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Le corps du schizophrène face à l'injection de neuroleptique

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par Sylvie D'HULST
IFSI Pamiers - I.D.E. 2008
  

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1. Formulation de la question de départ

1.1 La situation de départ

Stage de psychiatrie de deuxième année en CMP. Nous accueillons M. R, 30 ans. Il est suivi pour schizophrénie depuis quelques années et bénéficiait jusqu'alors d'un traitement oral. Suite à une décompensation de sa maladie à type d'hallucinations, un traitement injectable a été mis-en-place ; il s'agit du risperdal®, à raison d'une injection intramusculaire tous les quinze jours. M. R. a rendez-vous aujourd'hui pour sa deuxième administration de neuroleptique à action prolongée, la première ayant été faite lors d'une hospitalisation.

Les infirmières me présentent la situation. Elles me précisent que cette première injection en CMP est très importante ; d'une part, elle peut permettre d'établir une relation de confiance entre le patient et l'infirmière ; d'autre part elles m'expliquent que les soins invasifs chez les personnes atteintes de psychose révèlent parfois une dimension particulière chez eux ; en effet, ils peuvent-être vécus très difficilement compte tenu du rapport au corps singulier qu'implique cette maladie.

J'accueille M. R. avec une des infirmières dans la salle de soins et l'invite à s'asseoir sur la table d'examen. Il préfère rester debout. Je me présente et lui explique en quoi va consister le soin, après qu'il eût accepté que ce soit moi qui lui prodigue. Je le sens tendu et timide. Nous discutons un peu de ce nouveau traitement pendant la prise de paramètres ; je m'enquiers de l'apparition ou non d'effets secondaires suite à sa première injection. Il me précise qu'il n'en a décelé aucun et que la première injection l'avait soulagé. L'injection de risperdal® nécessitant une préparation particulière (seringue spéciale livrée dans un kit), je me « concentre » sur cette manipulation ; l'infirmière reste à mes côtés et converse avec le patient. Elle me dira plus tard qu'il n'est pas bon de laisser le patient « seul » face à ses angoisses dans ses moments-là, qu'il faut essayer de le rassurer le plus possible.

Ma seringue prête, je propose à M. R. de s'installer à plat ventre sur la table d'examen et de baisser un peu son pantalon. L'infirmière lui conseille de croiser les bras sous le menton et de se détendre. Elle m'expliquera par la suite que cette position permet au patient d'être plus décontracté. Pendant qu'elle lui parle, je procède à l'injection, en ayant pris soin de le prévenir au moment de la piqure. Je retire l'aiguille d'un geste rapide, désinfecte le site de ponction et applique le pansement. Suite à cela, je demande à M. R. comment il a vécu ce soin. Il me répond qu'il n'a pas ressenti de douleur et que ça s'est très bien passé pour lui.

Nous le raccompagnons avec l'infirmière dans le bureau afin de noter le prochain rendez-vous. Nous lui précisons les horaires d'ouverture du CMP et lui rappelons que nous sommes à sa disposition pour tout renseignement ou conseil dont il pourrait avoir besoin.

M. R. reviendra quinze jours plus tard pour l'injection suivante que je réaliserai seule. La discussion lors du soin sera plus longue et nous aborderons ses difficultés personnelles.

1.2 De la situation de départ à la question de départ

A la suite de ce stage, je gardais cette situation en tête pour plusieurs raisons. Le commentaire des infirmières concernant « le corps du psychotique » m'avait tout d'abord interpellé. De quoi parlaient-elles exactement ? Nous l'avions à peine évoqué en cours, mais j'en avais déjà souvent entendu parler dans la littérature. Quelques recherches complémentaires à ce sujet ne firent que confirmer la récurrence de cette particularité chez les patients atteints de psychoses, et tout particulièrement atteints de schizophrénies.

Plus tard au cours de ce même stage, un autre patient schizophrène refusa que je lui prodigue l'injection de neuroleptique, et je me demandais alors pourquoi l'un avait accepté et pas l'autre. L'injection intramusculaire avait-elle un sens particulier pour ce patient ? Avait-il eu peur d'avoir mal ? De se dévêtir devant une étudiante par exemple ? Ce refus était-il en rapport avec la pathologie dont il était atteint ? Je me demandais alors : l'injection intramusculaire se pratique-t-elle de la même manière chez un patient atteint de schizophrénie ou un patient « indemne » de cette maladie ?

Je me questionnais également à propos du CMP. Favorise t-il l'acceptation de ce soin ? Ce dernier est-il plus difficile à pratiquer en hôpital ? La phase d'état de la maladie a-t'elle une incidence sur la prise en charge ?

Enfin, je cherchais à comprendre ce qui avait fait que ce soin s'était déroulé sans difficulté particulière (si ce n'est la mienne durant la préparation du Risperdal !).

A ce stade de réflexion, mon analyse de la situation est plutôt « naïve » : certes, l'infirmière était là pour rassurer le patient, mais « Je » piquais et cette partie du soin me paraissait la plus compliquée et la plus importante ; le soin devait s'être bien passé car ce patient en l'occurrence ne présentait pas de troubles corporels et était stabilisé sur le plan du délire ; le patient était revenu pour l'injection suivante et se confia alors à moi. J'avais « réussi » le soin !

Aujourd'hui, grâce aux recherches des pôles théoriques et empiriques, à mon évolution professionnelle, mon analyse a changée. Si l'infirmière n'avait pas été à mes côté ce jour là, pour rassurer le patient, pour lui parler, pour le décontracter, aurais-je seulement pu lui administrer l'injection ? Serait-il revenu ? Peut-être que ce patient avait des troubles corporels que je n'avais pas vus mais que l'infirmière avait détectés, et de ce fait peut-être avait-elle plus particulièrement rassuré ce patient car elle avait senti que cela était nécessaire...

Au travers des pôles théorique et empirique, je vais donc essayer d'exposer les éléments qui m'ont permis d'avoir cette analyse différente de la situation.

Partant des éléments de la situation de départ, je fis dans un premier temps quelques recherches qui me permirent de cibler une question de départ. Je choisis de porter mon attention sur ce « corps du psychotique » que je souhaitais mieux comprendre. Je ciblais plus particulièrement les patients atteints de schizophrénie chez qui les troubles corporels, comme je l'ai déjà dit plus haut, semblent très « présents ». Je souhaitais également comprendre en quoi une injection intramusculaire peut révéler une dimension particulière chez ces patients ; le lien geste invasif-corps m'intéressait tout particulièrement, et de plus c'est un soin très souvent pratiqué en psychiatrie. Après mûres réflexions, je choisis de cibler l'injection de neuroleptique, que ce soit à action immédiate ou retardée ; en effet, ceci me permettrait de comparer des situations de crise (action immédiate), et des situations où les patients sont stabilisés (action retardée). Enfin, je souhaitais comprendre ce que fait l'infirmier de tous ces éléments réunis ; en tient-il compte ? Si oui, comment ? Développe-t-il des stratégies particulières ?

Je me posais alors cette question :

En quoi les troubles corporels du schizophrène peuvent influencer le rôle infirmier lors d'une injection de neuroleptique ?

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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci