apparence a surmonter la complexité d'une situation avec une solution . clé en main >.

Nous avons essayé de ne pas oublier qu'à chaque situation participative correspondait un modèle propre, mais qu'il fallait également comprendre le contexte plus général dans lequel celui-ci venait s'inscrire avant d'en observer les particularismes. Sans pour autant établir des déterminismes, retracer brièvement la . généalogie . du participatif au travers de l'évolution des valeurs de la culture web, nous semblait être un élément essentiel pour mieux appréhender les représentations que ce concept peut véhiculer aujourd'hui. Cela permet également de tracer les contours de logiques différentes (amateur/professionnelle), de déterminer la proximité ou au contraire la distance existant entre elles et donc de voir en quoi une congruence est possible.

Par ailleurs, notre démarche ne consiste pas a établir des projections quant a
l'avenir des interfaces . collaboratives . étudiées, dans la mesure oil nous
considérons l'Internet comme un média jeune sur lequel nous manquons encore de

1 De nombreux néologismes et anglicismes (termes entre guillemets) sont employés par nécessité dans ce travail du fait de la nature même du sujet, leurs définitions se trouvent en annexe dans le lexique.

recul. Nous pouvons juste ébaucher des pistes de réflexion quant aux mesures envisageables pour un nouveau partage des roles au sein des espaces participatifs. De plus, nous ne disposons pas des connaissances techniques en matière d'info graphisme ou de web design, qui nous permettraient de proposer de nouvelles interfaces interactives ou d'optimiser la maquette de ces sites. Cette phase de mise en place concrete ne découlera que d'une réflexion quant a la conception de la production de l'information qu'il appartient aux web journalistes d'investir.

En effet, l'évolution du « participatif » ne releve pas uniquement de la stratégie de développement des sites indépendants d'information, mais également de la renégociation permanente des roles (entre internautes et journalistes) qui s'y joue. Dans une seconde partie, notre démarche releve d'une proposition faite aux représentants de ces sites pour penser autrement leurs relations aux internautes dans le cadre de la production d'informations.

Enfin, si nous nommons les web journalistes interrogés « représentants », nous avons bien conscience que ces derniers ne constituent pas des portes-paroles représentatifs de l'ensemble de leurs rédactions récemment formée de journalistes de divers horizons. Cependant, nous considérons leurs propos comme révélateurs d'une démarche éditoriale collective.

LAN SYNTHETIQUE

1. Presentation du sujet : les sites indépendants d'information et le 3 participatif .

2. Definition de la notion de . sites indépendants d'information . par rapport a celle de . media .

3. Approche socio-historique du web : les filiations d'une tradition de partage, de participation et d'innovation collective

4. Presentation de la problematique et des hypothèse de travail

5. Enquête sur les representations des web journalistes des sites 3 participatifs . Arrêt sur images et Médiapart

6. Conclusion

7. Annexes

ABLE DES MA TIERES détaillée en fin de mémoire

INTRODUCTION

En 2000, se déroule ce que l'on nomme l'éclatement de la . bulle Internet . (dot corn buble)2. 0n considère communément cette date comme le passage du web 1.0, a savoir un web linéaire sur lequel les internautes n'ont aucun pouvoir avec des services médiocres et peu adaptés a leurs besoins, au web 2.0. Cette appellation définit le réseau comme un web participatif et interactif, continuellement a l'écoute des attentes des consommateurs et qui sait s'adapter rapidement. Cette transition a été favorisée par l'arrivée du haut débit (2002 en France), qui a permis le développement de nouveaux services et de pratiques participatives telles que le partage de fichiers (peer to peer).

Les chantres du web 2.03 voient dans cette nouvelle phase d'Internet le passage d'un média . horizontal ., oil les internautes sont cantonnés a un role de récepteurs, a un média plus . vertical ., oil les internautes sont a la fois récepteurs et émetteurs. Il s'agirait ainsi d'une révolution du schéma de communication, qui ferait d'Internet une agora démocratique oil tout un chacun aurait la possibilité d'exprimer son point de vue et de partager ses connaissances grace a des interfaces simplifiées.

De ce concept est née la vision du . tous journalistes ., dans la mesure oil les internautes pairs se substituent en partie aux intermédiaires médiatiques traditionnels aussi bien pour la production de contenus que leur hiérarchisation (sélection par recommandations et réactions critiques). Internet est alors considéré comme un média offrant une possibilité de constituer une nouvelle structure de production de l'information. Des lors le « participatif » devient un « buzz word », autrement dit un concept a la mode, qu'il s'agit, pour les entreprises ou les médias de masse, de décliner au travers de nouveaux services (tels que les « wikis », chats en direct), afin de s'engouffrer dans la bréche de ce nouveau dispositif.

2 ,4 Quand Internet fait des bulles ., reportage réalisé par Benjamin Rassat, produit par La Générale de production et 13eme rue, diffusé sur cette chaine le 13 juin 2007, http://www.youtube.com/watch?gl=FREhl=frav=Hj7KoLITX0k

3 « 2.0 . correspond a la seconde version améliorée d'un logiciel.

0r, avec un peu de recul historique, on peut avancer que la notion de participation pré-existait au web grand public, même si ce dernier a pu lui conférer une visibilité a grande échelle du fait de son réseau mondial. En effet, on observe notamment dans les mouvements activistes dès la fin des années 1970 une volonté de construire les bases d'un système d'information alternatif aux grands médias via des procédés recombinants et décentralisés qui permettraient une réappropriation des médias par le public. L'objectif n'est pas alors de modifier le contenu véhiculé, mais également la structure médiumnique en elle-même pour permettre l'émergence de « points de fuite » au système panoptique des médias de masse4. Se joue dans les mouvements militants une volonté de mettre en place des dispositifs communicationnels a la fois collectifs et atomisés, qui ne prévalent pas d'une destruction du système en place, mais comme une alternative dissidente a ce dernier.

Par ailleurs, les premiers pas d'Internet aux Etats-Unis sont fortement marqués par une culture « collaborative . des universitaires et des premiers hackers. Ces développeurs de la première heure étaient animés par une éthique de travail reposant sur le libre échange de données, ainsi qu'un mouvement d'innovation émulé par la reconnaissance et la compétition entre pairs.

C'est dans ce contexte que s'origine la culture participative, voire militante, du web, notamment basée sur une forte aversion de tout pouvoir central, en particulier de l'état. De la se serait opéré selon Franck Rebillard un glissement entre la philosophie libertaire du Web (liberté d'expression) et libérale des grandes entreprises des NTIC (libre échange). Les propos de cet auteur sont en ce sens éclairants :

« Il faut bien comprendre ici qu'a la triade Etat / Prive / internaute, se superpose une acception triple de la liberte : liberte d'expression, libreechange et libre circulation de l'information. L'ideologie liberale promue par certains entrepreneurs prives et l'ideologie libertaire des premiers internautes se rejoignent dans une meme aversion pour l'Etat, accuse de faillir a sa mission de garant de la liberte d'expression. >>5

4 H0LMES Brian, QUERRIEN Anne, VIDEC0Q Emmanuel, « Les trois plis du média activisme ., Multitudes, dossier « Majeure. Subjectivation du Net : post-média, réseaux, mise en commun ., n°21, été 2005, http://multitudes.samizdat.net/Les-trois-plis-du-media-activisme, mis en ligne le 31 mai 2005.

5 REBILLARD Franck, Le Web 2.0 en perspective, une analyse socio-économique de l'Internet, Paris, L'Harmattan, 2008, p. 94.

Des lors, le web 2.0 est concu comme un marché auto-régulé et sans frictions dans la mesure oil l'Etat n'intervient que de maniere minimale. Ainsi, Mark Deuze et Joël de Rosnay parlent d'un « écosystème informationnel » ou d'une société de l'information dans laquelle, la fluidité des échanges entre les utilisateurs et les producteurs de contenus ont bien plus que la valeur des informations en ellesmeme6. Cette utopie organisationnelle moderniste, que Rebillard nomme le « nouvel esprit du capitalisme », allie les valeurs d'autonomie, d'horizontalité et de liberté du mouvement libertaire et se confond avec lui dans le discours de la « révolution 2.0 ». Ce faisant, elle fait entrer ce dernier dans une ere oil les différents niveaux de médiation, a l'instar des journalistes, sont peu ou prou évacués au profit d'une organisation mécanisée.

0n peut rapprocher ces propos des agrégateurs de contenus des grandes « plates-formes d'audience »7, tels que Google news/iGoogle/Google headlines8, Msn actualités9 ou Yahoo actualités10/11. Ces taches de tri et de hiérarchisation de l'information, traditionnellement assimilées au travail journalistique, peuvent désormais etre faites individuellement grace a ces interfaces. D'oil la crainte d'un certain nombre de journalistes que le web 2.0, et ses services personnalisés et interactifs, n'entralnent la « mort » de leur profession. L'avenir promis a l'information étant de devenir une matière premiere a base de dépêches d'agence de presse dont chacun pourrait disposer tel qu'il en a envie. Cependant, il s'agit de ne pas évacuer les aspects communautaires et inter relationnels du réseau, qui vont de pair avec les nouveaux outils « web 2.0 ».

6 « For journalism, all of thie means, in part, that value attributed to media content will be increasingly determined by the interactions between users and producers rather than the product (cf. News) itself." Extrait de: DEUZE Mark, Liquid journalism, Political Communication Report, 2006, http://frank.mtsu.edu/-pcr/1601_2005_winter/roundtable_Deuze.htm

7 Cette catégorie comprends les moteurs de recherche, les portails de services de messagerie et les sites des journaux traditionnels, qui valorisent une audience captive a la fois quantitative et qualitative en la mettant a la disposition des annonceurs. EVANS Et SCHMALENSEE, "The Industrial organization of markets with two-sided platforms", in NBER Working Papers, n°11603, National Bureau of Economic Research Inc., 2005.

8 http://news.google.fr/

9 http://news.fr.msn.com/

10 http://fr.news.yahoo.com/

11 Ces sites compilent des flux RSS, voire proposent un journal personnalisé en enregistrant les préférences de lecture de l'utilisateur comme parametres de sélection de sa Une.

Selon Bruno Patino : . Si tout le monde devient journaliste, il n'y a plus de journalisme >. Cette réaction de l'ancien Directeur du Monde Interactive résume bien l'ambivalence des représentations que peuvent avoir des web journalistes : ils officient sur le . web 2.0 . et peuvent aller jusqu'à le considérer comme l'avenir de l'information, tout en considérant le . participatif . comme une menace par certains aspects.

Certains professionnels, inquiets de la remise en question de leur profession ont quant a eux fait le pari de migrer totalement sur le web. Ils ont créé des sites d'information, qui, tout en surfant sur la vague du . participatif ., remettent le travail d'enquete du journaliste au centre. Ainsi on peut lire dans la note d'intention présentant le projet de Médiapart :

3 ce projet est ne d'un double constat partage par une equipe de journalistes experimentes : la crise de la presse papier qui est une crise de l'offre editoriale ; la crise de croissance du web, dont les potentialites au service des citoyens eclaires ne sont pas exploitees au mieux et qui appelle l'invention d'un nouveau modele d'information de presse. [...] Elle [l'information de référence] suppose de remettre a l'honneur un genre trop delaisse et injustement decrie : l'enquete, avec ses decouvertes, ses surprises, ses revelations inedites..12

Ces nouveaux web journalistes mettent également en avant l'implication de leur communauté d'abonnés dans le fonctionnement de leurs sites13, faisant en partie le jeu de l'idéologie web 2.0, tout en affirmant que le role du journaliste n'en est que plus essentiel. Ces pure players reprennent a leur compte la tradition de l'enquête en partie délaissée par les médias traditionnels, ainsi que la logique des réseaux qui s'impose dans les circuits de l'information. Ce parti pris part du principe qu'il n'y a peut etre pas assez de travail journalistique de fonds dans les médias de masse, qui tentent de courir après le rythme imposé par les nouvelles technologies, et pas non plus assez du « participatif » de ces dernières.

En somme, ils essaient d'ouvrir empiriquement une troisième voie, un modèle mixte alliant les meilleurs aspects des anciens et des nouveaux médias. Cependant, ces tentatives semblent créer une situation d'entre-deux, qui placent les web

12,4 Le Projet Médiapart ., Déclaration d'intention mise en ligne le 07.12.07.

13 Dans l'interview de Pierre Haski précédemment citée, il déclare au sujet de la participation des internautes (en l'occurrence via des témoignages) : <4 C'est aussi ce qui contribue au bon developpement de notre audience. .

journalistes a la jonction de deux conceptions de leur activité partiellement antagonistes, notamment quant a leur role et a celui de leurs lecteurs.

Au dela du contexte technologique induit par le fait que les sites indépendants d'information concentrent leur activité sur la Toile (« pure players .), il est intéressant d'analyser le discours de ces web journalistes et leurs représentations du « participatif ». En effet, comment les journalistes des sites « pure players », dont la production suscite des commentaires et dont la structure comprend des contenus générés par les utilisateurs (UGC14), concoivent le role et la place des internautes participants ? Comment l'intègrent-ils aujourd'hui a leur démarche professionnelle et quels sont les schémas de fonctionnement qui en découlent ?

Enfin, quelles sont les évolutions possibles en terme d'intégration accrue des usages interactifs dans l'offre de ces sites indépendants d'information ?

Notre intuition de départ est que ces nouveaux sites « pure players » ne sont pas « au clair . avec le concept du participatif dont ils se réclament. Etant donné leur statut de journalistes professionnels, développant une offre payante et issus de médias traditionnels, ils semblent vouloir se distinguer de ces derniers via une collaboration active avec les internautes, tout en conservant certaines réticences a cet égard.

Nous cherchons a mettre a l'épreuve cette hypothèse en recueillant le discours développé par les sujets quant au role et a la place des internautes sur leurs sites, et dans une moindre mesure leur positionnement sur ce point par rapport aux médias traditionnels. La finalité de ce travail est de mettre en perspective ces discours avec les analyses théoriques développées a ce sujet, ainsi qu'en les confrontant aux formes concrètes que prend le participatif sur ces sites par le biais d'une observation de leurs pratiques.

14 cf. définition du terme « User Generated Content ., annexe 7.2 (lexique), p. 105.

PREMIERE PARTIE :

APPROCHE DE LA NOTION DE « PARTICIPATIF »

DANS LE CADRE DE L'INFORMATION SUR INTERNET

1. Presentation du sujet : les sites independants d'information et le

« par

ticipa

tif « 

Notre réflexion porte sur la définition des nouveaux sites indépendants d'information français par rapport aux internautes participants et sur leurs représentations du . collaboratif >. Leur création bien que très récente (notamment 16/04/08 pour Médiapart, 07/01/08 pour Asi...), nous proposons de dresser un premier bilan sur leur démarche éditoriale incluant la problématique de la gestion de leurs espaces participatifs, dont dépendra par ricochet leur nombre d'abonnés et donc leur viabilité financière.

1.1. Motivations a l'origine du choix du theme et proximite par rappor tau sujet

Etant nous-même abonnée a arrêtsurimages.net et Médiapart (respectivement depuis février et aolit 2008), nous suivons journellement leurs publications ainsi que les forums et espaces de commentaires ad hoc. Ces espaces de . friction . (terme employé par Vincent Truffy, cf. entretien) entre publications de la rédaction et réactions des abonnés constituent selon nous un lieu de réflexion sur les nouveaux enjeux du journalisme professionnel sur internet.

Notre réflexion quant aux roles de chacun au sein de ces sites a notamment germé suite au vif débat qu'a suscité la publication du témoignage de Dannette 0'choc au sujet de son voyage aux Etats-Unis pendant la campagne électorale de 2008 dans l'espace (bleu ciel) dédié aux articles de la rédaction d'@si15. 0utre la polémique faisant référence aux qualités rédactionnelles du post, les critiques portaient surtout sur le fait que celui-ci ne correspondait en rien aux critères d'objectivité que les internautes attendaient d'un article en ligne. 0r, cette publication n'en était pas une, mais relevait du . billet d'humeur . comme l'a précisé Daniel Schneidermann dans un édito postérieur16.

Nous avions alors nous-même réagi sur le forum de la manière suivante :

15 http://www.arretsurimages.net/contenu.php?id=1361

16 http://www.arretsurimages.net/contenu.php?id=1366

<au-dela de la question de la "qualite", la ligne de demarcation a bouge exceptionnellement et c'est donc davantage la cohabitation des contenus journalistiques et amateurs qui semble en jeu. L'espace journalistique est donne a un temoignage "brut" juge a priori digne d'interet par la redaction et ce sont les abonnes qui interviennent de l'autre cote de la "barriere" dans le cadre du forum. Une meme source, deux espaces. [...] On en revient a la meme question: les abonnes, premiers a vouloir reagir dans les forums sont parfois choques de lire du contenu redige par l'un d'entre nous dans un espace qu'ils estiment comme devant rester "professionnel". >17

La réponse de la rédaction pour justifier son choix de mettre en lumiere ce contenu reflétait bien ce débat entre la légitimité et le role de chaque entité (journalistes professionnels et abonnés commentateurs) :

<

Certains d'entre vous s'en etonnent, s'en emeuvent, trouvent que nous melangeons torchons et serviettes, chacun chez soi, les journalistes sur le pont, les forumeurs18 dans les forums, et ca ira mieux. C'est un debat legitime, mais j'avoue que je ne partage pas ces reserves. Un des charmes de notre aventure commune, n'est-ce pas de faire bouger les lignes ? Et faire bouger les lignes ne signifie evidemment pas les faire disparattre ! >

Daniel Schneidermann rappelait que la distinction était clairement faite dans l'esprit de l'équipe rédactionnelle (< Mais chacun a sa place. >), mais qu'elle était du fait des interactions permanentes avec les abonnés une ligne en perpétuelle définition. La démarche initiale du site voulant s'enrichir des apports des internautes sans etre dans le < fantasme du participatif > a été confrontée, a l'occasion de cet épisode, a un débat collectif.

Cela nous a amenée a réfléchir sur des notions telles que la coproduction de l'information, la modération des UGC, les éditions participatives, le web 2.0 ou la cohabitation des contenus professionnels et amateurs sur les sites d'information. Force est de constater que la signification de ces concepts est ardue en raison de leur nature plutot abstraite, du fait qu'ils tentent de décrire une situation interactionnelle actuelle.

Par ailleurs, participant nous-meme a ces sites en tant qu'abonnée, notre
proximité avec le sujet de cette étude a rendu difficile la mise a distance
nécessaire a leur observation objective et constitue en cela une limite non

17 http://www.arretsurimages.net/forum/read.php?3,52483,52483, (acces payant)

18 Internautes intervenant sur un forum en publiant un post en réaction a un billet ou une question initiale soumis a la communauté (exemple : les forums d'utilisateurs d'un produit fonctionnant sur la base de l'entre aide, a l'intersection entre les FAQ et les aides personnalisées).

négligeable a notre analyse. L'ouvrage de Franck Rebillard19 a été une lecture essentielle dans le processus de déconstruction de nos idées préconcues sur la nature « révolutionnaire » du web 2.0.

Le fait que nous nous informions quasi exclusivement via des communautés de partage de liens (digg, delicious, aaaliens), flux RSS et abonnements a des news letters ou podcasts, renvoyant a des blogs, forums, hébergeurs de vidéos et des sites d'information, institue déjà un certain a priori sur les pratiques sociales en la matière.

Cette manière de naviguer relève notamment d'une volonté de nous informer « autrement ». Nous sommes conscientes du fait qu'il existe des approches théoriques prospectivistes (voire technicistes) sur le « nouveau journalisme » a travers les penseurs du web (Clay Shirky, Narvic, Frédéric Filloux...). Une remise en contexte historique par la lecture de chiffres et de dates clés nous a cependant permise de questionner le caractère de nouveauté de la dimension participative d'Internet, qui lui est en général attribué par défaut.

Si les rapports entre les journalistes et leurs lecteurs sont par définition bouleversés du fait qu'ils prennent place sur un nouveau média, notre démarche consiste a interroger la construction des représentations que ce processus suscite et l'influence de celles-ci sur la réalité en retour. Cette conception du web comme eldorado d'un nouveau type de journalisme « web 2.0 » est largement véhiculée (en partie dans le discours de certains fondateurs de sites indépendants d'information comme nous le verrons) et participe a la construction d'un contexte de réception du média Internet.

C'est en ce sens qu'il nous parait intéressant d'analyser les discours de journalistes de ces sites, afin d'appréhender la manière dont ils concoivent la notion de collaboration sur leurs sites et comment celle-ci affectait selon eux leur pratique du journalisme.

19 Cf. Annexe 2, p.105 : GAG0 Laurent, « Recension Franck Rebillard : Web 2.0 en perspective. Une analyse socio-économique de l'internet », Le Temps des médias, n°12, printemps 2009, éditions du Nouveau Monde.

2. Definition : entre « sites independants d'information » et

« media d'information 0

2.1. Definition de la notion de media

Dans le cadre de cette recherche nous seront amene a utiliser le terme . media .. 0r, ce terme est polysemique. En effet, il est communement accorde aux medias plusieurs fonctions et cela depuis les origines des ces derniers (par exemple, techniques, esthetiques, phatiques, culturelles, politiques...). Nous utiliserons ainsi le terme dans son acception informationnelle et communicationnelle, dans le but de determiner les caracteristiques d'usages qui definissent un media. Nous serons des lors en accord avec les definitions posees par Marc Raboy, qui avance qu'un media est un moyen de communication pouvant avoir plusieurs dimensions (publique, privee ou communautaire). Selon lui :

- ils proposent des mecanismes qui permettent la dissemination massive d'informations, facilitant la construction de consensus sociaux, la construction et la reproduction du discours public et certains niveaux d'interaction, notamment dans le cas des nouveaux medias independants, alternatifs et communautaires. . (p. 507)20

Comme defini ci-dessus, nous nous attacherons a la definition des medias dits « de masse » et, non pas, a leur acception etymologique plus large de moyens de transmission de messages.

Avec l'emergence du numerique, les medias semblent se developper selon des logiques contraires, entralnant a la fois a leur concentration et leur nuclearisation. Marc Raboy note que :

« d'un cote les medias de masse (presse, radio, television) connaissent un processus de concentration de la propriete et une integration horizontale et verticale dans les domaines du son et de l'image grace a l'arrivee du support numerique. D'un autre cote, Internet, et les supports numeriques en general, individualisent et democratisent l'acces a la communication et a l'interaction, permettant le developpement inedit de nouveaux moyens alternatifs ou cooperatifs qui affectent, dans le meme mouvement, les medias de masse traditionnels >.

20 RAB0Y Marc, . Medias . (p.505 a 525), in Enjeux de mots, regard multiculturels sur les societes de l'information, CEtF editions, Caen, 2005, 649 p.

0n peut ainsi dire que la définition même de la notion de « média » a évolué avec l'arrivée des Nouvelles Technologies de l'Information et de la Communication (NTIC), entralnant un effet de concentration des médias de masses multisupports et, au contraire, un effet d'éclatement a l'échelle individuelle de l'accès a la communication d'information grace a Internet notamment ; mouvement qui affecte les usages des médias « traditionnels »21. Marc Raboy n'emploie pas indistinctement la notion de média pour les deux dimensions précitées, mais distingue les médias de masse (organes établis émettant un message a destination du public) et la société de l'information (assimilée a Internet oil l'émission du message est rendue accessible au public).

En effet, Internet semble avoir fait évoluer la notion de média de communication dans le sens oil on l'entendait précédemment avec les médias de masse (one to many), puisqu'il constitue pour certains un média horizontal (many to many) permettant de nouveaux usages allant du bilatéral22 au global en passant par le communautaire (réseaux sociaux...).

Nous reviendrons23 sur les origines et implications de cette thèse opposant le consommateur passif du système mass médiatique au « consomm'acteur » de l'Internet. Cela nous permet de pointer ici l'importance des discours dans la construction des perceptions sociales des médias et les postures d'usage qu'y en découlent. Comme le souligne Franck Rebillard : « Si l'imaginaire constitue a n'en point douter la composante la plus immatérielle de la technique, elle n'en est pas moins partie prenante de son devenir social.24 » La naissance d'un média est donc en partie constituée de projections imaginées, ne correspondants pas forcément a des prévisions qui se réaliseront, mais avant tout a des ressources collectives.

Le média Internet suscite ainsi beaucoup de prospectives sur les futures pratiques qui s'y développeront. Mais comme nous le rappelle Francis Balle :

« Les médias sont des techniques [qui] valent seulement par l'usage qui en

est fait. [...] Ainsi les médias nous surprennent-ils toujours : leur usage

21 Nous entendrons par médias « traditionnels » des dispositifs communicationnels et d'information préexistants au web, qui peuvent avoir transférés une partie de leur offre sur Internet mais dont le cceur d'activité demeure « analogique », comme par exemple des organes de presse possédant aujourd'hui des sites internet.

22 Certains usages d'Internet, tels que le courriel ou la messagerie instantanée, peuvent cependant le faire considérer également comme un média dans son acception privée (one to one).

23 Cf. partie 4.1. p. 35

24 p. 83 REBILLARD Franck, Le Web 2.0 en perspective, Paris, L'Harmattan, coll. Questions contemporaines, 2008.

correspond tres rarement a ce que leurs inventeurs [ou futurologues] avaient imagine.25 »

Un média ne se définit donc pas uniquement par ses possibilités techniques mais également par ses usages. Marc Raboy nous rappelle, que le cadre historique et sociétal dans lequel le médium prend place, va influencer le role et a la place des médias selon le type de régulation mis en place par l'état via un encadrement législatif, un modèle économique, des infrastructures... Nous gardons, dès lors, a l'esprit les dimensions multiples que prennent les médias, ainsi que leur caractère mouvant du fait de l'évolution que connaissent leurs usages et le cadre dans lequel elles prennent place.

Nous retiendrons ici le terme de média en tant qu'il répond aux trois critères de définition suivants : un support rendant possible la transmission d'informations a de nombreux individus épars26 et permettant ainsi, la constitution d'une opinion publique ; un dispositif triangulaire (émetteur, médiateur, récepteur) de communication prenant place dans l'espace public et qui fonctionne traditionnellement selon une certaine périodicité (contenus de . flux » ou de 3 stock »).

25 p. 5, BALLE Francis, Les Medias, Paris, PUF, coll. Que sais-je ?, 2009.

26 Dictionnaire Culturel, Le Robert, Alain Rey, 2005, Tome 3, p. 484.

2.2. Internet : un media « nouveau «  ? Quelles specificites mediumniques ?

La périodicité (production de l'information en flux tendu et discontinu), le champ d'application (a l'échelle internationale, a la sphere aussi bien privée que professionnelle ou publique) et les roles d'émetteur et de récepteur sur Internet évoluent et different des autres médias. En effet, selon Eric Maigret27 le terme de 3 média de masse . fait référence a une mise en relation distanciée de(s) l'émetteur(s) et du[es] récepteur(s) sans possibilité poussée d'interaction entre ces deux entités.

C'est ce critere qui permet de distinguer la communication interindividuelle de la communication organisationnelle, or avec les nouvelles applications qu'offre Internet, la donne change quelque peu. C'est la tout le propos de notre étude : les espaces d'interaction entre les tenants d'un web journal et ses abonnés. Cependant, si les échanges s'intensifient et que les roles peuvent, dans une certaine mesure, s'interchanger ou se cumuler (cf. User Generated Content28), Internet répond aux autres criteres de définition d'un média, bien qu'il soit doté de caractéristiques propres.

Internet demeure un dispositif communicationnel s'inscrivant dans le champ public, favorisant l'émergence d'une opinion publique par le débat qu'il permet via la publication de contenus datés en ligne. Cependant, selon Bernard Miège le Net est un média ambivalent dans sa structure même dans la mesure oil, il peut etre un moyen de : communication interpersonnel, d'expression participative, de transmission pour tous les autres médias. Il est donc difficile de définir Internet, dans la mesure oil il constitue un médium qui . déborde . les autres médias. Comme l'expose Serge Proulx, il permet . l'adjonction de potentialités supplémentaires ., qui ne s'excluent pas les unes les autres. Ainsi Internet cumule :

- une production atomisée et non-marchande des contenus (blogs, sites associatifs...) en sus des produits diffusés [...] par les groupes industriels de communication ; modèle dialogique (courriels, forums, messageries instantanées...) complétant la relation linéaire entre production et réception ; exhaustivité et disponibilité des informations [...] suppléant la

27 MAIGRET, Eric. Sociologie de la communication et des médias. Paris : Armand Collin, 2003, p. 29.

28 Cf. Lexique, annexe 7.2. p. 110.

rigidite de la programmation et de l'edition ; espaces de debats et de selection entre internautes combines aux scenes plus mediatiques de la representation politique. .

La multiplicité des dimensions d'Internet rend difficile sa définition en tant que média, en raison de la convergence des services qu'il permet. Par ailleurs, nous avons retenu la notion de média dans son acception . de masse . or, Internet correspond également a un médium d'usage privé et dialogique, mais c'est ce paradoxe même qui en fait un média . nouveau >.

Souvent qualifiée de . révolution ., sa nouveauté ne relève ainsi pas tant de son rythme rapide de diffusion de l'innovation ou de la décentralisation de la publication de contenus, qui constituent des phénomènes déjà rencontrés par d'autres médias comme le souligne Franck Rebillard, que du fait qu'il soit un 3 dispositif de communication total et universel >. Internet regroupe une grande diversité de modalités d'échange, de secteurs d'activité et d'espaces d'utilisation. Pour Patrice Flichy29, c'est dans cette . pluralité d'activités sociales . et de registres communicationnels, qu'il faut voir la spécificité d'Internet en tant que média.

Enfin, il ne faut pas oublier que l'Internet grand public est tres récent (le taux de pénétration en terme d'acces a Internet en France n'a dépassé les 50% qu'en 200530) et qu'il est donc actuellement une phase transitoire d'hybridation des différentes filiations et logiques qui le composent. Selon Rick Altman :

3 L'intermedialite proprement dite ne consisterait pas en un simple melange de medias, mais designerait plutot une periode pendant laquelle une forme destinee a devenir un media a part entiere se trouve encore a tel point tiraillee entre plusieurs medias que son identite reste encore en suspens. >>31

L'Internet ne peut se réduire aux médias qui le composent, mais, encore des logiques propres a ces derniers, il semble aujourd'hui difficile de cerner son identité propre.

29 FLICHY Patrice, L'imaginaire d'Internet, Paris, La Découverte, 2001, 272 p.

30 GREFFE Xavier et S0NNAC Nathalie (sous la direction de), Culture Web. Creation, contenus, economie numerique, Paris, Dalloz, 2008, 886 p.

31 ALTMAN Rick, . Technologie et textualité de l'intermédialité ., Societe et representations n°9, 2000, p. 11.

2.3. Les « sites indépendants d'information «  ?

Les sites indépendants d'information, qui constituent l'objet de notre étude, s'inscrivent dans le média Internet et ont des dénominateurs communs bien que leurs objets puissent différer.

Nous avons considéré dans ce travail l'information au sens journalistique du terme, c'est-à-dire toute actualité se déroulant dans le champ public portée a la connaissance de tous par une organisation via un support médiatique. Nous comprenons par . organisation ., un organe de presse constitué d'une équipe éditoriale de professionnels, possédant ou non la carte de presse, mais exerçant leur activité selon des r~gles de déontologie journalistique établies (recoupement des sources...).

Cela exclut donc de notre enquête la blogosphère (même si certains blogs peuvent être tenus par des journalistes), les réseaux sociaux (Facebook32, Twitter33...) et l'ensemble des sites a usage privé (pages personnelles...), associatif ou purement marchand (a visée promotionnelle et/ou commerciale) de notre champ de recherche. Bien qu'Internet soit par définition un dispositif de portée internationale, nous avons également réduit ce dernier a des sites d'information 3 de production française . pour des raisons méthodologiques (temps, possibilité de rencontrer les journalistes...) et afin de pouvoir observer des offres s'inscrivant dans un même contexte social (lois, pratiques culturelles...).

Le theme de notre étude porte sur les sites indépendants d'information que la Direction du développement des médias (DDM) a défini ainsi :

. service de communication au public en ligne fourni a titre professionnel par un prestataire qui en assume la responsabilite editoriale, consistant en la production et la mise a disposition du public, de faFon periodique et reguliere, d'un contenu original, compose d'informations ayant fait l'objet d'un traitement journalistique et presentant un lien avec l'actualite, qui ne constitue pas, en lui-meme, un outil de promotion ou un accessoire d'une activite industrielle ou commerciale ».34

32 http://www.facebook.com/

33 http://twitter.com/

34 Le Livre vert des Etats généraux de la presse, propositions du pMle 3 dirigé par Bruno Patino, . Le Choc d'Internet. Quels modeles pour la presse écrite ? ., p. 40, http://www.culture.gouv.fr/culture/actualites/conferen/albanel/livrevert1.pdf

Cependant, cette definition generique ne correspond que partiellement a l'acception des sites d'information que nous avons retenus dans cette etude, dans la mesure oil elle ne fait pas intervenir les notions d'independance et de « pure player », qui constituent pour nous les criteres constitutifs de notre selection.

Nous avons caracterise ces derniers comme suit : sites Internet non-adosses a une marque ou un groupe de presse/audiovisuel/FAI/moteur de recherche (sites dits « pure players »), tirant tout ou partie de ses revenus de la publicite, de la revente de ses contenus a d'autres medias ou des abonnements de ses utilisateurs. Leur modele d'affaires peut donc etre mixte, mais ne permet pas pour le moment d'assurer la perennite de leurs sites, ces derniers ayant ete crees recemment (2007/2008 en ce qui nous concerne).

Ces sites sont constitues d'une redaction de journalistes professionnels ayant construit leur propre outil de travail, mais pouvant collaborer en parallele a d'autres media et/ou avoir leur propre blog. Leur offre en matiere d'informations, generalistes ou specialisees, s'appuie egalement sur les contributions des internautes, qui s'expriment sous la forme de commentaires, blogs, ou courriels. Les contenus co-produits sont multimedias et inter-connectes (liens avec d'autres sites de meme nature, liens pour les partager sur les reseaux sociaux ou les envoyer par courriel...). Ces sites donnent donc acces des differents espaces dedies, soit a des publications propres a la redaction, soit a des liens ou breves d'autres sites, soit a des contenus amateurs d'Internautes.

Ils correspondent en cela a ce que l'on appelle des « sites participatifs » et que Franck Rebillard definit comme etant des :

« sites agregeant des contenus deposes par des internautes n'appartenant pas a l'organisation editrice du site. [...] Ces sites s'inscrivent davantage [en opposition aux sites de partage de contenus] dans la filiation de l'~crit, possedent a ce titre une maquette plus hierarchisee et un rubricage plus contraignant pour l'insertion des contenus, et presentant une visee intellectuelle (ex : l'encyclopedie Wikipedia ou le site de journalisme participatif AgoraVox). 35 »

La visee intellectuelle citee evoque les notions de collaboration et de « foules Intelligentes » cheres a Howard Reingold36.

35 P. 1J8, RE9ILLARD Franck, Le web 2.0 en perspective. Une analyse socio-économique de l'Internet, L'Harmattan, Paris, 2007, 158 p.

36 RHEING0LD Howard, Foules intelligentes, Pais, M2 Ed, 2005, 300 p.

Le terme de sites d'information « pure players . renvoie a l'une des caractéristiques que donne également Franck Rebillard du webzine : « journal publié exclusivement sur Internet, sans déclinaison dans l'imprimé ou l'audiovisuel..37.

Nous assimilons les sites indépendants d'information sur lesquels notre étude se porte aux webzines, mais nous n'emploierons pas ce terme afin, de les distinguer des dimensions amateurs et alternatives des webzines utilisé par Franck Rebillard. Nous nous pencherons cependant dans notre partie consacrée a l'approche sociohistorique de l'information sur le web sur les liens, que l'on peut établir entre la tradition d'auto publication collective des webzines et les espaces participatifs présents aujourd'hui sur ces sites.

Nous considérons les sites observés comme indépendants davantage en raison de la nature de leur structure financière (n'appartenant pas a un groupe de presse et ayant un capital appartenant en grande partie a leurs fondateurs), que du fait de la distinction amateur/professionnel comme c'est en partie le cas dans la tradition du web/fan-zinat.

Nous ne traiterons pas des sites indépendants d'information sous le terme de « médias ., en raison de la confusion possible entre l'acception d' « organe de presse en ligne . et le médium Internet comme « dispositif communicationnel . tel que nous l'avons défini.

Cela évitera également une possible confusion avec les médias dits « de masse ., que nous évoquerons davantage sous le terme de « médias traditionnels >. Cette terminologie ne doit pas etre entendue dans le sens oil l'on recréerait une querelle des anciens et des modernes ou reposant sur une barrière technologique (factice dans la mesure ou la radio ou la télé ont également recours a la technologie numérique et sont aussi présents sur le web), mais dans la mesure oil leur activité repose principalement sur des supports classiques (papier, ondes hertziennes...) et répond a des procédés industriels de production et de diffusion.

Par ailleurs, le projet de loi sur le statut d'éditeur en ligne n'accorde a ces sites un
statut équivalent aux médias d'information que dans la mesure oil ils proposent des

37 Rebillard, op. Cit., p. 149.

contenus éditoriaux de professionnels. En ce sens, les espaces de publications participatives de ces sites ne sont pas directement compris dans la notion de 3 média ., mais plutMt vu comme une activité annexe d'hébergeur-modérateur des user generated contents (UGC). 0r comme nous l'avons évoqué, le terme de média appliqué dans son sens large a Internet comprend également les activités de publication amateur. Comme l'évoque Rebillard : . avec l'Internet, pratiques amateurs et professionnelles se retrouvent ainsi sur un même dispositif de communication.38 »

Autrement dit, ces deux formes d'expression peuvent coexister (de manière non antinomique sans pour autant être forcément sur un pied d'égalité) sur un même site d'information et constituent la spécificité même d'Internet en tant que . nouveau . média. Du fait que ce statut légal de média en ligne ne comprenne pas l'une des caractéristiques d'Internet, nous éviterons de nommer ces sites d'information indépendants de la sorte.

38 Rebillard, op.cit., p. 109.

3. Approche socio-historique du web: les filiations d'une tradition de partage, de participation et d'innovation collective.

L'enthousiasme de certains commentateurs du web 2.0 pourrait laisser a penser que le concept du « participatif . est né avec l'Internet grand public. Ainsi, peuton lire Francis Balle s'émerveiller :

« mais le numerique va plus loin, avec le web 2.0, que cette interactivite : avec ses blogs le web franchit un seuil supplementaire, realisant le reve du Do-it-yourself, permettant a chacun de s'exprimer comme il l'entend et d'offrir une alternative aux medias traditionnels.39 .

De meme, certains journalistes attribuent au web 2.0. un caractere révolutionnaire du fait de son « horizontalité » et de sa capacité a accomplir le slogan « tous journalistes >. Le blogger John Paul Lepers40 affirme ainsi : « Internet est par essence un media democratique. [...] Tu peux devenir toi-meme reporter. »41

0r, cette notion constitutive du web s'origine dans des filiations philosophiques et des pratiques qui lui sont antérieures. Tout en étant davantage que la somme de ces dernieres, le web est animé par l'influence de ces logiques diverses. Ainsi Franck Rebillard avance que :

« Si nouveautes il y a, ce ne sont pas de totales originalites partant de rien, mais plutot des ajouts, des reorientations, des changements d'echelle et de vitesse, au sein de dynamiques sociales presentant une certaines continuite >>42.

Par ailleurs, les pratiques que nous avons étudiées sont intimement liées aux évolutions techniques, mais cette démarche ne releve aucunement d'une volonté de retracer la genese et du web en tant que nouvelle technologie. Il s'agissait davantage pour nous de saisir l'évolution des usages coopératifs, afin d'en percevoir une certaine philosophie commune. L'Internet étant un média né a la fin des années 1970 et toujours en pleine ébullition, nous disposons de peu de recul quant a son « histoire .. La tentation est grande de vouloir « tirer des lecons . de cette dernière. Nous avons essayé de nous garder de réécrire le cours de l'évolution de ce jeune média ou de s'y appuyer pour établir des projections par trop affirmatives.

39 BALLE Francis, Les Medias, Paris, PUF, coll. Que sais-je ?, 2009, p. 46-47.

40 http://johnpaullepers.blogs.com/

41 Citation d'un article du Monde du 19.06.06 dans : « Les nombrils électroniques ., Le Plan B, n°6, février-mars 2007, http://www.leplanb.org/medias/nombrils-electroniques-2.html

42 Ibid, p. 141.

Nous avons tenté d'interroger les permanences historiques des différents mouvements de pensée dont le principe de la participation est issu et de les mettre en relation avec la tradition libertaire du web. Cela nous permettra notamment de mieux saisir les enjeux sous-jacents au développement des espaces participatifs sur les sites indépendants d'information. Les représentations que suscite aujourd'hui le 3 participatif . découlent d'une culture alternative aux médias traditionnels et sont également a mettre en relations avec les origines . collaboratives . de l'Internet.

3.1. Felix et l'esprit des radios pirates

Nous reviendrons ici sur un épisode marquant de la contestation du système mass médiatique en Europe : radio Alice et les téléstreets italiennes. La théorisation dont ces initiatives ont fait l'objet dans les travaux de Félix Guattari nous apporte un éclairage sur les motivations qui peuvent pousser des militants a s'approprier le statut d'émetteur pour reconquérir un médium. Même si cette recherche de nouvelles potentialités s'est appliquée a des dispositifs communicationnels traditionnels (radio, télé, magazine...), elle a durablement marqué les esprits et la philosophie libertaire.

Sans aller jusqu'à dire que tout internaute a conscience ou connalt cet héritage indirect, le principe de participation de la « base . dans le processus médiatique procède, a ses origines, d'un engagement volontariste. Aujourd'hui, la pratique participative sur Internet s'est généralisée et n'est plus forcément considérée comme un acte de résistance a un système d'information « main stream »43. Cependant, cela renvoie a une volonté de s'informer autrement en contribuant a cette ressource.

L'appropriation par les citoyens de la parole médiatique permet, selon Guattari, non pas d'abattre le système panoptique des médias, mais d'ouvrir des « points de fuite .. 0n peut ici établir un parallèle avec la volonté de Médiapart et d'Arrêt sur images de faire un journalisme a contre courant de ce qui se fait dans les médias traditionnels. Le fait que ces « pure players . aient choisi de s'établir sur l'Internet (outre les coats moindres) et d'ouvrir leurs sites a la participation des internautes, fait ainsi partie de cette ambition alternative.

Nous considérons donc, a l'instar de Franck Rebillard que toute pratique sociale s'ancre dans un cadre socio-historique avec des permanences en termes de valeurs et d'usages. Nous essayons donc dans cette partie de dégager les filiations existantes entre les différentes dimensions actuelles du « participatif . avec la tradition contestataire des médias de masse, ainsi qu'avec les valeurs constitutives de l'Internet. Ce travail de contextualisation nous paralt important dans le cadre de notre approche des différentes dimensions actuelles du « participatif . et donc pour l'analyse des représentations affiliées.

43 Expression traduisant le courant de pensée dominant.

Les annees 1960 et 1970 ont vu naltre l'idee que les nouveaux outils techniques et leur acces plus aise menaient potentiellement l'individu au centre du dispositif communicationnel dont les industries mediatiques, telle que la television, les avaient depossedes. Cette critique adornienne44 des appareils de production de l'information a entre autres ete portee par Felix Guattari et son concept d' . ere post-mediatique >.

Selon lui, les possibilites qu'offrira la technique en terme de d'acces a d'innombrables contenus et sources, permettront l'entree dans une . ere post media ., qui consisterait en une reappropriation, a l'echelle individuelle et collective, des moyens de communication via leur usage interactif45. Pour lui, la proliferation des dispositifs atomises, donnant a nouveau aux citoyens l'acces a l'expression publique, ouvrirait la voie a un demantelement du systeme mass mediatique, de maniere plus efficace qu'un contre-modele a proprement parler.

Ainsi, Guattari avance-t-il que :

3 les nouvelles technologies secretent, dans le meme mouvement, de l'efficience et de la folie. Le pouvoir grandissant de l'ingenierie logicielle ne debouche pas necessairement sur celui de Big Brother. Il est beaucoup plus fissure qu'il n'y paratt. Il peut exploser comme un pare-brise sous l'impact de pratiques moleculaires alternatives. >46

Ses ecrits, comme L'Anti-CEdipe47, ont inspire les partisans du mouvement

d' . autonomie creatrice . en Italie (Bologne) et notamment l'idee que les marges de la societe etaient plus importantes que son centre48. Après la creation de la revue A-traverso, Radio Alice nait le 9 fevrier 1976 avec l'idee << rhizomatique > de donner la parole aux gens qui ne l'avaient jamais eue. Le pullulement des

44 Theodor Adorno avance par exemple que la musique dite . populaire . concue pour une consommation de masse ne repond pas a des gouts, mais procede d'une alienation et d'un ecrasement de l'individualite, opere par l' . industrie culturelle .. cf. Max Horkheimer/Theodor W. Adorno, Dialektik der Aufklarung (1944). Frankfurt am M., S. Fischer Verlag, 1969. Trad. franc. par E. Kaufholz, La dialectique de la Raison, Paris, Gallimard, 1974. Dans la presente traduction du texte de S. Weigel, . Raison . (avec la majuscule initiale) rend . Aufklarung .. Par opposition a 3 raison ., pour . Vernunft . (N.d.t.)

45 GUATTARI Felix, . Vers une ere post-media ., Terminal n°51, http://multitudes.samizdat.net/Vers-une-ere-postmedia, mis en ligne le 23 octobre 2004.

46 Ibid

47 GUATTARI Felix, Ecrits pour l'anti-cedipe, Paris, ed. Leo Scheer, coll. . Lignes Et Manifeste ., 2004, 509 p.

48 Interview de BIF0, l'un des fondateurs de Radio Alice, http://sebastien.schifres.free.fr/bifo.htm

initiatives, basées sur l'expérimentation et le partage en réseaux, construit de nouveaux usages . non-utiles . et gratuits aux technologies49.

Selon Franco Berardi, l'un des principaux protagoniste du mouvement des radios pirates aux te(estreet des années 2000 :

. ce qui nous interessait dans (e mouvement des radios qui a commence dans (es annees 1970, c'etait ('anticipation d'une tendance post-mediatique qui se profi(ait a ('horizon : une sociabi(ite dans (aque((e (es f(ux de communication ne sont p(us diriges d'en haut vers un pub(ic passif, mais fonctionnent comme un mai((age tres serre d'echanges rhizomatiques entre des emetteurs qui se trouvent sur (e meme p(an.50 4

Franco Berardi ne considère pas les dispositifs techniques comme structurellement porteurs de . modalités sémiotiques . différentes. Autrement dit, le média est un dispositif qui fonctionne selon des finalités et un agencement incorporé au cours de son histoire social et qu'il s'agit de faire éclater par l'application d'un . reverse engineering >. 0livier Blondeau décrit ce processus par . ('inversion de rA(es sociaux entre producteurs et consommateurs d'information et [(a redefinition de] (eur attitude par rapport a (a technique en genera(51 ..

Il s'agit donc non seulement de proposer un autre type de contenu, mais également de reconstruire le média en définissant des codes et un cadre d'action nouveaux. Cette vision recombinante du dispositif communicationnel s'oppose a la vision d'un média dont la fonction détermine forcément l'agencement du message et sa réception. Le dispositif est percu comme une possibilité de produire des situations d'énonciation permettant a une parole alternative d'émerger.

Si l'esprit critique s'exerce lors de la réception de tout message médiatique comme l'avance Franck Rebillard face a ceux qui opposent les mass médias verticaux a l'Internet horizontal, le courant de pensée Guattarien avance que la question se pose moins en termes de média qu'en terme de modalités sémiotiques. Emanuel Vidocq et Bernard Prince52 précisent que le mouvement guattarien relève

49 VIDEC0Q Emmanuel, H0LMES Brian, QUERRIEN Anne, . Les Trois Plis du média-activisme ., Mu(titudes, n°11, Février 2005, p.11-14.

50 BERARDI Franco, (Bifo), . Les radios libres et l'émergence d'une sensibilité postmédiatique ., in Mu(titudes, n°21, Paris, juin 2005.

51 BL0NDEAU 0livier, Devenir Media. L'activisme sur Internet, entre defection et experimentation, Paris, Edition Amsterdam, 2007, p. 84.

52 VID0CQ Emmanuel et PRINCE Bernard, . Félix Guattari et les agencements post-média. L'expérience de radio Tomate et du Minitel Alter ., in Mu(titudes, n°21, 2té 2005, p. 23-30.

moins d'une critique de l'aliénation médiatique, qu'une remise en cause de leur mode d'organisation sociale et une volonté de créer grace aux nouvelles technologies des dispositifs inédits.

Il s'agit de faire émerger des lignes de fuite par une expression alternative 3 mineure des minorités ., organisée dans un mouvement éclaté en réseau, au lieu d'une contre-culture monolithique, afin de fissurer le système médiatique a ses marges. Nous pouvons ici opérer un rapprochement avec la structure . en toile . de l'Internet a la fois atomisée et interconnectée, qui offre un moyen d'information et d'expression aux personnes n'ayant pas forcément voix au chapitre dans les médias traditionnels. Le réseau permet ainsi un découpage a la fois plus fin, plus dense et alternatif de l'information. Ce sont ainsi des actions réalisées a l'échelle d'individus, qui définissent l'ensemble, tout en le rendant d'autant plus insaisissable selon le principe d' . éclatement de l'action . conceptualisé par Hakim Bey.

3.2. « Frappez et fuyez «  : la philosophie libertaire d'Hakim Bey

Le web indépendant n'est pas considéré par Hakim Bey comme un contre-pouvoir ou un concurrent aux médias de masse, mais le Net les influence dans le sens oil il change les rapports habituels des récepteurs aux contenus. L'organisation non hiérarchique permet un échange libre des données et vient combler les manques du système informationnel dominant. L'interaction entre les membres de la . tribu . évoque ici l'esprit communautaire du Net nous permet de mieux saisir la nature mouvante du réseau.

Cette conceptualisation libertaire du web indépendant nous éclaire par ailleurs en ce qui concerne certaines de ses valeurs historiques, dont découle la volonté de participer au réseau. La mobilisation anti institutionnelle et le libre accès, sont toujours très prégnants sur le Net, comme nous avons pu le constater a l'occasion des manifestations contre la loi Hadopi53. Cette tradition pousse les internautes a s'auto-organiser et a collaborer sur le web pour proposer des alternatives, notamment en termes d'information.

La logique d'éclatement de l'action (cependant collective car en réseau, mais mouvante) renvoie au concept des TAZ (zones d'autonomie temporaire) développé par Hakim Bay. Sa pensée libertaire demeure une référence du web indépendant notamment en ce qui concerne le . soulèvement ., autrement dit l'énergie préexistante a une révolution, mais qui ne vient pas s'inscrire dans l'Histoire (assimilée a la notion de pérennité donc d'Etat), car invisible et en perpétuel mouvement.

3 La TAZ est comme une insurrection sans engagement direct contre l'Etat, une operation de guerilla qui libere une zone (de terrain, de temps, d'imagination) puis se dissout, avant que l'Etat ne l'ecrase, pour se reformer ailleurs dans le temps ou l'espace.54 4

Le mot d'ordre est « frappez et fuyez. Deplacez la tribu entiere, meme s'il ne
s'agit que de donnees sur le Reseau.
. Le concept de la disparition et du

53 Exemple : une . flash mob artichaut . était organisée par . Internet mon amour . dans les jardin du Palais Royal le 1er avril 2009 pour dénoncer l'absurdité de la loi Hadopi, http://www.internetmonamour.fr/

54 BEY Hakim, Zone Autonome Temporaire, Paris, L'Eclat, 1997, file:///c:/Users/Claire/Desktop/articles%20m%C3%A9moire/TAZHakimBey.html

mouvement sur le réseau est donc vu comme une stratégie de guérilla pour éviter la violence de l'Etat tout en exploitant ses failles en s'attaquant avant tout aux idées. La bande ou tribu (dont les membres sont unis par des liens d'affinités collectives non excluant) applique la tactique du « nomadisme psychique » afin de déplacer « le paradoxe d'un mode passif a un mode actif » notamment sur le Net. Ce dernier se définit comme « la totalité des transferts d'information et de communication » au sein duquel vient se greffer le web (« structure d'échange d'information horizontale et ouverte, le réseau non hiérarchique ») et le contreNet (« usage clandestin, illégal et rebelle du web, piratage de données et autres formes de parasitage. »)

Si le web non officiel a peu d'influence sur les grands médias, selon Hakim Bey, il instaure de nouveaux rapports entre les sujets et les données, et est par la-même propice au développement de TAZ, cela malgré le fait que le support demeure une médiation (la TAZ repose sur la rencontre en face a face festive). L'intéret repose en effet moins sur la technologie a l'oeuvre que sur la nature amplifiée et horizontale des rapports que sa structure permet.

« Le langage parlé, le courrier, les fanzines marginaux, les «liens téléphoniques» suffisent déjà au développement d'un travail d'information en réseau. La clé n'est pas le niveau ou la nouveauté technologique, mais l'ouverture et l'horizontalité de la structure. »

La TAZ est une notion floue, qui se définit avant tout dans l'action et s'inscrit dans les failles du systeme, ainsi le chaos du Net ne peut que nourrir le web selon cette logique. Des piratages de données au bricolage d'information forment des connections alternatives qui permettront des « dérivations de pouvoir servant l'émergence de la TAZ elle-meme ». ll s'agit moins de détruire le systeme des industries culturelles dominantes sur le réseau que d'en exploiter les espaces laissés vides.

Bien que le concept de web 2.0 n'était pas encore employé couramment au moment oil Félix Guattari ou Hakim Bey ont développé leur vision du réseau, les notions d'horizontalité des échanges et de dispositif alternatif y sont déjà très présents. Et leur vision vient quelque peu contredire l'affirmation de Franck Rebillard au sujet des partisans des échanges peer-to-peer notamment lorsqu'il

avance que « Le web 2.0 est en effet présenté par ses partisans les plus acharnés comme une alternative ne se contentant pas de se juxtaposer aux industries de la culture et de l'information, mais allant jusqu'à évincer celles-ci.55 . En effet, il ne s'agit pas de détruire les systèmes dominants, mais d'en changer les caractéristiques « sémiotiques », afin de permettre l'émergence d'un dispositif communicationnel alternatif, allant pour Hakim Bey jusqu'à se nourrir des failles du premier.

Au dela de l'aspect parasitaire de cette philosophie libertaire, se manifeste donc la volonté de faire émerger une réalité différente via le Net, qui porte en lui la promesse d'une AI intégrale au potentiel augmenté, grace a la mise en réseau non hiérarchique et non contrôlée de l'information.

Hakim Bey conclut son chapitre « Le Net et le web » ainsi : « Maintenant j'attends que les hackers me prouvent que j'ai raison, que mon intuition est bonne.. Les idées de prise de contrôle des flux d'information, quitte a ce que cela passe par leur détournement invisible et mouvant, ainsi que d'échanges horizontaux de données rejoignent les préceptes des hackers et des premiers concepteurs du réseau.

55 !bid, p.104.

3.3. L'esprit de collaboration des premiers hackers, fondateurs du réseau

Les premiers développeurs du web sont a l'origine d'une tradition de collaboration basée sur le libre échange des données et des connaissances. Les valeurs des hackers ont durablement marqué l'évolution de l'Internet et instiller une tradition participative. L'émulation entre développeurs motivés par la reconnaissance de leurs pairs et une bonne réputation sur le web constituent en outre des caractéristiques similaires aux situations que l'on retrouve sur les espaces participatifs (forums, blogosphère...). C'est en ce sens que l'analyse de la tradition qu'ils ont instaurée constitue une référence importante pour comprendre les interactions des internautes.

L'incubation d'Internet dans le milieu universitaire américain a contribué a ce que Franck Rebillard nomme des . sédimentations sociales consistantes ., autrement dit une . culture . du Net.

3 Unes des valeurs fondamentales du monde academique est le libre acces aux resultats des recherches. C'est le principe d'une circulation libre et gratuite de l'information qui fut adopte par Arpanet56. La seule recompense que pouvait esperer l'auteur d'un logiciel etait la reconnaissance de ses pairs.57 »

Avant que le terme de « hacker » soit employé pour désigner des personnes s'introduisant par effraction dans les systèmes informatiques (c'est ainsi que les premiers créateurs de logiciels se nommaient eux-memes). Ces derniers répondaient a une éthique reposant sur quatre principes fondamentaux, que Steven Levy résume ainsi :

3 toute information est par nature libre. Si vous rencontrez un probleme, n'attendez pas qu'on le resolve pour vous. Toute information devrait etre gratuite. Mefiez-vous de l'autorite, faites avancer la decentralisation.58 .

56 . '

I- Agence des Projets de Recherche Avancée a été crée en 1957 par le Ministère américain de la Défense afin de contrer les avancées technologiques des soviétiques suite a la mise en orbite de Spoutnik. Sous la direction du professeur Licklider du MIT et reliant quatre universités entre elles, cette agence permis la lecture a l'écran des codes de programmation auparavant imprimés et développa les premiers logiciels de système d'exploitation permettant aux programmateurs aussi bien qu'aux utilisateurs de l'améliorer directement sur l'ordinateur.

57 FLICHY Patrice, . Utopies et innovations. Le cas Internet ., in Sciences Humaines, Hors série n°16, 1997, p.66.

58 LEVY Steven, Hackers : Heroes of the Computer Revolution, New York, DoubleDay, 1984.

Le développement des premier systèmes d'exploitation (permettant la coordination des logiciels et de la machine) a été développé par les « hackers ., des étudiants américains en informatique. En effet, au début de l'informatique, la communauté des utilisateurs était la même que celle des programmateurs ; elle collaborait pour développer une ressource qui leur serait utile, mais ces derniers concevaient déjà l'Internet comme un espace public et un laboratoire d'innovation.

Howard Rheingold résume l'esprit d'émulation et d'innovation régnant a la fin des années 1960 et au début des années 1970 en témoignant du processus collectif de conception des programmes59. Selon Rheingold, c'est grace a ces origines que les programmes les plus essentiels a l'utilisation d'Internet sont encore « 0pen source », c'est-à-dire « free » (le terme anglais est ici employé dans son acception de « libre accès).

Les hackers n'étaient pas purement altruistes rappelle l'auteur, ils étaient mus par la volonté de créer la « killer app . (littéralement l' « application qui tue ., autrement le programme qui révolutionnerait et augmenterait l'utilisation d'une technologie, car devenue incontournable. 0n peut citer les exemples de l'email pour Internet ou du G PS pour les PDA) et d'obtenir la reconnaissance de leur pairs en matière de programmation. La réputation est ainsi un facteur très important d'émulation a l'origine de l'innovation et du partage de contenus libres, ainsi qu'en matière d'autorégulation d'une communauté.

La réputation exerce donc un effet de carotte et de baton très puissant auprès des internautes les plus investis sur les sites participatifs, que ce soient des communautés de partage de liens (« slashdot ., « aaaliens ., « delicious »60

...), de ventes aux enchères (« eBay »61) ou dans la blogosphère. Nous reviendrons plus loin62 sur les effets qu'exerce la réputation (malgré le pseudonymat) en termes de régulation des communautés d'information.

59 « Au MIT [...] inventer des programmes d'ordinateurs était une entreprise collective : des programmes capitaux étaient conservés dans des placards sans verrous sur des feuilles perforées ; n'importe quel hacker pouvait utiliser le programme et, s'il trouvait un meilleur moyen de faire ce que le programme était censé faire, il le corrigeait et le remettait dans le placard. Cf. RHEING0LD Howard, Foules intelligentes. La Révolution commence, Paris, M2 Editions, 2005, p. 84.

60 Sites de « social bookmarking . : http://slashdot.org/, http://aaaliens.com/, http://delicious.com/

61 http://www.ebay.fr/

62 Cf. partie 4.2.2 (cf. p.38) : la réputation agit comme un facteur de régulation au sein de la communauté.

Ce lien d'intérêt mutuel fonde ce que Rheingold nomme les . foules intelligentes ., autrement dit des . individus capables d'agir ensemble sans se connattre63 ., car associés via de nouvelles formes de . contrats sociaux . permises par une technologie.

Ainsi, des communautés s'organisent en France au milieu des années 1990 pour construire collectivement un réseau de sites proposant une information alternative. Ces webzines constituent la premiere étape de l'appropriation amateur de l'expression médiatique par les internautes.

63 !bid, p. 16.

3.5. Des webzines aux sites d'informations pure players : evolution des pratiques participatives en matiere d'information sur le web.

Les premieres formes d'implication d'internautes dans l'information en France datent du milieu des annees 1990. Ces initiatives individuelles et communautaires sont fortement empreintes, selon leurs auteurs eux-meme, de la tradition libertaire que nous avons evoque plus haut64. Cette dimension politique fait partie de la genese du web grand public. Avant que n'apparaissent les « start ups » et que les journaux papiers ne developpent reellement une offre sur la toile, des groupes de passionnes et de militants se sont collectivement saisis du web pour informer et s'exprimer.

Les premiers webzines francais, comme la « Cybersphere », sont apparus apres 1995, animes par un fort esprit d'independance. Comme le resume David Dufresne (le createur de « La Rafale ., aujourd'hui journaliste a Mediapart) :

« l'idee diffuse etait d'utiliser le nouveau reseau a disposition pour inventer de nouveau modes de relations que ceux presents dans la societe (mettre en commun les savoirs, partager, sortir de la dependance marchande).65 4

A l'epoque, bien qu'Internet commence a devenir accessible au plus grand nombre, la toile reste encore le terrain de jeu de « gardiens du temple > : les informaticiens-programmateurs, les chercheurs, les techos66, les gamers67... Ces derniers defendent une certaine vision du Net comme le resume Valantin Lacambre (fondateur d'un des premiers hebergeurs francais « altern.org >) :

« l'etat d'esprit etait politise puisque cette demarche s'inscrivait dans un heritage culturel des mouvements alternatifs des annees 1980 (radios libres, fanzines punks etc...) puisque la plupart des precurseurs d'Internet etaient deja des trentenaires militants.68 .

Meme si la plupart des webzines de l'epoque ne durent pas, un mouvement
collectif est amorce dans ces annees la comme le montre la naissance du minirezo,

64 Infra parties 3. a 3.4 (p. 19 a 29).

65 Emission La Place de la toile presentee par Caroline Broue, France Culture, vendredi 09/01/09 de 11 a 12h. Volet 1 de la serie Une Histoire du net (1995-2001) : que reste-t-il du Web independant ? http://www.radiofrance.fr/chaines/france-culture2/emissions/place~toile/

66 Fans de nouvelles technologies.

67 Amateurs de jeux video, notamment de « MM0G . (massive multiplayers online games, jeux multijoueurs en ligne).

68 Ibid.

association informelle de passionnés du web. Ils résument l'impulsion a l'origine de leur site ainsi : 44 Entre discours consuméristes, cyber-conneries et volontés de regulation, nous voulions faire entendre notre voix, celle de l'autopublication. C'est pourquoi nous avons fonde le mini-rezo.69 »

Le Minirézo est notamment a l'origine en 1997 du Manifeste de web indépendant qui avait pour but de faire prendre conscience aux internautes, qui commencaient alors a affluer vers la toile :

44 de leur rôle primordial sur l'Internet : lorsqu'ils montent leur propre site, lorsqu'ils envoient des commentaires, critiques et encouragements aux webmestres, lorsqu'ils s'entraident dans les forums et par courrier électronique, ils offrent une information libre et gratuite que d'autres voudraient vendre et contrôler. »

Mais a l'heure des premiers bilans, les premiers webzines se sont faits phagocytés par les sites d'information des journaux papiers et n'ont pas trouvé de pérennité face aux offres marchandes. L'esprit de collaboration qui animait ces sites amateurs ne semblaient pas suffisant et l'utopie d'interaction du média Internet des débuts s'est heurté au principe de réalité. Cyril Fievet (fondateur du webzine le Cybermonde) conclut une interview accordée a Chronik'art en 1997 ainsi :

- au bout de deux ans d'experimentation, je finis par etre un peu sceptique quant a l'interactivite. Nos tentatives sur Cybersphère se sont toujours soldees par des echecs, que ce soit de l'animation de debat sur forum ou le principe du roman interacti[. Ceci dit, ce type d'interactivite devrait etre plus efficace aujourd'hui. »77

Alors qu'actuellement la notion d'interactivité est régulièrement invoquée par les sites pure players d'information, on peut effectivement se demander comment elle fonctionne dans ce nouveau contexte.

**********************************

69 44 Le Minirézo », par le Minirézo, 29.07.2000, consulté le 22.04.09,

http://uzine.net/article22.html

70 44 Le Manifeste du Webindépendant », le Minirézo, 02.02.1997, consulté le 14.03.09, http://www.uzine.net/article60.html

71 44 La Presse en ligne », interview de Cyril Fievet par Cyril de Graeve, in Chronicart, rubrique 44 Futur proche », 01.09.1997, http://www.chronicart.com/webmag/article.php?id=27

Les sites d'information de notre enquête prennent place dans ce contexte oil les valeurs d'indépendance, de coopération, de partage et de libre accès aux connaissances sont très prégnantes. De part la composition et de leurs parcours professionnels, ces équipes rédactionnelles sont issues des médias traditionnels, mais officient désormais sur le réseau Internet.

Médiapart et Arrêt sur images n'ont pas émergé ex nihilo. Leur création procède d'une évolution dans la conception de l'information, c'est pourquoi nous avons tout d'abord adopté une approche socio-historique, des mouvements contestant les médias de masse jusqu'aux webzines. Si ces derniers relèvent de l'initiative de simples internautes, les sites de notre corpus s'inscrivent dans des dynamiques interactives. Il nous a donc paru important de dégager leurs filiations et leur évolution dans le temps, afin de mieux comprendre leurs différents enjeux et dimensions actuels.

Ces sites sont un mélange entre deux traditions et deux cultures différentes de l'information et les lieux les plus significatifs de cette friction (pas forcément au sens conflictuel du terme, mais premier) sont leurs espaces participatifs.

La problématique de la collaboration avec les internautes s'y pose avec force et renvoie elle-même a celle du role et de la place de chaque partie. Reste a savoir pour nous comment les journalistes exercant au sein de ces rédactions abordent, percoivent et réagissent a ces interactions.

4. Problématique et hypotheses

4.1. Présentation de la problématique

Notre réflexion sur les sites « pure players » d'information est née au départ d'un questionnement quant a leurs motivations a impliquer les internautes dans leur démarche éditoriale et leur manière d'aborder le concept du « participatif ». Cette notion indéterminée, apparue avec celle du web 2.0, s'est imposée comme un « buzz word », qui nous semblait etre un argumentaire tantot commercial, tantot démagogique. Si on en croit l'influent blogger américain Jeff Jarvis, l'alternative qui s'offre aux médias est la suivante : « Donnez aux Bens le contrôle de votre media, ils l'utiliseront ; ne le donnez pas, ils vous quitteront. »72

Dans le cadre de notre étude, nous nous sommes demandé si l'expression « impliquer les internautes », employée par les fondateurs des sites indépendants d'information, relevait d'une volonté de se distinguer des médias traditionnels dont ils sont ssus, ou bien, d'une volonté d'innover dans la production de l'information.

Le concept d'une horizontalité révolutionnaire sur Internet est en vogue chez les chantres du web 2.0., instillant l'idée que les nouveaux usages numériques appellent dans leurs théories prospectivistes (voire « technology optimist », cf. les « évangélisateurs » de Google) la fin de l'ère analogique. Par une sorte de contamination, certains journalistes et bloggers, citant l'exemple des vidéos du Tsunami en 2004 ou des attentats de Londres en 2005, s'interrogent sur la mort des journaux papiers73 a l'hégémonie de plus en plus contestée par les « pro-ams ».

Cela nous a fait nous interroger, moins sur les raisons ou la légitimité d'un tel questionnement (pourcentages des internautes contributeurs, principe d'innovation destructrice, danger pour la démocratie, destruction du lien social par les nouvelles pratiques d'information individualistes...), que sur ses fondements, a savoir les représentations que les web journalistes professionnels avaient de la

72 Ces propos de Jeff Jarvis ( http://www.buzzmachine.com/) ont été cité par Rupert Murdoch a l'occasion de son discours devant l'American Society of Newspapers Editors, le 13 avril 2005, http://www.newscorp.com/news/news~247.html

73 P0ULET Bernard, La Fin des journaux et l'avenir de l'information, Paris, Gallimard, 2008, 217 p.

place et le role des internautes contributeurs. Comment concoivent-ils la notion de participatif ? Comment celle-ci se concretise-t-elle sur leur site en terme d'interactions avec les internautes ? Ce questionnement resume notre problematique et le fil logique de notre enquête.

4.2. Presentation des hypotheses de travail

N.B. : Nous tenons a préciser que les termes web et Internet ne sont pas interchangeables, dans la mesure oil le premier ne constitue qu'une des applications du second. Cependant, l'usage courant les ayant consacrés comme synonymes, nous les avons ici employés indistinctement pour plus de simplicité.

Le but de cette étude étant de mieux appréhender les représentations du 3 participatif . qu'entretiennent les web journalistes a l'égard de certains sites indépendants d'information, nous avons dans un premier temps estimé qu'il était important de cerner le contexte socio-historique dans lequel ce concept s'inscrit. Il s'agissait donc de dégager les valeurs de la . web culture» s'organisant autour des notions de coopération, de libre accès, de partage des connaissances, d'engagement activiste et d'indépendance. Remonter les filiations théoriques de la notion du . participatif ., et leurs évolutions, nous a permis de mieux cerner les différentes dimensions qu'elle pouvait avoir aujourd'hui aux yeux des web journalistes notamment.

A partir de l'observation liminaire de leurs discours publics et des différentes écoles de pensée ayant cours au sujet du web 2.0., nous avons développé plusieurs hypotheses qui expliqueraient l'ambivalence des représentation de nos sujets a l'égard du . participatif >. Celles-ci s'articulent autour du partage des roles entre les journalistes et les internautes et de la distinction de statut opérée.

4.2.1. En quoi les journalistes percoivent leur role comme indispensable même au sein d'une organisation distribuée de production d'information

Sur le web beaucoup d'internautes ne contribuent que ponctuellement a l'élaboration de contenus, néanmoins doit-on s'en priver ? D'aucuns pensent que ces participations hiératiques, qui font masse, contribuent a brouiller l'offre en matière d'information par le foisonnement suscité. Selon le concept de la . longue traine ., ces internautes contribuent a la pluralité de contenus, qui prend la forme d'une organisation distribuée. Nous faisons ici l'hypothèse que, l'un des points expliquant l'ambivalence des représentations des journalistes a l'égard des contributions amateurs, est qu'ils les perçoivent paradoxalement, a la fois comme non pertinentes, et comme menaçantes pour leur profession. Ce tiraillement les entralnerait alors a réaffirmer l'importance de leur role dans le processus d'information en décrédibilisant ou en relativisant l'apport des UGC en termes d'information.

Cette production, comme l'a soulignée Clay Shirky (TED, Institution VS. Cooperation74), ne pourrait etre envisageable dans une structure de presse traditionnelle, qui doit par définition faire en sorte que chacun de ses journalistes soit le plus productif possible, parce qu'un organe professionnel hiérarchique a des coats de structure importants (coats d'encadrement permettant de diffuser l'information du haut vers le bas après validation).

0r dans un système coopératif, oil chacun peut contribuer a son rythme a la mise en commun des . connaissances ., les 80% des opérateurs les moins productifs peuvent également partager de la . valeur . qui, par définition, est trop . fine . pour etre atteinte par une institution dans le sens oil elle n'a pas les moyens de ratisser ces 80% de connaissances infimes individuellement. Si on regarde ces contributions, on constate qu'elles élargissent le champ spatial et temporel des points de vue et le système coopératif ne considère pas a priori ces dernières comme moins importantes que les premières dans la mesure oil elles ne sont pas considérées sous l'angle d'un coat.

74 http://www.ted.comitalksilangiengiclay_shirky_on_institutions_versus_collaboration.html

En effet, le partage des connaissances s'auto structure puisque les contributeurs ne sont pas intégrés a la structure mais y participent en tant qu'individus (renvoie a la notion des . foules intelligentes . d'Howard Rheingold). L'organisation stratégique de l'ensemble par le sommet est remplacée par une coordination spontanée de chaque acteur qui fait que le classement a laissé place au tagging, la hiérarchisation a priori au . ranking .75/vote a posteriori, la communication interne aux citations-hyperliens sur les réseaux sociaux...

 

76

Cette nouvelle structuration peut être assimilée au concept de . long tail . développé par Chris Andersen sur le site Wired77. Cette théorie veut que des :

. produits qui sont l'objet d'une faible demande, ou qui n'ont qu'un faible volume de vente, pourraient pris ensemble representer une part de marche egale ou superieure a celle des best-sellers si les canaux de distribution peuvent proposer assez de choix » comme a réussi a le faire « Amazon.com » (Mediamorphose, n°21, p.23).

Bien que cette théorie prenne place dans une logique marchande, on peut la transposer au « marché . de l'information.

En effet, si les coats d'organisation de la structure sont minimes, pourquoi délaisserait-on 80% des contributions même si elles n'apportent ne serait-ce qu'une seule information et ne concernent qu'un très faible nombre de lecteurs ? Dans leur ensemble elles font masse et permettent d'avoir un balisage de

75 En français : Classement.

76 CABANIS Alexandre, . Médias traditionnels et acteurs du web 2.0 : vers la cohabitation ou la convergence des acteurs de l'information et du divertissement ? ., Directeur de these Julien Levy, HEC,décembre 2006 p.23.

77 http://www.wired.com/

l'information beaucoup plus fin que ne pourrait le faire une équipe rédactionnelle professionnelle.

Ce a quoi certains professionnels pourraient rétorquer qu'elles . brouillent . l'information par trop d'information et qu'elles ne sont pas pertinentes du fait même qu'elles ne sont pas professionnelles, raison pour laquelle elles doivent être modérées, sélectionnées et hiérarchisées par une équipe de journalistes qui a pour mission d'être un intermédiaire facilitant et une garantie pour le lecteur.

Beaucoup de journalistes pensent ainsi que leur role est plus important que jamais et est même amené a se développer, dans la mesure oil il répond selon eux a un besoin de repères en terme de légitimité des sources et d'analyse parmi le foisonnement d'informations qu'offre la toile. Ainsi, suite a la question . 0il va la presse a votre avis ? ., le journaliste Jérome Bouvier rejette l'idée d'une autosuffisance de chacun en termes de consommation d'information. Pour lui, au contraire les agrégateurs de contenus appellent a un renouveau de la demande.78

Pierre Haski, l'un des fondateurs de Rue 89, site qui voulait a l'origine faire de l'information . a trois voix ., déclare :

3 Nous travaillons avec nos internautes sur leurs propositions de contenus, et, parfois, lorsque nous reperons un commentaire, nous incitons son auteur a developper. C'est ce que nous appelons le "participatif encadre". Dans ce cas, le journaliste est essentiel, il s'efface, mais cette contribution n'existerait pas sans lui. Cela nous amene a recueillir de tres beaux temoignages [...] *79.

Ces propos renvoient a la thèse de Clay Shirky, qui évoque que les membres de

l' . Institution . rappellent toujours que leur role est indispensable a l'organisation de l'ensemble qu'elle soit hiérarchique, décentralisée ou distribuée. 0r, il s'avère que de nouveaux outils ont accompagnés cette transformation de l'organisation du web, dont la possibilité pour les internautes de tagger eux même les contenus qu'ils mettent en ligne.

Ce phénomène génère une nouvelle taxinomie du web qui permet une meilleure
compréhension mutuelle dans la mesure oil, les codes de référencement ne sont

78 ,4 L'ame d'un journal, ce bien précieux ., Liberation, 20 janvier 2009, interview par Frédérique Roussel de Jérome Bouvier, initiateur de l'édition spéciale des assises internationales du journalisme (Maison des Métallos, 20/01/09), journaliste et ancien rédacteur des RFI.

79 "Nous sommes les numéros 1 des pure players", interview de Pierre Haski, Electron libre, 10.02.09, http://electronlibre.info/Nous-sommes-Numero-1-des-pure,257

plus élaborés par un seul (le webmaster80), mais adoptés collectivement. Selon Tim 0'Reilly, . Le tagging se prete a des associations multiples et redondantes, plus semblables a celles que notre cerveau réalise, qu'a des catégories rigides .. Contrairement a une hiérarchisation et une structuration constituées a priori par une rédaction par exemple, la progression de l'internaute sur une . plate-forme d'intelligence collective . va être propre en fonction de la navigation de tag en tag, qu'il va opérer par préférence. Ce qui fait que, l'offre s'adapte a l'internaute et non l'inverse selon une structuration de sens . auto-générée ., qui appelle de plus en plus au web sémantique81.

Cette structuration distribuée inquiète Bertrand Pecquerie au sujet du devenir des journalistes, menacés d'automatisation. Cela serait un véritable danger pour la démocratie selon lui82. La crainte latente est de se faire concurrencer par des multitudes d'internautes amateurs, se réduisant a des agrégateurs de contenus, sans qu'il y n'ait de contrôle final par le journaliste. 0r, ce processus de référencement et de navigation par lien procède d'une intelligence collective. La capacité de coordination de la communauté est évincée, celle-ci étant percue comme une entité floue puisque distribuée. C'est oublier que ce phénomène ne procède pas uniquement en un calcul d'algorithmes, mais également de facteurs inter-relationnels qui, a grande échelle, ont plus de chances de donner lieu a une hiérarchisation plus objective, que si cette dernière n'était que le fait d'une rédaction. Ainsi, la communauté est un espaces régit par des règles implicites, qui permettent a ses membres de valider ou non une information, même si ces codes ne sont pas reconnues par les journalistes.

80 Définition : administrateur de site (Cf. Petit Larousse 2009).

81 Cf. Définition du <4 web. 3.0 », lexique, annexe 7.2.

82 Extraits choisis de : <4 Et si les journalistes disparaissaient ? ., Télérama.fr, 14/01/09, Interview de Rick Edmonds (analyste au Poynter Institute, observatoire des médias américains) et Bertrand Pecquerie (Directeur du World editors forum, observatoire réunissant des rédacteurs en chefs du monde entier). Propos recueillis par Emmanuelle Anizon et 0livier Pascal-Moussellard.

4.2.2. La dynamique rela tionnelle e t la reputation, de nouveaux
criteres de legitimite mal compris par les journalis tes.

Dans le cadre d'une plate-forme de publications, des sortes de communautés se créent autour de thématiques ; les internautes suivent l'évolution des autres membres au fil de leurs publications (en l'inscrivant par exemple dans « mes contacts ») et jugent leur contribution sur le long terme. Les appréciations rentrent donc également dans le cadre d'interactions interpersonnelles (option « envoyer un message privé ») au long terme pour les membres les plus réguliers. Dès lors, nous avons observé que même si le nom ou le statut de la personne n'est pas précisé, la validité de la source est reconnue selon un large processus de cooptation entre abonnés.

Nous faisons donc l'hypothèse que la communauté des internautes s'auto-régule selon des critères implicites de légitimité, basée sur une reconnaissance des pairs, qui peut etre comparée a la confiance d'un journaliste a sa source. Etablis dans la durée et par un recoupement d'avis a grande échelle, ces nouveaux critères de fiabilité ne sont pourtant pas reconnus par les journalistes. Ces derniers ne reconnaissent par les UGC comme pouvant etre des sources fiables, car nonofficielles et difficilement identifiables.

Pourtant, le pseudonymat n'est pas en soit un problème dans une communauté d'abonnés oil le compte est nominatif et ne peut etre recréé en modifiant uniquement son adresse courriel. La fréquentation régulièrement du site par les utilisateurs entralne un processus d'identification des abonnés les plus actifs oil dont les posts sont les plus notés. De la découle un phénomène régulateur de réputation, qui fait que la charte éditoriale est largement respectée alors qu'elle n'est souvent pas lue par les internautes. La réputation est alors a double détente, a la fois carotte et baton dans la mesure oil s'effectue une sorte de contrôle (par exemple signaler un abus, ou réagir a un commentaire qui semble excessif) et d'émulation mutuelle (enrichir le débat). Cela prémunit peu ou prou contre la tentation du freerider83 et des trolls84 dans la mesure oil ces interactions prennent place dans une « communauté ».

83 Cf. Lexique, annexe 2.

Comme l'indique Dominique Cardon :

3

la reputation et la notoriete sur Internet se construisent sur la base de

l'audience et sont mesurees par l'ensemble des reseaux de contributeurs,

commentateurs, evaluateurs et diffuseurs, qui se greffent a tel ou tel site,

de sorte que la notoriete n'est jamais donn~e (par un statut) mais acquise

par un travail de conviction et d'interessement. Enfin, l'Internet ne connatt

pas les silencieux. Pour y etre present et reconnu, bref legitime, il faut agir,

contribuer, ecrire, recommander, repondre. L'espace public de l'Internet

offre toujours une prime aux agissants sur les internautes passifs. »85

Sur Internet la légitimité s'acquière par une contribution a l'activité du réseau et la reconnaissance par ses pairs (peers). Ce système de cooptation a grande échelle témoigne de l'importance du facteur inter-relationnel sur Internet que l'on soit une institution ou un particulier.

Barry Wellmann rappelle que même si les réseaux sociaux ont toujours existé, les nouvelles technologies leur donnent une nouvelle ampleur notamment du fait qu'elles émergent comme . forme sociale d'organisation dominante ., davantage médiatisées désormais (une personne peu plus facilement participer a plusieurs communautés, elle n'est pas restreinte a sa sphere géographique ou son entourage). Il définit la communauté comme . un réseau de liens interpersonnels amenant de la sociabilité, de l'aide, de l'information, une idée d'appartenance et une identité sociale ». Dans le cadre du web la dimension interpersonnelle, ou l'« individualisme réticulaire86 . comme la nomme Barry Wellmann, est donc prépondérante.

Autrement dit, la logique de la communauté repose sur le principe de la mise en relation des contenus, mais aussi des individus, rejoignant ainsi les principes fondamentaux du web, a savoir le lien (web 0.1), puis le flux (web 2.0). Et cette mise en relation au sein de la communauté virtuelle repose sur le principe de réputation, c'est-à-dire la confiance collective que l'internaute aura su susciter au long terme par la qualité de ses contributions. Selon Howard Rheingold, la

84 Cf. Lexique, annexe 2.

85 Dominique Cardon, . La Blogosphere est elle un espace public comme les autres ? ., in Transversales, 26.04.06, http://grit-transversales.org/article.php3?id_article=100

86 ,,,, , A "" n

VYCLUVIRIIII Barry, "The Rise of Networked Individualism", in Community Networks Online, 2001

edited by Leigh Keeble. London: Taylor Et Francis.

réputation agit comme un régulateur permettant de trouver collectivement un équilibre entre bien public et intérêt personnel8P.

La plate-forme de partage de liens « Digg . (référence en matière de communauté de liens) fonctionne selon un système de notation oil tout un chacun peut participer pour mettre en lumière des liens qui lui semblent particulièrement pertinents et qu'il voudrait accessibles a une plus large audience. Le site dit s'être constitué "to provide a place where people can collectively determine the value of content and we're changing the way people consume information online.88" Ici l'intérêt individuel (référencement par copinage...) est pondéré par la quantité d'avis et la reconnaissance vient du fait que la communauté a entériné le choix en votant pour le lien soumis jusqu'à lui donner une visibilité accrue (top 10 en home page). Etre actif permet d'avoir une certaine réputation, d'être plus écouté, voire de devenir modérateur.

Selon Tristan Mendès France, appliquée au domaine de l'information en ligne, la réputation semble être un bon complément au crédit que l'on attribue aux professionnels ou aux organes de presse établis. L'objectif, pour le web journaliste comme pour le blogger (et dans une moindre mesure le contributeur au sein d'un forum), est alors de gagner la confiance des autres internautes en « leur montrant qu'on ne fait pas trop d'erreurs, ou en tout cas qu'on arrive a les gérer [...] et que l'on sait modérer un réseau social .89. Au dela du crédit accordé a priori aux détenteurs de la carte de presse ou garant de la réputation de leur journal en vertu de l'éthique journalistique, la capacité a gérer une communauté constitue une qualité importante aux yeux de ce journaliste et blogger.

La culture du « sourcing »90 est sur le web un gage de crédibilité valorisant ainsi la
recherche d'information. En évitant d'attribuer des contenus ou de ne pas renvoyer
vers la source originelle, la réputation est alors renforcée. Par ailleurs, ces

87 RHEING0LD Howard, Foules intelligentes, La Révolution commence, Paris, M2 éditions, 2005, p.71.

88 http://digg.com/about/, Traduction personnelle : «pour offrir un endroit ou les gens peuvent collectivement déterminer la valeur de contenus et nous changeons leur manière de consommer l'information en ligne. .

89 Entretien Skype avec Tristan Mendès France, samedi 11 avril 2009.

90 Pratique qui consiste a mettre en avant ses sources en les citant selon des codes bien établis.

pratiques de reprise permettent de ne pas casser le . cercle vertueux >> des contributions de la communaute, mais de les faire connaltre au plus grand nombre. 0r, les medias traditionnels ayant migre une partie de leur offre sur Internet ne semblent pas a l'aise avec les pratiques de citations qui y ont cours. Ainsi, après a peine trois mois d'existence, Mediapart deplorait dejà quatre manquements de l'Agence France Presse suite a des reprises non . sourcees >> d'informations sorties a l'origine par Mediapart91. D'autres cas de reprises intempestives de videos amateurs ou d'informations emises depuis des blogs ont ete recenses.

Cependant, Eric Dupin pondère sur son blog Presse-citron l'idee selon laquelle la citation des sources est la principale difference entre les blogs et les journaux :

3 de faFon un peu caricaturale : les journalistes ne citent jamais leurs

sources, et les blogs citent toujours leurs sources. La &érité n'est peut-titre pas aussi simple que cela. >>92

En effet, il existe une tradition de la citation differente en matière de source sur le web et dans les medias, notamment due a une culture de la communaute permise par l'hyperlien.

0n peut supposer que cela est del au fait que, n'ayant pas de legitimite a priori, du fait qu'ils ne possèdent pas de carte de presse, la reconnaissance se construit de manière empirique en prouvant que l'on s'appuie et que l'on recoupe des sources fiables. Ces pratiques ne semblent cependant pas constituer un critère pertinent pour legitimer une information aux yeux de certains journalistes, qui les considèrent davantage comme un processus de referencement mutuel base sur le copinage. Nous avancons que cet argument est directement lie a celui du professionnalisme et donc de la remuneration comme gage de credibilite aux yeux des journalistes.

91 La Redaction de Mediapart, . Mediapart, le mur du silence et le marche aux voleurs >>, in Médiapart, 25.06.08.

92 http://www.presse-citron.net/un-blog-doit-toujours-citer-ses-sources-ou-pas

4.2.3. Critere de la legitimite e t de professionnalisme par la valeur (qualitative et pecuniaire) : le cas des blogs

Un autre point, qui a attiré notre attention et sur lequel nous avons basé nos entretiens, est l'opposition répétée qu'opère les journalistes entre médias professionnels et non professionnels comme critère de fiabilité de l'information. L'une des critiques souvent adressée par les journalistes aux internautes concernant la qualité et la fiabilité de leurs contributions est qu'elles sont issues d'un travail amateur. Leur statut remet par la-même en cause leur légitimité a vouloir contribuer a la production de l'information, comme le font notamment les bloggers. Même si notre étude ne porte pas directement sur la blogosphère, le Club de Médiapart est constitué de blogs. Par ailleurs, ces derniers incarnent de manière exacerbée ce point de friction entre journalistes professionnels et internautes.

Viviane Serfaty, qui a étudié le role des blogs politiques lors de la campagne présidentielles de 2004 aux Etats-Unis, note que :

3 le contenu politique des blogs etudies, de meme que leur frequence de publication, semblent indiquer que c'est par rapport aux medias, et notamment a la presse ~crite, que se definissent les redacteurs de blogs. Pourtant, aucun des auteurs evoques dans cette etude ne cherche a supplanter les medias traditionnels ; tous reconnaissent le caractere limite de leur activite de collecte et de verification de l'information *93.

0r, l'audience des blogs politiques étudiés par Serfaty, si elle demeure modeste comparée a celle des médias traditionnels, oscille tout de même entre 30 000 et 170 000 visites quotidiennes pour les plus populaires d'entre eux.

Elle explique ce phénomène par le fait que les bloggers se sont donné pour objet la surveillance attentive des médias traditionnels et constitués en tant que contreexpertise. Cette veille remet en cause l'autorité << naturelle > des médias de masse et une concurrence s'instaure entre les journalistes et les bloggers au profit de ces derniers94. Constat qu'elle appuie sur l'exemple désormais célèbre du journaliste de CBS, Dan Rather, concernant l'intervention de Georges Bush père pour couvrir la désobéissance de son fils lors de son service militaire. L'authenticité des

93 SERFATY Viviane, . Les Blogs et leurs usages politiques lors de la campagne présidentielle aux Etats-Unis en 2004 ., in Mots. Les langages du politique, n°80, mars 2006, p. 31.

94 !bib, p. 32.

documents avancés avait été mise en question sur un forum, ce qui avait amené le journaliste a avouer son impossibilité de vérifier leur véracité, puis a démissionner deux semaines plus tard.

0n pouvait par ailleurs lire dans l'enquête du journaliste du Monde, Xavier Tiernisen :

3 Pourtant, la plupart des blogueurs ne se considèrent pas comme

journalistes. Leur pratique inclut même souvent une critique implicite de la

presse. "L'espace public numérique joue un role de complément, il est donc

assez logique qu'il soit en réaction et en correction, explique Nicolas

Vanbremeersh, alias Versac, qui a tenu un blog politique de 2003 a 2008. >>95 Ainsi, si les bloggers ne s'affirment pas dans ce cas en tant que concurrents directs des journalistes dans la mesure oil ils reconnaissent eux même ne pas en être, ils se constituent en contradicteurs et en entité . de complément >. A ce titre, la réaction de Narvic (suite a un article publié dans Le Monde au sujet des bloggers96) est éclairante. Ce blogger estime que les rectifications apportées par la blogosphère constituent une . bonne lecon . pour Yves Eudes. Selon Narvic, contrairement a ce que continuent de penser les journalistes, ils n'ont plus le monopole de l'accès a la parole publique et leurs erreurs ne restent plus sans réaction97.

Basant une majeure partie de leur travail sur les mêmes sources officielles (agences de presse...) que les journalistes, les bloggers viennent cependant apporter un autre éclairage a l'actualité. En effet, alors que les médias traditionnels cherchent le consensus (tribunes accordées a des << personnalités contenues ., sélection et formatages des courriers des lecteurs...), Viviane Serfaty estime que la radicalité des prises de position des bloggers revivifient la notion de débat publique. Ils suscitent l'intérêt aussi bien pour la forme (approche hétérogène et ludique, oralité de l'écrit...), que pour le fonds de leurs propos, moins lisses et qui intègrent la participation des internautes. Serfaty conclut en disant :

3

il semblerait plutAt qu'ils fonctionnent comme un niveau de médiation supplémentaire, qui élabore un schéma d'interprétation de l'actualité

95 TIERNISEN Xavier, . Les blogs : info ou influence ? ., in Le Monde, 06.03.09.

96 EUDES Yves, . Profession blogueur ., in Le Monde, 11.11.08.

97 Narvic, . La Lecon des bloggers au grand journaliste du Monde ., Növovision, 13.11.08, http://novovision.fr/?La-lecon-des-blogueurs-au-grand

partisan et polémique et participe de faFon ponctuelle a la mise en agenda de certains themes. .98

Ainsi, les journalistes ne sont pas directement concurrencés par les internautes émetteurs de contenus, mais leur role de « watchdog » entre ici en friction avec l'activité de ces derniers. Les internautes contributeurs constituent un intermédiaire supplémentaire a l'information et au débat publique, voire parfois un niveau de vérification supplémentaire.

Cependant, nous avons constaté un phénomène, encore marginal, de va-et-vient entre les médias et les internautes dans la mesure oil les premiers viennent a leur tour puiser des informations sur des sites de partage de contenus. Les images amateurs des attentats de Londres ou du Tsunami sont par exemple souvent citées pour l'impact qu'elles auraient eu sur la conception même du métier de journaliste Ces cas restent rares, peut être en raison du fait que les UGC (outre leur mauvaise qualité d'image dans le cas de la vidéo) ne sont pas considérés comme des sources légitimes par les journalistes, qui ne semblent les invoquer que faute de mieux, c'est-à-dire d'une source journalistique.

Comme le note le journaliste Xavier Tiernisen du journal Le Monde99, les bloggers sont souvent appelés des « journalistes en pyjama », ce qui souligne le fait qu'ils n'ont pas la culture de l'enquête de terrain et les confine a un role de commentateur ou de « leader d'opinion ., plutot que d'informateur. L'article se poursuit en mettant en avant la nouvelle donne en matière de relations publiques et de communication que les blogs ont suscité, notamment en raison de leur caractère d'électrons libres. Ils ne possèdent pas la carte de presse et n'obéissent pas a la même déontologie que les journalistes professionnels.

Le fait que ces « pro-ams . soient non rémunérés pose ainsi problème, dans la mesure oil les anciens critères, qui permettaient de distinguer les « vrais » journalistes des amateurs, semblent s'atténuer. Eric Marquis, vice-président de la Commission de la carte d'identité des journalistes avance :

- A force de dire que tout le monde peut être journaliste, on dévalorise ce
métier et on occulte le fait que la bonne information a un coOt. Apres tout,
on ne parle pas de "chirurgien citoyen". Le terme de "citoyen" ne sert qu@~

98 Ibid, p. 33 et 34.

99 TIERNISEN Xavier, « Les blogs : info ou influence ? ., in Le Monde, 06.03.09.

habi((er une deva(orisation de ('information et une precarisation de (a profession. Nous sommes déjà descendus tres bas dans (es criteres d'attribution de (a carte de presse, jusqu'd (a moitie d'un smic pour (es revenus tires du journa(isme.1 .

0n constate donc ici que la remuneration est percue comme un critere discriminant essentiel, dans la mesure oil sont lies la qualite du travail, la notion de metier et la remuneration. A contrario, le fait que l'information soit gratuite, sur les blogs par exemple, discredite le travail dont elle est issue, puisque ce dernier n'est pas reconnu par une valeur pecuniaire. La legitimite d'une information est donc ici intimement liee au fait que l'on appartienne a un corps de metier avec ses r~gles, donnant acces a une remuneration.

Par ailleurs, la concurrence entre information payante fournie par des journalistes et gratuite fournie par des « journalistes citoyens » est clairement etablie par Eric Marquis. En effet, ces derniers « precarisent . les journalistes professionnels en « devalorisant . leur travail. Les bloggers voient alors leur production attaquee a la fois parcequ'ils ne demandent pas de remuneration (representant en quelque sorte des « jaunes >) et au sens oil leur travail de moins bonne qualite. Leurs publications, en etant assimilees par le public a la production journalistique, viendrait degrader l'image de celle-ci. Greffe et Sonnac expliquent :

« que ce soit pour exp(iquer (es crises du Monde ou de Liberation, (es mecomptes de (a Fnac ou de Virgin, un mode(e s'accredite, re(aye evidemment par (e medias c(assiques : (a mauvaise monnaie chasse (a bonne, dans une (oi de Gresham101 cu(ture((e. Des monceaux de contenus sans qua(ite, mais gratuits, font concurrence aux contenus professionne(s, payants certes, mais de qua(ite. .102

0r, nous pouvons nous demander dans quelle mesure cette confusion existe dans la mesure oil, les bloggers eux-mêmes ne se considèrent pas comme etant des journalistes. Bien au contraire, ces derniers ont tendance paradoxalement a s'en defendre, comme si etre assimiles aux journalistes signifiait avoir perdu de son independance. Un billet de Narvic sur son blog « Növovision . disant que, Laurent

100 Ibid.

101 Reference a la theorie du financier britannique Thomas Gresham, qui etabli au 16eme siècle que, lorsque deux monnaies en circulation, les agents economiques thesaurisent la « bonne . monnaie, et privilegient l'utilisation courante de la « mauvaise ..

102 GREFFE Xavier et S0NNAC Nathalie (sous la direction de), Cu(ture Web. Creation, contenus, économie numérique, Paris, Dalloz, 2008, p. 56.

Gloaguen (« Embruns »103) et Guy Birenbaum (« Sarfoff »104) font « un excellent journalisme », a cree une polemique. Les bloggers concernes ont virulament reagit en se defendant de faire du « gonzo journalisme » 105. Si on suit son argumentaire, Guy Birenbaum semble s'appuyer sur le fait qu'il dise ce qu'il pense106 pour prouver qu'il n'est pas journaliste. Il balaye egalement la question du type de traitement, qui correspond a une nomenclature rigide, alors que ce dernier revendique une liberte de ton. Versac quanta lui « defend » Laurent Gloaguen en avancant qu' « il ne blogue pas pour gagner sa vie ».

0n constate ici, que l'argument disant que le journalisme n'est concevable que comme un metier avance par les journalistes, l'est egalement par les bloggers. Cette conception emane peut etre de loi de 1935 cette derniere confere le statut de journaliste professionnel aux personnes employees par une entreprise de presse comme journaliste professionnel. Autrement dit, ne sont journalistes professionnels que ceux qui peuvent tirer de cette activite au moins 50% de leurs revenus, independants ou non.

A l'instar de Denis Ruellan, on peut toutefois se demander si le journalisme ne peut etre envisage que depuis le prisme du professionnalisme. Ruellan avance que des :

« que l'on prefere s'attacher aux qualites reellement dynamiques propres au groupe (que sont l'imprecision de ses frontieres et la creativite des modes de production), le journalisme apparatt dans toute sa riche specificite : un metier dont l'original inter.t est sa capacite a produire rapidement un discours attractif, ephemere et imprecis par necessite sur ce qui a ete, avec les moyens qu'il juge utiles et des procedures que lui seul apprecie. »107

Si l'on reprend la definition du terme « metier » que donne Ruellan, l'activite journalistique englobe davantage de pratiques que la production purement professionnelle.

0n observe donc une tension entre une definition formelle et une definition
davantage basee sur l'observation des pratiques sociales suscitant un discours

103 http://embruns.net/logbook/2008/07/04.html#c65479

104 http://www.lepost.fr/article/2008/07/01/1216898_sarkoff.html

105 Traitement journalistique ultra-subjectif d'un sujet, invente par Bill Cardoso et popularise par Hunter S. Thompson dans les annees 1970 aux Etats-Unis.

106 Na
·

rvic, «Les blogueurs sont dejà des journalistes », Növovision, 08.07.08, http://novovision.fr/?Les-blogueurs-sont-deja-des

107 RUELLAN Denis, Le journalisme, ou le professionnalisme du flou, Grenoble, PUG, 2007, 230p.

ambivalent aussi bien du coté des journalistes que des internautes émetteurs de contenus. Denis Ruellan note ainsi:

3 nouveaux venus aux marges du journalisme, les blogueurs dont une fraction (...) commence a frapper a la porte du groupe pour faire reconnaitre cette activite qu'ils presentent encore (fin 2006) dans un discours de double pretention a la professionnalisation et a l'autonomie, dialectique caracteristique des impetrants. .108

Par ailleurs, si les bloggers incarnent spécifiquement cette problématique et cristallisent le débat du fait qu'ils constituent des individualités plus aisément désignables ; a une plus large échelle, l'ensemble des UGC pose la question de savoir si la production de l'information ne peut être concue comme légitime qu'en tant que profession. Selon la tradition du Net, l'autonomie a au moins autant de valeur, sinon plus, que le professionnalisme de ce point de vue.

A fortiori, nous pouvons nous demander si la production amateur constitue un réel danger pour la profession des journalistes, qui est ici représentée comme un ordre, au même titre que celui des médecins. Il paralt contradictoire d'avancer qu'il existe une concurrence directe entre ces deux offres dans la mesure oil la définition même de cette notion marketing signifie : un même produit pour une même cible a un même prix. En poussant ce raisonnement jusqu'au bout, au risque d'être quelque peu caricatural, on peut se demander : pourquoi avoir peur de l'offre amateur si celle-ci n'a pas les qualités pour constituer une concurrence ?

Par ailleurs, ce raisonnement suppose que les pratiques de lecture ne sont pas complémentaires et ne se cumulent pas. Cela revient a considérer l'arrivée du participatif en quelque sorte comme une . innovation destructrice ., qui viendrait mettre en cause l'ancien modèle d'information. 0r, le lien entre les nouvelles pratiques numériques d'information et la crise économique des journaux papiers n'est pas prouvé. Pierre Haski déclare d'ailleurs :

3 La plus part des gens ont lu le même quotidien toute leur vie et rares sont les gens, sauf pour des raisons professionnelles, qui en lisent trois, quatre. Sur Internet, c'est exactement l'inverse. C'est-a-dire que le mot navigation veut dire ce qu'il veut dire, on passe d'un site a l'autre. .109

108 Ibid.

109 http://www.observatoiredesmedias.com/2009/04/28/les-sites-dinfos-pureplayers-en-francedebat-sur-les-modeles-economiques/

Les chantres du web 2.0, tel que Joël de Rosnay, s'appuient en outre sur les même chiffres de précarisation de la profession pour prouver le désamour du lectorat pour leur offre au profit de celle participative. Pierre Haski semble sous-entendre que c'est la concurrence de cette dernière qui est a l'origine de la situation. Si la cause est sensiblement différente, cela revient paradoxalement dans les deux cas a reconnaitre aux UGC une capacité a concurrencer les médias traditionnels et ainsi a les légitimer. Cette concurrence non assumée, mais latente, entre les journalistes et les contributeurs, pose la question de la nouvelle répartition des roles qui est en train de se jouer.

4.2.4. De la difficulté pour les journalistes de partager les roles

Les internautes contributeurs sont percus par certains journalistes comme étant un contre pouvoir stimulant, mais non suffisant. Notre hypothèse est donc que les professionnels de l'information, tel que Ricks Edmonds11°, justifient le fait que leur role d'intermédiaire est toujours indispensable sur la Toile en avancant que le regard extérieur qu'apportent les internautes se nourrit avant tout de leur production.

Mais d''autres, a l'instar de Clay Shirky pensent au contraire que réside la une crainte « corporatiste », qui figurerait les journalistes comme des « watchdogs » garants irremplacables de la démocratie. Il déclare a ce sujet :

"There are people in stage right now [...] trying to figure out wether or not bloggers are journalists and the answer of that question is : it does not matter, because that is not the right question ! Journalism was an answer to an even more important question, which is : how the society will be informed? How will they share ideas and opinions? And if there is an answer to that, that happens outside the professional framework of journalism, it makes no sens to take a professional metaphore and apply it to this distributive class. "111

Ainsi, la question serait moins de savoir si ces contributions émanent de journalistes professionnels ou d'amateurs, mais de savoir si celles de ces derniers constituent un moyen de s'informer (la tendance a s'informer sur Internet et donc des pages personnelles, des forums et des blogs, tend a prouver qu'elle répondent a un besoin112) et répondent ainsi a la question a l'origine du projet journalistique.

110 - Faute d'un regard extérieur sur notre travail, nous étions devenus un peu paresseux. Ce contre-pouvoir est donc un plus... mais il ne résout pas notre problématique : comment améliorer nos pratiques, utiliser au mieux les nouvelles facons d'informer et enrichir les conversations du Net ? Les blogs, les forums ont besoin de se nourrir de nos infos de terrain. Ce travail est irremplacable.. Cf. . Et si les journalistes disparaissaient ? ., Télérama.fr, 14/01/09, Interview de Rick Edmonds (analyste au Poynter Institute, observatoire des médias américains) et Bertrand Pecquerie (Directeur du World editors forum, observatoire réunissant des rédacteurs en chefs du monde entier). Propos recueillis par Emmanuelle Anizon et 0livier Pascal-Moussellard.

111 Ibid. . Il y a des personnes en activité actuellement qui tentent de déterminer si les bloggers sont ou non des journalistes et la réponse a cette question est : ca n'a pas d'importance, parce que la n'est pas la question ! Le journalisme était une réponse a une question plus importance encore, a savoir : comment la société peut-elle s'informer ? Comment vont-on partager ses idées et ses opinions ? Et si une réponse a cette question existe en dehors du spectre du journalisme professionnel, cela n'a aucun sens d'appliquer cette métaphore professionnelle a ce système distribué. .

112 En terme de temps passer en ligne, 71% des internautes français pensent délaisser les autres
médias aux bénéfices du Web. 51% estiment moins regarder la télévision, 39% moins lire la presse
papier et 30% moins écouter la radio selon l'étude Médiascope Europe publiée en décembre 2007

Si la structure de coopération en place sur Internet est un nouveau moyen de répondre a cette problématique, même en dehors d'un cadre institutionnel classique, est-il alors judicieux de s'en priver ?

Le fait que ces moyens d'expression soient a la disposition de tout le monde, car ils sont intégrés a la structure même de la production d'informations, implique que des personnes dont on n'approuve pas forcément l'amateurisme des méthodes par exemple, les utilisent sans que l'on puisse réellement avoir d'emprise sur elles.

Cela peut être comparé selon Howard Rheingold a la révolution de l'imprimé au 15eme siècle. La production physique de textes n'étant alors plus aux mains de l'Eglise, mais étant une technique accessible a un nombre croissant de personnes, le contrôle dogmatique de l'institution sur les contenus diffusés ne pouvait plus s'opérer comme auparavant. Mais cela a mené a un accroissement des connaissances et par la-même a des innovations ou bouleversements dans tous les domaines de la connaissance (politique, philosophie...), notamment par un phénomène d'intertextualité, qui peut être assimilé a une coopération selon les principes de . smart mobs . et de l'intelligence collective développés par Pierre Levy113. Ce concept revient a dire la chose suivante :

3 aucun d'entre nous ne sait tout, [que] chacun d'entre nous sait quelque chose et si nous mettons nos ressources en commun et réunissons nos compétences, nous pourront rassembler tous ces éléments. L'intelligence

collective peut 'etre considérée comme une source alternative au pouvoir des médias 114..

Selon Jenkins, ce nouveau mode de fonctionnement (. convergence >) ne constitue pas une révolution dans la mesure oil il est progressif et que les incertitudes le concernant ne s'effaceront qu'au fur et a mesure que les différentes options envisagées seront écartées suite a des luttes de pouvoir entre le public et les institutions. Ces compromis redéfiniront alors ce qu'il nomme la . culture publique du futur >.

pour le compte de l'European Interactive Advertising Association). A savoir que 57% des Européens ont acces a Internet soit 169 millions de personnes. GREFFE Xavier et S0NNAC Nathalie, Culture Web, Paris, Dalloz, 2008, p. 2.

113 LEVY Pierre, L'Intelligence collective, Paris, La Découverte, 1994,

http://www.archipress.org/levy/aql.htm (extraits) Et . L'Intelligence collective, notre plus grand richesse », Interview de Pierre Levy réalisée par Michel Alberganti, in Le Monde, 24.06.07.

114 JENKINS Henry, . La Culture de la convergence ., in Médiamorphoses, n°21, p.31-36.

Jenkins conclut en disant :

3ceux qui font les médias ne pourront résoudre leur crise actuelle qu'en renégociant leur relation avec leurs utilisateurs. Le public a qui on a donné le pouvoir grace a ces nouvelles technologies et qui occupe désormais un espace a l'intersection des anciens et des nouveaux médias exige de participer a cette culture *115.

Nous voyons donc la l'enjeu qui se pose aujourd'hui aux nouveaux sites d'information se trouvant a mi chemin des médias traditionnels et de ceux liés aux NTIC : renégocier le pouvoir et la manière d'informer et d'être informer.

Nous l'avons dit, les journalistes réticents avancent systématiquement la différence de statut qui les sépare des internautes émetteurs de contenus. Cela montre bien que s'ils sont prêts a considérer cette prise de parole comme 3 stimulante ., ils sont beaucoup moins enclins a l'envisager comme une . plus value . en soi en terme d'information. L'interaction avec les internautes serait donc avant tout concue comme un moyen de reconsidérer l'approche de l'information. Le . participatif . serait ainsi plus relié a la réflexion du journalisme qu'à la question de l'information du public, ce qui révèle leur difficulté a . passer le crayon » au public, pour reprendre une expression de Jenkins.

Nous avons articulé nos grilles d'entretien autour des hypothèses formuler dans cette première partie, dans le but de vérifier si les représentations des web journalistes des sites indépendants d'information de notre corpus a l'égard des UGC sont biens ambivalentes. Les points soulevés ici constituent les critères sur lesquelles nous avons basé nos résultats.

115 Ibid.

Dans cette premiere partie nous avons posé les bases de notre enquête. Ce travail liminaire de recherche a tout d'abord consisté a définir les termes clé de notre intitulé, afin de délimiter avec plus de précision le champ théorique de notre étude. Les notions de média, d'Internet comme média et de sites indépendants d'information sont souvent employés comme allant de soi. 0r, les cerner a constitué une premiere étape fondatrice dans l'affinage du choix de notre angle d'approche et la constitution de nos axes de réflexion. Ces termes ayant plusieurs acceptions et dimensions, cela nous a permis de mieux en saisir les diverses interprétations pour situer notre démarche. Caractériser les spécificités médiumniques d'Internet revient également a prendre en compte la part d'imaginaire collectif, notamment quant a son aspect horizontal révolutionnaire, qui constitue en partie les représentations sociales du . participatif ..

Ces dernières sont également issues du contexte socio-historique de la mouvance libertaire et la tradition de collaboration du web. Ce travail de recherche nous a permis de mieux saisir les tenants et les aboutissants de l'objet de notre enquête et de définir les criteres de vérification de nos hypotheses, afin d'aboutir a des résultats quant a la problématique posée. Cette étape constitue la deuxième partie de notre étude.

DEUXIEME PARTIE :

ENQUETE SUR LES REPRESENTATIONS DU

« PARTICIPATIF » AUPRES DE WEB JOURNALISTES

D'@RRET SUR IMAGES ET MEDIAPART

5. Enquête

5.1. Méthodologie et déroulemen t de l'enquê te

Bien que ces sites s'inscrivent peu ou proue dans la lignée de l'indépendance du web, ils ne découlent pas directement de sa tradition activiste ni par nature (militant, participatif, libre d'accès et interconnecté), ni par intention (ces acteurs se sont repliés sur le web après conflit avec les organes de presse qui les employaient, possibilité d'une adoption de ce média . par défaut >). Dégager ce contexte permet cependant de mieux cerner l'origine du principe de la participation sur Internet, appliqué notamment a l'information (webzines). L'analyse des motivations et les discours suscités par le participatif constituent la seconde étape de notre démarche.

L'enquête que nous avons menée repose sur l'étude des discours des différentes écoles de pensée (nombreuses en ce qui concerne le « web 2.0 »), afin de les mettre en perspective de manière critique et pondérée. Nous sommes ainsi aussi bien référés a des blogs thématiques amateurs et des sites militants, qu'à des ouvrages de sociologie des médias ou de science de la communication.

La méthode des entretiens qualitatifs et individuels, ainsi que l'analyse de discours, se sont naturellement imposés a nous. Nous avons en effet considéré leurs paroles publiques comme insuffisamment axées sur l'objet de notre étude. Nous avons basé notre travail sur des ouvrages d'initiation méthodologique116, ainsi que sur les travaux de Denise Jodelet117 portant sur les représentations sociales. Cette notion appartient au champs de la psychologie sociale et désigne le « processus de construction de la réalité *118 auquel tout un chacun a recours pour donner du sens a son environnement en fonction de ses propres valeurs, idées et connaissances.

116 BLANCHET Alain Et G0TMAN Anne, L'Entretien. L'Enquête et ses méthodes, coll. 128, Paris, Armand Colin, 2007, 125 p.

117 J0DELET Denise (sous la direction de), Les Representations sociales, Paris, PUF, 1999, 447 p., http://66.102.1.104/scholar?hl=frEtlr=Etq=cache:bS1BmmtbyskJ:classiques.uqac.ca/contemporains/j odelet_denise/folies_representations_soc/folies_representations_soc.doc+author:%22Jodelet%22+in title:%22Les+repr%C3%A9sentations+sociales%22+

118 RATEAU Patrick, . Les Représentations sociales ., extrait de : Psychologie sociale, Paris, Bréal, 2007, p. 162,

http://books.google.fr/books?id=4mAg3nKFcAYCEtpg= PA173Etlpg= PA173Etdq=denise+jodelet+%2B+re pr%C3%A9sentations+sociales+%2B+r%C3%A9sum%C3%A9Etsource=blEtots=Yh6iUltoWbEtsig=5H14BuXZu CmZcW3vsLELeZluu54Ethl=frEtei= P-lASs-iJtGNjAek6p2iCCIEtsa=XEtoi=book_resultEtct=resultEtresnum=7

Nous nous sommes ainsi appuyé sur un travail de contextualisation socio-historique (appréhension de l'environnement libertaire et numérique) pour mieux comprendre ce sur quoi se fondaient les représentions que pouvaient entretenir les sujets interrogés a l'égard du . participatif >.

Nous avons donc principalement mené nos deux entretiens (avec Daniel Schneidemann, puis avec Vincent Truffy) en axant nos questions de manière a pouvoir recueillir leurs discours, nous permettant de répondre a notre question d'origine. Nous avons posé des questions ouvertes et non directives, afin de pousser les sujets a définir eux même leur démarche et la manière dont ils percevaient leurs rapports aux internautes.

Cet exercice a permis de révéler des points saillants autour desquels se joue le participatif aux yeux des web journalistes interrogés. Nous avons ainsi dégagé des 3 noeuds . critiques significatifs autour des notions suivantes :

- le professionnalisme,

- la légitimité,

- la qualité,

- le prix,

- la rémunération,

- la modération,

- la profusion,

- et l'indépendance.

De même le recoupement des problématiques récurrentes au sein des publications abordant le sujet du participatif nous a guidé dans ce repérage. Ces noeuds sont tous liés entre eux et fonctionnent souvent par tandem dans la construction des théories des analystes et des professionnels du web. Ainsi, le prix est souvent relié a la recherche d'indépendance, la profusion a la modération, la qualité au professionnalisme... Cette connexion entre les différents sujets constitue une chalne logique constituant des argumentaires souvent très persuasifs bien que frontalement antagonistes. ll est alors difficile de se positionner . au dessus . du débat afin de dégager des lignes de force pouvant constituer les critères d'une grille d'entretien et par la suite d'analyse et d'interprétation.

Notre démarche dans ce cadre a consisté a donner une empreinte personnelle a l'interprétation des résultats et de force de propositions. Nous référer aux critères d'analyse que nous avons prédéfinis, permet cependant de demeurer centrer sur des éléments de réponse.

Nous avons également fondé notre enquête sur l'observation participante119 aux sites d'Arrêt sur images et de Médiapart, afin de pouvoir remettre en contexte les propos de nos sujets et les vérifier empiriquement nos hypotheses.

Nous avons sélectionné principalement deux sites indépendants d'information afin d'assoire notre étude (non exhaustive). Notre sélection de sites ne constitue pas une photographie exacte de l'offre existante en matière de sites pure players d'information. Notre choix repose en partie sur des raisons arbitraires (affinités et pratiques personnelles d'information sur le web), mais il s'est plus largement porté sur des sites qui répondaient a la définition de . sites indépendants d'information . telle que nous l'avons établie (cf. partie 1.2.3).

A ce titre, certains sites comme : . Causeur . (site d'opinion), . Bakchich . (faible
aspect participatif) ou . Slate . (faisant parti du groupe du Washington Post),

Agoravox .120 n'entrent pas dans le cadre que nous avons prédéfini pour notre enquête. Cependant, leur modèle de fonctionnement constitue une base de réflexion, voire d'inspiration, importante pour la seconde partie de notre travail en termes de propositions concretes.

Les sites de notre corpus proposent une offre d'information généraliste (Médiapart) ou thématique (@si). En effet, arretsurimages.net se concentre principalement sur l'analyse critique du traitement de l'information par les différents médias francais. Cependant, depuis la migration d'@si sur Internet, le choix des themes abordés,

119 44 On appelle observation participante en usine le fait, pour un sociologue, de participer, en tant que salarié, a la production dans l'entreprise pour en tirer l'information et la documentation la plus proche des faits et du travail concret. Cette participation se déroule généralement sur une longue période [...] de maniere a s'intégrer dans le collectif de travail, a se familiariser avec la forme spécifique de l'activité et a contrôler sur un grand nombre de cas les analyses dégagées ., cf. PENEFF Jean, . Les débuts de l'observation participante ou les premiers sociologues en usine ., in Sociologie du travail, vol. 38, n°1, p. 1-25.

120 Fondation basée a Bruxelles a vocation européenne dont les contenus sont rédigés et en partie modérés par des usagers du site.

aussi bien dans ses articles que ses émissions. Sa ligne éditoriale a évolué, rendant @si plus difficile a cerner.

Cependant, plusieurs points sont communs a ces deux sites, de manière essentielle pour notre étude, a savoir le fait : que leur rédaction soit constituée de web journalistes professionnels, que la majorité du contenu éditoriale soit réalisé par cette équipe, que leur positionnement et leur site (dans le discours et dans la pratique) inclus une part importante de . participatif ., qu'ils ne soient pas adossés a un grand groupe de presse ou d'investissement et qu'ils aient a leur tête d'anciens journalistes renommés des médias . traditionnels >. Ces critères n'ont pas uniquement été établi a posteriori par recoupement empirique, mais ils constituent également un contexte d'observation permettant a priori de répondre a la problématique posée.

Nous avons jugé le choix du modèle économique (payant en l'occurrence) comme un facteur discriminant malgré les incertitudes qui subsistent en la matière et même si notre étude ne porte pas sur la viabilité de ces sites. Nous avons conscience que le statut d'abonné/adhérent détermine en partie les représentations, les attentes, les rapports et les pratiques de l'internaute au site, aussi bien que l'approche d'une rédaction a ses visiteurs. Même s'il nous semble assez complexe de mesurer comparativement l'influence de ce facteur sur l'objet qui nous intéresse. Ces éléments constituent en ce sens des variables qu'il convient de souligner.

Au contraire, nous avons considéré qu'il était utile de mettre ces diverses démarches en perspective, afin de mieux percevoir les origines en terme de vision du . participatif . et incidences des ces alternatives sur la relation aux internautes.

5.1.1. Les démarches entreprises e t les personnes sollicitées

Ces bases theoriques posees (delimitant le champ de notre etude), nous avons selectionne les sites de notre corpus selon les caracteristiques degagees dans notre definition des sites independants d'information. Nous avons ainsi retenu 3 arrêtsurimages.net . ainsi que . mediapart.fr.com . et tente de recueillir le discours de leurs representants par le biais d'entretiens.

Nous avons donc interroge Daniel Schneidermann (@si) et Vincent Truffy (charge de la moderation et de l'animation du . Club . et de la rubrique . Revue du web . a Mediapart). Nous nous sommes par ailleurs entretenu avec David Dufresne (Mediapart) en tant que fondateur d'un des premiers webzines francais (La Rafale) et Tristan Mendès-France (. Egoblog *121, Place de la Toile) pour son experience de la moderation des commentaires en tant que blogger et expertise sur les nouveaux usages numeriques dans le domaine de l'information.

Les discours tenus publiquement (principalement par Pierre ) ne nous ont pas parus suffisamment axes sur l'objet de notre etude et pour cause la redaction de . Rue 89 > dit être < revenue > de l'information < a trois voix >. En effet, Pierre Haski declare notamment :

3 Nous avons invente notre modele participatif au jour le jour, de maniere

empirique. [...] Mais nous avons pu constater que l~id~e du "tous journalistes" ne tient pas. >122

Par ailleurs, les representants des sites d'information pure players ont ete invite a de nombreuses reprises par les medias traditionnels (sauf pour Arrêtsurimages.net), mais principalement dans le but de debattre de leurs modèles economiques ou a des fins promotionnelles (anniversaire, lancement d'un livre...)

Et même si ces modèles economiques reflètent des conceptions differentes de la production de l'information sur Internet et ont donc des implications indirectes sur le rapport que ces sites entretiennent avec les internautes (abonnes, inscrits, simples lecteurs...), notre analyse ne porte pas directement sur cette question.

121 http://egoblog.net/

122 "Nous sommes les numeros 1 des pure players", interview de Pierre Haski, Electron libre, 10.02.09, http://electronlibre.info/Nous-sommes-Numero-1-des-pure,257

Ayant lu nombre d'interventions publiques de représentants de leurs sites, nous avions conscience d'attendre un certain discours de leur part. Nous avons cependant tenté de déjouer ce biais en essayant d'adopter un regard neuf. Par ailleurs, nous n'avons pas appliqué exactement la même grille de questions lors de nos deux entretiens en raison de la différence de démarche des représentants (cela pour éviter un discours trop généraliste tel que nous avons pu par certains égard susciter lors de notre premier entretien avec Daniel Schneidermann). Ce dernier ayant un caractère exploratoire, nous avons tenté pour le second de rattacher nos questions a des exemples concrets. Cela a notamment eu pour effet de recueillir les réactions de Vincent Truffy par rapport a des situations concretes et significatives du rapport aux internautes de Médiapart et d'éveiller notre réflexion quant aux possibilités d'évolution, voire d'amélioration des espaces participatifs.

Une réticence était perceptible lors de cette premiere prise de contact, non pas a se faire interviewer, mais quant a la légitimité même de notre démarche (. Toutes les informations dont vous avez besoin sont sur le site. ») Est-ce du au fait que notre démarche sociologique relevait plus de l'écoute et du recueil de discours plutot que de la recherche d'information factuelles précises que mènent les journalistes ? Cela nous a poussé a anticiper les résistances et les inégalités du rapport qui pourraient éventuellement se mettre en place, ainsi qu'à prévoir d'éventuelles relances ciblées.

L'entretien avec Vincent Truffy s'est quant a lui déroulé dans un lieu public et a davantage pris la forme d'une discussion informelle. Tous les themes afférents au participatif ont été abordées sous un jour plus concret et fouillé, mais dans un ordre plus dispersé. L'échange a duré trois heures et s'est structuré autour de relances et de rebonds, le sujet orientant de lui-même sa réflexion vers du theme de notre enquête.

5.2. Resultats : confrontation des discours publiques e t lors d'en tre tiens avec les hypotheses de recherche d'apres les criteres predefinis.

5.2.1. Reticences de la part des web journalistes face au systeme d'autoregulation de la communaute

Nous avons recensé les blogs du Club de Médiapart ainsi que le nombre de billets que chacun d'eux comptabilisait (en les classant par tranche de 25), afin de voire si le concept de la « longue tralne » pouvait s'appliquer dans ce cas. Nous avons fait cela dans le but d'observer comment la communauté d'abonnés s'auto-organisait et dans quelle mesure l'intervention de la rédaction de Médiapart était nécessaire comme l'avance Vincent Truffy.

Répartition du nombre de blogs rapporté a leur nombre de billets sur le Club de Médiapart (mars 2009) :

= 1 : 311 bloggers

>= 1 < 25 billets : 787 bloggers >= 25 < 50 billets : 43 bloggers >= 50 < 100 billets : 20 bloggers > 100 < 150 billets : 8 bloggers > 150 < 175 billets : 2 bloggers Total du nombre de blogs (recensement personnel) = 860123

0n observe que 36% des bloggers n'ont contribué au club Médiapart que d'un seul billet alors que les 3,5% les plus actifs ont publié plus de 50 billets. Si on applique la loi des 20/80 (20% des bloggers constituent 80% de la production éditoriale) traditionnellement appliquée dans les entreprises, on constate que 20% des blogs (les 172 blogs les plus actifs) ont ainsi publié au moins 10 billets chacun alors que les 80% restant on publié moins de 2 billets. Ce cas de figure illustre le concept de la « long tail » et constitue un ensemble assez hétérogène. ll se structure selon le principe de la coordination, qui veut que l'organisation se fasse d'elle même.

123 833 au 06.04.09 selon Francois Bonnet, http://www.mediapart.fr/club/blog/francoisbonnet/060309/une-impatience-partagee-avec-nos-abonnes

Par un effet « naturel », les blogs les plus visités sont ceux aux quels les internautes s'abonnent selon une logique de « rendez-vous », les plus cités et les plus notés, ce qui les fait apparaitre dans les premiers rangs du « classement » éventuels des blogs (exemple : « commentaires d'utilité publique » sur la home page d'arretsurimages.net sont les plus pointés par les asinautes, onglets « les nouveaux billets », les « nouveaux blogs » ou « les + recommandés » sur le club de Médiapart). Il y a donc une sélection par la nouveauté/régularité des contributions et une sélection qualitative, par le vote ou le classement des plus lus/visités/envoyés, qui s'effectue d'elle-même entre internautes via les différentes applications mises a leur disposition par le site.

0n note que sur les 20 premiers blogs les plus recommandés sur Médiapart, 14 d'entre eux sont des blogs qui ont moins de 10 billets (limite établie ci dessus au dela de laquelle on fait parti des 20% de blogs les plus actifs) et 7 ayant un seul post a leur actif. Ce qui nous amène a dire qu'un peu plus d'un tiers des blogs plébiscités par les abonnés de médiapart font partis de cette longue traine de contributeurs ponctuels pouvant etre percus comme faisant de l'obstruction par le brouillage entrainé par leur nombre. Ils sont donc remarqués du fait du fait de leur apparition dans les listes de nouveautés ou du fait d'une recherche par mot clé (tags).

En effet, les algorithmes opèrent sur la home page du « Club » une sélection par obsolescence et par recommandation. La nature automatique (quantitative et qualitative) de ces classements mettant en avant les choix des abonnés. Vincent Truffy rappelle a la suite de posts controversés sur le VIH et les attentats du 11 septembre que la rédaction a fait le choix d'une modération a posteriori et de rendre accessible une sélection, qui ne correspond pas toujours a ses propres critères.

« Cette intrusion du quantitatif dans un ensemble très editorialise fonctionne néanmoins comme un rappel - modeste certes, puisque place en bas de page d'accueil ou dans des pages moins accessibles - de la popularité de ce qui ne correspond pas au choix de la redaction de Mediapart. C'est l'irruption de l'incongru, de l'insolite, de l'inapercu, c'est l'accident dans un ensemble qui pourrait parattre trop bien réglé au risque parfois de l'inacceptable. »124.

124 TRUFFY Vincent, « Le Club en chantier », Medipart, Edition « Découvrir Médiapart, 12 septembre 2008.

A noter que cette sélection autorégulée n'est pas celle qui est la plus visible sur la 3 home page . du site, mais sur celle du Club. C'est le responsable de la Une qui sélectionne, en accord avec le chargé du Club, les billets figurant dans la zone bleue de la page d'accueil du journal. Un choix rédactionnel supplante donc celui opéré par les internautes eux-même pour les parties les plus accessibles du sites afin de garantir la cohérence éditoriale de Médiapart.

0n peut alors se demander si ce parti pris relève du fait que les outils mis a la disposition des internautes ne sont pas satisfaisants (pas d'échelle de notation, d'élection de modérateurs parmi les abonnés...) ou d'une résistance a abandonner aux abonnés la sélection de leurs propres publications, car jugée non pertinente. L'intervention d'un professionnel est la encore présentée comme essentielle pour une meilleure sélection, ce qui révèle la volonté de la rédaction de conserver un certain . contrôle . sur le . Club >.

Un panachage semble etre tenté entre une modération a posteriori (qui relève d'une démarche d'hébergeur de contenus) et une mise en avant des billets correspondant a la ligne du journal (qui correspond a ce qui ce fait dans la rubrique 3 courrier des lecteurs . d'une média papier).

Selon Vincent Truffy, journaliste a Médiapart, la raison pour laquelle l'équipe rédactionnelle n'a pas souhaité mettre en avant le classement par vote sur la home page du site est que celui n'est pas pertinent. Si la confiance que l'on place dans les posts de certains contributeurs vient du fait qu'on suit leurs publication sur le long terme, ce phénomène entralne également un biais. En raison du nombre restreint d'abonnés actifs (difficilement quantifiables), la . dynamique relationnelle . fait que bien souvent les votes sont le fruit d'un phénomène de cooptation mutuelle, voire de copinage.

Par ailleurs, le vote relève souvent moins selon lui d'un jugement quant aux qualités intrinsèques du billet que du fait de savoir si l'internaute partage ou non le point de vue exprimé. Cela marque la différence entre l'amateur et le professionnel, dont l'intervention a alors un role de pondération essentiel.

5.2.2. Professionnalisme e t légi timi té : une question non résolue

Lors de notre entretien avec Daniel Schneidermann, le présentateur d'@si refusait de comparer qualitativement et explicitement les publications amateurs avec les contenus journalistiques125. Cependant, ce dernier précisait bien qu'une information n'était pas de qualité du fait qu'elle soit payante, mais était payante du fait qu'elle soit de qualité, c'est-à-dire professionnelle (forte présence du champ lexical du « métier >).

Autrement dit, le lien de causalité entre la qualité, le professionnalisme et la rémunération semble évident pour le sujet, bien qu'il se garde que reformuler la logique en sens inverse, a savoir : contenu non-payant, amateurisme et donc contenu de mauvaise qualité. Le lien entre valeur au sens de la qualité (une information vraie) et au sens monétaire (payée) est implicitement établi pour que s'opère une distinction entre la production d'informations en tant que travail et en tant qu'activité. ll y a donc une logique de différenciation de l'offre entre les « univers » des journalistes web (« Nous, on vérifie. ») et les autres (« gens qui font des pages personnelles ne vérifient rien >).

Le sujet dit également qu' « on ne leur [aux rédacteurs amateurs] demande pas d'ailleurs ., sous entendu de vérifier, de faire une information au sens journalistique du terme. Les rédacteurs amateurs sont ici percus comme faisant parti d'un autre « univers . (le terme est répété 5 fois), celui « de l'expression personnelle, [...] du témoignage >.

L'établissement de cette limite est ici clairement défini selon une perspective classique de la profession de journaliste qui ne réfère a la parole de son public qu'en tant que valeur marginale, qui ne fait sens que si elle reflète a titre individuel une opinion plus large, l' « opinion publique . (micro trottoir, courrier des lecteurs...).

En effet, les journalistes réfèrent souvent aux User Generated Contents a de
l' « information brute ., qui resterait a vérifier, retravailler et éditorialiser, car

125 Cf. retranscription (enregistrement autorisé) de l'entretien avec Daniel Schneidermann dans les locaux d'arrêtsurimages.net, le 30.01.09. « Non, je dirais pas plus ou moins de valeur, parce que ca ce serait dévalorisant pour les autres.[les blogs] .

n'ayant que peu de valeur en soi (métaphore de la pierre brute, puis taillée), or ils l'intègre plus ou moins a leur offre payante (la participation au Club est gratuite sur Médiapart, mais ce dernier est mis en avant dans la promotion de son offre payante globale).

Vincent Truffy soulève indirectement la question du crowd sourcing en disant :

« Si les gens temoignent, si les gens analysent, moi je suis content. S'ils font un travail - pseudo journalistique ., je suis content aussi, mais a la limite

ca me derange plus parce qu'a ce moment la on devrait etre dans une relation contractuelle. On devrait les piger. .

La encore qualité et valeur sont intimement liée de manière problématique dans la mesure oil il n'est pas forcément souhaitable que les abonnés soient auteurs d'UGC de nature quasi journalistique dans la mesure oil ce sont eux les abonnés.

C'est un problème que Tristan Mendès France au sujet de la récupération de la hiérarchisation collective des liens réalisée par la communauté . Digg >126 par exemple : « Il faut reconnaitre que c'est la communauté et non pas la redaction qui le fait, sinon cela revient a faire crowd sourcing abusif. . En effet, si la rémunération est une conséquence logique d'un travail de qualité comme l'entend Daniel Schneidermann, se pose alors la question éthique de l'appel a contribution et de la reprise libre d'UGC de qualité par des sites d'information marchands. Ces pratiques de collaboration des débuts du web sont aujourd'hui courantes sur ces derniers. Ils justifient cette démarche du fait que la réelle . valeur ajoutée . de leurs sites relève davantage des contenus journalistiques que des UGC. La possibilité de participer constitue alors davantage d'un service mis a la disposition des Internautes qu'une contribution servant le journal.

Toutefois, les journalistes de ces sites avancent que l'interactivité permet une production alternative de l'information qui les distingue des sites des journaux papiers. Daniel Schneidermann affirme lors de notre entretien :

3 La troisieme chose que permet Internet par rapport aux medias traditionnels c'est d'avoir un rapport different avec son public. C'est-a-dire [...] de ne plus etre tout a fait dans un rapport vertical, mais d'être dans un rapport d'echange horizontal. Ca, je dirais que c'est completement, enfin c'est la principale difference. .

126 http://digg.com/

Le rapport aux contributions des internautes se révèle donc ambigu6 dans le discours des protagonistes des sites indépendants d'information mêlant étroitement production journalistique et espaces participatifs.

Tristan Mendès France déclare ainsi que la notion de participatif relève en partie de la rhétorique dans la mesure oil rares sont les commentaires amateurs réellement enrichissants. La plus part du trafic des plates-formes est généré par des bloggers renommés comme Versac sur « Slate >.

La relation des pure players participatifs est donc ambivalente, puisqu'ils mettent en avant cet aspect interactif de leurs sites, mais qu'ils n'en attendent pas grand chose en termes d'information. Si ils leur attribuent une « plus value . notamment en l'intégrant au discours de positionnement face aux médias traditionnels (argument commecial), les UGC représentent avant tout quelque chose que la rédaction ne maltrise pas.

Vincent Truffy établi une nomenclature des différents types de contributions amateurs sur Médiapart. ll y a selon lui celles qui relève de la « vie souterraine » du Club. Ces contenus très hétéroclites n'entrent pas dans le projet du journal, mais animent le Club. Le constat fait entre la ligne éditoriale et certains UGC est paradoxale dans la mesure oil, même si la nature des blogs va être grandement déterminée par la démarche de la plate-forme, tout comme le sujet des commentaires vont l'être par celui de l'article au quel ils réagissent, du fait même que les contributeurs ne sont pas des professionnels on ne peut attendre d'eux de se conformer a une ligne éditoriale.

Contrairement a certains bloggers amateurs sélectionnés par des sites de grands journaux (c'est également le cas de Slate.fr) en tant qu'experts (exemple : le blog « Les Cuisines de l'Assemblée . de l'assistant parlementaire Samuel Le Goff sur le site de l'Express, « Famille je vous haime » du Psychiatre Psychanaliste Serge Hefez sur Libération.fr...), qui se font parfois relire par le journal qui les héberge (c'est par exemple la politique de Liberation, mais pas de L'Express), les abonnés n'ont que l'obligation de respecter la Charte éditoriale127. C'est ce que Vincent Truffy appelle « la vie souterraine de Médiapart . et que l'on peut rapprocher de la

127 http://www.mediapart.fr/charte-editoriale

notion de dynamique relationnelle évoquée en amont de part son aspect non formaté.

Puis, il y a des contributions amateurs telles qu'elles sont attendues de la part de la rédaction, a savoir qui respectent clairement la distinction avec le traitement journalistique, mais également la ligne éditoriale du site.

« [D]es choses qui viennent eclairer, il y a du contenu produit par les abonnes qui ne sont pas du contenu journalistique classique, parce que ca ne correspond pas aux normes de redaction, de verification etc., mais qui sont interessants quand meme parce qu'ils viennent eclairer l'actualite.

C'est de l'analyse, c'est du temoignage, c'est des choses comme ca. »

Enfin, de manière plus problématique, des contenus « pseudo-journalistiques » viennent brouiller les pistes. Vincent Truffy donne l'exemple d'un abonné ayant mis en ligne l'interview du réalisateur chinois Jia Zhangke alors que la rédaction l'avait également interviewé.

« On est dans un cas de figure ou le journal et le Club produisent la meme chose eventuellement la meme qualite. La difference est que l'un est dans une demarche d'explication, l'autre est dans une demarche de promotion. Mais eventuellement le contenu est le meme. C'est simplement la finalite qui fait la difference. »

Ici, la distinction se fait sur la démarche et non pas la qualité intrinsèque du résultat. La contribution de l'internaute est une information, mais le statut de produit journalistique ne lui ait pas pleinement attribué du fait qu'elle ne procède pas d'une recherche d'objectivité. De meme que la distinction établie entre le vote subjectif des internautes et la sélection qualitative des billets réalisée par la rédaction, le sujet considère que les internautes relèvent, contrairement au travail de l'équipe, de la sphère de l'opinion.

Ainsi a la question « vous considérez-vous comme un site militant ? » Vincent Truffy répond que le travail du journal est dans les faits infléchi par le contact avec ses abonnés qu'il percoit comme majoritairement militant. La encore Médiapart est considéré comme un site « de » militants et non pas un site militant en lui-meme. Toutefois, travailler a leur contact est percu comme une interaction qui va finalement influer et faire évoluer sur la démarche journalistique.

Bien que les abonnés contribuent a faire le site, ils ne contribuent pas a coproduire l'information (. Non, pas l'information. Je pense qu'on co-produit un journal, un site d'information avec les abonnés. .), ils agissent . a coté . et 3 avec >. Ils peuvent contribuer en partageant des contenus . de qualité . journalistique, mais pas journalistiques. Ils sont considérés comme partie intégrante du site, toutefois, ils viennent agir en annexe des journalistes.

Le caractère aléatoire de ces contributions modérées a posteriori peuvent cependant constituer une valeur ajoutée en terme d'image. Elles contribuent en effet a donner un cachet d'indépendance au site qui les héberge, dans la mesure oil ils constituent la preuve de la liberté d'expression des internautes. Ainsi, au dela de leur expertise, les bloggers confèrent par . concomitance . une indépendance de ton au site du média qui les héberge (exemple : le blog de Jean-Michel Aphatie sur RTL.fr128).

Tristan Mendès France place quant a lui davantage le curseur distinguant publications amateurs des publications professionnelles, non pas sur la finalité de la démarche, mais en fonction de la crédibilité du statut de journaliste dont jouissent ces derniers.

- Maintenant, le grand public a acces aux legos qui constituent la base de la construction journalistique (le lien twit du NYT, le fil AFP...) et c'est la que

les journalistes doivent s'appliquer a - editorialiser . davantage leur travail. La plus value journalistique reside donc dans un style redactionnel et un sens de l'analyse propre. Les journalistes sont maintenant tous nus, descendus de leur pieds d'Estal..

Cependant, le style des bloggers et des journalistes se rapprochant de plus en plus en tout cas du point de vue de leur qualité informative selon lui, . il est a priori impossible de tracer une ligne rouge nette en terme de qualité entre les travaux amateurs et professionnels >. La distinction en terme de qualité entre contenus amateurs et journalistique semble donc difficile a tracer de manière claire comme le montre l'amalgame qui a donné lui a l'appellation . pro-am . (professionnelamateur).

128 http://blogs.rtl.fr/aphatie/

Le participatif est un concept qui se défini en creux ou en réaction au journalisme, alors même qu'on lui reconnait par ailleurs une certaine autonomie. Certains contenus, . électrons libres >, n'entrent pas dans la ligne du site et ne s'inscrivent pas dans un sillon journalistique pré-établi. Dans ce cas, ces expressions personnelles spontanées sont percues comme un envers inévitable, mais pas vraiment souhaitées. Cela constitue la part d'incongru avec laquelle il faut composer lorsque l'on souhaite faire du . participatif >. Le journaliste doit alors toléré certains corollaires qu'il ne peut totalement contrôler dans la mesure oil ils respectent la Charte éditoriale et les règles de modération.

Dans un sens, les contenus amateurs peuvent être percus comme des contributions problématiques, car trop proches du journalisme (crowd sourcing non rémunéré de contributeurs qui payent même un service), ou car trop éloignés (caractères anecdotiques, foisonnant, personnel, polémique...). Dans tous les cas, cela révèle le problème de ces sites a allier a la fois une activité de modération propre a des hébergeurs de contenus et d'éditeur de presse devant avoir la maitrise de sa publication.

Ainsi se pose également la question des rapports de force qui se jouent au sein de ces espaces participatifs entre la rédaction modératrice et ses abonnés et de la place qui est laissée a ces derniers. Cela est en partie déterminé par les représentations que les web journalistes entretiennent quant au role de ces derniers.

5.2.3. Entre projection e t desillusion des atten tes journalistiques : le role marginal des internautes.

Daniel Schneidermann dit en general employer le terme d' « abonnes » pour designer les Internautes. 0r cette notion renvoie a deux significations, celle de client puisqu'il avance de lui meme « Apres, ca veut pas dire que ca nous place dans une situation totale d'independance. On est dependant de nos abonnes. ., mais aussi la signification d'adhesion a un groupe que vehicule encore davantage l'appellation specifiquement cree d'asinautes129. De meme en reaction aux annonces de certains abonnes de quitter le Club, son animateur ecrit :

« un compliment, puisque dire que l'on quitte Mediapart, c'est en parler comme d'une identite affective (un parti, un mouvement, une association,

un couple, etc.) dont les liens depassent ce qu'offre ordinairement un media, la simple consommation d'informations. Cela signifie que notre pari d'inventer un media participatif et contributif, d'un genre inedit, a mobilise et attire une partie de ceux qui nous ont permis, jusqu'ici, de durer. .130

Ce dernier point renvoie quelque part a une idee de communaute federee autour d'un organe central dont on reconnalt l'autorite puisqu'on accepte de la payer. Alors que D.S. dit avoir ete entre autre attire par l'aspect « horizontal . et non plus vertical des rapports du journaliste au public, il rappelle avec force qu'au bout du compte cette egalite dans l'echange a une limite très claire quant aux orientations du projet et a la ligne editoriale du site.

Daniel Schneidermann signale que certains ont essaye de faire du « chantage au desabonnement ., « Ce qui [l']a amene a un moment a mettre les choses au point avec eux. », comme suit :

- et a leur dire vous etes bien gentils, mais les patrons c'est nous ! Ceux qui font le site c'est nous ! On est dans une demarche de... de dialogue avec vous, de discussion avec vous dans les forums, d'appel a vos suggestions etc. mais en dernier ressort, ceux qui decident de ce qu'on met en ligne et de ce

129 Appellation courante des abonnes d'arretsurimages.net, utilisee par la redaction et les internautes eux-meme.

130 « Les Regles de notre Club ., Animateur du Club, Mediapart, 28.04.09, http://www.mediapart.fr/club/blog/animateur-du-club/280409/les-regles-de-notre-club

qu'on met pas en ligne c'est pas vous. Ceux qui choisissent les sujets c'est nous, c'est pas vous. »

Plus loin dans notre entretien il ajoute suite a une question sur l'eventuelle dimension militante d'arretsurimages.net :

3 si militant veut dire qui milite pour que les consommateurs de medias puissent acquerir une certaine mattrise sur la maniere dont ils consomment les medias. Ca oui, on milite pour ca, on milite pour rendre du pouvoir au public sur les medias. .

La encore on bute sur la volonte d'investir Internet pour que le public ne soit plus uniquement cantonne a ce role, mais puisse egalement interagir dans la production d'information, contribution percue comme enrichissante par les journalistes. 0r le paradoxe est maintenu puisque la dimension reellement participative d'Internet ne semble avoir ete integree qu'en contre-point a la publication journalistique professionnelle comme le montre les rapports de domination qui se dessinent dans son processus de production au sein du site Asi.

Lorsqu'a l'occasion d'une emission . making off . d'arretsurimages.net, Daniel Schneidermann exprime sa deception quant au peu de participation des internautes sur les forums

3 Ca participe pas des masses, ca vote pas des masses, je sais pas pourquoi. Je pensais que cela voterait plus [...] Toute la dimension communautaire est une dimension a laquelle les internautes n'ont pas tellement mordu. On

pensait vraiment que vous alliez vous precipiter davantage sur l'aspect communautaire et par exemple sur ces votes. Et en fait, vous vous etes [...] revelez beaucoup plus consommateurs et beaucoup moins « participatifs » si j'ose dire, que l'on ne pensait. *131

Hurluberlu, un asinaute « temoin . invite sur le plateau, se demande alors si cela n'est tout simplement du au fait que l' « irrigation . du site n'est pas suffisamment developpee. Autrement dit, si l'equipe redactionnelle intervient parfois dans les forums, ces derniers constituent plutot une face cachee qui n'est la qu'en reaction des contenus, mais qui n'interagissent pas reellement avec le reste du site. Cet exemple montre a quel point la question de la cooperation des internautes depend de multiples facteurs, dont celui de leur integration a la demarche d'ensemble du site par la redaction.

131 Extrait de l'emission . Nous cherchons un canal de diffusion pour nos emissions ., du 18.07.08,
22eme minutes, http.// www.arretsurimages.net/contenu.php?id-1000

De même, Pascal Riche de Rue 89 affirme dans l'emission Masse critique132 : « quand on s'est lance il y a deux ans, on pensait que le journalisme citoyen, ca pouvait effectivement exister . ; sur quoi Frederic Martel intervient pour dire que desormais il n'a plus que deux voix desormais contrairement a ce qu'annocait l'ambition initiale de Rue 89. Le web journaliste retorque :

« Non, non, ce n'est pas vrai, on utilise les ressources des internautes, mais on se rend compte que les internautes n'ont pas envie d'être journalistes. [...] Ils ont envie de participer, de nous donner de informations, des expertises, des temoignages, mais ils n'ont pas forcement envie d'être des journalistes citoyens. Donc, on se rend compte que c'est un peu une tarte a la crème qui a vecu cette histoire de « citizen journalism » et cette id~e que l'on peut se passer de journalistes >.

L'autre invite de cette emission est l'un des jeunes fondateurs du site Street Reporters133, un site participatif qui se veut le journal « de [sa] generation . en aidant techniquement et theoriquement les internautes a monter leur reportage (venant ensuite alimenter le site).

La confrontation de ces deux demarches differentes pose la question de savoir si la participation des internautes ne serait pas dans une certaine mesure freinee par la barrière du savoir-faire technique (montage video, traitement post production du son, mise en ligne d'un article...). Le fait d'être internaute, et donc d'être equipe, n'implique ni d'être capable de publier un contenu, ni par ailleurs de se sentir legitime pour le faire134.

La participation sur un site au modèle « mixte . (professionnel et amateur) est vue par Pascal Riche comme une source d'information pour les journalistes et de reaction aux publications de ces derniers. ll n'y a pas de reelle collaboration au sens de « travail en commun . et d'accompagnement des internautes. 0n attend de ces derniers qu'ils soient autonomes dans leur production, realisee en parallèle,

132 Chronique de Pascal Riche, « Masse critique ., 23.05.09, France Culture,

http://sites.radiofrance.fr/chaines/france-culture2/emissions/masse~critique/index.php

133 http://www.streetreporters.net/

134 Cela relevant d'une etude des pratiques et des representations des internautes participants, nous n'aborderons pas plus avant cette idee de « fracture numerique ..

mais non . avec . la rédaction. Cela pose la question de savoir jusqu'à quel point on peut intégrer les contenus amateurs a un site, sans pour autant comprendre le processus de travail dans sa démarche et son fonctionnement.

Le journaliste constate que les internautes ne . veulent pas . etre journalistes au sens professionnel du terme, ce qui justifie le fait que l'on n'intègre leur production qu'à titre de complément accessoire ou de matière première. Il n'est pas envisagé, non pas de les . former . pour qu'ils deviennent des . petits soldats >135, mais d'accompagner les internautes dans leur démarche de participation afin de rendre celle-ci pleinement possible. 0r, si on part du principe que le journalisme est un métier qui requiert des compétences, comment prétendre a une information . a trois voix ., la troisième voix devant etre assurée par des amateurs quasiment au même titre que les journalistes et les experts.

Ce débat reflète bien l'ambivalence que suscite la projection des représentations que les web journalistes ont des attentes des internautes en matière de participation au processus de production de l'information. 0n peut supposer que ce relatif désenchantement des sites . pure players . vient peut etre du fait qu'ils ont en partie adhéré a l'utopie web 2.0 et preter de ce fait des intentions d'imitation journalistique aux internautes. En effet, comme nous l'avons vu pour le cas des bloggers, ces derniers n'aspirent pas a etre reconnus en tant que journalistes et refusent de présenter leurs publications comme une production appartenant a ce champ.

L'intuition initiale de ces sites était que les internautes voulaient s'inscrire dans une démarche similaire a leur propre travail de production de l'information sans réellement analyser les pratiques et la culture ayant court sur le web. Et si, finalement cet engouement, puis cette désillusion, de la profession quant a l'implication des internautes tenaient plus a leur volonté de .réformer . le journalisme et de trancher avec leur pratique de la presse papier.

Au dela de la possible influence du discours techniciste ambiant, les initiateurs des
sites indépendants d'information semblent avoir accentué exagérément ce
mouvement comme pour mieux marquer leur . virage au numérique . a titre

135 En référence a : RUFFIN Francois, Les Petits Soldats du journalisme, Paris, éd. Des Arènes, 2003, 250 p.

personnel et appuyer ainsi leur rupture avec les médias traditionnels dont ils sont issus. La passage au numérique, avec toutes les possibilités d'interaction que cela comporte, impliquait que soit faite une nouvelle . promesse . (au sens marketing du terme), comme pour justifier un positionnement de rupture (Média-part) et une forte adhésion du public via un esprit communautaire.

Par ailleurs, si on extrapole ces cas, on peut se demander dans quelle mesure la collaboration est freinée, consciemment ou non, par les web journalistes. Car si les journalistes ont beaucoup attendu des internautes en matière de fréquence de production et de type de contenus, leur choix de mode d'intervention et la place des internautes semblent en même temps susciter des inquiétudes.

Tristan Mendès France avance au sujet de la réaction des professionnels face aux publications amateurs que les journalistes . se sentent plus dépassés que menacés . par les UGC et que leur inhabilité a gérer ces derniers provient davantage d'un retard en terme de culture web qu'une véritable hostilité. Ces moyens de s'informer peuvent même être percus comme stimulant au point de vue journalistique, mais cette approche de la participation des internautes renvoie la encore a leur caractère accessoire au travail du journaliste qui reste quant a lui prédominant.

Daniel Schneidermann pense ainsi que le role attendu par les internautes a l'égard du journaliste est de trier et hiérarchiser l'information pour le guider dans l'offre pléthorique a laquelle Internet lui permet d'accéder pour une question d'économie de temps notamment, mais aussi de savoir-faire et de fiabilité. Il se positionne ainsi comme un médiateur nécessaire entre les internautes et l'information sur le web. Ce cas de figure confirme ici la thèse de Clay Shirky qui avance que les membres d'une institution hiérarchisée vont toujours rappeler le caractère essentiel de leur role même au sein d'une organisation distribuée, ne reconnaissant pas la validité de cette organisation.

Si les internautes sont peu enclins a fournir du contenu journalistique comme l'avance certains web journalistes, on peut toutefois se demander si ce constat ne vient pas davantage du fait de la mixité du modèle de leurs sites. Ces derniers font peut être prédominer la production des journalistes du fait même de son

organisation preetablie par ces derniers et qui vient s'imposer comme un cadre a des internautes qui s'impliquent alors moins.

Cela revient la encore a revenir a l'impossible fusion de structures organisationnelles qui relèvent de cultures et de processus differents. Les journalistes en tant que membres d'une organisation hierarchisee « attendent . une certaine production des internautes. Ces derniers agissent quant a eux de manière assez hieratique et forment ainsi un ensemble de productions heterogènes se structurant de manière informelle selon la logique de l' « interaction interpersonnelle . (billet > commentaire/vote/trackback > reponse...) propre a la logique de cooperation volontaire du web. Ce qui forme un mouvement perpetuel de va et vient aleatoire qui peut donc sembler peu maitrisable, voire insatisfaisant, mais qui n'apporte pas « rien » a l'ecosystème informationnel.

La question est de savoir dans quelle mesure le système journalistique peut integrer ce mode de fonctionnement dans sa propre conception, car le simple fait d'être sur Internet et de mettre en place des outils n'implique pas forcement un changement de paradigme mediatique.

Le terme de « maniere [de] consommer les medias . que Daniel Schneidermann utilise lorsqu'il evoque la dimension militante d'arretsurimages renvoie bien au fait qu'Internet est percu comme un canal permettant la diffusion d'informations contre-hegemonique aux medias de masse. Internet ne semble pas constituer de pas pour autant un veritable lieux d'experimentation quant aux procedes et de remise en question de ses finalites.

Si on se refère a l'analyse d'0livier Blondeau, le site d'Asi serait assimilee aux :
« tenants de la « critique des medias . [... qui] s'inscrivent dans une

demarche de contre-information passant par la conquete d'espaces et d'outils de prise de parole et de diffusion au sein meme du système mediatique tel qu'il existe136 ..

Demarche qui s'oppose a celle des tenants de la critique communicationnelle qui :

136 BL0NDEAU 0livier, Devenir media, l'activisme sur Internet, entre defection et experimentation,

aris, editions Amsterdam, 2007, p. 95.

3tentent de repenser a (a fois (es dispositifs socio-techniques ou techno- po(itiques de production et de diffusion de ('information et (a nature même de ('information, son statut et ses fina(ités dans une société marquée par (a prédominance des médias de masse et (eur soumission au pouvoir

dominant.137 »

Cela rejoint la logique de . Don't hate the media. Be the media »138 selon laquelle devenir soi-même le média que l'on critique est le seul moyen de constituer . une source crédible et audible d'information ». 0r, le fait que le site d'Asi soit né suite a l'éviction de Daniel Schneidermann de l'antenne de France 5 et sa volonté de poursuivre son projet ailleurs pour en découvrir les nouvelles possibilités multimédia, de format et d'outils d'interaction au public (« Ca m'excitait intellectuellement de continuer sur un support nouveau qui soit un site Internet ») correspond bien a ce qu'0livier Blondeau appelle une . différenciation sectorie((e, p(us qu'une recherche de singu(arité novatrice de formation, de création de nouveaux médias139 ».

*****************************

Il semblerait que preter aux web journalistes comme ambition initiale de faire du « citizen journalism » et du « web 2.0 » serait trop hfitif, bien qu'ils leur arrivent d'évoquer Internet comme un média horizontal. Au contraire, leurs discours témoignent davantage d'une sorte de réticence et d'une volonté de garder la production journalistique au cceur du site en le séparant distinctement des interfaces participatives. Les contenus générés par les utilisateurs (UGC) viennent alors en réaction (contre-point, complément, correction, expression d'opinions ou d'expériences personnelles...) et mettent ainsi en valeur l'information en permettant une implication et une proximité du lecteur. Cela a l'avantage de fédérer une communauté d'internautes qui soutiennent le journal et valide par son

137 Ibid.

138 44 Ne détestez pas les médias. Devenez les médias », cf. Jello Biafra et actuel slogan d'Indymedia, http://www.indymedia.org/fr/

139 Ibid.

adhésion la qualité des informations mises a sa disposition la plus part du temps par l'abonnement et le vote de recommandation.

Mais, cette participation que l'on peut qualifier de . douce . (dans la mesure oil il ne s'agit pas a proprement d'une production de contenus) constitue une majorité silencieuse qui interpelle les représentants de ces sites. Comme l'a fait remarquer Daniel Schneidermann, une grande partie des abonnés d'Arrêt sur images ne viennent que sporadiquement sur le site et ne participent . pas des masses . selon ses propres termes.

Le Directeur d'Arrêt sur images semble attribuer cette passivité a la migration de son émission sur Internet et au fait que beaucoup d'anciens asinautes ne sont pas coutumiers de l'utilisation de ce médium, d'oil une stratégie de . délinéarisation . (Canal 94 de la Freebox). 0r, si on retourne la question, on peut s'étonner que l'émission n'ait pas davantage attiré un nouveau public du fait même de son médium, a savoir les internautes, et que ce journaliste s'inquiète davantage de la 3 transhumance numérique . de ses anciens téléspectateurs.

De même, Médiapart s'inquiète du fait que le Club commence a être accaparé par un petit nombre de contributeurs, qui le . squattent ., voire le . trollent ., ce qui remet en cause l'hétérogénéité représentative du journal notamment d'un point de vue politique. La crainte sous jacente est que le Club ne devienne un lieu oil celui qui criera le plus fort sera le plus entendu et la rédaction est donc la pour modérer.

0n peut toutefois supposer que cela vient davantage du fait que le Club n'a pas atteint une masse critique qui permette qu'une autorégulation s'installe grace a une hétérogénéité plus grande. En effet, si l'accès aux publications du Club est libre, la participation constitue un . plus produit . et n'est possible que pour les abonnés. La encore cela révèle un paradoxe dans la mesure oil, si les contenus ne font pas partis de l'offre payante, c'est qu'on ne leur accorde pas la même 3 valeur informative » que le journal, mais participer est un service que l'on paye au même titre que ce dernier. La production amateur valorise le site, mais pas le journal. C'est en quelque sorte du crowd sourcing indirect, dans la mesure oil si la plus value des UGC en terme informationnel est accessoire au journal, ils

constituent tout de même un argument promotionnel (« Profitez des services du Club >).

0r, si l'on revient a la définition du crowd sourcing, il s'agit de faire appel au travail d'internautes pour ensuite valoriser de manière marchande le trafic généré, en général par la vente d'espaces publicitaire, en l'occurrence par la vente d'abonnements. Et si l'on argue que le Club représente un facteur minime dans la « décision d'achat . et que c'est bien le contenu du journal qui est déterminant, pourquoi ne pas le laisser libre d'accès ? Parce que cela permet de fédérer une communauté d'internautes « captifs >. Mais en même temps, celle-ci ne constitue un réel soutient au site que si elle atteint une certaine visibilité. De plus, la fermer restreint la possibilité d'augmenter cette dernière et rend son contenu moins attractif, ce qui a tendance a nuire a son principe même.

Par ailleurs, permettre que l'on puisse y participer gratuitement impliquerait en partie une autonomisation du Club. Cependant, les blogs doivent entrer plus ou moins dans la ligne éditoriale du journal et doivent en quelque sorte agir en réaction de ses articles. Cependant, on pourrait imaginer que, si le fait d'avoir un blog soit payant, le fait de les commenter ne le soit pas, mais ce sont souvent les bloggers qui réagissent aux posts de leurs pairs et cela ne résoudrait pas le syndrome du vase clos.

Dans ce cas, soit la modération se fait plus stricte (ce qui n'est pas le parti pris de Médiapart jusqu'à présent), soit la participation au Club devient libre et on élargi la vocation du Club a une réelle fonction de plate-forme de blogs. Cela aurait le mérite de pousser le concept de la double fonction du site (journal et hébergeur d'UGC) jusqu'au bout.

A contrario, on pourrait penser qu'il s'agirait plutot d'« irriguer . davantage ces sites selon les termes d'un asinaute (cf. Hurluberlu). Autrement dit de les associer plus étroitement a la démarche du journal en les impliquant davantage dans les décisions et en les accompagnant dans la production commune de l'information. Cela reviendrait a creuser l'idée des Editions participatives de Médiapart, sortes de blogs animés en collaboration avec des abonnés et chapeautés par un journaliste de la rédaction autour d'un thème. Permettre aux internautes de s'associer au

travail de la rédaction constitue un risque sur plusieurs plan, notamment celui de la légitimité journalistique et nécessite de fait un parti pris prononcé comme c'est le cas d'Agora Vox.

Cela implique aussi que les journalistes acceptent de collaborer avec des amateurs et un travail de proximité sans pour autant avoir un parti pris pédagogique aussi fort que celui de l' . école du Bondy Blog >140 par exemple. Les rencontres et les journées portes-ouvertes qui ont eu lieu a Médiapart semblent aller dans le sens d'un dialogue plus prononcé entre la rédaction et les bloggers, mais davantage en ce qui concerne l'optimisation du Club qu'une réelle association. Mais ce type propositions pourrait etre percue par les bloggers comme un volonté de main mise sur le Club et pose la question de l'échelle de ce genre d'initiatives. La rédaction étant restreinte, cela impliquerait un réel investissement de la part de l'équipe. 0r, comme l'a souligné Tristan Mendès-France les sites d'information sont souvent dépassés et n'accordent pas assez d'importance a la modération. La gestion des espaces d'interaction ne semble pas percue comme faisant partie intégrante du travail journalistique, mais comme une activité ad hoc empiétant sur celle-ci.

0n pourrait davantage penser a une implication accrue du lecteur dans le processus de construction de l'information en terme d'ouverture quant aux dessous du travail des web journalistes. A l'instar des émissions de . making off . d'Arrêt sur images, on peut évoquer : les conférences de presse en direct sur Rue 89, les chats en Direct avec des journalistes suite a l'un de ses . papiers ., des propositions de sujets, ou de questions a poser a des invités interviewés. Cela impliquerait que le site fasse une plus grande place au role de l'internaute dans son propre travail non seulement en aval comme cela se fait déjà (commentaires, votes...), mais également en amont.

Cette interaction accrue est par définition chronophage et pose la question de la vocation et la stratégie de positionnement que se fixe le site, mais constituerait une véritable initiation au décryptage de l'information, qui constitue précisément l'objet d'arrêtsurimages.net. En outre, beaucoup de journalistes veulent se constituer en vigie pour guider l'internaute dans sa recherche d'informations fiables en opérant une sélection et hiérarchisation sur leur site. 0r, cette initiation a la production de l'information, sans etre trop didactique (via la curiosité de la

140 http://20minutes.bondyblog.fr/texts/zbb-ecole-du-blog

3cuisine . de la rédaction), pourrait constituer un premier pas vers l' . éducation aux médias et a l'image . que les chercheurs en sciences sociales appellent de leurs voeux. Avec pour corollaire de peut-être rendre le regard des internautes dans le travail journalistique par trop invasif pour les professionnels, voire une surveillance critique telles des souris de laboratoires.

Les internautes, que ce soit sur Médiapart ou Arrêt sur images, ne participent peutêtre pas autant qu'espéré, du fait même qu'ils ne se sentent pas investis de la production collective de leurs contenus et agissent donc davantage en lecteurs qu'en internautes actifs141. Les modèles actuels n'ont pas pleinement réussi a intégrer leur participation et a changer l'approche de l'information du fait d'une certaine permanence dans la manière d'envisager sa production.

Les différentes possibilités d'évolution proposées appellent dans tous les cas une certaine renégociation de la place de chacun sur le site et pose la question des différentes formes possibles de participation que les internautes souhaitent. ll s'agirait d'étudier non seulement leurs pratiques de navigation et des outils d'interaction mis a leur disposition, mais également la manière dont ils se représentent leur role sur le site et leurs attentes en la matière. Au dela des représentations des web journalistes et sans pour autant tomber dans une logique 3 de la demande ., ces sites dépendant de leurs abonnés non seulement sur le plan pécuniaire, mais également quant a leur . animation ., un étude approfondie de leurs attentes ouvrirait peut être de nouvelles brèches dans la structure même des dispositifs informationnels.

141 Comme le note Franck Rebillard, cela ne signifie pas pour autant qu'ils soient passifs dans la mesure oil, même l'exercice de son esprit critique a la lecture d'un article constitue le signe d'une posture active.

6. Conclusion

Médiapart et Arret sur images sont des sites indépendants d'information qui ont récemment fait le pari du . participatif >. Autrement dit, de constituer un site alliant a la fois du contenu journalistique et des contributions amateurs, par l'intermédiaire de commentaires, de forums, de blogs, ou de votes. Après un peu plus d'un an d'existence, pour beaucoup, c'est l'heure du premier bilan en matière de viabilité économique. Mais, du fait qu'ils aient opté pour un modèle payant basé sur l'abonnement, cette question est également liée a celle de l'adhésion des internautes a leur offre. Cette dernière comprend non seulement la qualité intrinsèque des contenus rédactionnels, mais aussi leur capacité a modérer et animer une communauté d'internautes.

La participation de ces derniers est l'une des raisons avancées par les représentants de ces sites pour expliquer leur migration sur le web et constitue un élément souvent mis en avant dans leur positionnement vis-à-vis des médias dits traditionnels (liberté d'expression, indépendance, proximité avec le lecteur...). Le 3 participatif . est donc une composante essentielle de leur démarche initiale. 0r, les discours de ces web journalistes issus de médias classiques révèlent une certaine ambivalence a l'égard des contenus générés par leurs abonnés actifs, ce qui pose la question de savoir qu'elles représentations ils entretiennent au sujet de la place et du role de ces derniers sur leurs sites.

Cette notion soulève plusieurs points de crispation comme les questions du
professionnalisme, de la qualité, de la gratuité ou de l'organisation, qui sont
sujettes a débat dans la profession et de fait chez ces journalistes qui sont a cheval

entre deux modèles de fonctionnement. Celui des contributions amateurs est basé sur la valeur de partage et de libre accès des connaissances sur des plates-formes d'UGC marchands ou bénévoles et auto-organisés. Celui des contenus journalistiques émane d'une structure hiérarchisée et professionnelle. Sur les sites indépendants d'information, une rédaction est « aux commandes . (construction du site, production d'articles et modération), mais certaines de ses publications sont amateurs. 0il se situe le curseur des attentes des web journalistes a l'égard des internautes : cohabitation, échange, collaboration ?

Comme nous l'avons vu au travers de l'analyse des entretiens menés, les web journalistes officiant sur ces sites développent par certains cotés un discours enthousiaste quant a la participation des internautes (même s'ils ont conscience que la part d'abonnés « actifs . demeure marginale). Ce présupposé fait parti du postulat de départ ayant initié leur démarche sur Internet.

Cependant, que ce soit du a leur parcours dans les médias traditionnels ou a leur expérience empirique du « participatif ., ils ont d'un autre coté tendance a relativiser la valeur et l'importance qu'il revet sur leurs sites. Cette demidéception est révélatrice de représentations du concept du « web 2.0 » ambivalentes. La participation est a la fois « trop . (virulente, foisonnante, ne correspondant parfois pas a la lige éditoriale du journal...) et « pas assez » (importante, vérifiée, éditorialisée...).

Nos résultats tendent a confirmer nos hypothèses au sujet de l'ambivalence des représentations des web journalistes d'Arret sur images et Médiapart au sujet de la place et du role des internautes contributeurs.

De fait, une sorte de statut quo s'instaure sur ces sites et invite a interroger ces attentes si l'on ne veut pas que ces tentatives d'intégrer le « participatif . a un site d'information ne deviennent un voau pieu mort-né. Cette situation appellerait maintenant a se tourner vers les attentes des internautes afin de cerner les points de jonction avec celles des web journalistes. Cela permettrait de mieux définir les enjeux collectifs, qui définiront l'évolution de ces sites participatifs.

SYNTHESE

Depuis 2007, de nouveaux acteurs de l'information sont apparus en ligne. Des journalistes tels qu'Edwy Plenel ou Daniel Schneidermann ont migré des médias traditionnels vers le « web 2.0 . pour fonder des sites indépendants d'information. Au dela de leur recherche de modèles économiques viables, se pose la question du rapport que ces équipes rédactionnelles entretiennent avec les internautes et de leur manière d'appréhender les nouveaux moyens d'interaction et de co-production de l'information qu'offre Internet.

Les rapports entre journalistes professionnels et « pro-amateurs . sont en permanente redéfinition sur Internet et constituent l'un des enjeux de ces nouveaux sites pure players. La conception du métier de journaliste est en débat et ses pratiques évoluent au contact du « participatif ». Ce « buzz word » est une notion clé de la démarche de ces sites notamment en tant que positionnement différentiel par rapport aux médias traditionnels.

La question du « participatif . s'articule autour d'un ensemble de « noeuds . (au sens ou ces problématiques sont étroitement entremelées) tels que celui du professionnalisme, de la valeur (qualité et prix) et de l'organisation des contributions des internautes. Le modèle mixte que propose les sites indépendants d'information, en tant qu'ils relèvent a la fois d'une structure professionnelle avec des espaces participatifs, cristallise ce débat.

Issue de la tradition de collaboration de la web culture, la notion de participation s'inscrit par ailleurs dans une logique d'auto structuration, d'indépendance et de légitimation différente de celle d'un média. Valeurs que les journalistes non « digital natives . semblent avoir du mal a intégrer dans leur propre schème de organisationnel tout en tentant de l'y intégrer.

Le « participatif » est un concept qui n'est pas né avec le « web 2.0 », mais qui résulte d'une tradition activiste (Félix Guattari, Hakim Bey...). Cependant, Internet de part sa taille et sa nouveauté technologique lui a conféré une ampleur trompeusement révolutionnaire. Pariant sur l'intervention des internautes comme

facteurs de développement de nouveaux services web plus adaptés, les zélateurs 2.0 lui attribuent l'accession du Net a une nouvelle phase de son évolution. En terme d'information, c'est la rhétorique du . tous journalistes ., apparu notamment avec les blogs, qui prime. Cela influe (par adhésion, ou par résistance, en tout cas par contamination contextuelle) sur la réflexion quant au role des internautes dans la chaine de production de l'information et de fait sur le métier de journaliste. 0r, le fait que la participation tire ses origines dans les mouvements activistes montre qu'il s'agit de ne pas négliger l'interrogation plus profonde qu'elle pose quant a la structure même de l'information et les attentes profondes des internautes au sujet de la nature de sa production. Au dela du phénomène de mode et de l'argument marketing, c'est bien une alternative via le . participatif . qui est recherchée et qui questionne l'organisation traditionnelle des médias ayant migré sur le web.

Concrètement, les discours des représentants des sites étudiés révèlent une certaine ambivalence dans leurs rapports aux internautes, notamment en matière d'attentes et de postures vis-à-vis de leurs contributions. Ces dernières sont a la fois percues comme quelque chose de souhaité, voire de révolutionnaire, car permettant la constitution d'un média plus . horizontal . et en même temps parfois percues comme une menace ou comme quelque chose de décevant. Les représentations qu'ont les web journalistes du . participatif . sont donc dans une certaine mesure paradoxales et tend a montrer qu'ils ne sont pas encore . au clair . avec ce concept et donc leur propre démarche.

Ce qui se joue sur les espaces d'interaction entre les journalistes et les internautes est a cheval entre deux conceptions de production de l'information, dont ces sites indépendants essaient peu ou prou de faire la synthèse pour tirer parti d'un nouveau modèle mélangeant le meilleur des deux. A la fois basés sur la logique de production spontanée de la communauté (davantage au sens d'un forum que d'un réseau social) et professionnelle de la rédaction, ces sites ont toujours une jambe beaucoup plus développée que l'autre a savoir celle des journalistes.

Même si le but recherché n'est pas la . parité ., ces sites sont créés, dirigés et
animés par des professionnels de l'information qui souhaitent offrir un cadre
favorable a l'expression des internautes. 0r les critères qui ont prévalus a la

constitution de cet espace commun ont été prédéfinis par la seule partie initiatrice du projet, alors même qu'à l'instar de la pétition de soutien a Arrêt sur images ayant circulé sur Internet, les abonnés ont joué un role important dans la constitution de ces sites. Ces critères relèvent en partie les préconcus théoriques et les attentes que les journalistes entretiennent au sujet du participatif.

Si ces espaces évoluent de manière empirique au contact des internautes, il s'avère cependant que les journalistes ne sont pas enclins a leur accorder le statut de collaborateurs et ne les intègrent pas pleinement au processus de production du l'information, voire du site. TantMt voulant ne pas céder aux sirènes du tout participatif, tantot décus qu'il n'y en ait pas davantage, les web journalistes n'ont pas encore pris le parti ni de rendre autonome ce pan de leur activité ni de l'intégrer complètement a cette dernière.

0r si cela n'est pas fait, il est a craindre que ces espaces d'échange perdent de leur sens et que l'on attribue cela a un échec du . participatif ., davantage qu'à ce modèle mixte. Il s'agit analyser les attentes des internautes en la matière, les attentes projetées des journalistes et de fait les raisons de son évolution actuelle.

APPROCHE DES REPRESENTATIONS DU

« PARTICIPATIF » DES REPRESENTANTS DES SITES

INDEPENDANTS D'INFORMATION :

@RRETSURIMAGES ET MEDIAPART

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ANNEXES

7. Annexes

TABLE DES MATIERES DES ANNEXES

7.1. Retranscription de l'entretien avec Daniel Schneidermann (apres autorisation), vendredi 30/01/09, 15h15 dans les locaux d'Asi 93

7.2. Lexique 110

7.3. Présentation des sites du corpus

7.3.1. ArrFt sur images 114

7.3.2. Médiapart 116

7.4. Index des noms propres 118

7.5. Index analytique 122

7.6. Bibliographie 124

7.1. Retranscrip tion de l'entretien avec Daniel Schneidermann (apres autorisation), vendredi 30/01/09, 15h15 dans les locaux d'Asi

Durée approximative de l'enregistrement : 30 minutes.

Durée totale de l'entretien : 1 heure.

Pour une question de lisibilité, mes consignes et relances sont signifiées en gras et les hésitations sont remplacées par la mention ...... Certaines formulations parlées ont cependant été conservées.

Alors en guise d'introduction je voulais juste vous demander de me resumer en fait l'ambition du site Asi pour vous ?

Etre un site de réflexion en tant que tel et de critique sur les médias.

Et o] en etes vous selon vous par rapport a ce projet la ? Est-ce qu'il evolue ? Nous le poursuivons tous les jours.

Et est-ce que vous pouvez me parler des rapports que vous avez avec les médias traditionnels ? Comment est-ce qu'ils ont accueilli votre site ?

0n a des rapports d'informateurs a... enfin comment dire, de journalistes a source. Les médias traditionnels sont notre objet, d'enquête, d'investigation, d'analyse. Donc on enquête sur eux, on les analyse, on les critique et cette démarche détermine la totalité de nos rapports.

Par « determiner » vous entendez quoi ? C'est-à-dire qu'elle régit la totalité de nos rapports.

Et comment vous qualifieriez ces rapports ?

Comme je vous l'ai dit, des rapports de journalistes a source...a objet.

Est-ce que vous les qualifieriez de rapports de domination, conflictuels, amicaux... Si vous deviez donner un adjectif.

[soupirs] Et bien, je dirais que si je devais donner un adjectif je ne saurais pas
lequel donner, parce que si vous voulez c'est des rapports traditionnels du

journaliste a l'objet de son enquête. Nos rapports avec les médias traditionnels sont les même que ceux d'un journaliste politique avec le milieu politique, sont les même que ceux d'un journaliste économique avec les entreprises, sont les même que ceux d'un journaliste sportif avec Amélie Mauresmo, voila donc c'est des rapports de journalistes a son objet, c'est des rapports professionnels.

Professionnels, d'accord. Que pensez-vous qu'ils pensent de votre site ? Je pense pas qu'on puisse généraliser.

Sans faire une regle générale, sans citer forcément de nom non plus, a votre avis comme ca ?

Si vous me demandez comme ca, vous me demandez une loi générale.

Si vous voulez citer des exemples vous pouvez.

Si vous me demandez comme ca vous me demandez de généraliser. Par « comme ca » j'entendais un avis spontané, de...

D'être général !

Vous pouvez détailler des exemples si vous voulez ne pas tomber dans la généralité.

... Pour m'en tenir a leur expression publique, on a des gens des médias traditionnels qui nous sont extrêmement hostiles comme Morandini, on a des gens de médias traditionnels qui sont bienveillants envers notre travail, je pense notamment a Nicolas Demorand, qui a fait un édito sur France Inter il y a quelques semaines au moment du premier anniversaire du site pour expliquer a quel point il pensait que ce site était nécessaire et intéressant. Donc vous voyez, le panel va d'un extrême a l'autre et entre les deux il y a toute la gamme. De . ouai c'est des cons, donc ils nous emmerdent, c'est des empêcheurs de tourner en rond, c'est des redresseurs de tord etc.. a voila, toute la gamme.

D'accord, donc la vous me parlez sur le plan professionnel. [hochement de tête] D'accord.

Pouvez vous me dire ce qui vous a motivé a poursuivre le projet Asi sur Internet ? ... 1) que je croyais a l'utilité du travail et que j'avais envie de le continuer. 2) Ca m'excitait intellectuellement de continuer sur un support nouveau qui soit un site Internet et 3) la mobilisation des internautes qui s'est manifestée par la pétition de soutien et par le succès de [incompréhensible] préalable.

En quoi le support Internet vous - excitait . ?

Parce que ca permet de faire des choses que je n'avais jamais faites. ...Ca permet d'abord de manier a la fois l'écriture, l'audio et la vidéo, ce que j'avais jamais fait nul part. Et ca permet surtout de ne pas formater ses interventions, ce que ne permettent pas les médias traditionnels. Ma chronique, du Monde et de Libé, elle doit avoir un certain nombre de signes et pas plus ni moins. Sur France 5 elle devait faire 52 minutes. 0n pouvait déborder de 52min30 et elle devait pas déborder de son petit couloir. Donc... ca permettait de ne pas formater.

La troisième chose que permet Internet par rapport aux médias traditionnels c'est d'avoir un rapport différent avec son public. C'est-à-dire, d'être moins, de ne plus être enfin d'être, enfin de ne plus être tout a fait dans un rapport vertical, mais d'être dans un rapport d'échange horizontal. Ca je dirais que c'est complètement, enfin c'est la principale différence, c'est la principale différence.

Et comment vous définiriez la place des internautes sur votre site ?

... D'abord, je veux dire en dehors des espaces a disposition dans lesquels ils peuvent réagir aux contenus... dialoguer avec nous et on va beaucoup sur le site, on a tous les gens de l'équipe qui vont sur le site, c'est presque en permanence fourré sur le site en train de discuter avec les, sur les forums avec les internautes, et ensuite ils sont apporteurs d'idées. Il sont un apport d'idées extrêmement important. Eux-même nous signalent des choses dans les médias qu'on a pas forcément vu, parce qu'on peut pas tout regarder, tout lire.

Et parce qu'ils nous apportent parfois des idées qui sont liées a leur vie a eux. Il y a quelques jours, une de nos abonnée, qui est marocaine et qui avait en septembre, interpellé sur France Inter Hortefeux sur la difficulté qu'elle avait pour obtenir des papiers, nous a écrit pour dire voila ca fait depuis septembre que j'ai interpellé

Hortefeux, voila ce qui s'est passé depuis, ou plutot ce qui ne s'est pas passé. Voila on a fait un papier, je sais pas si vous l'avez lu_

Et bien ca c'est typiquement si vous voulez, nous ont a fait un papier et la discussion s'est poursuivie dans le forum entre elle et les lecteurs. C'est typiquement ce que permet de faire Internet et c'est typiquement la richesse d'Internet.

Et la est-ce que vous considérez que vous êtes encore dans la critique des médias ? 0ui. 0n est dans le, quand on, parce que si vous voulez le, « Les Auditeurs ont la parole » [« Inter-active »] la petite tranche de France Inter entre 8h40 et 9h oil les auditeurs peuvent appeler et interpeller les invités c'est une séquence médiatique. Avoir quelqu'un qui interpelle Hortefeux, Hortefeux qui répond : « Mais ca va s'arranger, écrivez-moi et je vais arranger le coup etc. » 0n est typiquement dans un projet médiatique. Le dialogue direct entre un citoyen et un Ministre sur une radio, on est typiquement dans ce produit médiatique. Quelles sont les suites donc de ce produit médiatique ? Quelles sont les suites de ce moment médiatique ? 0n est complètement chez nous là_ Vous ne pensez pas ?

Vous me répondez par une question...

Joker. Vous deviez etre très forte a Ni oui Ni non quand vous étiez petite.

C'est-a-dire que vous êtes journaliste, donc je comprends la difficulté pour vous de répondre a des questions sans en poser mais...

[rires] Vous deviez etre très très forte au Ni oui Ni non.

Effectivement. Donc, pour vous les internautes c'est : des sources, des coproducteurs, des récepteurs... Quel nom vous leur donneriez ?

Arf, des abonnés ! Quand je les appelle sur le plateau je dis les abonnés. Des fois, il y a un « les téléspectateurs » qui m'échappe, les internautes, les « asinautes », on les appelle « asinautes ». Voila, on utilise un peu indifféremment tous ces mots. Parfois sur le plateau j'en emploie un plutot qu'un autre parce que c'est celui qui me vient a ce moment la. Si vous me demandez la a froid comment je les appelle, le rapport qui nous lie a eux c'est celui d'abonnés !

D'accord. Mais le role en tant que tel que cette appellation entend ? Ben je vous l'ai dit réagir et suggérer !

D'accord.

Et bien d'abord lire ! Bien sur [rires]. D'abord lire, regarder, écouter. Et ensuite réagir et proposer.

Dans les forums... Et est-ce que vous pensez élargir leur espace d'intervention ? De quelle maniere ?

Par exemple, Dannette O'Choc ?

Ah oui, ca c'est pas qu'on pense le faire !

Ou par rapport a la ménagère...

Ca on le fait déjà, effectivement. Alors, je ne sais pas si vous le savez, vous l'avez sans doute remarqué, mais on a mis sur pied un système de vote sur les commentaires, ils peuvent voter et...

Une fois toute les 24h...

Et les 5 commentaires qui obtiennent le plus de votes tournent en permanence sur la home page. Ca c'est une maniere de leur donner plus de visibilité. Ca j'ai pas pensé a vous le dire, mais ca, c'est a mon sens tres important. Ca leur permet entre eux de décider lesquels des commentaires qu'ils font, doivent avoir une visibilité sur la Home, et quand moi ou quelqu'un de l'équipe trouve qu'il y a un commentaire qui mérite encore davantage, parce qu'il est spécialement éclairant, spécialement talentueux, spécialement bien écrit, spécialement interpellant, spécialement tout ce que vous voulez. En plus, on crée un contenu avec ce commentaire et on en fait un... Ca arrive rarement hein... Pas plus d'une ou deux fois par mois. Mais ca, je trouve ca important aussi, quand il y a un commentaire que je lis et que vraiment faudrait que tout le monde puisse lire ca, c'est dommage que ce soit paumé dans les profondeurs du forum. Donc voila, l'outil est vraiment indispensable.

Donc vous mettez du contenu d'un internaute dans un cadre reserve aux journalistes.

0ui, mais avec une petite signalisation quand même puisqu'on a crée une petite catégorie qui s'appelle . Dans les Forums >. 0n a une catégorie enquête, une catégorie observatoire, on a des catégories machin bidule et on a une catégorie 3 Dans les forums >. Donc voila je pense pas qu'il y ait d'ambiguïté, les abonnés savent bien qu'il s'agit d'un texte d'un abonné, qui vient d'un abonné.

Et vous citez le nom de l'abonne, enfin, son pseudo. 0ui.

D'accord. Par rapport aux autres sites comme Médiapart, Rue 89, tous les sites d'information qui se sont crées ces deux dernières années, quels sont les rapports que vous entretenez avec eux cette fois ci ?

Personnels ?

Au titre au quel vous l'entendez.

En fait, on traite les nouveaux médias comme les anciens, c'est-à-dire qu'on les considère comme des sources, comme d'habitude. C'est-à-dire aussi bien quand ils produisent un contenu qui nous paralt intéressant et quand ils leur arrivent des choses dans leur vie interne et qu'ils les communiquent, on les traite aussi, exactement comme s'agissant d'anciens médias.

A la fois ça, en même temps on les traite pas exactement comme d'anciens médias parce qu'il est clair qu'on se sent une parenté. 0n se sent avec eux une parenté d'aventure.

De part le media...

0ui. Peut-être qu'on regarde avec une intensité peut-être plus intense que les autres ce qui arrive a Rue89, a Médiapart, a Bakchich, ce qui arrive aux sites d'information. Bah, c'est humain ! En même temps bien que nous sentant cette parenté avec eux, on essaie de les traiter comme des objets d'étude, d'investigation, comme Le Figaro, France 2, France Inter.

Et qu'est-ce qui vous différencie ou au contraire vous rapproche d'eux ?

Ce qui nous rapproche c'est le média ! [rires] C'est des gens qui font de l'information sur Internet ! Et ce qui nous différencie c'est l'objet. C'est-à-dire que nous on n'est pas un site généraliste, on est un site sur les médias.

Et par rapport a leur modèle, leur structure ?

Bah, ce qui nous différencie des sites gratuits, c'est qu'on n'est pas gratuit. Ce qui nous différencie des sites qui font de la pub, c'est qu'on ne fait pas de pub. Ce qui nous différencie de Médiapart, c'est qu'on est moins cher.

[...] Et une autre chose qui nous différencie fortement par rapport a eux c'est, un de nos contenus les plus (...) vedettes, c'est l'émission hebdomadaire, personne ne fait ca.

D'accord. Avez vous déjà pensé a vous associer a eux autour d'un projet ou par rapport a un engagement ou quelque chose comme ca ?

... Rédactionnellement je ne le souhaite pas, je pense pas que ce serait bien. Il faut que chacun garde sa pleine indépendance. En revanche, professionnellement si vous voulez, pour défendre les intérêts économiques de nos médias en matières de charges sociales, tout ce qui concerne les intérêts proprement économiques de nos médias, je pense que ce serait envisageable et même souhaitable. De la même manière que si vous voulez, pour prendre l'exemple extrême, Le Figaro et L'Huma appartienne au même syndicat professionnel et quand il s'agit de discuter avec les pouvoirs publics les mesures d'aides a la presse par exemple, c'est le syndicat professionnel qui y va et qui négocie au nom du Figaro et au nom de L'Huma. Voila, même si Le Figaro et L'Huma : ok... Ils sont tous les deux des entreprises d'un même secteur, ils ont des intérêts communs a défendre si vous voulez et voila. De la même manière que dans le syndicat des télévisions privées on retrouve TF1, Canal+ et M6, qui par ailleurs se tirent la bourre en permanence. Dans le syndicat des banques on retrouve des banques concurrentes, voila. Ca me paraltrait pas choquant que les sites d'information est le même type de structure. Et si on me propose d'y participer, je dirais oui et peut être même qu'un jour oil l'autre on en prendra l'initiative.

Et par rapport aux Etats généraux de la presse, quelle position avez vous eu ? Et bien ca on l'a expliqué sur le site, on y est pas allé.

Vous avez été invité ?

[rires] Si déjà... Non mais je pense qu'on a pas été invité parce que dès le début, dès que le truc a été lancé, on avait clamé haut et fort qu'on trouvait ca insensé que ce soit le pouvoir politique qui se mette en tête de sauver la presse. Le pouvoir politique n'a pas a sauver la presse. ll n'a pas, si vous voulez a impulser une démarche qui mélange l'économique et le rédactionnel, comme c'est le cas de cette initiative. Et donc non nous, de toute facon non, on nous a pas demandé, mais si on nous avait demandé, on n'y serait pas allé.

Et par rapport a l'indépendance dont vous parliez tout a l'heure, comment la définiriez vous ? Quels sont les critères d'indépendance pour votre site ?

Et bien les critères c'est qu'on est indépendant par rapports a la pub, puisqu'on a pas de pub et on est indépendant par rapport a des complexes d'investisseurs, puisqu'on a pas d'investisseurs, puisqu'on tourne uniquement avec l'argent de nos abonnés. Donc... ca c'est deux formes d'indépendance importantes.

Après, ca ne veut pas dire que ca nous place dans une situation totale d'indépendance. 0n est dépendant de nos abonnés. Et au début d'ailleurs, certains ne se privaient pas de nous le faire savoir en nous laissant des messages [incompréhensible] quand ils étaient pas contents, ce qui arrive toujours, parce qu'il y a toujours des lecteurs qui ne sont pas contents d'un média. Et quand ils étaient pas contents, ils laissaient des messages : . Si c'est comme ca je me désabonne. Je regrette de m'être abonné. Je ne renouvellerai pas. Je veux me désabonner . etc. Ce qui m'a amené a un moment a mettre les choses au point avec eux. Et a leur dire vous êtes bien gentils, mais les patrons les nous ! Ceux qui font le site c'est nous ! 0n est dans une démarche de... de dialogue avec vous, de discussion avec vous dans les forums, d'appel a vos suggestions etc. mais en dernier ressort, ceux qui décident de ce qu'on met en ligne et de ce qu'on met pas en ligne c'est pas vous. Ceux qui choisissent les sujets c'est nous, c'est pas vous. Et, d'une part, et d'autre part, nous serons imperméables au chantage au

désabonnement, donc si on considère qu'on doit traiter un sujet ou pas le traiter, c'est pas parce qu'on aura 50 ou 100 messages dans le forums qui nous dirons . si vous faites ca je me désabonne ., c'est pas pour ca qu'on ne le fera pas. Et, je sais pas si ca a marché, mais je constate qu'effectivement passé quelques semaines le chantage a disparu. Bon, alors après si vous voulez, il y a des gens qui se réabonnent, il y a des gens qui ne se réabonnent pas, c'est leur choix d'abonnes. Voila.

Donc vous avez en quelque sorte posé les limites que de votre collaboration avec les internautes ?

0ui, on peut le dire comme ca.

(...)

A un moment vous aviez parler de fonder une association, est-ce que vous pouvez m'en parler ?

0ui... l'idee m'avait traversee en juin, on voyait le pouvoir multiplier les initiatives de taxation contre tout ce qui touchait aux sites Internet, les entreprises de l'Internet si vous voulez. Et a un moment j'avais dit bon, ca aurait ete une idee un peu voisine de constituer un syndicat professionnel avec les sites d'info. C'est de se dire...le pouvoir pourrait etre tente pour des mauvaises raisons, c'est-à-dire pour des raisons redactionnelles, de penaliser un certain nombre d'entreprises Internet. Ce serait peut-etre pas mal que ces entreprises se regroupent et cherchent un mode de reaction commune. Voila, bon ca n'a pas eu de suites, on a pas poursuivi a la rentree, parce que, parce que vous voyez on est tout petit, on est 8 donc on peut pas tout faire a la fois, il faut bien choisir oil est ce qu'on choisit d'investir notre energie. Et en meme temps, un certain nombre de ces projets du pouvoir n'ont pas eu de suites, donc l'urgence elle etait moins grande.

Et est-ce que vous vous considéré comme un site, le mot est un peu provocant, mais c'est choisi exprès, « militant » ?

Non, non.

Et dans quel sens avez-vous compris mon usage du mot « militant » ?

[réponse immédiate] Politique ! Et c'est pour ca que j'ai répondu non. En revanche si vous voulez, si militant veut dire qui milite pour que les consommateurs de médias puissent acquérir une certaine maitrise sur la manière dont ils consomment les médias. Ca oui, on milite pour ca, on milite pour rendre du pouvoir au public sur les médias. La on est un site militant, je sais pas si c'est comme ca que vous l'entendiez.

D'accord, est-ce que vous avez un médiateur, ou chaque rédacteur intervient directement.

[hochement de tête négatif, sourire]

D'accord. Non, je ne sais pas, on pourrait penser qu'il y a des reunions pendant les quelles vous trancheriez des questions...

Mais sur quoi ?

Par exemple sur la moderation du forum, les idées a retenir dans les suggestions de sujets...

Ah ben ca si vous voulez, oui c'est moi qui tranche comme dans toutes les rédactions. 0n débat, on discute, après sur les décisions a prendre quand il y a un désaccord dans l'équipe c'est moi qui tranche bien sur.

Et par rapport a votre deuxième interpretation du mot militant, est-ce qu'on pourrait la rapprocher de ce que fait par ailleurs Acrimed ou...

La différence entre eux et nous, c'est que eux sont militants et se revendiquent militants. Nous, on est des journalistes. Alors on est des journalistes avec des opinions et des sensibilités si vous voulez. C'est pour cette raison qu'on a crée des zones très distinctes sur le site : la zone des enquêtes et des reportages qui est la zone bleue et la zone des chroniques, qui est la zone rose. Pour bien dire, pour bien signifier aux abonnés : bleu c'est de l'enquête, c'est du fait, dans la zone rose les chroniqueurs du site alors la, les chroniqueurs ont toute liberté pour exprimer leurs opinions, leurs sensibilités, la manière dont ils voient personnellement les choses etc. mais finalement comme un peu dans n'importe quel média. Dans Le

Monde aussi vous avez des faits et des commentaires, et partout. Donc, on reproduit la meme chose.

Une certaine liberté de ton comme peuvent l'avoir les internautes dans le forum. Non, je ne dirais pas ca comme ca, parce que même dans le... ca voudrait dire que dans la zone bleue il n'y a pas de liberté de ton. Alors que si, il y a aussi une liberté de ton dans la zone bleue. Et comme disent les journalistes, on sépare les faits des commentaires, enfin, on essaie.

Et quelle distinction faites vous entre les informateurs professionnels et d'autres qui peuvent ne pas 'etre professionnels dans le sens de la remuneration mais qui... Alors, allez-y, posez votre question, je sens que ca pourrait etre un peu long.

Oui et pas preparee.

Mais je sais bien, c'est pour ca.

Dans le sens ou, en quoi vous, vous placez en tant que journaliste professionnel ? Du fait de votre carrière, de votre formation ? En quoi, finalement, votre information a plus de valeur qu'une information fournie sur des blogs etc. ?

Non, je ne dirais pas plus ou moins de valeur, parce que ca ce serait dévalorisant pour les autres. Elle est produit selon des critères journalistiques, c'est-à-dire que ce qu'on fait nous, on l'a vérifié, recoupé autant que possible auprès de sources contradictoires et on publie uniquement une fois que ce travail est fait. C'est la base pour moi de la production journalistique. Les pages personnelles etc. on est dans un autre univers, on est dans l'univers de l'expression personnelle, dans l'univers du témoignage, on est pas dans un univers qui impose par exemple de vérifier quoi que ce soit. Les gens qui font des pages personnelles ne vérifient rien, on ne leur demande pas d'ailleurs. Nous, on vérifie. C'est ce qui fait, si vous voulez je pense que, c'est ce qui fait la gosse différence entre l'expression des journalistes professionnels sur le Web ou ailleurs et puis les sites personnels, les blogs, les pages perso.

Vous ne placez donc pas le curseur par rapport au fait que ce soit payant ou non.

Que ce soit payant c'est une conséquence. Que ce soit payant c'est une conséquence, puisque vérifier c'est un travail, donc ca suppose des professionnels pour faire ce travail a plein temps. Tous les jours, du matin au soir si vous voulez. Et a partir du moment oil c'est un métier il faut payer les gens. Donc, c'est, comment dire, c'est pas parce que c'est payant que c'est professionnel, c'est parce que c'est professionnel que c'est payant.

Et par rapport aux vérifications qui s'opèrent de la part les internautes par rapport a votre offre d'information, comment vous voyez ca ?

C'est l'un des avantages d'Internet, c'est que quand on se plante, ce qui peut nous arriver en dépit de toutes nos précautions et de tout notre professionnalisme qui est immense. Quand on se plante, et que les internautes nous rectifient, ce qui arrive a peu près tous les jours, sur des dates, sur des orthographes, sur des coquilles, parfois sur des faits, ben on rectifie. D'abord, on vérifie la rectification, parce qu'il peut arriver que la rectification ne soit pas pertinente. Et si la rectification est pertinente, et bien on rectifie le contenu. Ben ca c'est Internet, je vous apprends rien.

Donc en la matiere c'est un peu des collaborateurs ? Ponctuels.

Ok. Je pensais que vous parleriez tellement plus donc euh, je suis un peu prise au dépourvu.

Et oui, je suis un gros gibier, résistant. Et très occupé.

Dans ce cas la le - format . vous convient ? J'allais le dire.

Remerciements et fin de l'entretien enregistré.

7.2. Lexique

Agrégateur : site Internet permettant a un internaute de consulter de maniere synthétique et regroupée les informations des sites qu'il aura au préalable syndiqués.

Blog : espace personnel de publication Web présentant de maniere antechronologique les posts, ouverts ou non aux commentaires. Simples d'utilisation et hébergés sur une plate-forme de publication (exemple : skyblogs, blogspot...), les blogs sont souvent assimilés a des « pages personnelles », mais leurs sujets couvrent tous les domaines et ils peuvent etre tenus collectivement.

« Le mot - blog . est de creation recente. Faisant echo a la pratique du journal de bord traditionnellement tenu par les capitaines de navires (ship's log), la forme a d'abord ete designee par le mot - weblog ., rapidement transforme en - blog .. Cette abreviation a elle-meme ete particulierement feconde, produisant une forme verbale reguliere (to blog) et de nombreuses formes nominales, dont le neologisme blogosphere qui fait reference non seulement a l'ensemble des textes publies sous ce format, mais encore aux liens dynamiques crees entre differents blogs par la pratique du referencement reciproque a l'aide de liens hypertextes. »142

Buzz : (onomatopée anglais signifiant « faire du bruit ») Principe marketing reposant sur la transmission virale d'un message suite a sa diffusion sur plusieurs canaux. Ce « bruit . attire l'attention de quelques uns, volontairement ou non, et va se propager comme une rumeur a une vitesse exponentielle (plus on en parle, plus on en parle), jusqu'à l'adoption d'un terme, d'un message, d'un usage par le plus grand nombre.

Buzzword : mot « a la mode ., notamment dans le domaine des NTIC, qui n'a pas forcément d'origine ou de définition précise et renvoyant au phénomene du buzz. Crowdsourcing (pouvant etre traduit par « approvisionnement par la foule) :

néologisme inventé en 2006 par Jeff Howe et Mark Robinson de Wired Magazine. Ce concept désigne le phénomene d' « outsourcing . (sous-traitance) de tfiches ne

142 SERFATY Viviane, "Les blogs et leurs usages politiques lors de la campagne présidentielle de 2004 aux Etats-Unis ., in Mots, les langages du politique, n°80, mars 2006, http://mots.revues.org/index501.html?file=1

constituant pas le coeur de l'activité de l'entité faisant appel au travail mutualisé de nombreux internautes dans le but de les réutiliser a moindre coat.

Digital native : néologisme (to be a native from signifie en anglais . etre originaire de ») relatif a la génération ayant grandie avec les nouvelles technologies numériques, qui lui sont familières et qu'elle utilise avec facilité et de manière privilégiée.

Foules intelligentes : Concept développé par Pierre Levy et Howard Rheingold. . individus capables d'agir ensemble sans se connaltre143 », car associés via de nouvelles formes de contrats sociaux permises par une technologie.

Flux RSS : RSS signifie . Really Simple Syndication ». Il s'agit d'un outil de flux de données basé sur le langage XML, qui permet de syndiquer et de diffuser très facilement du contenu sur Internet.

Freerider : A rapprocher de la notion de . passager clandestin » du socioéconomiste américain Mancur 0lson dans son ouvrage de 1965, Logique de l'action collective. Cela correspond a la tentation de ne pas participer tout en profitant des contributions des autres en misant sur le fait que le reste de la communauté continuera de le faire.

Home page : page d'accueil d'un site.

Long tail (longue tralne) : 0n appelle . longue tralne » la partie a droite de la courbe de Pareto qui tend vers l'infini. La longue tralne des produits culturels désigne tous les biens qui ne font pas partis des meilleures ventes, mais qui trouvent néanmoins des acheteurs.

NTIC (ou TIC) : abréviation de . Nouvelles technologies de l'information et de la communication » regroupant communément les télécommunications, l'informatique et l'Internet.

143 Ibid, p. 16.

Peer to Peer : le . pair a pair > désigne une classe d'applications informatiques dédiées a la mutualisation de ressources et l'échange de fichiers.

Podcast : fichiers musicaux qui présentent l'avantage de pouvoir être agrégés facilement sur d'autres sites Internet ou téléchargeables (en général gratuitement) dans un lecteur (Itunes...) et sur un baladeur numérique en format mp3.

ost : terme anglais désignant une publication web, un billet de blog par exemple.

Pure player : entreprise concentrant son activité et son expertise sur un seul secteur spécifique (pas forcément celui de l'Internet).

Syndication : mise a disposition de tout ou partie du contenu d'un site a d'autres sites de maniere payante ou non.

Tag (. étiquette >) : procédé qui permet aux Internautes de choisir les mots clés désignant leur publication, facilitant ainsi leur archivage et leur recherche. Cette méthode releve de l'indexation des contenus par les auteurs eux-mêmes.

Troll : Personne cherchant a créer la polémique dans un espace participatif (wiki...), afin de l'enrayer en tenant des propos provocants, caricaturaux, non reliés au sujet ou répétitifs.

UGC (User Generated Content) : désigne les contenus publiés sur le web par les Internautes eux-mêmes. Ces publications amateurs sont en général d'acces libre et gratuites, mais leur utilisation est souvent protégée par le label Creative Commons. Le terme englobe les publications de toute nature (multimédia) publiables sur les blogs, sites participatifs et plates-formes de partage.

Web 2.0 : concept attribué a Dale Daugherty (fondateur d'une maison d'édition
informatique 0'Reilly Media) lors d'un conférence en 2004. Ce concept n'est pas
clairement défini, mais se base sur l'évolution d'Internet, depuis un modèle

statique de base de donnees (web 0.1) a un reseau plus interactif centre sur l'utilisateur et permettant sa participation active. Ce phenomène brouille donc la limite entre le statut d'emetteur et de recepteur (read-write web, crowdsourcing...) et le rapport hierarchique qu'il implique. Cela comprend aussi davantage d'inter-connections entre les sites selon une structure en reseaux et un principe confiance mutuelle entre internautes. Le web etant en evolution constante, la definition de web 2.0 est mouvante et d'aucuns pensent qu'il s'agit uniquement la d'un concept depasse, voir creux. « Wikipedia » (site participatif par excellence) en donne la definition suivante :

« L'evolution ainsi qualifiee concerne aussi bien les technologies employees que les usages. En particulier, on qualifie de web 2.0 les interfaces permettant aux internautes d'interagir a la fois avec le contenu des pages, mais aussi entre eux, faisant du web 2.0 le web communautaire et interactif. >>144

Web 3.0 : notion sans definition exacte, qui se confond avec celle de « web semantique » et du « web contextuel », c'est-à-dire que le navigateur aurait suffisamment d'informations (contenu du site visite, sur l'historique de navigation, les flux RSS...) sur les intentions sous-jacentes de la navigation de l'internaute pour lui proposer des donnees plus adaptees et eviter une recherche extensive. Cela se base sur le principe de savoir ce que l'internaute fait reellement plutot que la recherche qu'il opère pour la personnaliser et lui permettre d'être ainsi plus efficace. Cette phase est basee sur le sens de l'action davantage que sur la masse de contenus, en structurant la navigation a partir d'inferences entre les sites.

Webzine (definition de Franck Rebillard) :

« journal publie exclusivement sur Internet, sans declinaison dans l'imprime ou l'audiovisuel. Contraction possible des termes web et fanzine comme des termes web et magazine, le webzine s'inscrit corollairement soit dans les logiques de l'information - alternative >> et amateur, soit plutot dans le modele mass-mediatique. >>145

144 http://fr.wikipedia.org/wiki/Web_2.0

145 - REBILLARD Franck, Web 2.0 en perspective. Une analyse socio-économique de l'internet, Paris, L'Harmattan, coll. Questions contemporaines, serie Les Industries de la culture et de la communication, 2008, p. 149.

7.3. Presentation des sites du corpus

7.3.1. Arretsurimages

Arretsurimages.net prolonge l'émission animée par Daniel Scheidermann et produite par Carrere group entre 1995 et 2007 sur France 5. Date a laquelle la Direction de la chalne annonce ne pas reconduire cette émission de relecture des images télévisées a la rentrée. Claude-Yves Robin (Directeur Général de France 5) justifie cette décision par le vieillissement de l'émission et l'érosion de son audience qui est passée de 7,3% en 2003 a 5,9% en 2007. Puis, le 30 juin 2007, Daniel Schneidemann est licencié pour faute grave, a savoir : pour avoir mené 3 une campagne de dénigrement a l'encontre des dirigeants de la chaine et du groupe (France télévisions) allant jusqu'a des attaques personnelles envers son président Monsieur Patrick de Carolis dans le but de faire pression . et sousentendu que l'arret de son émission résultait d'une . vengeance >. ll avait notamment affirmé dans une interview accordée le 17 juin 2007 au Journal du

dimanche : « Pour tout dire, la direction est nulle, c'est tout.146 » Des pétitions (« Pour préserver la diversité du paysage audiovisuel français147 », 185 000 signatures) et des appels a soutien de la part d'organisations syndicales, associatives (ATTAC, FSU...) et de personnalités politiques sont lancées et décident l'équipe éditoriale a continuer son émission sur le web avec le lancement d'un site provisoire en septembre 2007 appelant au pré-abonnement.

La version définitive du site Arret sur images, également évoqué sous l'abréviation « @si », est lancée en le 7 janvier 2008. Le site est exploité par la société par actions simplifiées, dirigée par Daniel Schneidermann (actionnaire unique), et a pour but de mener une analyse critique du traitement médiatique de l'actualité s'étendant désormais a tous les types de supports148.

Son équipe est composée de la manière suivante : Daniel Schneidermann (producteur et animateur), Francois Rose (réalisateur), Julie Guilbault (chef de projet), Thomas Scotto (webmaster), Sophie Gidensberger, Dan Israel, Gilles Klein (journalistes), David Abiker, Gilles Klein, Judith Bernard, Alain Korkos, Anne-Sophie Jacques, Sébastien Bohler, Daniel Schneidermann et Gilles Klein (chroniqueurs), Justine Brabant et Aurélie Windels.

Le contenu du site est réservé a ses abonnés (30 euros par an), a l'exception de sa zone orange « Vite dit et gratuit ». Le site propose des chroniques, dossiers d'actualité , un forum et des émissions. Ces dernières (La ligne jaune, présentée par Guy Birenbaum et Dans le Texte présenté par Judith Bernard, chroniquée par Frédéric Ferney et Eric Naulleau) se sont développées a partir de l'émission de débat hebdomadaire et de la création d'Arrêtsurimages.tv (Canal 94 de la Freebox) lancée le 1er décembre 2008149 (2,50 euros par mois et accessible en clair de 21h30 a 23h30). La chalne compterait environ 1,200 abonnés et 11,000 des 24,000 clients du site avaient renouvelé leur abonnement. L'émission est accessible sur podcast depuis septembre 2008 et une version pour i Phone de l'émission sera lancée courrant 2009. Selon Daniel Schneidermann :

« la chaine ne remplacera pas le site, il s'agit de deux offres distinctes.

Arretsurimages.net reste le noyau de l'entreprise. Avec Internet, on n'est

146 http://www.lejdd.fr/cmc/media/200724/schneidermann-pas-du-bluff_29382.html

147 http://www.arretsurimages.eu/index.php

148 http://www.arretsurimages.net/a-propos.php

149 GR0NDIN Anaëlle, "Daniel Schneidermann : 0n va développer l'outil en fonction de la demande », L'Humanité, 23 janvier 2009, http://www.humanite.fr/2009-01-23_Medias_DanielSchneidermann-0n-va-developper-l-outil-en-fonction-de-la

plus dans un rapport vertical o] le journaliste ecrit et le lecteur lit. Une grande partie du contenu est suggeree par les internautes. Ils l'enrichissent, ils nous signalent des videos, des informations, des intox. On est la pour faire le tri et pour enquêter. Je pense que ce mode de production de l'information, c'est l'avenir. Internet a definitivement casse le rapport traditionnel entre le journaliste et son public.15° 4

Le développement des différents supports d'accessibilité aux contenu d'@si
relèverait d'une stratégie de . délinéarisation *151 afin de les rendre plus visible.
Dans l'extrême, Daniel Schneidermann affirme même dans la même interview que :

3 Si demain TF1 - je prends un cas extrême - vient me voir et dit : je veux reprendre Arrêt sur images, j'y réfléchirai. Le noyau de l'entreprise resterait tout de même le site. Mais a priori je ne peux pas refuser. .

150 Ibid.

151 Stratégie de déclinaison, visant a proposer son produit sur différents supports afin de permettre une consommation différée (exemple les . catch up tv . sur Internet pour les chaines de télévision).

7.3.2. Médiapart.fr

7.3.3. Le site de Médiapart a été fondé le 16 mars 2008 par : Edwy Plenel (ancien directeur de la rédaction du journal Le Monde, actuel Président de la SAS Société éditrice de Madiapart), Francois Bonnet (ancien chef du service international du Monde, Directeur éditorial de Médiapart), Gérard Desportes (ancien notamment de Libération et de La Vie, journaliste politique a Médiapart), Laurent Mauduit (ancien rédacteur en chef au Monde, journaliste économique a Médiapart), Godefroy Beauvallet (chercheur a l'école des télécommunication de Paris) et Marie-Hélène Smiéjan (gestionnaire, Directrice Générale de Médiapart).152 Les six fondateurs détiennent la majorité de capital de départ de 4 millions d'euros, complétée par des < investisseurs partenaires [...] sans lien avec les puissances financières en place . et une Société des amis de Médiapart (46 membres).

Selon . Le Projet ., mis en ligne le 2 décembre 2007 en guise de note d'intention sur le site temporaire de Médiapart, l'ambition du futur journal est de fournir une information de référence répondant aux critères de . [...] qualité, [d]'indépendance, [de] pertinence, [d]'exclusivité. >153 Est ainsi prévu de faire la part belle a l'enquête et l'investigation sur la base d'une équipe de 26 journalistes professionnels et référencer le « Meilleur du web». Parallèlement a cela, le pré-

152 http://electronlibre.info/Mediapart-crie-victoire-bien-tot,153

153 http://www.mediapart.fr/files/u1/LeProjet.pdf

site (ayant pour but d'enregistrer des abonnements par anticipation et de faire connaitre le projet Médiapart) expose :

3 Media participatif de qualite, notre journal ambitionne de construire un public de lecteurs contributeurs, dessinant les contours d'une communaute intellectuelle qui, avec ses interventions et ses echanges, proposera "le meilleur du debat? >.

Le réseau Internet est présenté comme un espace médiatique permettant de fonder un journal d'information généraliste indépendant grace a de faibles coats de structure, de séduire les 20/30 ans, d'être . mobile . et interactif. D'oil le nom du site qui relève aussi bien de la fusion entre les mots médias et participation, que média et a part (sa marque avait d'ailleurs été source d'un litige avec le groupe d'édition Média Participation en raison de la proximité du nom des deux sociétés). Médiapart se revendique ainsi :

. Ni sous-produit numerique de la presse papier, ni media de complement des titres existants, le reve que nous caressons est la creation d'un journal en ligne, de qualite et de reference, qui se suffise et vous suffise. .

Le contenu rédactionnel du site est accessible pour 9 euros par mois, mais l'accès au . Club . est libre (bien que la participation a la plate-forme interactive requière un abonnement). L'équilibre économique serait atteint avec environ 65000 abonnés, or le site en comptait moins de 15 000 en décembre 2008 alors que son ambition était d'en atteindre 25 000 a la même période154. Le parti était pris d'être le premier site . pure player . d'information généraliste, afin de conserver une indépendance vis-à-vis de la publicité et pouvoir constituer une identité éditoriale forte permettant l'émergence d'un lectorat . fidélisé et investi >. Cette démarche s'inscrit contre la . fausse gratuité . d'Internet, mais ne se déclare pas en opposition avec la culture du libre (Médiapart utilise un protocole libre) et le journalisme citoyen représente de « formidables apports », sans valoir un travail journalistique d'enquête.

L'équipe d'une trentaine de personnes est composée de 26 journalistes professionnels, qui s'occupent des trois éditions quotidiennes (9h, 13h et 19h) ainsi que de la modération et l'animation du Club et des éditions participatives. Ce dernier compte plus de 300 blogs tenus par des journalistes et des abonnés.

154 http://serge-briere.over-blog.com/article-26148409.html

7.4. Index des noms propres

ABIKER David, p. 108, 119, ALTMAN Rick, p.14,

ANDERSEN Chris, p. 39,

BALLE Francis, p. 11, 20, BEAUVALLET Godefroy, p. 110, 119, BERARDI Franco, p. 24,

BERNARD Judith, p.108, 119,

BEY Hakim, p. 25, 26, 27, 28, 29, 86, BIRENBAUM Guy, p. 50, 108, BL0NDEAU 0livier, p. 24, 78, 79, B0HLER Sébastien, p. 108,

B0UVIER Jerome, p. 40,

BRABANT Justine, p. 108, BUSH Georges, p. 46,

DEM0RAND Nicolas, p. 92 DUFRESNE David, p. 32, 62, DU PIN Eric, p. 45,

EDM0NDS Rick, p. 53,

FERNEY Frederic, p. 108

FIEVET Cyril, p. 33,

FILL0UX Frederic, p. 9,

FLICHY Patrice, p. 14, 29, GIDENSBERGER Sophie, p. 108, GL0AGUEN Laurent, p. 50, GUATTARI Felix, p. 22, 24, 27, 86,, HASKI Pierre, p. 40, 51, 52,

HEFEZ Serge, p. 69,

H0RTEFEUX Brice, p. 93, 94, Hurluberlu, p. 74, 81,

JACQUES Anne-Sophie, p. 108, JENKINS Henry, p. 54, 55,

KLEIN Gilles, p.108,

K0RK0S Alain, p. 108, LACAMBRE Valentin, p. 32, LEVY Pierre, p. 54, 104 LEVY Steven, p. 29

LE G0FF Samuel, p. 69 LEPERS John Paul, p. 20 MARQUIS Eric, p. 48,49 MAUDUIT Laurent, p. 110, MAURESM0 Amélie, p. 92,

MENDES-FRANCE Tristan, p. 44, 62, 68, 69, 71, 77,

MIEGE Bernard, p. 13, M0RANDINI Jean-Marc, p.92, NARVIC, p. 9, 42, 47, 50, NAULLEAU Eric, p. 108, 0'REILLY Tim, p. 41, 105, PECQUERIE Bertrand, p. 41, PLENEL Edwy, p. 86, 110, PRINCE Bernard, p. 24, PR0ULX Serge, p. 13,

RAB0Y Marc, p. 10, 11, RATHER Dan, p. 46,

RHEING0LD Howard, p. 30, 31, 39, 41, 104,

RICHE Pascal, p. 75,

R0BIN Claude-Yves, p. 107, R0SE François, p. 108, RUELLAN Denis, p. 50, 51,

SCHNEIDERMANN Daniel, p. 7, 8, 62, 63, 67, 68, 73, 74, 77, 78, 79, 86, 91, 108, 109,

SC0TT0 Thomas, p. 108, SERFATY Viviane, p. 46, 47, SHIRKY Clay, p. 9, 38, 40, 53, 77,

SMIEJAN Marie-Hélène, p. 110,

TRUFFY Vincent, p. 7, 59, 62, 63, 64, 65, 66, 68, 69, 70, 71, REBILLARD Franck, p. 2, 3, 9, 11, 17, 18, 19, 20, 22, 24, 27, 29, 106, VANBREMEERSH Nicolas (Versac), p. 47, 50, 69,

VID0CQ Emmanuel, p. 24,

WELLMANN Barry, p. 43,

WINDELS Aurelie, p. 108.

7.4. Index analytique

activiste, p. 2, 37, 58, 86, 87,

agrégateur, p. 3, 40, 41, 103,

Arret sur images / Asi, p 7, 22, 34, 60, 74, 78, 79, 80, 82, 84, 85, 88, 90, 91, 93, 94, 109,

Blog / blogger / blogosphère, p. 9, 13, 16, 17, 20, 29, 30, 35, 44, 45, 46, 47, 50,

53, 58, 62, 64, 68, 69, 71, 76, 81, 82, 84, 87, 101, 103, 105, 111,

Collaboration, p. 5, 9, 17, 29, 33, 34, 56, 68, 75, 77, 81, 84, 86, 99,

Communaute, p. 4, 9, 30, 31, 41, 42, 43, 44, 45, 64, 68, 73, 79, 81, 84, 87, 104, 107, 111,

crowd sourcing, p. 68, 72, 80,

Daniel Schneidermann, p. 7, 8, 62, 63, 67, 68, 73, 74, 77, 78, 79, 86, 91, 108, 109, 120

dispositif communicationnel, p. 13, 18, 23, 24, 28

Felix Guattari, p. 22, 23, 27, 86

Franck Rebillard, p. 2, 9, 11, 14, 17, 18, 20, 22, 24, 27, 29, 106,

Howard Rheingold, p. 30, 39, 43, 54, 104

médias de masse, p. 1, 2, 4, 10, 11, 22, 26, 34, 46, 78

médias traditionnels, p. 4, 5, 18, 20, 21, 22, 25, 34, 35, 45, 46, 47, 52, 55, 62, 69, 76, 85, 86, 91, 92, 93,

Médiapart, p. 4, 7, 22, 32, 34, 45, 46, 57, 60, 62, 63, 64, 65, 66, 68, 69, 70, 80, 81, 82, 84, 85, 89, 96, 97, 110, 111

Moderation, p. 8, 59, 62, 65, 66, 72, 81, 84, 100, 111

0rganisation, p. 3, 13, 16, 17, 25, 26, 38, 39, 40, 43, 64, 77, 78, 84, 86, 87, 108,

3 participatif ., p. 1, 4, 5, 6, 7, 8, 17, 18, 20, 21, 22, 29, 30, 34, 35, 36, 37, 40, 51,

55, 56, 57, 58, 59, 60, 61, 62, 63, 69, 72, 73, 74, 75, 84, 85, 86, 87, 88, 89, 105, 106, 111

pure players, p. 4, 5, 17, 18, 22, 32, 33, 35, 60, 62, 69, 76, 86

representation, p. 4, 5, 7, 9, 14, 21, 22, 35, 37, 38, 55, 56, 57, 58, 61, 72, 76, 83, 84, 85, 87, 89,

reputation, p. 29, 30, 42, 43, 44

réseau, p. 1, 2, 3, 4, 11, 16, 17, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 31, 32, 34, 39, 43, 44, 87, 106, 111

sites indépendants d'information, p. 5, 7, 9, 10, 16, 18, 21, 35, 37, 55, 56, 60, 62, 69, 76, 84, 116

UGC (User Generated Content), p. 5, 8, 13, 19, 38, 42, 48, 51, 52, 55, 67, 68, 69, 77, 79, 80, 81, 84, 105

Vincent Truffy, p. 7, 59, 62, 63, 64, 65, 66, 68, 69, 70, 71,

web 2.0, p. 1, 3, 4, 8, 9, 20, 27, 28, 35, 37, 43, 52, 58, 76, 79, 85, 86, 105, 106 web journaliste, p. 4, 5, 35, 37, 44, 55, 57, 59, 61, 64, 72, 75, 76, 77, 79, 82, 83, 84, 85, 87, 88

webzine, p. 18, 31, 32, 33, 34, 58, 62, 106

7.5. Bibliographie

Livres :

- BESS0N Eric, La Republique numerique, coll. Essai, Paris, Grasset, 91 p.

- BLANCHET Alain Et G0TMAN Anne, L'Entretien. L'Enquete et ses methodes, coll. 128, Paris, Armand Colin, 2007, 125 p.

- BL0NDEAU 0livier, Devenir media : l'activisme sur Internet entre defection et experimentation, Paris, Amsterdam ed., 2007, 320 p.

- FAY0N David, Web 2.0 et au-dela : nouveaux internautes : du surfeur a l'acteur, Paris, Economica, 2008, 191 p.

- F0GEL J.F, PATIN0 B., Une Presse sans Gutemberg, Paris, Grasset, 2005.

- JAUREGUIBERRY Francis et PR0ULX Alain, Internet, nouvel espace citoyen ?, Paris L'Harmattan, 2003, 249 p.

- GRANJ0N Fabien, L'Internet militant, Rennes, Apogee, 2001, 189 p.

- GREFFE Xavier et S0NNAC Nathalie (sous la direction de), Culture Web. Creation, contenus, economie numerique, Paris, Dalloz, 2008, 886 p.

- J0ANNES Alain, Le Journalisme a l'ere electronique : outils et methodes au service de l'information, mieux utiliser l'informatique et les reseaux, optimiser forme et contenu, Paris, Vuibert, 247 p.

- J0DELET Denise (sous la direction de), Les Representations sociales, Paris, PUF, 1999, 447 p.,

http://66.102.1.104/scholar?hl=frEtlr=Etq=cache:bS1BmmtbyskJ:classiques.uqac.ca /contemporains/jodelet~denise/folies~representations~soc/folies~representations~ soc.doc+author:%22Jodelet%22+intitle:%22Les+repr%C3%A9sentations+sociales%22+

- LESSIG Lawrence, Culture Libre, comment les medias utilisent la technologie et la loi pour confisquer la culture et controler la creativite, en telechargement libre sur readwriteweb.fr, 128 p.,

http://fr.readwriteweb.com/wp-content/uploads/Culture~LibreLawrence~Lessig.pdf

- PLENEL Edwy, Combat pour un presse libre, Paris, Galaade, coll. Auteur de vue, 2009, 53 p.

- P0ULET Bernard, La Fin des journaux et l'avenir de l'information, Paris, Gallimard, 2008, 217 p.

- R0SNAY Joël(de), La Révolte du pronétariat, des mass media aux média de masse, Paris, Fayard, 2006, 250 p.

http://www.agoravox.fr/pronetariat/ Pronetariat.pdf

- RUFFIN François, Les Petits Soldats du journalisme, Paris, éd. Des Arènes, 2003, 250 p.

- SASSAN Rémi, Les Utopies posthumaines : contre-cultures, cyber cultures et cultures du chaos, Sophia Antipolis, 0minisciences, 2005, 287 p.

- REBILLARD Franck, Web 2.0 en perspective. Une analyse socio-économique de l'internet, Paris, L'Harmattan, coll. Questions contemporaines, série Les Industries de la culture et de la communication, 2008, 158 p.

- RHEING0LD Howard, Foules intelligentes, Pais, M2 Ed, 2005, 300 p.

- . Sciences des médias : jalons pour une histoire politique ., Journées d'études et de recherches inter-disciplinaires sur les médias en Europe, dirigé par GE0RGAKAKS Didier, 2001, 250 p.

- VANBREMEERSCH Nicolas, De la démocratie numérique, Paris, Le Seuil, coll. Médiathèque, 2009, 204 p.

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- FLICHY Patrice, . Utopies et innovations, le cas Internet ., Sciences humaines, hors série n°16, p 64-67.

- GAG0 Laurent, . La rumeur et les sites d'information alternatifs. Approches des postures de réception ., Les Cahiers du Credam, n°4, 0ctobre 2004, p.49-54.

- GANS0LLEN Michel, . La Création de la valeur sur Internet ., Réseaux, n°97, 1999, p.15-76.

- H0LMES Brian, QUERRIEN Anne, VIDEC0Q Emmanuel, « Les trois plis du média activisme », Multitudes, dossier « Majeure. Subjectivation du Net : post-média, réseaux, mise en commun ., n°21, été 2005, http://multitudes.samizdat.net/Lestrois-plis-du-media-activisme, mis en ligne le 31 mai 2005.

- MAURIAC Laurent, « L'Apartheid journalistique ., Libération (cahier multimédia), 12 décembre 1997, p.1.

- REBILLARD Franck, « Webzines, e-zines : quels nouveaux médias ? », Médiamorphoses n° 21, ?. p.57-62.

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- « Les journalistes ont-ils encore du pouvoir ? ., Hermes n°35, 2003.

- « Web 2.0 ? Culture numérique, cultures expressives ., Médiamorphoses n°21, Septembre 2007, INA, Armand Colin.

- « Nouvelles Réflexions sur l'Internet ., Réseaux, n°124, 2004.

- « Technique et imaginaire ., Réseaux, n°109, 2001.

- « La Démocratie sous contrôle médiatique ., Pouvoirs, n°119, 2006.

- « Au Moyen 0rient, les blogueurs font de la résistance », The Christian Science Monitor, Le Courrier International, 24 novembre 2005.

- "Bob Greenberg on web 2.0's impact", Adweek, January 1st, 2007, http://www.rga.com/assets/attachments/51.pdf (résumé de la chronologie des phases du Webet deux conseils pour les agences créatives mises a mal par la concurrence du Web2.0).

- VANDEND0R PE C., « Internet, le média ultime ., Le Débat, mars/avril 2006, p.135.

Sites web:

http://www.arretsurimages.net/index.php

http://www.mediapart.fr/une

http://www.rue89.com/ http://www.radiofrance.fr/chaines/france-culture2/emissions/place~toile/ http://www.lemonde.fr

http://www.agoravox.fr/

http://www.bakchich.info/

http://www.aqit.org/

http://www.observatoiredesmedias.com/

http://www.acrimed.org/ http://www.canalu.tv/canalu/producteurs/universite~de~tous~les~savoirs~au~lyce e/dossier~programmes/utls~au~lycee~2007/l~avenir~de~l~internet~~1/l~avenir~de ~l~internet~jacques~francois~marchandise

http://www.ted.com/

http://atelier.rfi.fr/

http://www.internetactu.net/

http://fr.readwriteweb.com/

http://www.laquadrature.net/

http://www.causeur.fr/

http://www.lecourant.info/

http://www.observatoiredesmedias.com/

http://www.leplanb.org/

Blogs :

http://pisani.blog.lemonde.fr/ (transnet, Francis Pisani) http://www.presse-citron.net/ (Eric Dupin) http://blog.socialmedia.com/the-death-of-web-20-is-greatly-exaggerated/ (19/01/09)

http://www.my-os.net/blog/ (Etienne Mineur, graphiste) http://www.jeanfrancoisgervais.com/

http://affordance.typepad.com/ (0livier Ertzscheid, maitre de conférence en sciences de l'information).

http://www.bigbangblog.net/ (blog fondé en 2005 par Daniel Schneidermann, Judith Bernard et David Abiker, progressivement abandonné a partir de septembre 2007 au profit du site d'@si).

http://ic.fing.org/texts/niveaux-d-implication (Fondation Internet Nouvelle

Génération, Groupe de réflexion sur l'intelligence collective animé par Godefroy Beauvallet et Philippe Durance. Quels aspects influencent le développement de l'intelligence collective, interaction entre le groupe, les individus qui la composent et son environnement).

http://fr.wikipedia.org/wiki/Web_2.0 (la auto-définition du Webparticipatif par les internautes contributeurs eux-même des termes qu' . ils . concoivent). http://www.nowhereelse.fr/

http://www.themediatrend.com/wordpress/, Marc Mentre http://www.shirky.com/weblog/, Clay Shirky

http://egoblog.net/, Tristan Mendès France

http://www.davduf.net/, David Dufresne

http://novovision.fr/, Narvic

http://www.mondaynote.com/, Jean-Louis Gassée et Frédéric Filloux http://www.mikiane.com/user/575/edit

Communautés de partage de liens et agrégateurs de contenus : http://aaaliens.com/

http://digg.com/

http://delicious.com/popular/

http://www.metafilter.com/

http://cozop.com/

Ressources multimédias :

- Chronique d'Amaury de Rochegonde, . Médias grand angle ., France Info, 28/12/08, . Les Sites indépendants de plus en plus référents ., http://www.france-info.com/spip.php?article230755Ettheme=36Etsous_theme=178 (cas dans lesquels Médiapart et Rue89 ont su se distinguer ayant révélant des informations exclusives).

- < La bataille de l'information sur Internet ., 14/03/08, http://www.france-info.com/spip.php?article185208Ettheme=81Etsous_theme=178

( Portails Internet/agrégateurs de contenu = sorte de . média des médias ., versus l'offre 360° des médias traditionnels)

- LEVY-PROVENCAL Michel (Mikiane), . Les contenus a l'heure de l'abondance . (Vidéo), http://mikiane.com/node/2009/05/18/les-contenus-lheure-de-labondance

- . Les sites d'infos pure players - débat sur les modèles économiques ., Les Grands débats de BFM (podcast), animé par Nicolas Doze, BFM radio, 28.04.09, http://www.observatoiredesmedias.com/2009/04/28/les-sites-dinfos-pureplayersen-france-debat-sur-les-modeles-economiques/

- Chronique de Pascal Riché, . Masse critique ., 23.05.09, France Culture, http://sites.radiofrance.fr/chaines/franceculture2/emissions/masse~critique/index.php

TABLE DES MATIERES

Introduction 1

PREMIERE PARTIE : .............................................................................. 14

APPROCHE DE LA NOTION DE « PARTICIPATIF 0 DANS LE CADRE DE L'INFORMATION SUR INTERNET

.................................................................................................. 14

1. Présen ta tion du suje t : les sites indépendan ts d'informa tion e t le

« participa tif 0 15 1.1. Motivations a l'origine du choix du theme e t proximi té par rapport au suje t 15

2. Défini tion : entre « sites indépendan ts d'informa tion 0 e t

« média d'informa tion 0 18

2.1. Défini tion de la notion de média ............ 18

2.2. Internet : un média « nouveau 0 7 Quelles spécifici tés

médiumniques 7 21

2.3. Les « sites indépendan ts d'informa tion 0 7 23

3. Approche socio-his torique du web: les filia tions d'une tradition de

par tage, de participation e t d'innova tion collective. 27

3.1. Félix Gua ttari e t l'espri t des radios pirates 29

3.2. « Frappez e t fuyez 0 : la philosophie liber taire d'Hakim Bey 33

3.3. L'espri t de collaboration des premiers hackers, fonda teurs du réseau

,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,, 36

3.5. Des webzines aux sites d'informa tions pure players : évolu tion des

pra tiques participa tives en matière d'informa tion sur le web. ,,,,,,,,,,,,, 39

4. Probléma tique e t hypotheses 42

4.1. Présen ta tion de la probléma tique ............. 42

4.2. Présen ta tion des hypotheses de travail ...... 44

4.2.1. En quoi les journalis tes percoivent leur role comme indispensable même au sein d'une organisation dis tribuée de production d'informa tion 45 4.2.2. La dynamique rela tionnelle e t la répu ta tion, de nouveaux criteres de légi timi té mal compris par les journalis tes. 49

4.2.3. Critere de la légi timi té e t de professionnalisme par la valeur

(qualitative e t pécuniaire) : le cas des blogs ... 53

4.2.4. De la difficul té pour les journalis tes de partager les roles 60

DEUXIEME PARTIE : ENQUETE SUR LES REPRESENTATIONS DU « PARTICIPATIF ~

AUPRES DE WEB JOURNALISTES D'@RRET SUR IMAGES ET MEDIAPART ............................ 64

5. Enquê te 65

5.1. Mé thodologie e t déroulemen t de l'enquê te 65

5.2. Résul ta ts : confrontation des discours publiques e t lors d'en tre tiens avec les hypotheses de recherche d'apres les criteres prédéfinis. 71

5.2.1. Ré ticences de la part des web journalis tes face au système

d'au torégula tion de la communau té ............. 71

5.2.2. Professionnalisme e t légi timi té : une question non résolue 74

5.2.3. Entre projection e t désillusion des a tten tes journalis tiques : le

role marginal des in ternau tes. 80

6. Conclusion 91

Synthese 94

APPROCHE DES REPRESENTATIONS DU « PARTICIPATIF * DES REPRESENTANTS DES SITES

INDEPENDANTS D'INFORMATION : @RRETSURIMAGES ET MEDIAPART .............................. 97
********************* 97

ANNEXES...................................................................................... 97

7. Annexes 98
7.1. Re transcrip tion de l'en tre tien avec Daniel Schneidermann (apres au torisa tion), vendredi 30/01/09, 15h15 dans les locaux d'Asi 99

7.2. Lexique ........................................................................ 111

7.3. Présen ta tion des sites du corpus ......................................... 115

7.3.1. Arre tsurimages.ne t ..................................................... 115
7.3.2. Médiapar t.fr ............................................................. 118
7.4. Index analytique ............................................................. 123
7.5. Bibliographie .................................................................. 125
TABLE DES MATIERES ................................................................... 131






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