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Contextualisation et variation de la langue française dans l'écriture littéraire au Cameroun: le cas de l'invention du beau regard de Patrice Nganang

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par Simplice Aimé Kengni
Université de Yaoundé I - Maitrise en Lettres Modernes Françaises 2006
  

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4.2.2 La dérivation suffixale.

La dérivation suffixale s'opère à travers l'adjonction d'un suffixe à un radical. En effet un suffixe, comme le définissent J. DUBOIS et alii, est un affixe qui suit le radical auquel il est étroitement lié.72(*)

Notons que ce dernier n'a pas d'existence autonome ; il s'ajoute uniquement à un mot déjà existant pour former un nouveau mot. Par ailleurs, le corpus littéraire africain permet de se rendre compte qu'il n'existe pas une classe exhaustive desdits suffixes. Ils constituent une classe ouverte et les mots sont formés au gré de l'écrivain. Toutefois, ceux-ci s'inscrivent dans la réalité sociale.

· les suffixes en - ment.

De manière générale, le suffixe - ment est considéré comme un suffixe d'adverbe qui, joint à des radicaux adjectivaux, permet de former des adverbes. Il permet aussi de former des noms ; dans ce cas, il n'est plus lié à un adjectif. Notre corpus présente les cas suivants :

53) Sourd, il décomposait la femme dont les parties silencieuses et têtuement ramassées sur la chaise devant son bureau l'énervaient.(p.54)

54) Évidement, ce n'était plus seules les femmes de D. Eloundou qui parlaient, mais toute sa famille, qui pleine d'effroi que la mangement n'ait plus lieu mentionnait avec frénésie. (p.88)

55) Si les membres cette fois ne cotisèrent que chichement, c'était parce que l'homme du jour n'avait que son honneur à offrir aux enchères. (p.118)

les exemples 53 et 55 présentent des dérivés formés à partir des radicaux adjectivaux, tandis que dans l'exemple 54, on a un dérivé mangement formé sur la base du radical verbal mange.

L'occurrence têtuement signifie de manière entêtée. Chichement signifie avec réserve ou rétention. Car dans le cadre de la tontine, chaque individu verse ses cotisations si et seulement s'il est sûr que le bénéficiaire sera en mesure de verser à son tour la même somme qu'il aura déboursé. Or Taba étant reconnu comme pauvre ne bénéficiera pas d'une riche cotisation surtout qu'il n'a aucun gage matériel sur lequel on pourrait compter. Le lexème mangement renvoie à une fête accompagnée de collation (boire et manger). Cette pratique est courante dans le contexte camerounais, et est désormais devenue un rituel servant à ponctuer tout événement heureux.

· les suffixes en -er.

-er selon E. BILOA,73(*) peut être considéré comme un suffixe de verbe qui joint à des noms ou à des éléments tenant lieu de radicaux nominaux, permet de former des verbes.

L'IBR fait état des exemples ci-après.

56) D. Eloundou retrouva son équilibre, car sinon - sinon quoi ? Sinon la secrétaire qu'il avait saluée aurait de quoi kongosser avec les collèges. (p.81)

57) Nous nous en foutons des paroles des garçons de notre quartier qui dans notre dos, se chuchotent que « tout le monde peut la couiller » (p.92)

Le verbe kongosser signifie calomnier quelqu'un c'est en fait un dérivé du mot kongossa qui est un emprunt d'une langue locale camerounaise et renvoie aux différents commérages faits sur une personne qui est absente. Cette pratique est courante dans le quotidien des camerounais et a donné lieu à l'expression familière faire le kongossa sur le nom de quelqu'un.

Le verbe couiller signifie entretenir des rapports sexuels avec une femme. C'est un dérivé du support nominal couilles qui est un emploi vulgaire de testicule.

· Les autres suffixes.

En plus de ces groupes de suffixes mentionnés supra, l'IBR présente encore d'autres cas isolés qui résultent de la créativité de son auteur. Ainsi, nous avons relevé les exemples suivants :

58) Il avait atteint au bout de moult stages de recyclages, promotions, jonglages et pistonnages, son grade actuel d'adjoint au commissaire principal. (p.17)

59) C'est au bout de notre cavale litique qu'un jour, dans le salon de notre tante, nous rencontrons un homme que nous croyons d'abord être son père à elle. (p.92)

Dans le premier cas, jonglages et pistonnages sont des substantifs appartenant au registre familier du français.

Dans ce contexte, jonglages renvoie à toute forme de truquages, de tentatives frauduleuses en vue de faire bénéficier à quelqu'un ce qu'il ne mérite pas. Pistonnages signifie le fait d'apporter son appui à quelqu'un (recommandation) pour qu'il obtienne une place, un avantage dans une sélection.

Ces deux termes sont utilisés dans L'IBR pour mettre à nue les réalités de la société camerounaise en générale et de la police en particulier.

L'occurrence litique s'inscrit aussi dans le langage familier du français au Cameroun. Il s'agit ici de toute action entreprise sur le lit, en particulier les rapports sexuels.

Par ailleurs, le phénomène de dérivation dans L'IBR influence aussi les catégories grammaticales de base qu'il transforme : il s'agit ici de la dérivation impropre.

* 72 J. DUBOIS et alii, Dictionnaire de linguistique, Paris, Larousse, 1973, p.466

* 73 E. BILOA, La Langue française au Cameroun, Analyse linguistique et didactique, Bern, Peter Lang, 2003, p.131

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand