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Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

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par Chouaibou MOUNTON
Université de Yaoundé II SOA - Master II professionnel en politiques urbaines et des collectivités territoriales décentralisées 2016
  

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UNIVERSITE DE YAOUNDE II-SOA

BP : 1365 Yaoundé BP : 18 Soa

Site web: www.uy2-soa.com

E-mail : uy2-soa@uy2-soa.com

Tél. : 22 21 34 04/ Fax : 77 99 14 23

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ECONOMIQUES ET DE GESTION

BP : 1365-YAOUNDE CAMEROUN
Tél. : (+237) 22 06 26 98/ Fax : 22 23 84 28

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MANAGEMENT

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Tel.: (+237) 22 06 26 98/ Fax: 22 23 84 28

MEMOIRE PRESENTE EN VUE DE L'OBTENTION D'UN MASTER

TERRITORIALES DECENTRALISEES

Par :

PROFESSIONNEL EN POLITIQUES URBAINES ET DES COLLECTIVITES

MOUNTON CHOUAIBOU

Sous la Direction de :
Dr. AUGUSTIN NGOMSI
CHARGE DE COURS A L'UNIVERSITE DE YAOUNDE II SOA
ANNEE ACADEMIQUE 2015-2016

1

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

2

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

SOMMAIRE

SOMMAIRE i

AVERTISSEMENT ii

DEDICACE iii

REMERCIEMENTS ...iv

LISTE DES SIGLES ET ABREVIATIONS v

LISTE DES GRAPHIQUES, SCHEMAS ET FIGURES viii

LISTE DES TABLEAUX ix

RESUME x

ABSTRACT x

INTRODUCTION GENERALE 2

PREMIERE PARTIE : ANALYSE DES LIENS ENTRE L'AMENAGEMENT DU

TERRITOIRE ET LA CROISSANCE URBAINE 7

CHAPITRE I : LA CROISSANCE URBAINE, UNE CONSEQUENCE DE

L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE 9

Section I : L'influence positive de l'aménagement du territoire sur la croissance urbaine 9

A. Aménagement du territoire et croissance endogène 9

A.1. Dépenses publiques et croissance urbaine 9

A.2. Le foncier, la différenciation urbaine et la croissance urbaine 15

B. Aménagement du territoire et économie d'agglomération 17

B.1. Apport de l'économie géographique 17

B.2. Apport de la théorie des pôles de croissance 18

Section II : influence négative de l'aménagement du territoire sur la croissance urbaine 21

A. Théorie de flux migratoires des facteurs de production 21

3

4

5

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

A.1. L'apport du modèle de Tiebout 21

A.2. L'apport du modèle d'Alonso 22

B. Théories marxistes 23

B.1. Analyse de Marx 23

B.2. Analyse des néo-marxistes 24

CHAPITRE II : LA CROISSANCE URBAINE, UNE CAUSE DE L'AMENAGEMENT DU

TERRITOIRE 25

Section I : Influence de la croissance urbaine sur l'aménagement du territoire 25

A. La théorie du développement 25

A.1. Croissance démographique et aménagement du territoire 25

A.2. Foncier urbain et aménagement du territoire 26

B. La croissance démo-économique et l'aménagement du territoire 27

B.1. Populations et richesse urbaine 27

B.2. Apport de la théorie de la modernisation 29

Section II : Lien empirique entre la croissance urbaine et l'aménagement du territoire 29

A. Croissance du PIB et aménagement du territoire 30

A.1. Modèle de Catin, Hanchane et Kamal 30

A.2. ouverture internationale et aménagement du territoire 30

B. Infrastructures, services publics et croissance démographique 31

B.1. Infrastructures, services publics et efficacité économique 31

B.2. Croissance démographique et aménagement du territoire 35

DEUXIEME PARTIE : VERIFICATION DU LIEN DE CAUSALITE ENTRE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET LA CROISSANCE URBAINE AU

CAMEROUN 39

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

CHAPITRE III : LES PRATIQUES DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET LA

CROISSANCE URBAINE AU CAMEROUN 41

Section I : Les caractéristiques de la croissance urbaine dans les villes Camerounaises 41

A. Croissance urbaine et habitat urbain 41

A.1. Visage actuel des villes camerounaises 41

A.2. Villes camerounaises et quartiers précaires 44

B. Croissance urbaine et transports urbains 45

B.1. Villes camerounaises et embouteillages 45

B.2. Genèse du phénomène de « mototaxis » 47

Section II : Les approches pratiques des dirigeants en matière

d'aménagement du territoire 48

A. Les différentes formes d'organisation spatiale du territoire 49

A.1. les scénarii d'aménagement du territoire 49

A.2. la vision du DSCE par rapport au territoire Camerounais 51

B. Les approches pratiques des dirigeants pour faire face aux désordres

urbains 53

B.1. Interventions des délégués du gouvernement dans les grandes villes 53

B.2. Intervention des pouvoirs centraux 56
CHAPITRE IV : RESULTATS DE LA VERIFICATION EMPIRIQUE ET

RECOMMANDATIONS 62

Section I : Méthodologie et résultats de l'analyse 62

A. Modèles 62

A1. Spécification des modèles 62

A.2. Les variables 63

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

B. Estimation des modèles 64

B.1. Source des données 64

B.2. Méthode d'estimation 65

C. Les résultats 65

C.1. Présentation des résultats 65

C.2. Analyse des résultats 69

Section II : les recommandations de politiques économiques ou urbaines 70

A. Recommandations d'ordre socioéconomique et politique 71

A.1. Recommandations d'ordre socio-économique 71

A.2. Recommandations d'ordre politique 73

B. Recommandations d'ordre pratique 74

B.1. Recommandation par rapport aux villes 74

B.2. Recommandation par rapport aux documents de planification 74

CONCLUSION GENERALE ..76

BIBLIOGRAPHIE ...78

ANNEXES 81

TABLE DES MATIERES ...83

6

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

AVERTISSEMENT/WARNING

L'université de Yaoundé II et la Faculté des Sciences Economiques et de Gestion n'entendent donner aucune approbation ni improbation aux opinions émises dans ce mémoire. Ces opinions

doivent être considérées comme propres à leur auteur.

The University of Yaoundé II and the Faculty of Economics and Management will not give their approval or rejection on opinions contained in this thesis. These opinions should be

considered as their author owner.

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

DEDICACE

7

A mes parents

Monsieur Ngah Amadou et Madame Mbopuwouo Sanatou, pour tout ce qu'ils ont du enduré

pour faire de moi ce que je suis devenu,

A ma grande soeur

Madame Mojap Amsétou, pour son soutien inconditionnel, lequel a rendu possible cette

formation.

8

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

REMERCIEMENTS

Le présent mémoire ne serait jamais arrivé à terme sans l'apport de nombreuses personnes physiques et morales à qui nous adressons toute notre gratitude. Nos remerciements

vont ainsi à l'endroit :

Du doyen de la faculté des Sciences Economiques et de Gestion de l'Université de Yaoundé II pour m'avoir donné une formation de qualité grâce à son établissement,

Du Docteur Augustin Ngomsi, pour avoir accepté d'assurer la direction de notre

mémoire,

Du coordonnateur du programme Master professionnel Politiques Urbaines et des CTD, le professeur Isaac Tamba, pour le bon encadrement dont il a fait montre à notre égard,

Du vice-coordonnateur, le Docteur Schouame Ebenezer, pour ses conseils et sa

disponibilité,

De l'ensemble du corps enseignant de la Faculté des Sciences Economiques et de Gestion en général, et du programme Master professionnel Politiques Urbaines et des CTD en

particulier,

Du Ministre de l'Habitat et du Développement Urbain pour nous avoir permis de compléter notre formation en acceptant notre demande de stage, de Madame le directeur de la DEPC pour avoir encadré notre stage au Ministère, de Madame le sous-directeur de la CEP et du C6 pour avoir facilité notre stage tout en nous assistant dans la rédaction de notre mémoire,

De notre famille, et de tous ceux qui, de près ou de loin, ont contribué au succès de notre

formation.

9

10

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

SIGLES ET ABREVIATIONS

AFD : Agence Française de Développement

AMA: Capital avancé Marchandise Argent

BEAC : Banque des Etats d'Afrique Centrale

BIP: Budget d'Investissements Publics

CEMAC: Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale

CERED: Centre de Recherche pour le Développement

CFC: Crédit Foncier du Cameroun

CTD: Collectivité territorial Décentralisée

CP: Contrats Plans

DF: Documentation Française

DSCE: Document de Stratégie pour la Croissance et l'Emploi

DSRP: Document de Stratégie pour la Réduction de la Pauvreté

DSRPU: Document de Stratégie pour la Réduction de la Pauvreté Urbaine

ECAM: Enquête Camerounaise Auprès des Ménages

INS : Institut National de la Statistique

MAETUR: Mission d'Aménagement et d'Equipement des Terrains Urbains et Ruraux

MAM : Marchandise Argent Marché

MINHDU : Ministère de l'Habitat et du Développement Urbain

NAS: National Academic of Sciences

OCDE Organisation pour la Coopération et le Développement Économique

ODD: Objectifs pour le Développement Durable

OMD: Objectifs du Millénaire pour le Développement

ONU : Organisation des Nations Unies

ONU-HABITAT : Organisation des Nations Unies pour l'Habitat

PDU : Plan Directeur d'Urbanisme

PIB : Produit Intérieur Brut

PLADDT : Plans Locaux d'Aménagement et de Développement Durable du Territoire

PME : Petite et Moyenne Entreprise

POS : Plan d'Occupation des Sols

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

PPP : Partenariats Publics-Privés

PS : Plans de Secteur

PSU : Plan Sommaire d'Urbanisme

PUD : Plans d'Urbanisme Directeurs

R& D : Recherche et Développement

SDAU : Schéma Directeur d'Aménagement Urbain

SNADDT : Schéma National d'Aménagement et de Développement Durable du Territoire SRADDT : Schémas Régionaux d'Aménagement et de Développement Durable du Territoire

SS : Schémas Sectoriaux

UNFPA: United Nations Population Fund

11

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

LISTE DES GRAPHIQUES, SCHEMAS ET
FIGURES

Graphique 1A : Evolution du BIP, de la POPTOTAL et de la POPURB

entre 1986 et 2015 42
Graphique 1B : Evolution du BP de la POPTOTAL et de la POPURB

entre 1986 et 2015 42

Image 1 : Infrastructures et transports 20

Schéma 1 : du budget des dépenses publiques aux services publics 10

Schéma 2 : Le polycentrisme maillé du territoire camerounais 52

Schéma 3 : Arbre à problèmes/ transports urbains...................................................57 Schéma 4 : Arbre à problèmes / gouvernance urbaine...............................................58 Schéma 5 : Arbre à Problèmes / Urbanisme-Habitat-Cadre de vie..................................59

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

LISTE DES TABLEAUX

12

Tableau 1 : Données socio-économiques sur le Cameroun

.. ..81

Tableau 2 : Forme logarithmiques des données socio-économiques sur le Cameroun

82

Tableau 3 : régression du premier modèle dans Eviews

65

Tableau 4 : régression du deuxième modèle dans Eviews

57

Tableau 5 : Sens de causalité entre les variables

68

13

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

RESUME

Ce travail voudrait savoir si les politiques urbaines sont la cause ou la conséquence de la croissance urbaine au Cameroun.

La recherche documentaire et le test de causalité au sens de Granger laissent penser que non seulement il existe un lien entre les politiques urbaines en matière d'aménagement du territoire et la croissance urbaine, mais aussi, la croissance urbaine est la cause de la mise en oeuvre des politiques urbaines.

Nous recommandons donc la mise en place des instruments de planification urbaine de nature à améliorer le cadre et le niveau de vie des populations urbaines.

Mots-clés : aménagement du territoire, croissance urbanisme, Cameroun.

14

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

ABSTRACT

This work would like to know if urban policies are the cause or the consequence of the urban growth in Cameroon.

Documentary research and the Granger causality test show that not only there is correlation between territory layout and urban growth but also, urban growth causes territory layout.

So we recommend the elaboration of the urban planning instruments which can ameliorate the surround and the life conditions of the urban populations.

Key words: territory layout, urban growth, Cameroon.

15

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

INTRODUCTION GENERALE

16

17

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

CONTEXTE

Le concept de l'aménagement du territoire s'est imposé en langue française dans les années 1960 grâce à des auteurs tels que Lajugie (1964), Gottmann (1966), Labasse (1966) ou Rochefort et al. (1970). Il se définit d'abord par sa finalité que l'on peut, comme Piveteau (1979) assimiler à une réponse à des contradictions spatiales, contradictions qui ont cru avec le temps en raison de la multiplication des dysfonctionnements, des déséquilibres spatiaux et des destructions (notamment de l'environnement écologique et du patrimoine). Il s'explique aussi par le changement d'attitude des pouvoirs publics et par les nouvelles compétences de ces derniers en matière de gestion de l'espace.

Les géographes tels que Brunet et al., (1998) définissent ce concept comme l'action volontaire et réfléchie d'une collectivité sur son territoire, soit au niveau local (aménagement urbain, rural, local), soit au niveau régional (grands aménagements régionaux, irrigations), soit au niveau national (aménagement du territoire). Pour eux, le territoire est une maille de la gestion de l'espace, un espace approprié avec sentiment ou conscience de son appropriation et relevant d'un Etat.

Avec la montée en puissance de la mondialisation, l'aménagement du territoire devrait occuper le centre des préoccupations aussi bien des chercheurs que des décideurs. La majorité des villes à travers le globe fait déjà face à la hausse considérable du taux de chômage, la multiplicité des flux migratoires inter et intracontinentaux. Elle présente aussi une désarticulation de son territoire et une désintégration économique. Ces villes vivent au quotidien les réalités que sont le désordre et l'anarchie urbaine.

La mondialisation implique la libre circulation, le brassage économique, social et culturel. De ce fait, elle peut être un handicap pour les territoires mal aménagés et les économies mal structurées. Ce dynamisme qui se traduit localement par une forte pression sur le processus d'urbanisation est source d'une explosion des besoins en infrastructures urbaines et en services collectifs, lesquels sont exacerbés par l'importance des retards accumulés et par l'accroissement de la pauvreté en zone urbaine (AFD, 2005).

La tendance actuelle de l'aménagement du territoire est à la décentralisation. Depuis plus d'une dizaine d'années, les politiques d'aménagement du territoire s'intéressent aux politiques de décentralisation. Ces politiques s'accompagnent d'un transfert de responsabilité vers les CTD destinées à devenir progressivement des acteurs majeurs dans les domaines du développement

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

économique, de la fourniture des services essentiels et de la lutte contre la pauvreté. Mais alors, elles sont souvent peu expérimentées et peu préparées à la gestion de la ville. Cette nouvelle configuration conduit les bailleurs de fonds à faire évoluer leurs modes d'intervention1. Ainsi, les politiques d'aménagement du territoire doivent être fondées sur la réciprocité2, doivent être un instrument de compétitivité nationale de l'économie, doivent être placées au coeur des priorités, et doivent promouvoir le développement endogène et des modes d'urbanisation modernes.

En effet, les modes d'urbanisation sont aussi un des enjeux majeurs de l'aménagement du territoire. Le territoire est au coeur des stratégies visant à renforcer la compétitivité et l'attractivité économique. Il incarne les nouveaux ressorts de la compétitivité : la mobilisation du savoir des hommes, leurs capacités d'organisation productive, la valorisation des singularités.

La performance des entreprises ne s'entend plus sans un environnement de qualité que seule une communauté d'acteurs (le capital social) peut organiser et maintenir dans ses dimensions technologiques, mais aussi sociales, culturelles et environnementales. Le besoin d'innovation réclame aujourd'hui le développement de systèmes où inter-réagissent unités de production et services d'accompagnement. De tels systèmes exigent de fortes convergences entre stratégie d'entreprises et projets de territoires.

Les nouvelles dynamiques d'emploi s'appuient largement sur le développement de nouveaux services de proximité. Ils requièrent des systèmes d'organisation collective et le développement de fonction de stimulation et d'expérimentation. Ces systèmes ne sauront se construire et durer qu'en s'organisant à partir d'espaces vécus.

Ainsi, l'initiative locale et collective, en valorisant les composantes de la proximité (voisinage, esthétique, échange, quotidienneté...) est en mesure de s'affirmer comme précurseur de nouvelles solidarités complémentaires des mécanismes traditionnels. Ces mécanismes apparaissent de plus en plus dans leurs insuffisances. Le territoire est l'instrument de la modernisation des politiques publiques. Il impose la transversalité à ces politiques, leur

1 Il s'agit en particulier de passer de financements jusqu'ici principalement attribués à l'Etat (financement souverain) à des financements attribués aux communes directement (financement sous-souverain) ou par le biais d'institutions spécialisées. L'enjeu est également de faciliter l'accès des municipalités au marché financier, grâce à la mise en place de mécanismes spécifiques (émission des titres, emprunts obligataires).

2 La réciprocité est le fait de fonder une pratique sur le principe d'équilibre, le principe d'harmonie.

18

19

20

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

décloisonnement. Il impose aussi l'enjeu d'une démarche qui doit faire converger la légitimité des politiques publiques sectorielles et les initiatives locales des acteurs économiques et sociaux. Cette démarche doit favoriser la rencontre entre un processus ascendant global, complexe, nourri de la mobilisation de ses acteurs locaux et un processus descendant qui équilibre et qui intègre au nom de l'équité républicaine. in fine, il est le lieu d'ancrage de nos institutions locales, reste le domaine de l'action exclusive de l'État qui dispose à travers « la compétence de la compétence » de degrés de liberté non affectés par les effets de la mondialisation. Ces libertés lui permettent toutes les initiatives pour améliorer l'efficacité économique tout autant que démocratique du système d'administration publique (Lipietz, 2001).

Ainsi, les politiques d'aménagement du territoire doivent donc être en mesure d' « aménager le territoire plutôt que de déménager les hommes » tout en essayant, autant que faire se peut, de maîtriser la croissance urbaine.

PROBLEMATIQUE.

L'aménagement du territoire est un art au service de la puissance publique, qui vise à travers une planification physique pertinente, à favoriser la réduction autant que faire se peut des disparités inter ou intra régionales. Il est l'une des missions régaliennes de l'Etat, qui cherche à atteindre les objectifs de cohésion territoriale et la solidarité nationale de manière à créer des synergies entre le développement économique et la protection de l'environnement. Cela passe par la réalisation du souci du « détenteur de la compétence de la compétence » de créer des conditions de vie décente dans un cadre décent, de permettre l'accès égal à tous les points du territoire à ses populations. En bref, les politiques d'aménagement du territoire visent à maîtriser la croissance urbaine tout en garantissant le bien être des populations.

Le Cameroun est marqué par deux faits incontestables. D'un côté, l'Etat essaye depuis l'indépendance de maîtriser la croissance urbaine en mettant sur pied plusieurs instruments3 en matière d'aménagement du territoire, de l'autre côté, la croissance urbaine explose4 entraînant avec qu'elle de nombreux problèmes parmi lesquels le désordre et l'anarchie urbaine.

3 Lois, SDAU, PUD, PDU, POS, PS, PSU

4 52% de taux d'urbanisation selon l'INS

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

Malgré le dynamisme des pouvoirs publics en matière d'aménagement du territoire, les réalités au Cameroun montrent plutôt une fragilité accentuée de l'économie, une désintégration du territoire et des systèmes productifs. On note que les dirigeants ont d'énormes difficultés à apporter des solutions adaptées aux problèmes que sont la crise économique, le chômage, le manque de compétitivité économique, l'anarchie urbaine, la non maîtrise du foncier et la poussée démographique en milieu urbain, bref, la non maîtrise de la croissance urbaine.

On peut donc s'interroger de la relation entre la croissance urbaine et l'aménagement du territoire au Cameroun. Est-ce que c'est l'aménagement du territoire qui est à l'origine de la croissance urbaine ou bien c'est la croissance urbaine qui incite à l'aménagement du territoire au Cameroun ? En d'autres termes, est-ce que ce sont les politiques publiques en matière d'aménagement du territoire qui impactent la croissance urbaine ou bien c'est la croissance urbaine qui amène les pouvoirs publics à mettre en oeuvre ces politiques? Quelle relation existe-il entre l'aménagement du territoire et la croissance urbaine au Cameroun ?

OBJECTIFS

L'objectif principal de ce travail est de connaitre le sens de la causalité entre l'aménagement du territoire et la croissance urbaine au Cameroun. Plus précisément, nous voulons savoir si les politiques publiques en matière d'aménagement du territoire sont justifiées ou expliquées par la croissance urbaine ou bien c'est la mise en place de ces politiques qui sont à l'origine de cette croissance urbaine.

HYPOTHESES

Nos objectifs nous amènent à la formulation des hypothèses suivantes :

- L'aménagement du territoire influence positivement la croissance urbaine au Cameroun. - La croissance urbaine influence négativement l'aménagement du territoire au Cameroun.

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

METHODOLOGIE

Notre analyse se fera grâce à la recherche documentaire et l'analyse économétrique. A partir des données de l'INS et de la Banque Mondiale, nous effectuerons des tests de corrélation et de causalité au sens de Granger afin de savoir si d'une part, il existe une relation entre les politiques d'aménagement du territoire et la croissance urbaine et d'autre part le sens de cette relation et donc de la causalité entre ces deux variables.

INTERET

Les résultats de notre analyse permettront aux autorités de mettre en place des politiques urbaines efficaces qui prennent en compte la dynamique urbaine et les moyens dont disposent les acteurs concernés.

PLAN DU TRAVAIL

Notre travail s'organise autour de deux grandes parties :

La première partie met en exergue la relation potentielle entre l'aménagement du territoire et la croissance urbaine ;

La deuxième partie procède à la vérification empirique dans le cas du Cameroun.

21

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

PREMIERE PARTIE :

ANALYSE DES LIENS ENTRE

L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE

ET LA CROISSANCE URBAINE

22

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

INTRODUCTION

L'objectif de cette partie est de présenter les liens éventuels entre l'aménagement du territoire et la croissance urbaine. La méthodologie déployée est la recherche documentaire.

La partie s'organise autour de deux chapitres :

- Le premier met en exergue l'influence de l'aménagement du territoire sur la croissance urbaine ;

- Le deuxième met en exergue l'influence de la croissance urbaine sur l'aménagement du territoire.

23

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

CHAPITRE I : LA CROISSANCE URBAINE, UNE CONSEQUENCE DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE

L'objectif de ce chapitre est d'analyser l'influence de l'aménagement du territoire sur la croissance urbaine. La littérature laisse penser que cette influence peut être positive ou négative. Notre chapitre s'organise autour de deux principales sections :

- la première section met en exergue l'influence positive de l'aménagement du territoire sur la croissance urbaine ;

- la seconde section met en exergue l'influence négative de l'aménagement du territoire sur la croissance urbaine.

Section I : L'influence positive de l'aménagement du territoire sur la croissance urbaine.

Diverses théories tentent de mettre en exergue l'influence positive de l'aménagement du territoire sur la croissance urbaine. Nous nous intéresserons aux théories liées aux modèles de croissance endogène (A) et celles liées aux économies d'agglomération (B).

A. Aménagement du territoire et croissance endogène

Les politiques publiques d'aménagement du territoire présentent des atouts indéniables lorsqu'elles sont véritablement mises en oeuvre. Leurs succès passent par la réalisation des infrastructures importantes, les services publics, la maîtrise du foncier ainsi qu'une différenciation du territoire.

24

25

26

27

28

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

A.1. Dépenses publiques et croissance urbaine

SCHEMA 1 : DU BUDGET DES DEPENSES PUBLIQUES AUX SERVICES PUBLICS.

BUDGET DES
DEPENSES
PUBLIQUES

BUDGET

D'INVESTISSEMENT

BUDGET D'INVESTISSEMENTS COURANTS

CAPITAL PUBLIC

INFRASTRUCTURES PUBLIQUES

TARIFICATION UNIFORMISEE

SERVICES PUBLICS GRATUITS

SERVICES PUBLICS

SERVICES PUBLICS

SERVICES PUBLICS
AVEC CONGESTION

Source : Charlot (1996) et traitement de l'auteur

SERVICES PUBLICS PAYANTS

Le schéma ci-dessus décrit le budget des dépenses publiques. Il montre l'importance de ces dépenses dans la relance des activités économiques grâce à la mise en oeuvre des infrastructures et des équipements indispensables pour les agents économiques.

Meade (1952) considère que le capital public a deux rôles dans la sphère économique : il peut être un facteur de production non-rémunéré mais, aussi, une variable d'environnement qui

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

contribue à augmenter la productivité du capital privé et du travail. Ceci peut être traduit en termes d'externalités. Les services publics sont à la base de deux grandes catégories d'externalités technologiques.

Ils sont tout d'abord source d'externalités technologiques directes. Ils sont en effet des facteurs de production non-rémunérés (Barro, 1990) ou rémunérés à un taux inférieur à leur productivité marginale. Les services tels l'utilisation de réseaux électriques ou de canalisations rentrent dans la fonction de production des entreprises sans engendrer de coût supplémentaire.

Outre cette externalité directe, les services publics engendrent des externalités technologiques indirectes. L'existence de services de transport et communication, même s'ils sont payants, améliore la circulation des sources de progrès technique comme les innovations, la connaissance. Les produits joints de la production circuleront plus rapidement entre les agents, si les infrastructures sont développées. Les infrastructures de transport et communication constituent un support de transmission des externalités directes procurées par le capital humain, les innovations, le progrès technique. Elles favorisent donc les externalités de "spillover" (Artus et Kaabi, 1993) et développent les organisations de type réseaux.

Que l'externalité soit directe ou indirecte, les services publics sont complémentaires aux facteurs privés. Ils accroissent en effet la productivité du capital privé et du travail, et améliorent les combinaisons productives. Ils peuvent accroître le nombre de combinaisons productives possibles et modifier les complémentarités et/ou substitutions existant entre les autres facteurs. Par exemple, dans l'analyse de la croissance de Kaldor (1959), la substitution entre travail et capital n'est pas élevée pour un processus donné mais varie avec les infrastructures qui transforment ce processus de production.

L'offre publique de services aux entreprises permet également d'obtenir des gains par l'allongement du détour de production. Cet allongement stimule la division du travail et la spécialisation des tâches (Kaldor, 1970). Il s'agit également d'effets que les agents ne contrôlent pas individuellement et qui vont pourtant accroître leur utilité future, en transformant la structure des coûts de production. Ces effets peuvent être décrits en termes d'externalités pécuniaires (Charlot, 1996).

Les politiques de développement économique des territoires peuvent permettre de tirer le meilleur parti de leurs atouts, même s'ils sont modestes, et d'enrichir leur base productive. Au

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

besoin, des politiques de redistribution sont susceptibles de compenser partiellement les inégalités de revenus qui, dans certains cas, sont même susceptibles de servir de moteur de croissance par un effet de caractère keynésien (Prager et Thisse, 2009).

De même, les théories économiques modernes ont élargi le paradigme de la croissance de façon à rendre endogène la capacité d'innovation. Cette action s'est faite par la mise en exergue de la relation entre la croissance et les composantes institutionnelles au travers de la motivation à investir dans l'innovation (Aghion, 2002). Ainsi, une meilleure protection des droits de propriété intellectuelle, un contexte entrepreneurial favorable aux activités innovantes et une plus grande efficacité institutionnelle de la recherche sont perçus comme étant de nature à stimuler la croissance.

Cette approche offre un solide cadre théorique permettant d'expliquer les différences institutionnelles entre les pays faisant l'expérience d'une croissance économique soutenue et ceux qui stagnent. Les premiers sont ceux où le système juridique et le système d'éducation permettent aux entrepreneurs de profiter de la diffusion des connaissances, faisant ainsi évoluer le pays vers la frontière technologique. Par contre, les pays manifestant une forte instabilité dans les règles du jeu économique dissuadent les élites d'investir dans des activités innovantes et les orientent vers la lutte pour la capture de la rente publique («rent-seeking»). Cette lutte se fait alors au détriment de la rente d'innovation (Baumol, 2002).

Les modèles de croissance endogène tiennent compte de ces externalités positives dans l'analyse de l'évolution de long terme des taux de croissance des économies. Les premiers modèles se sont centrés sur la connaissance (Römer, 1986, 1990) et la formation (Lucas, 1988), puis les dépenses publiques au sens large ont été évoquées (Barro, 1990 ; Artus et Kaabi, 1993). Ces derniers travaux mettent en avant la nécessité de la production par l'Etat de certains services source d'externalités. Le rôle économique de l'Etat est alors clair: produire des services qui vont accroître la productivité (Barro, 1990) et/ou accroître l'utilité des ménages (Artus et Kaabi, 1993), sans être directement financés par les agents mais par une taxe, et permettre à l'économie de se positionner sur une trajectoire de croissance optimale (Charlot, 1996).

Selon Lucas (1993), la formation et la croissance des villes s'expliquent par la présence de rendements croissants liés à la spécialisation industrielle et à la formation d'un marché local du travail, mais également au potentiel de la demande finale localisée, c'est-à-dire au potentiel de

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

marché que représente une agglomération. Il initie, par-là, un ensemble de modèles de croissance endogène qui prennent en considération les dynamiques d'agglomération engendrées par la formation d'un capital humain localisé.

La théorie générale de l'emploi de l'intérêt et de la monnaie a été popularisée par John Maynard Keynes dans les années 30. Elle montre qu'on peut stimuler la croissance économique par la consommation, l'investissement ou les dépenses publiques.

Keynes stipule que le chômage est le résultat d'une insuffisance de la demande effective. L'Etat peut agir sur les deux composantes de la demande globale :

- sur la consommation : l'Etat peut augmenter les revenus disponibles en réduisant la fiscalité. Plus directement, l'Etat peut accroître sa propre consommation (la consommation publique).

- sur l'investissement : en réduisant les taux d'intérêt, l'Etat va réduire le coût des emprunts pour les ménages et le coût de financement des investissements pour les entreprises.

Dans les faits, l'action de l'Etat se traduira par une politique budgétaire expansive. L'impact sur l'économie sera plus que proportionnel, c'est ce que l'on appelle l'"effet multiplicateur".

La théorie de la base exportatrice est une transposition territoriale des modèles post-keynésiens de croissance par la demande. Les activités d'exportation sont l'élément principal de la dynamique économique régionale, alors que la croissance des branches productrices des biens et services pour le marché local dépend des revenus distribués par le secteur d'exportation. L'approche en termes de clusters5 lui est associée et est devenue un élément incontournable des doctrines de développement régional, malgré sa fragilité aussi bien théorique qu'empirique. C'est le bon mélange des clusters, aussi bien dans leur nombre, et leur importance que dans leur variété qui fait la richesse d'un territoire.

5 Un cluster est une concentration géographique d'entreprises et d'organismes divers (associations, banques, sociétés de conseil, infrastructures de formation,...) se rattachant à une activité. Il permet donc à chacun de ses membres de bénéficier d'économies d'échelles en gardant la souplesse d'une PME (Porte 2001). Les clusters peuvent être décrits et analysés de trois manières complémentaires qui se réfèrent chacune à un « type idéal » correspondant à une perspective particulière de l'agglomération (Gordon et Mc Cann, 2000) :

· le modèle traditionnel du « complexe industriel », concentration géographique d'activités reliées dans une même chaîne de valeur, autour, en général, d'une ou plusieurs grandes entreprises directrices (automobile, aéronautique, chimie, ..) ;

· l'agglomération d'entreprises - le plus souvent des PME -, relevant de la même activité, induite par la division du travail et les avantages liés à la spécialisation locale d'inputs humains, physiques ou immatériels, l'ensemble étant le fruit d'arbitrages entre coûts de transaction et économies d'échelle ;

· le modèle du tissu économique et social, des réseaux sociaux, formels ou informels, qui contribuent à renforcer la confiance et à faciliter la circulation des connaissances dans une aire géographique déterminée, la proximité géographique restant un facteur de réduction des incertitudes et des coûts de transactions dans les activités innovantes.

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

La théorie de la base inverse la théorie traditionnelle faisant dépendre la croissance des variables internes telles la croissance démographique ou l'accumulation du capital. Cette théorie avait l'intuition majeure de faire dépendre la croissance de petits ensembles territoriaux aux variables exogènes en l'occurrence les exportations. Selon cette théorie, la croissance urbaine est due principalement à des facteurs extérieurs à la ville, en particulier par la demande d'exportations. Sa formulation la plus simple part d'un constat clair : « seuls les ensembles économiques de grande dimension, sont maîtres de leur développement au point que celui-ci dépend de variables internes, de proportions qui leurs sont propres. Si l'on considère des « morceaux d'espace » infranationaux incomplets, spécialisés, ils ne peuvent plus tirer de leurs efforts ni de leurs aptitudes propres les moyens de leur croissance. Celle-ci dépend des signaux venus de l'extérieur». Cette théorie d'inspiration mercantiliste, keynésienne et même néoclassique (le modèle de l'échange international) a inspiré un grand nombre de travaux (Hoyt, 1954 ; North, 1955). La théorie a des racines mercantilistes puisqu'elle repose sur le rôle primordial des échanges commerciaux de la ville avec le monde extérieur; son appartenance au keynésianisme est apparente : la théorie permet la définition du coefficient multiplicateur. Quant à la filiation néoclassique; on peut établir le coefficient de localisation à partir de la notion d'intensité relative d'une activité dans l'espace.

Selon cette théorie, les activités d'exportation sont l'élément principal de la dynamique économique régionale, alors que la croissance des branches productrices des biens et services pour le marché local dépend des revenus distribués par le secteur d'exportation.

Des auteurs comme Czamanski (1964) ont essayé d'aboutir à un schéma dynamique qui développe les propos de la théorie ; ils ont proposé que le processus de développement urbain se succède selon des phases au cours desquelles certaines activités auront un rôle moteur de la croissance et des phases où ces mêmes activités seront liées par d'autres. Ces auteurs proposent d'expliquer les différentes étapes de la croissance urbaine selon un schéma d'ensemble qui n'est pas sans rappeler celui de Walt Rostow (1963) pour le développement économique général.

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Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

A.2. Le foncier, la différenciation urbaine et la croissance urbaine

Malthus (1815) et Smith (1776) considèrent que la rente foncière est un don gratuit de la nature récupérée par les propriétaires fonciers en vertu de leur pouvoir monopole de détention de la terre. La terre constitue un capital, voire une valeur refuge sur laquelle investissent les urbains au profit de leurs enfants ou pour accroître leur propre richesse (pratiques spéculatives). Ces dynamiques - anciennes - s'accélèrent aujourd'hui en raison de l'augmentation très importante de la valeur des parcelles, notamment en milieu péri-urbain où les champs se transforment en terrains à bâtir. Cette évolution s'accompagne de pratiques clientélistes : les élites économiques ou politiques nationales et locales utilisent le foncier comme moyen de rétribution et de consolidation de leur base sociale et de leur clientèle politique (Mansion et Broutin, 2012).

La théorie des places centrales de Christaller (1955) a connu plusieurs extensions dont celles proposées par Losch (2002). Losch a montré « qu'il y a avantage à ordonner les ensembles de réseaux urbains en un paysage économique où des secteurs riches en villes, ..., alternent avec des secteurs plus pauvres en agglomérations ».

Le caractère centrifuge des mouvements d'activités a fait l'objet de diverses enquêtes qui l'ont rendu évident. Ces enquêtes ont été à la base de plusieurs constructions théoriques qui empruntent une idée très ancienne selon laquelle : derrière l'acquisition d'un bien foncier, il y a aussi la disponibilité d'un type d'accès au centre.

Différents travaux ont été menés à partir du modèle d'Alonso (1964) aux Etats-Unis et en France. Selon ces travaux, pour minimiser les dépenses de transport et accroître ainsi la surface de son logement, un individu recherchera une localisation proche du centre. Le prix de l'unité de sol central s'élèvera, ce qui dissuadera certains de s'y rapprocher. Finalement, le prix du sol décroîtra du centre vers la périphérie parallèlement à la croissance des dépenses de transport. Un double arbitrage intervient donc : entre dépenses de transport et de logement ; entre prix de l'unité d'espace et quantité d'espace.

Dans le même ordre d'idée, l'importance du modèle élaboré par Mayer (2001) est qu'au lieu de partir du centre pour expliquer la décroissance des prix du sol plus on s'approche de la périphérie; « c'est l'évolution du prix du sol périurbain qui se transmet en ville : la hausse des prix fonciers urbains dépend de la hausse du prix du sol aux limites de l'urbanisation ».

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En ce qui concerne la différenciation du territoire, les stratégies de différenciation horizontale ou verticale des territoires sont des réponses pertinentes pour mobiliser et valoriser les atouts particuliers de chaque région dans un pays. Les autorités publiques de différents territoires ont intégré, du moins partiellement, avec la mondialisation, les enjeux de la concurrence internationale. Elles ont aussi intégré le fait que la compétitivité territoriale peut se gagner avec des spécialisations adaptées.

Les stratégies de différenciation verticale accordent une priorité au renforcement du système éducatif à tous les niveaux et à l'amélioration des compétences dans tous les secteurs de l'activité économique. Les universités apparaissent comme les moteurs et les catalyseurs du développement des régions les plus avancées, les collèges technologiques et les centres techniques sont les instruments privilégiés d'accès à la connaissance dans des régions qui se situent encore loin de la frontière technologique. Ces stratégies verticales jouent sur le développement des capacités d'innovation de l'ensemble des entreprises par l'élévation du niveau d'ensemble du capital humain de la région, le renforcement des interactions des PME avec les grandes entreprises, les collèges techniques, les centres de recherche et les universités. Elles passent également par l'amélioration des infrastructures de la région et de son accessibilité. Toutes ces actions supposent l'élaboration et la bonne mise en oeuvre de stratégies d'innovation adaptées à la situation de chaque territoire (Madiès et Prager, 2008).

B. Aménagement du territoire et économie d'agglomération.

L'aménagement du territoire peut être source de croissance économique d'un territoire dans la mesure où, lorsqu'il est une réussite, on arrive à la formation des économies d'agglomération.

B.1. Apport de l'économie géographique

Les nouvelles théories de l'économie géographique mettent l'accent sur le rôle de l'agglomération. « L'agglomération peut être un facteur de croissance, permettant de stimuler les autres facteurs de productions de façon directe grâce à l'innovation, grâce aux infrastructures de transport...et indirecte par le biais des économies de l'agglomération » (Cureaux, 2000).

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Ainsi, pour l'économie géographique (Scott, Storper, 2003), la concentration d'acteurs économiques induit une surproductivité globale (Krugman, 1991 ; Combes et al., 2009 ; Martin et al., 2010) ou une croissance supérieure (Paci, Usai, 2008) en raison des externalités positives induites par l'agglomération des firmes. Cette règle vaut pour les externalités de type Marshall-Arrow-Romer qui retracent la relation croissante entre les interactions et le degré de spécialisation des firmes et les externalités de type Jacobs (Massard, Riou, 2002) qui soulignent que les interactions sont d'autant plus importantes que les firmes agglomérées se caractérisent par un fort degré de diversification des activités. Dans l'un et l'autre cas, la densité urbaine exerce un effet positif sur les échanges et, par conséquent, sur la dynamique économique (Dreier et al., 2001).

Le mouvement de métropolisation est un facteur puissant d'efficacité et de croissance économique qu'il serait contreproductif de vouloir contrecarrer. L'aménagement du territoire doit avant tout viser à libérer les initiatives des territoires. Pour cela, le cadre institutionnel doit évoluer dans le sens amorcé par l'intercommunalité et, plus largement, vers une recomposition de l'architecture des collectivités territoriales. Quant à l'indispensable souci d'équité territoriale, l'instrument le plus puissant pour y répondre réside de fait dans la redistribution horizontale, par le canal de la fiscalité nationale, de la protection sociale et d'un certain nombre de services collectifs (Maurice, 2001).

Cependant, une très forte concentration spatiale peut renforcer l'effet de concurrence dans les régions centre et peut conduire à une délocalisation d'activités vers les périphéries. Cette tendance se confirme d'autant plus que les facteurs qui favorisent la localisation tels que l'infrastructure, la main-d'oeuvre bon marché ou la demande des biens produits existent aussi bien au centre qu'aux régions périphériques. La mutation des espaces urbains est le résultat direct de la mobilité des activités. Les activités pour se localiser « sont amenées à retenir l'emplacement urbain le mieux adapté à leurs besoins ou celui qui leur est imposé par les contraintes auxquelles elles font face » (Aydalot, 1985).

Sans aucun doute, les principes de l'économie géographique et urbaine font - ou devraient pouvoir faire - consensus en fournissant aux décideurs un cadre de référence et des concepts nouveaux susceptibles d'être mobilisés dans leurs travaux. Ainsi, est-il nécessaire de reconnaître la prévalence des rendements d'échelle croissants dans la formation des espaces économiques (Prager et Thisse, 2009).

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B.2. Apport de la théorie des pôles de croissance

Perroux (1958) a proposé sa théorie des pôles de croissance qu'il présentait à la fois comme théorie de la croissance sectorielle déséquilibrée et comme théorie de la croissance régionale déséquilibrée.

La théorie part d'un constat selon lequel la vie économique résulte de l'action spécifique d'unités économiques et non pas de l'action des agents isolés en situation de concurrence. Ainsi, la croissance n'est pas une progression linéaire mais plutôt un processus qui se propage dans le déséquilibre sous l'impact de l'action de certains agents que Perroux nomme « Unités Motrices». C'est la localisation des activités motrices qui donne à la théorie des pôles de croissance son contenu spatial. Les activités additionnelles dépendantes des activités motrices ne se dispersent pas sur tout le territoire, mais au contraire elles manifestent un comportement de regroupement aux alentours de la production dominante. Selon la théorie, il y a polarisation lorsque les activités additionnelles se multiplient et que les bénéfices de la croissance du pôle se diffusent à son arrière-pays. Ainsi, Perroux présente une théorie qui explique la concentration spatiale de la croissance.

Selon le théorème de George-Hotelling-Vickrey (1977), lorsque la taille de la population est optimale, le total des dépenses requises pour l'implantation d'un équipement public coïncide avec la rente différentielle totale donnant la valorisation du sol en chaque point du territoire. Un nombre d'individus trop élevé (petit) par rapport à l'optimum se traduira par un loyer du sol trop important (petit) en chaque point. La rente foncière urbaine peut alors constituer un instrument de l'aménagement en équipements publics (Guigou et al., 2001).

De même, au fur et à mesure que s'accroît la taille de la population, le nombre de firmes opérant dans le secteur intermédiaire augmente, permettant ainsi une division plus fine et poussée des tâches et, par conséquent, un accroissement concomitant de la production globale (Abdel-Rahman et Fujita, 1990). Autrement dit, une plus grande spécialisation du secteur intermédiaire a un effet multiplicateur sur la productivité du secteur final, ce qui rend une grande ville plus productive qu'une petite. A son tour, cette productivité plus élevée permet au salaire de croître avec la taille de la force de travail locale (Glaeser et Maré, 2001). Si les entreprises du secteur final se concentrent dans une région, la demande de biens intermédiaires y est très élevée, ce qui attire les producteurs de biens intermédiaires. En retour, ces biens étant fournis à un coût

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Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

moindre dans la région centrale, les entreprises du secteur final y sont également attirées. Un processus d'agglomération de nature cumulative va donc s'enclencher (Krugman et Venables, 1995) correspondant à des compétences plus pointues (Kim, 1989).

L'hétérogénéité croissante des formations professionnelles des travailleurs et des besoins des firmes favorise alors leur regroupement géographique. A cause du nombre élevé d'opportunités qu'elles engendrent, les grandes villes permettent de réduire les difficultés d'appariement entre firmes et travailleurs : un employeur cherchant à pourvoir un emploi vacant a une plus forte probabilité de trouver un salarié doté des compétences requises et, réciproquement, les travailleurs ont une plus forte probabilité de trouver un emploi permettant de valoriser au mieux leurs compétences lorsque le marché du travail présente une taille suffisante (Kim, 1989 ; Hamilton et al., 2000 ; Zenou, 2009). De nouveau, le niveau moyen de productivité s'accroît avec le nombre de firmes et de travailleurs installés au sein du même territoire (Prager et Thisse, 2009).

Image 1 : Infrastructures et transports

Source : Magazine d'information sur la formation professionnelle en Lorraine | n° 56 | Avril 2012

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Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

L'image 1 présente les avantages dont dispose un territoire qui, grâce à la mise sur pied des infrastructures, met en oeuvre la multi-modalité, intégrant ainsi l'ensemble des moyens de communication et créant au passage une mine d'emplois. La mise sur pied de la multi-modalité passe par l'intégration de l'ensemble des inter- modalités existantes sur le territoire. Ce schéma montre ainsi que ce sont les politiques en matière d'aménagement qui doivent précéder la croissance urbaine afin de pouvoir la contrôler et l'orienter.

Les politiques d'infrastructures peuvent aider au développement des régions les plus en retard si elles se concentrent en leur sein, mais avec le risque de voir l'amélioration de la convergence s'exercer au détriment de la croissance nationale. En effet, si la baisse des coûts de transaction à l'intérieur des régions les plus en retard aide à leur développement, les effets d'agglomération y sont moins favorables à la croissance globale que dans les régions plus avancées (Martin, 2000). Par contre, des politiques d'innovation assurées par le canal d'aides financières en faveur de la recherche et du développement peuvent à la fois favoriser une meilleure répartition de l'activité dans l'espace et un supplément de croissance économique. Ceci est possible car la baisse des coûts de l'innovation a un effet positif d'ensemble supérieur à l'effet négatif dû à la moindre croissance des activités dans les régions où les effets d'agglomération sont les plus faibles (Prager et Thisse, 2009).

Section II : Influence négative de l'aménagement du territoire sur la croissance urbaine.

Deux groupes de théories seront évoqués dans cette section : celui des théories relatives aux flux migratoires des facteurs (A) et celui des théories relatives au marxisme (B).

A. Théorie de flux migratoires des facteurs de production.

Cette théorie s'analyse à partir de deux principaux travaux : les travaux de Tiebout (1956) et ceux d'Alonso (1964).

A.1. L'apport du modèle de Tiebout

Le modèle développé par Tiebout (1956) explique la différenciation communale selon l'offre de biens et services publics locaux. En considérant un consommateur-électeur parfaitement mobile, il suppose que l'information sur les dépenses et les taxes locales est disponible, qu'il n'y

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a pas de rendements croissants ni décroissants et qu'il existe une taille optimale du fait de la rareté de ressources foncières. Le choix du consommateur -électeur se fait en fonction de la collectivité qui offre des biens et services qui satisfont le mieux ses préférences ; sa mobilité dépend de sa demande en biens publics et sur les ressources dont disposent les collectivités. Les collectivités sont alors appelées par la loi de la concurrence tout comme les entreprises à produire le plus efficacement leurs biens collectifs locaux, à inciter les ménages à révéler leurs préférences réelles pour ces biens collectifs afin d'aboutir à une répartition des ménages en collectivités homogènes. Les élus locaux séduisent les entreprises en s'investissant dans une bataille « marketing » dont l'enjeu est de vendre au mieux leurs territoires.

En France, par exemple, les décideurs ont pris conscience que le développement des services collectifs avait de l'influence sur l'évolution des activités économiques. Le développement urbain n'était plus condamné à suivre le développement économique, mais pouvait espérer l'orienter. Les villes commencent à se mettre ouvertement en concurrence. Les maires consacrent de plus en plus de temps à la promotion économique de leur Cité (Oblet, 2003).

Néanmoins, l'attractivité d'une ville repose à terme sur son urbanité, c'est-à-dire la capacité de faire d'une ville un lieu qui favorise les échanges et les rencontres entre les agents économiques qui en dépendent.

A.2. L'apport du modèle d'Alonso

Le modèle monocentrique élaboré par la nouvelle économie urbaine est fondé sur les travaux d'Alonso (1964). Ce modèle a permis d'expliquer un grand nombre de caractéristiques urbaines telles que la centralité de l'emploi, la décroissance de la densité de la population et des prix fonciers avec la distance au centre. Le modèle de base reprend l'hypothèse monocentrique de Von Thünen (1826), avec l'existence d'un Central Business District et système de transport radial générant un coût des déplacements. Les agents économiques maximisent leur utilité sous contrainte de budget en cherchant la localisation la plus optimale. C'est en fait, répondre aux exigences que postule la rationalité du raisonnement marginaliste. Le principal résultat du modèle est d'établir la décroissance de la rente foncière. Ainsi les agents qui occupent les localisations les plus loin du centre et qui supportent par la suite un coût de transport plus lourd, bénéficient en récompense d'une faible rente foncière. La périurbanisation résidentielle devint donc parmi les causes de l'étalement urbain qui, selon cette optique, se traduit par une baisse des

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densités centrales au profit de la périphérie et donc par un éloignement des frontières de la ville. En reformulant le modèle de base, l'économie urbaine a pu analyser l'étalement urbain : le Centre des affaires devient un pôle urbain qui concentre les emplois et qui enregistre la densité de populations la plus élevée. Le modèle permet en outre d'analyser l'effet de la population, du revenu et des coûts de transport sur l'étalement urbain.

La croissance démographique engendre une croissance urbaine en taille et en densité. L'accroissement de la population conduit à une augmentation de la demande de sol ; en considérant que le coût de déplacement est indépendant du revenu alors si l'élasticité-revenu de la consommation de sol est supérieure à zéro, une augmentation de revenu engendre nécessairement une augmentation de la demande de consommation de sol et les ménages se trouvent incités à se localiser plus loin du centre. La ville s'étale davantage. L'analyse économique a longtemps essayé de démontrer que la hausse des revenus et la baisse des coûts de transport sous-tendent le mouvement de périurbanisation qui apparaît comme le résultat de la croissance économique. Le maintien de cette croissance est le souci de tout décideur. Dès lors, il faut accompagner la périurbanisation par une politique raisonnable qui visera entre autre la minimisation de ses effets négatifs.

Ainsi, l'aménagement du territoire peut être source de déséquilibre territorial. En favorisant l'étalement urbain, il induit des coûts supplémentaires pour les entreprises de distributions et pour les ménages. Cela réduit les profits des firmes, augmente les dépenses ménagères ainsi que les coûts pour l'environnement (augmentation du volume des gaz à effet de serre, transformation des forêts en zones d'habitation).

B. Théories marxistes

Les théories marxistes regroupent entre autre les travaux de Marx et ceux des néo-marxistes.

B.1. Analyse de Marx (1864)

Le courant marxiste s'oppose à la théorie libérale en démontrant que l'organisation capitaliste de la société aboutit à l'exploitation de la plus grande partie de la population par les

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détenteurs des moyens de production. La société se divise donc en deux grandes classes qui s'affrontent : le prolétariat (qui détient la force de travail) et la bourgeoisie (qui détient le capital).

L'affrontement de ces classes s'effectue dans le cadre du processus de production. Marx distingue deux sphères importantes : celle de l'échange de marchandises et du cycle MAM (marchandises, argent, marchandises) ; celle de la production et du cycle AMA (capital avancé, marchandise, produit obtenu).

L'existence de la ville suppose que la société est redistributrice. « Le capitalisme, cependant, légitime l'urbanisation en termes de contribution à l'accumulation du capital et à la croissance plutôt qu'en termes de fonctions magiques ou religieuses » (Ahmed, 1999). D'abord, les problèmes spatiaux sont apparus au second rang de l'analyse marxiste qui s'intéressait plutôt à l'étude des crises du capitalisme. Enracinée dans l'histoire et basée sur l'étude des mécanismes du capitalisme industriel, l'étude des villes repose sur la division du travail entre ville et compagne qui constitue à l'oeil du marxisme une force dialectique de transformation de la société. Marx a démontré comment le capitalisme industriel impose la concentration urbaine. Il a cherché comment les mécanismes de la concentration urbaine constituent, avec l'industrialisation, le facteur qui détermine la transformation sociale de son temps. La ville, selon l'analyse de Marx, devient le lieu privilégié des mutations révolutionnaires.

D'un autre coté, Marx a mis en évidence le lien entre l'espace et les stratégies du capital. Ce dernier, en cherchant le profit dépasse l'espace lorsqu'il atteint un degré d'accumulation supranational, impérial. D'autres travaux qui ont inspiré Marx, ont essayé d'étudier les problèmes de la « ville socialiste». Leurs apports ont enrichi la pensée marxiste et ont permis l'émergence de plusieurs théories basées sur l'étude de l'espace. La théorie de la rente est l'une de ces théories. Elle essaie d'expliquer les fluctuations des prix du sol urbain et du prix du logement. En général, l'analyse marxiste considère l'espace comme rapport social ; l'espace est le produit de l'histoire du développement du capitalisme. «L'espace prend forme dans les villes, lieux par excellence de la lutte des classes, point de jonction de la production des marchandises et de la reproduction de la force du travail » (Aydalot, 1985).

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B.2. Analyse des néo-marxistes

L'apport de Marx au problème de la rente foncière en milieu urbain est resté médiocre ; mais, l'observation des faits et la richesse des modèles développés, ont poussé les néo-marxistes à essayer de dépasser cette insuffisance théorique de leur précurseur. Ainsi, Lipietz (1974), parle de tribut foncier urbain. Il part d'un constat simple : le logement est différent du blé supposé homogène et reproductible dans la théorie d'origine et que le sol urbain lorsqu'il est vendu, il l'est une fois pour toute. Il propose la notion de tribut relevé une fois pour toute au lieu de la rente annuelle traditionnelle. Dans son analyse, Lipietz aboutit à ce que « le prix du sol intègre un tribut foncier créé par l'usage qui sera fait du sol, lui-même découlant de la division sociale de l'espace. Le tribut foncier est la redistribution au profit d'une catégorie parasitaire de la plus-value sociale déterminée par cette division sociale de l'espace ». Le point faible de ces apports néo-marxiste c'est que la propriété foncière ne diffère pas de l'espace. « Ce faisant, ce n'est pas l'espace comme rapport social, mais la propriété du sol comme rapport social qui a été mis en avant de manière sans doute excessive » (Aydalot, 1985).

Pour les marxistes, les villes, qui sont les résultats des politiques d'aménagement du territoire, sont des « bombes à retardement ». Elles créent des fractures sociales obligeant une partie de la population urbaine à se soumettre à une autre. Cela justifie le fait que la majorité des révolutions a eu pour point de départ les villes.

En somme, il était question dans ce chapitre de mettre en exergue l'influence de l'aménagement du territoire sur la croissance urbaine. Nous avons pu voir véritablement que l'aménagement du territoire influence aussi bien positivement que négativement la croissance urbaine.

Cependant, l'aménagement du territoire, en dehors du fait qu'il influence beaucoup plus positivement que négativement la croissance urbaine, est indispensable pour la maîtrise de la croissance urbaine.

Si l'influence de l'aménagement du territoire sur la croissance urbaine est établie, qu'en est-il de celle de la croissance urbaine sur l'aménagement du territoire ?

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CHAPITRE II : LA CROISSANCE URBAINE, UNE CAUSE DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE

L'objectif de ce chapitre est d'analyser l'influence de la croissance urbaine sur l'aménagement du territoire. La littérature fait ressortir cette influence, mais aussi des travaux empiriques qui la mettent en exergue. Notre chapitre s'organise autour de deux principales sections :

- la première section met en exergue l'influence de la croissance urbaine sur l'aménagement du territoire ;

- la seconde section s'intéresse aux travaux empiriques qui mettent en exergue cette influence de la croissance urbaine sur l'aménagement du territoire.

Section I : Influence de la croissance urbaine sur l'aménagement du territoire

Diverses théories mettent en exergue l'influence de la croissance urbaine sur l'aménagement du territoire. Dans le cadre de cette section, nous nous pencherons sur la théorie du développement (A) et sur la théorie démo-économique (B).

A. La théorie du développement

La théorie ci-dessus s'intéresse à la croissance démographique mais aussi au foncier urbain.

A.1. Croissance démographique et aménagement du territoire

Selon Perroux (1950), le développement est « l'ensemble des transformations des structures économiques, sociales, institutionnelles et démographiques qui accompagnent la croissance, la rendent durable et, en général, améliorent les conditions de vie de la population. ». Cependant, la croissance non contrôlée en milieu urbain peut être source de nombreuses difficultés. En effet, la majorité des théoriciens du développement sont unanimes à reconnaître que la croissance rapide de la population et l'élévation de son taux posent de graves problèmes, surtout lorsque l'évolution économique n'arrive pas à suivre ce rythme.

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L'accroissement rapide de la population occasionne une diminution des ressources susceptibles d'améliorer les conditions de vie de la population. Un pays à forte natalité et à faible mortalité est amené obligatoirement à consacrer des ressources importantes à la construction d'écoles, d'hôpitaux, de logements et d'autres services dont a besoin la population. Ces fonds investis dans ces opérations sont socialement indispensables, mais ne sont pas immédiatement productifs. Ainsi, on constate bien qu'il existe une relation importante entre la croissance démographique et le développement économique surtout pour un pays en développement.

Les résultats décevants des plans de développement peuvent être attribués en grande partie à l'expansion rapide de la population. D'après certains spécialistes, un taux d'accroissement démographique élevé tend à baisser le taux d'épargne et des investissements, à ralentir la croissance économique, aggraver le chômage et à alourdir les dépenses de formation (scolaire, professionnelle...).

Dans ce contexte, la population se fragmente et, la partie de la population qui « fonde» la ville et son développement est celle qui est capable d'y attirer du revenu en provenance de l'extérieur ; ce sont « le roi qui collecte des taxes, le propriétaire qui perçoit des loyers, le marchand qui bénéficie de ses échanges avec l'extérieur, un artisan ou un industriel qui vend ses biens à l'extérieur, un romancier dont les livres sont achetés hors de la ville, un médecin qui a des clients à la campagne, un étudiant vivant de l'argent de parents vivant ailleurs, etc.». Le reste de la population vit grâce à ces revenus venus de l'extérieur.

Dans une économie nationale sous la loi de l'offre, les économies locales et régionales sont encore largement dépendantes des lois de la demande keynésienne. C'est le revenu des résidents, qui est redistribué via l'échange marchand vers le secteur domestique. Ce revenu permet de fixer le niveau final d'emploi. Il est aussi le revenu de cohésion spatiale et territoriale. Développer le territoire, faire de l'« aménagement du territoire » comme on le dit, vise ce même objectif de cohésion par le revenu et l'emploi (Davezies, 2001).

A.2. Foncier urbain et aménagement du territoire

La croissance urbaine entraîne la consommation de plusieurs ressources naturelles. La transformation de terres agricoles en logements ou en routes tend à être permanente et n'est

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réversible qu'avec des coûts très élevés. L'étalement urbain implique aussi le transport de matières premières utilisées pour la construction, l'ouverture de carrières à proximité de réserves naturelles, une extraction excessive des graviers des lits de rivière. Il modifie les propriétés des sols en réduisant leurs fonctions essentielles (perméabilité, puits de carbone). Il modifie les interactions entre eaux superficielles et eaux souterraines.

L'artificialisation des sols s'accompagne de leur imperméabilisation, donc d'une amplification du ruissellement des eaux de pluies, augmentant donc le niveau des crues. Celles-ci deviennent d'autant plus dangereuses du fait de l'augmentation du nombre de logements construits dans des zones inondables (Laugier, 2012).

B. La croissance démo-économique et l'aménagement du territoire.

La théorie démo-économique met en relation les populations et leurs richesses. Elle permet aussi de comprendre la relation qui existe entre les populations et leur environnement.

B.1. Populations et richesse urbaine

La croissance démographique urbaine couplée à l'exode rural met d'énormes pressions sur les politiques publiques d'aménagement du territoire mais aussi sur les ressources disponibles. En effet, La théorie démo-économique malthusienne et ses prolongements contemporains situent, a priori, la relation entre population et richesse dans un univers fini. Dans cet univers, la progression de la population est positivement liée au niveau de vie et se heurte à la contrainte des ressources qu'elle contribue elle-même à exacerber. Le modèle malthusien et ses prolongements directs se sont concentrés sur la relation entre la population et les ressources naturelles et alimentaires. Sous l'hypothèse de rendements marginaux décroissants de la progression démographique, ils concluent que la croissance de la population exerce une pression négative directe sur l'accumulation, considérée alors comme le seul facteur de la progression des niveaux de vie.

La liaison dynamique entre croissance démographique et accumulation de capital est décrite par les analyses pionnières de Coale et Hoover (1958). Ils identifient, sur une double base théorique et empirique, une série d'effets démographiques négatifs sur les conditions de l'accumulation.

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L'effet de diversion détourne l'investissement d'emplois directement productifs vers des emplois non directement productifs; l'effet de dilution du capital résulte arithmétiquement de la dynamique d'un rapport macroéconomique dont le dénominateur est la taille croissante de la population; et l'effet de dépendance relie négativement la capacité d'épargne d'un ménage ou de l'économie avec la part des inactifs par rapport à la population active.

Dans l'agriculture, la relation positive qui existe entre la densité et la productivité (choix des techniques, économies d'échelle, infrastructures) semble se transformer en relation négative (rendements décroissants) pour des densités trop importantes (supérieures à 100 habitants au km2). Dans l'éducation, le ralentissement de la croissance démographique est associé avec des dépenses par élève supérieures, de même que pour les dépenses par tête de santé ou de nutrition au sein du ménage.

Dans le court terme, une moindre croissance démographique diminuerait l'inégalité de la répartition des revenus, dans le cas toutefois où les politiques de population seraient orientées vers les groupes à revenu le plus faible. Dans le long terme, l'avantage potentiel résulterait de l'accroissement du prix du facteur travail relativement aux autres facteurs de production. Bien que la plupart des problèmes liés au développement urbain (pression sur les services et ralentissement du développement du secteur moderne) aient été amplifiés par la forte croissance démographique, le ralentissement de cette croissance ne les réglera vraisemblablement pas.

«La revue de la recherche postérieure à 1986, bien que ne suggérant pas de distances radicales par rapport aux résultats du rapport de la NAS6 de (1986), conduit à une conclusion quelque peu appuyée concernant les effets négatifs de la croissance démographique sur les potentialités de développement des pays en développement» (ONU, 1993)

Cassen et al. (1994) identifient, dans un certain nombre de travaux récents, une perception nouvelle des conséquences de la croissance démographique, moins neutraliste et insistant sur un certain nombre de mécanismes négatifs :

Dans un premier temps, la forte croissance démographique a ainsi, à moyen terme, et sous des conditions de forte fécondité, des effets négatifs évidents aux niveaux des individus et des

6 National Academy of Sciences

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ménages, particulièrement sur la santé et les opportunités économiques des femmes et des jeunes.

Dans un deuxième temps, la forte croissance démographique constitue également une contrainte importante pour la provision de services publics adéquats en éducation et santé, et diminue l'assurance d'opportunités d'emplois pour une force de travail croissante. De façon à alléger ces pressions qui exacerberont les problèmes dans le long terme, il est nécessaire d'agir rapidement sur les problèmes de population (Cassen et Bates, 1994).

Le consensus qui semble caractériser les années quatre-vingt-dix, tel qu'il émane des débats et des travaux de la Conférence Mondiale sur la Population et le Développement du Caire de 1994, s'organise donc autour de plusieurs traits caractéristiques. Ces traits sont fédérés par l'idée dominante selon laquelle la croissance démographique est un obstacle majeur à un développement soutenu (Amalric et Banuri, 1994).

B.2. Apport de la théorie de la modernisation

Une branche de la théorie de la modernisation affirme que la croissance démographique est un problème à tous les niveaux d'agrégation. Au niveau local, le problème est défini, comme il l'est par les analyses qui alimentent le nouveau consensus des années quatre-vingt-dix, en termes de santé des femmes et des enfants, de capacités parentales à pourvoir aux besoins de base de leur progéniture. Pour l'ouvrage collectif édité par Cassen (1994), elle est un problème en termes d'externalités.

Au niveau national, le problème se pose plus en termes de liaison macroéconomique entre accroissement démographique et développement économique. Les focalisations particulières sont faites en ce qui concerne les conséquences sur la formation de capital, l'emploi et la capacité des Etats à pourvoir en services publics (éducation, santé et infrastructures) une population croissante.

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Section II : Lien empirique entre la croissance urbaine et l'aménagement du territoire.

Plusieurs travaux mettent en exergue le lien entre la croissance urbaine et l'aménagement du territoire. Dans cette section, nous analyserons ceux relatifs à la croissance du P11B (A) et ceux relatifs à la croissance démographique (B).

A. Croissance du PIB et aménagement du territoire.

L'étude du lien entre la croissance urbaine et l'aménagement du territoire peut se faire à travers l'analyse d'un modèle. Elle peut aussi se faire à travers l'ouverture internationale d'un pays, laquelle impacte son économie.

A.1. Modèle de Catin, Hanchane et Kamal

Catin, Hanchane et Kamal(2008) ont proposé un modèle pour analyser, par période quinquennale de 1950 à 2000, les principaux déterminants du taux d'urbanisation et du degré de primatie urbaine dans 56 pays en développement. Ce modèle arrive aux résultats qui révèlent que la croissance de la part de l'emploi non agricole et la croissance du P11B par habitant encouragent le processus d'urbanisation. La part de l'emploi non agricole dans la population active a un effet positif et significatif sur l'urbanisation. L'exode agricole semble constituer un important déterminant de l'urbanisation, indépendamment même de la croissance du PIB par habitant. Lorsque la part relative de l'emploi dans les secteurs secondaire et tertiaire s'accroît, le taux d'urbanisation s'en trouve renforcé.

Ainsi, la croissance du PIB par tête a aussi un impact positif et significatif sur l'urbanisation et peut exercer en conséquence un effet de « boule de neige ». L'accumulation capitalistique dans les zone urbaines contribue au développement d'un marché final et intermédiaire, donc au développement d'activités induites et complémentaires (effets de revenu et de demande). Cette accumulation peut générer des économies d'échelle internes et des économies externes d'agglomération (effets de productivité) (Catin, 1995).

Pour les pays en développement, la relation entre urbanisation et développement économique s'avère non monotone : l'urbanisation augmente de manière sensible au cours des phases initiales du développement, pour ensuite progresser moins vite.

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A.2. ouverture internationale et aménagement du territoire

Il est montré dans de nombreux pays en développement en particulier en Chine que l'insertion progressive de l'économie d'un pays en développement dans le commerce international est une des recommandations fortes de nombreux auteurs. Elle contribue en principe à la croissance selon la vision traditionnelle des avantages comparés ; mais elle a également pour conséquence immédiate une polarisation des activités économiques sur le territoire et une forte augmentation des inégalités régionales (Kanbur et Venables, 2007). Toutefois, on peut s'attendre à terme à une plus grande dispersion géographique des activités, idée confirmée par Ades et Glaeser (1999).

De même, L'intégration économique entre pays voisins contribue à une meilleure spécialisation économique et à des niveaux de croissance plus élevés. On constate toutefois que les accords commerciaux bilatéraux ou régionaux sont susceptibles d'avoir des effets positifs sur les relations politiques des pays concernés. Le commerce entre deux pays augmente le coût d'opportunité d'un conflit, alors que si ces deux pays sont très ouverts au commerce avec de nombreux pays tiers, leur dépendance commune est réduite et le coût d'opportunité d'un conflit entre eux est plus faible (Martin et al., 2008).

Mais, l'effet de l'intégration régionale sur le commerce international est ambigu. Si elle est susceptible de renforcer le développement des pays appartenant à l'aire régionale, cela peut se faire au détriment de ceux qui restent à l'écart de l'accord (Coulibaly, 2006 ; Madiès, 2007). La mise en oeuvre des accords régionaux peut avoir pour effet, du moins dans un premier temps, de favoriser une croissance plus rapide des territoires les mieux dotés en infrastructures et en capital humain. Ces accords commerciaux régionaux ne peuvent profiter aux pays enclavés et faibles que si leurs voisins adoptent des politiques dynamiques et « amicales » (Collier, 2007b).

Les forces du marché, l'ouverture internationale et des institutions économiques efficaces sont à l'évidence des constituants majeurs du développement économique. Toutefois, le libre jeu des forces de marché ne suffit pas à valoriser au mieux les capacités des territoires et leur croissance économique. Par exemple, une étude récente de la Banque Mondiale vient de montrer, sur un échantillon de 11 500 entreprises dans 27 pays émergents de l'ex-bloc soviétique, que l'ouverture à la concurrence, contrairement aux idées reçues, peut avoir un effet négatif sur la capacité d'innovation des entreprises (Gorodnichenko et al., 2009). Dans le même esprit, les

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forces d'agglomération ne peuvent être laissées complètement à elles-mêmes. Leur développement peut être utilement stimulé par des instruments appropriés et bien choisis (Scott, 2002).

B. Infrastructures, services publics et croissance démographique

Il est intéressant d'étudier l'impact des infrastructures et services publics sur la croissance urbaine, mais aussi d'étudier l'impact de la croissance démographique urbaine sur l'aménagement du territoire.

B.1. Infrastructures, services publics et efficacité économique

Un certain nombre de travaux empiriques cherchent à mesurer les effets des services publics dans le système économique. Ashauer (1989) affirme que la faiblesse de l'offre de services publics, dans les années 1970 aux Etats-Unis, est cruciale dans l'explication du déclin du taux de croissance de la productivité. Sa méthodologie a été remise en cause, mais d'autres travaux concernant différentes nations confirment l'impact plus ou moins direct des dépenses publiques sur la productivité. Femald (1990), Rubin (1991), Ford et Prorret (1991) contestent l'absence de contrôle du biais de simultanéité, c'est-à-dire du double sens de la relation dépenses-publiques-revenus, par Ashauer, mais aboutissent au même résultat.

Munell (1992) trouve que le capital public a un effet significatif et positif sur la croissance de l'emploi. Artus (1991) montre que le niveau des dépenses publiques a un effet sur la Recherche-Développement et sur le taux de croissance du PIB, en France.

Declercq (1996) conclut, après une étude par branches sectorielles portant sur la période 19521989, que « le capital public a un impact sur l'évolution du coût variable des entreprises des branches marchandes non financières de l'économie française». Les dépenses publiques sont donc des instruments de politique économique importants. Pour un pays en développement, un niveau d'investissements trop faible peut accentuer les écarts initiaux de revenu entre l'économie et le reste du monde et créer des effets d'hystérésis7.

7 Retard dans le développement d'un phénomène physique par rapport à un autre.

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Une économie ayant de faibles capacités productives initiales et ne bénéficiant pas d'externalités positives ne peut combler son retard. Elle risque de tomber dans une «trappe de sous-développement » (D'Autume-Michel, 1993), de se positionner sur une trajectoire de croissance irrémédiablement faible. Dans ces conditions, la convergence des taux de croissance des nations n'est plus assurée comme elle l'était dans les modèles néoclassiques traditionnels de croissance (Solow, 1956) et d'économie internationale.

Les services publics peuvent constituer des avantages comparatifs à part entière et permettre à la région d'attirer de nouvelles activités. Les services et infrastructures publics jouent sur la croissance régionale de deux façons : ils produisent des externalités technologiques et pécuniaires et engendrent une croissance nette et ils créent des avantages comparatifs qui vont attirer les agents dans la région et amplifier les économies d'échelle. Ainsi, les infrastructures et services publics peuvent être un catalyseur de développement. Ils permettent, dans un premier temps, aux entreprises localisées sur place d'obtenir des gains de productivité, puis ces bénéfices vont attirer d'autres firmes dans la région et générer une activité économique importante, donnant lieu à de fortes possibilités de division des tâches, de circulation de la connaissance et de technologies. Cette interdépendance conduit à un processus de développement auto-entretenu et cumulatif. Murphy et al., (1989) préconisent une injection exogène de capital public pour lancer ce processus cumulatif.

D'autres travaux empiriques ont traité de ces questions. Duffy-Deno et Eberts (1991) montrent que les investissements et le stock d'infrastructures publiques ont un effet positif significatif sur le revenu individuel par tête dans 28 unités urbaines de 1980 à 1984. De même, Ralle (1991) montre sur la période 1970-1989 que le capital public accroît la productivité du secteur privé dans les régions françaises. Des auteurs tels Eberts et Fogarty (1987) ou Munell (1990) testent la relation entre capital ou investissements publics et investissements privés et constatent une influence positive du capital public sur les investissements privés.

Richardson (1973) et Lever, Legler et Shapiro (1970) mettent en avant l'interdépendance entre la distribution partiale du capital public et les investissements privés. Les infrastructures de transport et communication vont diminuer les coûts de transport des biens, des capitaux, des hommes et de l'information entre les régions. Ces infrastructures vont permettre aux entreprises de développer leurs aires de marché, de réduire les monopoles spatiaux et donc de renforcer les effets de la concurrence. Elles sont donc à l'origine d'externalités spatiales qui vont profiter à

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l'ensemble de la communauté (Quinet, 1992). Cependant, elles ont un effet ambigu sur la croissance d'une région. La répartition des gains peut être défavorable aux régions les plus faibles.

Les modèles de localisation (Martin et Rogers, 1995) et les études empiriques (Johansson, 1993; Rietvield, 1989; William et Mullen, 1992) s'intéressent plus spécifiquement aux infrastructures et en particulier aux infrastructures de transport et communication. L'importance des coûts de transport dans l'analyse géographique des activités économiques les place au premier plan des discussions sur les conséquences des dépenses publiques sur le développement régional. Elles ont également des conséquences spatiales spécifiques. "Les transports comportent une dimension de plus que la plupart des autres activités : ils sont localisés dans l'espace, leur impact est déjà géographique, avant d'être macro-économique" (Quinet, 1992).

Hansen (1965) a construit une typologie des régions allant dans ce sens. Pour lui, il existe trois types de régions :

- les régions "congestionnées" dans lesquelles il y a une forte concentration de population, d'activités industrielles et commerciales et un stock important d'infrastructures. Dans ces régions, l'effet marginal positif d'investissements publics supplémentaires sera absorbé par l'effet négatif de pollution et la congestion supplémentaire.

- Les régions intermédiaires, où il y a abondance de main-d'oeuvre formée et de matières premières. Les investissements publics peuvent avoir dans ce cas un effet marginal supérieur aux coûts.

- Les régions pauvres, où le niveau de vie est faible : ce sont généralement des régions agricoles peu développées ou possédant une industrie déclinante. Ces régions sont peu attractives pour les entreprises et les investissements publics ont peu d'effets sur leur dynamisme.

Les tests effectués par Williams et Mullen (1992) sur 48 Etats américains, pour les années 1970, 1980 et 1986, nuancent l'hypothèse d'Hansen : les investissements publics en infrastructures routières ont un effet stimulant sur l'ensemble des régions, même les plus « en retard ».

Le jeu des répartitions d'activités entre les régions dépend des caractéristiques initiales de chacune, en particulier de leur position, les unes par rapport aux autres. La croissance de la région peut être reliée positivement avec le stock d'infrastructures de transport et communication

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qu'elle possède si les gains nets qu'elle tire de ces infrastructures sont supérieurs à ceux que les autres régions en tirent. La plupart des modèles s'intéressent à ces gains en termes de baisse de coûts de transport des biens (Martin et Rogers, 1995) et de leurs conséquences sur la répartition des entreprises. Or, si le déploiement des infrastructures de transport et communication a des effets directs sur le coût de transport des biens, il en a aussi sur la circulation des personnes et de l'information. Il est donc simplificateur de restreindre l'impact des infrastructures de la région à une baisse des coûts de transport.

Ces infrastructures facilitent également les échanges de main-d'oeuvre, de connaissance, de technologie entre différentes régions. Elles amplifient les externalités que peuvent se procurer les agents à se localiser près d'une région où les économies d'échelle sont fortes (Kubo, 1995).

L'intervention publique dans la sphère économique peut alors être positive. Cependant, l'étude du rôle des dépenses publiques dans les mécanismes de croissance doit tenir compte de deux caractéristiques capitales, au niveau régional.

En premier lieu, la région est ouverte sur le reste du monde. Les facteurs de production peuvent quitter la région ou affluer des autres régions. Les barrières culturelles et institutionnelles étant plus limitées, la région peut entrer dans un processus cumulatif de croissance qui peut être impulsé par les dotations initiales ou par des facteurs exogènes tels les externalités générées par la proximité de régions riches (Kubo, 1995) ou celles générées par des investissements publics importants (Murphy et al., 1989).

Ensuite, les dépenses publiques en infrastructures de transport et communication transforment l'espace et vont être essentielles pour comprendre les schémas de croissance régionaux. Elles baissent les coûts de transport, elles favorisent l'externalité de spillover et, au sein de la région, développent les complémentarités entre espaces urbains et espaces ruraux (Charlot, 1996).

Dans une étude s'intéressant aux effets des travaux publics sur la croissance du revenu réel dans 195 petites municipalités du Missouri, les auteurs ont estimé que les investissements de travaux publics contribuaient à 30 % de l'augmentation du revenu réel entre 1963 et 1966. La construction d'autoroutes, de ports maritimes, d'établissements d'enseignement professionnel et de structures récréatives participeraient le plus à la croissance du revenu (Charlot, 1996).

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Au total, c'est d'abord le montant des ressources publiques consacrées aux infrastructures de transport et la qualité de la gestion des modes de transport qui contribuent à l'efficacité économique de la ville (Perrot, 2004). Dans l'ensemble, les infrastructures de transport comme les autres services publics sont une condition majeure du développement et du bien-être des populations (Prager et Thisse, 2009).

B.2. Croissance démographique et aménagement du territoire

La croissance démographique de la Colombie a entraîné une multiplication par quatre de la population en un demi-siècle (FIórez, 2000 : Dureau et Flórez, 1996). Même si la population rurale a presque doublé sur cette période, l'essentiel de cet accroissement a profité aux villes qui ont connu un formidable essor. Cette croissance urbaine très rapide a été alimentée à la fois par un afflux migratoire massif et par un accroissement naturel très élevé dû aux caractéristiques de la transition démographique en Colombie, en particulier la jeunesse et la natalité élevée des populations citadines. La répartition du peuplement sur le territoire national ainsi que la configuration générale du réseau urbain s'en sont trouvées modifiées de façon irréversible.

L'impact positif de l'emploi non agricole, en pourcentage de la population active, sur la primatie urbaine indique que l'exode rural s'oriente d'abord vers la grande ville. L'exode rural renforce aussi bien le taux d'urbanisation que le degré de primatie. La faiblesse des infrastructures, d'autant plus pour les pays à bas revenus, renforce la polarisation de la population dans la ville principale. D'ailleurs, l'impact négatif de la variable population montre que la croissance démographique s'accompagne en général d'un mouvement d'urbanisation profond qui profite plus aux autres villes qu'à la ville principale (Catin et al., 2008).

Dans un contexte de forte natalité, c'est au contraire l'absence d'exode rural qui peut expliquer l'urbanisation. Les habitants se déplacent peu et viennent constituer de petites concentrations urbaines, sans forcément émigrer dans la capitale ou les grandes villes. L'urbanisation prend alors la forme d'une prolifération de petites et moyennes agglomérations comme c'est le cas au Nigeria. L'accroissement très rapide de la population engendre une pression importante sur les terres en milieu rural comme urbain. La croissance horizontale des grandes métropoles et l'émergence des villes secondaires entraînent une compétition importante sur le foncier situé à la périphérie des villes (Mansion et Broutin, 2012).

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D'après le CERED, la population du Maroc augmente de 450 mille personnes par an. Cette croissance importante de la population par rapport aux ressources disponibles constitue une entrave au progrès et un obstacle à l'amélioration du niveau de vie. Ceci parce que l'économie n'est pas suffisamment développée pour faire face au problème d'alimentation, de logement, de santé, d'éducation, et d'emploi de la population.

Dans le même ordre d'idée, une étude réalisée sur l'agglomération rennaise a montré que les coûts d'aménagement diminuent avec l'augmentation de la densité. D'autres études ont démontré le surcoût de l'étalement urbain sur les réseaux d'infrastructures (électricité, eau potable, eaux usées, voirie). Au niveau des ménages, l'étalement urbain a d'abord un coût dans les déplacements (frais d'automobile notamment, prix du carburant en augmentation). De plus, les prêts immobiliers constituent une part importante de leur endettement.

L'étalement urbain et le développement des réseaux de transports génèrent une dégradation et une fragmentation des habitats, engendrant isolement des populations, perte de diversité génétique et homogénéisation des espèces.

De même, les faits décrits par les données des enquêtes ECAM, montrent au Cameroun, l'impact négatif qu'une croissance démographique forte peut avoir sur les conditions de vie des populations, en affectant le taux de croissance du PIB par tête. Une croissance démographique relativement élevée peut également avoir un impact négatif sur les conditions de vie des ménages à travers la pression qu'elle peut exercer sur les infrastructures de base existantes liée à l'augmentation de leur demande. (UNFPA, 2013)

Somme toute, il était question dans ce chapitre d'analyser l'influence de la croissance urbaine sur l'aménagement du territoire à travers une analyse théorique et empirique relative à la recherche documentaire. Nous avons vu que la croissance démographique urbaine impacte négativement les ressources disponibles, limite les efforts des politiques d'aménagement du territoire. Nous avons aussi vu qu'il existe un lien empirique entre la croissance économique et l'aménagement du territoire.

Deux constats émergent ainsi de cette analyse : la croissance démographique urbaine influence négativement l'aménagement du territoire ; il existe une corrélation positive entre l'aménagement du territoire et la croissance urbaine.

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CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE

Au terme de cette partie, il était question d'analyser les liens entre l'aménagement du territoire et la croissance urbaine. Nous avons vu que la mise en oeuvre des politiques publiques en matière d'aménagement du territoire était un préalable pour assurer la croissance économique d'un territoire ; nous avons aussi vu que la croissance démographique incontrôlée pouvait être un handicap pour les politiques d'aménagement du territoire.

Il ressort de cette analyse qu'il existe effectivement un lien étroit entre l'aménagement du territoire et la croissance urbaine, ce lien peut être une corrélation positive s'il s'agit de la croissance économique ou une corrélation négative s'il s'agit de la croissance démographique urbaine.

Ainsi, la mise en oeuvre des infrastructures et des équipements, la densification urbaine sont des facteurs qui favorisent la croissance économique ainsi que l'efficacité économique. Ces efforts des pouvoirs publics pour satisfaire les demandes croissantes des agents économiques permettent à ces derniers de contrôler et d'orienter la croissance urbaine.

La croissance démographique se traduit par l'anarchie dans l'occupation des sols, la naissance des quartiers précaires. Elle se traduit aussi par les besoins croissants en logements sociaux. Elle pousse les pouvoirs publics à mettre en oeuvre les instruments de planification urbaine et d'aménagement du territoire mais aussi, de nouvelles mesures pour orienter et encadrer les activités humaines.

Au final, la croissance urbaine cause sans aucun doute la mise en oeuvre des politiques publiques d'aménagement du territoire et par conséquent, cause l'aménagement du territoire.

Ceci étant, cette double corrélation est-elle perceptible dans le contexte camerounais ? Existe-il un lien entre les décisions de mise en oeuvre des politiques publiques en matière d'aménagement du territoire et la croissance urbaine empiriquement vérifiable?

Seule une étude empirique du contexte camerounais permettra de répondre à ces questions.

VERIFICATION EMPIRIQUE DU LIEN DE

CAUSALITE ENTRE L'AMENAGEMENT

DU TERRITOIRE ET LA CROISSANCE

URBAINE AU CAMEROUN

DEUXIEME PARTIE :

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INTRODUCTION

L'objectif de cette partie est de faire une vérification empirique des liens de corrélation ou de causalité entre l'aménagement du territoire et la croissance urbaine dans le cadre du Cameroun. La méthodologie déployée est la recherche documentaire et l'analyse économétrique.

La partie s'organise autour de deux chapitres :

- Le premier met en exergue les caractéristiques de la croissance urbaine dans les établissements urbains du Cameroun ;

- Le deuxième fait une analyse économétrique sur les potentiels liens entre l'aménagement du territoire et la croissance urbaine dans le contexte camerounais.

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CHAPITRE III : LES PRATIQUES DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET LA CROISSANCE URBAINE AU CAMEROUN.

L'objectif de ce chapitre est double : présenter les politiques et pratiques d'aménagement du territoire au Cameroun, d'une part, d'autre part, les éléments caractéristiques de la croissance urbaine dans ce pays. Le chapitre s'organise alors autour de deux sections

- La première présente les caractéristiques de la croissance urbaine dans les villes camerounaises ;

- La seconde présente les approches pratiques des dirigeants camerounais en matière d'aménagement du territoire.

Section I : Les caractéristiques de la croissance urbaine dans les villes camerounaises

Cette section présente les caractéristiques de la croissance urbaine relatives à l'habitat urbain (A) et celles relatives aux transports urbains (B).

A. Croissance urbaine et habitat urbain.

La manifestation de la croissance urbaine au Cameroun peut s'apprécier à travers l'analyse de la situation actuelle des villes de ce pays.

A.1. Visage actuel des villes camerounaises

La pression démographique 8pose la problématique de l'habitat comme enjeu majeur pour le développement du pays. Ces taux de croissance élevés drainent avec eux une foultitude de problèmes qui se posent en termes de qualité et de quantité d'habitats sociaux.

Les graphiques qui suivent illustrent l'évolution de la population totale et urbaine du Cameroun pendant les trois décennies passées, tout comme l'évolution du BIP.

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8 Le Cameroun est marqué par un taux de croissance démographique de 2.5% et un taux d'urbanisation au-dessus de 52%,

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Graphique 1A : Evolution du BIP de la POPTOTAL et de la POPURB entre 1986 et 2015.

Source : INS et traitement de l'auteur

Graphique 1B : Evolution du BIP, de la POPTOTAL et de la POPURB entre 1986 et 2015.

Source : INS et traitement de l'auteur.

Ces deux graphiques montrent une tendance croissante des trois variables. La population totale et la population urbaine présentent une forte croissance, ce qui confirme le fait que la

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population camerounaise a beaucoup évolué ces dernières décennies tout comme la population urbaine dont la croissance a été fortement influencée par l'exode rurale. On note également que le BIP croit mais à un rythme beaucoup plus lent. Cependant, la tendance croissante de la population et du BIP cache une réalité que le graphique ne permet pas de voir, celle du lien de corrélation négative entre la croissance démographique et la croissance du BIP. Cela explique la carence des logements sociaux au Cameroun, vu les ressources limités dont dispose l'Etat à travers la SIC et le CFC pour financer ce secteur.

En effet, les villes camerounaises sont confrontées aux problèmes de :

> L'insuffisance des revenus des ménages ;

> Le déficit qualitatif et quantitatif des cadres d'habitation ;

> La faiblesse des fonds mobilisés en faveur de l'habitat ;

> La présence importante de l'informel dans le secteur de l'habitat ;

> Le vieillissement des tissus bâtis ;

> Le désordre urbain ;

> L'insuffisance, la méconnaissance et la non implémentation des documents de planification urbaine existants ;

> La méconnaissance des procédures liées à l'acte de construire et le non respect des règles

de construction.

Il en découle une anarchie très marquée dans l'occupation de l'espace urbaine, la prolifération des quartiers précaires, la dégradation des conditions de vie et de sécurité des personnes dans les habitations et les bâtiments en milieu urbain.

A cause de la crise urbaine des années 80, il y a eu fragilisation de l'équilibre ville-campagne. Les migrations en direction des villes se sont intensifiées car ce sont elles qui créent les richesses. L'accumulation des difficultés a abouti à l'intensification de l'exclusion des pauvres dans les villes, mais aussi au façonnement de villes duales. Il s'agit de la juxtaposition de plusieurs espaces qui correspondent à différents niveaux d'intégration et de pratiques de la ville.

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On note ainsi la coexistence d'une ville légale, celle qui correspond aux normes établies et qui regroupe les centres administratifs, les quartiers résidentiels et les quartiers populaires centraux. À côté de cette ville légale, on trouve une ville illégale, résultat des développements périphériques irréguliers, illégaux, sous-équipés. C'est celle où les habitants parleront d'aller en ville, lorsqu'ils doivent quitter leur quartier.

A.2. Villes camerounaises et quartiers précaires

Les quartiers précaires sont la manifestation la plus flagrante du manque de planification et de contrôle de la croissance des villes. Ces quartiers s'étendent en raison de l'urbanisation croissante, de la pénurie du logement abordable dans les villes, mais également à cause de multiples autres raisons telles que la pauvreté, les déplacements liés à des conflits, à des catastrophes naturelles.

Le phénomène de quartier précaire est devenu une particularité des pays d'Asie, d'Afrique, et d'Amérique Latine. Ces trois sous-ensembles concentrent la quasi-totalité du milliard d'habitants des quartiers précaires dans le monde. Les pays développés concentrent environ 10 millions d'habitants dans les quartiers précaires, contre 550 dans les pays d'Asie et du Pacifique, 250 dans les pays d'Afrique, ou encore 150 millions en Amérique Latine et dans les Caraïbes. Cette situation est le résultat de la combinaison de plusieurs facteurs qui tiennent à la fois aux situations démographiques, à la place des villes, et aux différentes formes de gouvernance qu'on rencontre dans les différents pays ( Diagane, 2019).

Cette situation amène à distinguer :

-Le bidonville stricto-sensu : Ce type de quartier précaire concentre toutes les formes d'exclusions, c'est-à-dire une exclusion sociale, une exclusion urbaine et une exclusion foncière. Les populations qui y vivent subissent les contraintes d'une double précarité; celle physique des abris de fortune mais aussi celle juridique des statuts d'occupation. Ce qui caractérise ce type de quartiers tient à plusieurs facteurs. Le premier d'entre eux est l'installation sur les zones à risque, c'est-à-dire que ces quartiers s'installent souvent sur les plus mauvais terrains des villes.

La seconde caractéristique tient à la nature des matériaux utilisés pour les constructions. Il s'agit souvent de matériaux de récupération, qu'il s'agisse de tôle, de toile ou de bois, qui sont utilisés pour la confection des habitations précaires. La troisième caractéristique est l'absence d'équipement et d'infrastructure de base.

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-La sous-intégration à la ville. D'abord l'éloignement par rapport à la ville, mais également la déconnexion par rapport aux structures formelles de la ville, se traduit par de mauvaises liaisons en termes de transport, mais également en termes de service. Enfin, parce que ces quartiers occupent souvent illégalement le terrain, ils restent sous la menace d'éviction et cela empêche les populations dans la consolidation de leur habitation.

-Les quartiers irréguliers déjà consolidés ou en voie de l'être : Il s'agit souvent de quartiers anciens, qui finissent par être tolérés parce qu'ils connaissent une consolidation de leur bâtit en dur et font l'objet d'une amélioration d'un niveau d'équipement. Les autorités finissent en effet, même si c'est timidement, à y consentir quelques investissements ne serait-ce que pour assurer la sécurité des biens et des personnes. Parce qu'ils sont anciens, ces quartiers atteignent également un niveau de mixité sociale par l'arrivée progressive de populations diversifiées.

-Les quartiers centraux laissés à l'abandon et qui se transforment en taudis : Ce sont des quartiers formels qui subissent un processus avancé de dégradation au point de constituer des ghettos qui cumulent plusieurs handicaps et ne retiennent que des populations captives, celles qui n'ont pas une grande liberté en matière de choix de leur lieu de résidence. De façon générale, il s'agit de quartiers qui ont mal vieillis au point d'accuser également un retard important dans l'adaptation des équipements et infrastructures tels que la voirie, les approvisionnements en eau potable et en électricité, mais aussi des services. La dégradation de ces quartiers peut aussi être une conséquence d'un processus de gentrification9 en cours qui affecte des portions entières des villes et souvent des centres-villes.

B. Croissance urbaine et transports urbains

La croissance urbaine peut s'apprécier aussi à travers la mobilité des agents au sein des villes et les moyens de transport utilisés par ces derniers.

B.1. Villes camerounaises et embouteillages

Il devient de plus en plus difficile de se rendre à son lieu de travail dans les grandes villes tentaculaires du Cameroun. Cette situation est due en grande partie à l'invasion des minibus et motocyclettes qui sont parvenus à prendre la place d'un transport public par autobus défaillant.

9 La gentrification est la transformation des espaces due à une intensification des investissements, de l'accroissement de la valeur immobilière des constructions et de l'attrait d'activités à fortes valeurs ajoutées

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

Les raisons de ce dysfonctionnement du transport urbain ne sont pas difficiles à comprendre. Les régies affaiblies, fragmentées et sous-financées ont été incapables tant de maintenir les services existants que de faire des plans de développement. Les autobus tombent en ruine après des années de surcharge sur des routes défoncées et d'entretiens mécaniques rapidement interrompus par le manque de pièces de rechange. Les tarifs sont trop bas et les subventions trop irrégulières pour assurer des exploitations soutenables. Les habitants des banlieues marchent ou ont recours à des services informels, largement non réglementés, sales, dangereux, inconfortables et peu fiables (mototaxis, cargos, etc.).

Dans la plupart des villes (Yaoundé, Douala), les régies ont eu des difficultés à satisfaire les demandes de service des nouveaux habitants urbains, les pauvres en particulier. L'absence de politiques d'utilisation des terres et de développement économique ont débouché sur l'extension tentaculaire des villes. La baisse de la densité associée à une extension anarchique a fait augmenter les distances et poussé à la hausse le prix du transport public. Ces développements affectent souvent les pauvres de manière disproportionnée, les excluant de l'emploi et des services sociaux. Pendant ce temps, l'utilisation accrue des véhicules privés a entraîné l'engorgement des routes, menaçant la sécurité des piétons et la santé des citadins qui inhalent les gaz d'échappement.

Les villes camerounaises partagent certaines caractéristiques communes :

- une population urbaine en croissance, mal servie par le système des transports ; - un déclin des normes du transport public ;

- des chevauchements et des conflits entre les agences chargées de la planification et de la mise en oeuvre des solutions en matière de transport ;

- une forte croissance de l'utilisation du transport par minibus et par motocycles ;

- une dépendance croissante vis-à-vis du transport privé (voitures et motocyclettes) ; - une absence et dégradation des infrastructures de transport ;

- des mauvais aménagements pour le transport non motorisé (marche et bicyclette).

L'engorgement des routes est un problème dans toutes les villes. Les causes en sont la mauvaise gestion du flux de la circulation, l'absence d'aires de stationnement et la médiocre application

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des règles. Le développement anarchique des villes les a rendues incapables de faire face à l'augmentation du nombre des véhicules. Moins de la moitié des routes sont revêtues, ce qui réduit l'accessibilité des autobus aux faubourgs éloignés et quartiers périphériques densément peuplés. Les routes revêtues représentent juste le tiers de la moyenne correspondant aux villes dans le monde en développement. Dans toutes les villes, le réseau routier est inférieur aux normes. La capacité est insuffisante, il n'y a ni bandes d'urgence ni voies de service, le revêtement est dégradé et l'éclairage des rues réduit au minimum. Le mauvais état des routes limite la vitesse des véhicules, réduit considérablement la productivité du parc d'autobus et alourdit les coûts d'entretien des véhicules. Il favorise également l'utilisation des minibus, taxis et motocyclettes qui présentent une plus grande maniabilité que les grands autobus mais ne sont pas aussi efficaces en tant que moyen de transport public urbain.

La plupart des routes ont été construites lorsque les villes n'avaient qu'un seul centre, et avant la rapide croissance de formes personnalisées de transport motorisé. Le réseau routier primaire part en étoile du centre ville vers les zones environnantes et manque de liaisons orbitales ou circulaires. La majorité des routes n'ont qu'une seule bande de circulation dans chaque direction. Lorsqu'elles sont plus larges, une des voies est souvent occupée par les piétons et les véhicules en stationnement. Les carrefours sont peu espacés et mal conçus pour changer de direction.

En plus de ces défauts généraux, peu d'attention a été accordée à d'autres facteurs qui facilitent les opérations des systèmes de transport public. Les voies réservées aux autobus sont rares ou carrément inexistantes. Les arrêts d'autobus, les abribus et autres aménagements destinés aux passagers sont rares et en mauvais état. Les terminaux d'autobus sont légèrement plus grands que les aires de stationnement surencombrées, sans aménagements pour les passagers.

La plupart des villes ignorent les besoins des piétons. Une grande partie du réseau routier manque de trottoirs, les piétons et véhicules motorisés doivent partager le même espace. Lorsqu'ils existent, les trottoirs sont mal entretenus, comportent des caniveaux à ciel ouvert, et sont grignotés par les propriétés qu'ils bordent. Il n'y a ni passages pour piétons ni ponts, sauf dans les centres villes. À cause de la mauvaise gestion de la circulation, les accidents sont fréquents. Les piétons représentent le gros des victimes d'accidents mortels.

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Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

B.2. Genèse et ampleur du phénomène de « mototaxis »

L'utilisation des motocyclettes pour le transport commercial s'est développée très rapidement au cours des dernières années, en raison du mauvais état des routes et de l'incapacité des compagnies d'autobus de satisfaire la demande croissante. À l'origine, les services offerts par les motocyclettes permettaient de relier les zones résidentielles aux grands axes routiers où les passagers pouvaient trouver des taxis ou des autobus. Actuellement, on retrouve les motocyclettes sur les routes principales et même dans le centre ville. Les conducteurs des motocyclettes sont souvent jeunes et inexpérimentés. Les accidents sont fréquents et souvent mortels.

Un transport public urbain efficace requiert une attention coordonnée à la planification urbaine, à la construction et à l'entretien des infrastructures ainsi qu'à l'organisation des services de transport. Malheureusement, ces fonctions sont rarement combinées. Même lorsqu'elles sont toutes les trois assurées par les pouvoirs publics centraux, plusieurs ministères différents sont généralement impliqués. Dans la plupart des villes camerounaises, de nombreuses institutions à tous les niveaux du gouvernement (services centraux, communautés urbaines, communes, entreprises publiques, gendarmerie nationale, police nationale, armée nationale) sont impliquées dans la planification, la réglementation, l'octroi des permis et le contrôle du transport urbain. L'effet net de cette confusion généralisée des rôles se traduit par une mauvaise responsabilisation, un manque de coordination et la dilution à tous les niveaux de l'engagement vis-à-vis de la mise en oeuvre de stratégies de transport au service des besoins de la population.

En bref, « on constate une réglementation inefficace et une absence presque totale de planification intégrée, ce qui explique le désordre urbain permanent » (Kumar et Barrett, 2008).

Section II : Les approches pratiques des dirigeants en matière d'aménagement du territoire.

Cette section présente les différentes formes d'organisation spatiale du territoire (A) et les pratiques des dirigeants pour faire face au désordre urbain (B).

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Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

A. Les différentes formes d'organisation spatiale du territoire

L'appréciation des différentes formes d'organisation spatiale du territoire permet de voir dans quelle logique se situe la vision du Cameroun en matière d'aménagement du territoire.

A.1. les scénarii d'aménagement du territoire

Le processus d'urbanisation distingue les territoires connectés au monde, en complémentarité et en compétitivité des territoires et d'espaces marginalisés ou carrément exclus de ces dynamiques.

Quatre scénarios d'organisation spatiale se distinguent : ? Le scénario de l'archipel éclaté

Ce scénario est un scénario tendanciel, puisqu'il appelle pour l'essentiel l'approfondissement de mécanisme déjà à l'oeuvre. La globalisation accentue la primauté de l'économie sur les autres dimensions de la vie collective. Au sein de l'économie, l'hégémonie des forces de la concurrence et du paradigme libéral entraîne un mouvement de dérégulation de grande ampleur. Celui-ci accroît le volume des échanges internationaux, libérant certaines forces productives et aussi stimulant la croissance économique selon de nouvelles modalités et dans de nouveaux champs d'activité.

La traduction spatiale de ce scénario est logiquement l'accentuation de la polarisation des foyers d'activités par agglomération. Ce qui n'exclut pas totalement l'apparition de nouveaux pôles, portés par des activités innovantes, mais dont le nombre ne pourra être que très limité. La géographie liée à ce scénario correspond donc à une structure avec des pôles économiques et technologiques (villes, pôles d'activités, entreprises) connectés entre eux à l'échelle nationale ou régionale sur la base de projets partagés, mais sans effet de diffusion ni de contagion sur les autres régions.

Le corollaire de cette organisation spatiale est le maintien, voire l'accentuation, des écarts de développement entre les « territoires qui gagnent » et les autres et ce, aux diverses échelles. Les manifestations les plus critiques de cette fracture territoriale résident, d'une part, dans certaines parties des périphéries des villes et, d'autre part, dans certains espaces ruraux désertifiés, mais la

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fragilisation pourrait également gagner de nombreuses villes petites et moyennes à l'économie largement tributaire des transferts sociaux.

? Le scénario du local différencié

Dans ce scénario, ce ne sont plus des forces économiques qui jouent leur carte en participant à la constitution de véritables « villes-État », mais des pouvoirs locaux assis sur des régions ou des communautés, qui tendent à se construire sur des logiques identitaires et communautaristes.

Ce scénario est celui de la constitution de nouvelles féodalités. Il est également, comme le précédent, producteur d'inégalités entre les territoires, convenablement dotés, qui sauront tirer profit de la nouvelle donne, et ceux, moins attractifs, qui ne parviendront pas à développer les alliances et les partenariats nécessaires à leur développement.

Ce scénario peut notamment naître d'une période de trop long atermoiement de l'État pour trancher sur la question des articulations et des priorités entre les différentes entités territoriales, dont la plupart constituent davantage un reflet de l'histoire qu'une vision de l'avenir.

? Le scénario du centralisme rénové

Dans ce scénario, l'État est au coeur de toutes les initiatives en matière d'aménagement du territoire. Le partage des responsabilités et le pluralisme des initiatives dans le domaine du développement territorial pourraient alors venir buter sur la prétention tutélaire de l'État à incarner à lui seul l'intérêt général.

Le mode d'intervention privilégié des pouvoirs publics demeure de type allocatif. Les objectifs consistent à mieux intégrer les espaces périphériques ou délaissés, à limiter le développement anarchique des flux, à parfaire le traitement social des territoires.

Dans ce contexte, le monopole retrouvé de l'État aurait deux conséquences : favoriser le corporatisme en permettant à des intérêts coalisés de bénéficier d'avantages ; développer les réflexes d'assistanat à travers le maintien d'une sphère publique excessive, bloquant ainsi les mécanismes des changements nécessaires, l'initiative et l'innovation, notamment à travers un ferme encadrement des initiatives locales.

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? Le scénario du polycentrisme maillé

Ce scénario est celui d'une approche polycentrique du territoire en grands bassins de peuplement, approche qui devrait approfondir l'intégration en mettant l'accent sur les valeurs de cohésion, de solidarité et de responsabilité, y compris vis-à-vis des générations futures.

Au sein de ces ensembles, des réseaux de villes seraient appelés à se développer autour de pôles urbains dynamiques, compétitifs aux niveaux sous régional et mondial et intégrés dans des ensembles territoriaux solidaires.

Des coopérations, se tissant entre agglomérations d'un même grand bassin de peuplement sous forme de métropole polycentrique avec un partage des compétences et des infrastructures, permettraient un véritable système de villes maillées entre elles, complétant le dynamisme national grâce à une combinaison optimale entre qualité du cadre de vie et performances de la gamme des biens et services disponibles.

De nouveaux modes de régulation territoriale seraient en mesure d'ouvrir le champ à des stratégies locales différenciées, sans pour autant être déconnectées les unes des autres. Le rôle prégnant de l'État central et l'importance accordée à la définition de stratégies nationales ne seraient pas remis en cause, mais se construiraient désormais différemment. On devrait assister à une redéfinition des missions de la puissance publique centrale, au profit de la régulation des conflits, de l'organisation des cadres territoriaux et de la prévention des risques.

Dans cette nouvelle donne, le niveau régional apparaîtrait comme le plus à même de valoriser les réseaux de croissance et de solidarité, rendant possible une différenciation des politiques publiques permettant de prendre en compte la diversité des territoires, la variété de l'armature urbaine, notamment au niveau des villes moyennes et petites, de leurs profils, de leur spécialisation. (Guigou, 2001)

A.2. la vision du DSCE par rapport au territoire Camerounais

Le Cameroun semble s'inscrire dans la vision d'organisation des villes décrite par le scénario du polycentrisme maillé, dans la mesure où le DSCE intègre en son sein la logique sous-entendue par ce scénario10 tout comme la loi d'orientation pour l'aménagement et le

10 Selon le MINHDU, la réalisation de la vision 2035 passe par la rationalisation de l'occupation de l'espace urbain, l'amélioration du cadre et des conditions de vie des populations, la maîtrise de la croissance urbaine à 57.4% en

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développement durable du territoire au Cameroun. Cette vision pousse à réfléchir sur la structure de l'Etat, laquelle structure doit favoriser l'action publique et la structuration de l'économie.

Schéma 2 : Le polymorphisme maillé du territoire camerounais

Taille des villes

Plus de 100 000 habitants

Plus de 10 000 habitants

Plus de 500 000 habitants

Plus de 1 000 000 habitants

Source : traitement de l'auteur.

Le schéma ci-dessus traduit l'image du territoire camerounais lorsque ce dernier aura mis en oeuvre le polymorphisme maillé. On note une intégration des différentes villes avec des effets de contagion, de diffusion du développement, de la technologie d'une ville, d'une partie du territoire vers les autres.

2020, l'entretien et/ou la mise en place des infrastructures urbaines, la maîtrise de la gestion foncière en milieu urbain, la mise en réseau des villes , l'aménagement de nouvelles trames foncière.

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B. Les approches pratiques des dirigeants pour faire face aux désordres urbains.

Deux principales interventions visent à mettre fin au désordre urbain. Celle des délégués du gouvernement auprès des communautés urbaines et celles des services centraux (MINHDU).

B.1. Interventions des délégués du gouvernement dans les grandes villes

Dans leurs approches, les délégués du gouvernement auprès des communautés urbaines ont essayé plusieurs opérations de planification urbaine parmi lesquelles le déguerpissement la réhabilitation/restructuration et la résorption intégrale.

- Le déguerpissement.

Jusqu'en 1960, la pauvreté se concentrait dans les espaces très circonscrits des villes. Les quartiers précaires étaient alors considérés comme la manifestation d'une transition urbaine, et devaient rapidement disparaître. Et lorsqu'on s'est aperçu qu'il ne s'agissait pas d'un phénomène passager, des réponses ont été apportées souvent sous la forme de déguerpissement, une façon d'affirmer l'autorité de la puissance publique.

Les déguerpissements ont en effet montré leurs limites. Ils induisaient des coûts élevés sur les plans social, économique et sécuritaire, et étaient souvent à l'origine de troubles sociaux. C'est ce qui explique qu'à la fin des années 60 des courants de pensée se sont affirmés. John Turner en était la figure emblématique pour soutenir une approche qui privilégie, plutôt que la démolition, l'amélioration de l'environnement des pauvres et leur implication directe dans les projets qui les concernent.

- La réhabilitation/restructuration.

Le consensus a été fait autour de la réhabilitation/restructuration. Du point de vue des bailleurs de fonds, il s'agit de la nécessité d'une intervention vigoureuse, dans ces quartiers précaires, lieux de concentration de la pauvreté, dans le but d'enclencher un cercle vertueux, qui conduira à l'évolution, tant physique que sociale, des quartiers. Pour les autorités, il s'agit d'intervenir pour éliminer les divers risques sanitaires, environnementaux, sécuritaires et sociaux auxquels sont exposées les populations, la nécessité de soigner l'image de la ville en éliminant ce

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qui pourrait l'entacher, vu de l'extérieur, lutter contre la pauvreté, l'exclusion, et la recherche d'une amélioration des conditions difficiles d'existence dans ces quartiers.

- La résorption intégrale des quartiers précaires.

Comme dans les déguerpissements, le but recherché dans la résorption intégrale est l'élimination pure et simple du quartier. Dans cette situation, les quartiers précaires occupent soit des terrains publics, soit des terrains privés. L'intervention peut avoir une légitimité lorsqu'ils occupent des terrains privés alors que dans le cas du squat des terrains publics, il est plus difficile de justifier les déguerpissements. Dans tous les cas de figure, il s'agit d'interventions risquées surtout lorsqu'aucune solution d'accompagnement n'est proposée comme c'est malheureusement souvent le cas. La nouvelle donne aujourd'hui est la restructuration in-situ.

- La restructuration in situ.

C'est celle qui vise l'amélioration du quartier sur place, en minimisant les déplacements de populations. Même si les projets sont tous différents, les démarches conduisant à la restructuration sont identiques.

Elles comprennent, dans une première phase, la préparation et l'état des lieux ; dans une seconde phase, les travaux de viabilisation ; et dans une troisième phase, les travaux d'ingénierie sociale, sous forme d'accompagnement et de soutien des populations à se réinstaller dans le nouveau quartier.

La restructuration in situ des quartiers précaires est une opération complexe, qui imbrique plusieurs tâches et exige souvent l'intervention coordonnée de plusieurs structures. Elle a cependant l'avantage de maintenir le quartier et ses populations sur place, pour un traitement parfois sur de longues années. Cela diffère naturellement les résultats dans le temps, et rend moins visible l'impact d'une action souvent lourde qui nécessite une préparation minutieuse et des moyens importants dont on n'a souvent pas l'entière maîtrise.

Cette approche est celle encouragée par les bailleurs des fonds parmi lesquels la Banque Mondiale. Pour elle en effet, les interventions n'ont de sens que si elles permettent de rendre les villes plus compétitives et d'améliorer les conditions de vie des plus pauvres. Autrement dit, il s'agit de cibler les actions dont la mise en oeuvre permettra d'accroître la compétitivité des villes, de dégager des ressources durables, qui donneront les moyens d'équiper les quartiers précaires et de les intégrer dans les structures des villes. Toujours pour la Banque Mondiale, la forte concentration des populations, dans les grandes villes du Sud, est inéluctable et peut constituer

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une chance de développement pour les pays, même si elle se fait, dans un premier temps, de façon désordonnée et incontrôlée.

Pour la Banque Mondiale, l'urbanisation est inévitable. Elle est essentielle pour le maintien de la croissance économique, construite sur l'effet d'agglomération. Les villes sont, en effet, le moteur de la croissance économique. Elles se spécialisent et interagissent pour soutenir l'économie nationale, et les quartiers précaires ne sont qu'une conséquence du dysfonctionnement du marché foncier. Cette idée maîtresse est lancée par la Banque Mondiale, et renforcée par une succession de paradigmes, dans l'objectif d'assister les pays, pour créer des richesses, qui seront équitablement partagées.

La Banque Mondiale considère en effet, que même si la concentration urbaine peut constituer un atout, la non maîtrise des flux de migration vers les villes peut constituer un danger, surtout lorsque les demandes sociales ne sont pas satisfaites.

Depuis l'an 2000, la Banque Mondiale s'est engagée énergiquement dans la lutte contre la pauvreté. Elle reconnaît ainsi les insuffisances des stratégies fondées sur les politiques d'ajustement structurel (PAS), credo des années 80-90. Sa nouvelle stratégie, la réduction de la pauvreté doit tenir compte des conditions économiques spécifiques, et de la situation sociale de chaque pays. C'est cela qui aboutit à la définition des stratégies nationales de réduction de la pauvreté, élaborée par les différents groupes sociaux, dans le cadre d'une démocratie participative. Les objectifs économiques et les objectifs sociaux sont désormais placés sur un même plan.

Cet engagement nouveau de la Banque Mondiale s'est traduit par la définition d'objectifs du millénaire pour le développement (OMD), lesquels ont été remplacés par les objectifs de développement durable (ODD). Au départ, 8 objectifs, 18 cibles et 40 indicateurs avaient ainsi été retenus, cela correspondait à un engagement de la communauté internationale, pour améliorer la situation des habitants des quartiers précaires, réduisant de moitié la pauvreté à l'horizon 2015. Depuis le 25 septembre 2015, un nouvel ensemble d'objectifs mondiaux pour éradiquer la pauvreté, protéger la planète et garantir la prospérité pour tous, a été adopté dans le cadre d'un nouveau programme de développement durable. Chaque objectif a des cibles à atteindre d'ici les 15 prochaines années.

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Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

B.2. Intervention des pouvoirs centraux

Dans son approche, le MINHDU a effectué en 2013, un diagnostic urbain afin de faire ressortir les problèmes dont souffre le secteur urbain au Cameroun dans les composantes que sont les transports urbains, gouvernance urbaine et urbanisme-habitat-cadre de vie.

Dans la composante transports urbains, il ressort l'arbre à problèmes suivant : Schéma 3 : Arbres à problèmes/transports urbains.

Insuffisance des financements alloués à l'aménagement des voiries

Formes d'extension urbaine peu favorables au développement des transports collectifs

Insuffisance de la politique et de la stratégie de construction et d'entretien des voiries urbaines

Chevauchement des interventions des acteurs publics sur le terrain et absence d'un cadre de concertation

Augmentation des
dépenses de
transport pour les
usagers

Insuffisance de la couverture des villes par un réseau viaire principal

Inadaptation des

infrastructures au transport en commun (absence de couloirs de circulation réservés aux bus et aux taxis collectifs)

Allongement du temps d'attente d'un moyen de transport

Mesures fiscales et
réglementaires peu
incitatives pour les

entreprises de
transports collectifs

Chevauchement des missions et absence d'un cadre de concertation

Faiblesse quantitative et qualitative de l'offre de transports collectifs et semi collectifs

Politique peu incitative de développement du
transport urbain de masse

Insuffisance de la signalisation routière

Conditions d'exploitation difficiles du fait des encombrements

Coût élevé

d'acquisition des matériels roulants neufs et absence

de réglementation

relative à
l'importation des véhicules

Fréquence élevée des accidents, encombrement des voies

Insuffisante application de la réglementation sur l'occupation de la voie publique

Faible fluidité du trafic

Absence de voies de contournement des grands centres urbains

Inadéquation des caractéristiques géométriques des voiries

Chevauchement des missions et absence d'un cadre de concertation

Insuffisance d'aménagement des marchés de vivres frais

Absence de plans de déplacement

Prolifération des

mototaxis

Source : Stratégie de Développement du Sous-secteur Urbain au Cameroun, MINHDU, 2013

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

Cet arbre à problème montre clairement que « La faiblesse quantitative et qualitative de l'offre de transports collectifs et semi-collectifs accessibles au plus grand nombre dans les grandes villes », est le problème central en matière de transports urbains au Cameroun.

Il apparaît que l'urbanisme n'est pas suffisamment réglementé, et les textes en vigueur sont mal maîtrisés ou mal appliqués ; la mobilité urbaine est réduite, notamment du fait de l'insuffisance quantitative et qualitative d'un réseau viaire adapté au transport collectif et semi-collectif; l'insuffisance des aménagements à caractère socio-économique entraîne des désordres urbains, et amoindrit l'apport économique attendu des villes.

Dans la composante gouvernance urbaine, l'arbre à problèmes se présente comme suit :

Schéma 4 : Arbre à problèmes / gouvernance urbaine

Difficultés de transfert de compétences Etat-CTD

Faible appui des CTD aux populations urbaines

Faiblesse des appuis structurel et organisationnel des services déconcentrés de l'Etat

Faiblesse de
planification,
programmation et
exécution

Difficulté de la mise en cohérence de tous les leviers novateurs d'une gestion optimale de la cité

Insuffisances organisationnelles, financières, humaines ; faible productivité des villes

Insuffisances de la coordination entre services étatiques, entre Etat et CTD, et entre les CTD

Nombreuses

insuffisances dans la

gestion des

communes, tant au

plan organisationnel

que financier

Capacités des services de l'Etat limitées, en raison d'une insuffisance qualitative et quantitative des ressources humaines

Insuffisance des moyens financiers et humains des communes

Faible respect des textes, éclatement des compétences, absence d'approche concertée

Forte résistance de la plupart des administrations à déconcentrer leurs activités

Insuffisances diverses au niveau des OSC

Faible ancrage des notions d'imputabilité et de transparence, du fait à la fois des insuffisances d'un cadre formel, mais aussi du non-respect des dispositions en vigueur tant par les CTD que par les services de l'Etat

Faible participation des populations de communes aux activités de l'Etat, méconnaissance des procédures et fonctionnement des services étatiques

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Source : Stratégie de Développement du Sous-secteur Urbain au CAMEROUN, MINHDU, 2013.

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

Cet arbre à problème fait apparaître clairement que le problème central de la gouvernance urbaine est la difficulté de la mise en cohérence de tous les leviers novateurs d'une gestion optimale de la cité. Cette situation est due au fait que, les mécanismes de la gouvernance urbaine sont insuffisants et ne jouent pas leur rôle de manière satisfaisante, du fait en particulier du faible niveau des capacités techniques et organisationnelles des acteurs.

Dans la composante urbanisme-habitat-cadre de vie, nous avons :

Schéma 5 : Arbre à Problèmes / Urbanisme-Habitat-Cadre de vie

Caractère peu ordonné des installations humaines et absence de réserves

Un habitat indécent s'est développé de façon anarchique et inorganisée dans l'essentiel des zones urbaines au Cameroun

Urbanisation de zones inconstructibles et impropres à l'installation de l'habitat

Autoproduction de l'habitat par la grande majorité des ménages (plus de 90%.)

Aggravation de la situation sanitaire de la population qui affecte directement son développement

Lotissements domaniaux et communaux sommairement aménagés et faible professionnalisation de la promotion foncière et immobilière privée.

Insuffisance

d'espaces urbanisés

Absence ou non

application des documents d'urbanisme et de la réglementation de l'occupation et de l'usage

des sols

Séparation des
responsabilités en
matière de droit foncier
et d'urbanisme

Insuffisance quantitative et qualitative de l'offre de logements décents et de terrains à bâtir

Insuffisance de

l'offre quantitative

du secteur privé

formel

Existence d'un droit foncier archaïque par rapport à la réalité de l'urbanisation

Désengagement de

l'Etat dans le

l'habitat planifié

Absence
d'accompagnement,

d'orientation, de

soutien budgétaire à

canalisation,
d'incitation et de
contrôle de la part

des pouvoirs

publics

professionnalisati

Faible

PME de la

on des artisans et

construction

Absence d'un

système de crédit

et/ou de garanties d'emprunts adaptés aux besoins des promoteurs

d'approvisionne

matériaux de

construction

Difficultés

ment en

pour les

Absence

l'espace et de

réserves foncières

équipements et les VRD

d'organisation de

d'urbanisation non

consommatrice

Fourniture insuffisante des services urbains de base

structurée et

fortement

d'espace

Forme

quartiers périphériques où le réseau est essentiellement en terre

Enclavement des

réseaux très

Coût des

extensions de

élevé

Inadaptation

ménagères

des méthodes

de collecte des

ordures

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Source : Stratégie de Développement du Sous-secteur Urbain au Cameroun, MINHDU, 2013

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Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

Cet arbre à problèmes laisse apparaître clairement que, le problème central de la sous-composante urbanisme est l'insuffisance d'espaces aménagés, celui de la sous-composante habitat est l'insuffisance de l'offre de logements décents et de terrains à bâtir et celui de la sous-composante cadre de vie est une fourniture insuffisante des services urbains de base.

Les leçons que nous pouvons tirer du sous-secteur urbain au Cameroun relatifs aux composantes transports urbains, gouvernance urbaine et urbanisme-habitat-cadre de vie sont les suivants :

> L'urbanisme n'est pas suffisamment réglementé, et les textes en vigueur sont mal maîtrisés ou mal appliqués ;

> La crise économique a raréfié les ressources allouées à l'aménagement urbain, et en particulier aux opérations de restructuration et de rénovation des quartiers dans les villes ;

> L'offre de logements décents accessibles au plus grand nombre est insuffisante. Il en est de même pour la fourniture des services urbains de base ;

> L'insuffisance des aménagements à caractère socio-économique entraîne des désordres urbains, et amoindrit l'apport économique attendu des villes ;

> La mobilité urbaine est réduite, notamment du fait de l'insuffisance quantitative et qualitative d'un réseau viaire adapté au transport collectif et semi-collectif ;

> Les difficultés d'accès aux financements, couplés à l'insuffisance de la réglementation ou à sa mauvaise application, freinent l'exercice des professionnels des métiers urbains ;

> Les mécanismes de la gouvernance urbaine sont insuffisants et ne jouent pas leur rôle de manière satisfaisante, du fait en particulier du faible niveau des capacités techniques et organisationnelles des acteurs ;

> Les données statistiques disponibles sur les questions urbaines sont très globales et insuffisantes pour permettre de bien cerner les problématiques du sous-secteur.

Ainsi, en tant que acteur central en matière d'aménagement du territoire en milieux urbains, le MINHDU participe à la mise en oeuvre de tous les projets d'infrastructures et d'équipements urbains ; il assiste aussi les CTD dans l'élaboration de leurs documents de planification (PDU, POS, PSU, PS) en finançant les études.

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

Somme toute, il était question dans ce chapitre de présenter les politiques et les pratiques d'aménagement du territoire au Cameroun, d'une part, d'autre part, les éléments caractéristiques de la croissance urbaine dans ce pays. Il ressort de cette analyse que, malgré les efforts consentis par les dirigeants, l'urbanisation n'est pas maitrisée et, au lieu de constituer le levier de la croissance économique, elle s'est traduite par l'expansion anarchique de l'habitat, l'insuffisance des infrastructures et services urbains de base.

Le corollaire de cette situation est la promiscuité, l'insalubrité et la fracture sociale. Les nombreux dysfonctionnements auxquels nos villes sont confrontées conduisent à un contexte urbain marqué par la régression de la production, la stagnation voire la baisse du revenu urbain, l'exposition des populations aux risques divers et à l'aggravation de la pauvreté. En un mot, la pauvreté urbaine et les désordres socioéconomiques qui en découlent se sont considérablement accrus, en obérant par là même la triple fonction économique, culturelle et résidentielle des villes11.

Ainsi, l'ampleur des problèmes urbains demande une réflexion plus poussée afin d'apporter des solutions adaptées pour faire face aux désordres urbains. Cela est d'autant plus vrai que les mesures mises en oeuvre interviennent dans un contexte où le laxisme des dirigeants a déjà permis à l'anarchie de précéder la planification urbaine.

Néanmoins, nous avons aussi vu que la Banque Mondiale et les dirigeants camerounais sont d'accord sur le fait que l'aménagement du territoire y inclue la densification urbaine est un facteur qui influence positivement la croissance économique.

L'aménagement du territoire nécessite des moyens colossaux, lesquels doivent provenir d'une source viable. Cela demande à analyser les liens entre l'aménagement du territoire et la croissance urbaine quantitativement.

11 DECLARATION DE S. E. JEAN CLAUDE MBWENTCHOU, MINISTRE DE L'HABITAT ET DU DEVELOPPEMENT URBAIN DU CAMEROUN, Quito, Equateur, 18 octobre 2016

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

CHAPITRE IV : RESULTATS DE LA VERIFICATION EMPIRIQUE ET RECOMMANDATIONS

L'objectif de ce chapitre est de présenter les résultats de la vérification empirique et de faire des recommandations à l'intention des pouvoirs publics. Notre chapitre s'organise autour de deux principales sections :

- La première présente la méthodologie dont nous avons fait usage ainsi que les résultats ; - La seconde fait des recommandations à partir des résultats obtenus par l'analyse.

Section I : L'analyse de la relation entre l'aménagement du territoire et la croissance urbaine

Cette section présente le modèle d'analyse usité (A) et son estimation (B), ainsi que les résultats et leurs interprétations (C).

A. La présentation du modèle d'analyse

La présentation du modèle d'analyse passe par sa spécification et la présentation de ses variables.

A1. Spécification du modèle

Deux modèles de régression linéaire multiple12 ont été utilisés dans le cadre de notre analyse empirique. Ceci pour apprécier la relation étudiée dans le cadre du champ défini, mais aussi pour voir la manifestation de ce phénomène au niveau national.

- Le premier modèle met en relation le Budget d'Investissement Public (BIP), le Produit Intérieur Brut(PIB) et la Population Total du Cameroun(POPTOTAL) et s'écrit :

LogBIPit = áo + á1LogPIBit +á2LogPOPTOTALit +åit (1)

12 Les hypothèses suivantes doivent être vérifiées pour la validation des résultats d'une régression linéaire multiple

H1 : les xit sont observées sans erreur

H2 : E(åit) =0

H3 : E(åit 2) = óå (homoscédasticité )

H4 : E(åt, åt') =0, si t?t'(erreurs indépendantes)

H5 : cov(xit, åt') =0

H6 : absence de colinéarité entre les variables explicatives

H7 : X'X/n tend vers une matrice finie non singulière

H8 : n> k+1, le nombre d'observations est supérieur au nombre de séries explicatives (Bourbonnais, 2009)

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

Où áo est le terme constant, åit est le terme d'erreur (iid); i [1, 30] et t [1986,2015], á1t et á2t les pentes liées aux variables respectives.

131t et

- Le deuxième met en relation le Budget d'Investissement Public, le Produit Intérieur Brut et la Population Urbaine(POPURB) du Cameroun et s'écrit :

LogBIPit = âo + â1LogPIBit +â2LogPOPURBit +uit (2)

Où 13o est le terme constant, õit est le terme d'erreur (iid) ; i [1, 30] et t [1986,2015],

132t les pentes liées aux variables respectives.

Suivant les théories relatives aux potentiels économiques et sociaux qu'offrent les investissements publics, on s'attend à une valeur positive de á1 traduisant la corrélation positive

entre le Budget d'Investissement Public et le Produit Intérieur, et une valeur négative de á2 traduisant la corrélation négative entre Budget d'Investissement Public et la Population Totale du Cameroun.

Suivant les mêmes théories, on s'attend à une valeur positive de 131 traduisant la corrélation positive entre le Budget d'Investissement Public et le Produit Intérieur tout comme dans le

premier modèle et une valeur négative de 132 traduisant la corrélation négative entre Budget d'Investissement Public et la Population urbaine du Cameroun.

A.2. Les variables

Deux catégories de variables seront utilisées dans notre analyse : la variable expliquée BIP et les variables explicatives PIB, POPTOTAL et POPURB.

BIP : Budget d'Investissement Public,

PIB : Produit Intérieur Brut,

POPTOTAL : Population Totale du Cameroun, POPURB : Population Urbaine du Cameroun.

Etant donné que nous étudions des phénomènes dynamiques, il nous est paru évident de retenir plutôt le logarithme népérien des valeurs des variables supra au lieu des valeurs brutes, vu que la

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

dérivée du logarithme donne immédiatement le taux de croissance de la variable. Ainsi, nous aurons comme variables : LBIP, LPIB, LPOPTOTAL et LPOPURB. Le tableau 2 en annexe donne les valeurs de ces variables.

LBIP : Logarithme népérien du Budget d'Investissement Public,

LPIB : Logarithme népérien du Produit Intérieur Brut,

LPOPTOTAL : Logarithme népérien de la Population Totale du Cameroun, LPOPURB : Logarithme népérien de la Population Urbaine au Cameroun.

Afin d'arriver à un modèle significatif qui, non seulement nous permettra de faire notre vérification mais qui rend compte également de l'évolution socio-économique du Cameroun pendant les périodes de crise et en dehors des périodes de crise, notre analyse s'est focalisée sur les trois décennies qui partent de 1986 à 2015.

Cet intervalle de temps nous permet ainsi de prendre en compte le premier, le deuxième et le troisième recensement de la population au Cameroun pour plus de lisibilité dans l'analyse des données.

B. Estimation des modèles

Pour effectuer une bonne estimation, il est nécessaire d'avoir des données issues d'une source viable, mais aussi de faire usage d'une méthode bien spécifique.

B.1. Source des données

Les données utilisées dans le cadre de notre analyse sont essentiellement des données socio-économiques. Dans la mesure où l'aménagement du territoire qui est une mission régalienne de l'Etat se traduit par des investissements importants en infrastructures et en équipements, nous avons choisi de capter économiquement cette action par le BIP.

En ce qui concerne la croissance urbaine, celle-ci est considérée dans le cadre de notre analyse comme la croissance économique en milieu urbain et la croissance de la population urbaine. Nous capterons la croissance économique urbaine par le Produit Intérieur Brut (PIB national), vu la difficulté de déterminer le PIB urbain dans le PIB national. Nous nous appuyons néanmoins

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

sur le fait qu'il est établi13 que la grande partie du PIB national est produite par les établissements urbains. La croissance démographique urbaine sera captée par la population urbaine au Cameroun.

Ces données ont été obtenues à partir des données de l'INS, des lois de finance sur les années considérées et les données de la Banque Mondiale. Le tableau 1 en annexe présente ces différentes données.

B.2. Méthode d'estimation

Notre analyse fait des régressions linéaires multiples avec la méthode des MCO, ainsi qu'un test de causalité au sens de Granger.

Les régressions cherchent à mettre en exergue la relation entre l'aménagement du territoire et la croissance urbaine, tandis que le test de causalité de Granger cherche à savoir le sens de la causalité entre ces deux concepts.

C. Les résultats

L'estimation des modèles permet d'arriver à des résultats dont l'analyse permet de prendre une position claire par rapport aux hypothèses émises.

C.1. Présentation des résultats

L'estimation des modèles grâce au logiciel Eviews.3 nous a permis d'arriver aux résultats suivants.

Pour le premier modèle, nous avons :

78

13 Selon le diagnostic du sous-secteur urbain au Cameroun effectué par le MINHDU en 2013, les villes ont contribué au PIB national pour 65,5% en moyenne sur la période 2003-2007

79

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

Tableau 3 : régression du premier modèle dans Eviews.

Dependent Variable: LBIP

Method: Least Squares

Sample: 1986 2015

Included observations: 30

White Heteroskedasticity-Consistent Standard Errors & Covariance

Variable

Coefficient

Std. Error

t-Statistic

Prob.

LPIB

1.922391

0.248148

7.746948

0.0000

LPOPTOTAL

-2.659402

0.613227

-4.336731

0.0002

C

14.65191

3.915810

3.741731

0.0009

R-squared

0.839941

Mean dependent var

 

5.773603

Adjusted R-squared

0.828085

S.D. dependent var

 

0.613579

S.E. of regression

0.254406

Akaike info criterion

 

0.194871

Sum squared resid

1.747509

Schwarz criterion

 

0.334991

Log likelihood

0.076938

F-statistic

 

70.84381

Durbin-Watson stat

0.918766

Prob (F-statistic)

 

0.000000

Source : traitement de l'auteur dans le logiciel Eviews.

Le tableau 3 présente les résultats de l'estimation du premier modèle. Sa lecture, notamment les valeurs des probabilités, permet de dire que tous les paramètres sont significatifs.

Pour le deuxième modèle, nous avons :

Tableau 4 : régression du deuxième modèle dans Eviews.

Dependent Variable: LBIP

Method: Least Squares

Sample: 1986 2015

Included observations: 30

White Heteroskedasticity-Consistent Standard Errors & Covariance

Variable

Coefficient

Std. Error

t-Statistic

Prob.

LPIB

1.360392

0.134827

10.08992

0.0000

LPOPURB

-0.957616

0.250229

-3.826957

0.0007

C

2.460929

1.466592

1.677992

0.1049

R-squared

0.828233

Mean dependent var

 

5.773603

Adjusted R-squared

0.815510

S.D. dependent var

 

0.613579

S.E. of regression

0.263547

Akaike info criterion

 

0.265466

Sum squared resid

1.875333

Schwarz criterion

 

0.405586

Log likelihood

-0.981992

F-statistic

 

65.09485

Durbin-Watson stat

0.887289

Prob (F-statistic)

 

0.000000

Source : traitement de l'auteur dans le logiciel Eviews.

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

Le tableau 4 présente les résultats de l'estimation du deuxième modèle. Il montre clairement que tous les paramètres sont significatifs.

En ce qui concerne le test de causalité de Granger, notre analyse nous a permis d'arriver aux résultats suivants relatifs aux modèles précédents :

Pour ce qui est du premier modèle, nous avons :

Tableau 5 : Sens de causalité entre les variables LBIP, LPIB et LPOPTOTAL.

Pairwise Granger Causality Tests Sample: 1986 2015

Lags: 2

Null Hypothesis:

Obs

F-Statistic

Probability

LPIB does not Granger Cause LBIP LBIP does not Granger Cause LPIB

28

5.63216

1.45800

0.01021

0.25342

LPOPTOTAL does not Granger Cause LBIP LBIP does not Granger Cause LPOPTOTAL

28

6.07809

1.65334

0.00760

0.21336

Source : traitement de l'auteur dans le logiciel Eviews.

Le tableau 5 présente les résultats du test de causalité au sens de Granger des variables du premier modèle. Il laisse aussi apparaître la significativité de certaines hypothèses par rapport aux autres.

Pour ce qui est du deuxième modèle, nous avons :

Tableau 6 : Sens de causalité entre les variables LBIP, LPIB et LPOPURB.

Sample: 1986 2015 Lags: 2

Null Hypothesis:

Obs

F-Statistic

Probability

LPIB does not Granger Cause LBIP LBIP does not Granger Cause LPIB

28

5.63216

1.45800

0.01021

0.25342

LPOPURB does not Granger Cause LBIP LBIP does not Granger Cause LPOPURB

28

8.49956

2.82346

0.00172

0.08007

80

Source : traitement de l'auteur dans le logiciel Eviews.

81

82

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

Le tableau 6 présente les résultats du test de causalité au sens de Granger des variables du deuxième modèle. Il laisse aussi apparaître la significativité de certaines hypothèses par rapport aux autres.

C.2. Analyse des résultats

La lecture des résultats de l'estimation du premier modèles permet de constater que :

Le coefficient de détermination R2 = 0.839941 est supérieur à 75%, ce qui évoque une présomption à la causalité entre la variable expliquée LBIP et les variables explicatives LPIB et LPOPTOTAL.

La statistique de Fischer calculée Fcal = 70.84381 est supérieure à la statistique de Fischer tabulée, F0.05(3 , 28) = 2.95, ce qui signifie que le modèle est globalement significatif.

Interprétation des paramètres :

- U1

Suivant le test des hypothèses : H0 : U1 = 0 contre H1 : U1 ? 0, nous avons :

La statistique de Student liée à U1, t1 = 7.746948 est supérieure à la statistique de Student tabulée t0.05(27) =2.052, ce qui signifie que le paramètre U1 est significativement différent de 0.

Suivant le test des hypothèses : Ho' : U1 <0 contre H1' : U1 >0, nous avons :

La statistique de Student t1' = 7.746948 est aussi supérieure à la statistique de Student tabulée t0.025(27) =1.703, ce qui signifie que le paramètre U1 est significativement supérieur à 0, donc positif.

Nous concluons que le PIB influence positivement le BIP.

- U2

Suivant le test des hypothèses : H0 : U2 = 0 contre H1 : U2 ?0, nous avons :

La statistique de Student liée à U2, t2 = -4.336731 est supérieure en valeur absolue à la statistique de Student tabulée t0.05(27) = 2.052, ce qui signifie que le paramètre U2 est significativement différent de 0.

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

Suivant le test des hypothèses : H0' : U2 <0 contre H1' : U2 >0, nous avons :

La statistique de Student t2' = -4.336731 est inférieure à la statistique de Student tabulée donnée par t0.025(27) =1.703, ce qui signifie que le paramètre U2 est significativement inférieur à 0, donc négatif.

Il ressort que la taille totale de la population camerounaise influence négativement le BIP.

La lecture des résultats relatifs à l'estimation du deuxième modèle permet de constater aussi que :

Le coefficient de détermination R2 = 0.828233 est supérieur à 75%, ce qui évoque une présomption à la causalité entre la variable expliquée LBIP et les variables explicatives LPIB et LPOPURB.

La statistique de Fischer calculée Fcal = 65.09485 est supérieure à la statistique de Fischer tabulée donnée par F0.05(3 , 28) = 2.95, ce qui signifie que le modèle est globalement significatif.

Interprétation des paramètres :

- P1

Suivant le test des hypothèses : H0 : P1 =0 contre H1 : P1 ?0, nous avons :

La statistique de Student liée à P1, t1 = 10.08992 est supérieure à la statistique de Student tabulée t0.05(27) = 2.052, ce qui signifie que le paramètre P1 est significativement différent de 0.

Suivant le test des hypothèses : H0' : P1<0 contre H1' : P1 >0, nous avons :

La statistique de Student t1' = 10.08992 est supérieure à la statistique de Student tabulée donnée par t0.025(27) = 1.703, ce qui signifie que le paramètre P1 est significativement supérieur à 0, donc positif.

Il en ressort que le PIB influence positivement le BIP.

- P2

Suivant le test des hypothèses : H0 : P2 = 0 contre H1 : P2 ? 0, nous avons :

83

84

85

86

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

La statistique de Student liée à P2, t2 = -3.826957 est supérieure en valeur absolue à la statistique de Student tabulée t0.05(27) = 2.052, ce qui signifie que le paramètre P2 est significativement différent de 0.

Suivant le test des hypothèses : H0 : P2 < 0 contre H1 : P2 > 0, nous avons :

La statistique de Student calculée t2' = -3.826957 est inférieure à la statistique de Student tabulée donnée par t0.025(27) = 1.703, ce qui signifie que le paramètre P2 est significativement inférieur à 0, donc négatif.

Il en ressort que la taille de la population urbaine influence négativement le BIP.

La lecture des résultats relatifs aux tests de causalité au sens de Granger permet d'apprécier le sens de ces causalités.

- Sens de causalité entre le BIP et le PIB. Suivant le test des hypothèses :

H0 : LPIB ne cause pas LBIP au sens de Granger H1 : LPIB cause LBIP au sens de Granger

Nous avons :

La statistique calculée de Fischer Fcal = 5.63216 est supérieure à la statistique tabulée de Fischer, donnée par F0.05(1 , 26) = 5.23.

Ainsi, LPIB cause LBIP au sens de Granger, ce qui nous amène à dire que le PIB est la cause du BIP.

Suivant le test des hypothèses :

H0' : LBIP ne cause pas LPIB au sens de Granger H1' : LBIP cause LPIB au sens de Granger Nous avons :

La statistique calculée de Fischer Fcal' = 1.45800 est inférieure à la statistique tabulée de Fischer, donnée par F0.05(1 , 26) = 5.23. Ceci signifie que LBIP ne cause pas LPIB.

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

En définitive, seul le PIB cause le BIP.

- Sens de causalité entre BIP et la population totale. Suivant le test des hypothèses :

H0 : LPOPTOTAL ne cause pas LBIP au sens de Granger H1 : LPOPTOTAL cause LBIP au sens de Granger Nous avons :

La statistique de Fischer calculée Fcal = 6.07809 est supérieure à la statistique de Fischer tabulée F0.05(1 , 26) = 5.23, ce qui signifie que LPOPTOTAL cause LBIP au sens de Granger.

Suivant le test des hypothèses :

H0' : LBIP ne cause pas LPOPTOTAL au sens de Granger H1 : LBIP cause LPOTOTAL au sens de Granger

Nous avons :

La statistique de Fischer calculée Fcal' = 1.65334 est inférieure à la statistique tabulée de Fischer, donnée par F0.05(1 , 26) = 5.23, ce qui signifie que LBIP ne cause LPOPTOTAL au sens de Granger.

En définitive, la population totale cause le BIP au sens de Granger. - Sens de causalité entre le BIP et la population urbaine. Suivant le test des hypothèses :

H0 : LPOPURB ne cause pas LBIP au sens de Granger

H1 : LPOPURB cause LBIP au sens de Granger

Nous avons :

La statistique de Fischer calculée Fcal = 8.49956 est supérieure à la statistique de Fischer tabulée donnée par F0.05(1 , 26) = 5.23.

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

Ceci signifie que LPOPURB cause sans aucun doute LBIP au sens de Granger.

Suivant le test des hypothèses :

H0' : LBIP ne cause pas LPOPURB au sens de Granger

H1' : LBIP cause LPOPURB au sens de Granger

Nous avons :

La statistique de Fischer calculée Fcal' = 2.82346 est inférieure à la statistique de Fischer tabulée donnée par F°.°5(1 , 26) = 5.23. Ce qui signifie que LGBIP ne cause pas LPOPURB au sens de Granger.

En définitive, seule la population urbaine cause le BIP au sens de Granger.

Il ressort de notre analyse que, non seulement il existe un lien entre l'aménagement du territoire et la croissance urbaine, mais aussi, la croissance urbaine cause l'aménagement du territoire. Ce résultat est vrai en ce qui concerne la population urbaine mais aussi en ce qui concerne la population totale du Cameroun.

Les résultats obtenus ainsi que les enseignements tirés de la revue de la littérature nous amènent à formuler quelques recommandations de politiques économiques ou urbaines, à l'attention des dirigeants politiques ainsi que des chercheurs.

Section II : les recommandations de politiques économiques ou urbaines.

Dans cette section, nous ferons des recommandations d'ordre socio-économique et politique (A) et des recommandations d'ordre pratique (B), en nous appuyant sur les résultats obtenus dans le cadre de notre analyse, mais aussi sur des enseignements tirés des observations des pratiques courantes.

A. Recommandations d'ordre socioéconomique et politique.

Les pouvoirs devraient mettre en oeuvre des mesures concrètes susceptibles d'améliorer le contexte économique du pays ainsi que le cadre et le niveau de vie des populations.

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

A.1. Recommandations d'ordre socioéconomique

Notre analyse a permis de mettre en exergue le lien qui existe entre l'aménagement du territoire et la croissance urbaine. Les dirigeants devraient prendre conscience de ce fait et mettre en place des politiques économiques qui créent un cercle vertueux de développement, un cercle où l'aménagement du territoire permet à l'économie de prospérer, laquelle va donner plus de possibilité de réaction aux dirigeants grâce à ses fruits.

La programmation économique doit favoriser la mise en oeuvre des politiques qui boostent la croissance économique, étant entendu que celle-ci tire l'aménagement du territoire positivement en lui apportant plus de ressources.

En ce qui concerne la corrélation négative entre l'aménagement du territoire et la croissance urbaine, les dirigeants devraient mettre en oeuvre des politiques qui, loin de chercher à limiter la croissance démographique, vont plutôt en faire un instrument de croissance économique. Cela est possible.

En effet, en communiquant avec les populations, en amenant celles-ci à comprendre son importance dans la construction de la nation, en mettant sur pied des mécanismes d'éducation de masse, les dirigeants peuvent rendre chaque mètre carré du territoire urbain productif. Cela passe par à une politique foncière transparente et bien encadrée. Le contrôle du foncier urbain permettra de limiter l'étalement urbain, d'encourager la densification urbaine tout en permettant à l'Etat de gagner en ressources.

En ce qui concerne les transports urbains, l'amélioration du transport urbain dans les villes dépendra d'une stratégie de mesures coordonnées visant l'aménagement des infrastructures, la gestion de la circulation, la qualité des services et le développement du réseau. Parmi les mesures à court terme figurent l'augmentation du financement des routes, l'application des réglementations existantes, le contrôle de la surcharge et le renforcement des contrôles techniques. Les mesures à moyen terme incluent la réhabilitation des routes, l'amélioration de la gestion de la circulation, la définition et mise en application de normes pour le service (tarifs, horaires), la conception d'une nouvelle structure d'itinéraires et la rationalisation du service à travers une concurrence contrôlée.

87

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

L'objectif à long terme est de consolider les gains dans tous ces domaines grâce à la création d'une régie métropolitaine du transport ayant autorité sur les infrastructures et les véhicules. Pour être compétente, cette régie doit coordonner la planification du transport, l'aménagement des infrastructures et la réglementation des services. Son budget doit être suffisant pour attirer et retenir le personnel qualifié, et ne doit pas faire l'objet de changements arbitraires lorsque le département d'appui est sous pression. Les coûts pour les utilisateurs - en particulier les permis d'exploitation ou les frais de franchise perçus sur les opérateurs - constituent l'option de financement privilégiée. Ils ne doivent pas être onéreux ni avoir un effet important sur les tarifs.

Toutefois, pour exploiter leur potentiel, les villes doivent réparer leurs chaussées, améliorer leurs pratiques de gestion de la circulation et assurer la viabilité économique des services des grands véhicules à travers le recouvrement des coûts à l'aide soit de boîtes de perception soit de subventions prévisibles.

La réintroduction des grands autobus dépendra non seulement des améliorations physiques et institutionnelles mais également d'un ferme engagement politique en faveur d'une exploitation soutenable. Peu d'opérateurs privés sont en mesure de mobiliser le capital nécessaire pour acquérir de grands autobus. Pour lever les barrières à l'investissement, il faudra un contrôle de la concurrence sous la forme de droits d'exploitation exclusive des services d'autobus sur des itinéraires désignés. Une concurrence contrôlée peut être introduite à travers la consolidation du secteur informel en de plus grandes unités ou associations capables d'obtenir des contrats exclusifs sur des itinéraires. L'élimination de la concurrence non rentable permettrait de réduire la congestion et d'améliorer la vitesse du transport, rendant ainsi les grands autobus commercialement intéressants. Cette approche est fondée sur une durée des contrats calquée sur la durée de remboursement de l'investissement et sur un système de réglementation tarifaire qui garantit une récupération raisonnable des coûts et protège les opérateurs et régulateurs des pressions politiques éphémères.

Les villes camerounaises doivent rapidement évoluer vers le modèle de régie métropolitaine des transports adopté avec succès dans nombre de villes à travers le monde. Cette évolution permettra de coordonner la planification, la réglementation, l'octroi des permis, le contrôle technique, le suivi et l'application des règles.

88

89

90

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

A.2. Recommandations d'ordre politique.

Le contexte camerounais est tel que le désordre urbain a précédé l'aménagement du territoire en milieux urbains. Dans ce contexte, les opérations d'aménagement que prône la loi d'urbanisme ont une portée limitée. Ces opérations se contentent uniquement d'apporter de « l'aide à la pierre » et s'intéressent peu à « l'aide à la personne » ou contribuent résiduellement à celle-ci. De plus, la brutalité liée à leur mise en oeuvre a été telle qu'elles ont causé plus de mal que de bien aux populations et, n'ont contribué qu'à la réplication des quartiers précaires. Sans mesures d'accompagnement, la restructuration des quartiers précaires n'a eu pour effets que de déplacer les populations des quartiers précaires au centre ville vers la périphérique où de nouveaux quartiers précaires sont crées.

Ainsi, la loi portant urbanisme au Cameroun ainsi que ses décrets d'application devraient évoluer, afin d'intégrer les nouvelles donnes que sont la restructuration in situ, et l'approche devra être celle d'économie sociale et solidaire, où « les trois pieds de la marmite »14 doivent jouer chacun son rôle. Les dirigeants devraient trouver des stratégies de communication afin d'informer la masse populaire sur la nécessité de connaître l'ensemble des lois relatives à la planification urbaine, l'ensemble des documents de planification urbaine ainsi que leur respect. Il est coûteux pour les pouvoirs publics de mettre sur pied des opérations de restructuration/réhabilitation ; les mesures préventives qui passent par l'acquisition des documents de planification urbaine par chaque CTD et leur respect et mise en application par l'ensemble de la population sont prioritaires et l'Etat devrait travailler sans relâche dans ce sens.

Dans cette visée, il est nécessaire de vulgariser la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire ainsi que la loi portant urbanisme au Cameroun. Les pouvoirs publics devraient aussi mettre en cohérence toutes les lois et décrets qui ont traits à l'aménagement du territoire, coordonner leurs interventions avec celles des CTD en ce qui concerne la mise en oeuvre des infrastructures ou la réalisation de certains projets pour plus d'efficacités.

14 Secteur public, secteur privé, société civile.

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

B. Recommandations d'ordre pratique.

Les pratiques en aménagement du territoire au Cameroun doivent intégrer un certain nombre de réalités incontournables pour une bonne orientation de la croissance urbaine.

B.1. Recommandation par rapport aux villes

Les pouvoirs publics devraient procéder à une hiérarchisation légale des villes camerounaises, à la constitutionnalisation des lois relatives au foncier, à la mise sur pied d'un tribunal spécialisé dans les affaires foncières et d'habitat. Ils doivent aussi implémenter l'expérience des pratiques israéliennes en matière de logements sociaux. Ceci passe par la communication, le rapprochement entre tous les acteurs et une bonne coordination des actions des uns et des autres.

B.2. Recommandation par rapport aux documents de planification

Les pouvoirs publics devraient aussi accélérer la mise sur pied des schémas d'aménagement

du territoire que sont :

- Le Schéma National d'Aménagement et de Développement Durable du Territoire ;

- Les Schémas Régionaux d'Aménagement et de Développement Durable du Territoire ;

- Les Schémas Sectoriaux ;

- Les Plans Locaux d'Aménagement et de Développement Durable du Territoire ;

- Les Contrats Plans,

Afin que les documents de planification urbaine que sont le PDU, le POS, le PSU et le PS

puissent s'incorporer à ces schémas et que le territoire camerounais arrive effectivement à une

intégration comme celle décrite par le modèle du polycentrisme maillé.

Pour conclure, dans ce chapitre, il était question de présenter les résultats de la vérification empirique et de faire des recommandations à l'intention des pouvoirs publics. Nos résultats montrent qu'il existe un lien entre l'aménagement du territoire et la croissance urbaine. Ce lien peut être une corrélation positive ou une corrélation négative.

Le résultat relatif à l'influence de l'aménagement du territoire confirme notre première hypothèse. Il montre qu'il existe effectivement un lien entre l'aménagement du territoire et la croissance urbaine. L'aménagement du territoire influence ainsi positivement la croissance urbaine.

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

Le résultat relatif à l'influence de la croissance urbaine sur l'aménagement du territoire confirme aussi notre deuxième hypothèse. La croissance démographique urbaine influence négativement l'aménagement du territoire.

Enfin, les tests de causalité au sens de Granger montrent dans leur globalité que la croissance urbaine est à l'origine de la mise en oeuvre des politiques publiques en matière d'aménagement du territoire et donc, cause l'aménagement du territoire.

91

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE.

Au terme de cette partie, il était question de faire une vérification empirique des liens de corrélation ou de causalité entre l'aménagement du territoire et la croissance urbaine dans le cadre du Cameroun. Nous avons pu mettre en exergue les caractéristiques de la croissance urbaine dans les établissements urbains du Cameroun ; nous avons aussi effectué une analyse économétrique sur les potentiels liens entre l'aménagement du territoire et la croissance urbaine dans le contexte camerounais.

Il est apparu que l'aménagement du territoire est au coeur des politiques gouvernementales, ce qui explique les nombreux efforts consacrés pour en faire un instrument de croissance économique, qu'il influence positivement la croissance économique urbaine, et que la croissance démographique urbaine influence négativement ce dernier.

Nos résultats, lesquels ont confirmé nos hypothèses, nous ont montré clairement que, non seulement, il existe un lien entre l'aménagement du territoire et la croissance urbaine, mais aussi, la croissance urbaine cause l'aménagement du territoire. Ces résultats sont vrais en ce qui concerne la population urbaine mais aussi en ce qui concerne la population totale du Cameroun.

Au final, comme mentionné supra, il existe un lien entre l'aménagement du territoire et la croissance urbaine et, la croissance urbaine cause sans aucun doute la mise en oeuvre des politiques publiques d'aménagement du territoire et par conséquent, cause l'aménagement du territoire.

92

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

CONCLUSION GENERALE

93

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Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

Au terme de notre analyse, il était question de mettre en exergue la relation entre l'aménagement du territoire et la croissance urbaine d'une part, et d'autre part, le sens de cette relation. Nous avons vu aussi bien dans notre analyse théorique que dans notre analyse empirique que l'aménagement du territoire influence positivement la croissance économique urbaine, et que la croissance démographique urbaine influence négativement l'aménagement du territoire.

Il est apparu très clair qu'il existe un lien entre l'aménagement du territoire et la croissance urbaine, mais aussi que, la croissance urbaine cause l'aménagement du territoire. Ce résultat est vrai en ce qui concerne la population urbaine mais aussi en ce qui concerne la population totale du Cameroun.

In fine, l'aménagement du territoire apparaît non seulement comme étant un facteur de développement urbain à travers la mise en oeuvre effective des politiques y relatives, mais aussi comme un préalable pour une intégration et une organisation efficace du territoire.

Sa mise en oeuvre obéit à une double approche, selon que celle-ci se fait ex-ante au processus d'urbanisation, ce qui nécessite une planification rigoureuse, ou selon que celle-ci se fait ex-post à l'urbanisation anarchique, ce qui nécessite des mesures concertées dans une approche d'économie sociale et solidaire pour plus d'efficacités.

Le sens de la causalité qui va de la croissance urbaine vers l'aménagement du territoire explique en partie les attitudes des dirigeants camerounais en matière d'aménagement du territoire. L'approche des dirigeants est une approche réactive destinée à répondre à des problèmes déjà existants. Ce fait avéré est regrettable et traduit l'impuissance des pouvoirs publics qui semblent débordés par les problèmes urbains. Pour inverser cette causalité, les dirigeants devraient mettre en oeuvre des politiques ambitieuses qui permettront de rattraper la croissance urbaine et de la dépasser.

Ce n'est que lorsque les pouvoirs publics seront à mesure de prévoir avec exactitude l'évolution des variables macroéconomiques ainsi que les solutions à apporter à ces dernières en cas de chocs exogène ou endogène que le Cameroun dira qu'il contrôle sa croissance urbaine.

Cela est possible dans la mesure où le Cameroun dispose des ressources importantes pour faire face aux problèmes urbains. Le retard résiderait dans l'incapacité des dirigeants qui n'arrivent

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

pas à faire des stratégies élaborées des réalités concrètes, mais aussi de la tournure de l'économie mondiale. Cela pourrait aussi être lié aux risques de déstabilisation liés aux conflits armés.

Malgré tout, une chose incontestable est le fait qu'au Cameroun, il n'existe malheureusement aucune ville fonctionnelle. Il existe plusieurs villes légales qui jusqu'ici n'arrivent pas à assurer les trois principales fonctions d'une véritable ville.

Cette analyse bien qu'étant non exhaustive, nous pousse à nous intéresser au lien de causalité qui pourrait exister entre l'aménagement du territoire et la croissance urbaine à l'échelle de la sous-région d'Afrique centrale, mais aussi à nous interroger sur les stratégies à mettre en oeuvre pour arriver à une intégration territoriale et économique des pays de la zone CEMAC.

95

96

97

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

BIBLIOGRAPHIE

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· Loi no 2004/017 du 22 juillet 2004 d'orientation de la décentralisation.

· Loi no 2004/017 du 22 juillet 2004 portant orientation à la décentralisation.

· Loi n°2014/026 du 23 décembre 2014 portant loi de finances de la République du Cameroun pour l'exercice 2015.

98

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

ANNEXES

Tableau 1 : Données socio-économiques sur le Cameroun

Année

BIP en milliards

PIB en milliards

Population en millions

Population urbaine en millions

1986

310,00

3416,00

10197,9

2906,4

1987

340,00

3189,00

10493,7

3966,6

1988

250,00

3093,00

10920,9

5329,4

1989

225,00

3014,00

11226,6

5478,6

1990

175,00

3005,00

11541,0

5632,0

1991

186,00

3319,00

11864,1

5789,7

1992

166,00

3230,00

12196,3

5951,8

1993

136,00

3049,00

12537,8

6118,5

1994

136,00

2799,00

12888,9

6289,8

1995

184,00

3264,00

13249,8

6465,9

1996

286,00

4008,00

13620,8

6646,9

1997

147,00

4291,00

14002,1

6833,0

1998

166,00

4590,00

14394,2

7024,4

1999

229,00

4875,00

14797,3

7221,1

2000

295,00

5194,00

15211,6

7423,2

2001

339,00

7104,00

15637,5

7631,1

2002

294,00

7005,00

16075,3

7844,8

2003

264,00

7330,00

16525,5

8064,4

2004

271,00

7741,00

16988,2

8290,2

2005

289,00

8119,00

17620,0

8522,4

2006

348,00

8984,00

17252,3

8971,2

2007

496,00

9230,00

17735,7

9222,6

2008

574,41

10443,83

18214,6

9471,6

2009

640,34

11040,35

18706,4

9727,3

2010

421,19

11699,69

19406,1

10091,2

2011

677,20

20124,09

20124,1

10464,5

2012

792,20

13389,20

20687,6

10757,5

2013

957,00

14346,80

21266,8

11058,7

2014

1000,00

15193,26

21862,3

11368,4

2015

1150,00

16074,48

22474,4

11686,7

Source : INS, Lois des finances (1986-2015) et traitement de l'auteur.

99

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

Tableau 2 : Forme logarithmiques des données socio-économiques sur le Cameroun

Année

LOGBIP

LOGPIB

LOGPOPTOTAL

LOGPOPURB

1986

5.736572

8.136226

9.229938

7.974672

1987

5.828946

8.067463

9.258526

8.285665

1988

5.521461

8.036897

9.298430

8.580990

1989

5.416100

8.011023

9.326045

8.608605

1990

5.164786

8.008033

9.353660

8.636220

1991

5.225747

8.107419

9.381275

8.663835

1992

5.111988

8.080237

9.408890

8.691450

1993

4.912655

8.022569

9.436506

8.719066

1994

4.912655

7.937017

9.464121

8.746681

1995

5.214936

8.090709

9.491736

8.774296

1996

5.655992

8.296048

9.519351

8.801911

1997

4.990433

8.364275

9.546966

8.829526

1998

5.111988

8.431635

9.574581

8.857141

1999

5.433722

8.491875

9.602197

8.884757

2000

5.686975

8.555259

9.629812

8.912372

2001

5.826000

8.868413

9.657427

8.939987

2002

5.683580

8.854379

9.685042

8.967602

2003

5.575949

8.899731

9.712657

8.995217

2004

5.602119

8.954286

9.740272

9.022832

2005

5.666427

9.001962

9.767888

9.050448

2006

5.852202

9.103200

9.755701

9.101774

2007

6.206576

9.130214

9.783335

9.129408

2008

6.353344

9.253767

9.809979

9.156052

2009

6.461999

9.309312

9.836621

9.182695

2010

6.043082

9.367318

9.873343

9.219416

2011

6.517967

9.437133

9.909673

9.255747

2012

6.674814

9.502204

9.937289

9.283362

2013

6.863803

9.571282

9.964904

9.310977

2014

6.907755

9.628607

9.992519

9.338592

2015

7.047517

9.684988

10.02013

9.366208

Source : traitement de l'auteur.

100

101

102

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

TABLE DES MATIERES

SOMMAIRE i

AVERTISSEMENT ii

DEDICACE iii

REMERCIEMENTS iv

LISTE DES SIGLES ET ABREVIATIONS v

LISTE DES GRAPHIQUES, SCHEMAS ET FIGURES viii

LISTE DES TABLEAUX ix

RESUME x

ABSTRACT x

INTRODUCTION GENERALE 2
PREMIERE PARTIE : ANALYSE DES LIENS ENTRE L'AMENAGEMENT DU

TERRITOIRE ET LA CROISSANCE URBAINE .7

CHAPITRE I : LA CROISSANCE URBAINE, UNE CONSEQUENCE DE

L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE 9

Section I : L'influence positive de l'aménagement du territoire sur la croissance urbaine 9

A. Aménagement du territoire et croissance endogène 9

A.1. Dépenses publiques et croissance urbaine 9

A.2. Le foncier, la différenciation urbaine et la croissance urbaine 15

B. Aménagement du territoire et économie d'agglomération 17

B.1. Apport de l'économie géographique 17

B.2. Apport de la théorie des pôles de croissance 18

Section II : influence négative de l'aménagement du territoire sur la croissance urbaine 21

A. Théorie de flux migratoires des facteurs de production 21

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

A.1. L'apport du modèle de Tiebout 21

A.2. L'apport du modèle d'Alonso 22

B. Théories marxistes 23

B.1. Analyse de Marx 23

B.2. Analyse des néo-marxistes 24

CHAPITRE II : LA CROISSANCE URBAINE, UNE CAUSE DE L'AMENAGEMENT DU

TERRITOIRE 25

Section I : Influence de la croissance urbaine sur l'aménagement du territoire 25

A. La théorie du développement 25

A.1. Croissance démographique et aménagement du territoire 25

A.2. Foncier urbain et aménagement du territoire 26

B. La croissance démo-économique et l'aménagement du territoire 27

B.1. Populations et richesse urbaine 27

B.2. Apport de la théorie de la modernisation 29

Section II : Lien empirique entre la croissance urbaine et l'aménagement du territoire 29

A. Croissance du PIB et aménagement du territoire 30

A.1. Modèle de Catin, Hanchane et Kamal 30

A.2. ouverture internationale et aménagement du territoire 30

B. Infrastructures, services publics et croissance démographique 31

B.1. Infrastructures, services publics et efficacité économique 31

B.2. Croissance démographique et aménagement du territoire 35

DEUXIEME PARTIE : VERIFICATION DU LIEN DE CAUSALITE ENTRE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET LA CROISSANCE URBAINE AU

CAMEROUN 39

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

CHAPITRE III : LES PRATIQUES DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET LA

CROISSANCE URBAINE AU CAMEROUN 41

Section I : Les caractéristiques de la croissance urbaine dans les villes Camerounaises 41

A. Croissance urbaine et habitat urbain 41

A.1. Visage actuel des villes camerounaises 41

A.2. Villes camerounaises et quartiers précaires 44

B. Croissance urbaine et transports urbains 45

B.1. Villes camerounaises et embouteillages 45

B.2. Genèse et ampleur du phénomène de « mototaxis » 47

Section II : Les approches pratiques des dirigeants en matière

d'aménagement du territoire 48

A. Les différentes formes d'organisation spatiale du territoire 49

A.1. les scénarii d'aménagement du territoire 49

A.2. la vision du DSCE par rapport au territoire Camerounais 51

B. Les approches pratiques des dirigeants pour faire face aux désordres urbains 53

B.1. Interventions des délégués du gouvernement dans les grandes villes 53

B.2. Intervention des pouvoirs centraux 56
CHAPITRE IV : RESULTATS DE LA VERIFICATION EMPIRIQUE ET

RECOMMANDATIONS 62

Section I : Méthodologie et résultats de l'analyse 62

A. Modèles 62

A1. Spécification des modèles 62

A.2. Les variables 63

B. Estimation des modèles 64

103

Aménagement du territoire et croissance urbaine au Cameroun

B.1. Source des données 64

B.2. Méthode d'estimation 65

C. Les résultats 65

C.1. Présentation des résultats 65

C.2. Analyse des résultats 69

Section II : les recommandations de politiques économiques ou urbaines 70

A. Recommandations d'ordre socioéconomique et politique 71

A.1. Recommandations d'ordre socio-économique 71

A.2. Recommandations d'ordre politique 73

B. Recommandations d'ordre pratique 74

B.1. Recommandation par rapport aux villes

74

B.2. Recommandation par rapport aux documents de planification

74

 

CONCLUSION GENERALE

76

BIBLIOGRAPHIE

78

ANNEXES

.81

TABLE DES MATIERES

..83






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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld