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Vécu de guerre, PTSD, mémoire et attention : étude comparative chez des enfants à¢gés entre 8 et 12 ans

( Télécharger le fichier original )
par Rachelle EL HASROUNY
Universite Saint Joseph - Psychomotricite 2011
  

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UNIVERSITE SAINT JOSEPH
FACULTE DE MEDECINE
INSTITUT DE PSYCHOMOTRICITE

Vécu de guerre, PTSD, mémoire et attention : étude
comparative chez des enfants âgés entre 8 et 12 ans

Note de recherche en psychomotricité
EL HASROUNY RACHELLE

Sommaire

Page

Introduction 4

I- Méthodologie de la recherche. ~~~~~..~~~~~~~~~~~~~ 6

Problematique~~~~~~~~~~.~~~~~~~~~~~~~~~~~~~6 Hypothèses~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~...12

Outils~.~~~~~~~~~~~~~~~..~~~~~~~~~.~~~~~~16

a- Les questionnaires~~~..~~.~~~~~~~~~~~~~~~~~.16

b- Les tests et les subtests~~~..~~~~~~~~~~~~~~~~~ .16

Échantillonnage ~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~...19

Résultats. ~~~~~~~~~ ~~~~~~~~~~~~~~~~~ ~~ 22

A- Les questionnaires~~~~~. ~~ .~~~~~~~~~~~~~~~~22

B- Les tests et les subtests~~~~~~~. ~~~~~~~~~~~~~~~23

1. Analyse de variance~ ~~.~ ~~~~~~~~~~~~~~~~~ 23

a. Attention et mémoire, groupe expérimental et groupe témoin~~~~~.24

a.1. Selon le groupe~ ~~ ~~~~~~~~~~~~~~~~~ 24

a.2. Selon le sexe~~. ~..~~~~~~~~~~~~~~~~ ~~24

b. Attention et mémoire, groupe expérimental ~~~~~.~~~~~~.25

b.1. Selon le groupe~~~~~.~~~~~~~~~~~~~~.~~.25

b.2. Selon le sexe~~. ~~~..~~~~~~~~~~~~~~~~ 25

2. Corrélation des variables dépendantes~ ~~ ~.~~~~~~~~~~26

a. Groupe experimental~~~~~~~.~~..~~~.~~~~~~~~26

b. Groupe temoin~~~~~~. ~~~~~ ~~~~~~~~~~~.27

3. Analyse des protocoles individuels~~. ~~~~~~~~~~~~~27

a. Attention selective~~~~. ~~~~~~~~~~~~~~~~~27

b. Attention soutenue~~~~. ~~~~~~~~~~~~~~~~~27

c. Attention auditive~~~~. ~~~~~~~~~~~~~~~~~.28

d. Attention visuelle~~~. ~~~~~~~~~~~~~~~~~~.28

e. Memoire visuelle~~~. ~~~~~~~~~~~~~~~~~~ 29

f. Memoire auditive~~~~. ~~~~~~~~~~~~~~~~~ 29

Analyse et synthèse~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~..~~30

Conclusion 36

Bibliographie 37

Annexes. 41

- - Liste des tableaux

- - Questionnaires en arabe

Introduction

Parmi les problèmes qui se posent à nous au Liban, le premier est celui de la guerre, ou la situation de guerre que les enfants ont vécue pendant plusieurs années. Parmi eux, des enfants ont directement vécu les bombardements, les affrontements armés, les fuites et exodes dramatiques, etc. Des enfants qui survivent à des évènements horribles n'en sortent inévitablement pas intacts. Aucun être humain ne reste sans réaction à la vision des êtres humains blessés, tués ou terrorisés, ou à l'écoute des bombes qui s'explosent tout près de lui. Certes, la survenue d'un évènement traumatique dans la vie d'un enfant ou d'un adolescent est une aventure complexe.

La guerre empéche l'enfant de vivre sa condition d'enfant et le prive des éléments qui devaient participer à son développement. « Des troubles se manifestent par un ensemble de signes dont certains sont pathognomoniques d'un syndrome de stress post-traumatique PTSD tels les reviviscences de l'évènement traumatique, cauchemars, sursauts, angoisse, phobies, repli relationnel, des troubles psychosomatiques. Selon leur âge, les symptômes post-traumatiques peuvent transparaître dans le comportement, et leur souffrance se manifester de diverses façons comme : agitation motrice, trouble de l'attention, etc. Parfois, ils l'expriment sous forme de jeux ou de comportements répétitifs ». (Bailly, 1999).

Cependant, les chercheurs intéressés à comprendre l'impact de la guerre n'ont pas exclu l'impact possible de l'exposition à des évènements traumatiques sur les conditions de la santé mentale des personnes. Les troubles de la vie d'après-guerre et les changements qui vont ébranler le sort de ces enfants aux différents niveaux - économique, social, familial - menacent de mettre en danger leur développement à long terme et leur apprentissage. Les enfants pendant et après les guerres, reçoivent rarement l'attention et l'assistance nécessaires pour faire face à ce qu'ils ont vécu et pour les aider dans leur rétablissement de leur futur développement (Machel, 1996).

L'évènement traumatique vient bouleverser la personnalité dans son présent, dans son futur et même dans son passé.

Au niveau intellectuel et scolaire, Heuyer (1948) note que le niveau mental est peu touché par les incidences de la guerre. En revanche, le niveau scolaire des enfants qui ont été victime de guerre a nettement baissé.

En neuropsychologie infantile, une vraie corrélation existe entre ces deux aspects, affectif et cognitif, pour aboutir à un bon cheminement développemental de l'enfant. Il est essentiel d'évaluer au moins sommairement la personnalité de l'enfant pour comprendre l'importance des composantes affectives qui peuvent moduler voire modifier l'efficience de ses fonctions cognitives.

Les fonctions exécutives recouvrent de processus impliqués dans la régulation et le contrôle du comportement. Plus précisément, elles entrent en oeuvre dans des situations non routinières qui nécessitent l'élaboration, l'exécution et l'évaluation d'un plan (et éventuellement, sa correction) afin d'atteindre un but particulier (Censabella, 2007). Elles englobent des notions variées, telles que supervision attentionnelle, flexibilité, inhibition, planification, mémoire de travail, résolution de problèmes, génération d'hypothèse, raisonnement abstrait, estimation cognitive, ou encore programmation, contrôle, et initiation du comportement.

Dans ce présent travail, nous nous intéressons à étudier le lien qui pourrait entre certaines fonctions exécutives (l'attention et la mémoire) et le vécu de guerre des enfants libanais âgés entre 8 et 12 ans.

I- Méthodologie de la recherche

Nous tentons dans cette recherche à répondre à la question suivante : Jusqu'à quel point, le vécu de la guerre du juillet 2006, peut-il avoir des répercussions actuelles sur les capacités attentionnelles et mnésiques des enfants du Sud du Liban, appartenant à la tranche d'âge 8-12 ans ?

Problématique

En réalité, la guerre au Liban est une situation à laquelle on ne pourra jamais échapper. En juillet 2006, le dernier conflit armé israélo-libanais, qui a duré trente-et-un jours, a laissé un bilan dramatique de pertes humaines et matérielles. Comme toutes les guerres, cette violence extrême nous a laissé des séquelles socio-psychologiques, économiques et environnementales, ainsi que la haine, le non-respect, la peur de l'autre ou de l'avenir, la difficulté à négocier, etc.

Des enquêtes sur les types des évènements liés à la guerre, ainsi que les actes de violence personnalisée, pouvant avoir des conséquences différentes sur la santé mentale des enfants et des jeunes, étaient essentiels, en gardant à l'esprit que les réponses à de tels incidents de l'exposition peuvent se manifester dans une gamme de doux à de graves troubles psychologiques, ou bien à une absence totale de troubles (Baker & Shalhoub- Kevorkian, 1999).

Toute guerre peut être considérée comme un ensemble d'épisodes stressants, causant des troubles psychologiques, neuropsychologiques, comportementaux, cognitifs, langagiers, moteurs, neurologiques, etc. Le syndrome le plus mis en évidence parmi ceux-ci est le syndrome du stress post-traumatique, connu surtout par le PTSD. Comme définition, cet état de stress post-traumatique a été décrit après la guerre de Vietnam, et appelé au début « la névrose de guerre ». C'est une réaction à un traumatisme physique ou psychique, une scène à laquelle on a assistée ou on a subie. Il y a un intervalle libre avant l'apparition du trouble. Le patient va présenter des flash-back des traumas, des troubles du sommeil, états de vigilance, etc.

Selon le DSM IV, ce trouble atteint 0.5 à 2 % de la population ; les femmes sont plus atteintes que les hommes. On peut avoir une rémission totale et sans rechute. Le diagnostic du PTSD selon ce même manuel est le suivant :

- Le sujet a été exposé à un évènement traumatique.

- La reviviscence de ce trauma.

- Évitement persistant des stimulis associés au traumatisme et émoussement de la réactivité générale.

- Présence de symptômes traduisant une activation neurovégétative : irritabilité ou accès de colère, insomnie ou hypersomnie, difficultés de concentration, hypervigilance, réaction de sursaut exagérée.

Il existe une relation de cause-à-effet entre la guerre et les manifestations stressantes. Selon McNally (1993), Saight et al. (1996), parmi les facteurs qui provoquent le stress posttraumatique chez les enfants, la guerre a été associée avec le taux le plus élevé. Malgré cela, nous n'attardons pas beaucoup sur la présence du PTSD chez les enfants sélectionnés pour cette recherche, et nous ne considérons pas que ces derniers soient psychopathologiques, car ces derniers ont vécus la guerre depuis quatre ans et demi ; même si la question de la durée des symptômes est aussi assez controversée.

Les différences dans les rapports sur la gravité des symptômes à long terme peuvent éventuellement s'expliquer par un certain nombre de facteurs qui diffèrent selon les études, notamment la gravité initiale à court terme des symptômes, le milieu psychosocial après le traumatisme, et la continuité des perturbations (Jones & Kafetsios, 2002 ; Kuterovac-Jagodic, 2003). Ce qui répond à la réalité du terrain du Sud du Liban, où un danger permanent persistait, ainsi que plusieurs attaques ont survenu après le cessez-le-feu, et des bombes à fragmentation existaient toujours.

Nous trouvons certains auteurs affirmant que les effets des expériences de guerre sont persistants (Elbedour, ten Bensel, & Bastien, 1993 ; Stein, Comer, Gardner & Kelleher, 1999). Tandis que d'autres suggèrent également qu'une fois la guerre terminée, il y a une diminution naturelle des symptômes post-traumatiques (Laor et al. 1997 ; Punamaki et al., 2001).

Parmi des enfants irakiens âgés de 4 à 8 ans, réfugiés en Suède, 21,4 % souffrent d'un PTSD, tandis que 30,9 % présentent un PTSD incomplet. La prévalence du PTSD est fortement liée à la gravité de l'exposition : 37,5 % chez les enfants sévèrement exposés contre 11,5 % chez les enfants faiblement exposés. L'étude de suivi témoigne de la stabilité de l'affection : deux ans et demi plus tard, la prévalence du PTSD est de 20,6 % (Almqvist & al., 1997).

Par ailleurs, des inégalités sont à noter dans la persistance des troubles. Kessler et al. (1995) trouvent une durée moyenne du PTSD évoluant entre trois et cinq ans selon que les victimes ont pu ou non disposer d'un traitement médical, et une symptomatologie toujours présente pour un tiers d'entre elles après dix ans de l'évènement.

Dans le méme esprit, une étude d'investigation des symptômes traumatiques (Stein & al., 1997) observe que chez 43,3% des sujets présentant un PTSD, ce dernier est dû à une expérience traumatique remontant à plus de dix ans. En plus, une étude menée sur Détroit indique que 26 % des victimes récupèrent en moins de six mois, 40 % en moins d'un an, et qu'un tiers d'entre elles présentent l'affection à cinq ans. La durée du PTSD est significativement plus longue chez les femmes et chez les victimes directes (Breslau & al., 1998).

Le PTSD des enfants dépend davantage de ce traumatisme individuel que d'un effet de contagion des symptômes parentaux, notamment maternels (Ahmad & al., 2000). Les plus fréquents symptômes d'après-guerre, notés dans une étude menée auprès de 40 enfants (3-12 ans) du Haut-Karabagh après l'installation d'un cessez-le-feu (entre 1994-1996), sont la peur de l'obscurité et des avions (43.2%), la peur des bruits forts (27%), les pleurs fréquents (24.32%). D'autres symptômes sont moins fréquents, comme l'irritabilité (13.5%), l'agressivité, l'angoisse de séparation, les cauchemars et le réveil en sursaut (16.2%), et l'asociabilité et le comportement de retrait (10.5%).

Au Liban, des recherches antérieures menées au cours des phases de plusieurs types de conflit prolongé, classent l'exposition à la guerre comme suit : la perte d'un parent, la séparation, les blessures physiques, les bombardements, les enlèvements, la démolition de la maison, et le

déplacement (Macksoud & Aber, 1996 ; Derkarabetian, 1984 ; Macksoud, 1992 ; Cheminenti et al., 1989 ; Assal & Farrell, 1992 ; Fayyad et al., 2001).

Des observations cliniques (Zohrabian, 2006) auprès d'enfants libanais ayant vécu la dernière guerre de juillet 2006 ont mis en relief :

1- une angoisse de séparation excessive

2- une hyperactivité

3- une agressivité importante

4- une incapacité à exprimer les émotions

5- une asociabilité

6- un évitement de toute nouvelle situation.

Dans le cadre d'une étude auprès des enfants du Sud du Liban, qui ont vécu la guerre de juillet 2006, des classes d'EB5, les résultats étaient les suivants (Bouchedid, 2008) :

- 84.1% : Je comprends tout ce qui est dit à moi.

- 79.9% : Je suis presque toujours à l'heure et n'oublie pas ce que je suis censé faire - 76.1 : Je suis suffisamment bien dans les classes de mathématiques

- 65.3 % : Je fais toujours mes devoirs à temps.

- 63.6 % : J'oublie souvent de faire des choses. L'école a été facile pour moi.

- 60.9% : je fais beaucoup de soucis avant quelque chose nouvelle que je démarre. - 47.8% : La plupart du temps, je cours plutôt que je marche.

- 43.1% : Je ne peux pas attendre des choses qui viennent, comme les autres enfants peuvent.

- 35.0% : Je saute d'une activité à une autre.

- 26.8 % : des enseignants se plaignent que je ne peux pas rester assis, et il est difficile pour moi d'obtenir de bonnes notes.

- 24.9% : J'ai répété une année à l'école.

- 20.4% : En raison de mes problèmes d'apprentissage, je reçois une aide supplémentaire, ou que je suis dans une classe spéciale à l'école. Je ne peux pas garder ma concentration sur quelque chose

- 15.4 % : À un moment donné, j'ai eu des problèmes de langage.

- 10.6 % : La lecture a été difficile pour moi.

Cependant, différents types de traumatismes sont liés de façon différentielle aux conséquences sur la santé mentale. Certains, comme la guerre, peuvent avoir un effet nul ou modéré sur la santé mentale des enfants, ou bien peuvent avoir des effets dévastateurs. A ce jour, seulement quelques études ont essayé d'évaluer l'impact d'un évènement spécifique sur la symptomatologie et l'ajustement de l'enfant (Macksoud & Aber, 1996).

Heuyer (1948) groupe les conséquences de la guerre en trois grandes catégories : les conséquences intellectuelles et scolaires, les conséquences affectives, et la délinquance infantile et juvénile. Au niveau intellectuel et scolaire, Heuyer note que le niveau mental est peu touché par les incidences de la guerre. En revanche, le niveau scolaire des enfants qui ont été victimes de guerre a nettement baissé.

Concernant ce qui nous intéresse des séquelles, les individus qui ont vécus une guerre présentent des altérations cognitives allant des déficiences dans le fonctionnement global de la mémoire, à des difficultés plus spécifiques. Il est difficile de savoir si des mécanismes communs peuvent tenir compte de ces diverses difficultés cognitives (Moore, 2009). Une étude, en 2002, effectué au département de psychologie de « Hebrew University » à Jérusalem, a évalué le fonctionnement cognitif après dix jours d'exposition à la guerre. Quarante-huit survivants ont été évalués pour des symptômes de stress post-traumatique, d'anxiété, de dépression, et de dissociation immédiate et retardée de la mémoire, de l'attention, de l'apprentissage et du QI (Psychiatry research, vol. 110, 2002).

Puisque chaque enfant vit les situations différemment, selon son caractère et son histoire personnelle, des dissemblances dans la sévérité des critères pourraient engendrer des différences dans les résultats des tests cognitifs.

Selon Censabella (2007), les fonctions exécutives sont tout un ensemble de processus dont la fonction principale est de faciliter l'adaptation de la personne aux exigences et fluctuations soudaines de l'environnement et, en particulier, aux situations nouvelles.

En effet, les retentissements post-guerre ont été associés à des troubles cognitifs impliquant la mémoire et l'attention. L'association entre la déficience cognitive et les symptômes est inconnue, mais cette corrélation peut entrainer une dégradation du traitement des souvenirs traumatiques. A noter que la guerre peut causer des manifestations comme l'anxiété, dont les aspects cognitifs ont été largement étudiés (Eysenck, 1997), mettant en évidence ses effets sur les capacités de mémoire de travail (Ikeda, 1996), et sur les ressources attentionnelles (Sarason, 1988).

Les personnes souffrant d'une atteinte du système exécutif rencontrent, au quotidien, des difficultés à s'adapter sur le plan familial, social et professionnel et à gérer des situations nouvelles. Les altérations qu'elles présentent peuvent toutefois survenir chez des personnes sans lésion cérébrale mais dans une moindre mesure.

Des liens sont trouvés entre l'attention et la mémoire : les processus attentionnels interviennent entre la mémoire sensorielle et la mémoire à court terme, de travail. Pour notre présente étude, nous choisissons d'explorer uniquement deux fonctions cognitives : l'attention et la mémoire, qui sont liés entre elles.

En effet, il reste inconnu si les déficiences cognitives sont considérées des caractéristiques d'un vécu traumatique aigu. Très récemment, dans une enquête, les fonctions neurocognitives ont été examinées chez des individus exposés à un seul traumatisme (n = 21), d'autres ayant un PTSD aigu (n = 16), ainsi qu'un groupe d'individus jamais exposés à un traumatisme (n = 17). Un certain nombre de déficits dans les domaines cognitifs de la mémoire, des ressources attentionnelles, des fonctions exécutives et de la mémoire de travail, était trouvé dans le groupe ayant reçu un diagnostic de stress post-traumatique aigu et non parmi les autres groupes (Lagarde G, 2010).

Hypothèses

1- Les enfants qui ont vécus la guerre de juillet 2006, pourraient avoir des difficultés au niveau de l'attention (sélective, soutenue, auditive, visuelle).

Tout comme l'apprentissage constitue probablement un mécanisme central lors de la récupération de fonctions après une lésion ou un trauma, l'attention constitue le pré-requis à un apprentissage adéquat (Moskovitch, 1994).

L'attention est un pré-requis à toute autre fonction cognitive. D'après William James (1890), « l'attention est la prise de possession par l'esprit, sous une forme claire et vive, d'un objet ou d'une suite de pensées parmi plusieurs qui semblent possibles. Elle implique le retrait de certains objets afin de traiter plus efficacement les autres. » L'attention est un système complexe et hiérarchisé comprenant plusieurs fonctions impliquées dans un vaste réseau neuroanatomique.

Posner (1971 ; 1987) distingue globalement quatre composantes attentionnelles :

- L'alerte correspond à l'état général d'éveil de la personne et à sa disposition à traiter et à réagir aux stimulations extérieures. Deux types d'alertes peuvent être distingués : alerte tonique et alerte phasique.

- L'attention sélective correspond au processus permettant de sélectionner et de traiter un stimulus ou une classe de stimuli particuliers parmi l'ensemble des stimulations de l'environnement. Ces processus impliquent donc l'inhibition des réponses aux stimulis non pertinentes pour la tache en cours. On distingue les capacités d'attention sélective sur matériel auditif et sur matériel visuel.

- L'attention soutenue et la vigilance permettent de maintenir un niveau attentionnel suffisant pendant une période de temps assez longue. On distingue la vigilance de l'attention soutenue par la fréquence d'apparition des stimuli. Dans une tache de vigilance, les stimuli

sont rares et il y a peu d'informations à traiter, à l'inverse dans une activité d'attention soutenue, un traitement beaucoup plus actif est nécessaire.

- L'attention divisée correspond à la capacité à repartir ses ressources attentionnelles entre plusieurs taches ou sources d'informations.

Des survivants qui ont des hauts niveaux d'exposition à la guerre, ont montré une déficience d'attention et de rappel immédiat de l'information, ainsi qu'un QI faible. Ils n'ont pas montré, cependant, une dépréciation de rappel verbal et de l'apprentissage. Donc, un QI plus faible et une baisse d'attention sont associés au vécu d'un trauma. Une faible attention peut avoir un rôle dans l'élaboration des souvenirs traumatiques (Brandes, D. ; 2002).

Bien que les résultats soient équivoques, les études sur des adultes ont signalé des problèmes cognitifs chez des personnes après un trauma, en particulier dans les zones de concentration, de l'apprentissage et de la mémoire. En revanche, la fonction cognitive indexée par les performances neuropsychologiques par des instruments standardisés n'a pas été largement évaluée chez des enfants (Michael D. ; 2002).

2- Le vécu de la guerre israélo-libanaise du juillet 2006 a des répercussions actuelles sur la mémoire (à court terme, à long terme, auditive, visuelle) des enfants âgés entre 8 et 12 ans.

La mémoire est l'ensemble des systèmes biologiques et psychologiques dont les fonctions sont : l'intégration (l'enregistrement, la fixation, l'inscription) de données, leur rétention (stockage, conservation), leur restitution (rappel, utilisation). Elle est ce qui autorise la persistance du passé dans l'instant présent, ce qui assure pour l'individu la continuité du monde, de son histoire et de sa personnalité.

Tulving (1995) suggère l'existence de cinq systèmes de mémoire principaux : la mémoire à court terme, et quatre systèmes de mémoire à long terme : la mémoire procédurale, les systèmes de représentation perceptive, la mémoire sémantique, et la mémoire épisodique.


· La mémoire à court terme concerne tous les processus cognitifs qui permettent le stockage d'infirmations verbales et visuo-spatiales durant quelques secondes. L'intégritéde cette mémoire est néanmoins fondamentale car elle sous-tend le développement du

vocabulaire, du calcul, et des capacités de raisonnement et est donc nécessaire au bon déroulement des apprentissages scolaires.

· La mémoire à long terme est un système qui maintient une information pendant les périodes allant de quelques minutes à plusieurs années.

· La mémoire procédurale est le système de mémoire qui est impliqué dans l'apprentissage d'habiletés perceptivo-motrices et cognitives ainsi que dans le conditionnement. Il s'agit d'un système où les connaissances ne s'expriment que par l'action.

· Les systèmes de représentation perceptive renvoient à l'acquisition et au maintien de connaissances relatives à la forme et à la structure des mots, des objets, etc. en l'absence de toute connaissance concernant leurs propriétés fonctionnelles et associatives

· La mémoire sémantique rend possible l'acquisition et le maintien des connaissances générales sur le monde.

· La mémoire épisodique permet à une personne de se souvenir et de prendre conscience des évènements qu'elle a personnellement vécus dans un contexte spatial et temporel particulier. Cette connaissance concerne non seulement ce qui s'est passé, mais également où et quand cela s'est passé (le contexte). Cette mémoire serait donc le support de notre histoire individuelle.

En fait, le développement psychologique et le développement cognitif se font en parallèle ; chacun selon des exigences et des conditions indispensables. Ainsi, chaque interruption pendant un stade du développement perturbait le cheminement de tout le processus évolutif des enfants.

Des écrits suggèrent également que le traumatisme subi pendant l'enfance, peut avoir un impact durable sur le développement cognitif, moral, ainsi que sur la personnalité, les relations

sociales et les capacités de faire face (Arroyo & Eth, 1985; Terr, 1983; Pynoos & Nader, 1988 ; Sack et al., 1993).

L'après-guerre est lié à des problèmes de traitement automatique et à une altération de la mémoire exécutive. Des dysfonctionnements observés dans la flexibilité mentale pourraient avoir un impact négatif sur le traitement cognitif de la mémoire traumatique, empêchant ainsi la récupération (Kanagaratnam P. et Asbjornsen A. ; 2007).

En général, la personne souffrant de PTSD ne peut pas raconter l'événement traumatisant de manière complète et cohérente, ceci notamment parce que le cerveau a une difficulté fondamentale à l'intégrer avec les autres événements de la vie passée : Les souvenirs ordinaires s'estompent avec le temps, tandis que les souvenirs d'événements traumatisants gardent toute leur intensité, même après plusieurs années. C'est pourquoi le traumatisme paraît toujours être un événement récent. Les éléments rappelant le traumatisme peuvent favoriser l'apparition des symptômes du PTSD, flashbacks, pensées intrusives et cauchemars. ( www.psychom.ch ; avril 2011)

Outils

Nous avons utilisé pour cette étude deux questionnaires ainsi que deux tests et quatre subtests.

a- Les questionnaires

Les deux questionnaires ont pour objectif d'identifier d'une part, les enfants ayant vécu la guerre de juillet 2006, et de sélectionner parmi eux, ceux qui présentent des symptômes de PTSD d'autre part.

- Le premier questionnaire : Questionnaire sur les Evènements de la Guerre QEG réduit (Stuvland, 1992), est constitué de 10 questions permettant de savoir si les enfants ont été exposés à des évènements stressants ou traumatiques pendant la guerre. Le QEG initial est formé de 24 questions qui décrivent des situations et des évènements que les enfants ont pu subir ; ceux-ci doivent répondre en cochant les cases Oui et Non, selon les cas.

- Le second questionnaire : PCLS, l'échelle de stress post-traumatique (Weathers, 1993), constitué de 27 questions, évalue la sévérité des symptômes de PTSD selon les critères diagnostiques du DSM-IV, suite à un épisode de vie stressant. Nous avons utilisé la version destinée aux civils en temps de guerre, tandis qu'il y a une autre version destinée aux militaires. Ce questionnaire évalue également les trois dimensions théoriques du trouble : la répétition, l'évitement et l'hyperactivité neurovégétative. Le sujet évalue l'intensité de chaque item par rapport à l'évènement traumatique sur une échelle de « pas du tout " à « très souvent ".

A noter que le questionnaire fut traduit en arabe. (Cf. annexe 1)

b- Les tests et les subtests

La récolte des données sur les variables traitées dans notre recherche, sera effectuée après la passation des tests suivants :

Variable

Tests

 
 

Attention sélective

Test de Stroop

Attention soutenue

Test d'attention concentrée : d2

Attention visuelle

Subtest de barrage des visages et du chat (NEPSY)

Attention auditive

Subtest des couleurs (NEPSY)

Mémoire visuelle (à court et à long terme)

Mémoire des visages (NEPSY)

Mémoire auditive (à court et à long terme)

Mémoire des prénoms (NEPSY)

Une brève présentation de chaque test et subtest nous semble indispensable pour une meilleure compréhension de la suite de la recherche :

- Le test de Stroop est utilisé pour l'évaluation de l'attention sélective. 3 planches sont disponibles : la planche 1 contient des mots de couleurs écrit en encre noire, la planche 2 contient des rectangles de couleurs, la planche 3 contient des noms de couleurs écrits en encre de couleur. Planche par planche, la tâche du sujet est soit de lire, soit de dénommer les couleurs le plus rapidement possible. L'examinateur mesure le nombre de mots lus ou de couleurs déterminées, pendant la durée de 45 secondes.

- Le test d'attention concentrée d2 est utilisé pour l'évaluation de l'attention soutenue. Il consiste à barrer sur 14 lignes, tous les « d " assortis de deux traits, au milieu de distracteurs « d » ou « p » assortis d'un, trois ou quatre traits. L'épreuve dure 4 minutes 40s, à raison de 20 secondes par ligne.

- Le subtest de barrage (NEPSY) évalue l'attention visuelle. Il consiste à observer des images et barrer les cibles aussi rapidement et précisément que possible.

- Le subtest des couleurs (NEPSY) nous informe sur l'attention auditive. L'enfant doit adapter sa réponse à des stimuli similaires ou contrastes. En premier, il doit prendre un carré rouge à chaque fois qu'il entend le mot « rouge ". Puis, la deuxième étape consiste à mettre un carré rouge quand il entend « jaune ", un carré jaune quand il entend « rouge ", et un carré bleu quand il entend « bleu ". Ce test évalue les capacités de vigilance et le maintien de l'attention sélective auditive.

- La mémoire des visages (NEPSY) nous informe sur la mémoire visuelle, à court et à long terme. Ce subtest demande de l'enfant de reconnaître parmi trois, un visage présenté auparavant. Il y a un rappel immédiat et un rappel différé après 30 minutes.

- La mémoire des prénoms (NEPSY) est utilisée pour l'évaluation de la mémoire auditive. Cela demande de l'enfant d'apprendre en trois essais les prénoms de huit enfants dessinés. Ce test évalue la capacité à retenir des prénoms d'enfants après trois essais d'apprentissage. Il y a un rappel libre et un rappel différé au bout de 30 minutes.

Échantillonnage

D'après « The psychological conditions of children and youth in Lebanon, after the July 2006 war », les sociétés libanaises exposées à la guerre de juillet 2006 étaient distribués en trois zones, selon les degrés d'exposition. Pour la recherche actuelle, est considérée comme une population-mère celle appartenant à la Zone 1, qui était la plus exposée aux violences israéliennes quotidiennes.

Dans le cadre de cette recherche qui étudie les troubles de la mémoire et de l'attention, chez les enfants qui ont vécus la guerre du juillet 2006, nous allons choisir, en adoptant la technique de l'échantillonnage sélectif, qui demande une combinaison les deux critères suivants :

1- Des enfants appartenant à la tranche d'âge 8-12 ans,

2- Des enfants qui ont vécus la guerre du juillet 2006. (d'après le questionnaire utilisé)

Comme justification pour le choix du premier critère : Levin et al. (1991) montrent que les fonctions exécutives se développaient bel et bien entre 6 et 12 ans, ce qui correspond globalement au développement des lobes frontaux et que les changements développementaux semblaient opérer par stades. Peu de changements étaient observés au-delà de 13 ans. Par rapport à l'age et au sexe, plusieurs études n'ont rapporté aucune différence importante d'age (Cooley-Quille et al, 1995 ; Richters, 1993), et d'autres études n'ont pas réussi à trouver des différences significatives entre les sexes à tous les niveaux d'exposition à une guerre (Bell & Jenkins, 1993), bien qu'il y ait indications que les hommes semblent être plus directement exposés à la violence que les femmes (Fitzpatrick & Boldizar, 1993; Singer et al, 1995).

Le deuxième critère est indispensable, pour éviter de tomber sur des enfants vivant actuellement dans la région concernée, et qui n'étaient pas là-bas pendant la guerre, ou bien la guerre n'a pas laissé un impact sur eux.

Dans le but de délimiter la population, sur le terrain, l'école de l'Annonciation de Rmeich fut choisie, puisqu'elle appartient à la zone 1 déjà définie auparavant et son public appaiient à plusieurs villages de cette région. L'accord était facilement confirmé, et 170 élèves appaienant à la tranche d'âge 8-12 ans (classes EB3 - EB6) ont répondu au questionnaire.

Pratiquement, la passation des questionnaires était collective. Chaque enfant remplissait son propre questionnaire. En cas de besoin, l'enseignant ou l'assistante sociale apportait, une aide individuelle aux plus jeunes enfants. L'établissement a décidé que nous pourrons rencontrer les enfants seulement pendant les séances de sport, d'arts, d'informatique et de religion ; alors, le surveillant a organisé un horaire. En plus, le CDI était le lieu de passation des tests, un lieu calme dans lequel nous avons utilisé une table, deux chaises et un radiocassette.

49 enfants ont été sélectionnés comme ayant vécu la guerre et ce d'après le Questionnaire sur les Evènements de la Guerre QEG. Parmi ces 49 enfants, 24 ne présentant pas un PTSD alors que 25 ont des manifestations de symptômes post-traumatiques et ce d'après les résultats du questionnaire PCLS.

Age

Elèves qui ont un vécu
de guerre sans PTSD

Elèves ayant des
symptômes du PTSD

Total

Filles

8 ans

2

2

22

9 ans

3

3

10 ans

3

3

11 ans

2

2

12 ans

1

1

Garçons

8 ans

3

2

27

9 ans

5

3

10 ans

2

4

11 ans

1

3

12 ans

2

2

Total

24

25

49

Tableau 1 : répartition de la population

En effet, notre étude différencie le groupe de sujets ayant subi la guerre d'un groupe de sujets contrôles. En général, on utilise un groupe témoin et un groupe expérimental afin d'observer l'effet de la modification de nos variables pour finalement obtenir des liens. Une comparaison des résultats des tests administrés sera effectuée. En réalité, le Liban ne possède pas encore des normes pour toutes les épreuves de l'examen psychomoteur.

Nous avons respecté les règles de la répartition des sujets entre le groupe expérimental et le groupe contrôle. Puisque cette guerre est supposée être bien un facteur causal, alors la logique voudrait que cet évènement se manifeste plus significativement dans le groupe expérimental que

dans le groupe de contrôle. Alors, ce dernier doit appartenir à un mohafazat qui n'a pas étéexposé à la guerre de juillet 2006, ni attaqué par les bombardements israéliennes. Une école de
mohafazat Mont-Liban a été sélectionnée, le collège des soeurs du rosaire, à Mansourieh. Et, le
groupe d'enfants choisi est appareillé en âge et en sexe, avec l'échantillon expérimental reparti
auparavant.

Résultats

I- Les questionnaires

Les enfants caractérisés comme ayant vécus la guerre, se répartissaient comme suit :

Graphe 1 : Réponses du QEG

Une variation irrégulière est remarquable entre les situations de guerre que les enfants ont subies : les enfants qui n'ont pas des symptômes du PTSD présentent des taux plus élevés d'exposition à des évènements stressants. En effet, les élèves qui ont des symptômes de stress post-traumatique sont eux qui avaient vécu des situations ou ils ont pensé qu'ils vont être tués (56%), ceux qui étaient forcés de quitter leurs villages et ceux qui avaient pensé qu'ils vont être morts de froid (52%). Tandis que les élèves qui ont subi les autres situations n'ont pas manifesté le PTSD.

Les résultats concernant les symptômes du PTSD, en pourcentage sont les suivants :

- 86.9 % se sentent très bouleversé lorsque quelque chose les rappelle la guerre.

- 78.3 % sont perturbés par des souvenirs, des pensées ou des images en relation avec la

guerre, sont perturbées par des rêves répétés en relation avec cette guerre, et ont des

difficultés à se souvenir de parties importantes de la guerre.

- 73.9% se sentent comme si leur avenir était en quelque sorte raccourci, et ont des difficultés pour s'endormir ou rester endormis.

- 69.5% ont des réactions physiques, lorsque quelque chose leur a rappelé la guerre, perdent d'intérêt dans des activités qui habituellement leur faisaient plaisir, ont des difficultés à se concentrer, sont en état de super-alarme, sur la défensive ou sur ses gardes, et se sentent énervés ou sursautent facilement.

- 65.2% brusquement agissent ou sentent comme si la guerre se reproduisait, et se sentent distant ou coupé des autres personnes.

- 52.2 % évitent de penser ou de parler de la guerre ou évitent des sentiments qui sont relation avec elle, et évitent des activités ou des situations parce qu'elles leur rappellent la guerre, et se sentent irritables ou ont des bouffées de colère.

- 30.4 % se sentent émotionnellement anesthésié ou incapable d'avoir des sentiments d'amour pour ceux qui sont proches d'eux.

II- Les tests et les subtests

1. Analyse de variance

Après cela, une étude comparative, effectuée à l'aide d'une analyse de variance entre les résultats de l'échantillon du vécu de guerre, de celui ayant des symptômes du PTSD et de l'échantillon contrôle, a été faite pour chaque tranche groupe, pour chaque variable et pour chaque sexe.

On considère que l'intervalle de confiance est 95% alors que le risque d'erreur est 5%. Si p<5%, on conclut l'existence de la différence significative, et si p>5%, c'est impossible de conclure l'existence d'une différence.

Les quatre tableaux qui suivent montrent les scores des deux groupes d'enfants et des deux sexes, dans les six épreuves. Les résultats sont donnés en termes de moyennes, avec les écarts-types.

a- Attention et mémoire, groupe expérimental et groupe témoin

a.1. Selon le groupe

Les résultats ont montré qu'il y a une différence significative entre les deux groupes, pour l'attention sélective [F (1 ; 96) = 96.8 ; p<0.05], l'attention soutenue [F (1 ; 96) = 4.7 ; p<0.05], l'attention auditive [F (1 ; 96) = 13.2 ; p<0.05], et la mémoire auditive [F (1 ; 96) = 80.5 ; p<0.05].

Des différences non significatives apparaissent entre les deux groupes au niveau de l'attention visuelle [F (1 ; 96) = 0.01 ; p n.s.], et la mémoire visuelle [F (1 ; 96) = 1.3 ; p n.s.].

Groupe

Variable

Groupe expérimental

Groupe témoin

 

Ecart type

Moyenne

Ecart type

Attention sélective

12.9

5.3

25.4

7.1

Attention soutenue

95.4

23.8

105.6

23

Attention auditive

100.9

11

109.2

11.7

Attention visuelle

29.9

8.4

29.7

5.7

Mémoire auditive

12.2

4.1

20.8

5.2

Mémoire visuelle

23.3

3.4

24.4

2.5

 

Tableau 2 : moyenne et écart-type des 2 groupes au niveau mémoire et attention

a.2. Selon le sexe

Les résultats ont montré qu'il y a de différence significative entre les sexes pour les deux groupes, au niveau de l'attention auditive [F (3 ; 94) = 5.8 ; p <0.05], la mémoire auditive [F (3 ; 94) = 28.3 ; p<0.05], l'attention sélective [F (3 ; 94) = 34.5 ; p <0.05], et la mémoire visuelle [F (3 ; 94)= 4.3 ; p<0.05). Cependant, il n'existe pas de différences significatives au niveau de l'attention soutenue [F (3 ; 94) = 1.5 ; p n.s.], l'attention visuelle [F (3 ; 94) = 1.2 ; p n.s.],

Groupe

Variable/ sexe

Groupe expérimental

Groupe témoin

Moyenne

Ecart type

Moyenne

Ecart type

Attention sélective

Filles

13.1

6

27.4

6.7

Garçons

12.75

5.35

23.78

7.1

Attention soutenue

Filles

96.3

22.4

105.95

13

Garçons

97.25

22

105.4

28

Attention auditive

Filles

105.1

11.2

107.5

11.8

Garçons

98.4

17.5

110.6

11.7

Attention visuelle

Filles

32.1

4.85

28.8

5.7

Garçons

28.05

10.05

30.1

5.6

Mémoire auditive

Filles

12.3

3.6

19.4

4

Garçons

12.45

4.75

21.9

5.8

Mémoire visuelle

Filles

22.1

3.75

23.5

2.1

Garçons

23.8

2.75

24.4

2.8

Tableau 3 : moyenne et écart-type entre les sexes des 2 groupes au niveau mémoire et attention

b. Attention et mémoire : groupe expérimental, sans PTSD et avec PTSD

b.1. Selon le groupe

Les résultats ont montré qu'il n'y a aucune différence significative entre les enfants du groupe expérimental, au niveau de l'attention auditive [F (1 ; 47) = 2.7 ; p n.s.], l'attention visuelle [F (1 ; 47) = 2.3 ; p n.s.], l'attention sélective [F (1 ; 47) = 0.7 ; p n.s.], l'attention soutenue [F (1 ; 47) = 0.1 ; p n.s.), la mémoire visuelle [F (1 ; 47) = 0.5 ; p n.s.], et la mémoire auditive [F (1 ; 47) = 0.2 ; p n.s.].

Groupe

Variable

Vécu de la guerre sans PTSD

Symptômes de PTSD

Moyenne

Ecart type

Moyenne

Ecart type

Attention sélective

11.7

5.4

12.96

4.9

Attention soutenue

97.6

17.4

95.4

27

Attention auditive

104.2

9.8

99.2

11.5

Attention visuelle

31.9

7.5

28.2

9

Mémoire auditive

12.67

4.3

12.08

4

Mémoire visuelle

23.2

2.9

23.9

3.8

Tableau 4 : moyenne et écart-type entre les enfants avec et sans PTSD au niveau mémoire et attention

b.2. Selon le sexe

Les analyses de variance ont montré que les performances différent de façon significative entre les garçons et les filles des deux groupes au niveau de l'attention auditive [F (3 ; 45) = 3.2 ; p <0.05], de l'attention visuelle [F (3 ; 45) = 1.6 ; p n.s.], l'attention

sélective [F (3 ; 45) = 0.5 ; p n.s.], l'attention soutenue [F (3 ; 45) = 0.8 ; p n.s.], la mémoire visuelle [F (3 ; 45) = 2.7 ; p n.s.], et la mémoire auditive [F (3 ; 45) = 0.1 ; p n.s.].

Groupe

Variable/ sexe

Vécu de la guerre

Symptômes de PTSD

Moyenne

Ecart type

Moyenne

Ecart type

Attention sélective

Filles

12.7

6.8

13.5

5.2

Garçons

13

6.1

12.5

4.6

Attention soutenue

Filles

91.7

15.8

100.9

29

Garçons

100.9

19

93.6

25

Attention auditive

Filles

105.2

10.4

105

12

Garçons

102.3

10.3

94.5

7.2

Attention visuelle

Filles

33.3

4.5

30.9

5.2

Garçons

30

9

26.1

11.1

Mémoire auditive

Filles

12.4

3.7

12.2

3.5

Garçons

13

5

11.9

4.5

Mémoire visuelle

Filles

21.9

3.3

22.3

4.2

Garçons

23.9

2

23.7

3.5

Tableau 5 : moyenne et écart-type entre les sexes chez les enfants avec et sans PTSD au niveau mémoire et
attention.

2. Corrélation des variables dépendantes

Une matrice de corrélation a été réalisée pour chacune des populations à partir des variables mesurées. Plus le coefficient est proche des valeurs extrêmes -1 et 1, plus la corrélation entre les variables est forte.

a. Groupe expérimental

D'abord, nous avons analysé les corrélations, variable par variable ; ce qui a permis de montrer une forte corrélation entre l'attention sélective et l'attention auditive, entre l'attention soutenue et celles visuelle et auditive. Ainsi que l'attention soutenue et la mémoire visuelle sont fortement corrélées. Toutes les corrélations trouvées sont positives, donc, lorsque le score de l'une croit, le score de l'autre croit aussi.

 

Attention
soutenue

Attention
auditive

Attention
visuelle

Mémoire
auditive

Mémoire
visuelle

Attention sélective

-0.167

0.309*

0.068

0.164

-0.045

Attention soutenue

 

0.297*

0.317*

0.225

0.293*

Attention auditive

 
 

0.130

0.182

-0.144

Attention visuelle

 
 
 

0.186

0.215

Mémoire auditive

0.089

Tableau 6 : corrélation entre les variables chez le groupe expérimental

Cette table de corrélation confirme que les enfants qui ont une bonne attention sélective ont aussi une bonne attention auditive, et vice versa. Ainsi qu'une faible attention soutenue est associée à une faible attention auditive, attention visuelle, et de même à une faible mémoire visuelle.

b. Groupe témoin

Par rapport au groupe témoin, l'étude des intensités de liaison entre les variables étudiées, ne montrait aucune corrélation significative. Puisque les coefficients trouvés sont différents de zéro, les variables ne sont pas complètement indépendantes.

 

Attention
soutenue

Attention
auditive

Attention
visuelle

Mémoire
auditive

Mémoire
visuelle

Attention sélective

0.094

-0.205

0.048

-0.19

0.113

Attention soutenue

 

0.232

0.086

-0.075

0.136

Attention auditive

 
 

-0.08

0.116

0.047

Attention visuelle

 
 
 

0.254

0.116

Mémoire auditive

 
 
 
 

0.146

Tableau 7 : corrélation entre les variables chez le groupe témoin

3. Analyse des protocoles individuels

L'analyse des protocoles individuels permet de repérer les similitudes tout en prenant en compte la variabilité des réponses à l'intérieur de chaque population. Cette analyse montre que les enfants ayant des scores normaux constituent plus que la moitié de l'échantillon (73% et plus), au niveau de toutes les variables, et par rapport aux deux groupes. Ceux qui ont obtenu des scores pathologiques dans le groupe expérimental (10 enfants) constituent le double de ceux du groupe témoin (5 enfants).

a. Attention sélective

 

Groupe expérimental

Groupe témoin

Fréquence

Pourcentage

Fréquence

Pourcentage

Normal

40

81.6 %

43

87.8%

Limite

4

8.2 %

5

10.2%

Pathologique

5

10.2%

1

2%

Total

49

100

49

100

Tableau 8 : différences interindividuelles pour l'attention sélective

Un chiffre surprenant apparait dans ce tableau : 10.2 % des enfants du groupe témoin ont obtenu des résultats limites, ce qui est un taux supérieur à celui du groupe expérimental (8.2%). Toutefois, 10.2 % des enfants du groupe expérimental ont des résultats pathologiques alors que 2 % uniquement pour le groupe témoins, ce qui va avec notre hypothèse.

b. Attention soutenue

 

Groupe expérimental

Groupe témoin

 

Pourcentage

Fréquence

Pourcentage

Normal

40

81.6%

46

93.9%

Limite

9

18.4%

2

4.1%

Pathologique

0

0

1

2%

Total

49

100

49

100

 

Tableau 9: différences interindividuelles pour l'attention soutenue

Au niveau de l'attention soutenue, aucun enfant du groupe expérimental n'a eu un score pathologique, tandis qu'un seul enfant témoin était pathologique. En plus, le nombre des enfants ayant des scores limites était plus élevé dans la population expérimentale.

c. Attention auditive

 

Groupe expérimental

Groupe témoin

 

Pourcentage

Fréquence

Pourcentage

Normal

45

91.8 %

41

83.7%

Limite

4

8.2 %

8

16.3%

Pathologique

0

0

0

0

Total

49

100

49

100

 

Tableau 10 : différences interindividuelles pour l'attention auditive

Le pourcentage le plus important est celui concernant la normalité de l'attention auditive des enfants qui ont vécu la guerre, en comparaison avec celui des enfants du groupe témoin. Ce dernier présente un pourcentage plus élevé au niveau des scores limites.

d. Attention visuelle

 

Groupe expérimental

Groupe témoin

Fréquence

Pourcentage

Fréquence

Pourcentage

Normal

43

87.8%

38

77.6%

Limite

3

6.1%

10

20.4%

Pathologique

3

6.1%

1

2%

Total

49

100

49

100

Tableau 11 : différences interindividuelles pour l'attention visuelle

Les scores normaux et les scores pathologiques sont plus notables dans le groupe expérimental ; tandis que la fréquence des scores limites est plus grande dans le groupe témoin. Cette variable a eu la plus basse fréquence des scores normaux, parmi les autres, et la plus haute fréquence des scores limites.

e. Mémoire visuelle

 

Groupe expérimental

Groupe témoin

Fréquence

Pourcentage

Fréquence

Pourcentage

Normal

42

85.7%

43

87.8%

Limite

5

10.2%

5

10.2%

Pathologique

2

4.1%

1

2%

Total

49

100

49

100

Tableau 12 : différences interindividuelles pour la mémoire visuelle

Seule la mémoire visuelle discrimine les deux groupes, puisqu'ils ont des résultats comparables pour cette variable.

f. Mémoire auditive

 

Groupe expérimental

Groupe témoin

Fréquence

Pourcentage

Fréquence

Pourcentage

Normal

36

73.5%

42

85.7%

Limite

13

26.5%

6

12.3%

Pathologique

0

0

1

2%

Total

49

100

49

100

Tableau 13 : différences interindividuelles pour la mémoire auditive

Là, apparaissent le pourcentage le plus bas des scores normaux du groupe expérimental, et le pourcentage le plus élevé des scores limites.

Analyse et synthèse

Après avoir présenté quantitativement les différents scores obtenus dans des tableaux bien détaillés, il serait intéressant de faire dans ce qui suit une analyse qualitative de ces derniers, afin de mieux cerner les effets et de les mettre en relation afin de pouvoir vérifier ou infirmer les deux hypothèses.

Tout d'abord, nous relevons à partir de nos observations au cours de la passation que le test peut engendrer une certaine confusion et anxiété chez les enfants. Il demande en effet, une concentration de leur part ainsi qu'une facilité à accepter l'examinateur et à entrer avec lui en relation, afin de réaliser les exercices aisément. A noter que les enfants du groupe expérimental posent plus de questions comme « Est-ce que c'est noté ? Pourquoi tu fais ces jeux ? Pourquoi tu ne rencontres pas toute la classe ? », surtout que nos rencontres étaient dans un cadre scolaire. Ces derniers stressaient du chronomètre et de la demande d'une certaine rapidité. En plus, les enfants qui ont vécu la guerre, prenaient plus de plaisir à exécuter ce qui est demandé, et à découvrir des choses nouvelles. Tandis que les enfants témoins n'exprimaient pas leur ressenti vis-à-vis des tests, et semblaient être habitués à se concentrer sur des exercices cognitifs.

Le faible effectif et la grande variabilité interindividuelle sont caractéristiques de ces deux populations. Ainsi, comme nous l'avons annoncé précédemment, afin d'aller au delà des résultats moyens, nous avons mené une analyse des protocoles individuels, visant à mettre en évidence la cohérence et les différences interindividuelles. Mais, nous tenons à rappeler que ce faible effectif est la conséquence directe de quelques précautions : même institution pour chaque population afin de limiter la variabilité, même région, ...

D'une manière générale, les résultats montrent des différences significatives au niveau du sexe et du vécu de la guerre. Nous notons qu'en ce qui concerne la variable sexe, les différences significatives n'ont pas été considérables pour toutes les épreuves. En plus, il n'y a pas de différences entre les enfants qui ont le PTSD et ceux qui n'ont pas le PTSD, au niveau de l'attention et la mémoire. Ce qui veut dire que le fait d'avoir vécu un traumatisme garde des effets et séquelles cognitives telles que la mémoire et l'attention même s'il n'y a pas une persistance de stress post-traumatique. Le vécu des mêmes évènements traumatiques, a donné des résultats semblables dans les tests et les subtests passés.

Nous n'avons pas mis en relief les variations par rapport à l'age, puisque l'examen des résultats montre, pour les deux populations, une progression générale des moyennes avec l'age, qui peuvent correspondre à l'évolution et au développement des fonctions exécutives. Les résultats infirment la théorie suivant laquelle les enfants qui ont tardivement vécu une guerre ont moins de difficultés et sont moins atteints par les conséquences de la guerre, et que ceux qui ont précocement vécu la guerre ont plus de dégâts. Donc, tous ces enfants qui ont vécu la guerre entre l'age de 4 et 8 ans, en 2006, ont eu la même intensité de dommages.

Plus spécifiquement, nous pouvons dire que notre première hypothèse est vérifiée : l'attention des enfants ayant vécu la guerre de juillet 2006 est plus altérée que celle des enfants témoins. Cette atteinte se généralise à la capacité attentionnelle sélective, soutenue et auditive, mais non pas pour celle visuelle.

Au niveau de l'attention sélective, les enfants du groupe expérimental montrent des difficultés à ignorer des éléments et de porter leur attention uniquement sur d'autres éléments exigés. Cette sélection demande un certain effort mental, et est considéré comme un filtre qui permet d'éviter la surcharge du système mental (Broadbent ; 1958). Afin d'être bien perçues, les informations doivent être sélectionnées une à une. Ce qui se trouve déficitaire chez les enfants qui ont vécu la guerre, puisqu'ils n'arrivent pas à négliger des éléments et à focaliser leurs attentions sur les renseignements données. En conséquence, les enfants se distraient par l'autre stimulus, et ils n'ont pas la capacité d'inhiber la procédure automatique de la lecture des mots (Stroop), et de focaliser leur attention sur une cible particulière, qui est la couleur de l'encre. Cette focalisation se rend possible grace à des processus de sélection et d'activation de l'information cible et grace à l'inhibition de l'activation des informations potentiellement perturbatrices du traitement focal.

L'intégrité de certains processus inhibiteurs est donc nécessaire au bon fonctionnement de l'attention sélective ; et alors, nous remarquons chez les enfants qui ont vécu la guerre, le processus d'inhibition mentale, qui est une fonction exécutive, est également défaillante.

Au niveau de l'attention soutenue, le test d2 met en évidence un effet de fatigabilité ou une fluctuation attentionnelle, chez les enfants qui ont vécu la guerre. Ces derniers, en situation de guerre, leur attention était partagée entre la tache qu'ils effectuent et entre ce qui peut se

passer à l'extérieur, et, après le cessez-le-feu, ils étaient habités par la guerre et préoccupés par ce qui peut arriver à tout moment à eux-mêmes, à leurs collègues et leurs membres de leur famille. Dans ces conditions, ils n'étaient pas habitués à se concentrer totalement sur ce qu'ils exécutaient, et leurs attentions sont profondément affectées. Donc, les facteurs d'insécurité et la pensée aux évènements violents immédiats que les enfants doivent faire face, perturbent leurs capacités d'attention sur les taches proposées.

Une étude de l'aspect temporel des relations entre motivation et attention soutenue, nous parait d'un intérêt majeur pour une meilleure compréhension des difficultés rencontrées par les élèves qui ont vécu la guerre, et surtout les filles. Ils sont plus attentionnés à leurs soucis personnels qu'aux demandes de l'autre. Plusieurs facteurs entrent en jeu, pouvant diminuer la motivation : le stress personnel, l'instabilité de l'environnement,... Nos nombreuses gratifications étaient évaluées comme très motivantes pour les enfants ayant vécu la guerre.

L'enfance est considérée comme étant une période sans contraintes sociales et économiques, marquée par l'apprentissage et le jeu. Les enfants sont passés dans une période de temps, pendant et après la guerre, durant laquelle les lieux spécifiques aux jeux étaient détruits, les parents avaient peur de les laisser jouer dehors comme ils veulent, les enfants eux-mêmes étaient anxieux de ce qui peut se passer à n'importe quel moment (bombes, attaques aériennes, .). Ce qui a limité leur manipulation des jeux pour quelques semaines ou mois. Puisque le danger faisait partie de leur vie quotidienne, l'imprévu quasi-quotidien rendait difficile la projection de ces élèves dans l'avenir, et les empêche de planifier et de donner de sens et de l'intérêt aux taches cognitives et à l'éducation.

Au niveau de l'attention auditive, chez le groupe expérimental, il y avait beaucoup de comportements sans rapport avec la tache durant le subtest des couleurs, comme des mouvements des doigts et des mains, des tremblements, des hésitations, ... ce qui tend à confirmer un problème de l'attention et d'impulsivité, en plus d'un excès d'angoisse dü à la rapidité, que les enfants ont mentionné.

Au niveau de l'attention visuelle, la normalité obtenue chez le groupe expérimental, confirme que les enfants sont capables de conserver leur attention quand la charge cognitive augmente, et de conserver toutes les caractéristiques dans leur mémoire de travail. Tandis que

nous trouvons que les filles ayant vécu la guerre, ont plus de difficultés à ce niveau. Nous remarquons que les enfants du groupe témoin ont obtenu plus des scores limites.

La réalisation d'une tâche cognitive nécessiterait une mobilisation importante et un hyper-effort, pouvant entraîner une sensation de fatigue. Le maintien d'un niveau de performance suffisant au cours d'une épreuve ferait donc appel à un effort supplémentaire. Nous pourrons également envisager que, à partir d'un certain seuil de stress, l'enfant n'a plus la possibilité de compenser ses déficits attentionnelles. Mais, nos résultats ne montrent pas des différences significatives, chez les enfants qui ont plus des symptômes de stress posttraumatique. Ce qui peut montrer que la guerre est en elle-même un épisode stressant, même si le nombre des symptômes n'aboutit pas à un diagnostique pathologique de PTSD.

Ainsi, la deuxième hypothèse stipulant que les enfants qui ont vécu la guerre de juillet 2006 ont des difficultés au niveau de la mémoire auditive et visuelle, est également quasivérifiée. En effet, tous les résultats prouvent que l'exposition à la guerre a un effet perturbant sur la mémoire auditive plus que sur la mémoire visuelle.

Le subtest de la mémoire visuelle semble être plus facile que le subtest de la mémoire auditive pour les enfants des deux groupes. La reconnaissance et la mémoire des visages commencent à émerger dès la petite enfance. Cependant, les stratégies employées par les jeunes enfants pour identifier des visages inconnus sont les détails tels que des traits saillants, le type de coiffure et les lunettes. Ce qui n'est pas déficitaire chez notre groupe expérimental.

Le subtest des prénoms évaluant la mémoire auditive est une tache d'association de paires visuoverbales. Se souvenir de visages et de prénoms fait partie des expériences quotidiennes des enfants, tandis que c'est aussi complexe et implique la formation d'associations intermodales entre des informations visuelle et sémantique. Il fait appel à l'apprentissage, à l'attention active, à la planification stratégique et à l'aptitude à récupérer ce qui a été appris après un certain délai. Il demande aussi une facilité d'accès aux informations stockées en mémoire à long et à court terme. De ce fait, des faibles performances à cette tache apparaissent chez les enfants qui ont vécu la guerre, ce qui nous renseigne sur l'inorganisation

des stratégies et de la planification. Nous discernons qu'un chiffre non négligeable des enfants témoins a eu un score limite pour ce subtest.

Les chercheurs suggèrent que les déficits d'encodage ont un effet nocif sur le système de se souvenir à court terme. Les enfants de notre groupe expérimental manifestent autant de déficits dans la capacité de prendre de nouvelles informations mais pas dans la capacité à conceptualiser et à manipuler des informations précédemment encodées.

Incapables d'intégrer les souvenirs traumatiques, les enfants de la guerre semblent avoir perdu la capacité d'assimiler de nouvelles expériences. Les choses se passent donc comme si leur personnalité est arrêtée définitivement à un certain point, et ne pouvait plus s'accroître par l'adjonction ou l'assimilation d'éléments nouveaux (Janet, 1904). Tous ces enfants qui vivent un trauma semblent arrêtés dans l'évolution de la vie, ils sont accrochés à un obstacle qu'ils n'arrivent pas à « franchir ». Le stress est autant un moyen de perturber l'attention ou au contraire de focaliser l'attention sur des évènements passés. Leur esprit n'est pas disponible à l'écoute, à la mémorisation, au désir d'apprendre et de reproduire. Nous le comprenons : ils sont soucieux, inquiets, déstabilisés, déstructurés, apeurés, angoissés, appréhensifs au sujet de tout, de leur vie, des autres, du monde alentour.

Un des premiers concepts de Janet qui est tombé en abandon est son modèle de l'économie mentale. Selon ce modèle, le trauma occasionne une instabilité dans les niveaux psychologiques et trouble toujours la tension psychologique, la capacité de diriger l'énergie et la concentration vers un acte canalisé et créative, comme la mémoire des prénoms. L'expérience que les enfants ont vécue dans leur enfance, revenait en mémoire ; et quand la mémoire leur est ravivée par quelques évènements, c'est là que les symptômes réapparaissaient et que la personne souffrait de difficultés mentales dus à l'influence de ces remémorations.

D'autres chercheurs soulèvent la possibilité que les troubles de mémoire survenant chez certaines personnes ayant le PTSD pourraient découler notamment de troubles d'attention soutenue ou sélective (Wolfe & Schlesinger, 1997). Il devient donc important de contrôler ces variables lors de mesures du niveau de mémoire. Ce qui correspond à la corrélation trouvée entre l'attention soutenue et la mémoire visuelle.

L'insuffisance mnésique peut être liée à une inhibition intellectuelle avec un certain désintérêt, et peut aussi recouvrir un problème attentionnel, renvoyant à une anxiété ou au stress.

A noter que les épreuves utilisées pour l'évaluation de la mémoire, impliquent la mémoire sémantique et non pas la mémoire épisodique.

Par contre, quelques enfants peuvent avoir le stress post-traumatiques et utiliser le déni comme mécanisme de défense. Selon Yehuda et ses collègues (1995), ce ne serait pas l'âge des participants qui expliquerait les différents résultats, mais le temps écoulé entre le traumatisme et l'expérimentation. Un enfant qui est soumis à un stress intense et répété, ne va pas opérer ces différents contrôles sur lui-même comme un enfant élevé sans stress continu.

Selon certains chercheurs (Nixon et al., 2004), les troubles de mémoire sont fortement associés à l'intensité et au type d'expérience traumatisante plutôt qu'à la symptomatologie du PTSD. Donc, même si les symptômes du PTSD sont peu nombreux chez quelques enfants, leurs mémoires sont très affectées. Les symptômes ne sont donc pas apparents de manière constante et sont propres à chaque sujet. Il est tout à fait possible qu'une personne en état de stress posttraumatique, réponde adéquatement et intelligemment à des questions qui lui sont posées à propos de son vécu, de ses perceptions, ~

Conclusion

Les fonctions exécutives désignent un ensemble assez hétérogène de processus cognitifs de haut niveau permettant un comportement flexible et adapté au contexte. Suite aux résultats des enfants ayant vécus la guerre, déjà analysés, et en les comparant à ceux des enfants qui n'ont pas vécu la guerre, nous trouvons que toutes ces fonctions se trouvent altérées chez eux. En effet, en cas de vécu de guerre, les séquelles sont sévères et caractérisés par une grande diversité : la diminution des ressources attentionnelles et mnésiques.

Donc, suite à l'atteinte de l'attention et de la mémoire qui sont les éléments essentiels à tout ce que nous faisons dans notre vie, nous pouvons conclure que la guerre a un impact dangereux sur la totalité des aspects de la vie de ces enfants. Globalement, le groupe expérimental reste à surveiller.

Il est vrai que le vécu de la guerre entraine sur le plan cognitif une baisse de l'efficience des fonctions exécutives mais, les symptômes qui apparaissent suite à cette baisse de l'efficience ne sont pas les mémes chez tous les enfants. L'intensité des symptômes diffèrent selon le degré et la durée d'exposition à la guerre, les symptômes du PTSD, ainsi que le temps après la guerre qui est 4 ans, ~

Ce travail effectué a permis de répondre à notre problématique, mais notre vérification reste toujours non constante car tout dépend de plusieurs paramètres. Une multifactorialité des causes peut biaiser notre interprétation. Et, parce que l'enfant est plus perméable aux influences de son environnement, il faudra considérer le contexte familial, éducationnel, socioculturel et scolaire dans lesquels il évolue ; surtout que dans notre pays, malheureusement, la guerre est une réalité qui risque d'exister toujours. Alors, la permanence et la succession des conflits reconnus par les enfants du Sud du Liban, et les déclenchements brutaux des évènements agressants, mettent ces derniers dans un prolongement traumatique.

Les études dans ce domaine sont encore peu développées et beaucoup de données restent à analyser. Ces données, encore limitées, ouvrent toutefois des perspectives de recherche très prometteuses. La guerre est la plus difficile question à résoudre, surtout dans notre pays.

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annexes






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