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La mobilisation des savoirs chez les retraités à  travers la pratique bénévole.

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par Anne GOMETZ
Université Paris VIII Vincennes Saint-Denis - Master 1 sciences de l'éducation 2008
  

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UNIVERSITÉ PARIS 8

Master des Sciences de l'Éducation et Formation

parcours « Éducation tout au long de la vie »

LA MOBILISATION DES SAVOIRS CHEZ LES RETRAITÉS À TRAVERS LA PRATIQUE BÉNÉVOLE.

Sous la direction de Madame Dan Ferrand-Bechmann.

Anne GOMETZ Année 2008-2009

N° ÉTUDIANT : xxxxxxxx

À mon père, Laurent Gometz, décédé le 4 février 2008,

« Au fil des années l'arbre devient plus fort et la rivière plus large. De même en vieillissant les hommes gagnent en profondeur, en sagesse et en expérience. C'est pourquoi les personnes âgées ne devraient pas seulement être respectées et vénérées, mais leurs sociétés devraient tirer parti du riche potentiel qu'elles représentent. »

Kofi Annan, Secrétaire général des Nations Unies.

Sommaire.

Avant-propos.......................................................................................................................................5

Introduction.........................................................................................................................................6

1. Problématique................................................................................................................................10

1.1. Réflexion sur le sujet et question de recherche..........................................................10

1.2. Choix de l'objet de recherche.....................................................................................12

2. Aspects théoriques.........................................................................................................................13

2.1. Précisions terminologiques....................................................... ................................13

2.2. La vieillesse : construction historique et culturelle....................................................13

2.3. La retraite...................................................................................................................17

2.4. Le Métier de Bénévole à l'heure de la retraite............................................................22

3. Méthodologie, terrain et analyse...........................................................................................32

3.1. Approche qualitative et compréhensive.....................................................................32

3.2. Le terrain de recherche...............................................................................................33

3.3. Précisions sur la démarche de recherche et sur les aspects méthodologiques : pour une analyse de mon implication dans les entretiens et l'observation participante...........36

3.4. Présentation des sujets interviewés............................................................................38

3.5. Eléments d'analyse.....................................................................................................42

Conclusion.........................................................................................................................................51

Bibliographie.....................................................................................................................................54

Résumé..............................................................................................................................................63

Table des matières

Avant-propos.

La problématique qui est ici traitée est le fruit d'une réflexion que j'ai menée à la suite du décès brutal de mon père le 4 février 2008, au moment où j'esquissais mes premiers pas sur le chemin de la recherche. À cette période, les savoirs construits à travers l'expérience et la pratique bénévole m'interpellaient déjà et cet événement inattendu est venu modifier quelque peu l'orientation d'origine. Ce sont les circonstances de sa mort qui ont imprimé cette nouvelle direction, focalisant alors mon attention sur la population des retraités. J'étais alors animée de trois questions :

- Quelle place notre société attribue t-elle aux personnes vieillissantes ?

- Une fois mis à l'écart du travail, dans une société qui identifie utilité sociale et activité rémunérée, comment les retraités continuent-ils à exercer un rôle de citoyen actif valorisant ?

- Qu'en est-il de la perspective éducative des retraités ?

Mon père est décédé trois jours après son admission en clinique, d'une affection qui relevait certes de l'urgence chirurgicale, mais dont la prise en charge immédiate et adaptée devait normalement le mettre à l'abri d'une fin tragique. Hélas, cette nuit-là, par souci de rentabilité, un seul chirurgien de garde exerçait sur trois cliniques en même temps. Et dans l'urgence des malades à traiter, le critère sélectif retenu fut la date de naissance du patient. « Il était âgé», expliquera le chirurgien par la suite. Le terme de «âgé» semblant justifier de manière suffisante l'issue fatale. Sa mort posa les jalons d'un nouveau cheminement. Cette piste alternative me conduisit à réinterroger et à préciser mon objet de recherche. Je décidai aussitôt d'impulser un nouveau souffle à ma recherche en choisissant de questionner cette troisième partie de la vie représentée par la retraite.

Les expériences plurielles accumulées tout au long de l'existence font de ces personnes parvenues dans la troisième partie de leur vie, des réservoirs de savoirs et de compétences qu'il serait dommage d'ignorer. En quoi ces connaissances construites au fil des ans, tant dans le domaine professionnel que de manière informelle à travers la vie quotidienne, peuvent-elles être objets d'intérêt dans l'exercice bénévole ? Et par-là même, en mettant l'accent sur ce profil « expert » des retraités, serait-il envisageable que le regard porté sur ceux qui sont abusivement qualifiés « d'inactifs » puisse évoluer, autorisant la reconnaissance de leur utilité sociale à travers leur contribution gratuite à la vie collective et faisant évoluer les représentations d'une vieillesse déficitaire parce que retraitée ?

Auparavant, le séminaire de Dan Ferrand-Bechmann, puis la lecture de son ouvrage Le Métier de Bénévole avait suscité prioritairement mon intérêt pour ce domaine de la mobilisation des savoirs dans l'engagement bénévole. La volonté de porter un regard attentif sur ce moment de l'existence en interaction avec le paradigme de l'éducation tout au long de la vie, s'inscrit dans un défi pédagogique à double objectif. D'une part comprendre comment cette période de l'existence, du fait d'un temps libéré du travail contraint peut être le moment privilégié pour poursuivre des apprentissages voire en reprendre et d'autre part ajouter une « pierre » à la réflexion concernant la situation et le devenir des aînés dans la société contemporaine.

Introduction.

« En Afrique, quand un vieillard meurt, c'est une bibliothèque qui brûle », dit un philosophe malien (Amadou Hampâté Ba). Au cours de l'existence, l'activité professionnelle, la vie quotidienne, les multiples interactions seraient-elles à l'origine de l'acquisition de connaissances, de savoirs divers ?

Tout au long de la vie, on ne cesserait d'apprendre, et cette réalité envisagée par des organismes internationaux dont l'UNESCO précise que l'on apprend aussi en dehors des lieux habituellement dédiés à la formation et à l'éducation. Les retraités, parce qu'ils disposent de temps libre représentent aujourd'hui la catégorie de la population qui consacrent le plus d'heures au bénévolat. Comment, à travers cette activité, en produisant et/ou en construisant des savoirs, compétences et expériences, continuent-ils à jouer un rôle important dans la société et contribuent ainsi au bien-être collectif ? A contrario, sont-ils soupçonnés de voler des emplois ? Telle est la question à laquelle je vais tenter d'apporter quelques éléments de réponses dans ce travail de recherche, tant il paraît intéressant d'amorcer une réflexion autour du bénévolat des retraités afin de comprendre en quoi l'engagement social « à la tombée du jour »1(*), sollicite la mobilisation des savoirs et s'inscrit de fait dans une éducation conçue tout au long de la vie.

Précisons d'emblée l'impasse d'une terminologie adéquate à décrire les personnes à la retraite, l'hétérogénéité de ce groupe d'âge étant la règle. Contours flous et imprécis délimitent ce public dont la dénomination est problématique.

Lors du passage à la retraite, des remaniements identitaires se produisent, nécessitant des sources de reconnaissances sociales nouvelles et l'engagement bénévole se présente comme une voie possible pour accéder à cette reconnaissance. S'engager en tant que bénévole, c'est mettre au service des autres et d'un projet sa créativité et son savoir-faire. Au-delà du plaisir, l'engagement altruiste génère des savoirs dont certains sont largement inconscients, appris sur le tas, par l'échange, dans l'action et la confrontation aux problèmes divers qui vont stimuler chez le participant des capacités d'innovation, d'imagination pour venir à bout de certaines situations. Ils sont susceptibles de plus de faciliter cette transition entre monde professionnel et mise à la retraite en permettant à l'individu de rester acteur de sa vie.

La diversité des situations au cours desquelles on apprend est ici attestée par les pratiques sociales, dans des espaces qui favorisent les apprentissages, tel le bénévolat. Ceux-ci s'effectuent sur des modes à la fois singulier et collectif, et les individus engagés dans une pratique commune apprennent en interagissant. Pour Billett (2004), l'engagement associatif est un « des éléments moteurs de l'apprentissage »(p. 153)2(*). C'est donc bien d'un « nouvel apprenant »3(*)dont je souhaite parler, autonome, en dialogue permanent avec les autres et l'environnement, en perpétuelle évolution, tout au long de la vie et plus spécifiquement dans cette période de la retraite qui peut être représentée non pas comme l'entrée dans le 3ème âge, mais plutôt comme l'entrée dans un âge d'auto et co-formation (Dacheux, 2008)4(*). Alors, quels sont les savoirs que les retraités mobilisent à travers le bénévolat, quels sont ceux qu'ils apprennent, comment se déroule l'acquisition de ces savoirs à travers l'interaction dans un contexte informel ?

Dans une première partie, je présenterai la problématique, la raison de son choix ainsi que la question de recherche qui a servi de guide tout au long de ce travail. Une deuxième partie sera consacrée aux aspects théoriques et conceptuels autour de la vieillesse, la retraite et le bénévolat. Enfin, j'exposerai le terrain de recherche qui fournit un début d'éclairage et me permet d'apporter des éléments de réponse aux questions que je me pose. Ces réponses offriront une ouverture pour s'interroger ultérieurement sur la place de l'autre, son rôle dans la mobilisation des savoirs et seront reprises dans la conclusion. Et plus précisément, il sera raisonnable d'envisager la question de la possibilité d'une spécificité du bénévolat des retraités en termes de mobilisation des savoirs concernant essentiellement les savoir-être.

1. PROBLÉMATIQUE.

1.1. Réflexion sur le sujet et question de recherche.

Ainsi que le mentionne Dan Ferrand-Bechmann (2008)5(*) « on s'engage tout au long de la vie et tout particulièrement au troisième âge » et la présence des retraités dans le paysage bénévole est un fait notable, comme nous l'indiquent Prouteau et Wolff (2006)6(*) qui précisent que les seniors sont « des pourvoyeurs importants de ressources humaines bénévoles notamment dans le domaine de l'action sociale et caritative ».

La retraite aujourd'hui ne résonne plus chez les intéressés comme une mise à l'écart et beaucoup de seniors refusent le verdict d'inutilité sociale. Ils désirent rester actifs, en ont les capacités cognitives et physiques et désormais « retraite » ne rime plus avec « vieillesse ». Les seniors se portent de mieux en mieux, vivent plus longtemps et en meilleure forme. Pourtant, force est de constater que la place des retraités dans la société est difficile à trouver, tant le paradoxe entre allongement de l'espérance de vie, bon état physique et moral lors du vieillissement et la représentation négative associée à la situation des personnes vieillissantes est grand. En effet, les stéréotypes ont la vie dure, et empêchent de saisir l'hétérogénéité qui se caractérise dans le « vieillir » ainsi que la diversité des situations vécues par les individus lors de la retraite.

Quelle place est faite aux seniors après la retraite ? Si dans certaines sociétés (africaines et asiatiques) la vieillesse est appréhendée de manière positive - l'être vieillissant étant vu comme quelqu'un qui a accumulé expériences et savoirs - dans notre monde occidental, le grand âge est perçu comme un handicap, voire une déchéance, et les personnes âgées sont exclues et contraintes à l'isolement. L'éducation, l'instruction, la participation sociale peuvent représenter une alternative à cette problématique en permettant aux aînés de jouer un rôle actif tout en conservant leur autonomie.

Dans une perspective interactionniste, l'Autre, les autres interviennent comme « co-producteurs du sentiment de vieillir et de la déprise » (Caradec, 2008)7(*). C'est au cours des interactions quotidiennes que la conscience de vieillir survient, et le décalage entre le regard sur soi et le regard de l'autre est une des premières caractéristiques du « devenir vieux ». L'âgisme interactif pousse alors progressivement les individus à réduire les contacts sociaux quand inversement, les supports interpersonnels sous formes d'encouragements à poursuivre telle ou telle activité permettent la conservation du sentiment de sa propre valeur. C'est dans ce contexte que je pense l'engagement bénévole capable de modifier simultanément le regard sur soi et sur l'autre. La possibilité d'une part, de réinvestir ses compétences professionnelles dans une activité bénévole, d'autre part de continuer à apprendre au contact des autres peut contribuer à rehausser l'image et la perception de la vieillesse et faciliter ainsi la reconstruction identitaire au moment de la retraite. Le bénévolat à l'heure de la retraite, en créant du lien social vient rompre avec cette vision pessimiste de la personne âgée inutile.

La production et la construction des savoirs (savoir-faire, savoir-être, savoir-agir) concourt à l'autonomie de l'individu dans une période de la vie (la retraite souvent perçue comme l'entrée dans la vieillesse avec tous les stéréotypes et les préjugés que ce terme véhicule) où la perte d'autonomie est précisément une des conséquences souvent citée pour décrire cette phase du vieillissement. A contrario, je crois que l'éducation tout au long de la vie, et plus particulièrement ici, à travers la pratique du bénévolat permet à l'individu « d'exercer un pouvoir sur sa vie, d'être sujet et non-objet, acteur et non-usager, acteur-auteur »8(*). Aujourd'hui, on se forme tout au long de la vie. La formation ne concerne plus uniquement les enfants jusqu'à leur entrée dans la vie adulte et le monde du travail, mais englobe tous les âges de la vie et tous les groupes sociaux. Et c'est bien en cela que c'est une révolution, puisqu'elle permet de mettre la culture à la portée de tous, de la naissance jusqu'à la mort.

Essayer de comprendre quels sont les savoirs mobilisés par les retraités à travers la pratique bénévole, telle est la question de départ de ce travail. Ici, je laisserai de côté les propositions de formations que font certaines associations spécifiques à l'ensemble de leurs bénévoles (les associations de lutte contre le Sida qui offrent des cessions de formation) et je m'intéresserai spécifiquement aux savoirs mobilisés de manière informelle, à travers la pratique et dans une certaine mesure inconscients ou non intentionnels si ce n'est pour résoudre une problématique.

Le questionnement basé sur les éléments théoriques que je vais exposer par la suite et auquel je me propose d'apporter un début de réponse est donc :

- Quels sont les savoirs que les retraités mobilisent à travers la pratique bénévole ?

De cette question globale, en découlent plusieurs :

- Quels sont les savoirs qui leur manquent et ceux qu'ils acquièrent ? De quelle manière le bénévolat peut-il bénéficier aux retraités eux-mêmes, notamment dans la négociation de ce passage à la retraite ? Le bénévolat des retraités peut-il contribuer à rehausser l'image et la perception de la vieillesse chez les intéressés ? Enfin, comment la présence d'autrui intervient-elle dans la motivation à s'engager et dans la mobilisation des savoirs ?

1.2. Choix de l'objet de recherche.

La majorité des études consacrées à l'engagement bénévole et la participation sociale met l'accent sur les motivations, les domaines de participation, les caractéristiques socio-démographiques (Prouteau et Wolff, 2002). Mais à ma connaissance, peu se sont intéressées directement à la mobilisation des savoirs à travers la pratique bénévole. La population des retraités auprès de laquelle s'oriente mon intérêt m'a particulièrement interpellée, tant pour des raisons personnelles douloureuses que par une expérience propre dans la sphère associative au sein de laquelle j'ai côtoyé durablement ces bénévoles compétents et engagés.

En effet, bénévole dans une association (que j'appelerai JA tout au long de ce travail), je suis insérée dans un groupe où se mêlent toutes les générations et nous oeuvrons collectivement à la réussite d'un des objectifs prioritaires que s'est donnée l'association : organiser un périple d'une semaine en VTT (pèlerinage) pour les adolescents sur les sentiers et routes du département. Cette vaste entreprise nécessite une main d'oeuvre importante, de la disponibilité, une présence régulière et fidèle et bon nombre de compétences et de savoirs divers sont ainsi sollicités pour mener à bien ce projet. La nécessité de déployer tout au long de l'année un travail de préparation prenant, implique presque naturellement de faire appel à des personnes qui disposent de temps libre et donc de retraités.

Un projet d'une telle envergure, pour qu'il soit mené à terme nécessite de la part des participants un engagement certain, une régularité dans le travail et l'assurance qu'ils répondront présents le moment venu. Car outre la semaine de juillet qui voit la réalisation effectif du périple, la préparation quand à elle se fait tout au long de l'année, directement dépendante de ces retraités actifs et désireux de s'impliquer.

1.3. Hypothèse principale.

L'hypothèse ici posée est que la pratique bénévole chez les retraités favorise la mobilisation des savoirs. Les retraités vont d'une part transférer des connaissances et expériences accumulées au cours de leur vie professionnelle et personnelle et d'autre part, pour les besoins de l'action dans laquelle ils sont engagés, ils vont acquérir de nouvelles connaissances, principalement par le biais du collectif et des multiples interactions réalisés sur le terrain de la pratique et de l'engagement.

Par ailleurs, il est envisageable de poser comme hypothèse supplémentaire que ces savoirs mobilisés à une période de la vie caractérisée par la cessation d'activité, en procurant sens et valeur à l'existence, seront de nature à rehausser l'image de la retraite et celle de la vieillesse, au moins dans la perception qu'en ont les retraités eux-mêmes.

2. ASPECTS THÉORIQUES.

2.1. Précisions terminologiques.

Avant de développer ci-après les considérations sur la vieillesse et la retraite, il est pertinent de faire le point sur la terminologie utilisée pour évoquer le groupe d'âge dont il est question. On a tenté ici et là de réserver le terme de « seniors » aux « jeunes personnes âgées » en appliquant la limite de 75 ou 80 ans comme borne ultime. « Troisième âge » conviendrait alors pour nommer cette catégorie et « quatrième âge » serait adéquat logiquement pour parler des individus qui vivent encore au-delà de 80 ans. Le vocabulaire en effet hésite entre plusieurs options capables de nommer ce moment de la vie qui se rapproche inéluctablement de la mort. Personnes âgées, aînés, anciens, seniors, troisième âge, autant d'appellations incertaines qui en disent long sur la difficulté qu'il y a à approcher cette population-là, tant les représentations sociales qui s'y rattachent sont trop souvent connotées négativement. Et si l'on n'y prend garde, les dénominations quelles qu'elles soient courent le risque d'enfermer les individus dans des catégories figées et inertes donnant une perception statique du vieillissement, alors qu'ici, le postulat de base impose d'appréhender la vieillesse comme un processus dynamique qui commence dés la naissance et s'achève avec la mort. Le choix est donc fait d'utiliser indifféremment l'un ou l'autre terme, tout en gardant à l'esprit que la définition de la « personne âgée » est essentiellement une question de rapports, tant il est vrai que la vieillesse est un phénomène relationnel (Caradec, 2008).

2.2. La vieillesse : construction historique et culturelle.

La vieillesse, construction sociale qui varie selon les personnes, les époques, les cultures n'existe pas en tant que fait naturel. Selon les périodes et les lieux, les civilisations reposant sur l'oral et la tradition la valoriseront à travers le savoir et l'expérience qu'on lui attribue (Moyen-Âge,Afrique...), alors que dans les sociétés où triomphe le culte de la beauté (Grèce, Renaissance, Occident contemporain...) elle sera dépréciée. Création culturelle récente, elle devient aujourd'hui un problème social qui s'évalue à travers les termes qui lui sont associés (déclin, crépuscule...). Les représentations mentales négatives dont elle fait l'objet, sont à rapprocher de toutes les discriminations en général car elles conditionnent les modes de pensées dépréciatifs à l'égard de la personne âgée.

La perception du vieillissement humain, selon Philibert (1984)9(*) est caractérisé par des variations importantes qui peuvent s'observer dans les différents statuts attribués à la personne âgée à travers le temps et l'espace. Néanmoins, si beaucoup des fonctions traditionnellement prêtées aux personnes âgées sont devenues caduques avec l'avènement de l'ère de l'industrialisation, le rôle éducatif des grands-parents persiste à travers ces leçons de vie et d'humanité qu'ils dispensent du fait de cette expérience acquise avec les années.

2.1. La vieillesse à travers le temps...

Apologie de la vieillesse, ou mise à l'écart des personnes âgées, les tenants de la gérontocratie ou leurs opposants se sont alternés au cours du temps pour assigner un rôle et une place aux sujets âgés. Des philosophes de l'Antiquité aux penseurs du siècle des Lumières, la vieillesse a successivement changé de visage, tantôt vénérée et respectée, tantôt repoussée et objet d'exclusion. Léopold Rosenmayr (2001)10(*) évoque les mutations du rôle et du statut des personnes âgées au sein de la Grèce Antique, de l'affaiblissement du pouvoir de celles-ci lorsque les connaissances collectives transmises par les anciens s'effacent devant la suprématie des savoirs acquis individuellement et de l'avènement de la raison. Au milieu du XXe siècle on entrait dans la vieillesse à 60 ans. Aujourd'hui, des nouveaux seuils de la vieillesse apparaissent avec l'allongement de l'espérance de vie. Les catégories fondées sur l'âge sont sensibles au temps et par ailleurs les effets de génération viennent s'y imbriquer et rendre caduques les supposés seuils d'entrée dans la vieillesse.

...et à travers le monde.

De l'Occident jusqu'en Afrique, en passant par l'Asie et l'Amérique du Sud, les représentations de la vieillesse subissent des variations importantes. Vue comme étant inutile socialement ou appréhendée comme détentrice du savoir et du pouvoir, la personne vieillissante est l'objet de perceptions différentes selon les cultures. Dans les pays d'Afrique en milieu rural traditionnel, l'« ancien », c'est celui qui sait, il possède une fonction éducative. L'âge chronologique est l'expression de l'expérience, du savoir et de la sagesse. Arcand (1982)11(*) examine la situation des personnes âgées dans une population amérindienne des plaines colombiennes et observe qu'il est impossible de distinguer le groupe des individus vieillissants des autres groupes, la vieillesse chez eux n'existant tout simplement pas. Les plus âgés continuent de participer à toutes les activités, il n'y a ni retraite, ni phénomène d'exclusion ou d'isolement, s'opposant en cela de manière caractéristique à la situation des personnes âgées dans la société occidentale.

2.2.2. De la vieillesse à l'âgisme.

C'est à Robert Butler (1969)12(*), gérontologue américain, que l'on doit pour la première fois la définition de l'âgisme comme représentant « une forme très répandue de préjugés relatifs au vieillissement et aux personnes âgées, source de discriminations sociales et censée reposer, comme le racisme sur des croyances fausses et une généralisation abusive »13(*). Perceptions erronées, comportements incivils et discourtois renvoient un message marquant la différence qui sépare les personnes âgées des autres en une attitude qui ignore le processus extrêmement hétérogène propre au vieillissement. L'âgisme est davantage le fait des sociétés occidentales dans lesquelles la vieillesse est stigmatisée car liée à la mort, en guise d'explication partielle de l'exclusion dont elle fait l'objet.

Ici, Goffman14(*) nous aide à comprendre ce qui se joue dans le « vieillir » et les étiquettes qui y sont accolées. Pour celui-ci en effet, est stigmatisé celui qui possède un trait le différenciant des autres et qui jette sur lui un discrédit l'empêchant d'être accepté par la société. Goffman distingue l'individu discrédité - cas où la différence est visible - de l'individu discréditable - dont le trait le différenciant n'est pas perceptible par l'entourage. Dans le cas présent, l'âge est un attribut qui à lui seul paraît suffisant pour désigner l'individu, lui appliquant ainsi une identité qui l'accompagne dans toutes les situations sociales auxquelles il sera confronté. La théorie interactionniste de Goffman permet de comprendre comment la personne âgée peut être rejetée du seul fait d'être appréhendée à partir de la catégorie « âge ». Suzanne Weber (2003)15(*) évoque les stéréotypes concernant le vieillissement et parle du « processus de déshumanisation » qui conduit à gommer la singularité de l'individu, à l'uniformiser en l'assimilant tout entier à la population globale dont il est issu, lequel devient un être fictif et abstrait, « procédé typique de la démarche raciste » (p. 23).

De même pour Puijalon et Trincaz (2000)16(*), l'âgisme, cette « forme d'hétérophobie à l'égard des plus âgés » stigmatise ceux-ci. L'ignorance est à la base du rejet, de la crainte et des préjugés. L'autre, le différent, effraie - frayeur provoquée par l'esquisse de la mort qui approche - et l'attribution de qualités et de défauts à son endroit permet de se rassurer, d'éloigner le spectre de sa propre fin. Dire « les personnes âgées sont râleuses », « les personnes âgées apprennent moins vite » c'est comme prétendre que « les jeunes d'aujourd'hui sont mal élevés », « les Noirs sont paresseux »; autant de discours qui utilisent la correspondance physique/moral pour asseoir des certitudes qui ont comme fonction de maintenir à bonne distance celui qui fait peur. Cette « logique de refus de l'altérité » est la même que celle qui est à l'oeuvre dans la doctrine raciste. Ignorance et crainte.

Ces perceptions et préjugés concernent également le rapport des seniors aux technologies de l'information et de la communication (TIC) et selon Caradec (2000)17(*)deux types de discours sont fréquents. Dans le discours pessimiste de l'incompatibilité, les personnes âgées seraient dépassées par les technologies numériques; a contrario le discours de la familiarité, en vogue aujourd'hui, accrédite l'idée selon laquelle les « seniors » seraient enthousiastes à l'égard d'Internet. Ces deux types de discours ont le défaut d'ignorer à la fois l'hétérogénéité de cette population de « personnes âgées » ainsi que celle de l'équipement lui-même. Attitudes positives et négatives des aînés à l'égard des TIC, renvoient donc aux styles de vie que les utilisateurs associent à ces outils. Pour maintenir un lien à distance ou satisfaire aux exigences d'une activité, les aînés seront incités à apprendre et développer des compétences dans ce domaine ou non.

2.2.3. Vieillissement : quelques chiffres.

Malgré une forte natalité, le vieillissement de la population française est une réalité. Aujourd'hui, dans la France métropolitaine, selon Insee première (2007)18(*), il y aurait 10,3 millions de personnes âgées de 65 ans et plus, ce qui représente 16,2% de la population, par rapport à 15% en 1994. Et cette progression ne cesse de se poursuivre, puisque d'ici 2040, les plus de 75 ans tripleront, et ceux de 85 ans et plus quadrupleront. En effet, les projections futures prévoient selon Godet et Mousli (2006)19(*), que c'est entre 2005 et 2050 que les plus grandes transformations de la population auront lieu. Ce vieillissement sans précédent est la conjonction de deux phénomènes : l'allongement de l'espérance de vie et la baisse du taux de fécondité, et dans l'avenir ces éléments iront en s'accentuant. Selon Guérin (2002), le vieillissement de la population est un signe de richesse, bien que certains le citent comme étant un facteur de déclin économique, les seniors étant perçus comme peu intéressés par l'avenir des autres et insuffisamment mobilisés pour préparer les conditions économiques du futur.

2.3. La retraite.

2.3.1. Quelques chiffres.

L'évolution démographique initiée après la seconde guerre mondiale va conduire un nombre impressionnant de personnes à la retraite à l'horizon 2040. En France, seuls sont considérés comme actifs les individus qui ont un emploi rémunéré. De quatre retraités pour dix actifs aujourd'hui, ils seront sept pour dix demain, selon Alaphilippe et al. (2001)20(*). Selon Guérin (2007)21(*) entre 55-60 ans, il n'y a plus que 54% d'actifs, et entre 60-64 ans, ils ne sont plus que 13,2%. Sur l'ensemble des 55-64 ans, seuls 37,8% sont encore en activité (selon l'indicateur Le Monde/Eurostat de février 2007), contre 69,5% en Suède. Dans l'Europe des 27, le taux moyen est de 43,4% des 55-64 ans à être actifs. Guérin (2007) dénonce le choix politique comptable, qui, en conduisant un certain nombre de quinquagénaires en pré-retraite comme moyen pour diminuer le taux de chômage, a privé le développement des entreprises de la contribution en termes de savoir-faire, savoir-être, d'expériences des seniors, alors que ceux-ci sont « tout à la fois la mémoire, les détenteurs de savoir-faire et les passeurs entre les générations » (p.76)22(*).

Dans de récentes études, Davoine et Méda (2008)23(*) montrent que les Français accordent une place importante au travail (92% de français contre 84% du reste de l'UE 25). Les facteurs explicatifs seraient à rechercher du côté des valeurs intrinsèques que sont l'épanouissement personnel et la réalisation de soi par opposition aux valeurs extrinsèques (salaire, prestige, sécurité de l'emploi). Ainsi la dimension affective du travail semble être une spécificité française. Pour Grosjean (2003)24(*), cet épanouissement attendu serait surtout lié au besoin d'être dans la norme, d'être reconnu socialement à travers le salaire que fournit le travail plutôt qu'en relation avec le contenu de celui-ci. Dans cette perspective, le bénévolat ne saurait rivaliser tout à fait avec le travail salarié, tant la reconnaissance sociale passant par le biais d'une activité rémunérée reste une référence qui détermine la place qu'occupe un individu au sein de la société. Il manquerait ainsi la gratification essentielle que permet le versement d'un salaire. Si l'engagement bénévole chez le retraité se substitue au travail il ne peut toutefois le remplacer. Il permet de réemployer des compétences acquises dans l'activité professionnelle et procure le sentiment d'être toujours utile dans une société où la retraite résonne parfois comme une mort sociale. Et ils ne ravissent pas des emplois puisque les activités associatives prennent en charges des missions que l'État ne peut ou ne veut plus assurer. Le bénévolat des retraités permet de revisiter la notion d'« utilité » autrement qu'à travers une logique marchande.

2.3.2. Passage à la retraite.

Dans l'histoire d'une vie, la retraite représente un moment de transition radicale. Sur ce point, tous les auteurs s'accordent sur la brisure imposée par la retraite, celle-ci correspondant souvent dans l'opinion courante à l'entrée dans la vieillesse. Pourtant, ainsi que cité ci-dessus, avec l'allongement de la durée de la vie, le découpage ternaire des temps de la vie qui prévalait encore hier est aujourd'hui remis en cause. Vieillesse (âge chronologique) et retraite (âge social) se sont progressivement désynchronisées, les variations des données démographiques redéfinissant de nouveaux âges de la vie. Sexagénaires et même septuagénaires ne peuvent plus êtres appréhendés comme des personnes âgées. La retraite - limite sociologique - ne correspond plus aujourd'hui à la limite biologique, et les frontières de la vieillesse sont à redéfinir (Puijalon et Trincaz, 2000)25(*). Caradec (2008)26(*) souligne que ce passage à la retraite, s'il s'avère être une crise responsable en plus de la perte du statut, de la privation d'un rôle instrumental et de la disparition d'un groupe de pairs, n'est souvent que passagère.

Cette nouvelle phase existentielle à investir nécessite un réaménagement des conditions de vie; et pour beaucoup de seniors, la retraite résonne comme une mise à l'écart dans une société où les valeurs de la productivité sont prépondérantes. Peu d'études s'intéressent au vécu entraîné par le passage à la retraite, les recherches étant surtout orientées par le problème du manque de main d'oeuvre et la question des pensions à payer. Pourtant, en tant que moment qui vient rompre la continuité de l'existence, elle provoque une rupture à la fois au niveau du statut et au niveau du rapport au temps (Vankemmel, 2006)27(*). Alaphilippe et al. (2001) partent des trois temps de vie - temps de la formation, de la production et temps de la retraite - pour s'interroger sur l'âge de passage du second au troisième qu'ils déclinent en trois niveaux : l'âge légal qui est arbitraire, l'âge réel soumis à une importante variation interindividuelle et l'âge idéal qui fluctue en fonction de la pénibilité du métier, des histoires de vie et du souhait de prolonger ou non une activité salariée.

Le passage de la vie active à la retraite serait illustré par quatre formes de transition (Thierry, 2007) : transition-reproduction, dans laquelle l'individu reproduit complètement son mode de vie professionnelle tant au niveau des horaires qu'au niveau des responsabilités, la transition de transposition qui permet de réinvestir les compétences et expériences dans de nouvelles activités bien souvent bénévoles, la transition-rupture avec la concrétisation d'un projet très différent mûri longtemps avant la retraite et l'impossible transition où la personne se disperse dans de nombreuses activités ou lutte contre la dépression. Toutefois ces phases de transition seront vécues très différemment selon qu'il existe une perte de pouvoir pour ceux qui occupaient auparavant des positions hiérarchiques élevées ou au contraire un gain de liberté.

L'investissement dans une activité bénévole pourrait bien représenter une solution qui aide le retraité à se recomposer une identité et se reconstituer un réseau de sociabilité (Vankemmel, 2006). Les évènements de vie et les infléchissements dans le parcours des individus sont souvent cités pour expliquer l'engagement bénévole, et que celui-ci marque une rupture ou s'inscrive dans la continuité, il est toujours en lien avec un cheminement dans la vie des sujets. L'entrée dans la retraite serait particulièrement facilitée lorsque les activités nouvellement entreprises seraient en continuité avec les anciennes, permettant de mobiliser des compétences reconnues socialement utiles (Caradec, 2008).

Donc, la retraite constitue bien une rupture ainsi que le révèle Georges Lapassade (2007)28(*) au cours de l'entretien qu'il a avec Lucette Colin. Ce sont des « dilemmes perturbateurs »29(*) qui vont entraîner des « transformations de perspectives »30(*), des nouvelles manières de comprendre et de percevoir l'existence. Ainsi l'affirme également Lapassade (2007) « Pour qu'il y ait des innovations, il faut qu'il y ait des ruptures » (p. 147). Si la retraite est une rupture, c'est qu'elle représente un passage vers l'étranger, car en bouleversant un quotidien rassurant rythmé par l'activité professionnelle, elle conduit à une relecture des schémas habituels de l'existence. On peut parler de mobilité, construction de soi et donc d'éducation parce qu'il y a « engendrement de rapports inédits à l'existence et donc traversée de frontières »31(*).

2.3.3. L'éducation tout au long de la vie à l'heure de la retraite.

« Apprendre à connaître, faire, vivre et apprendre à être » sont les piliers de l'éducation des adultes définie en 1996 par Jacques Delors à la suite de la promulgation du « concept de l'apprentissage tout au long de la vie » par l'UNESCO (1976) (Deriaz, 2005)32(*). Certaines personnes âgées ont la volonté de continuer à se former, se développer dans un domaine qui leur agrée. Ceci rejoint le concept allemand de la Bildung qui considère l'être humain comme étant toujours perfectible, responsable de sa propre formation, concept résolument humaniste et qui porte en lui « une lutte pour l'émancipation »33(*).

Cependant, malgré la volonté de l'UNESCO d'une éducation pour tous tout au long de la vie, et bien que la plupart des pays industrialisés se soient dotés de politiques éducatives pour les adultes, celles-ci concernent essentiellement le domaine de la formation de base et de la formation professionnelle. Selon Jean-Louis Le Grand (2008)34(*) il devient urgent « de penser sérieusement l'articulation de tous les âges de la vie, de se situer dans une pluralité de registres temporels et de moments » (p. 124) et la stigmatisation des personnes âgées, en véhiculant une image déficitaire des capacités cognitives du sujet vieillissant entraîne des attitudes de discrimination concernant l'intérêt qu'aurait celui-ci à poursuivre toute instruction. Ces stéréotypes sont injustifiés et il serait plus approprié de parler en termes de spécificités physiologiques, psychologiques et comportementales présentes par ailleurs dans le reste de la population, en somme de tenir compte de l'intervention de facteurs plus complexes, telle l'expérience et considérer la pluralité des publics (Boutinet, Carré et Kern, 2007)35(*).

Aujourd'hui, beaucoup de retraités ont à coeur de profiter de leur retraite, de s'instruire, d'acquérir de nouvelles compétences ce qui passe par un intérêt de plus en plus marqué envers les technologies numériques. Vidal (2003)36(*) fournit d'ailleurs des exemples d'initiatives originales, dont celle de la maison du savoir de Saint-Laurent-de-Neste qui a fait appel à des retraités pour endosser le rôle de médiateur dans un objectif d'appropriation des TIC par le plus grand nombre; ou CYBERPAPY, site fondé sur un principe de forums où les seniors répondent aux questions que posent des jeunes. Les compétences numériques permettent l'enrichissement personnel au moment de la retraite (Anna Terzian, 2008)37(*).

L'allongement de la durée de la vie, l'amélioration du niveau de vie des personnes âgées et la démocratisation des études plus longtemps constituent autant de phénomènes qui justifient l'importance à accorder à l'éducation des seniors et le refus d'une conception utilitariste de l'éducation dédiée essentiellement à l'insertion professionnelle. Le bénévolat à l'heure de la retraite se présente comme une traversée de frontières particulièrement apte à susciter innovation, production et construction de savoirs et donc éducation dans une période de l'existence qui correspond à une rupture, un « dilemme perturbateur »38(*). La pratique du bénévolat permet au sujet de s'éduquer en restant acteur de sa vie et d'exercer ainsi un certain pouvoir (Ferrand-Bechmann, 2007).

2.4. Le Métier de Bénévole39(*) à l'heure de la retraite.

2.4.1. Le bénévolat.

Selon Dan Ferrand-Bechmann (1992)40(*), toute action non rétribuée financièrement, qui s'exerce sans contrainte sociale et qui est dirigée vers autrui ou vers la communauté (p.35) peut être qualifiée de bénévole. Dans cette définition, le bénévolat fait référence à un acte gratuit, librement consenti et en lien avec d'autres personnes que soi. La présence de la tierce personne est aussi un critère retenu par Edith Archambault (2002)41(*) pour différencier le simple adhérent à une association, du bénévole qui y accomplit un travail. Conceptuellement, le bénévolat s'oppose au travail, comme le montre Maud Simonet-Cusset (2004)42(*) qui évoque l'ambivalence sémantique éprouvée par les bénévoles lorsqu'ils parlent de travail pour désigner leur activité. Pour Dan Ferrand-Bechmann (2007), « [...] les bénévoles ont une activité proche du travail avec toutes les dimensions décrites par le travail »43(*), autorisant l'analyse de l'activité des bénévoles avec les concepts de la sociologie du travail. Ce qui distingue le travail bénévole du travail salarié, c'est peut-être la bonne volonté et sûrement l'absence de salaire autre que symbolique. Dans « bénévolat », il y a « bonne volonté », la volonté de faire le bien et c'est bien sous « l'impulsion de leur bonne volonté » (Vermeersch,2004)44(*)que les individus se mettent au service d'autrui. Il s'agit d'un « don entre étrangers » supposant l'existence d'un tiers qui n'appartient pas au cercle familial ou amical (Godbout, 199445(*); Gagnon et Fortin, 2002)46(*)

On pourrait en effet comprendre le bénévolat comme l'expression du besoin de l'Autre, besoin qui selon Lévinas (1984)47(*) serait inné. Ce besoin d'altérité serait un des moteurs de l'engagement et le bénévolat comme une modalité de l'engagement répond à cette attente. Lipovetsky (1983) parle du narcissisme qui serait « inséparable d'un engouement relationnel particulier »48(*), narcissisme collectif qui fait se regrouper entre eux les individus qui se ressemblent. Vermeersch (2004) l'atteste : l'engagement bénévole offrirait à l'individu le cadre collectif qui viendrait remplacer le rôle autrefois joué par les institutions. Amorce d'explication peut-être de l'ampleur du phénomène bénévole qui s'exprime dans la sphère associative par une augmentation de 5% chaque année particulièrement dans les domaines humanitaire et culturel (Bulletin de statistiques et d'études édité par le Ministère de la Santé de la Jeunesse et des Sports)49(*). L'enquête publiée estime à 18 millions le nombre de bénévoles dans les associations et à 14,2 millions ceux qui sont actifs dans plusieurs associations à la fois, représentant ainsi 935 000 emplois en équivalents temps plein. Parmi cette population, Lionel Prouteau et François-Charles Wolff (2007)50(*)font le constat d'une forte participation des seniors à la vie associative, les sexagénaires représentant la part la plus importante des bénévoles (57,8%), participation sensible à différentes caractéristiques concernant le niveau de diplôme et de formation élevés, un revenu domestique confortable, des antécédents associatifs familiaux et une pratique religieuse régulière (Enquête « Vie associative », INSEE, 2002).

De manière générale tous âges confondus, parmi les motivations à faire du bénévolat, Dan Ferrand-Bechmann (2007) cite le besoin d'échanges et de liens sociaux, la volonté de découvrir de nouveaux horizons, la perspective d'acquérir des savoirs, de les transmettre et celle de rompre avec la solitude ainsi que le souhait de rester actif. « Rendre à la communauté ce qu'elle vous a donné »51(*) est une réponse fréquente, selon l'auteur. De manière identique les recherches de Suzie Robichaud (2003)52(*) aboutissent aux mêmes conclusions : se sentir utile, partager avec les autres, rendre ce qui a été reçu et elle précise en outre que le sentiment d'appartenir à une communauté et de s'attacher au groupe accroit la motivation. Pour mieux saisir les raisons de faire du bénévolat, il faut en comprendre les intérêts inséparables de la communauté ou du groupe social. La reconnaissance est certainement une des conséquences espérée consciemment ou non de cet acte gratuit et tourné vers l'autre. Et cette reconnaissance passe par le souci de mesurer l'effet de leur action, la proximité entre donneur et receveur étant ici essentielle. Le bénévole « donneur de temps » trouve au contact de l'autre et du groupe sa motivation centrale. Il y puise son énergie à donner et à durer, très souvent animé d'un « projet militant » (Ferrand-Bechmann, 1988)53(*) qui le fait agir « pour » et « avec » l'autre.

2.4.2- Production et construction des savoirs à travers la pratique bénévole.

Le lien entre autonomie et apprentissage, permet selon Dan Ferrand-Bechmann d'explorer la question de l'autoformation. L'individu s'approprie ses savoirs, apprend en agissant, apprend de l'expérience à travers sa participation associative. Et dans ce contexte, il n'apprend pas uniquement pour apprendre, mais pour solutionner des problèmes, pour mieux maîtriser son environnement, ce qui constitue un moteur puissant. Il est motivé à apprendre, parce qu'il est intégré dans une association pour laquelle il oeuvre en tant que bénévole et que son activité rend nécessaire l'acquisition de connaissances nouvelles pour les besoins de l'action.

On apprend sur le tas à travers des situations inédites, par imitation, par l'identification à travers l'échange au sein d'une communauté. Le regard porté à l'expérience de l'autre conduit à des questionnements et réflexions qui sont sources d'apprentissage. D'après Dan Ferrand-Bechmann (2008)54(*) l'individu apprend en agissant, à travers un réel engagement. La motivation et l'intentionnalité sont ici des facteurs indispensables dans l'appropriation des savoirs, moteurs suscitant le désir d'apprendre pour mieux faire. Ces savoirs acquis à travers l'expérience sont d'ordre diffus, souvent cachés, difficiles à expliciter, ce que Illich nomme le travail de l'ombre.

Lochard et Simonet-Cusset (2003)55(*) évoquent les savoirs produits par l'acteur associatif, ce dernier disposant de savoirs de vie, savoirs d'action directement issus de l'expérience. L'expert militant, ainsi que le désigne Jacques Ion (2003)56(*) est aujourd'hui une réalité présente au sein des associations, concourant de par la mobilisation même de savoirs divers, de compétences complexes et multiples, d'expériences partagées, à une nouvelle redéfinition des rapports au savoir. Lochard (2003) cite le processus qui a conduit les associations de solidarité à produire leurs propres connaissances sur le monde de la pauvreté, en occupant une position d'expert sur ces différentes questions et leur assurant ainsi une reconnaissance de leur savoir. Les mouvements associatifs (ATD Quart Monde, Secours Catholique, Emmaüs) participent activement à la construction des connaissances sur les nouvelles formes de précarité au sujet desquelles il existe un déficit. L'expérience du mouvement ATD Quart Monde (Claude Ferrand57(*)) souligne bien l'existence de savoirs alternatifs produits par la sphère associative parce que au plus près des réalités sociales et fait la preuve de la nécessité de croiser ces connaissances avec celles issues de la recherche académique. La mobilisation des savoirs des bénévoles peut être alors conçue sous l'angle de la participation commune favorisant échanges, co-réflexion, coopération pour élaborer le sens de certaines expériences dans une « connaissance qui se construit par des allers-retours entres les groupes d'acteurs »58(*).

Dan Ferrand-Bechmann (2008) décrit bien les capacités mises en oeuvre chez les bénévoles au sein du milieu associatif. Il s'agit des capacités à échanger, recevoir de l'autre, donner, créer du lien, des capacités à assumer des responsabilités et celles de flexibilité pour innover, anticiper, toutes capacités qui ne sont pas forcément développées ailleurs. À travers l'expérimentation, les savoirs acquis s'exercent dans trois domaines en constante interaction :

- des savoir-faire, surtout techniques et pratiques pour solutionner des problèmes particuliers, savoirs transférables d'un lieu à l'autre, d'une activité bénévole à une autre;

- des savoir-agir, compétences organisationnelles, afin de faire évoluer une situation qui va motiver l'acteur à assumer de nouvelles responsabilités et acquérir du pouvoir;

- des savoir-être, permettant le développement de capacités relationnelles, des qualités telles que l'écoute, l'empathie, la négociation. Appartenant aux compétences sociales, la compétence interculturelle s'élabore en relation avec le vécu de la personne, en fonction de ses diverses expériences. Elle signifie la capacité d'ouverture à l'altérité, à la richesse de l'autre au cours des rencontres, des interactions et pose de fait, la reconnaissance de l'Autre comme indispensable au développement de l'individu. Rappelons que selon Abdallah-Pretceille (1999), pour avoir accès à la richesse d'autrui, il faut admettre sa propre diversité, puisque celle-ci "est constitutive de la nature de l'homme"59(*).

Les connaissances produites par les organisations associatives sont multiples et issues de l'expérience du terrain. Ces savoirs et connaissances mobilisés par les bénévoles sont différents de ceux produits par le monde scientifique ou par l'Etat (Simonet-Cusset, 2003) car au plus près des réalités sociales et méritent alors d'être reconnus.

2.4.3 La nécessité de l'Autre dans la motivation et les apprentissages.

Le rapprochement d'individus a priori distincts provenant de milieux socio-culturels différents, en somme « l'altérité devient source d'enrichissement personnel et collectif » (Claude Ferrand, 2008 : 23)60(*). La participation à une activité commune en milieu associatif nécessite de croiser des savoirs, et donc d'échanger, de négocier, d'apprendre l'un de l'autre. Il est un fait que les interactions multiples possèdent des effets transformateurs.

Une des dimensions fondamentales du bénévolat est le rapport à autrui (Ferrand-Bechmann, 1992). « Le bénévolat est une relation d'aide, de service à autrui, à son prochain »61(*). Les multiples interactions relatives à la fréquentation du monde bénévole peuvent permettre le développement « d'un travail réflexif d'interprétation enrichi par le cadre collectif »62(*). Par exemple, le dépassement des conflits souvent présents dés qu'il y a collaboration autour d'une oeuvre commune, contraint à un recul réflexif qui est formateur, puisque la compréhension des situations sociales requiert des capacités « d'observation et d'analyse de soi et de l'autre »63(*). Ainsi Knowles (1990)64(*) identifie comme facteurs d'apprentissage de l'adulte, outre l'expérience à laquelle le sujet cherche à donner un sens et les situations auxquelles il est confronté, ses rencontres avec les autres.

Le regard posé sur l'expérience et le fonctionnement des autres est un puissant levier qui incite à l'apprentissage. La confrontation à l'altérité, en sollicitant l'expérience du « sentiment d'ouverture-fermeture aux autres »65(*) interroge le sociocentrisme de l'individu et constitue en soi un apprentissage. Ainsi, la pratique et la participation à une activité favorisent la production des savoirs; interactions et communication intersubjective interviennent dans cette construction. Guylaine Racine (2000)66(*) examine la construction des savoirs d'expériences chez des intervenantes qui travaillent au sein d'organismes s'occupant de femmes sans-abri, et elle montre le rôle important de la communauté d'intervenantes dans les apprentissages réalisés. Dans un premier développement l'auteure évoque des formules que citent les intervenantes, telles que « apprendre sur le tas », « apprendre en étant dedans ». Une large place serait ainsi faite à la participation commune pour un même projet, et les échanges informels seraient les moments où elles auraient le plus appris. La place de la réflexion est centrale. L'apprentissage à travers la pratique est contributif d' « un processus d'analyse réflexive »67(*). Ceci n'est pas sans rappeler le sujet réflexif, maître de ses apprentissages cher à Kölb (1984). Et Balleux (2000) cite deux aspects du modèle d'apprentissage de Kölb (1984) : l'accent mis sur « l'ici et maintenant » et le processus de rétroaction qui relie trois facteurs : « l'expérience telle qu'est est vécue subjectivement par la personne dans des situations singulières, la compréhension de cette situation et la construction de savoirs à partir de ce contexte » (p. 271)68(*).

Dans un deuxième développement de l'étude pré-citée, il est question de la réflexion à laquelle les pairs participent pour « transformer une expérience en un apprentissage » (p.78). L'auteure discerne quatre apports relatifs au collectif : le sentiment de sécurité que procure le groupe lorsqu'il faut intervenir, une fonction régulatrice de la subjectivité qui permet la prise de distance et de recul par rapport à l'expérience personnelle, la confrontation des différents points de vue qui en provoquant la déstabilisation oblige le sujet à se décentrer et donc à apprendre, le développement personnel fruit « du travail collectif qui favorise la critique et le développement de sa propre pratique » (p. 79). En accord avec Schön (1994)69(*), si réfléchir sur l'action permet de construire ses savoirs, l'étude de Racine (2000) met en évidence le rôle capital du collectif dans ce processus de réflexion. Par ailleurs, elle cite Pineau (1989 : 26) pour qui « la rupture dans l'expérience ouvre une brèche » (p.82). Des bruits nouveaux créent une nouvelle situation, nouvelle expérience source d'apprentissage. L'intérêt de cette étude est bien de montrer que la réflexion sur l'expérience est dépendante des interactions dues à la pratique commune. Ce point est également clairement identifié par Catherine Clenet (2006)70(*) pour qui les pairs « contribuent à la construction d'une identité d'apprenant autonome ».

2.4.4 - Un exemple.

L'exemple des Réseaux d'Echanges réciproques de Savoirs (RERS)71(*) me permet d'illustrer la question de la construction des savoirs à travers la pratique bénévole. Basés sur la réciprocité et l'entraide, les réseaux mettent en lumière cette présence de l'autre dans la réalisation des apprentissages. Cette pratique née à l'initiative de Claire et Marc Héber-Suffrin en 1971 à Orly postule la complémentarité des savoirs avec comme objectif de permettre à des citoyens de tous âges à travers un processus d'échange, d'accéder à des savoirs et savoir-faire divers.

Dans les RERS, chacun apprend au cours de l'échange : sur l'objet de l'échange, pour le demandeur; sur le savoir avancé pour l'offreur qui apprend pour répondre aux questions qu'il se pose lui-même ou par le demandeur. Ici les participants facilitent la circulation des savoirs. À travers la relation de réciprocité demandeur/offreur, ce sont les modes d'apprentissage, les relations au monde et aux autres qui sont modifiées et participent à la transformation personnelle des sujets et donc à leur autonomie et émancipation. Par ailleurs, l'autre devient nécessaire dans cet acte d'apprentissage qui loin d'être un acte solitaire repose au contraire sur la nécessaire présence du collectif et la dynamique de l'échange.

Les « RERS » favorisent à la fois l'émergence de savoirs nouveaux, la prise en compte de savoirs déjà existants et la certitude que tout le monde peut participer à la circulation des savoirs. Ils reprennent les grands thèmes chers à l'éducation populaire en valorisant les savoirs de l'expérience en dehors des cadres scolaires et universitaires, l'autoformation par la confrontation des façons d'apprendre, l'éducation de « chacun par chacun » à travers un système horizontal de partage des savoirs et favorisent l'apprentissage de la citoyenneté.

Cet exemple montre que ces apprentissages en marge des systèmes dits formels, ne s'inscrivent pas dans un programme structuré d'acquisition de connaissances. Dans un article de Sociologie et sociétés, « Acquisition des savoirs et pratiques de groupe »72(*), Lave (1991) explique que la participation régulière des nouveaux venus à un groupe qui partage des pratiques communes les fait devenir progressivement des anciens. En plus d'apprendre, les participants acquièrent une identité et une compétence en étant membre du groupe. En effet, la perception de soi est modifiée par la transformation de la participation. Dan Ferrand-Bechmann (2000)73(*) mentionne par ailleurs, l'existence d'identités plus positives à travers des activités socialement utiles telles que le permet la pratique bénévole. Les nouveaux venus passent d'une « participation périphérique légitime » à une participation à part entière. Il ne semble pas qu'il y ait enseignement; l'apprentissage se fait au cours de la vie quotidienne, de façon improvisée, par la pratique continue. Ici l'évaluation des progrès réalisés par l'apprenti est directement visible à travers le travail lui-même, et il n'y a ni réprimandes, ni félicitations, ni directives, ni examens. D'emblée, les nouveaux ont une vision globale de l'ensemble de l'activité à réaliser ainsi que les nombreux exemples de travail de leurs pairs - les anciens - sous les yeux.

2.4.5- L'engagement bénévole à l'heure de la retraite.

Dans le contexte de l'éducation tout au long de la vie, l'UNESCO (1997)74(*)insiste sur l'engagement et l'expérience comme points positifs relatifs au vieillissement qui méritent d'être amplement diffusés; les seniors possèdent des compétences didactiques fruits de leurs expériences de vie qui se révèlent d'un grand profit pour les autres générations. Cet engagement souvent associatif, en permettant de mobiliser des compétences reconnues utiles socialement peut faciliter « l'entrée dans la retraite » et simultanément, l'immersion dans le bénévolat va médiatiser la rencontre avec l'Autre.

Libérés des contraintes du travail, les retraités consacrent beaucoup de temps libre au bénévolat. Et ils sont poussés à garder une activité, après que la société leur ait donné le goût du travail (Ferrand-Bechmann, 2000). En plus de transférer des savoirs, ils en acquièrent. Désireux de se cultiver, d'apprendre, de s'émanciper par le savoir, les aînés, on l'a vu précédemment, revendiquent le droit à la formation et à l'éducation après la retraite. Dans cette perspective, l'engagement bénévole est un moyen d'apprendre et a un impact certain sur le rapport au savoir. Il assure et négocie ce difficile virage qu'est la retraite et que l'on peut représenter tel un voyage, une plongée vers l'inhabituel auquel il faudra s'adapter. S'accommoder au nouveau, à l'étrange sont des capacités qui vont se développer lorsqu'on brise avec le quotidien. Et si, comme le cite Dan Ferrand-Bechmann75(*), « les situations de rupture sont aussi des moments où l'individu est amené [...] à faire des choix nouveaux et surtout à rechercher d'autres réseaux de socialisation et même à s'engager » (p. 51), les activités de bénévolat, en leur reconnaissant en plus une expérience de vie qui peut être partagée, deviennent alors véritablement gratifiantes pour les aînés.

Les motivations des retraités à exercer des activités bénévoles au moment de la retraite seraient communes aux autres groupes d'âge mais s'en dissocieraient quelque peu par l'absence d'envie exprimée de développer ou d'acquérir compétences et connaissances (Richard et al.,2006)76(*). Toutes les études s'accordent sur ce point. Utiliser son savoir-faire, retrouver un noyau de sociabilité et rester utile tout en rendant ce qu'on a reçu, seraient les principaux moteurs de l'engagement (Ferrand-Bechmann, 2000). Dans une étude consacrée aux motivations des bénévoles retraités qui participent à un projet de recherche-action, Richard & al. (2006) confirment comme sources de leur implication, la volonté d'utiliser les compétences et l'expérience développées au cours de la carrière professionnelle, celle de reproduire le mode de fonctionnement similaire au climat de travail et de continuer à jouer un rôle dans la société. Prouteau et Wolff (2007)77(*) rapportent des éléments identiques sur la base de l'enquête « Vie associative » menée par l'INSEE en 2002, en montrant par ailleurs que la dimension relationnelle comme motif essentiel de l'adhésion à une association au moment du départ à la retraite est essentielle.

On peut distinguer trois types de postures des retraités lorsqu'ils s'engagent (Thierry, 2007)78(*). Il y a en effet ceux qui ont toujours fait du bénévolat et le poursuivent une fois qu'ils cessent leur activité professionnelle, ceux qui vont s'y engouffrer par crainte du vide laissé par la fin de la carrière, et ceux qui hésitent à s'engager soit parce qu'ils ont peur d'être accaparés, soit par repli sur la sphère intime. Selon l'auteur, des dispositifs d'accompagnement sont dans ce cas nécessaires pour susciter l'investissement bénévole, une véritable « pédagogie de l'engagement » visant à rassurer une population qui redoute d'être impliquée sans limites et de reproduire l'effervescence et les contraintes propres au monde du travail. Mais être bénévole, pourrait-on dire, c'est pas automatique ! Thierry (2007) et Maud Simonet-Cusset (2004)79(*) estiment que devenir bénévole relève d'un apprentissage. Celui-ci peut être précoce en lien avec le milieu familial, les engagements de jeunesse, le réseau relationnel (Thierry, 2007) et de plus, certains rôles exercés par le bénévole nécessitent une formation, un suivi, voire même une évaluation (Simonet-Cusset, 2004 : 250).

2.4.5 - Engagement bénévole et mobilisation des savoirs chez les retraités.

Si savoir et pouvoir sont liés, c'est parce que le savoir confère le pouvoir. Et c'est précisément la perte de pouvoir qui caractérise la situation des personnes retraitées. Ainsi qu'énoncé ci-dessus, si autrefois savoir et donc pouvoir caractérisaient les personnes âgées, aujourd'hui, leur place au sein de la société contemporaine est devenue précaire. Et bien que retraite et vieillesse ne riment plus de concert, l'imaginaire populaire est encore nourrie de ces anciennes images que véhiculaient les retraités d'hier, celles que précisément ils redoutent et réfutent. La production et la construction des savoirs (savoir-faire, savoir-être, savoir-agir) concourt à l'autonomie de l'individu dans une période de la vie où la perte d'autonomie est une des conséquences souvent citée pour décrire cette phase du vieillissement. Le monde du bénévolat est alors un lieu de socialisation où il est possible d'agir et même d'exister. « Le bénévolat est une troisième voie de promotion sociale qui permet [...] d'accéder à un nouveau pouvoir, soit la redondance du milieu professionnel » (Ferrand-Bechmann, 1992 : 130)80(*). Réinvestir ses compétences professionnelles devient pour ces retraités l'occasion d'exercer un pouvoir qui vient pallier à la perte de statut liée à l'emploi.

3- MÉTHODOLOGIE, TERRAIN ET ANALYSE.

3.1 - Approche qualitative et compréhensive.

S'engager dans un travail de recherche, c'est emprunter un chemin incertain, surtout lorsqu'il s'agit comme ici d'une première aventure. Le cadre collectif dans lequel s'ancre cette expérience suppose de s'affilier à un champ de pratiques sociales et permet de bénéficier de l'appui de l'équipe pédagogique et des supports méthodologiques en ligne. Ceux-ci fournissent des repères, délimitent et précisent les étapes successives de ce travail.

La méthodologie retenue est celle d'une recherche qualitative qui vise essentiellement la compréhension en profondeur du phénomène analysé ici, à savoir la mobilisation des savoirs chez les retraités à travers leur activité bénévole. Elle s'inscrit dans une approche interactionniste et compréhensive avec un aller et retour constant entre le terrain et la théorie. La richesse du terrain est ici privilégiée. En accord avec les théories interactionnistes, je pense que la réalité sociale est en permanence construite par les groupes et les individus, lesquels échangent du sens à travers les multiples interactions, se livrent à des interprétations, deviennent acteurs de leur existence, et sont alors les mieux à même de partager leur compréhension des phénomènes sociaux. Le groupe dans cette approche ne peut être considéré comme un tout homogène. Pour Kaufmann (2007), les individus sont « des producteurs actifs du social, donc dépositaires d'un savoir important qu'il s'agit de saisir de l'intérieur » (p.26)81(*). La relation hiérarchique qui peut exister classiquement entre l'enquêteur et l'enquêté est ici mise de côté, pour un partage plus fécond des connaissances.

La posture compréhensive conduit le chercheur à construire sa problématique à partir des hypothèses qui jaillissent au fur et à mesure de la progression de son travail sur le terrain et se nourrit des observations ainsi que des significations des acteurs eux-mêmes obtenues à partir du matériel discursif issu des entretiens. Ici est donc privilégiée l'observation participante, des entretiens semi-directifs, des conversations informelles ainsi que la tenue d'un journal de terrain et d'un journal de recherche, ces derniers étant pris comme outils de travail.

- Observation participante : dans un premier temps, celle-ci s'est déroulée dans l'Association JA qui sera présentée plus bas, au sein de laquelle j'ai participé en tant que bénévole, ce qui m'a permis de procéder à l'observation de 3 réunions de préparation de 2 heures environ chacune, de 6 temps de préparation du camp, dont 4 journées entières consacrées à l'organisation du parcours, et 3 journées lors du déroulement du camp lui-même.

- Entretiens semi-directifs hors du cadre associatif, en privilégiant les rencontres au domicile des personnes qui ont eu la gentillesse de répondre à mes questions. Cependant et pour des raisons d'ordre pratique, j'ai effectué quelques entretiens avec d'autres personnes étrangères à cette association.

- Conversations informelles, avec les bénévoles rencontrés sur le terrain, donc l'Association JA pendant les temps de préparation, temps de pause, temps de repas au cours du déroulement du camp lui-même et avec Fanny, enseignante à la retraite qui m'a longuement raconté ses pérégrinations sur le chemin du bénévolat et dont j'ai choisi de réaliser le portrait en guise d'exemple.

- La rédaction d'un journal de terrain, dans lequel j'ai annoté les observations réalisées au cours des réunions de participation, pendant la reconnaissance du parcours et lors du déroulement du camp. Parallèlement la tenue d'un journal de recherche que j'avais déjà bien entamé avant de rédiger le journal de terrain dans lequel les questions et réflexions issues des lectures préalables ou d'interrogations diverses qui ont jailli de ma pratique.

3.2 - Le terrain de recherche.

3.2.1- Présentation de l'association JA.

L'association JA82(*), est une association loi 1901, association à caractère récréatif et éducatif qui a pour finalités de développer l'éducation dans les milieux ruraux, de permettre un temps de vacances et d'activités culturelles et de favoriser le développement des liens entre les jeunes de différents lieux culturels européens. Le projet éducatif exprime la volonté de développer chez les jeunes, l'esprit critique, l'autonomie, la tolérance et de favoriser les liens intergénérationnels et interculturels ainsi que l'expression de la solidarité et la reconnaissance de la diversité. Bien que montrant une façade « laïque », elle est pourtant catholique d'inspiration et de direction.

La principale activité de l'association est d'organiser un camp itinérant en VTT déclaré auprès de la DDJS83(*) qui se déroule chaque année la première semaine de juillet. Il s'agit d'un pèlerinage qui accueille deux types de public jeunes : 180 pédalants âgés de de 11 à 15 ans et 50 jeunes de 16 ans et plus qui ont en charge une partie de l'animation de certains temps du camp (notamment les veillées), ainsi que l'organisation logistique (montage et démontage des tentes, accueil le soir des jeunes pédalants, etc...). Une des spécificités de ce camp est le mélange des générations (au total 360 personnes environ sur le camp), car outre les deux groupes de jeunes présentés ci-dessus, l'équipe d'organisation est également constituée de personnes adultes dont l'âge varie entre 18 et 75 ans qui ont en charge toute la partie logistique de la confection des repas, au transport du matériel, à l'organisation de l'itinéraire qui sera emprunté en VTT, le secrétariat, en passant par la sécurité, les soins divers, etc... Tous sont bénévoles. Toutes les professions se côtoient. Si certains postes nécessitent des personnes diplômées (infirmières, médecins) et donc encore en activité professionnelle, la plupart sont occupés par des retraités hommes et femmes qui exercent des fonctions qui n'ont bien souvent rien à voir avec les compétences antérieures acquises dans leur métier. Presque tous réinvestissent ici des expériences diverses, des connaissances développées tout au long de leur vie de manière bien souvent informelle, des savoirs quotidiens; et parallèlement, ils innovent, inventent, créent pour les besoins de l'action et mènent à terme le projet pour lequel ils participent et dans lequel ils se sont engagés.

3.2.2 - L'observation participante : Association JA.

C'est en tant que membre du conseil d'administration de l'association JA (décrite ci-dessous) et participant à l'organisation d'une de ses activités principales depuis 7 ans que j'ai amorcé l'entrée sur le terrain. Les relations tissées avec les retraités qui oeuvrent à la mise sur pied du projet phare de l'association a sans doute facilité mon observation. Ma présence lors des réunions de travail, pendant les journées de repérage sur le terrain de l'itinéraire, la collaboration préexistante à cette note de recherche de plusieurs années avec eux avait déjà permis d'instaurer un lien de confiance. Cette relation durable, bien antérieure à la recherche elle-même a contribué simultanément à simplifier les étapes de mon travail - l'entrée sur le terrain et l'acceptation de ma présence - mais parallèlement à rendre plus complexe l'analyse des faits observés, du fait d'une proximité peu propice au recul et à l'impartialité. C'est au cours des réunions de préparation que j'ai observé ces retraités actifs, et avec qui j'ai étroitement collaboré.

3.2.3 - Entretiens semi-dirigés et conversations informelles.

Une précision d'importance doit être mentionnée ici sur les questions d'usages autour de l'état civil des personnes interrogées. En effet, m'inscrivant dans une approche résolument interactionniste, j'ai défini la vieillesse précédemment comme un processus et non comme un état, ce qui m'interdit d'approcher celle-ci de manière figée ; par ailleurs, l'objet de la recherche s'intéresse aux retraités, ce qui fait référence à une étape de la vie, bien plus qu'à un âge. Dans cette perspective, j'ai décidé de ne pas demander l'âge des personnes avec qui je me suis entretenue, le choix de la retraite en tant que critère définissant l'échantillon étant le seul à retenir. J'ai de plus discuté de ce point avec les principaux intéressés, qui ont tous manifesté leur approbation, satisfaits de voir que retraite et vieillesse étaient dissociées.

La grille d'entretien qui a été élaborée a pris en compte mes observations sur le terrain, au contact régulier des bénévoles retraités, contact inscrit dans la durée. C'est au fil des entretiens que la prise de conscience de l'intérêt d'une attention flottante m'est apparue. Cette attitude particulière d'écoute attentive, écoute sensible n'est venue qu'avec l'entraînement et la familiarisation avec ce type particulier d'échanges propres à libérer la parole.

Ainsi qu'énoncé ci-dessus, pour des questions de faisabilité, j'ai procédé à des entretiens de personnes étrangères à cette association. Ma propre participation en tant que bénévole sur le terrain, mon implication, des difficultés relationnelles avec certains membres, et la charge de travail des uns et des autres a compliqué quelque peu le déroulement formel des entretiens. Comme je l'ai expliqué, ceux-ci ont eu lieu préférentiellement au domicile des intéressés. S'agissant des conversations informelles - riches d'enseignements - elles se sont déroulées dans le décours de l'action, pendant les pauses, les repas partagés, les moments volés ici et là et surtout lorsque l'instant s'y prêtait. Il m'est apparu que cette façon de procéder permettait d'obtenir un matériau fécond en termes de réponses inattendues et moins conformistes de la part des interviewés. Et pour moi-même, l'absence du canevas à suivre a permis que je me concentre davantage sur l'échange, sans cette impérieuse nécessité de formuler chacun des thèmes. Ceci a constitué par ailleurs, un bon entraînement pour mener ensuite les entretiens semi-directifs. Je connaissais et maitrisais davantage les différentes questions à aborder dans un style plus conversationnel.

a) Les conversations informelles :

Il est rapidement apparu que l'appareil d'enregistrement était de nature à contraindre la parole. Pour certaines personnes et essentiellement dans le cadre précis de l'Association JA, la présence du MP3, aussi discret soit-il, a provoqué une rétention verbale manifeste. Les raisons majeures présumées sont à attribuer à la crainte de certains bénévoles à l'idée d'être évalués bien que j'eus expliqué auparavant les enjeux de l'entretien et l'utilisation qui allait en être faite (anonymat, ...). Ce constat était par ailleurs absent au cours des conversations informelles.

Si l'utilisation d'un magnétophone (ici MP3) est incontournable à des fins d'analyse du matériau ainsi recueilli, j'ai jugé bon d'y adjoindre les bribes relevées ici et là au hasard des échanges qui ont eu lieu dans des moments plus propices à la parole, lors des repas pris en commun, dans les périodes actives où nous débattions autour d'une problématique particulière en lien avec l'action en cours. Ces fragments de discussions prélevés « sur le vif » ont ensuite été annotés dans le journal de terrain, en général et lorsque cela avait été possible, le soir même du jour où ces échanges avaient eu lieu. Toutefois, l'enregistrement des entretiens a constitué l'essentiel du matériel de recherche, et les échanges informels ont surtout servi à définir les thèmes développés dans la grille d'entretien.

b) Le choix des interlocuteurs.

Je m'intéresse au point de vue des interlocuteurs, aux représentations et au sens que les bénévoles prêtent à leur engagement, à leurs motivations, aux diverses situations dans lesquelles ils sont impliqués et l'approche compréhensive est ici privilégiée. En dehors de l'association JA dans laquelle je suis moi-même bénévole, les autres personnes avec qui je me suis entretenue appartenaient pour certaines d'entre elles à mon entourage; pour d'autres, le hasard de la rencontre m'a orienté vers une autre personne et ainsi de suite. C'est donc sur le terrain, à travers l'observation participante que j'ai découvert mes futurs interlocuteurs sans établir a priori d'échantillon.

Cinq entretiens intégralement enregistrés ont eu lieu. En fonction de la situation et des personnes elles-mêmes, les durées varient de ½ heure à 1 heure environ.

Je précise que pour respecter l'anonymat des personnes interrogées tous les prénoms ont été modifiés. J'ai conversé avec autant d'hommes que de femmes, et les entretiens plus formels se sont déroulés avec trois hommes et deux femmes. Leurs caractéristiques sont conformes aux statistiques exposées ci-dessus : tous appartiennent en effet à un milieu socio-culturel favorisé, possèdent un niveau d'études et de formation supérieure.

3.3 - Précisions sur la démarche de recherche et sur les aspects méthodologiques : pour une analyse de mon implication dans les entretiens et l'observation participante.

La pratique sur le terrain revêt quelques aspects « techniques » qu'il me semble utile de mentionner ici. En effet, en tant qu'apprenti-chercheur, mes premiers pas sont forcément aléatoires, incertains; je trébuche, me reprends et même ainsi, il apparaît vite que seul, le recul temporel me permettra de poser un regard distancié capable d'analyser ma démarche méthodologique, les erreurs, les manques et les faiblesses.

Ces difficultés ou aléas de la recherche concernent l'observation participante, les conversations informelles et la conduite des entretiens semi-dirigés. Le moment de l'entretien est un exercice périlleux qui nécessite un questionnement permanent afin de mesurer les effets de la rencontre sur l'autre et ses répercussions éventuelles sur la richesse et/ou la qualité du matériau qui en résulte. L'attitude critique prévaut ici pour mener à bien ce travail de terrain. Et au centre de cette réflexion, le journal de recherche occupe une place intéressante en tant qu'outil d'analyse de mon implication. Il représente une nouveauté pour moi et un élément du processus méthodologique dans lequel je me suis engagée.

Nécessaire dans toute démarche scientifique, l'analyse implicationnelle se doit « d'être cumulative, pouvoir être critiquée, reconstruite, revisitée »84(*) puisque tout chercheur en sciences humaines et sociales établit des relations importantes d'ordre divers (affectif, émotionnel...) avec son objet de recherche. La démarche heuristique d'analyse de ma propre implication (notion inséparable de celle d'interaction et donc opposée à l'objectivité pure) s'effectue à travers la rédaction du journal de terrain, qui, en plus de conserver une trace écrite de la construction de mes connaissances au fil des explorations, oblige au questionnement sur les difficultés rencontrées et facilite selon Ardoino (1992)85(*) le travail du « rapport complexe implication-distanciation » qui relie le chercheur à son objet. Pour Rémi Hess (2008), « le journal est un outil efficace pour celui qui veut comprendre sa pratique, la réfléchir, l'organiser »86(*). Et ce journal « extime », parce qu'il suscite diverses réactions, fait évoluer la pensée en stimulant lors de la relecture, un recul réflexif et critique, une compréhension a postériori des faits par une analyse dans l'après-coup des éléments marquants. Son procédé cumulatif ainsi que l'indexicalisation des réflexions offrent un gain de temps appréciable au moment d'effectuer un retour sur des écrits antérieurs éventuellement réfléchis sous un éclairage nouveau. Cette posture réflexive qui évite des interprétations hâtives, se révèle être dans ma pratique hésitante d'apprenti-chercheur, un outil de choix qui mérite de s'améliorer encore pour mieux élucider mon implication dans la recherche.

Enfin, je précise que l'incursion sur le terrain de recherche, la rencontre des acteurs principaux, les conversations nombreuses ont apporté des corrections à ma vision de départ et enrichi la problématique. Toutefois, mon inexpérience dans le domaine a ralenti la progression optimale de ce travail en donnant dans un premier temps une place prééminente à la théorie au détriment de la recherche empirique.

3.4 - Présentation des sujets interviewés.

Claude.

Retraité depuis 10 ans, Claude a exercé successivement différentes professions dont celle d'entrepreneur. Mobilité et adaptation le caractérisent. C'est un bénévole régulier qui y consacre une moyenne de plus de 4 heures par semaine. Claude est bénévole dans l'association JA; c'est lui le responsable du parcours en VTT, organisé annuellement sur une période d'une semaine (tracé de l'itinéraire et sécurité).

Pierre.

Retraité depuis 15ans, il a exercé la profession d'ingénieur à EDF. Engagement et fidélité sont des qualificatifs qui résument son parcours. Il a en effet toujours été bénévole et cela dans de multiples associations au sein d'un mouvement syndical pendant sa vie professionnelle, et après sa retraite dans diverses associations (JA, accompagnement des malades, visites dans les maisons de retraite, etc...). C'est un bénévole régulier (environ 4 heures par semaine) mais qui a réduit progressivement ses activités, l'âge et la fatigue venant.

Annie.

Épouse de Pierre. Retraitée. Elle a exercé la profession d'enseignante, activité qu'elle a abandonné ensuite lorsqu'elle a déménagé en Martinique pour se consacrer à l'éducation de ses enfants. Elle a, à l'instar de son mari, été bénévole sa vie durant. Tour à tour ou parfois même simultanément, elle a été bénévole au Secours Catholique en tant que trésorière, aux AVF (Accueil des Villes de France), dans sa paroisse, en tant que catéchiste, assure aujourd'hui des visites dans les maisons de retraite et accompagne les familles endeuillées ainsi que l'aide à la préparation des funérailles.

Georges

Retraité depuis 18 ans, après avoir exercé la profession de juriste. Il est devenu visiteur de prison bénévole au moment de la retraite. C'est un bénévole occasionnel qui espace de plus en plus sa participation bénévole du fait de son âge avancé et de troubles de santé.

Jean

Jeune retraité depuis 5 ans, il est bénévole dans une association « Neuville Tiers-Monde » qui collecte des médicaments pour les envoyer dans les pays d'Afrique. Il a travaillé toute sa vie pour le même employeur en tant que préparateur en pharmacie. Régularité - il consacre trois demi-journées par semaine à l'association - et équilibre ont rythmé son existence tant personnelle que professionnelle. Passionné de botanique, il a eu à coeur de parfaire son savoir, de poursuivre sa formation en s'instruisant lui-même à travers de nombreux ouvrages. C'est lors de l'entrée en retraite - qu'il a anticipé et attendu avec impatience - qu'il a décidé d'employer son temps en offrant ses services à une association qui récolte et expédie des médicaments aux populations africaines. Son recrutement est en lien avec l'exercice professionnel de toute une vie.

Fanny (E5)87(*).

Retraitée depuis moins de dix ans, elle n'a repris un engagement bénévole que depuis deux ans. Lorsque la retraite est intervenue, elle a émis le désir de prendre un temps de réflexion qui a duré presque 4 ans durant lequel elle n'a « absolument rien fait ». Selon elle, cette suspension dans ses activités était nécessaire afin de faire le point sur sa vie, sur une existence hors du commun et les divers bouleversements qui ont jalonné sa route. Un vif besoin de transmettre caractérise son engagement. « Faire passer quelque chose » résume sa motivation à être bénévole.

3.4.1- Arrêt sur image : la participation bénévole de Fanny au CCFD (Comité Catholique contre la faim et pour le Développement) et le camp VTT organisé par l'association JA.

a) Portrait d'une bénévole au CCFD88(*) : Fanny.

Le CCFD est une ONG (Organisation non gouvernementale) française, association Loi 1901, reconnue d'utilité publique. Elle se compose de 28 mouvements et services D'Église (MSE). Pour mener à bien les diverses actions qu'elle entreprend à travers le monde entier, elle s'appuie sur une minorité de salariés (170) et sur une majorité de bénévoles (15000). Deux missions principales figurent à leurs objectifs :

- appuyer des programmes de développement. L'association vient en aide aux populations les plus vulnérables de différentes manières;

- sensibiliser l'opinion publique à la situation précaire que vivent les habitants des pays les plus démunis.

Fanny, retraitée de l'enseignement est bénévole au CCFD. En évoquant les projets mis en oeuvre dans les 5 continents, elle témoigne de la nécessité d'une intervention solidaire auprès des plus démunis et contribue à assurer la promotion de la solidarité internationale. Cette année accompagnée d'un indien - un intouchable - elle est venue exposer le rôle et les actions du CCFD à des classes de collégiens. Pour Fanny, la dimension éducative est prégnante, elle se veut focalisée sur le partage d'une expérience humaine d'une grande richesse pour éveiller les consciences. Les associations de solidarité internationale doivent participer à l'éducation au développement pour que le monde évolue vers plus de justice et de solidarité. « Avant même que d'agir, il faut comprendre », dit Fanny. Elle milite pour cela, afin que par la connaissance de l'autre, du monde, des peuples, les attitudes se modifient pour faire de tout individu un citoyen actif qui soit encouragé à agir.

Chaque année au moment du carême, une collecte est organisée afin de recueillir des fonds pour financer des projets de développements sur les 5 continents. Dans le cadre d'une action éducative sensibilisatrice, des responsables associatifs témoignent de leurs expériences, de leur travail dans les différents domaines du développement en soutien aux populations les plus pauvres. Par ailleurs des démarches pédagogiques sont menées pour inciter à questionner leurs modes de vie et de consommation.

Fanny a passé une partie de sa vie au Cameroun, débutant déjà ses activités bénévoles auprès des femmes qu'elle assiste dans diverses démarches administratives ou en venant en aide aux jeunes enfants pour pallier leurs insuffisances scolaires. Ses années africaines lui ont permis d'acquérir et de consolider grâce au bénévolat, des capacités d'adaptation, d'accroître sa confiance en elle, et d'apprendre patience et écoute. Sa mise à la retraite est suivi d'un intervalle de 4 ans « pour réfléchir » dit-elle, avant de décider qu'elle ferait oeuvre utile dans l'action bénévole parce qu'elle des « choses à transmettre ». Aujourd'hui, elle milite pour « l'intergénérationnel » comme autrefois au Cameroun pour « l'interculturel », afin de « réussir à mieux vivre ensemble ».

b) Association JA et camp VTT.

L'organisation du camp VTT exige de la part des bénévoles engagés et impliqués des compétences plurielles qu'il faut mobiliser. Les nombreux postes nécessaires au fonctionnement du périple sont tous occupés par des bénévoles - pour la majorité, retraités - et pour la plupart d'entre eux, si ce n'est tous, il s'agit d'une première expérience dans le domaine. Le savoir-faire déployé au sein de l'association est bien souvent le fait de personnes qui découvrent et innovent.

Quelles compétences, quels savoirs pour mener à bien les différentes activités développées dans le camp VTT ?

Une certaine technicité est requise aujourd'hui au sein des associations et celles-ci ne peuvent plus se satisfaire d'amateurisme. Il en va de même pour l'association JA qui développe des stratégies voisines de celles mises en oeuvre dans n'importe quelle entreprise. Il est impossible de parler d'improvisation puisqu'ils prennent en charge des tâches complexes et s'appuient sur une organisation collective qui joue un rôle central. Et c'est parfois aussi un manque d'organisation qui est reproché au cadre de travail. Les bénévoles peuvent se sentir lassés, isolés, insuffisamment écoutés face à la lourdeur des tâches demandées. Leurs revendications sont très proches de celles des travailleurs au sein de n'importe quelle entreprise. L'absence de reconnaissance, le sentiment de transparence viennent parfois s'ajouter à un « ras-le-bol » intermittent face à des insuffisances du cadre organisateur.

Le « choc culturel » que provoque la rencontre avec l'autre est bien une réalité dans le travail en commun. Que ce choc résulte des relations intergénérationnelles ou du croisement des points de vue, il nécessite dialogue, échange et ouverture réciproque. La compréhension de logiques différentes est convoquée dans l'action commune et de la même façon, le travail collectif va encourager la connaissance réciproque. Accords et désaccords seront mis au travail régulièrement pour mener à bien l'action.

Les savoirs sont répartis à travers plusieurs équipes qui travaillent en synergie et leur collaboration est discutée et orchestrée dans les fréquentes réunions de préparation. Les « postes » ont été attribués sur la base d'un volontariat en étroite dépendance avec les disponibilités de chacun. Les premiers temps, il y avait peu de bénévoles; il a fallu composer avec les personnes qui se présentaient, à partir d'engagements reposant sur le bouche à oreille, des retraités séduits par le projet proposé. C'est à travers l'expérimentation sur le terrain que les connaissances se sont développées. Le groupe a grossi d'années en années et les premiers bénévoles ayant fait la preuve de leur compétence se sont maintenus aux mêmes postes, devenant responsables et en charge du recrutement de nouveaux bénévoles. Ceux-ci ont bénéficié de l'expérience des anciens, imitation et identification ont été les modes d'apprentissages privilégiés, conformément aux analyses, de Dan Ferrand-Bechmann (2008 : 53). Regarder l'autre faire, échanger avec lui, prendre connaissance des situations passées dans lesquelles telle ou telle action a ou non fonctionné, s'en inspirer pour améliorer les dispositifs, apporter des modifications salutaires dans certains cas, contribuer à faire progresser l'ensemble. Sans dialogue, sans confrontation de points de vue parfois contradictoires, sans une construction harmonieuse et concertée des savoirs, rien n'aurait été possible. La gestion du camp a ceci de spécifique et en même temps de remarquable qu'elle a été le fait d'amateurs certes motivés, mais sans connaissance spécifique avec le projet. Ils ont bel et bien faits preuve de créativité, d'invention au terme de maintes réflexions collectives où la convivialité et le plaisir occupaient la place centrale.

Par exemple, le responsable de parcours doit mobiliser des capacités de repérage spatial et une bonne connaissance topographique des lieux, des capacités d'orientation, d'anticipation de la difficulté du parcours afin de l'adapter au public accueilli (des adolescents filles et garçons de 11 à 15 ans) s'avèrent indispensables. En amont, les longs préparatifs exigent la maitrise de l'outil informatique (reproduction des cartes, le tracé et l'insertion du profil de l'itinéraire dans des carnets). Ces savoir-faire techniques sont pour une part appris sur le tas et d'autre part acquis au cours de l'échange.

L'envergure du projet et le nombre croissant de participants ont suscité dans la « hiérarchie » le désir de s'associer l'expérience de professionnels rompus aux techniques de l'animation et de la direction de camps de jeunes. Alors que les retraités jouissaient dès les premières heures d'une grande liberté dans leurs décisions, l'intervention d'un membre plus jeune à la tête du camp, a provoqué des frictions, des heurts, des désaccords qui ont amené quelques désaffections et démissions de bénévoles retraités. Ils possédaient un pouvoir qu'ils entendaient conserver; la passation de celui-ci entre des mains juvéniles semble avoir résonné comme un jugement défavorable de leur activité.

De l'association JA qui organise un pèlerinage en VTT sur les routes du département, il est possible de parler d'un travail communautaire et l'analyse qui peut être faite de son fonctionnement est très proche de celle établie par Dan Ferrand-Bechmann (1992 : 69) au sujet des mouvements scouts. Ils possèdent également un « système de représentation propre », puisque chacun est tenu d'endosser un tee-shirt dont la couleur spécifique détermine le rôle et la place occupée dans la hiérarchie toute pyramidale de l'organisation; ils ont leurs rites, leurs chants, leurs cris qui les identifient de façon certaine, ces éléments assurant la cohésion du groupe et leur clôture par opposition à l'out-group qui ne véhicule pas les mêmes valeurs.

3.5. Éléments d'analyse.

Ces premiers éléments d'analyse prélevés à partir des entretiens évoquent la pratique de ces bénévoles retraités qui sont actifs en milieu associatif, (dont l'association JA décrite ci-dessus, le Secours catholique, le CCFD, Neuville Tiers-Monde), association de solidarité ou de loisirs.

3.5.1. Le bénévolat à l'heure de la retraite.

a) Motivations à s'engager ?

Au départ, il y a une demande, une sollicitation extérieure, bien souvent parce que les compétences professionnelles du nouveau retraité sont connues, tel Pierre : «  plutôt que d'aller au Secours Catholique où tout le monde peut faire quelque chose, viens là et moi je m'étais spécialisé dans le domaine de la gestion financière » ou encore Fanny qui exprime comment cette demande coïncidait avec ses attentes : « Cela m'a été demandé, ce n'est pas moi qui l'ai demandé, on me l'a demandé et lorsqu'on me l'a demandé, j'ai dit oui de suite et j'ai dit : j'attendais ça ». Le point commun aux situations rencontrées, c'est l'intervention d'un autre, amorce de l'engagement, moteur sans lequel les retraités tergiverseraient sans doute un moment avant de se lancer dans cette aventure existentielle. Des manques parfois qui agissent tel des appels d'air dans lesquels on se laisse happer, telle Annie : « Au départ, j'y étais comme participante, (AVF - Accueil des Villes de France) je payais mes cotisations, je prenais des cours d'anglais et un jour s'est posé la question du renouvellement du bureau et je me suis présentée comme trésorière ». Ensuite les réponses restent conformes aux études citées plus haut qui font intervenir comme facteurs à la source de l'engagement, le besoin de se rendre utile, de « rendre à la communauté ce qu'elle vous a donné », de réinvestir des compétences professionnelles, et même pour l'un d'entre eux « pour ne pas rester à écouter la pendule égrener ses coups »89(*). Relevons que ce type de bénévolat là, ressemble à ce que Dan Ferrand-Bechmann (2000 : 68)90(*) décrit comme étant « à la frontière de l'égoïsme quand il se 'donne' par ennui, solitude... ».

La place de l'héritage familial est considérable dans les parcours des individus interrogés. Presque tous admettent l'influence de l'engagement parental sur leur propre engagement, une sorte de tradition inscrite dans leur éducation, une culture de l'engagement qu'il soit religieux ou politique semble en effet intervenir comme facteur prépondérant pour expliquer leur bénévolat. Ainsi Claude et Jean qui soulignent les racines de leur bénévolat dans le scoutisme de leur enfance : « Çà vient de papa qui était directeur d'école, donc il a aussi quelquefois orienté les garçons en leur disant « pourquoi t'irais pas dans les scouts ? » explique Jean. « J'étais comme programmé ! ». Et pour Claude, il est question de ses « gênes familiaux ». L'acte bénévole n'est pas rémunéré certes, mais il rapporte beaucoup sur un plan personnel, même si ici et là on se défend de le faire pour ça. « Il y a des gens qui se demandent pourquoi on le fait, mais ça nous apporte quelque chose...[...] mais on s'en fout du retour ! » dit Pierre, à quoi il précise plus tard « ...on a l'impression de leur apporter quelque chose ! [..] il y a les remerciements, on est heureux, parce qu'on se dit, bon on leur a permis de ... mais, c'est pas du tout ça qu'on recherche ».

Quoiqu'il en soit, le bénévolat permet l'expression de l'individu, la réalisation de soi, l'épanouissement personnel dans un monde qui encourage les valeurs narcissiques. Et cette expression de soi est liée à l'aide apportée à l'autre, à la communauté. Cette aide cependant se doit d'être utile. En apportant à l'autre, c'est aussi à soi que l'on fait du bien. Altruisme teinté d'individualisme donc, ainsi se côtoient motivations altruistes et motivations plus égoïstes dans une définition plus moderne du bénévolat. Mais ces raisons ne sont pas citées, car sans doute est-il bien difficile de l'admettre. Il semble plus aisé de se persuader que l'activité bénévole est avant tout orientée vers l'autre et pour l'autre. Ils inscrivent « ce faire dans un faire pour - (ceux pour qui ils font) et dans un faire avec (ceux avec qui ils font) », relève Maud Simonet-Cusset (2004 : 249)91(*). En filigrane cependant, la dimension religieuse se profile toujours derrière ce rapport à l'autre, digne héritier de la charité chrétienne. Liberté et gratuité du geste l'attestent et les personnes que j'ai rencontrées exercent d'ailleurs leurs talents bénévoles dans la sphère religieuse.

Les freins à l'engagement concerneraient surtout la peur de manquer de temps, la crainte d'être exploité plus que de mesure et de perdre cette liberté revendiquée après toute une existence de contraintes horaires professionnelles. C'est à cela précisément que sont farouchement attachés les retraités. Le manque de temps en effet est invoqué pour expliquer en quoi leur motivation serait susceptible de révision, justification présente dans les discours des retraités qui veulent réserver un espace temporel à leurs petits-enfants. Et puis il y a les limitations physiques, la santé précaire qui pourrait affecter le rythme de l'engagement et freiner les ardeurs bénévoles, comme le reconnaît Claude : « À partir du moment où on se sent en bonne santé et où il n'y a pas de problèmes physiques, il n'y pas d'appréhension alors que quand tu commences à avoir quelques problèmes de ci, de là, tu commences à te dire que ça va peut-être effectivement être plus difficile, alors bon on est obligé de ralentir le rythme et d'en tenir compte... ».

Pour Pierre, pour Claude et Jean, le bénévolat à la retraite s'inscrit dans une logique du don ancrée dans leur éducation religieuse. Les termes de « devoir », « réciprocité » sont centraux dans leur discours.

b) Passage à la retraite : craintes ?

La retraite de par la rupture qu'elle impose, serait-elle un événement incitatif à l'engagement bénévole ?

Dans les différents entretiens et les conversations, le passage de la vie active à la retraite n'est pas présenté comme une épreuve difficile pour ces personnalités dynamiques. Si certains l'ont anticipé, préparé, Jean l'a même espéré : « [...] j'étais bien content. Et j'ai regretté qu'une seule chose, c'est de ne pas avoir pu le faire avant ! », exprime-t-il au sujet de sa mise à la retraite. Pour Claude, ni cassure, ni rupture, mais continuité entre ses activités professionnelles et bénévoles. Retraite un peu à la carte, il a changé de profession au cours de sa carrière et les dernières années précédant sa retraite ont préparé celle-ci. Passage en douceur qui n'a rien modifié à son emploi du temps, conforme au modèle de la transition-reproduction décrit par Thierry (2007). L'existence de Pierre quand à elle, a toujours été rythmée par des activités bénévoles ou militantes à travers l'engagement syndical et dit-il « il a toujours relativisé le sens de son travail ».

c) Bénévolat = travail ?

Pour distinguer travail et bénévolat, l'absence de contrainte horaire et la marge de liberté inexistante dans le monde professionnel semblent être les critères déterminants. Les bénévoles n'évoquent aucunement la qualification ou des compétences spécifiques comme éléments de choix pour opposer travail et bénévolat. Être bénévole c'est travailler, sans rémunération. Jean aime d'ailleurs à souligner comment son engagement suscite interrogation, voire même suspicion : « [...] la plupart des personnes ne comprennent pas que cela puisse être fait gratuitement. Ils s'imaginent qu'on est payés ! ». Il est un « outsider » au monde du travail, un dissident qui attise les regards soupçonneux (Ferrand-Bechmann, 2000; Simonet-Cusset, 2004). Pour lui, aucune différence entre sa profession de préparateur en pharmacie et son activité bénévole au sein de l'association où il a également affaire avec les médicaments, si ce n'est le temps moindre qu'il y consacre : trois fois par semaine. Il en parle comme d'un travail, et pour unique salaire, la reconnaissance, « des grâces ! », dit-il en riant.

d) Retraite = vieillesse ?

Ils ne se sentent pas âgés, les retraités bénévoles que j'ai rencontré et pour eux, la vieillesse est un processus dont la dynamique est dépendante des activités exercées, lesquelles sont largement sensibles aux capacités physiques et intellectuelles. Les limitations du corps, la dégradation de l'état de santé, les difficultés de mobilités sont signalées en premier comme étant les marqueurs qui font basculer dans le vieillissement et viennent freiner de fait l'engagement bénévole. Tant qu'on peut rester actifs, vieillir se rapproche davantage d'une accumulation des ans plutôt que d'un changement d'état (Caradec, 2008), dans une perception du vieillissement étroitement dépendante du regard d'autrui (Puijalon et Trincaz, 2000), comme le souligne Pierre « personnellement, vis-à-vis de ceux qui nous entourent, on sent qu'on prend de l'âge ». Étant donné que la personne âgée, c'est celle qui ne fait rien et qui réduit ses contacts sociaux, leur activité bénévole semble les exclure de cette catégorie. Les stéréotypes de repli, de retrait, d'apathie sont très accrochés à la vision négative de la vieillesse et les bénévoles luttent contre ces images en revendiquant une jeunesse d'esprit. La personne âgée, c'est l'autre. Fanny porte un regard plein d'optimisme sur cette question du vieillissement : « Je ne suis pas dans une étape où je me dis, bon ça y est je vais tomber par terre. Je sais que je vais tomber par terre, ça c'est prévu, pour tout le monde. Il n'y a pas d'âge. J'ai perdu un enfant qui n'avait que 25 jours et lui n'attendait qu'une chose, c'était de vivre. J'ai pas peur de la mort. J'ai peur de souffrir. Je ne suis pas dans un état de dire, je ne sers plus à rien. Non, je ne suis pas dans cet état-là. Or, je sais qu'il y en a pas mal qui sont comme ça. »

L'exemple de l'association JA, est suffisamment éclairant de cette volonté qu'ont les retraités à refuser l'étiquette de «personne âgée». Dans le camp VTT qu'ils organisent, chacun des acteurs bénévoles, du plus jeune au plus ancien a été « rebaptisé » d'un nom assorti d'une couleur spécifique de tee-shirt, sorte de titre teinté d'une touche humoristique pour marquer le rôle et la fonction occupée dans le camp. Ainsi, les tee-shirts rouges correspondent aux « TTV » acronyme de « Très très vieux », titre décerné au groupe majoritairement constitué de bénévoles retraités. Le mécontentement de ces derniers est palpable, à demi avoué. Ils rechignent toutefois à l'exprimer « officiellement », bien qu'en coulisses, ils déplorent cette appelation jugée stigmatisante.

3.5.2 - Savoirs mobilisés à travers l'engagement bénévole.

L'engagement bénévole implique la mobilisation de savoirs, de capacités pour mener à bien un projet, une entreprise, réaliser des objectifs. On apprend mais on réinvestit et on transmet également des compétences acquises ailleurs. Les acteurs engagés sur le terrain qu'il soit associatif ou informel n'ont pas toujours conscience que ces apprentissages ont lieu. Il n'y a pas d'intention d'apprendre. Et lorsqu'ils apprennent ou expriment le désir d'acquérir des connaissances, c'est à des fins utilitaires, pour mener à bien l'action dans laquelle ils se sont engagés.

De toute évidence, les retraités possèdent de l'expérience, des compétences qu'ils vont exploiter à travers leur pratique bénévole. Que cette réalité soit explicitement formulée, en tant que volonté annoncée de transmettre quelque chose ou qu'elle fonctionne comme moteur à l'engagement, comme c'est le cas pour Fanny : « Lorsque j'ai pris ma retraite, je suis venue ici dans le département et je ne me voyais pas tellement rester là (j'ai encore la tête, j'ai des bras, des mains) j'ai des choses à donner ou peut-être à communiquer ou à transmettre, (je ne sais pas) sur plusieurs points de vue. C'est pas à donner des choses et obliger les gens, mais à parler, discuter et à dire d'autres choses que ce qu'on connait dans nos coins; c'est pour cela que j'ai voulu m'occuper des jeunes ». Pour Dan Ferrand-Bechmann (2008)92(*), « les capacités et les savoirs acquis dans des engagements sont d'ordre diffus et confus » (p. 58). Confrontés à des problématiques diverses, les bénévoles que j'ai rencontré ont développé, consolidé et/ou transmis des compétences dans trois domaines divers étroitement liés et qui interagissent (Ferrand-Bechmann, 2008) : des savoir-faire, des savoir-agir, des savoir-être et parmi ces derniers, des savoir-passer (Lesourd, 2008).

a) Des savoir-faire...

Ils sont de l'ordre des savoir-faire techniques, des « trucs », des idées innovantes soudain nécessaires pour résoudre un problème ou conduire une action précise, savoirs appris nulle part qui résultent ici même de l'interaction entre une situation précise et une solution à trouver. Par exemple, Claude, retraité bénévole dans l'association JA et responsable du tracé du parcours en VTT et de son bon fonctionnement met au point un système de gommettes multicolores qu'il colle sur les cartes routières distribuées aux différentes équipes en charge de la sécurité des pédalants. Les équipes sont nombreuses - toutes composées de bénévoles - qu'il faut « manager » impérativement et les aiguiller vers des sentiers sur lesquels ils sont susceptibles d'intervenir. Claude n'était pas spécialisé dans ce domaine auparavant. Certes, il avait l'habitude de diriger une équipe lorsqu'il était entrepreneur, et il puise dans ses ressources acquises au cours de sa carrière professionnelle pour conduire sa tâche. Mais il doit accepter aujourd'hui de confronter son savoir à un alter ego, puisque son poste de responsable ne lui octroie plus les mêmes droits officiels qu'il était légitimé à revendiquer dans sa carrière professionnelle. En tant que bénévoles, les voilà tous sur un « même pied d'égalité ».

Certains transfèrent des compétences professionnelles qu'ils réinvestissent dans la pratique bénévole, à l'image de Jean, jeune retraité qui a officié pendant une quarantaine d'années comme préparateur en pharmacie et qui aujourd'hui collecte des médicaments pour les envoyer dans les pays du Tiers-Monde, l'Afrique essentiellement. Il supervise le tri des médicaments, enseigne à ses collaborateurs bénévoles. Les liens tissés au sein de l'association l'ont même récemment incité à participer en tant que brancardier à l'accompagnement des malades au pèlerinage de Lourdes où il était responsable de la distribution des médicaments tous les matins. Ou encore Georges, sémillant septuagénaire, demain octogénaire, devenu visiteur de prison lorsqu'il prend sa retraite de juriste, venant exercer là une activité complémentaire voire compensatoire à son ancienne profession, en passant de l'autre côté des barreaux : « Le plus mauvais souvenir de mes études juridiques, c'est le droit pénal. Le droit pénal, ça c'est pas intéressant ! ». En revanche, son expérience du bénévolat lui a apporté beaucoup. Sa connaissance du milieu carcéral a fait de lui une personne toute désignée pour visiter des détenus dont il est même devenu proche, quand sa profession d'hier l'empêchait de cultiver cette proximité relationnelle. Compétences différemment exploitées aujourd'hui, mais qui n'en constituent pas moins des bases favorisant un authentique dialogue avec des prisonniers reconnaissants.

b) Des savoir-agir...

Le savoir-agir est « une capacité à exercer un changement sur la structure sociale dans laquelle on évolue et à diriger ce changement » (Dan Ferrand-Bechmann, 2008 : 55). La prise de décision dans les moments opportuns, les responsabilités engagées à travers l'action sont sollicitées et requises dans la pratique bénévole à chaque étape de l'action. Au départ, il n'y a pas forcément de résultat. C'est un peu une plongée dans l'inconnu comme le formule Pierre : « Moi j'étais bon face à un industriel pour lui vendre mon gaz ou mon électricité, mais j'étais très mauvais concernant le Conseil Général ». Puis, il y a les apprentissages, l'observation des autres, ceux qui ont l'expérience : «  Il y a le savoir et la découverte de talents insoupçonnés de l'expérience de négociatrices de ces femmes qui me dépassait énormément face à ce type d'interlocuteurs », dit-il encore.

c) Des savoir-être...

D'après Martine Dorange (2003)93(*), ce que peuvent transmettre les aînés, bien plus que les savoir-faire qui sont dans une société du progrès rapidement obsolètes et dévalorisés, ce sont des savoir-être, fruits de l'expérience de toute une vie. Selon l'enquête réalisée par l'auteur, les jeunes exprimeraient leurs souhaits dans ce sens : compréhension, tolérance, écoute, conseils, des attentes essentiellement axées autour du comportement. Et cela vient confirmer les propos de Fanny « je crois que les jeunes ont besoin de plus d'écoute », dit-elle. La majeure partie de son discours repose sur ce point fondamental. L'écoute, l'apprentissage du respect, celle de la patience pour accepter l'autre, voilà ce qu'elle a glané au cours de son existence et ce dont elle entend faire profiter autrui, c'est-à-dire le groupe de jeunes qu'elle accompagne : « L'expérience, des trucs de la vie, des trucs où tu te casses le nez. Moi c'est l'Afrique qui m'a beaucoup ouvert l'esprit. D'autres civilisations en face de moi, des façons d'être heureux différemment de moi, de vivre différemment de moi. [...] ils m'ont donné une ouverture d'esprit terrible. Là, ils m'ont fait un bien immense, immense ! Et puis, l'expérience de la vie... Des trucs qui me sont tombés sur la figure, plein de choses, qui font qu'à un moment donné, tu vois autrement. ».

Entre les bénévoles eux-mêmes, les savoir-être sont requis pour articuler des logiques d'actions distinctes voire contradictoires et qu'il convient d'agencer de manière optimale. L'apprentissage de la négociation, la discussion, la confrontation des points de vue, toutes capacités convoquées lors du travail collaboratif entre bénévoles, mais également entre bénévoles et bénéficiaires. « Le rapport au savoir est souvent affectif et relationnel dans les associations » (Ferrand-Bechmann, 2008 : 59). L'émotion intervient dans l'acte d'apprendre; le bénévole s'implique dans ses activités et les obstacles rencontrés tout comme les réussites ont une résonance particulière pour le sujet qui va devoir articuler désir et frustration en fonction du succès ou non de ses projets. Présence attentive, écoute sensible, encouragements, autant d'attitudes qui viendront renforcer et maintenir une motivation parfois défaillante. « On forme une équipe ! », m'a dit un bénévole au sein de l'association JA. « Heureusement qu'il y a avait R... pour m'aider, sinon, je ne sais pas comment j'aurais pu me débrouiller » a dit un autre de la même association en évoquant une situation complexe à gérer.

Fanny véritable « passeur », construit un pont entre les générations, entre les retraités qu'elles côtoient au MCR et les jeunes qu'elle accompagne à l'aumônerie. Ici, non seulement elle puise dans les « savoir-passer » (Lesourd, 2008)94(*) qu'elle a acquis au cours de sa vie, lorsqu'elle a dû s'adapter aux « accidents existentiels », mais elle tente surtout de les transmettre aux autres en utilisant du bricolage créatif à sa façon : « C'est comme des graines que tu vas lancer. L'action n'est pas de suite. Ces graines vont mourir. Et plus tard, ces graines, elles reviennent, elles sont là. », dit-t-elle pour expliquer sa façon de gérer les conflits rencontrés dans la vie.

d) Des savoirs qui manquent ?

Au fil du temps, quelques bénévoles bien que portés par une longue expérience existentielle et professionnelle, admettent que certaines connaissances leur font défaut. C'est le cas de Pierre qui a dû se plonger dans différentes lectures et parfaire sa culture juridique « J'ai dû d'abord m'acheter les livres de comptabilité (rires) et puis les livres de droit pour connaître les responsabilités des uns et des autres en tant que conseil d'administration, c'est sûr ! », ou Jean qui avoue parcourir plus régulièrement le Vidal pour vérifier le nom de certains médicaments ce qui a permis, alors qu'il a effectué toute sa carrière en pharmacie d'acquérir de nouvelles connaissances, « ...ce qui m'embête le plus, ce sont les génériques, parce que c'est le nom de la molécule... [...] j'ai fait beaucoup de progrès pour ça, parce que maintenant j'en connais énormément de noms !». Ou Claude enfin, qui déplore l'insuffisance de son savoir en informatique dans« l'utilisation de l'ordinateur pour me servir du logiciel du profil en long ou des trucs comme ça, je sais que ça existe, je sais comment ça fonctionne, mais je ne sais pas l'utiliser... ». Tôt ou tard, il l'affirme, il faudra qu'il s'y mette. Parfois, ce sont les autres qui incitent à l'effort telle que Fanny qui est devenue une « manie net », surfant allègrement sur la toile, parcourant les sites dédiés aux adolescents pour affiner ses conceptions du monde de la jeunesse, se documenter sur les préoccupations des filles et garçons d'aujourd'hui, s'approcher au plus prés de leur vision actuelle afin de mieux les comprendre, pour mieux les aider.

3.5.3 - De l'importance de la présence de l'Autre.

« Le sujet se construit dans des interactions avec l'autre, car il n'y a pas d'auto, de je sans inter », (Barbot, 2008)95(*). L'autre est source d'enrichissement, bien que les contacts soient insuffisants à créer la véritable rencontre (Abdallah-Pretceille, 1999)96(*). De tous ces savoirs mobilisés, ceux qui apparaissent dans les discours des bénévoles comme étant les plus importants sont les savoir-être. Les capacités d'écoute sont mentionnées dans chaque entretien comme étant primordiales pour établir la relation à l'autre. Et elles se construisent par l'expérience, la confrontation aux personnes dans de multiples contextes à travers la diversité des rencontres. Il semble presque évident aux bénévoles que leurs activités altruistes convoquent la figure de l'altérité comme le coeur de leurs actions et l'origine de leurs motivations. « Si il n'y avait pas l'autre, il n'y aurait pas de bénévolat. L'autre explique notre bénévolat », affirme Annie avec conviction.

La compétence interculturelle ne peut s'exercer qu'au sein des communications interpersonnelles dans des expériences partagées avec d'autres individus. Ici, il faut évoquer l'interactionnisme comme théorie car ainsi que le rappelle Barbot (2006)97(*) "l'autre me révèle à moi-même et me modifie et l'autre se modifie en regard" (p.173). Être compétent sur un plan interculturel implique d'être capable de se décentrer pour entrer en contact avec un autre, opération qui exige des qualités d'empathie. Les savoirs élaborées dans ce domaine sont peut-être alors les savoirs qui comptent le plus. Échange, dialogue, rencontres, convivialité, contacts, être membre d'une équipe sont des termes récurrents qui témoignent de l'accent particulier que mettent les retraités dans leurs fonctions bénévoles. Ce moment de la vie est privilégié à cet égard; il semblerait en effet, que les différents témoignages confirment cette tendance de la prégnance de l'autre et des espaces nouveaux de sociabilité qu'offrent le terrain associatif, dans cette période de rupture que représente la retraite.

L'autre également est à l'origine des gratifications symboliques. Ainsi que le formule Gagnon & co. (2004)98(*), le bénévolat serait une expression de l'individualisme. Le monde moderne impose de se recomposer sans cesse une identité et pousse l'individu à rechercher la confirmation des ses choix et de ses valeurs à travers la reconnaissance. La pratique bénévole pourrait remplir ce rôle de recomposition de l'identité; motivations altruistes et plus personnelles (acquisition de compétences, relations...) participeraient de « cette recherche de construction de soi dans et par la relation à l'autre »99(*). Jean l'explique bien lorsqu'il dit recevoir « des grâces » en faisant référence à la présence de l'autre, cet autre sans qui, exercer des activités parfois très fatigantes n'aurait pas d'intérêt. Jean s'investit dans des actions bénévoles « par amour du prochain » dit-il, et pour lui « c'est vraiment du bénévolat, du bénévolat à 120% ».

Pour Abdallah-Pretceille (1999)100(*), l'hétérogénéité au sein des groupes est la norme et la diversité culturelle se vit au quotidien dans toutes les structures et organismes, lieux de rencontres multiples et d'échanges sociaux. Il devient nécessaire d'en tenir compte, de la prendre en considération afin de permettre dialogue et vraie rencontre pour une reconnaissance mutuelle de l'altérité envisagée comme une richesse et une possibilité de croissance de l'être humain. La prise en compte du fait interculturel est ici centrale puisqu'il ne s'adresse pas uniquement aux contacts entre nationalités différentes, mais il est le fait de tous les groupes sociaux : cultures générationnelles, sociales, professionnelles, religieuses. Toute personne est concernée, chaque individu se situant au carrefour de cultures multiples qui s'enchevêtrent incessamment. Notion dynamique, la culture s'exprime à travers les individus, et il serait plus juste de parler de cultures au pluriel, tant il est vrai que les individus appartiennent simultanément à plusieurs groupes. Et le groupe favorise et facilite cette élaboration commune de savoirs construits dans l'action.

Conclusion.

Les retraités en s'engageant dans une pratique sociale telle que le bénévolat, contribuent au bien-être collectif. Ils mettent à disposition d'autrui des savoirs - savoir-faire, savoir-être, savoir-agir - des compétences, des expériences, en acquièrent également pour les besoins de l'action. La vie ne s'arrête pas avec la retraite, et l'éducation se poursuit jusqu'à la mort.

Si les retraités s'engagent dans une activité bénévole, c'est avant tout pour se rendre utile aux autres, « rendre ce que l'on a reçu », étant le leitmotiv qui revient dans chaque entretien. Ce souhait de se rendre utile correspond à celui avoué ou non de continuer à jouer un rôle dans une société qui exclut rapidement ceux qui sortent du circuit du travail. Il ne s'agit pas uniquement de « remplissage », de combler un vide consécutif à l'arrêt d'un métier prenant ou de s'imposer un cadre temporel. Il y a de l'ordre de quelque chose d'autre, tel que donner du sens à sa vie, dans une période définie par une rupture, la retraite. Toutes les personnes que j'ai rencontrées évoquent leurs compétences, expériences professionnelles mais peut-être plus encore cette expérience de la vie qu'ils entendent mettre à profit intelligemment et surtout qu'ils souhaitent transmettre. Car quelle que soit l'activité bénévole qu'ils ont choisie, s'esquisse en toile de fond cet impérieux besoin de donner, d'échanger, de « faire part ».

Ils sont retraités dit-on; mais pas retraités de la vie. Au contraire, leur engagement dans toutes les formes qu'il peut prendre est profond, et si plaisir et convivialité sont mentionnés, il n'y a pas là que la recherche d'un loisir un peu original qui viendrait compenser un besoin narcissique insatisfait ou éventuellement mis à mal par le fait d'être écarté du monde du travail, mais bien une volonté réelle et sincèrement exprimée de « servir encore à quelque chose », et peut-être surtout d'expérimenter une nouvelle façon d'exister, de procurer un sens à cette troisième partie de la vie par la recherche d'une « reconnaissance dans une société qui demeure foncièrement productiviste » (Puijalon et Trincaz, 2000 : 235). Car ces bénévoles sont ancrés dans le concret, acteurs de terrain proches et attentifs aux autres, directement aux prises avec les réalités sociales dont ils deviennent, de par les multiples savoirs mobilisés, des « experts ».

Gardons-nous toutefois de tout angélisme autour du bénévolat des retraités, lequel ne serait qu'altruisme et solidarité et ne négligeons pas le poids des normes sociales, l'intervention des représentations autour du « bien vieillir », ainsi que la crainte toujours vivace d'être exclu de la société. Ces éléments sont actifs dans l'engagement bénévole, qu'ils soient explicitement cités ou en filigrane dans les motivations. Et finalement, la diversité des processus à l'oeuvre dans le social, celle des trajectoires individuelles n'autorisent pas la formulation d'une conclusion explicative sur les raisons de s'engager.

Grâce à l'approche compréhensive qui est ici privilégiée, j'ai cherché à saisir à travers les discours des retraités quels savoirs étaient mobilisés. Ils sont, on l'a vu, multiples et variés, mais tous ont en commun de participer à construire du lien social à une période de la vie souvent assimilée avec retrait social.

Apports de cette note de recherche.

Interroger la construction/production des savoirs chez les retraités dans leur engagement bénévole, c'est explorer le paradigme de l'éducation tout au long de la vie autrement qu'à travers l'éducation permanente des adultes. Les personnes retraitées que j'ai rencontrées considèrent que leur vie sociale n'est pas mise entre parenthèses avec l'arrivée de la retraite. Il ne s'agit nullement d'une mise en retrait puisque aujourd'hui retraite et entrée dans la vieillesse ne correspondent plus. Leur bonne santé, leur dynamisme intact les poussent à faire quelque chose de ce temps de vie dégagé des responsabilités professionnelles et familiales (souvent les enfants ont quitté le domicile). Ils ont plus que jamais envie d'être acteur de la société, d'y exercer un rôle parce qu'ils considèrent que leur expérience de vie peut être un apport intéressant pour autrui. Et un des espaces privilégiés pour que puisent s'exprimer ces connaissances qu'ils revendiquent est le monde du bénévolat, le cadre associatif, la participation citoyenne. En même temps, il y a cette volonté avouée ou non de contrer les stéréotypes de la personne âgée, du retraité qui sont toujours actifs dans l'imaginaire et auxquels ils ne veulent plus correspondre. Enfin, dans une société dite individualiste, force est de constater que l'impératif de l'épanouissement personnel, de la réalisation de soi, de cette nécessité d'être autonome atteint également ce moment de la vie, encourageant à saisir l'espace et le monde bénévole pour satisfaire ces exigences existentielles.

Le monde du bénévolat, le monde associatif réservent des espaces qui sont l'occasion formelle (réunions de travail, réunions de préparation autour d'un projet) et informelle (conversations) de transmettre et d'acquérir des savoirs.

Pistes de recherche pour le M2.

Cette note de recherche n'est qu'une première étape d'un travail plus complet sur les savoirs que mobilisent les retraités bénévoles et à partir de laquelle, il est possible de dégager une piste de recherche supplémentaire qui pourrait être idéalement explorée dans le cadre du mémoire de Master 2. Il est ainsi clairement apparu que les savoir-être constitués par les compétences sociales et interculturelles, les capacités relationnelles, occupent une place primordiale dans la pratique bénévole puisqu'ils interviennent au niveau de l'incitation à s'engager et ce sont ceux-là de plus qui sont prioritairement mobilisés et privilégiés lors des différentes activités.

En lien avec l'hypothèse principale qui suppose que le bénévolat à l'heure de la retraite mobilise une diversité de connaissances, compétences, expériences, et cela, essentiellement à travers les interactions qui ont lieu au cours de l'action et pour les besoins de celle-ci, je m'intéresserai à la place de l'autre, au rôle qu'il est amené à jouer dans la construction de ces savoirs diffus. Autrui se situe d'emblée, on l'a vu, au coeur de l'engagement, puisqu'il en est le moteur, une des motivations premières, une incitation à l'action et le garant de la pérennité du bénévolat. Mais il intervient également dans la mobilisation de ces savoirs, ceux-ci étant co-construits au sein d'un collectif qui apporte à la fois sécurité et soutien et la condition pour la réalisation des diverses actions entreprises par les bénévoles. C'est l'accent sur les aspects de ce travail collaboratif des bénévoles que je souhaite marquer en questionnant le rôle joué par l'autre, la place de la communauté dans les apprentissages liés au travail bénévole.

Postuler une spécificité de la pratique bénévole des retraités en termes de mobilisation de savoirs axés sur les savoir-être, les compétences sociales et interculturelles, est la voie que je me propose donc d'explorer dans le mémoire prochain du Master 2. Même si les retraités que j'ai rencontrés ont toujours à coeur de connaître, de découvrir de nouveaux savoir-faire, d'autres tours de mains, ce qu'ils paraissent rechercher avant tout, c'est bien le contact humain et à travers lui, la mise en acte d'une solidarité effective qui passe par un besoin de transmettre à l'autre de l'expérience de vie. Peut-être que la retraite au niveau des représentations s'esquisse comme la « dernière ligne droite » de l'existence, l'ultime chemin où il est possible de faire quelque chose d'utile, de servir à quelque chose et surtout à quelqu'un, à quelques uns.

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Lévinas, E. (1982) Ethique et infini, Paris, Librairie Arthème Fayard, 1990

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Prouteau L. et Wolff F.-C., Hors thème. La participation associative et le bénévolat des seniors, Retraite et société 2007/1, n° 50, p. 157-189. Site : cairn

Puijalon, B. & Trincaz, J. (2000) Le droit de vieillir. Éditions Fayard.

Racine, G. (2000) La production de savoirs d'expérience chez les intervenants sociaux. Le rapport entre l'expérience individuelle et collective, Paris, Editions L'Harmattan.

Richard, L., Gagné, J., Lehoux, P. (2006) « S'engager à titre de collaborateur bénévole dans un projet de recherche participative : les motivations d'un groupe d'aînés, Service social - Vol.52, n°1, p. 17-30. Site : http://id.erudit.org/iderudit/015952ar

Robichaud, S. (2003) Le bénévolat. Entre le coeur et la raison. Chicoutimi, Québec, Les Editions JCL inc., septembre 2003. Site : http://www.uqac.uquebec.ca/zone30/Classiques_des_sciences_sociales/index.html

Rosenmayr, L. « L'image de la vieillesse à la naissance de l'Europe », Retraite et société, 2001-3 (n°34), p. 11-27.

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Thierry, D. (2007) L'engagement bénévole des retraités : une implication réfléchie, sur www.francebenevolat.org.

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Vermeersch, S. (2004) Entre individualisation et participation : l'engagement associatif bénévole, in Revue française de sociologie, 2004/4 (Volume 45) sur CAIRN.

Vidal, Ph. (2003) « Les 55-65 ans confrontés à l'usage des technologies de l'information et de la communication, une génération de transition ? » Empan, 2003/4 (n°52). Site : www.cairn.fr

Voegtli, M. (2004) « Du Jeu dans le Je : ruptures biographiques et travail de mise en cohérence », Lien social et Politiques, n°51, p. 145-158. Site : http://id.erudit.org/iderudit/008877ar

Weber, S.(2003) Avec le temps... De la vieillesse dans les sociétés occidentales et de quelques moyens de la réhabiliter, Les Editions Libertaires.

Weigand, G. (2008) La Bildung : un concept fondamental en pédagogie, Conférence vidéo du 13 mai 2008. Paris 8 - UFR Sciences de l'Education, Psychanalyse, Français Langue Etrangère,

ANNEXES

Annexe n°1 : Grille d'entretien.

OBJECTIFS

QUESTIONS

EXEMPLES

Retraite et vieillissement

Passage à la retraite (depuis combien de temps...)

Choix, départ forcé ?

Vécu, préparation, appréhension

 

Images de la vieillesse et auto-perception

Vieillesse vue comme un processus, état, altération des capacités...

Motivations du bénévolat

Lesquelles ?

Depuis combien de temps ?

Bénévolat avant la retraite, à partir de la retraite...

 

Pourquoi le faisiez-vous/le faites-vous, type d'activités

Freins ?

Pour aider d'autres personnes, pour le plaisir, pour rencontrer des gens ? Pour être utile, donner du sens

 

L'engagement, une occasion de créer des liens, d'apprendre, de développer des habiletés ?

Apprendre à fonctionner en groupe, apprendre quelque chose,assumer de nouvelles responsabilités

 

Temps consacré au bénévolat ?

Rôle du conjoint, de la famille, place pour autres activités

Apprentissages et bénévolat

Types d'apprentissages réalisés?

Investissement dans une activité rémunérée ou défrayée

Savoir-faire pratiques (Internet, TIC...), savoir-être négociation, compétences sociales, dialogues), savoir-agir (prise de décisions, responsabilités nouvelles...)

 

Liens avec compétences antérieures et/ou professionnelles

Savoirs transférés

Dispositions acquises antérieures recyclées

 

Savoirs qui manquent ?

Internet, TIC...

Interactions avec autrui

Rôle de l'autre dans les apprentissages ?

Donne envie d'apprendre, aide, conseil, soutien...

 

Présence d'autrui : motivation ?

 

Résumé.

Cette note de recherche s'intéresse aux savoirs mobilisés dans l'engagement bénévole chez les retraités. Le moment de la retraite souvent vécu comme une rupture est en effet l'occasion de mettre au service des autres, les expériences et les compétences accumulées au cours de l'existence tout en faisant l'acquisition de nouveaux savoirs. L'accent ici, est mis sur la place d'autrui tant dans les motivations à s'engager que dans la mobilisation des savoirs.

En amorçant une réflexion autour du bénévolat des retraités, il s'agit surtout de comprendre comment le bénévolat « à la tombée du jour »101(*) en favorisant la production/construction de savoirs à travers l'interaction dans un contexte informel, s'inscrit de fait dans une éducation conçue tout au long de la vie et permet aux aînés de continuer à jouer un rôle actif dans la société.

Mots-clés : bénévolat - retraite - savoirs - vieillesse - éducation tout au long de la vie - âgisme - autrui

TABLE DES MATIÈRESSommaire. 4

Avant-propos. 5

Introduction. 7

1. PROBLÉMATIQUE. 9

1.1. Réflexion sur le sujet et question de recherche. 9

1.2. Choix de l'objet de recherche. 11

2. ASPECTS THÉORIQUES. 12

2.1. Précisions terminologiques. 12

2.2. La vieillesse : construction historique et culturelle. 13

2.1. La vieillesse à travers le temps... 13

...et à travers le monde. 14

2.2.2. De la vieillesse à l'âgisme. 14

2.2.3. Vieillissement : quelques chiffres. 16

2.3. La retraite. 16

2.3.1. Quelques chiffres. 16

2.3.2. Passage à la retraite. 17

2.3.3. L'éducation tout au long de la vie à l'heure de la retraite. 19

2.4. Le Métier de Bénévole à l'heure de la retraite. 21

2.4.1. Le bénévolat. 21

2.4.2- Production et construction des savoirs à travers la pratique bénévole. 23

2.4.3 La nécessité de l'Autre dans la motivation et les apprentissages. 25

2.4.4 - Un exemple. 27

2.4.5- L'engagement bénévole à l'heure de la retraite. 28

2.4.5 - Engagement bénévole et mobilisation des savoirs chez les retraités. 29

3- MÉTHODOLOGIE, TERRAIN ET ANALYSE. 30

3.1 - Approche qualitative et compréhensive. 30

3.2 - Le terrain de recherche. 32

3.2.1- Présentation de l'association JA. 32

3.2.2 - L'observation participante : Association JA. 33

3.2.3 - Entretiens semi-dirigés et conversations informelles. 33

a) Les conversations informelles : 34

b) Le choix des interlocuteurs. 35

3.3 - Précisions sur la démarche de recherche et sur les aspects méthodologiques : pour une analyse de mon implication dans les entretiens et l'observation participante. 35

3.4 - Présentation des sujets interviewés. 37

Claude. 37

Pierre. 37

Annie. 37

Georges 37

Jean 38

Fanny (E5). 38

3.4.1- Arrêt sur image : la participation bénévole de Fanny au CCFD (Comité Catholique contre la faim et pour le Développement) et le camp VTT organisé par l'association JA. 38

a) Portrait d'une bénévole au CCFD : Fanny. 38

b) Association JA et camp VTT. 40

3.5. Éléments d'analyse. 42

3.5.1. Le bénévolat à l'heure de la retraite. 42

a) Motivations à s'engager ? 42

b) Passage à la retraite : craintes ? 44

c) Bénévolat = travail ? 44

d) Retraite = vieillesse ? 45

3.5.2 - Savoirs mobilisés à travers l'engagement bénévole. 46

a) Des savoir-faire... 46

b) Des savoir-agir... 47

c) Des savoir-être... 48

d) Des savoirs qui manquent ? 49

3.5.3 - De l'importance de la présence de l'Autre. 50

Conclusion. 51

Apports de cette note de recherche. 52

Pistes de recherche pour le M2. 53

Bibliographie. 55

Annexe n°1 : Grille d'entretien. 59

Résumé. 60

* 1 Ferrand-Bechmann, D. (2008) « Se former en s'engageant dans la vie associative », in Colin, L. et Le Grand, J-L. (2008) [dir.] L'éducation tout au long de la vie, Economica Anthropos.

* 2 Cité par Brougère G., Bézille, H. 2007, "De l'usage de la notion d'informel dans le champ de l'éducation", Note de synthèse, Revue Française de pédagogie, n°158, Janvier- février -mars 2007, pp. 117-160.

* 3 Op. Cit. , Brougère G., Bézille, H. 2007, p. 154.

* 4 Dacheux, J-P. (2008) « Vieillissement et formation », in le Journal des Chercheurs, Intervention au cours du Séminaire DUFA, de l'Université Paris VIII ayant pour thème : « Le formateur d'adulte face à la formation continue des personnes âgées ».

* 5 Ibid., p. 41

* 6 Prouteau, L. et Wolff, F-C, (2006) La participation associative et le bénévolat des seniors, Retraite et Société.

* 7 Caradec, V. (2008) Sociologie de la vieillesse et du vieillissement, Armand Colin.

* 8 Ferrand-Bechmann, D. (2007) Vie associative et engagement. Éducation tout au long de la vie. Cours de Master 1, Education tout au long de la vie. IED, Université Paris 8.

* 9 Philibert, M. (1984) « Le statut de la personne âgée dans les sociétés antiques et préindustrielles », Sociologie et sociétés, vol. 16, n°2, p. 15-28. Site : http://www.erudit.org/revue/socsoc/1984/v16/n2/001553ar.pdf

* 10 Rosenmayr, L. « L'image de la vieillesse à la naissance de l'Europe », Retraite et société, 2001-3 (n°34), p. 11-27.

* 11 Arcand, B. (1982) « La construction culturelle de la vieillesse », Anthropologie et Sociétés, vol. 6 n°3, pp. 7-23. québec : Département d'anthropologie, Université LavaL. Site : http://classiques.uqac.ca/contemporains/arcand_bernard/construction_culture_vieillesse/vieillesse.html

* 12 Cité par Kern, D. (2002) L'intégration des personnes âgées dans la vie sociale de la ville. Mémoire de DESS développement Social Urbain non publié, Université d'Evry. : http://perso.numericable.fr/sitedurtf7/publications.htm

* 13 Coudin G. Beaufils B. et Henrard J-C. «Au-delà des stéréotypes », Le Journal des Psychologues, avril 98, No 156 pp. 26-29, p. 17, cité par KERN.

* 14 Goffman, E. (1963/1975) Stigmates, les usages sociaux du handicap, Éditions de Minuit.

* 15 Weber, S.(2003) Avec le temps... De la vieillesse dans les sociétés occidentales et de quelques moyens de la réhabiliter, Les Editions Libertaires.

* 16 Puijalon, B. & Trincaz, J. (2000) Le droit de vieillir. Éditions Fayard.

* 17 Caradec, V. (2000) La diversité des usages des technologies. Étude auprès de couples à la retraite et de personnes veuves, Rapport pour la DREES-MiRe, la CNAV et le GRETS/EDF, janvier 2000.

* 18 Cité par Guérin, S.(2002) L'invention des seniors, hachette Littérature, 2007;

* 19 Godet, M. et Mousli, M. (2006) « Vieillissement, activités et territoires à l'horizon 2030 », Rapport du conseil d'analyse économique n°63 (CAE). Paris, La Documentation française, 2006

* 20 Alaphilippe, D. Gana, K. et Bailly, N. (2001) Le passage à la retraite : craintes et espoirs, Connexions, 76/2001-2

* 21 Guérin, S. (2007) L'invention des seniors, Hachette Littératures.

* 22 Ibid., Guérin (2007)

* 23 Davoine, L., et Méda, D., Place et sens du travail en Europe : une singularité française ?, Document de travail, N° 96-1, février 2008, Centre d'études de l'emploi. Site : http://www.cee-recherche.fr/fr/doctrav/travail_europe_96_vf.pdf

* 24 Grosjean, M-F. (2003) Chômeur et bénévole, Thèse de doctorat de sociologie et sciences sociales sous la direction de Claude Giraud, Faculté d'Anthropologie et de Sociologie, université Lumière Lyon II. Site : http://demeter.univ-lyon2.fr/sdx/theses/these/lyon2/2003/grosjean_mf/pdf/grosjean_mf.pdf

* 25 Op. Cit., Puijalon et Trincaz, 2000.

* 26 Caradec, V. (2008) Sociologie de la vieillesse et du vieillissement, Armand Colin, 2 ème édition.

* 27 Vankemmel, A. (2006) « Retraite et recomposition des temps de vie et des identités : le cas des retraités du milieu associatif », Dire le monde social : les sociologues face aux discours politiques, économiques et médiatiques, Bordeaux, du 5 au 8 septembre 2006.

* 28 Colin, L. et Lapassade, G. (2008) « De l'entrée dans la vie à une éducation tout au long de la vie ». Entretien avec Georges Lapassade, in Colin, L. et Le Grand, J-L. (2008) [dir.] L'éducation tout au long de la vie, Economica Anthropos.

* 29 Mezirow, J. ((2001) Penser son expérience, développer l'autoformation. Lyon : Ed. De La Chronique Sociale.

* 30 Ibid., p. 184

* 31 Colin, L. (2008) « Passer les frontières : une éducation tout au long de la vie ? » in COLIN, L. et Le GRAND, J-L. (2008) [dir.] L'éducation tout au long de la vie, Economica Anthropos.

* 32 Deriaz, M. (2005) A propos des apprenants ainés. Une contribution pour défaire les mythes qui entourent la vieillesse. Site : http://plasticites-sciences-arts.org/PLASTIR/Deriaz%20P9.pdf

* 33 Weigand, G. (2008) La Bildung : un concept fondamental en pédagogie, Conférence vidéo du 13 mai 2008. Paris 8 - UFR Sciences de l'Education, Psychanalyse, Français Langue Etrangère

* 34 Le Grand, J-L. (2008) « L'histoire de vie comme anthropologie existentielle critique », in Colin, L. et Le Grand, J-L. (2008) [dir.] L'éducation tout au long de la vie, Economica Anthropos.

* 35 Boutinet, J-P, Carré, P., Kern, D. (2007) Proposition pour symposium : La formation tout au long des âges de la vie adulte : utopies et réalités. Les caractéristiques des apprentissages dans les phases de la vie adulte.

* 36 Vidal, Ph. (2003) « Les 55-65 ans confrontés à l'usage des technologies de l'information et de la communication, une génération de transition ? » Empan, 2003/4 (n°52).

* 37 Terzian, A. (2008) « Ressources et dispositifs technologiques au service d'une éducation tout au long de la vie ou Bien sûr que tu télécommuniqueras » in Education tout au long de la vie : approches critiques, Anthropos.

* 38 Op. Cit., Mezirow, 2001

* 39 Titre en référence à l'ouvrage de Dan Ferrand-Bechmann (2002), Op. Cit.

* 40 Ferrand-Bechmann, D. (1992) Bénévolat et solidarité, Paris, Syros-Alternatives.

* 41 Archambault, E. (2002), « Le travail bénévole en France et en Europe », Revue française des Affaires sociales, vol.56, n°4, décembre. Site : http://matisse.univ-paris1.fr/archambault/

* 42 Simonet-Cusset, M. (2004) « Penser le bénévolat comme travail pour repenser la sociologie du travail » in Ferrand-Bechmann, D. (2004) [dir.] Les bénévoles et leurs associations. Autres réalités, autre sociologie ? Paris, L'Harmattan, p.247-261.

* 43 Ferrand-Bechmann, D. (2007) « Vie associative et engagement. Éducation tout au long de la vie » in Cours de Master 1 « Education tout au long de la vie ». IED, Université Paris 8.

* 44 Vermeersch, S. (2004) Entre individualisation et participation : l'engagement associatif bénévole, in Revue française de sociologie, 2004/4 (Volume 45) sur CAIRN.

* 45 Godbout, J. T. (1994), « La sphère du don entre étrangers : le bénévolat et l'entraide », in Dumont, F., Langlois, S. et Martin, Y. [dir.] Traité des problèmes sociaux, chapitre 48, pp. 981-994. Québec : l'Institut québécois de recherche sur la culture, 1994, 1164 pp.

* 46 Gagnon, E., Fortin, A., (2002) « L'espace et le temps de l'engagement bénévole. Essai de définition. », in Nouvelles Pratiques Sociales, vol.15, n°2. Site : erudit.

* 47 Lévinas, E. (1982) Ethique et infini, Paris, Librairie Arthème Fayard, 1990

* 48 Lipovetsky, G. (1983) L'ère du vide. Essai sur l'individualisme contemporain. Éditions Gallimard, p.21.

* 49 Tchernonog, V. et Thiery, P. (2007) « Le Paysage associatif français » Stat-Info, Bulletin de statistiques et d'études, N°07-04, Ministère de La Santé, de la Jeunesse et des Sports.

* 50 Prouteau L. et Wolff F.-C., Hors thème. La participation associative et le bénévolat des seniors, Retraite et société 2007/1, n° 50, p. 157-189. Site : cairn

* 51 Op. Cit., Ferrand-Bechmann (2007).

* 52 Robichaud, S. (2003) Le bénévolat : entre le coeur et la raison, Chicoutimi, Québec, Les Editions JCL inc.

* 53 Citée par Brodiez, A. (2004) « Militants, bénévoles, affiliés, affranchis,... : de l'applicabilité historique des travaux sociologiques » in Ferrand-Bechmann, D. [dir.] Les bénévoles et leurs associations. Autres réalités, autre sociologie ? L'Harmattan, 2004.

* 54 Ferrand-Bechmann, D., (2008), « Se former en s'engageant dans la vie associative », in COLIN, L. et Le Grand, J-L. (2008) [dir.] L'éducation tout au long de la vie, Economica Anthropos.

* 55 Lochard, Y., Simonet-Cusset, M. (2003) [coord.] L'expert associatif, le savant et le politique, Paris, Editions Syllepse.

* 56 Ion, J. (2003) « Modes d'engagements et savoirs associatifs : petit coup d'oeil dans le rétroviseur », in Lochard, Y., Simonet-Cusset, M. (2003) [coord.] L'expert associatif, le savant et le politique, Paris, Editions Syllepse

* 57 Ferrand, C.[dir.] (2008), Le croisement des pouvoirs. Croiser les savoirs en formation, recherche, action, Paris, Les Editions de l'Atelier/Editions ouvrières, Les Editions ATD Quart Monde.

* 58 Ibid., p. 90

* 59 Abdallah-Pretceille, M. (1999) L'éducation interculturelle, Pairs, PUF.

* 60 Ferrand, C. [dir.] (2008), Le croisement des pouvoirs. Croiser les savoirs en formation, recherche, action, Paris, Les Editions de l'Atelier/Editions ouvrières, Les Editions ATD Quart Monde.

* 61 Op. Cit., Ferrand-Bechmann, 1992, p. 37.

* 62 Op. Cit., Colin, 2007

* 63 Op. Cit., Colin, 2007

* 64 Cité par Boutinet, J-P, Carré, P., Kern, D. (2007), Op. Cit.

* 65 Op. Cit., Colin, 2008.

* 66 Racine, G. (2000) La production de savoirs d'expérience chez les intervenants sociaux. Le rapport entre l'expérience individuelle et collective, Paris, Editions L'Harmattan.

* 67 Ibid., p. 74.

* 68 Balleux, A. (2000) « Évolution de la notion d'apprentissage expérientiel en éducation des adultes : 25 ans de recherche », Revue des sciences de l'éducation, vol. XXVI, n°2, p. 263-286.

* 69 Cité par Racine (2000).

* 70 Clenet, C. (2006) « L'accompagnement de l'autoformation expérientielle », In H.Bézille 1 B. Courtois (dir.), Penser la relation expérience-formation. Lyon :Ed. De la Chronique Sociale, p.125.

* 71 Arnaud, B. & Giordan, A, (coordonné par) (2002) Rapport d'étude « Nature de l'engagement bénévole dans les Réseaux d'Echanges Réciproques de Savoirs et de formation. Les différents types de bénévoles dans les RER et les formations spécifiques ». sur www.Ides.unige.ch.

* 72 Lave, J. (1991) Acquisition des savoirs et pratiques de groupe, Sociologie et sociétés, vol. XXIII (n°1), 145-162. Site : erudit

* 73 Ferrand-Bechmann, D. (2000) Le Métier de Bénévole, Anthropos, Ed. Economica.

* 74 Document de l'UNESCO « Les personnes âgées et l'éducation des adultes ». Site : http://www.unesco.org/education/uie/confintea/pdf/Fra_8a.pdf

* 75 Op. Cit., (2008)

* 76 Richard, L., Gagné, J., Lehoux, P. (2006) « S'engager à titre de collaborateur bénévole dans un projet de recherche participative : les motivations d'un groupe d'aînés, Service social - Vol.52, n°1, p. 17-30.

* 77 Prouteau L. et Wolff F.-C., Hors thème. La participation associative et le bénévolat des seniors, Retraite et société 2007/1, n° 50, p. 157-189. Site : cairn

* 78 Thierry, D. (2007) L'engagement bénévole des retraités : une implication réfléchie ! Site : francebenevolat.org.

* 79 Op.Cit., Simonet-Cusset (2004)

* 80 Ferrand-Bechmann, D. (1992) Bénévolat et solidarité, Paris, Syros-Alternatives.

* 81 Kaufmann, J-C. (2007) L'enquête et ses méthodes. L'entretien compréhensif, Paris, Armand Colin. 2Ème édition.

* 82 « JA » est le pseudonyme donné à l'association.

* 83 Direction Départementale de la Jeunesse et des Sports

* 84 Le Grand, J-L.(2006) Implexité : implications et complexité. Le Journal des Chercheurs. Site : http://www.barbier-rd.nom.fr/JLLeGrandImplexite.html

* 85 Ardoino, J. (1992) L'implication, publication Voies libres, Lyon : http://jardoino.club.fr/publications_2.htm#174

* 86 Hess, R. (2008) « L'écriture du journal et de la correspondance. Une éducation tout au long de notre vie » in Colin, L. et Le Grand, J-L. (2008) [dir.] L'éducation tout au long de la vie, Economica Anthropos.

* 87 Dont il sera réalisé un portrait si-dessous.

* 88 Voir le site : www.ccfd.asso.fr

* 89 Réponse d'un bénévole anonyme.

* 90 Op. Cit., Ferrand-Bechmann, 2000.

* 91 Op. Cit., Simonet-Cusset (2004)

* 92 Op. Cit., Ferrand-Bechmann, 2008, p. 58

* 93 Dorange, M., Grandir et vieillir : et si c'était cela transmettre ?... Passeurs de vie, d'histoire, d'identité, Intervention - Nanterre, 2003. Site : http://www.prix-chronos.org/theme/articles/pdf/art_13.pdf

* 94 Lesourd, F. (2008) « L'explicitation biographique des moments transformateurs », in Bézille, H. & Courtois, B. (2006) [dir.] Penser la relation expérience-formation, Lyon : Edition De la Chronique Sociale, p. 142-155.

* 95 Barbot, M-J., « L'autre dans l'autoformation, une ingénierie de la rencontre à créer ? » Colloque sur « l'autre dans l'autoformation », coordonné par Dr Genevièreve Lameul, 15e Congrès international, Mondialisation et Éducation : vers une société de la connaissance, Université cadi Ayyad, Marrakech, Maroc (2-6 juin 2008).

* 96 Abdallah-Pretceille, M. (1999) L'éducation interculturelle, Paris, Presses Universitaires de France, 2e édition, 2005.

* 97 Barbot M-J. (2006) "L'accompagnement de l'expérience interculturelle : construire la rencontre?". In H.Bézille & B. Courtois (dir.), Penser la relation expérience-formation. Lyon : Ed. De la Chronique Sociale. (p.171-187).

* 98 Gagnon, E., Fortin, A., Ferland-Raymond, A-E. Mercier, A. (2004) « Donner du sens. Trajectoires de bénévoles et communautés morales », Lien social et Politiques, n°51, 2004, p. 49-57. Sur erudit.

* 99 Ibid., p. 51.

* 100 Op. Cit., Abdallah-Pretceille, 1999.

* 101 Ferrand-Bechmann, D. (2008) « Se former en s'engageant dans la vie associative », in COLIN, L. et LE GRAND, J-L. (2008) [dir.] L'éducation tout au long de la vie, Economica Anthropos.






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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand