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Ajustement d'une PME familiale à  son environnement socio économique: le cas de la société Mballa et fils SARL

( Télécharger le fichier original )
par Désiré Jules Ndoumou Foe
Université catholique d'Afrique Centrale - Master en socio anthropologie du développement 2007
  

Disponible en mode multipage

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UNIVERSITE CATHOLIQUE D'AFRIQUE CENTRALE

Institut Catholique de Yaoundé Faculté de Sciences Sociales et de Gestion

MASTER EN SCIENCES SOCIALES OPTION
DEVELOPPEMENT ET MANAGEMENT DE PROJETS EN
AFRIQUE

L'AJUSTEMENT D'UNE PME FAMILIALE A SON
ENVIRONNEMENT SOCIO -- ECONOMIQUE :
LE CAS DE LA SOCIETE MBALLA ET FILS Sarl
(Edéa)

MEMOIRE

Présenté en vue de l'obtention du Diplôme de Master en Sciences Sociales
Option Développement et Management de Projets en Afrique

Par

Désiré Jules NDOUMOU FOE
(DESS en Gestion des Ressources Humaines)

Sous la direction de
Pr. Claude ABE
Année Académique 2007-2008

La mémoire inaltérable

- Professeur Séverin Cécile ABEGA

- François-Xavier ONAMBELE

- Isidore FOE

REMERCIEMENTS

La réalisation d'une telle oeuvre nécessite la contribution de plusieurs volontés.

Avant tout, notre profonde gratitude va au Professeur Claude ABE qui a bien voulu, malgré ses multiples occupations diriger ce mémoire, et dont les suggestions et critiques ont eu un impact considérable sur ce travail.

Merci infiniment à nos parents Monsieur et Madame NDOUMOU pour leur soutien indéfectible tant moral que financier. Nous ne manquerons pas de mentionner ici l'apport considérable de notre mère Madame NDOUMOU née Perpétue Marie Rose Noah qui nous a fait bénéficier de ses aptitudes d'enseignante, et, de conseiller en organisation administrative, en veillant à relire et à corriger notre travail.

Nos remerciements vont aussi aux Professeurs du cycle de Master en Sciences Sociales option Développement et Gestion de Projets de l'Institut Catholique de Yaoundé, qui nous ont guidé dans la quête d'un sujet de recherche digne d'intérêt méthodologique, nous pensons en particulier au Professeur Séverin Cécile ABEGA, au Professeur Marie Thérèse MENGUE et au Docteur Claude KIAMBA.

Merci à toute l'équipe de la Société MBALLA et Fils Sarl, pour les informations mises à notre disposition, indispensables à la concrétisation de ce mémoire. Nous sommes particulièrement redevables à Monsieur Patrice BOULLEY du Projet d'Assainissement de Yaoundé pour ses conseils judicieux. Nous tenons également à remercier tous nos frères, soeurs, amis et camarades qui n'ont eu de cesse de nous rappeler l'urgence d'achever ce travail de recherche. Nous pensons à Monsieur Abicho MAHAMAT, Mademoiselle Nadine NDOUMOU, Monsieur Willy FOADJO, Monsieur Mergel TAKAM...

Nous souhaitons aussi remercier tous ceux qui d'une manière ou d'une autre ont contribué à la réalisation de ce travail, mais qui n'auront pas été cités ici.

LEXIQUE DES ABREVIATIONS

ALU : Aluminium

ALUCAM : Compagnie Camerounaise d'Aluminium

AUDSCGIE : Acte Uniforme relatif au Droit des Sociétés Commerciales et des Groupements d'Intérêts Economiques

BIBA Conseils : Bitegye Business Association

BICEC : Banque Internationale du Cameroun pour l'Epargne et le Crédit C.A : Chiffre d'affaires

CACED : Caisse de Crédit pour l'Epargne et le Développement

CENEB : Camerounaise d'Entretien, Equipement Industriel, Bâtiment et Travaux Publics CCIMA : Chambre de Commerce d'Industrie, des Mines et de l'Artisanat du Cameroun CIME : Centre des Impôts des Moyennes Entreprises

CIESP: Comité Interministériel Élargi au Secteur Privé CNIC : Chantier Naval et Industriel du Cameroun

CNPS : Caisse Nationale de Prévoyance Sociale

CRADAT : Centre Régional Africain d'Administration du Travail CSTC : Confédération Syndicale des Travailleurs du Cameroun DEN Conseils : Désiré Ngomo Conseils

DESS : Diplôme d'Etudes Supérieures Spécialisées

DGI : Direction Générale des Impôts

DIRSTAT: Direction de la Statistique

DSF : Déclaration Statistique et Fiscale

EBC : Edéa Businessmen Corporation

EPI : Équipement de Protection individuel

FIFFA: First Investment For Financial Assistance

FOGAPE : Fonds d'Aide et de Garantie aux Petites et Moyennes Entreprises

FONDECAM- PME : Fonds de Développement Camerounais des Petites et Moyennes Entreprises

GIE : Groupement d'Intérêt Economique

GROPESAM : Groupement des Opérateurs Économiques de la Sanaga Maritime

GTL : Grands Travaux du Littoral

IS : Impôt sur les Sociétés

ISO : International Standard Organization M. : Monsieur

ME : Moyennes Entreprises

MEF: Moyennes Entreprises Familiales METALLEST : Métallurgie de l'Estuaire MI: Moyennes Industries

MINEPAT : Ministère de l'Economie, de la Programmation et de l'Aménagement du Territoire

MINPMEESA : Ministère des Petites et Moyennes Entreprises, de l'Economie Sociale et de l'Artisanat

MPE : Maintenance Polyvalente d'Edéa

OHADA : Organisation pour l'Harmonisation du Droit des Affaires en Afrique

PE: Petites Entreprises

PME : Petites et Moyennes Entreprises PMI : Petites et Moyennes Industries SARL : Société à Responsabilité Limitée

SCDP : Société Camerounaise des Dépôts Pétroliers SITRAFER : Société Internationale des Travaux Ferroviaires

SMF : Société MBALLA et Fils

SMS: Groupement d'Intérêt Economique Sanaga Metal and Steel

SOCATRAL : Société Camerounaise de Transformation de l'Aluminium SONARA : Société Nationale de Raffinage et d'Extraction des Produits Pétroliers SRM : Société de Réalisation et de Maintenance

STIC : Société des Travaux Industriels du Cameroun

TPE : Très Petites Entreprises

TVA : Taxe sur la Valeur Ajoutée

USLC : Union des Syndicats Libres du Cameroun

LISTE DES TABLEAUX ET GRAPHIQUES

TABLEAUX

Tableau 1 : Géographie du capital de la Société Mballa et Fils 52

Tableau 2 : Evolution des Charges de personnel de 2003 à 2005 en rapport avec la production

.60

Tableau 3 : Evolution des prix des EPI depuis 1992 61

Tableau 4 : Tableau comparatif des prix des EPI Formel et vendeur ambulant .79

Tableau 5 : Données sur l'emploi au 30 avril 2006 .41

Tableau 6 : Répartition de l'effectif permanent par fonction/qualification/ancienneté en

2006 . 42

Tableau 7 : Charges sociales et fiscales 2005 ..44

Tableau 8 : Étude des salaires du premier trimestre 2006 45

Tableau 9 : Calcul de l'indicateur général d'équilibre 2006 46

Tableau10 : Tableau représentatif de l'évolution du Chiffre d'affaires de la SMF 49

Tableau 11 : Synthèse du diagnostic 50

Tableau 12 : État d'endettement au 29 février 2008 57

GRAPHIQUES

Graphique 1 : Cadre de réflexion sur la conduite d'un diagnostic 69

Graphique 2 : Répartition des effectifs par âge de janvier-juillet 2006 43

Graphique 3 : Graphique représentatif des charges patronales fiscales et sociales sur le

chiffres d'affaires en 2005 44

Graphique 4 : Évolution de la masse salariale de janvier - mars 2006 45

Graphique 5 : Poids relatif des salaires sur le Chiffres d'affaires de la SMF ..46

ABSTRACT

Be it of smaller, medium or larger dimension, the contribution of family owned companies to the development of industrial countries is renowned. In Cameroon, this type of organization permits the creation of wealth and employment in the formal sector as well as in the informal one. In this regards, small and mediums firms are nowadays at the throax of Cameroon Government socio-economic development policies.

From 1994 to 2005, the industrial, social and financial state of affairs of SMF shrank slowly. At the end of the year 2005 the difficulties were at their highest point. To respond to the situation, the general manager of the company decided to request the strategic and financial support of a non family member. In May 2006, the project of a socio economic adjustment plan of the company was officially set up by the general management. A team made up of an expert in human resources management, and, a local company specialised in financial, fiscal and work advices, was selected to conduct the organisational change process.

Due to the resurgence of the initial difficulties in 2008, this long essay intends to evaluate the socio-economic adjustment process conducted from May 2006 to February 2007. This study was conducted through the methods of intervention- research in management sciences, and the approach of the sociology of change in traditional societies of Georges Balandier. The main goal of this study was to identify the root of organizational difficulties, in order to propose key measures to ensure mid and long term organizational performance. An analysis of research proposals reveals that the role played both by the type of management used by the owner of the company, and, the method used by the adjustment team, are fundamental in the crisis revival one year after the official end of the adjustment process. The study reveals that financial management pervades the relations between the company and its socio-economic environment. Thus, the environment played a minor role in the inefficiency of the adjustment process to reach its goals. The study recommends a number of strategies to sustain long term organizational performance.

SOMMAIRE

DEDICACE i

REMERCIEMENTS ii

LEXIQUE DES ABREVIATIONS ...iii

LISTE DES TABLEAUX ET GRAPHIQUES vi

ABSTRACT vii

INTRODUCTION GENERALE

1-

CONTEXTE ET JUSTIFICATION

1

2-

OBJET DE L'ETUDE

.3

3-

INTERET DE L'ETUDE

3

4-

REVUE DE LITTERATURE

.4

4.1 Orientations stratégiques de la PME et influence de l'environnement

..4

4.2. Difficultés des entreprises et des entrepreneurs africains

12

5- PROBLEMATIQUE

16

6- HYPOTHESES DE RECHERCHE

.16

7- METHODOLOGIE DE RECHERCHE

17

7.1 Approche de la recherche intervention en sciences de gestion

17

7.2. Approche de la sociologie des mutations dans les sociétés traditionnelles de Georges

Balandier

23

8- OUTILS DE COLLECTE DES DONNEES .

.25

9- DELIMITATION DU CHAMP D'ETUDE

25

10- DEFINITION DES CONCEPTS

..26

10.1 Définition de la notion de changement organisationnel

.26

10.2 Définition de la notion d'entreprise familiale

27

10.3 Définition de la notion de PME

29

10.4 Définition de la notion d'entreprise en difficulté

29

10.5 Définition du concept d'environnement en sciences de gestion

30

PARTIE I : CADRE OPERATIONNEL DES PME FAMILIALES AU CAMEROUN

CHAPITRE I : CARACTERISTIQUES GENERALES DES ENTREPRISES FAMILIALES AU CAMEROUN 31

I- ANALYSE DES CARACTERISTIQUES ET DES SPECIFICITES DES ENTREPRISES FAMILIALES AU CAMEROUN .31

I.1 Caractéristiques et spécificités des entreprises familiales en fonction de leur taille au

Cameroun 32

I.2 Spécificités du management dans la PME familiale au Cameroun 37

II- ENVIRONNEMENT ECONOMIQUE ET REGLEMENTAIRE DES PME AU CAMEROUN 41

II.1 Rôle économique et stratégique de l'Etat dans la promotion et le développement des PME

au Cameroun 42

II.2 Sources de financement des PME 44

II.3 Cadre juridique sur la notion d'entreprise en difficulté dans l'acte uniforme OHADA .46

CHAPITRE II : PRESENTATION DU MILIEU D'ETUDE 51

I- HISTORIQUE ET PRESENTATION DE LA SOCIETE MBALLA ET FILS....51

I.1 Géographie du capital ...52

I.2 Caractéristiques de l'activité 52

I.3 Organisation et fonctionnement 54

II- NATURE DES PROBLEMES RENCONTRES PAR L'ENTREPRISE MBALLA ET

FILS 55

II.1 Problèmes au niveau des données industrielles ...56

II.2 Problèmes au niveau des données sociales ..58

II.3 Problèmes au niveau des données financières ....60

PARTIE II : EVALUATION DU PROCESSUS D'AJUSTEMENT ET INTERPRETATION

DES ECARTS

CHAPITRE I : PRESENTATION DU PROCESSUS D'AJUSTEMENT DE LA SOCIETE MBALLA ET FILS 63

I- HISTORIQUE DE L'INTERVENTION, NEGOCIATION DU MANDAT, ET METHODOLOGIE UTILISEE 63

I.1 Historique de l'intervention et négociation du mandat 63

I.2 Méthodologie utilisée et processus de recueil des données ..66

II- PHASE DIAGNOSTIQUE DU PROCESSUS D'AJUSTEMENT 68

II.1 Diagnostic de l'environnement extérieur de la SMF 70

II.2 Diagnostic de l'environnement économique de la SMF 71

II.3 Diagnostic de la production de la SMF 78

II.4 Diagnostic social de la SMF 80

II.5 Diagnostic financier ..90

II.6 Synthèse du diagnostic organisationnel de la SMF .92

II.7 Deuxième attendu du processus d'ajustement : La formulation des mesures à mettre en oeuvre pour ajuster l'entreprise à son environnement socio-économique 94

CHAPITRE II : ANALYSE DES RESULTATS ET DES ECARTS RELEVES, INTERPRETATION DES DONNEES ET RECOMMANDATIONS 98

I- RESULTATS OBTENUS APRES MISE EN PLACE DES MESURES

D'AJUSTEMENT ..98

I.1 Résultats obtenus en rapport avec l'objectif 1:Résorption du déficit de trésorerie 98

I.2 Résultats obtenus en rapport avec l'objectif 2 : Assainir le climat organisationnel 99

I.3 Résultats obtenus en rapport avec l'objectif 3 : Propositions pour rassurer environnement ..101

II- FACTEURS EXPLICATIFS DES ECARTS, ANALYSE DES HYPOTHESES ET

RECOMMANDATIONS .103

II.1 Résultats et écarts a moyen terme 103

II.2. Analyse du système de gestion financière de l'entreprise 104

II.3 Analyse des hypothèses de recherche ..107

II.4 Recommandations pour ajuster l'entreprise de manière durable a son environnement socio économique 114

CONCLUSION GENERALE .117

BIBLIOGRAPHIE 121

ANNEXES 128

1- CONTEXTE ET JUSTIFICATION

A l'ère du vingt et unième siècle, le thème de la Petite et Moyenne Entreprise (PME) et de son avenir industriel en Afrique revêt la plus grande importance dans un monde incertain et de concurrence virulente.

Traditionnellement, la moyenne entreprise familiale permet au Cameroun une utilisation plus économique des facteurs de production par rapport aux grandes entreprises, grâce à un recours intensif à la main d'oeuvre non qualifiée, généralement abondante au Cameroun et une mobilisation de l'épargne canalisée sous forme de fonds propres (Tchankam, 1998:12). Le document du Ve plan quinquennal de la République du Cameroun, retraçant le bilan du IVe plan quinquennal camerounais soutient qu'"... à investissement égal, les petites et moyennes entreprises et l'artisanat créent beaucoup plus d'emplois que les grandes entreprises et procurent un revenu immédiat".

Créée en 1992, avec le statut juridique d'établissement, la Société Mballa et Fils (SMF) est aujourd'hui une société à responsabilité limitée (SARL) et compte au nombre de ce type d'organisation. Elle effectue des prestations de service dans le domaine de la soudure spéciale sur champ magnétique et la chaudronnerie industrielle. De ce fait, elle a récemment adhéré au Groupement d'Intérêt Economique (GIE) Sanaga Metal and Steel regroupant les PME de soudure et chaudronnerie industrielle du département de la Sanaga Maritime.

En 2007, l'administration fiscale a décidé de déplacer son fichier de son centre départemental d'Edéa, au Centre des Impôts des Moyennes Entreprises de Douala (CIME)1. Ces prestations sont actuellement effectuées de manière quasi exclusive au sein de l'usine de la Compagnie Camerounaise de l'Aluminium (ALUCAM) à Edéa, son client.

L'entreprise Mballa et Fils a connu depuis 1992 plusieurs faits marquants aussi bien dans son environnement interne, qu'externe:

- le décès en 1994 de son fondateur M. Ernest Mballa, contremaître principal retraité de l'entreprise ALUCAM et spécialisé en chaudronnerie- soudure, et la succession au poste de gérante de sa veuve assistante sociale de formation retraitée ;

- la perte de ses principaux marchés en 2003 avec comme conséquence, le gel des salaires des employés, la mise en chômage technique et la grève de ces derniers ;

- en 2004, face à la dégradation de la qualité des prestations et aux remous sociaux, le client unique de l'entreprise, ALUCAM, agite le spectre d'un arrêt total de ses commandes de travaux ;

- en 2005, la famille Mballa, à travers la gérante de la SMF sollicite l'appui stratégique et financier d'un cadre retraité de l'usine ALUCAM, pour l'aider à sortir de l'impasse ;

1 Le CIME encadre les entreprises dont le chiffre d'affaire est supérieur à cent millions de FCFA et inférieur à 1 Milliard.

- l'absorption du propriétaire historique de l'usine ALUCAM, PECHINEY par le géant canadien de l'aluminium ALCAN en 2006, et la fusion entre ce dernier et le groupe minier anglo - australien RIO TINTO en août 2008.

A présent, l'entreprise fait face à de nouvelles contraintes externes en termes d'innovation et d'actualisation technologique, de prise en compte de nouveaux standards internationaux de qualité et de sécurité au travail, et de concurrence accrue sur des marchés acquis de longue date. A cela, s'ajoute une importante pression fiscale et sociale. A ces mutations externes, fait écho en interne une gestion désuète et patrimonialiste marquée par l'interaction entreprise - famille.

Cette détérioration de l'environnement de la SMF compresse sa marge de manoeuvre et diminue sa capacité d'autofinancement. En outre, la baisse de rentabilité de l'entreprise se répercute sur sa trésorerie qui devient plus serrée et l'oblige à accroître son endettement à court terme. Le poids des charges financières augmente, ce qui détériore un peu plus les résultats de l'entreprise et oblitère sa capacité à redresser la situation. La démotivation des équipes, fait suite à la perte de confiance de l'environnement proche (banquiers, fisc, services sociaux, fournisseurs, client...). L'entreprise est en crise!

Dans ce contexte, l'avenir industriel de la SMF semble incertain. La mise sur pied d'un plan d'ajustement de l'entreprise en mai 2006, venait répondre à la dégradation des données sociales, industrielles et financières. La nécessité d'adapter sa stratégie et ses tactiques à son environnement est aujourd'hui devenue incontournable. C'est ainsi qu'entrent en jeu les programmes de changement organisationnel, à savoir : reenginering, qualité totale, empowerment, redressement et de restructuration, remèdes à double tranchant, car, s'ils peuvent renforcer une organisation, ils peuvent aussi la déstabiliser.

Pourtant, le constat s'il est loin d'être exhaustif est saisissant; la contribution des PME à la création de richesses, à la création d'emplois et à la compétitivité au Cameroun est majeure, ceci malgré le peu d'investissement consenti. De ce fait, en juin 2007, elles étaient considérées dans le document de la phase I de la stratégie sectorielle de l'industrie et des services de la République du Cameroun, comme le principal moteur de la croissance, et reconnues désormais comme un acteur décisif dans le mouvement international de la lutte contre la pauvreté.

Ainsi, dans le contexte actuel marqué par la volonté politique de faire du Cameroun un pays émergent d'ici 2035, la recherche de pérennisation et d'efficience de la PME familiale au Cameroun et particulièrement de la SMF revêt une importance capitale.

2 -- OBJET DE L'ETUDE

Cette étude vise à évaluer à moyen terme les résultats obtenus par le processus d'ajustement conduit de mai 2006 à février 2007 au sein de la SMF. De manière spécifique, il sera question tout au long du travail :

- de faire un état des lieux des problèmes et difficultés de l'entreprise ;

- de présenter le processus d'ajustement, ses objectifs, sa mise en oeuvre et ses résultats ; - de faire une analyse des écarts et des facteurs explicatifs de ces derniers ;

- d'examiner les systèmes internes de l'entreprise en rapport avec les écarts constatés, afin de faire des recommandations ayant un impact durable sur la rentabilité de l'entreprise.

Il importe à présent de faire ressortir l'intérêt de cette étude.

3 --INTERET DE L'ETUDE

Grâce à la méthode de l'étude de cas, cette étude envisage, faire la liaison entre le monde universitaire, cadre d'élaboration des théories et concepts, et les milieux d'affaires camerounais où se développent les pratiques de management. Les résultats de notre investigation permettront à la communauté scientifique de déceler les facteurs explicatifs des défaillances des PME familiales camerounaises, dans la perspective d'une élaboration plus efficace et efficiente des stratégies d'intervention au sein de ces dernières. Ce travail pourrait également constituer un repère pour les entrepreneurs camerounais, afin de mieux agir pour répondre aux besoins de développement de leurs entreprises.

A notre connaissance, il n'y a pour le moment aucune étude sérieuse sur l'ajustement d'une PME de type patrimonial à son environnement socio-économique au Cameroun. Notre motivation ne peut être que grande, quand on sait l'importance des PME au développement du tissu économique, de l'emploi et à la réduction de la pauvreté au Cameroun.

A présent, un état de la littérature sur les liens entre l'organisation (de production économique) et son environnement, nous amènera à évoquer les spécificités du management interculturel en Afrique.

4 -REVUE DE LITTERATURE

L'analyse des organisations est une démarche ancienne dont les premières tentatives apparaissent au début du siècle dernier et principalement en Occident, avec le développement accéléré des activités et des structures de production économique. Ce phénomène a amené les spécialistes de tout bords (économistes, ingénieurs, psychologues, sociologues, gestionnaires et spécialistes des sciences de gestion), à se pencher davantage sur le fonctionnement de ce type de structure. Les uns pour rechercher les voies et moyens susceptibles de conduire à une plus grande efficience productive de ces dernières, les autres pour relever les conséquences de cette quête sur l'individu et le corps social. Nous passerons en revue la littérature sur les relations entre les organisations de production économique de taille réduite et leur environnement.

Les théories énoncées par les théoriciens de l'école de la contingence ont retenu notre attention dans un premier temps. Au-delà des limites et critiques de cette précédente perspective, nous découvrons que la prise en compte de la contingence et de la culture permet de rendre fructueuses les relations entre l'entreprise et son environnement en Afrique. Puis, nous faisons un survol de la littérature sur les difficultés des entreprises et des entrepreneurs africains.

4.1 Orientations stratégiques de la PME et influence de l'environnement

La relation qui existe entre l'environnement et l'organisation est un élément central des théories en management stratégiques (Ginsberg et Venkatraman, 1985 ; Bamberger, 1988). Le contexte d'évolution de la firme peut également être envisagé comme une variable affectant les stratégies des entreprises (McArthur et Nystrom, 1991).

Différents courants de pensée existent et expliquent de façon contraire l'importance du contexte et de l'organisation. Astley et Van de Ven (1983) identifient quatre écoles de pensée de la théorie des organisations en fonction du degré de déterminisme / volontarisme et du niveau d'analyse organisationnelle (entreprise ou population d'entreprises).

Les courants de pensée privilégiant le déterminisme seront la théorie de la contingence au niveau individuel et la théorie de la sélection naturelle (écologie des populations) au niveau collectif. Le volontarisme se retrouvera dans les choix stratégiques (individuel) et les théories de l'action collective ou de l'écologie humaine (Astley et Fombrun, 1983).

Le courant de pensée déterministe sied le mieux à cette étude compte tenu de la taille réduite de la SMF et des contraintes environnementales auxquelles elle fait face. Nous avons donc préféré survoler les travaux des théoriciens de l'école de la contingence pour étayer notre étude.

Variables organisationnelles

(1)

Stratégie

Processus

(4)

(3)

Output

Performance

4.1.1 Besoin d'adaptation des organisations : la théorie de la contingence

Nous privilégions ici la thèse de l'école de la contingence qui va intégrer le rôle prédominant de l'environnement. L'entreprise sera dépendante de celui-ci pour l'obtention de ses ressources et émettra des réponses contingentes. Remarquons que cette contingence peut tout aussi bien découler de l'environnement que de la taille, de l'âge, du système technique ou de la répartition du pouvoir de l'entreprise (Mintzberg, 1994 : 164), des caractéristiques de la direction (Kalika, 1995) ou encore du cycle de vie des produits et de la concentration du secteur (Hambrick et Lei, 1985). "La thèse de H. Mintzberg pourrait s'énoncer ainsi: pour q'une organisation soit efficace, il faut à la fois se référer à la situation de l'organisation dans son environnement et à une cohérence interne entre les paramètres de conception" (Amblard et al, 2005). Si les premières hypothèses de cette théorie visaient à étudier la structure de l'entreprise (Burns et Stalker, 1961, Lawrence et Lorsch, 1967), ses prolongements permirent d'envisager les comportements stratégiques adéquats avec l'environnement (Ginsberg et Venkatraman, 1985).

Les quatre liens de contingence identifiés par Ginsberg et Venkatraman (1985), généralement examinés dans les recherches en management stratégique, peuvent nous aider à mieux évaluer la performance de la PME familiale au Cameroun :

(2)

Inputs

Variables environnementales

Examinons rapidement ces quatre relations unissant la stratégie à la performance :

(1) est la relation la plus souvent étudiée. Elle vise à déterminer en quoi l'adéquation de la stratégie avec son environnement (le fit) favorise le niveau de performance de l'entreprise ;

(2) envisage la formation de la stratégie en fonction d'une contingence interne : la forme organisationnelle retenue. En effet, le postulat de base de ce type d'approche est que l'entreprise est dotée de ressources liées à sa structure et la stratégie retenue doit être une transposition au niveau

concurrentiel de cette base de compétitivité ;

(3) considère que la performance passée va déterminer la stratégie présente et les résultats futurs. Cela peut être analysé en fonction de deux aspects assez proches : les résultats précédents vont permettre de déterminer une marge de manoeuvre financière pouvant entraîner l'orientation stratégique et les résultats vont stimuler, par le biais d'une mise en confiance, les décisions des managers ;

(4) se retrouve dans la conception "chandlerienne" de la firme pour laquelle la stratégie va influencer la forme organisationnelle permettant ainsi d'obtenir un meilleur niveau de performance.

Bien que fréquemment étudiée, la première relation qui s'intéresse aux liens entre l'environnement, la stratégie et la performance présente l'avantage de considérer la stratégie comme une interface entre l'externe et l'interne. Il peut en résulter des tensions comme le remarque D. Miller (1992). En effet, les entreprises seront à la recherche de cohérence interne (adéquation entre la structure et la stratégie), mais, régulièrement, il y aura des interruptions, afin de s'ajuster à l'environnement et tendre vers une cohérence externe (adéquation entre l'environnement et la stratégie).

Cette dernière remarque de D. Miller (1992) cristallise ici la forme que doit prendre l'ajustement des PME à leur environnement socio-économique au Cameroun. Ceci passe notamment par la recherche de cohérence au sein de l'organisation, et, ensuite en externe en ajustant l'entreprise par à coup tenant compte des réactions de l'environnement. A ce propos, H. Mintzberg (1982:28) insiste sur le concept d'ajustement pour expliquer le rapport des organisations avec leur environnement et sur celui de cohérence pour leur fonctionnement interne.

Pour H. Mintzberg (1990:41), l'organisation va se structurer en fonction de la stabilité ou de l'incertitude de l'environnement extérieur. Il s'agit du système sociopolitique au sens large (législation, système éducatif, relations professionnelles, etc.), ainsi que des clients, des fournisseurs, des tendances du marché et de la vie des produits. Leur modification expliquent le passage d'une configuration (entrepreneuriale, bureaucratique, organisations divisionnalisées, organisation professionnelle, organisation innovatrice, organisation missionnaire) à l'autre. Par conséquent, H. Mintzberg rejette une vision étroite de l'organisation comme système clos (Amblard et al, 2005:18).

L'alignement de l'organisation sur son environnement (le fit) est donc un concept central. Smith et Grimm (1987) envisagent cette prédominance pour deux raisons : les organisations sont dépendantes de leur environnement pour leurs ressources et les organisations doivent gérer cette dépendance pour maintenir et développer leur stratégie. L'entreprise agit donc sous la contrainte.

La position d'entreprise sous-traitante de la SMF, accentue l'importance de cette dernière assertion de Smith et Grimm (1987), c'est sans doute pour cela que le rapport de la PME à son

environnement est bien souvent envisagé sous l'angle de la dépendance.

Les thèses déterministes semblent trouver un écho idéal en ce qui concerne l'analyse stratégique des entreprises de petites dimensions. C'est ainsi qu'on peut relever diverses remarques dans la littérature sur les petites structures telles que "les PMI sont plus sensibles aux aléas du marché sans grand pouvoir pour en faire évoluer les conditions de fonctionnement" (Silvestre et Goujet, 1996), "(...) par principe, les organisations de dimension réduite (effectifs inférieurs à 50 salariés) subissent l'environnement plus qu'elles ne le structurent à leur profit" (Paché, 1990) ou encore "La petite entreprise s'insère dans un environnement dense et complexe. Dans la plupart des cas, elle semble en subir fortement l'influence sans exploiter les avantages qu'il recèle" (Chappoz, 1991). La précarité semble donc être son mode de fonctionnement stratégique. Mais, ces théories de la contingence ne permettent pas de montrer comment les acteurs peuvent être à la fois, ceux qui construisent le système, lui assure une certaine permanence et lui permettent d'évoluer.

La théorie de la contingence fait l'objet de nombreuses critiques.

Par exemple, Crozier et Friedberg (1977) vont considérer que la conception de l'environnement, notamment pour la théorie de la contingence est étroite car, le contexte est envisagé comme "un ensemble de facteurs impersonnels dont les caractéristiques objectives s'imposent en quelque sorte d'emblée et automatiquement aux organisations". L'entreprise est uniquement envisagée sous l'angle de l'adaptation, de la réaction.

La théorie de la contingence montre comment une entreprise ou une organisation dépend des institutions, de sa relation au marché, des objectifs de ses dirigeants, des types de configurations organisationnelles que cela génère et de leur cohérence. Ce type d'approche, toutefois, évacue la possibilité pour les membres de l'entreprise de sortir de ces schémas, de prendre des décisions liées à ce que chacun croit percevoir de son intérêt et de celui de l'ensemble. En effet, notre observation montre la prépondérance de l'action du propriétaire - dirigeant de la PME familiale au Cameroun, dans la relation de cette dernière à son environnement.

Si les configurations de H. Mintzberg sont suggestives, à les prendre à la lettre on voit bien qu'elles ne correspondent pas entièrement à la manière dont se structurent les entreprises, qu'il y en a des multitudes, que la cohérence n'est pas forcément au rendez-vous. Les théories de la contingence ne permettent pas de montrer comment les acteurs des PME familiales au Cameroun peuvent être à la fois ceux qui construisent le système, lui assurent une certaine permanence et lui permettent d'évoluer. Amblard et al (2005:22), pensent que l'analyse stratégique constitue un rappel salutaire.

Pour les penseurs de l'analyse stratégique, il existe des acteurs, un construit social, des jeux

de pouvoir dans un système qui ne correspond pas vraiment à ce que H. Mintzberg croit voir2. On ne peut résumer le jeu des acteurs aux contraintes de l'environnement et de la cohérence. Ces limites des thèses déterministes permettent à d'autres tels que Child (1972, 1997), Weick (1979) de postuler que les choix stratégiques seront réalisés, en partie, indépendamment de l'environnement. Les préférences stratégiques seront fonction des objectifs des dirigeants et auront un impact sur l'environnement. Cette stratégie aura des implications environnementales, puisque les conditions de l'environnement pourront être modifiées. Elle aura aussi des implications organisationnelles, puisqu'il y aura une adaptation, un nouvel agencement du champ opérationnel, de la structure, de la technologie ou des employés. Les thèses du choix stratégique peuvent être regroupées sous le vocable de volontariste car, elles pensent pouvoir soumettre le réel à la volonté des acteurs s'opposant en cela aux écoles de la contingence et de l'écologie des populations.

Nous pensons que les thèses déterministes et particulièrement, celles énoncées par les théoriciens de l'école de la contingence, peuvent être associées à celles du choix stratégique, dites volontaristes pour atteindre notre objectif d'ajustement des PME à leur environnement socioéconomique au Cameroun. Ainsi, pour nous, bien que soumis aux aléas du marché et à leur environnement, les propriétaires - dirigeants des PME doivent se comporter en entrepreneurs3 à même de prendre des décisions stratégiques et de modifier leur environnement. Cette perspective de l'entrepreneur comme personnage central au sein d'une société en mutation, est postulée par E. Kamdem (2002), l'un des principaux chantres de la littérature de gestion en Afrique.

4.1.2 Prise en compte de la contingence et de la culture dans le management des organisations africaines à travers l'approche interculturelle.

Il se développe une analyse de plus en plus riche sur les organisations africaines en général et leur management en particulier (Kamdem, 2000, 2002). De la production scientifique sur le management des organisations africaines, quelles que soient les perspectives, un constat ce dégage: la variable culture constitue une dimension centrale dans les études sur le management des organisations africaines. Notre étude étant basée sur le cas d'une entreprise familiale au Cameroun,

2 A ce propos, H. Amblard et al (2005) partent de l'exemple d'une entreprise pharmaceutique pour expliquer la

diversité des comportements des acteurs au sein d'une organisation.

3 J. Schumpter (1935) définit la fonction sociale de l'entrepreneur en termes d'innovation et de changement. E.

Kamdem (2002) ajoute que l'entrepreneur est celui qui arrive à faire une combinaison nouvelle et évolutive des facteurs de production, autrement dit « à assurer la mobilisation des ressources techniques et humaines dans une perspective essentiellement innovatrice: changement de l'organisation et des méthodes de travail, création de nouveaux produits, exploration de nouveaux marchés, etc. »p.134.

la question principale à relever est celle de savoir dans quelle mesure les cultures africaines favorisent ou ne favorisent pas la réussite du management des formes d'organisations modernes ? Flusieurs tentatives de classification émergent de la littérature.

B. Tidjani (1995) distingue 3 approches : anthropologique, gestionnaire et politique.

Selon l'auteur, l'approche anthropologique a pour objectif de « montrer que chaque entreprise constitue un cas particulier et que la cohabitation entre les cultures africaines et les techniques de gestion moderne est toujours possible ». Ici, l'unité d'analyse est « l'entreprise », dont les implications sont que « les valeurs de l'espace social peuvent toujours trouver un réemploi dans l'entreprise de type moderne ; les contraintes découlant des techniques de gestion modernes sont contournables ». Pour B. Tidjani (1995), l'approche anthropologique a le mérite de reconnaître que le conflit entre les cultures africaines et les techniques modernes de gestion n'est pas insurmontable, cependant, elle pèche, comme les autres approches, par une faible prise en compte des choix stratégiques de politique industrielle des États et des entrepreneurs africains.

L'approche gestionnaire, dont l'objectif selon B. Tidjani (1995) est de « faire ressortir les contradictions qui existent entre les cultures africaines et les techniques modernes de gestion », se traduit pour l'entreprise par des blocages incontournables à cause des spécificités culturelles africaines. Cette approche souffre de carences majeures selon l'auteur. En plus de la non prise en compte des choix stratégiques des États et des entrepreneurs africains, la méthode utilisée par les chercheurs est « a-historique et statique » accordant peu d'attention ni aux évolutions culturelles, ni aux processus d'adoption et d'apprentissage des techniques modernes de gestion.

La dernière approche politique, a pour objectif d' « utiliser les conflits entre cultures africaines et techniques de gestion modernes comme argument dans le débat idéologique entre impérialisme et développement ». Dans cette approche, on s'intéresse à l'ensemble des entreprises utilisant les techniques modernes de gestion pour montrer que l'importation de modèles occidentaux de management ne saurait constituer un raccourci ou un substitut durable aux méthodes de gestion bâties à partir de valeurs et préoccupations de la majorité des populations africaines. Cette approche, de nature manipulatoire, présente des limites notamment dans la non prise en compte des stratégies étatiques et entrepreneuriales, mais aussi, dans les retards accusés en terme de formation et de développement en management.

Face aux limites de ces trois approches, l'auteur propose une approche dynamique de l'étude du management des organisations africaines pour « comprendre les processus d'adoption des techniques de gestion modernes ». Il préconise l'utilisation de méthode comparative, historique et institutionnelle pour rapprocher les pratiques africaines de celles d'autres pays.

Au-delà de la comparaison et du rapprochement souhaité ici par B. Tidjani, c'est l'ouverture laissée par les différentes approches à l'adaptation d'une méthode susceptible de prendre en compte,

au cas par cas, les spécificités des entreprises africaines qui nous semblent importantes pour cette étude.

E. Kamdem (2000) distingue aussi trois tendances majeures émergeant des travaux et s'intéressant au fonctionnement des organisations africaines.

La première tendance dite « radicale » considère que ce sont les caractéristiques de la culture africaine, qui inhibent le développement des organisations dans le sens où des normes économiques modernes comme la compétition individuelle, l'accumulation matérielle, le calcul économique ou encore la rentabilité financière, sont prohibés par la culture traditionnelle africaine. Cette vision est présente dans les travaux de Hyden (1983), Etoungua-Manguellé (1990) ou Kabou (1991).

Le second courant postule pour « un renouvellement des analyses sur le thème de la culture pour que ce dernier soit abordé dans une perspective résolument constructiviste ». Cette vision réformiste de la culture est développée par plusieurs auteurs (Bayart, 1996 ; Zady Kessy, 1998). Dans ce sens M. Zady Kessy (1998) distingue des freins4 et des ressorts5 qu'offre la culture africaine au management des organisations. Malgré le fait que ce courant aborde la question de la culture avec plus de prudence, les auteurs laissent le débat ouvert quant au rôle de la culture africaine dans le fonctionnement des organisations.

Le dernier courant est qualifié par E. Kamdem (2000) de managérial ou d'entrepreneurial, « en ce sens qu'il est principalement incarné par des chercheurs (d'Iribarne, 1986; Aktouf, 1986) qui, sans nécessairement être issus d'institutions de formation en gestion, s'intéressent à l'analyse des dynamiques sociales dans les entreprises africaines ainsi qu'à la recherche de paradigmes susceptibles de rendre compte de ces dynamiques ». Ce courant représente dans la classification de B. Tidjani (1995), l'approche gestionnaire, dont les tenants estiment que les traditions africaines influent dans le fonctionnement des organisations. Les chercheurs étudient comment les cultures africaines peuvent affecter positivement ou négativement le pilotage des entreprises. Ce courant est le plus prolifique dans les travaux sur le management des organisations africaines avec des thématiques et des problématiques différentes et variées6.

Si on s'en tient à la majeure partie des travaux sur les liens entre management et culture (Hofstede, 1995 ; d'Iribarne, 1998), c'est la contingence qui doit primer dans l'enseignement du

4 Les freins sont : Les pesanteurs et les effets de la tradition communautaire, La vision mythique du chef et

l'exercice de l'autorité, La représentation et l'utilisation peu productive du temps, La prédominance du sacré et des comportements magico-religieux, La résistance à la formalisation écrite et à la gestion procédurale, L'opacité de la communication institutionnelle et le culte du secret, L'attrait du conformisme et la résistance au changement, L'exercice abusif du droit d'aînesse qui constitue un handicap majeur à la mobilisation des cadets sociaux.

5 Les ressorts sont : La solidarité communautaire pour le développement d'une éthique disciplinaire de groupe,

La socialisation de la parole donnée comme base de construction du contrat de confiance, L'hospitalité comme moyen d'insertion professionnelle des nouvelles recrues, L'enthousiasme individuel et collectif comme source d'engagement professionnel.

6 Voir Kamdem, 2000, dans ce sens.

management, à moins qu'il y ait, là aussi, « divorce entre pratique et recherche » (Demil & al. 2007). C'est probablement ce qui poussent Hernandez et Kamdem (2007) ainsi que d'autres chercheurs (Hernandez, 1997 ; Mutabazi, 2006) à promouvoir l'enseignement d'un modèle managérial endogène, développé à partir des pratiques « authentiques » anciennes et nouvelles (Kamdem, 2002)7. Hernandez et Kamdem (2007) appellent ainsi à l'enseignement d'une « autre gestion » plus proche des valeurs culturelles africaines, et des tissus économiques locaux où les activités agricoles et informelles l'emportent largement sur le secteur dit « moderne », c'est-à-dire en fait occidentalisé ». Ainsi, il faudrait abandonner les « bonnes recettes » des experts en gestion ou autres consultants internationaux qui « ont longtemps prétendu imposer en Afrique `la' bonne façon de manager, oubliant que les présupposés culturels implicites de ce modèle étaient fort éloignés du contexte africain et réduisaient ainsi à néant ses chances d'y réussir ». Il ne serait donc plus question que l'africain change de mentalité pour adopter les modèles occidentaux de management, mais plutôt l'inverse ; c'est-à-dire que les modèles de management mobilisés dans le contexte africain soient fondés sur les réalités locales. L'histoire occidentale dans ce domaine doit servir. Ge sont des praticiens, tels que Taylor, Fayol, etc., qui ont élaboré les premières réflexions sur le management à partir de leurs expériences personnelles. Le management en Afrique ne devrait-il pas s'inspirer d'expériences de terrain dont certaines ont fait l'objet de publications. B. Tidjani (1995) cite le cas, notamment de l'ouvrage de E. S. Ndione (1994) sur « L'économie urbaine en Afrique. Le don et le recours », ou encore « L'aventure de l'entrepreneur en Afrique : Chronique sénégalaise » de A. Bâ (2005), ainsi que les nombreuses expériences contenues dans « l'Entreprise et l'Entrepreneuriat en Afrique, au XIXème et XXème siécles »8. Gela fait dire à E. Kamdem (2002) que, si ces expériences entrepreneuriales étaient « bien étudiées en leur temps, elles auraient pu constituer les prémices d'un management africain authentique et fonctionnel, et susceptible d'être développé comme modèle alternatif par rapport au modèle émergent à l'époque en occident et devenu dominant par la suite notamment en Afrique » (c'est le modèle OST de Taylor).

Par ailleurs, des efforts doivent être faits pour « accroître le couplage du système Recherche- Pratique » dans le contexte africain (Demil et al, 2007). Parmi les moyens à envisager ces derniers proposent une méthodologie de recherche qui puisse intégrer de nouveaux critères de validité tels que la pertinence, la possibilité de mise en oeuvre ou la prise en compte de contextes spécifiques9 ; promouvoir des méthodologies telles que la recherche-action10.

7 Reprenant les actes de la conférence organisée en 1981 à l'université Paris VII sur « l'Entreprise et

l'Entrepreneuriat en Afrique, au XIXème et XXème siècles » publié dans un ouvrage collectif en deux tomes en 1983.

8 Voir supra, p11

9 Jean Marc Ela (2001) fait la même préconisation.

10 Emmanuel Seyni Ndione (1994) fait la même préconisation.

Nous pensons à la suite de J.M Ela (2001), que la PME familiale au Cameroun ne peut être compétitive que si une action adaptée aux spécificités de son contexte local lui est appliquée. Par ailleurs, à l'exemple de E.S Seyni Ndione (1994), nous pensons promouvoir à travers cette étude la pratique de la recherche intervention au Cameroun. En effet, il s'agit surtout ici de faire jouer aux sciences sociales un rôle de premier plan dans le développement de l'Afrique en général et du Cameroun en particulier. Cette vision est notamment défendue par Claude Abé (2003) dans « Les sociales et le devenir de l'Afrique ». Nous nous devons à présent de faire ressortir les difficultés auxquelles font face les entrepreneurs africains.

4.2 Les difficultés des entreprises et des entrepreneurs africains

Les travaux sur l'ajustement ou les entreprises en difficultés concernant le Cameroun sont rares. On retrouve quelques travaux sur ce thème en Afrique dans l'ouvrage collectif sous la direction de S. Ellis et Y.A Fauré (1995) Entreprises et Entrepreneurs Africains.

Par exemple, P. Labazée (idem : 142) évoque la perméabilité de l'entreprise africaine à son environnement culturel et social. Pour ce dernier, les difficultés des entreprises en Afrique sont liées au fait que la gestion des profits, marges et rentes capitalisés par les entreprises paraît échapper, au moins en partie aux critères de la décision économique. Il ajoute que « divers travaux évoquent les conséquences redistributives, des obligations magico - religieuses, des charges ostentatoires sur la valorisation des ressources financières dégagées au cours de l'activité ».

Les difficultés rencontrées par les femmes entrepreneurs et les tentatives d'ajustement de leurs activités sont reprises dans une étude du Ministère des Affaires Sociales et des Femmes du Cameroun (ibid : 474-482), présentant le cas de deux femmes propriétaires de moyennes entreprises à Bamenda affiliées à la North West Business Women's Association (NWBWA). Il ressort de cette étude que pour réussir dans leurs affaires les femmes entrepreneurs dépendent d'au moins trois facteurs : la disponibilité des crédits ; l'assistance des réseaux familiaux ; le fait d'être propriétaire d'un terrain. La prise en compte de ces facteurs s'avère essentielle pour la compréhension des difficultés des PME familiales au Cameroun, et particulièrement celles dont le propriétaire dirigeant est une femme comme c'est le cas de la SMF. Les femmes d'affaires réunies en association veillent à rendre leurs activités pérennes et efficaces en organisant des cours de gestion et de développement à destination des commerçantes. La formation en gestion représente donc un élément important dans la survie des PME.

Le métier d'entrepreneur ne s'apprend pas. En revanche, comme le soutient Y.A Fauré (ibid : 541) on peut apprendre des techniques de gestion et acquérir du savoir-faire. Néanmoins, « un problème majeur réside dans la faible ou la non disponibilité à la formation : le responsable

d'une entreprise ne souhaite pas apparaître comme celui qui apprend, ce qui signifierait qu'il ne sait pas, et il hésite également à quitter son activité, souvent très prenante, de crainte de s'exposer à des risques (perte de clientèle, relâchement des liens avec les fournisseurs, affaiblissement du contrôle des employés, etc.) ».

B. Ponson (ibid : 427-428) rappelle que les entreprises africaines exercent dans un environnement pénalisant. Il révèle que « l'Etat en Afrique a souvent pratiqué un interventionnisme de mauvais aloi :. multiplication des contrôles bureaucratiques injustifiés, pression fiscale excessive sur les entreprises du secteur formel, sans compter les prélèvements non officiels de toutes sortes... L'Etat s'est souvent révélé un prédateur redoutable pour les entreprises ». L'Etat en Afrique a insuffisamment contribué à la mise en place d'un environnement favorable aux PME.

Un document de l'Association Nationale des Entreprises Zaïroises (ANEZA), paru en décembre 1976, dresse la liste des défaillances constatées au sein des entreprises zaïroises :

absence totale d'activités commerciales, gestion inefficace, utilisation des fonds sociaux à des fins personnelles (construction de villas, achat de voitures etc.), absence totale de documents comptables, défaut de paiement des impôts, du personnel, de l'Institut National de Sécurité Sociale, non remboursement d'emprunts bancaires (ANEZA, circulaire du 15 novembre 1976). Cette situation au Zaïre est transposable au Cameroun, et particulièrement dans le cas soumis à notre étude.

Le cas de certains entrepreneurs comme celui de Blaise Tano Kouadio en Côte d'Ivoire (ibid : 341-345), montre qu'il est possible de s'ajuster après « une chute initiale ». Interrogé sur les causes de son échec, Tano Kouadio explique sans fard :

« Je me suis comporté comme un Africain. J'ai créé une société qui marchait bien et j'ai commencé à jouer le chef. J'achetais tout ce que je voulais. J'appelais mon comptable, je lui disais : « envoiemoi un million ». Je les dépensais. Je me suis cassé la figure ».

L'échec de la première entreprise est interprété a posteriori comme une épreuve formatrice :

« Se casser la figure, c'est une expérience à vivre. Résultat : les gens quand ils ont une boîte, je ne dis pas qu'ils sont guéris, mais ils savent la gérer. Parce que c'est terrible ».

le vice-président de la BAD, A. O. Sangowawa, établissait en 1993, lors d'une conférence organisée par le Comité des agences donatrices pour le développement des petites entreprises, un diagnostic fort intéressant au sujet des difficultés auxquelles doivent faire face les PME d'Afrique (P. English et G. Hénault, 1996 : 20) :

« [...] les petites entreprises méritent d'être encouragées en raison du grand intérêt et des merveilleuses possibilités qu'elles offrent du point de vue de la création d'emplois, de la répartition équitable du revenu, de la réduction de la pauvreté, de l'établissement d'un potentiel technologique local, de la participation au processus de développement des groupes qui sont dans une situation

économique précaire -- en particulier les femmes -- , de la création d'un terrain propice à la formation de gestionnaires et de chefs d'entreprises, de l'utilisation de leurs propres ressources pécuniaires et de la fourniture de services auxiliaires aux grandes entreprises. Bien qu'un nombre considérable d'États africains comprennent aujourd'hui l'importance des petites entreprises et se rendent compte qu'on doit favoriser leur essor, seuls quelques-uns d'entre eux ont adopté un train de mesures complet et efficace en ce sens. L'absence d'infrastructures, d'un cadre institutionnel et de mécanismes de financement appropriés ainsi que l'inefficacité des systèmes d'information existants ne sont que quelques-uns des sérieux obstacles qui entravent le développement organisé des petites entreprises en Afrique. »

Le représentant du secteur privé à cette même conférence, Alain Bambara, Président de Cosmivoire, résume les difficultés de l'entreprise et de l'entrepreneur africain (idem :22) :

« Quand une personne présente un projet, tout le monde part du principe qu'elle va échouer. On lui signale qu'elle sera en butte à des écueils, à des difficultés insurmontables. On lui dit que le secteur qu'elle veut exploiter est dominé par les expatriés et qu'elle n'a aucune chance. On lui conseille de s'intéresser à des secteurs plus rentables, comme si de tels secteurs pouvaient exister sans que les expatriés ne les remarquent.

Il règne chez beaucoup de nos administrateurs une mentalité qui n'encourage guère leurs frères à se lancer dans l'aventure de la petite entreprise. Au contraire, ils commencent même à l'étouffer par leur manière d'exercer leur autorité. Pour les esprits non suffisamment préparés à sassumer, de tels comportements sont vite décourageants.

Ce que je peux dire, c'est que ces tracasseries font partie du milieu de l'entreprise en Afrique et que l'entrepreneur doit s'en accommoder et trouver les moyens de s'en sortir. Le manque de fonds propres et l'insuffisance de sécurité sont souvent évoqués lorsqu'il est question des PME. Cest une réalité. Je me souviens avoir une fois sollicité un crédit à la Banque Nationale de Développement Agricole, pour ma plantation d'ananas. À l'époque, cette banque m'avait demandé de donner ma villa urbaine en garantie du prêt. Souvent, le patrimoine immobilier du promoteur n'est pas suffisant pour constituer une couverture-titres.

Par ailleurs, je viens de solliciter de la Société financière internationale un crédit, que j'ai obtenu. L'accord d'investissement est un document de 82 pages dont 36 traitent des conditions à remplir pour obtenir ce prêt. Je vous laisse deviner les difficultés qu'une PME pourrait rencontrer si d'aventure elle devait se trouver dans mon cas. Un État tout puissant qui passe une commande à des PME endettées et manquant de liquidités et qui ne leur paient pas leur dû, oeuvre pour la disparition d'un secteur dont lui même veut faire la promotion. »

La multiplication et la diversification de la production africaine sur les organisations, tel qu'on vient d'en avoir un aperçu ci-dessus, ne doivent pas faire illusion.

E. Kamdem (2000) relève deux principaux freins au développement des sciences de gestion en Afrique. C'est d'une part « la représentation négative de l'organisation », et d'autre part « la faible conceptualisation de l'objet `Organisation' ». L'organisation de production économique, loin de susciter un attrait aux yeux des africains, est plutôt devenue une source de méfiance car, étant susceptible de produire toutes sortes de nuisance chez l'individu11. Très souvent en Afrique, le concept d'organisation est largement confondu avec celui d'organisation administrative ou politique, c'est probablement pourquoi les chercheurs africains en sociologie et en sciences sociales ne se sont pas beaucoup passionnés pour cet objet d'étude davantage considéré comme une préoccupation des chercheurs en sciences juridiques et politiques. En outre, l'insuffisance, voire l'absence de ressources financières et matérielles est très souvent invoquée pour expliquer le retard pris par la recherche en général en Afrique. Nous pensons plutôt que le développement de la recherche aujourd'hui en Afrique est d'abord une affaire de volonté politique des dirigeants et d'engagement personnel des chercheurs avant d'être une affaire de disponibilité des ressources financières12.

Après avoir fait un état de la littérature sur notre thème d'étude, il est question à présent de faire ressortir la problématique de recherche. En effet, « Dans la pratique du monde réel, les problèmes ne se présentent pas d'eux-mêmes au professionnel comme des données. Ils doivent être construits à partir des matériaux de situations problématiques qui sont curieux, troublants et incertains. Pour transformer une situation problématique en problème, un professionnel doit effectuer un certain travail. Il doit donner du sens à une situation incertaine qui, initialement, n'en a pas » (Weick, 1995).

11 `Le travail du blanc ne finit jamais', telle est la phrase quasi rituelle prononcée aujourd'hui par nombre d'africains chaque fois qu'ils veulent exprimer la lassitude et la désaffection ressenties à la fois dans le travail industriel et dans son mode d'organisation.

12 Il est important de souligner ici le rôle central de certaines structures de financement et de vulgarisation de la recherche, à l'instar du Conseil Africain pour le développement de la Recherche en Sciences Sociales en Afrique (CODESRIA).

5 - LA PROBLEMATIQUE

A la suite de H. Mintzberg, les théoriciens de l'école de la contingence stipulent que la P.M.E est condamnée à s'ajuster à son environnement. Dans le contexte africain, la prise en compte de la contingence et de la culture dans le management des organisations africaines est devenue indispensable comme le soutiennent nombre d'auteurs (Tidjani, 1995, Kamdem 2002, Ela, 2006). C'est dans cette perspective que E. Kamdem (2002) voit dans la capacité de l'entrepreneur africain à s'ajuster à son environnement politique, social et surtout culturel, le facteur clé de succès de l'entreprise en Afrique. Ainsi, les déséquilibres constatés au niveau des données industrielles, sociales et financières de la SMF, ont conduit en mai 2006, à la mise sur pied d'un plan d'ajustement de l'entreprise. Le succès enregistré à court terme par ce dernier - résorption d'un déficit de trésorerie de 20 millions Fcfa et assainissement du climat social et des relations avec les partenaires de mai 2006 à février 2007- apparaît être un écran de fumée, tant il est vrai qu'un an plus tard, jusqu'au moment de cette étude les indicateurs financiers de la SMF dévoilent de nouveau une dégradation de la trésorerie de l'entreprise. Cette situation entraîne de nouveau, inexorablement l'entreprise vers une crise sociale et industrielle. Face à cette résurgence des déséquilibres ayant suscité la mise en oeuvre d'un plan d'ajustement de l'entreprise, nous nous interrogeons sur les causes réelles de ces derniers. L'objectif est de déterminer ce qui rend compte de cette situation. Cela dit, quels sont les facteurs explicatifs de l'incapacité du processus d'ajustement à assurer la cohérence externe et interne de l'entreprise à moyen terme? En d'autres termes, comment s'est effectué l'ajustement de la SMF ? Quels en sont les résultats et quels sont les indicateurs qui en rendent compte ?

6- LES HYPOTHESES DE RECHERCHE

Certains facteurs jouent un rôle prépondérant dans l'inefficacité du processus d'ajustement à moyen terme : l'environnement proche (concurrents, clients, fournisseurs, partenaires publics, institutions financières) de l'organisation, le style de management utilisé par le propriétaire dirigeant, la méthode utilisée pour conduire le processus d'ajustement et les résultats qui en découlent.

7- METHODOLOGIE

La problématique de recherche et les hypothèses ainsi définies, la démarche à suivre en découle presque automatiquement, il ne peut s'agir que d'une démarche rigoureuse, dans laquelle les enquêtes appellent des analyses et des réponses rigoureuses suivant divers éclairages spécifiques et complémentaires. Étant nous mêmes impliqués dans le processus d'ajustement de l'entreprise, nous ne pouvons mieux évaluer ce dernier, qu'à travers une méthode qui puisse nous permettre d'explorer les systèmes internes de la SMF et de produire des connaissances à la fois scientifiques et utiles à l'action comme la recherche intervention en sciences de gestion. Dans un deuxième temps, l'approche de la sociologie des mutations dans les sociétés traditionnelles de Georges Balandier permettra de mieux comprendre les nombreuses mutations, et ruptures enregistrées dans le processus de changement organisationnel engagé au sein de la SMF.

7.1 Approche de la recherche intervention en sciences de gestion

La recherche intervention consiste à aider sur le terrain, à concevoir et à mettre en place des modèles, outils et procédures de gestion adéquats, à partir d'un projet de transformation plus ou moins complètement défini, avec comme objectif de produire à la fois des connaissances utiles pour l'action et des théories de différents niveaux de généralité en sciences de gestion. Le « terrain » a donc, dans ce type de recherche, un statut enrichi par rapport à des démarches d'observation classiques. Loin de se réduire à un lieu d'expérience « aquarium » que le chercheur observerait de l'extérieur, le terrain constitue au contraire un lieu d'émergence de la connaissance pratique et de la théorie13.

A. Hatchuel (1994) propose une conception générale de l'intervention adaptée à la fois aux problèmes des organisations contemporaines et aux besoins de production de connaissance scientifiques: « La vie organisationnelle naît avec la formation d'acteurs nécessairement différenciés et toujours en quête de ce qui peut fonder leurs relations. Elle est aussi faite de la mort ou de la métamorphose de ces acteurs. Le chercheur qui veut penser un processus d'intervention ne peut échapper à cette « loi naturelle ». Mais pour que son intervention ait un sens, il devra lutter contre cette loi lorsqu'elle se fonde sur une représentation mutilée des faits et des relations entre les acteurs »

13 Les fondements épistémologiques de la méthode de recherche intervention s'inspirent de la Grounded theory

de Glaser et Strauss (1967, 1995), qui repose sur un axiome principal : la théorie se construit sur les faits, elle vient d'en bas, du terrain, et nécessite l'usage d'une analyse comparative. La Grounded theory vise, non pas à fournir une description exhaustive d'un objet, mais "à développer une théorie qui permette de rendre compte d'une partie importante des comportements considérés"

(Hatchuel, 1994 : 60).

Cette dernière phrase justifie clairement la position normative de l'intervenant. Or, les techniques managériales, les mots d'ordre organisationnels comme la décentralisation, la qualité totale, la participation, l'entreprise apprenante ou le reenginiering fonctionnent, dit A. Hatchuel, comme des mythes rationnels, c'est-à-dire comme des utopies possédant à la fois les propriétés mobilisatrices du mythe et les propriétés opératoires de la raison. La démarche d'apprentissage viendra non pas comme dans l'action science, de la confrontation des discours dans le cadre d'un travail collectif du groupe sur lui-même, mais, de la dynamique de la construction collective de l'innovation gestionnaire. Le processus d'apprentissage se matérialise ici simultanément par « la production de connaissances nouvelles et par la construction de nouvelles figures d'acteurs, dont le chercheur pourra analyser les difficultés, la portée et l'éventuelle exemplarité » (Hatchuel, 1994 : 74), que le chercheur soit ou non co-producteur du mythe rationnel. Cette démarche nous offre la possibilité tout en ayant été impliqué dans le processus d'ajustement, de prendre nos distances dans la perspective de production de nouvelles connaissances sur l'ajustement des PME familiales à leur environnement socio-économique.

Du point de vue méthodologique, la recherche intervention s'articule autour de cinq principes : le principe de rationalité accrue, le principe d'inachèvement, le principe de scientificité, le principe d'isonomie et le principe des deux niveaux d'interaction.

Le principe de rationalité accrue indique que le chercheur intervenant doit « favoriser une meilleure adéquation entre la connaissance des faits et les rapports qu'ils rendent possibles entre les hommes » (Hatchuel, 1994 : 68). Ce principe rompt clairement avec la rationalité universelle en méme temps qu'il spécifie le rôle du chercheur par rapport aux acteurs de l'organisation avec lesquels il travaille. Il s'agit non pas de mettre en place un dialogue entre les acteurs ou d'apporter de l'extérieur des connaissances d'expert, mais, de penser la mise en comptabilité de relations et de savoirs nouveaux, et c'est cette opération qui constitue précisément la démarche de rationalisation.

Le principe d'inachèvement, indique qu'il est impossible de spécifier à l'avance le chemin et les résultats d'une recherche intervention : c'est le but du dispositif de générer des connaissances nouvelles de nature à faire évoluer l'organisation.

Le principe de scientificité correspond à l'idéal de vérité. Il est la conséquence méthodologique du principe de rationalité accrue : le chercheur doit avoir en permanence une attitude critique par rapport aux faits. Le chercheur n'est pas « l'expert des experts », mais, doit s'interroger sur les conditions de validation des savoirs mobilisés au cours de l'intervention, que ces

savoirs soient d'ordre technique ou d'ordre plus sociologique.

Le principe d'isonomie correspond à l'idéal démocratique, que nous avons rencontré aussi dans les démarches d'action research, action science et science de l'aide à la décision. Il indique que « l'effort de compréhension doit s'appliquer également à tous les acteurs concernés » (Hatchuel, 1994 : 68). L'intervention elle-même doit donc se traduire concrètement par la mise en place d'un système d'échanges entre acteurs qui respecte à la fois recherche de vérité et démocratie.

Le principe des deux niveaux d'interaction indique que la recherche intervention suppose à la fois un dispositif d'intervention et une démarche de connaissance. Dans le dispositif d'intervention, la relation du chercheur aux autres acteurs n'est pas fixée à l'avance : « tout processus d'intervention est une complexification du fonctionnement initial, selon un mode très particulier : [...] l'apparition d'acteurs délocalisés, c'est-à-dire d'individus dont les relations aux autres acteurs ne sont pas déjà codifiées, mais se construisent en fonction du déroulement de l'intervention elle-même » (idem : 69). La démarche de connaissance est une démarche activatrice, dans laquelle le chercheur stimule la production de nouveaux points de vue : « les relations nouvelles que crée le dispositif d'intervention ont pour objet de créer une nouvelle dynamique de connaissance et la confrontation entre les savoirs de l'intervenant et ceux des acteurs concernés » (ibid. : 69).

Au total, « l'intervention n'est pas seulement l'exploration d'un système, mais, la production de savoirs et de concepts qui permettent de penser les trajectoires dans lesquelles un collectif pourrait s'engager » (ibid. : 70). En particulier, dans les pratiques de recherche intervention en sciences de gestion, la modélisation rationnelle joue un rôle important. Le modèle constitue un mythe rationnel autour duquel se structure progressivement l'intervention :

« Les modèles rationnels sont un moyen de concevoir des comportements idéalisés - des mythes

rationnels - dans des situations structurées. Ils ne sont pas d'abord destinés à être implémentés, niappliqués: ils constituent une référence par rapport à laquelle l'analyste confronte les

comportements observés de certains acteurs. [...] Cette confrontation permet à l'analyste de construire avec ces acteurs une nouvelle vision des contraintes et des objectifs par rapport auxquels ils opèrent ». (Hatchuel et Molet, 1985 : 377).

Le changement est vu ici comme étant toute transformation intentionnelle du système par un groupe d'acteurs - dont le chercheur peut faire partie - du point de vue de sa gestion, c'est -à dire toute mise en place de « façons de faire » nouvelles. La démarche part d'une situation idéalisée ou d'un projet concret de transformation avec pour objectif d'aider sur le terrain, à mettre en place des modèles et outils de gestion adéquats, à partir d'un projet de transformation plus ou moins

complètement défini. Toute démarche d'intervention se traduit, au minimum, par une observation de ce qui se passe sur le terrain, et va jusqu'à l'aide à la conception et à la mise en oeuvre de changements concrets au sein des organisations étudiées. Nous pouvons donc, grâce à cette méthode, appréhender les transformations en oeuvre au sein de l'entreprise après la mise en place de l'ajustement et proposer des outils à méme d'assurer une cohérence interne et externe à moyen et long terme des PME familiales camerounaises.

La recherche intervention en sciences de gestion n'a pas les limites de la simple observation, elle ne souffre pas de l'absence de vision organisationnelle de la conception « en chambre » de modèles et d'outils14 et elle ne limite pas ses outils d'intervention au travail sur les relations collectives, et autorise une intervention sur les objectifs pratiques de l'organisation, contrairement à l'action research et l'action science, telles que définies respectivement par Lewin et Argyris15. Cette portée pratique et stratégique de la recherche intervention s'avère importante pour assurer le développement des PME familiales camerounaises. Donnant au chercheur une position « au coeur de la gestion », elle permet donc aussi d'accéder à une plus grande variété de connaissances sur les organisations et leurs modes de gestion. Il est évidemment possible que l'observation donne lieu à des recommandations pour l'action. Le chercheur peut alors concevoir « en chambre » des modèles et outils qu'il pense adaptés au contexte qu'il a étudié.

7.1.1. La boîte à outils du chercheur intervenant

L'intervention du chercheur en entreprise représente l'irruption d'un acteur nouveau dans l'action collective, intervention qui est susceptible de transformer, à des degrés divers, le cours des choses. Le modèle du chercheur - intervenant, nous l'avons vu, est donc un modèle sophistiqué :

- la distinction entre le chercheur et le système qu'il observe, très nette dans les démarches expérimentales ou d'observations non participantes classiques, se complexifie en recherche intervention; le chercheur participe concrètement à l'action, d'une part, et les acteurs sont amenés à réfléchir sur leur propre système d'action, d'autre part.

- le chercheur - intervenant et les acteurs avec lesquels il travaille forment ensemble un groupe

14 La conception « en chambre » de modèles de gestion, qu'il s'agisse d'outils de gestion très concrets ou

d'utopies de divers ordres (par exemple, « l'entreprise idéale »), consiste à formaliser assez précisément l'outil ou le modèle, mais sans savoir s'il sera contextualisable. Lire A. David (2000) « La recherche intervention, un cadre général pour les sciences de gestion » communication, conférence internationale de management stratégique.p15.

15 Pour des développements récents sur l'action research, voir, entre autres, le numéro spécial que la revue

Human Relations a consacré à ce thème en 1993 (Action Research, Special issue, Volume 46 Number 2. February 1993. Pages 121-298). L'action recherche part plutôt de l'idée de préparer un groupe au changement : processus participatif, autonomie donnée aux acteurs entraînent une forme de libération des individus et du collectif, donc un changement dans les relations qui est à son tour de nature à engendrer des transformations concrètes dans les processus de décision.

d'acteurs engagés collectivement dans un processus d'apprentissage ; l'une des conséquences est que le chercheur devra pouvoir s'analyser lui-même en train d'agir ; l'action du chercheur fait donc partie des événements soumis à l'analyse ;

- du point de vue scientifique, il est primordial de pouvoir répondre à la question de savoir comment, avec quelle légitimité et jusqu'à quel point le chercheur doit être concepteur et prescripteur des transformations d'un système organisé, et dans quelles conditions les connaissances issues de l'intervention pourront être considérées comme scientifiques. La « boîte à outils » du chercheur - intervenant aura donc quatre compartiments : des principes épistémologiques, des théories, concepts et grilles d'analyse, un dispositif expérimental, des règles méthodologiques.

Il s'agit pour le chercheur intervenant premièrement de respecter les cinq principes épistémologiques de la recherche intervention Il s'agit des principes de rationalité accrue, d'inachèvement, d'isonomie, de scientificité et de double - niveau d'interaction que nous avons exposés ci-dessus.

Deuxièmement, de maîtriser les concepts de la théorie des organisations, connaître les outils de gestion, savoir acquérir des compétences techniques.

Ensuite, il doit être à méme d'utiliser la conception et la mise en oeuvre d'outils de gestion et de procédures d'organisation comme dispositif de connaissance. En recherche - intervention, le dispositif de connaissance est à double niveau (principe des deux niveaux d'interaction) :

- Supposons que l'intervention ait pour but la conception et la mise en place d'un outil d'aide à la décision, comme c'est le cas dans notre étude. Les entretiens, l'analyse documentaire, l'observation des acteurs au travail vont produire un premier ensemble de connaissances sur le système étudié et permettre l'élaboration de conjectures sur ses trajectoires possibles, en particulier par rapport au processus de décision à instrumenter.

- Mais, à un second niveau, le processus de transformation enclenché par la conception et l'implémentation de l'outil est à son tour générateur de connaissances scientifiques, à la fois sur l'outil mis au point (progrès des techniques de gestion - ici, un nouvel outil d'aide à la décision), sur ses implications organisationnelles (compatibilité outil/organisation, par exemple en termes de possibilités de décentralisation des décisions ou d'amélioration de la coordination), sur le changement et son pilotage (comment concevoir et gérer une action de changement). Dans cette optique, le chercheur intervenant dans les PME familiales au Cameroun est un porteur de changement16. Nous nous basons sur cette boite à outils pour mener une action adaptée à la situation

16 Kanter, Stein et Jick (1992:378) proposent trois grandes catégories d'acteurs impliqués dans le processus de changement au sein des organisations : les stratèges, les maîtres d'oeuvres et les récepteurs (change strategists, change implementors, change recipients). Le chercheur intervenant appartient selon nous à la fois à la catégorie des stratèges et à celle des maîtres d'oeuvres.

de l'entreprise étudiée.

7.1.2. Appliquer sur le terrain trois grands principes méthodologiques

Trois principes méthodologiques qui constituent la traduction concrète de ce qui précède seront appliquées à notre cas pour comprendre son système de fonctionnement et parvenir à une cohérence interne et externe de l'organisation : le principe d'investigation prospective, le principe de conception et le principe de libre circulation entre niveaux théoriques.

Le principe d'investigation prospective signifie qu'il faut conduire la recherche en ayant à l'esprit qu'il s'agit de concevoir ou d'accompagner des projets de transformation, donc des trajectoires collectives possibles pour le système étudié, et non de faire une analyse statique: les entretiens, par exemple, ne prendront donc que rarement, en recherche - intervention, la forme de questionnaires semi - directifs avec liste de questions fixées à l'avance et identiques pour tous et seront plus proches du déroulement d'une enquête policière. Cette méthode s'avère utile pour la collecte de données au sein des PME familiales dans un milieu en mutation. En effet, la majorité des acteurs au sein de ces dernières acceptent difficilement la réalité des mutations en cours dans leur milieu et se confient difficilement.

Le principe de conception suppose que le chercheur dépasse rapidement la phase des entretiens pour passer à la phase d'intervention proprement dite, c'est-à-dire à la conception et la mise en oeuvre d'outils de gestion et d'organisation adéquats par rapport à la problématique gestionnaire retenue. En prenant appui sur ce principe, nous pourrons concevoir de nouveaux outils de gestion et d'organisation adaptées à la PME familiale au Cameroun en général et à notre cas d'étude en particulier, qui puissent combler les insuffisances des mesures mises en oeuvre lors du processus d'ajustement conduit en 2006.

Le principe de libre circulation entre niveaux théoriques signifie que le chercheur travaille sans cesse en reliant les faits observés à des théories intermédiaires ou plus générales (David, 1999). Il doit, en même temps, expliciter les inférences faites à partir des observations de terrain ou à partir de théories de différents niveaux, pour garantir sur le plan technique la scientificité des résultats : validité interne (cohérence logique), validité externe (conditions de généralisation).

Dans le but de faire ressortir les processus de changement à l'oeuvre au sein de la SMF, à travers les résistances et les adaptations au changement, nous avons fait appel à l'approche théorique de la sociologie des mutations.

7.2 Approche de la sociologie des mutations dans les sociétés traditionnelles de Georges Balandier

Cette approche met en exergue les dynamiques sociales à l'oeuvre au sein des sociétés « traditionnelles " ou « sous développées ". Et d'autant plus que la dynamique sociale reste vue généralement sous l'aspect du changement, de la transformation des structures; en négligeant l'observation qu'elle est d'abord inhérente à ces dernières et à tout instant active; en sous estimant le fait qu'elle résulte aussi des facteurs externes, du système de relations extérieures, et non seulement des facteurs internes déterminant le cycle de vie des sociétés (Balandier, 1981:15). Il s'agira aussi pour nous, de déceler l'importance de ces facteurs externes et internes sur le processus de transformation/amélioration, que nous souhaitons mettre en place au sein de l'entreprise.

Par ailleurs, les sociétés étudiées aujourd'hui en Afrique noire résultent du conflit de deux principes de structuration et d'organisation qui sont contradictoires : d'une part, la parenté large - « les liens de sang " -, l'alliance et la justification mythique de l'ordre des rapports sociaux ; d'autre part, les différenciations et les compétitions qu'impliquent l'économie de marché, le rationalisme économique et les calculs auxquels se trouvent de plus en plus contraints les individus et les groupes. Cette dualité dans le monde de l'entreprise africaine est encore plus criarde au sein des PME familiales. A l'observation, la famille semble prendre le pas sur la rationalité économique dans les PME familiales au Cameroun. Les mutations en cours entre tradition et modernité dans les pays sous développés, génèrent de nombreux coûts sociaux inhérents à ces changements. Cette transformation introduit l'Africain dans un univers social plus hétérogène et plus instable, mais aussi plus abstrait, que celui régit par la coutume jusqu'à une date récente (idem : 223).

Le progrès n'est plus associé à un développement continu, les changement fondamentaux ne peuvent simplement résulter d'un processus cumulatif ; ils se réalisent par sauts, à la faveur d'un mouvement discontinu, brusqué, sur le mode des mutations reconnues dans l'ordre biologique (idem :21) .

Dans le rapport dit des cinq experts, publié en 1951 par l'Organisation des Nations Unies et repris par G. Balandier (1981), un chapitre particulier est consacré à l'énumération des « conditions du développement économique ". Il souligne avec force combien le contexte socio-culturel joue un rôle déterminant et peut être un frein à l'innovation : « Le progrès économique ne se produit que si l'atmosphère est favorable, que si la population est éprise de progrès et si les institutions sociales, économiques, juridiques et politiques sont favorables au progrès... Une société n'aura aucun désir de progrès si elle ne se rend pas compte que le progrès est possible. Le progrès ne se produit que si la population est persuadée que l'homme peut, par un effort conscient, dominer la nature... " Cependant, pour G. Balandier (1981:236), il serait trompeur, au plus haut degré, de laisser entendre

que le progrès est simplement une affaire de choix. La conversion des « sociétés traditionnelles » n'exige pas seulement une mobilisation du capital intérieur et une aide extérieure complémentaire, un transfert de complexe technique, mais, qu'elle implique nécessairement la lente croissance de nouvelles aptitudes, de nouvelles manières de faire, de vivre et de penser. S'il y a un dynamisme incontestable des sociétés non industrialisées, ce dernier n'opère pas nécessairement dans le sens propre aux sociétés développées ; les forces de changement ne visent pas d'abord à une amélioration des conditions matérielles de l'existence. On peut donc dire que la résolution des problèmes que crée l'état de sous-développement implique, en particulier, une ré-orientation du dynamisme interne. Ceci n'est guère possible que par le truchement d'une véritable « mobilisation idéologique ».

De manière pratique, l'ajustement des PME familiales au Cameroun nécessite de parvenir tout d'abord à une cohérence interne au sein des organisations, ceci ne peut être atteint que grace à la diffusion de nouvelles cultures organisationnelles basée sur une prise de conscience collective des divers intervenants. Cette mobilisation idéologique des acteurs des PME produira les conditions propices à un maintien à moyen ou long terme des effets des processus de changement. La diffusion de la civilisation industrielle ne pose pas seulement un problème d'adaptation technique, elle requiert un nouvel aménagement des motivations et, en conséquence, elle exige de l'individu une véritable conversion à court terme.

Il ajoute que ce qui se trouve mis en évidence, c'est principalement : « a) L'absence d'ajustement total de toute société à ses divers environnements - le milieu et lensemble des sociétés-partenaires; b) La réalisation et le maintien de tout ordre social par le jeu d'approximations successives en dépit d'apparences souvent contraires; c) le décalage entre les valeurs, les normes, les règles qui fondent la société « officielle » et celles qui se manifestent par la pratique des divers agents sociaux » (Balandier, 1981: 15-16). Ainsi, le processus d'ajustement des PME familiales au Cameroun à leur environnement socio - économique ne peut être abouti, aisé, au contraire, il doit sans cesse être revu, pour répondre aux mutations continuelles de l'environnement social, économique, culturel, technologique....

8- OUTILS DE COLLECTE DES DONNEES

Deux types de données constituent l'information. Il y a d'abord les données contextuelles formelles qui fournissent une première information descriptive. Elles proviennent essentiellement de la littérature "grise", c'est-à-dire les documents qui circulent dans l'entreprise ou qui la présentent (procès-verbaux de réunions, règlements intérieurs, dépliants de présentation...). Ensuite, nous procédons à l'observation des faits, à partir de laquelle nous pourrons interpréter les données de manière critique et scientifique. Nous avons eu recours à l'observation participante, ayant déjà passé trois ans au sein de la SMF. Pour permettre un effet connaissance minimal sur l'organisation, les données contextuelles formelles sont associées aux informations issues des entretiens réalisés dans l'entreprise auprès de ses membres. Les entretiens ont été conduits selon le principe d'investigation prospective propre à la méthode de la recherche intervention et qui se rapproche de l'enquête policière17. Les informations issues des entretiens ont une portée compréhensive plus importante que les données contextuelles formelles dans la mesure où elles révèlent le sens que les acteurs donnent à leurs actes, et en quoi ils sont des créateurs actifs du social.

9- DELIMITATION DU CHAMP D'ETUDE

Cette étude part de la nécessité de contribuer à l'ajustement des PME à leur environnement socio - économique au Cameroun, à travers la méthode de la recherche intervention en sciences de gestion. Pour cela, nous avons choisi de nous appesantir sur le cas d'une entreprise familiale, en l'occurrence la SMF basée à Edéa. C'est dans les pays et les régions en voie de développement que la méthode des cas est susceptible d'apporter la contribution la plus importante à l'enseignement du management (Reynolds, 1985: 2). Cette recherche évalue le processus d'ajustement mis en oeuvre au sein de la SMF de mai 2006 à février 2007, et les résultats qui en découlent à court terme (à la fin du processus), à moyen terme (un à deux ans après la fin officielle du processus), afin de parvenir à une cohérence interne et externe durable de l'organisation.

17 Voir supra, p 22, pour plus de détails.

10- DEFINITION DES CONCEPTS

Il convient d'examiner certains des concepts majeurs utilisés dans cette étude.

10.1 Définition de la notion de changement organisationnel

Dans les sciences de la gestion, le changement est encore un thème qui « englobe de nombreuses significations différentes. Changer, c'est tout à la fois : devenir, s'ajuster, s'adapter et transformer » (Beaudoin, 1990 : 43).

D'après Grouard et Meston (1998: 98), le changement organisationnel est le "processus de transformation radicale ou marginale des structures et des compétences qui ponctue le processus d'évolution des organisations". Ces derniers donnent deux types de changements, ceux qui sont provoqués et ceux qui sont subis. Le changement provoqué ou changement choisi, souhaité, volontaire est décidé pour améliorer une situation, soit pour anticiper une possible dégradation de celle-ci. Le changement subi ou imposé "est celui qui est engagé tardivement. Il devient alors la condition nécessaire à la survie de l'entreprise ou de la partie concernée de celle-ci" (Grouard et Meston, 1998: 9). Il y a quelques causes communes qui déclenchent généralement le changement et qui s'expliquent par des facteurs externes ou internes.

Les facteurs externes sont généralement associés à l'environnement dans lequel se trouve l'organisation ou à des éléments qui lui sont extérieurs et qui changent. Grouard et Meston (1998) ont identifié six principaux facteurs externes, facteurs qui sont aussi des motifs de changement : le marché, la concurrence, les innovations technologiques, l'évolution de la législation et de la réglementation, la modification de l'actionnariat et enfin, l'évolution de la société et des modes de penser. Les facteurs internes sont associés à l'organisation elle-même. Grouard et Meston (1998) ont identifié deux facteurs internes, appelés aussi mobiles des changements : (1) le développement de l'entreprise et sa croissance, et (2) la vision du dirigeant.

La résistance au changement est définie comme « l'expression implicite ou explicite de réactions de défense à l'endroit de l'intention de changement » (Collerette et al, 1997:94). De nombreux facteurs handicapent le processus de changement au sein des entreprises. On enregistre huit principaux écueils : ne pas stimuler suffisamment le sentiment d'urgence, ne pas constituer de noyau dur, manquer de vision, minimiser l'effort de communication, laisser des obstacles, ne pas se donner de repères sur le court terme, crier trop tôt victoire, ne pas ancrer le changement dans la culture de l'entreprise (Kotter, 2000 : 3-22). « Les routines défensives » représentent pour R.

Martin (2000 :138), le rejet implicite et systématique des essais de changement par les salariés. En période de crise, l'état d'esprit des salariés ne les porte pas à en apprendre plus sur la réalité, mais plutôt à la glorification implicite du passé et, avec lui, les pratiques actuelles - pourtant cause d'échec (Martin, 2000 : 138).

A propos de l'adaptation ou ajustement, E. Morin (1996) distingue et oppose deux types d'ajustement, à savoir l'adaptation à une situation et se tirer d'affaire, c'est-à-dire le coping. L'adaptation à une situation « suppose que l'évènement ou le stimulus échappe au contrôle de l'individu ; ses comportements doivent s'ajuster aux circonstances [...], alors que se tirer d'affaire implique que les conséquences de l'action dépendent des décisions de l'individu » (Morin, 1996 : 231).

La gestion du changement est parfois assimilée à une sculpture mobile qu'il convient

d'équilibrer. Parvenir à cet équilibre critique implique, que l'on suive le dialogue entre ceux quisont censés conduire le processus et ceux dont on attend qu'ils mettent en place les nouvelles

stratégies ; que l'on crée un contexte institutionnel favorable ; que l'on tienne compte des émotions qui, bien que traditionnellement exclues des lieux de travail, n'en sont pas moins essentielles à la réussite de la transformation (Duck, 2000 :65).

La pratique de l'audit organisationnel est perçue par T. Goss et al (2000 :114), comme la première action à entreprendre pour conduire le changement au sein d'une entreprise. Un diagnostic généralisé du fonctionnement de l'entreprise, pour s'en faire une image complète.

10.2 Définition de la notion d'entreprise familiale

Dans le cadre de la théorie des organisations, le nombre de travaux consacrés à l'étude de l'entreprise, ne cesse de croître. On se limitera ici à donner la définition dominante qui relève de l'approche systémique (Lexique de Gestion 2003 :222) : « l'entreprise est un système socioéconomique structuré ouvert sur son environnement, finalisé devant satisfaire des exigences de pérennité et de flexibilité, et tenter d'assurer la réalisation des objectifs des différentes parties prenantes (propriétaires, salariés, fournisseurs, clients, puissance publique) ».

La création d'une entreprise, par son propriétaire, doit être stimulée par la recherche des profits et a pour objectif une accumulation efficiente (Tchankam 2000:5).

Pour P. Labazée (1991:544), l'établissement africain se présente comme un lieu de compétition quotidienne entre l'impératif d'équilibre financier et les contraintes de solidarité envers la famille et le réseau relationnel du promoteur.

A propos de la famille, nous pouvons dire que cette institution est présente dans toutes les sociétés. D'après le dictionnaire d'économie et des sciences sociales (1993), deux sens recouvrent ce vocable. Il peut désigner l'ensemble des personnes qui ont des liens de parenté et d'alliance (grands parents, oncles, tantes, cousins etc.). Mais, il correspond aussi au groupe de personnes qui vivent ensemble dans le même foyer, c'est-à-dire généralement les parents et les enfants.

Pour le lexique des sciences économiques et sociales (1996), elle est un "groupe" caractérisé par la résidence commune et la coopération d'adultes des deux sexes et des enfants qu'ils ont engendrés ou adoptés".

Pour J.P Tchankam (1998: 2) en Afrique, les recherches ont montré que la famille est un vaste réseau de contacts parmi lesquels on trouve des fournisseurs, des consommateurs, des fonctionnaires (ou protecteurs), etc. Elle fournit en général une main-d'oeuvre (y compris les apprentis) qu'il faut ménager et qui est payée par l'entreprise, malgré ses prestations médiocres. Les relations sociales au sein de la famille sont onéreuses, en particulier les cérémonies, telles que les mariages, les baptêmes, les funérailles, les pèlerinages. La caisse de l'entreprise est celle de la famille et sa croissance est fortement concurrencée par les besoins quotidiens de la parentèle...18

La PME familiale quant à elle peut être définie comme une organisation à taille humaine, dont la propriété et le pouvoir de gestion sont sous le contrôle effectif des membres de naissance ou par alliance d'une méme famille (Handler 1989 ; Hugron 1998). Ce qui, quelle que soit la forme juridique adoptée, se traduit le plus souvent par une confusion implicite des patrimoines de la famille et de l'entreprise (Hirigoyen, 1981). Elle présente la particularité de se situer à l'intersection d'un système familial fonctionnant selon une logique d'émotivité et d'un système entreprise géré selon une logique de rationalité (Goetschin, 1987). Elle est ainsi régie par un compromis issu des valeurs, des normes et des objectifs des deux systèmes. Du point de vue du management stratégique, cela sous-entend que le contrôle de la progression de l'entreprise vers la réalisation des objectifs se fait dans le respect des normes, des règles et des valeurs en cours au sein du système - entreprise et du système- famille (Chua et al. 1996). Pour Davis (1983), c'est cette interaction entre deux organisations -- la famille et l'entreprise qui caractérise l'entreprise familiale.

18 Lire à ce sujet B. Ponson, « Individualisme ou communauté : quelques implications managériales pour

l'entreprise en Afrique » in G.Hénault et R.M'Rabet (1990 :18) L'entrepreneuriat en Afrique francophone : culture, financement et développement, Paris, John Libbey.

10.3 Définition de la notion de PME

Nous pouvons considérer la P.M.E en Afrique, dans son aspect qualitatif, comme étant une entreprise à but lucratif, gérée de façon autonome, possédant une petite part de marché dans son secteur d'activité (Chirishungu, 2001 : 36). Quant à son aspect quantitatif, cela dépend de la classification et les critères adoptés par chaque pays. Les enquêtes effectuées en contexte africain se sont basées sur la classification du nombre d'employés:

- Une entreprise artisanale : moins de 10 employés ;

- Une petite entreprise : moins de 30 employés ;

- Une moyenne entreprise : moins de 100 employés.

Au Cameroun, l'article 113 (3) du Code Général des Impôts stipule que les petites et moyennes entreprises sont celles dont le chiffre d'affaires est inférieur à un milliard de francs CFA. La SMF répond aux caractéristiques de la moyenne entreprise, car, disposant d'un effectif de moins de 100 employés. En addition, ayant réalisé un chiffre d'affaires de plus de 100 millions de francs CFA au cours de l'année 2006, elle est enregistrée depuis mars 2007 au Centre des Impôts des Moyennes Entreprises de Douala.

10.4 La notion d'entreprise en difficulté

Trois concepts sont retenus pour définir une entreprise en difficulté (Daigne, 1993:22): - entreprise non rentable en état de cessation des paiements ;

- entreprise saine, si ce n'est très performante, mais extrêmement vulnérable, car ayant un taux de croissance trop important et une sous capitalisation financière chronique;

- entreprise présentant des déséquilibres au niveau de ses :

· données industrielles = baisse d'activité,

· données sociales = démotivation du personnel,

· données financières = dégradation de la trésorerie.

Nous retiendrons la troisième approche qui sied à la situation de la SMF.

10.5 Définition du concept d'environnement en sciences de gestion

D'après le Lexique de gestion (2003), en sciences de gestion, l'environnement est un ensemble de facteurs socio-économiques qui influent sur la vie de l'entreprise : la concurrence, l'Etat, la législation sociale, financière, commerciale, les groupes de pression, lobbies, syndicats, associations de consommateurs, etc. Il y a ainsi un environnement politique, un environnement économique, un environnement juridique, un environnement social, un environnement technique...

Un environnement pertinent est défini par Crozier et Friedberg (1977 : 164), comme "l'ensemble des acteurs sociaux dont les comportements conditionnent plus ou moins directement la capacité de l'organisation de fonctionner satisfaisante et d'atteindre ses objectifs (...)".

CHAPITRE I : CARACTERISTIQUES GENERALES DES ENTREPRISES
FAMILIALES AU CAMEROUN

Au Cameroun, on trouve des petites entreprises familiales artisanales, des PME, des entreprises d'envergure nationale, et même de grands groupes internationaux. Au Cameroun, les sociétés sous contrôle familial s'étendent du petit fonds de commerce au fonds artisanal et recouvrent toutes les formes de sociétés : entreprise individuelle, Société Anonyme (SA), Société à responsabilité limitée (SARL), telle que la SMF, Entreprise Unipersonnelle à Responsabilité Limitée (EURL), Société en commandite par actions, etc, ainsi que le secteur privé et même de nos jours, le secteur public (après la vague de privatisation). Pour J.P Tchankam (1998 :9), l'entreprise familiale au Cameroun serait celle dans laquelle les membres d'une même famille contrôlent l'activité ou le travail et participent activement à la direction, entretenant un lien durable entre famille et entreprise. Le capital de la SMF19 est par exemple réparti entre le propriétaire-dirigeant, ses enfants et petits-enfants. La famille participe pleinement dans l'activité de l'entreprise. Cette définition de J.P Tchankam a priori très générale possède de nombreux atouts :

- elle n'impose aucune restriction pour ce qui est de la taille, la forme juridique et aussi de l'âge. Par conséquent, sont pris en compte aussi bien les artisans que les grands groupes ; des fondateurs à leurs successeurs, voire jusqu'à la énième génération;

- elle insiste sur l'identité familiale : la présence d'une seule famille jusqu'au contrôle maintenu dans une famille élargie à des non - familiaux. Ici apparaît pour une fois la notion de famille élargie très chère à l'environnement africain;

- elle montre l'importance du réseau et fait observer que l'entreprise familiale est plus un réseau de contrat qu'un noeud de contrat. Elle privilégie l'activité et le travail, et amoindrie de ce fait, l'influence souvent trop forte du capital.

It ANALYSE DES CARACTERISTIQUES ET DES SPECIFICITES DES ENTREPRISES FAMILIALES AU CAMEROUN

L'entreprise familiale possède des caractéristiques qui lui sont propres, parce que contrairement aux autres entreprises, la présence significative de membres d'une même famille en son sein influence nécessairement sa vision des choses, sa perception du temps et ses valeurs qui, par ricochet, déterminent sa culture, sa structure et son fonctionnement.

19 Voir infra, tableau 1: Géographie du capital de la SMF, p 52.

I.1 Caractéristiques et spécificités des entreprises familiales en fonction de leur taille au Cameroun

Les études sur la classification des entreprises familiales au Cameroun, montrent qu'ils en existent de très petites (TPE), de petites (PE), de moyennes (ME), et de grandes (GE) dimensions. Vu les similitudes qui existent entre la TPE déclarée et la PE au Cameroun, il nous a semblé utile de rapprocher ces deux entités. Nous n'évoquerons que les caractéristiques liées au TPE, PE et ME.

I.1.1 Caractéristiques de la TPE non déclarée

Il s'agit comme l'a justement observé J.C Camilleri (1996), des activités de survie pour les plus pauvres, dont les migrants, et ne concernent en général qu'une personne. Elles peuvent également constituer un complément de revenu pour les ménages, exercées à temps partiel ou sur une base saisonnière. Elles ne nécessitent qu'un faible capital et pas de local : par exemple, les vendeurs ambulants ou les femmes commerçantes qui proposent des légumes sur les marchés. La TPE non déclarée ne comporte pas les caractéristiques entrepreneuriales et sa possibilité de croissance est quasiment nulle.

I.1.2 Caractéristiques de la TPE déclarée et de la PE

Une TPE déclarée est dans la majeure partie des cas, une entreprise artisanale. Une entreprise est dite artisanale lorsqu'elle exerce une activité manuelle et indépendante. Le chef d'entreprise doit travailler pour son propre compte et avoir un contact direct avec les clients, à qui il vend les produits qu'il a fabriqué ou transformé (Hamza, 1996). L'activité de l'entreprise doit consister en un travail de production, de transformation, de réparation ou de production de service. Mais, les entreprises non artisanales peuvent faire partie des TPE. C'est le cas notamment, des activités purement commerciales et intellectuelles, tout comme les activités médicales et paramédicales. La TPE déclarée et la PE ont en général un investissement supérieur à 150.000 FCFA et inférieur à 15 millions de FCFA. Ce seuil de 150 000 CFA est le minimum à partir duquel se manifeste selon J.C Camilleri (1996 : 16), une logique d'entrepreneur. La plupart du temps, ces entreprises sont "en nom personnel", c'est-à-dire que l'affaire leur appartient en nom propre, ils en sont propriétaires sans avoir théoriquement à consulter qui que ce soit pour prendre des décisions de gestion. L'avantage est, évidemment, la liberté de gestion et la rapidité de décisions, l'inconvénient étant le risque d'erreurs, un statut fiscal parfois moins précis.

Le chef ici joue tout : son argent, sa situation et plus encore, ses biens, sinon même la survie

de sa famille et, parfois, celle de ses propres collaborateurs. Il est souvent pris en tenaille entre l'exercice de sa fonction de dirigeant et ses responsabilités de chef famille. C'est un polyvalent responsable prêt à tout faire, car, il est d'une prudence parfois injustifiée. C'est d'ailleurs, ce qui explique qu'il soit toujours en permanence à la recherche d'homme de confiance.

Ces entreprises travaillent dans les locaux fixes et disposent d'un capital sans partage. Elles sont présentes dans tous les secteurs : commerce, production, transport, services (y compris bars et maquis), construction, pêche, agriculture, etc. Elles fournissent à la majorité de la population les services et les produits artisanaux de base. Ce sont les formes plus stables et plus organisées d'entreprises, mais, la production étant effectuée à la demande dans la TPE, l'activité est irrégulière, et la main-d'oeuvre constituée en grande partie d'apprentis instables. Une caractéristique lourde, ancienne, en quelque sorte structurelle du Cameroun est que la TPE et la PE familiale n'appartiennent pas seulement aux nationaux. Une bonne partie de ces entreprises est largement investie par des africains non camerounais - maliens, sénégalais, burkinabés guinéens, nigérians, béninois, togolais, mauritaniens...Elles connaissent le risque de contrôle fiscal au Cameroun. Par ailleurs, les relations qu'elles ont avec l'administration fiscale (émanation et exécutant du pouvoir) sont souvent empreintes de conflits refoulés, parfois de convivialité, plus rarement de contentieux ouvert.

Vis-à-vis de son personnel, les dirigeants de la très petite entreprise et de la petite entreprise sont directement responsables, sans aucun écran ou intermédiaire, de la vie de ses salariés et souvent de leurs familles. C'est une responsabilité directe et souvent lourde. On comprend aisément que ces derniers n'ont pas droit à l'erreur. Dans certaines d'entre elles, les gens motivés n'attendent pas les ordres pour trouver du travail ; il y a toujours quelque chose d'utile à faire, d'autant plus que chacun est polyvalent. Il n'y a rien d'anormal au fait qu'un vendeur donne un coup d'aspirateur ou qu'il participe à la tenue de la comptabilité, s'il a quelques compétences dans ce domaine.

Les atouts indéniables de la petite unité sont dans le fait qu'elle soit tout d'abord, par nature, à faible intensité de capital et à forte intensité de travail ; puisqu'elle corresponde mieux aux dotations en facteurs de production et permette une meilleure gestion que les grandes entreprises. Ces entreprises de petite taille écoulent des produits de qualité à des prix légèrement inférieurs à ceux du secteur moderne. L'unité de production présente la plupart des caractères d'une entreprise et le responsable recherche une gestion rationnelle, il tient par exemple une comptabilité simplifiée et à la limite sommaire (cahier entrée-sortie), il paie des impôts, il surveille la productivité des salariés qu'il emploie ; mais, les moyens de production restent faibles, la capacité technique est souvent réduite et ces unités se heurtent à la concurrence des entreprises modernes dynamiques du même secteur. On les trouve aussi au sein du secteur informel. Certaines sont de petits établissements non assujettis à la "patente" de la Direction Générale des Impôts (DGI), bien qu'elles exercent leurs

activités dans un local professionnel et disposent d'une enseigne. Ils acquittent par contre la contribution des petits commerçants et artisans collectée mensuellement par les municipalités. Compte tenu de l'étroitesse des marchés, le développement de ces entreprises passerait par la diversification (c'est-à-dire de nouvelles petites entreprises), plutôt que par la croissance (Warnier, 1993).

En réalité, la distinction entre PE et ME n'est pas précise au Cameroun, les frontières sont souvent floues et artificielles.

I.1.3 Caractéristiques de la ME-MI familiale

La controverse sur les notions de ME-MI a toujours suscité de vifs débats. Ainsi, observons nous qu'il y a souvent des malentendus entre européens et africains lorsqu'ils parlent de la taille d'une entreprise. Une société considérée comme petite et moyenne en France peut sembler gigantesque dans un pays en voie de développement. Ces remarques si elles paraissent évidentes sont à notre avis très utiles pour comprendre le choix de ces unités.

Au Cameroun, les MEF appartiennent aussi au secteur moderne. Elles se caractérisent par une main-d'oeuvre stable, la tenue d'une comptabilité minimale et le paiement d'impôts et de charges sociales. Elles sont au demeurant - du moins en principe - les cibles privilégiées des aides à la création d'entreprise, dans une optique d'industrialisation régionale. Ces unités reposent le plus souvent sur un homme dont le charisme impose plus qu'ailleurs un mode d'action. Pour agir, cet homme possède un patrimoine personnel dont il affecte une part à son entreprise.

Les chefs d'entreprises revêtent plusieurs origines : il peut s'agir soit d'anciens artisans qui se sont modernisés, des commerçants ayant accumulés un capital suffisant pour créer une entreprise, d'anciens ouvriers d'entreprises étrangères ou d'anciens travailleurs émigrés qui sont retournés dans leur pays d'origine avec une expérience professionnelle acquise à l'étranger, des travailleurs de la fonction publique comme activités parallèles, s'ils y sont encore ou comme principale activité, s'ils ont été victimes d'un licenciement, de diplômés en inactivité professionnelle ou de chômeurs ayant bénéficié de diverses aides...La création de la SMF est par exemple liée à un processus d'essaimage mis en place par l'ancien employeur du fondateur de l'entreprise. Par cette pratique, l'employeur visait à inciter ses meilleurs salariés ayant atteint l'âge de la retraite, à créer leur propre entreprise.

Traditionnellement, la MEF permet au Cameroun :

- une utilisation plus économique des facteurs de production par rapport aux grandes entreprises, grâce à un recours intensif à la main d'oeuvre non qualifiée, généralement abondante au Cameroun ; - une mobilisation de l'épargne canalisée sous forme de fonds propres. Elle constitue aussi un cadre propice et un terrain d'apprentissage pour une classe émergente d'entrepreneurs nationaux, capables

de concurrencer progressivement les grandes entreprises publiques et étrangères qui détiennent un quasi-monopole dans de nombreuses filières de production.

Les secteurs importants où l'on rencontre les MEF sont : le commerce, la construction, la réparation, les transports, les services et les activités de ces entreprises sont nombreuses dans les villes. En milieu rural, on compte plus d'industries artisanales et familiales, sources importantes d'emplois. Les MEF créent beaucoup d'emplois et avec peu d'investissements et donc de la valeur ajoutée. La majorité de ces entreprises n'utilisent que partiellement ou pas du tout le plan comptable, ce qui ne signifie pas, qu'elles soient privées de systèmes de comptabilité, mais, plutôt que ceux utilisés soient très archaïques. Elles sont inscrites à la Direction de la Statistique, et on les retrouve très souvent au fichier contribuable des entreprises de la DGI. Elles sont assujetties à diverses dispositions fiscales (patentes, impôts libératoires, impôts sur les sociétés).

Le financement des MEF camerounaises est le fait de sources locales et extérieures de financement. Il est opportun de préciser que chaque entreprise par rapport à sa spécificité bénéficiera ou non de telle ou telle source de financement. On relèvera que l'épargne personnelle alimente la majorité des financements des MEF. Celle-ci est complétée de plus ou moins loin par des dons et prêts de parents. Les différents apports en capitaux sont très souvent insuffisants pour permettre l'installation - ou l'extension - d'une entreprise moderne, surtout lorsqu'il s'agit d'un professionnel. Même lorsqu'ils existent, ces apports sont réduits fréquemment au minimum et l'appel au financement bancaire doit couvrir la majeure partie des investissements.

Au Cameroun, le marché financier est relativement limité, c'est-à-dire que les capitaux sont peu nombreux. Le système bancaire manifeste une très grande discrétion. Les prêts aux MEF sont accordés par certains organismes de financement - banques de développement, banques commerciales, Fonds d'Aides et de Garantie aux Petites et Moyennes entreprises (FOGAPE)20...

Le financement informel par le biais des tontines a une forte contribution au soutien des MEF au Cameroun. La SMF est par exemple affiliée à différentes tontines dans la ville d'Edéa par le biais de son propriétaire -- dirigeant.

Les MEF familiales ne sont pas seulement locales. On peut distinguer des maisons européennes et des entreprises libano-syriennes. Ces dernières jouent un rôle indéniable dans la production, le commerce de gros, le bâtiment, les bois-scieries, les services... Même si la multiplication des MEF s'est réalisée ces dernières années sous l'impulsion des Pouvoirs Publics, l'extension des entreprises se heurte à un environnement socio-culturel encore peu réceptif à tout changement brutal.

L'entrepreneur des MEF hésite de ce fait entre des activités à faible risque, mais, à marges confortables et immédiates, et des activités plus rentables à haut risque liées à la grande dimension

20 Cet organisme de financement a récemment été remplacé par le FONDECAM PME

des entreprises. Connaissant ses limites en matière d'organisation interne d'entreprise, une fois passé un seuil de taille et de complexité, soucieux d'échapper à la pression fiscale et aux contraintes familiales, l'entrepreneur se situe entre la dispersion des activités, la concentration du pouvoir et la spontanéité des décisions. On assiste alors à la multiplication d'affaires de natures diverses, exigeant des compétences différentes dans des secteurs économiques sans lien entre eux. C'est le cas du propriétaire dirigeant de la SMF, qui dispose d'une unité de production, de transformation et de commercialisation d'huile de palme. De plus, toutes les affaires étant sous le contrôle d'un même propriétaire, il en résulte dans une telle situation un risque de confusion. Cette situation qui apparaît comme une réaction aux contraintes du milieu peut empirer et entraîner un mouvement"pathologique" des créations des petites entreprises.

Mais, il faut reconnaître que la MEF moderne présente une " culture d'entreprise" avec un fonctionnement basé sur le principe d'un calcul économique rationnel.

Toutefois, il convient de rappeler que "petits métiers", artisanat et ME ne constituent pas les différentes étapes d'un même processus d'accumulation. La plupart des artisans n'ont pas exercé de petits métiers avant de démarrer leur activité et ils ne deviennent pas des dirigeants de ME. Ces trois niveaux de la petite production marchande restent cloisonnés les uns par rapport aux autres et aucun phénomène de transition ne permet le passage d'un niveau à l'autre (Camilleri 1996 :33).

I.1.4 Caractéristiques communes à la TPE déclarée, PE, ME-MI familiales

On doit souligner ici les difficultés d'approvisionnement et le frein notable qu'elles constituent dans la vie de la TPE, PE, ME-MI. Lorsqu'il s'agit de produits importés, elles sont quasiment désarmées devant les problèmes posés - rapports avec l'administration des douanes... Il en est de même pour les biens d'équipement, il faut noter d'ailleurs à ce sujet que le manque d'information et de conseil leurs font commettre souvent de graves erreurs de choix, au niveau de la qualité et de l'adaptation aux besoins qu'au niveau des prix (Tchankam, 1998). Ces difficultés nous renvoient aux contraintes lourdes du système de production qui sont étroitement liées à "l'inadéquation des technologies et des matériels" au contexte local, aux déficiences de transport, à la gestion des stocks - pièce de rechange, matières premières, fournitures diverses, maintenance, garantie du matériel non assuré, etc...

Signalons que ces problèmes attenants au choix de technologie affectent aussi bien les secteurs produisant des biens que ceux assurant des services. Ce choix est fonction de la demande et de l'état des marchés.

Les autres caractéristiques communes les plus évidentes se retrouvent au niveau du principe de succession. Celle du chef de famille propriétaire-dirigeant dans les pays africains a toujours posé

d'énormes difficultés dues à l'environnement social en Afrique où le chef de famille dispose d'une longue progéniture relevant de différents ménages et qui s'explique par la pratique de la polygamie. Deux hypothèses s'affrontent très souvent devant les juridictions civiles. Lorsque le chef de famille a réglé sa succession par un testament dans le cadre de ses activités notamment son entreprise ; sa volonté fait loi. Lorsque ce dernier, sans doute pour des raisons diverses, ne s'en est pas préoccupé, on assiste très souvent à une féroce bataille où se dispute la succession entre les différents prétendants qui sont des enfants issus de ces différents ménages. De nos jours, les greffes des tribunaux sont très souvent saisis pour régler ce second cas apparemment ambigu. Devant l'impossibilité d'une conciliation ou d'un arrangement à l'amiable et face à la non tenue des conseils de famille, le juge est souvent contraint pour assurer la pérennité de l'entreprise de nommer un administrateur provisoire, afin d'éviter une liquidation pure et simple. Le cas YEBTCHUE en est une illustration parfaite (arrêt de la cour suprême chambre civile mai 1987).

I.2 Spécificités du management dans la PME familiale au Cameroun

E. Kamdem (2002:24) considère le management comme une série d'activités, en vue d'atteindre un certain nombre d'objectifs, en prenant soin des biens et surtout des personnes.

Le management à l'africaine peut se définir comme des manières de concevoir et de pratiquer l'organisation des personnes et des biens; et qui soient authentiques, c'est-à-dire adaptées au contexte (écologique, historique, politique, technologique, économique et social) des sociétés africaines. Le dirigeant africain, qu'il soit de l'Etat, de l'entreprise, du village, de la société politique ou de la société civile, a une vision du pouvoir qui est révélatrice d'un désir de paternalisme récurrent, d'une volonté de rayonnement personnel et d'un souci profond de légitimation légale (Kamdem 2002 :359). Il ajoute que c'est ici qu'on touche le fond du problème, qui est de savoir dans quelle mesure ces manières sont susceptibles de conduire au succès économique et au développement social.

I.2.1. Rôle de l'entrepreneur et style de management au Cameroun

Les concepts entrepreneur, propriétaire- dirigeant, dirigeant, sont souvent sujets à confusion. La principale différence avancée par d'Amboise (Lalonde, 1985) entre l'entrepreneur et le dirigeant est que, le premier en plus des rôles qu'il peut jouer, assume seul les risques, tandis que le dirigeant apporte uniquement son expertise. Dans la distinction entre entrepreneur et propriétaire dirigeant, il souligne que l'entrepreneur est celui qui dirige une entreprise dont il est le fondateur, tandis que le propriétaire dirigeant peut assumer la direction d'une entreprise dont il n'est pas le fondateur.

J. Schumpeter (1935) définit la fonction sociale de l'entrepreneur essentiellement en termes d'innovation et de changement. L'entrepreneur est donc celui qui arrive à faire une combinaison nouvelle et évolutive des facteurs de production. Ainsi, le rôle de l'entrepreneur est beaucoup plus important que celui du détenteur des capitaux. L'entrepreneur est donc différent du rentier, qui se contente simplement de placer ses capitaux pour de meilleurs profits. Au rôle statique du rentier, s'oppose celui beaucoup plus dynamique de l'entrepreneur dont J. Schumpeter (1935 : 345) propose une première typologie : le fabricant commerçant, le capitaine d'industrie, le directeur et le fondateur promoteur.

La problématique existentielle de l'entrepreneur africain est abordée par P. Kammogne Fokam (1993), banquier et chef d'entreprise camerounais, à travers une vision résolument guerrière de l'environnement socio-économique et socio-politique. Ce dernier selon lui, limite beaucoup les chances de succès de l'entrepreneur : « Être entrepreneur en Afrique, constate-t-il, c'est demander à David de se lancer quotidiennement dans un combat de front contre Goliath » (Kammogne Fokam, 1993:33).

Au Cameroun, à partir d'une série d'études de terrain, E. Kamdem (1996), a élaboré un cadre typologique des entrepreneurs camerounais.

Une première catégorie regroupe des personnes exerçant ou ayant exercé dans les milieux d'affaires, sans pour autant être portées par une saine et profonde ambition d'épouser plus longtemps le métier d'entrepreneur. De ce fait, elles vont davantage chercher à jouer sur le registre, non des relations d'affaires proprement dites, mais, davantage sur celui des réseaux d'influence de nature beaucoup plus socio-politique. Chez --elles, la vocation d'acteur socio-politique prime sur celle de l'entrepreneur créatif et innovateur (Kamdem, 2002 :142). On recense au sein de cette première catégorie le modèle d'entrepreneur résigné, l'entrepreneur pleurnicheur, l'entrepreneur mystificateur. La deuxième catégorie est celle des vrais entrepreneurs (au sens de Schumpeter). Ces derniers reflètent moins des archétypes camerounais et africains comme les premiers, mais, sont des modèles classiques qu'on retrouve dans la plupart des sociétés au sein desquelles la fonction d'entrepreneur est déterminante. Le modèle d'entrepreneur professionnel au Cameroun comprend le profil de l'entrepreneur débrouillard et celui de l'entrepreneur challenger.

Si de nombreux auteurs se sont intéressés aux caractéristiques du système de management dans les entreprises africaines, on peut observer qu'à chaque fois, ils n'ont pas suffisamment développé les aspects familiaux. Cette situation s'explique par la non prise en compte de la distinction entreprise familiale et non familiale qui incontestablement apporte un éclairage nouveau à la compréhension de leurs comportements managériaux. Afin d'éviter cette confusion, nous avons choisi de nous intéresser, dans un premier temps, aux spécificités de chaque type d'entreprise, puis, en second lieu, à leurs traits communs.

I.2.2 - Spécificités du système de management propres à la TPE déclarée et la PE familiales au Cameroun.

L'un des traits marquants de la TPE et même de la PE est sa structure personnalisée, sans partage de l'autorité, avec unité de commandement. Ici, le chef d'entreprise et le propriétaire sont une seule et même personne. Beaucoup de ces entrepreneurs se sont formés sur le tas et n'ont pas de formation dans le domaine de la gestion (dans le secteur manufacturier, leur bagage est pour l'essentiel technique) ; ils ont souvent un certain âge et leurs connaissances sont dépassées ; ils travaillent souvent seuls, à l'intérieur et à l'extérieur de leur entreprise, et font moins appel à d'autres compétences. Leur gestion reste "traditionnelle", ignorante des contraintes du marché et de l'économie d'entreprise. Ils font moins appel aux compétences des cabinets-conseils, à l'exception des cabinets d'expertise comptable. Ils ne sont pas très souvent en rapport avec les banques. La gestion d'entreprise est subordonnée à ces objectifs. Épouses, cadets, neveux interviennent fréquemment sans contrat dans la production : ils ne perçoivent pas de salaires et se contentent de bénéficier d'un toit, de la nourriture et de la prise en charge de frais médicaux. Les apprentis, quant à eux, doivent se satisfaire d'acquérir un savoir-faire.

Au Cameroun, l'un de leur point distinctif se trouve dans la gestion des stocks. On accumule, on ajoute, on conserve, on garde ; les greniers sont pleins et les magasins débordent. Certains se servent encore du livre de ventes tenu à la main et font des additions avec la machine à calculer dont se servait papa avant son décès. Certains encore gardent des produits que quelques clients n'achètent que tous les 18 mois. On conserve des stocks de papier dont personne ne veut plus. On ne met pas de blouse pour vendre de la viande ou encore on continue à envelopper celle-ci avec du papier journal. Savoir déléguer, savoir faire faire, sont encore des "sacro-saints symboles" (Tchankam, 1998:17).

I.2.3 Traits marquants du système de management dans la ME-MI familiale au Cameroun

Dans la MEF, on note un début d'organisation par fonction. Mais, ipso facto elles demeurent des entreprises où les décisions importantes concernant la gestion - administrative et technique - dépendent d'une ou deux personnes. Ce sont, en outre, les dimensions de l'unité - souvent modestes - qui permettent au chef d'entreprise d'exercer un contrôle total et personnalisé. Ici, comme ailleurs, ces chefs d'entreprises n'ont que des notions très sommaires de gestion et ne disposent donc pas de compétences de base nécessaires. C'est sans doute ce qui explique les réticences qu'ils manifestent dans la délégation des compétences et les risques qu'ils pensent ainsi encourir : ils sont inquiets de

la possibilité d'être trompés par un collaborateur qui se montrerait trop adroit dans le traitement des livres de comptes ; ils ne veulent généralement pas confier la manipulation des fonds à un agent extérieur à la parentèle ; et, plus fondamentalement, ils tiennent à entourer leur situation financière du plus grand secret. Aussi, la comptabilité n'est elle pas considérée comme une ardente nécessité. Il est assez surprenant de constater que les pratiques de gestion courantes dans le monde des MEF camerounaises ne se différencient guère de celles en vigueur dans les petites activités informelles.

En Afrique, en général, et au Cameroun, en particulier, la MEF est davantage une entreprise personnalisée, fortement marquée par son chef ; sa dimension dépend de l'aptitude de ce dernier à communiquer et à animer un groupe plus ou moins important dans un style personnel par opposition au style relativement " désincarné " de la grande entreprise (Tchankam, 1998).

I.2.4 Traits communs du système de management des PME familiales au Cameroun.

Deux principaux traits sont communs au management des PME familiale au Cameroun : la gestion de l'interdépendance entreprise - famille et le management de sa propre famille. Les parents, les enfants, les frères et soeurs, ne se retrouvent pas dans l'entreprise non familiale. C'est là une force positive ou négative de l'entreprise familiale avec laquelle les employés doivent composer, qu'ils fassent partie ou non de la famille. Les entreprises familiales réussissent souvent à mieux concilier le monde du travail et le monde de la famille. Il est plus naturel d'y retrouver les concepts d'horaire flexible, de partage des tâches ou de garderie en milieu de travail. Elles représentent pour la communauté l'exemple de la force de l'équipe par rapport au travail du " lone hero" et de l'individualisme, car, on y est forcé de travailler ensemble (Tchankam, 1998 :18).

Les premiers handicaps et non des moindres viennent de la gestion d'une main d'oeuvre lignagère. Le mode de recrutement du personnel met toujours en avant les liens de parenté et les recommandations pressantes d'un proche, ce qui a pour effet de renforcer le système des rapports sociaux, en l'occurrence les relations de dépendance entre l'entrepreneur devenu aîné et les cadets sociaux. Cette façon de sélectionner des ressources humaines sans faire droit aux profils techniques des postes en question et à la qualification des employés n'est pas sans conséquence sur l'avenir des entreprises. Par ailleurs, les membres de la famille, qui participent ou non à la gestion de l'affaire, partagent un passé familial commun. Souvent, ils semblent avoir arrêté le temps et se comportent comme s'ils s'adressaient à l'enfant que chacun a été. Les vieilles querelles et rivalités ne tardent pas à réapparaître à la moindre difficulté. Par exemple, un entrepreneur peut ne plus se rendre compte que son dirigeant de frère n'est plus le petit martyr de leur enfance et a développé sa personnalité (Catry et Buff, 1996 : 193).

En outre, le management des collaborateurs qui ne font pas partie de la famille n'est pas toujours facile, bien que leur apport ne puisse faire l'objet d'aucune contestation. Trois types de problèmes sont souvent observés : les tensions relatives aux promotions, les tensions relatives aux rémunérations, les tensions familiaux et non familiaux.

L'on peut ajouter que la plupart des actions menées ne sont pas planifiées, celles-ci sont surtout dues aux défaillances internes qui se manifestent par des décisions prises sur dossiers, absence ou rareté d'outils comptables fiables et d'instruments de suivi des activités. Ces dirigeants méconnaissent pour la plupart tant les techniques modernes de gestion (comptabilité, administration du personnel, techniques de ventes, etc.) que, sur un plan moins formalisé et plus pragmatique, les multiples micro-procédures rationnelles qui permettent à un responsable d'une unité économique d'y introduire ou d'en améliorer la rigueur et l'efficacité au quotidien.

La culture familiale pèse lourdement sur le management des entreprises familiales africaines, et découle généralement sur un système de management paternaliste. Très souvent les employés qu'ils appartiennent à la famille ou non sont considérés comme ses enfants. D'où l'appellation de "papa" qu'on lui attribue. A titre d'exemple, la gérante de la SMF est appelée « maman » par l'ensemble du personnel (familiaux et non familiaux). Ce caractère autocratique de la firme au sein de laquelle se confondent patron et père de famille découle du système traditionnel dans lequel évoluent ces dirigeants (Tchankam, 1998). Le partage du pouvoir, quand bien même celui-ci existe, est toujours bouleversé par les ambitions mal contrôlées du dirigeant qui ne comprend pas qu'on résiste à celui qui a donné toute sa vie pour créer son entreprise. Le chef d'entreprise familiale éprouve toujours plus que d'autres un attachement charnel, quasi-possessif, envers son entreprise (Gélinier et Gaultier, 1975 :210). Cette symbiose plus ou moins complète entre la firme et le dirigeant entraîne parfois des prélèvements personnels, souvent considérés comme rémunération d'un travail.

II/ ENVIRONNEMENT ECONOMIQUE ET REGLEMENTAIRE DES PME AU CAMEROUN

Dans cette partie de l'étude, nous nous sommes focalisés principalement sur le rôle grandissant de l'Etat comme porteur de changement dans le processus de transformation/amélioration des PME au Cameroun.

II.1 Rôle économique et stratégique de l'Etat dans la promotion et le développement des PME au Cameroun.

En février 2009, le Gouvernement camerounais à travers le Ministère de l'Economie, de la Programmation et de l'Aménagement du Territoire (MINEPAT) a présenté le document Vision Cameroun 2035. L'objectif de ce document est d'arriver à créer des conditions économiques et sociales susceptibles de transformer le Cameroun en pays émergent d'ici 25 ans. Le rôle de l'Etat dans le domaine économique s'inscrit dans un paradigme d'Etat stratège et pragmatique"21. Une réforme importante du cadre législatif a été entreprise et le partenariat Etat/secteur privé est actuellement régi par un cadre juridique articulé autour de la loi N°2006/012 du 29 décembre 2006 fixant le régime général des contrats de partenariat. La promotion du secteur privé sera articulée autour de la promotion des formes appropriées de partenariat public- privé, telles que les contrats de gérance, les joint-ventures, les opérations de leasing, les concessions, l'affermage.

La promotion des PME/PMI vise en particulier la densification du réseau d'entreprises nationales, l'amélioration de leur compétitivité, afin de relever le défi de mutation du secteur informel et de résorption du sous emploi au Cameroun. Cet appui portera d'après le document Cameroun Vision 2035 (2009 :43) sur : « des dispositions réglementaires et institutionnelles favorables à l'émergence et le développement des entreprises (l'implémentation de la charte des investissements et des codes sectoriels, simplification des procédures, création des institutions et des modes appropriés de financement, institution de la sous-traitance, le développement des infrastructures des normes et de l'assurance qualité, ...) et ; des appuis opérationnels en termes de subventions et d'accompagnement technique (actions de promotion de l'entreprenariat, appropriation des technologies, remise à niveau, ...) ».

II.1.2 Action du Ministère des Petites et Moyennes Entreprise, de l'Economie Sociale et de l'Artisanat (MINPMEESA) dans le développement des PME au Cameroun

La place de l'Etat dans l'environnement des PME est marquée par la création du MINPMEESA en 2004. Créé par décret N° 2004/320 du 08 décembre 2004 portant organisation du Gouvernement, le Ministère des Petites et Moyennes Entreprises, de l'Economie Sociale et de l'Artisanat est chargé de l'application de la politique du Gouvernement en matière de développement des PME, de l'Economie Sociale et de l'Artisanat. Ce ministère s'occupe principalement : de la promotion et de l'encadrement des PME et de l'artisanat; du développement de l'économie sociale;

21 Ce nouveau paradigme de l'Etat se décline en trois axes : (i) planification stratégique ; (ii) régulation et ; (iii)

interventionnisme proportionné et ciblé. Voir document Cameroun vision 2035 (2009: 42), MINEPAT.

de la constitution, en liaison avec les organisations professionnelles, d'une banque de données et de projets à l'intention des investisseurs dans les secteurs des PME et de l'artisanat; de la promotion de l'esprit d'initiative privée; du suivi de l'activité des organismes d'assistance aux PME et de l'artisanat.

La loi en cours de promulgation sur les PME fixe les règles générales de promotion des PME au Cameroun. L'article 2 de cette loi stipule que les TPE, les PE et les ME font partie des PME. Cette loi classifie les PME en fonction du nombre de travailleurs permanents qu'elles emploient, de leur chiffre d'affaires ou du total du bilan. La TPE est une entreprise employant de 01 à 05 personnes ou dont le chiffre d'affaires annuel n'excède pas 15 millions FCFA. La PE emploie de 06 à 99 personnes ou possède un chiffre d'affaires n'excédant pas 250 millions FCFA. La ME est une entreprise employant de 100 à 299 personnes ou dont le chiffre d'affaires annuel n'excède pas 1 milliard FCFA.

Cette loi envisage la promotion de l'initiative privée de promotion des PME par la mise en place de procédures de facilitation administrative axée sur la réduction de la durée de création conformément aux normes internationales reconnues. En outre, il est question de la promotion des secteurs porteurs ou innovants, du développement de l'entrepreneuriat, de la culture d'entreprise et de l'assistance multiforme aux promoteurs. Cette politique de promotion est soutenue par les centres de formalités administratives des entreprises. Ces centres sont des espaces uniques de facilitation des procédures relatives à la création, à la modification ou à la cessation d'activité des entreprises.

En outre, des structures d'incubation des PME visant à assurer le développement, l'appui et l'assistance nécessaire aux PME, créées dans un délai inférieur à cinq ans sont prévues à l'article 8 de la loi sur les PME. Le chapitre IV sur l'appui aux PME est particulièrement intéressant pour cette étude. Car, les PME en difficultés pourront bénéficier de plan de redressement ou de restructuration. L'article 21 prévoit un plan de mise à niveau sur la base d'un diagnostic visant à faire ressortir les forces et les faiblesses de l'entreprise.

Le MINPMEESA a mis sur pied en 2008, un guide pratique des formalités administratives. Cette initiative a pour but la facilitation de l'accès des entrepreneurs à l'information. « Le guide pratique des formalités administratives à l'intention des entrepreneurs au Cameroun », est un recueil des procédures administratives, qui expose les démarches nécessaires pour qu'une entreprise puisse exercer une activité dans un secteur économique donné.

II.2 Sources de financement des PME

Par différentes sources de financement des P.M.E. camerounaises, nous entendons les structures qui disposent de capitaux destinés aux P.M.E. De nombreuses sources de financement sont offertes aux PME au Cameroun, notamment à travers les banques commerciales, les établissements de micro finance, les tontines et associations, les projets des institutions internationales et des organisations non gouvernementales de développement22.

Le financement des PME au Cameroun provient de sources endogènes, externes et informelles.

A propos du financement endogène, les enquêtes effectuées sur le terrain depuis quelques années (Y.-A Fauré, 1992), ont révélé le recours systématique des entrepreneurs africains à leur épargne personnelle, comme à celle de leur famille ou de leurs amis. Par la suite, ils financent leurs investissements avec leurs propres bénéfices. De cette façon, ils ne s'endettent pas envers des personnes étrangères ou envers certaines institutions. Au Cameroun, parmi 90 entrepreneurs bamiléké de Douala, 79, soit 88%, ont eu recours à leurs économies personnelles, 41% ont bénéficié d'un prêt de la famille et 33% d'un prêt d'un autre membre du groupe ethnique (Brenner, 1992 in S. Ellis et Y.-A Fauré, 1995). Cependant, les données au Cameroun doivent être interprétées avec réserve du fait du rôle essentiel joué par les tontines et leur implication, sur une grande échelle dans le financement des entreprises.

Le financement externe correspond aux crédits que les entrepreneurs peuvent obtenir. C'est parfois auprès d'un prêteur individuel. Si les crédits auprès des membres de la famille ou des amis sont presque toujours accordés sans intérêts, il n'en est pas de même des crédits obtenus auprès des prêteurs professionnels, qui sont souvent des usuriers, car, les taux exigés rapportés à la durée du crédit sont en général très élevés. Une autre modalité de financement externe est le recours de l'entrepreneur aux avances de ses clients et aux avances de ses fournisseurs qu'il connaît bien. Les uns acceptent de régler leurs achats d'avance, bénéficiant d'un prix moindre, les autres acceptent de n'être réglés qu'ultérieurement. Ces crédits déguisés se fondent toujours sur des relations personnelles, mais, liées cette fois à l'activité des uns et des autres. Ce mode de financement, qui ne concerne que le court terme, est basé sur la proximité non plus sociale, mais, commerciale. Les crédits bancaires sont moins utilisés. Cependant, les MEF disposent pour la plupart de comptes bancaires dans les banques commerciales. C'est le cas de la SMF qui dispose d'un compte à la Banque Internationale du Cameroun pour l'Epargne et le Crédit (BICEC), l'une des banques commerciales du Cameroun. Cette dernière délivre à la SMF l'attestation de domiciliation bancaire

22 A propos des sources de financement des PME au Cameroun, le mémoire présenté par Georges Mbenda Behalal (1989) La problématique du financement des PME au Cameroun, Université du Québec à Chicoutimi, donne une vue complète des diverses sources offertes aux PME camerounaises.

requise dans la composition des dossiers administratifs pour la soumission aux appels d'offres dans le secteur public ou privé. Les micros finances sont à l'image des prêteurs professionnels décrits ci dessus, et, participent très souvent aux financements de l'activité. Les raisons pour lesquelles les banques ne sont pratiquement pas impliquées dans le financement de la PME familiale au Cameroun sont nombreuses. On reproche principalement aux banques :

- le coût élevé de leurs crédits. Le taux d'intérêt est souvent considéré comme excessif. Il est pourtant bien moindre que celui des prêteurs individuels. De plus, des frais annexes, nécessités par les coûts d'administration élevés de ces prêts d'un faible montant consentis pour une courte durée, viennent renchérir l'intérêt effectif du crédit ;

- les conditions posées. C'est d'abord l'exigence de garanties que l'emprunteur peut difficilement

offrir, ce sont aussi les démarches à effectuer, les pièces qu'il doit produire, ce qui allonge le délai nécessaire à l'obtention du crédit ;

- le manque de confiance du client qui n'a pas de relation de confiance avec le banquier. Il doit se présenter à un guichet donné à des heures fixes. Le crédit bancaire requiert un montage financier, il ne se fonde absolument pas sur une relation personnelle de l'emprunteur avec son banquier (Lelart, 1985 in S. Ellis et Y.-A Fauré, 1995: 453).

S. Ellis et Y.-A Fauré (1995 :446) soulignent la souplesse et la diversité du financement informel. Les tontiniers prennent la place du système bancaire défaillant. Plus répandues, les tontines facilitent la mobilisation de l'épargne populaire, celle là même qui est ensuite employée, toujours à court terme, dans les entreprises. Au Cameroun, après une enquête effectuée par l'Organisation Internationale du Travail en 1984 auprès de 360 PME, il résulte que la moitié d'entre elles ont pu démarrer leur entreprise grâce à des tontines et/ou y recourir régulièrement pour la bonne marche de leurs affaires. Une enquête plus récente auprès d'un échantillon plus restreint de 90 entrepreneurs de Douala a confirmé ces observations : 42, près de la moitié, ont utilisé les tontines pour se financer (Brenner, 1992, in S. Ellis et Y.-A Fauré, 1995: 455).

Nous avons choisi de nous attarder sur le mécanisme le plus récent d'appui financier au PME camerounaise: le FONDECAM PME qui vise à remplacer le FOGAPE.

II.2.1 Fonds de Développement Camerounais des PME (FONDECAM PME)

Le Premier Ministre, Chef du Gouvernement camerounais, a procédé le 25 juin 2007 au lancement des activités visant à la mise en place du Fonds de Développement Camerounais des PME. Il s'agit de procéder à un appel à souscription pour les investisseurs camerounais qui, dans un premier temps devraient pouvoir rassembler une somme de 65 milliards de francs CFA, destinée à financer les projets dans les domaines des PME. Cette somme collectée dans le système bancaire

national et garantie par la Deutsch Bank, permettra le démarrage du FONDECAM PME sous la forme d'un Fonds test. Cette structure vise à relancer le secteur des PME au Cameroun. Le lancement de FONDECAM PME est l'une des manifestations visibles du dialogue public-secteur privé, tel que souhaité par le dernier Comité Interministériel Elargi au Secteur Privé de novembre 2006. Certaines dispositions sont prises dans l'octroi des prêts. A titre d'illustration, le Fonds n'est pas destiné à financer la création d'entreprises, mais, l'expansion ou le renforcement d'unités existantes ou présentant des garanties réelles de réussite.

Le FONDECAM PME est le fruit de l'initiative d'investisseurs camerounais avec l'appui des partenaires internationaux, Deutsch Bank et Carousel Finance. Alors que le MINPMEESA agira en régulateur, au nom du Gouvernement.

Il est à présent utile pour notre étude, de mettre en exergue le cadre juridique offert aux PME en difficultés au Cameroun.

II.3 Cadre juridique sur la notion d'entreprise en difficulté dans l'acte uniforme OHADA23

La détermination de la notion d'entreprise en difficulté, s'avère difficile en raison de la diversité des modes d'analyse, des défaillances, des stades différents de gravité de la situation, de la rareté des critères permettant de les déceler et de l'hétérogénéité de leurs causes. L'approche de la défaillance d'une entreprise peut être opérée en examinant ses aspects économiques24 ou l'aspect financier25 ou en recourant aux procédures collectives26 après une analyse à posteriori (P. Nguihé Kanté, 1999) des conséquences, essentiellement financières, de ses difficultés. Si les professionnels mettent davantage l'accent sur telle ou telle de ces approches pour canaliser l'entreprise en difficulté, le juriste quant à lui a plutôt tendance à l'observer au travers de la notion de cessation de paiements. Mais à dire vrai, aucune de ces manières d'examiner l'entreprise n'est à méme de fournir à elle seule un apport décisif à l'élaboration d'une notion de l'entreprise en difficulté, en raison de leur caractère fragmentaire et des objectifs parfois différents qu'elles poursuivent.

Il s'agit en outre d'une notion éminemment évolutive : on ne peut figer une situation par

23 OHADA signifie Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires ; cette structure regroupe

actuellement 16 pays membres.

24 Ces aspects concernent essentiellement la rentabilité et l'efficacité de l'unité de production.

25 Cette situation concerne les problèmes de trésorerie, l'importance des fonds propres de l'entreprise et les besoins

de crédits.

26 Procédure (sauvegarde, redressement judiciaire ou liquidation judiciaire) plaçant toute personne physique ou

morale de droit privé exerçant une activité économique en cessation des paiements ou menacée de tomber dans cette situation, sous le contrôle de la justice et la faisant bénéficier de la suspension des poursuites. Voir Encyclopédie pratique du droit et des contrats www.lawoperationnel.com/EncyclopédieJur. Consulté le 25/05/09.

nature changeante et fluctuante comme l'est celle d'une entreprise. A la limite, une entreprise d'apparence prospère se trouve toujours sous la menace de sérieuses difficultés. Il suffit, par exemple, qu'un nouveau brevet soit déposé et exploité pour que sa production soit à terme moins compétitive, ou que le principal dirigeant, possesseur de la majeure partie du capital, soit victime d'un accident, ou encore que survienne une crise économique ou une mésintelligence entre les associés.

La notion d'entreprise en difficulté est ainsi dynamique et complexe, rebelle à une détermination simple de ses éléments constitutifs. Cela se vérifie lorsque l'on tente d'établir des critères permettant de déceler la défaillance. On constate d'après P. Nguihé Kanté (1999) que la détérioration d'une exploitation se produit généralement en trois temps : dans un premier stade, malgré des résultats florissants, un esprit averti peut déjà percevoir certains signes d'accumulation probable de difficultés ou certains éléments de fragilité ; la deuxième phase voit ces difficultés potentielles se concrétiser dans la réalité économique et financière de l'entreprise ; et si aucune mesure n'est prise efficacement, la troisième sera constituée par le dénouement au travers d'une procédure de concours ou de décisions nécessaires d'une liquidation partielle ou totale ou d'une absorption.

Évidemment, poursuit P. Nguihé Kanté (idem), la multiplicité des critères est à la fois le résultat de la variété des situations qui peuvent se présenter, et du rôle que l'on veut leur assigner; prévoir une situation dangereuse à terme nécessite une précision d'analyse plus complexe que le simple constat d'un état avéré de cessation de paiements. En effet, si l'on s'accorde généralement pour reconnaître qu'il est possible de prévoir deux ou trois ans à l'avance le caractère insurmontable de certaines difficultés, il est moins aisé d'établir des critères offrant une fiabilité suffisante et ayant un caractère de généralité, tels qu'ils puissent être utilisés pour l'ensemble des entreprises. La définition objective du moment à partir duquel une entreprise se trouve en péril s'avère impossible; la pratique tout comme le droit positif mettent l'accent sur les conséquences des difficultés, telles qu'elles se traduisent dans les bilans, que ce soit pour fixer une condition d'ouverture d'une procédure collective de liquidation des biens ou pour utiliser d'autres techniques de redressement de l'entreprise. Les critères retenus, juridiques pour les premières, ou économiques pour les secondes, ont tendance à ne prendre en considérations que l'aspect strictement financier et comptable. Or, malgré d'incontestables progrès dans ce domaine, il est admis que les comptes publiés par les sociétés commerciales africaines jouent moins que dans d'autres pays européens et américains le rôle d'outil de diagnostic pour leurs associés comme pour leurs partenaires, principalement pour des raisons tenant au poids des contraintes fiscales. Il en résulte un scepticisme largement répandu à l'égard du caractère significatif des données fournies par les documents comptables des sociétés, et de nombreux risques dans la recherche, à l'aide par exemple de la technique de ratios, des moyens

de prévision des difficultés.

A ces différents facteurs d'imprécision de la notion d'entreprise en difficulté, s'ajoute l'hétérogénéité des causes des défaillances d'origine interne ou externe à l'entreprise. Pour P.G Pougoue et Y. Kalieu (1999:19), les facteurs internes tiennent ou bien aux dirigeants ou bien à la production, ou bien encore à l'état financier de l'entreprise. Les difficultés d'origine interne sont plus graves et plus faciles à déceler. Elles peuvent provenir de la forme sociale qui ne correspond pas à la dimension de l'entreprise. Elles peuvent aussi être la conséquence d'une mauvaise gestion résultant par exemple d'une comptabilité inexistante, d'un personnel pléthorique, d'une incohérence de la politique adoptée, des détournements ou des malversations commis par un dirigeant, un comptable ou un employé indélicat ou même d'une confusion des patrimoines.

F.M Sawadogo (2002:28), ajoute que la confusion des patrimoines est une réalité palpable en Afrique, où très souvent, le patrimoine personnel des dirigeants n'est pas dissocié de celui de l'entreprise. Les conséquences de cette confusion sont déplorables. En effet, parvenu à une telle situation, non seulement l'appréciation de la gestion n'est plus facile, mais aussi, la survenance de cette difficultés touchant personnellement le dirigeant se répercute inévitablement sur l'entreprise. Cette situation est prégnante dans les PME familiales au Cameroun.

Par contre, les facteurs de difficultés extérieures à l'entreprise n'ont bien souvent qu'un effet révélateur ou aggravant et on constate leur faible incidence -sauf exception- sur les défaillances des entreprises. Ils correspondent aux variations de la politique du crédit, aux événements aléatoires affectant l'économie -crises sectorielles, régionale ou nationale- ou à la défaillance d'un débiteur important ou de plusieurs d'entre eux. Généralement d'ordre économique, elles proviennent généralement des effets de la concurrence, de la fluctuation des coûts des produits ou de la monnaie, du poids de certaines charges.

Les signes visibles de ces difficultés sont extrêmement variés et vont depuis l'apparition de certains déséquilibres ou difficultés jusqu'aux reports d'échéances, un règlement tardif des impôts, taxes et cotisations sociales, l'inscription de privilèges27, de protêts28, un recours permanent au découvert bancaire ou encore des cessions d'actifs, une paralysie des organes de gestion etc. Chacune des causes spécifiques entraîne son lot de conséquences, et l'accumulation des facteurs

27 En droit civil et commercial, un privilège est le droit d'origine légale accordé à un créancier d'être payé sur le

prix de vente des biens du débiteur de préférence aux autres créanciers. Voir Encyclopédie libre, www.wikipedia.org. Consulté le 25/05/09.

28 Acte d'huissier préalable à un recouvrement de créance et constatant le non paiement d'un cheque ou d'un

effet de commerce. En cas d'impayé cet acte de procédure est nécessaire et il faut faire protester le cheque ou l'effet de commerce impayé. Un seul protêt est suffisant à caractériser l'état de cessation de paiement. Lorsque l'on sait qu'une société a des difficultés de trésorerie il faut périodiquement consulter le registre des protêts tenu au greffe du Tribunal de Commerce dont dépend le Registre du Commerce et des Sociétés où est immatriculée cette société. Voir Encyclopédie pratique du droit et des contrats www.lawoperationnel.com/EncyclopédieJur. Consulté le 25/05/09.

d'aggravation financière et sociale désespérée.

Il apparaît ainsi difficile de donner une définition de l'entreprise en difficulté, concept économique (Y. Chaput in E de Lagrange, 1978:177) plus que juridique. Le législateur OHADA s'est d'ailleurs abstenu de régler clairement la question, ses actuels progrès se limitant tout simplement à la définition de la notion de cessation des paiements29 et à l'énoncé de certaines indications relatives à la survenance d'une situation très préoccupante. Ainsi, d'après l'article 2 alinéas 2 et 4 de l'Acte Uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif OHADA, la notion d'entreprise en difficulté va au delà du simple état de cessation de paiements et recouvre également toutes les situations caractéristiques de l'état de pré-cessation de paiements que sont l'insolvabilité, le surendettement, la simple situation difficile...

II.3.1 Un système de prévention - détection des difficultés peu satisfaisant

Il n'est jamais trop tôt pour prévoir les difficultés d'une entreprise. En effet, l'efficacité de la prévention résulte à n'en point douter de la rapidité avec laquelle les maux susceptibles de troubler le bien être de la société sont mis à jour et combattus. Les difficultés qui affectent l'entreprise sont toujours de nature à s'amplifier avec le temps. Elles prennent ainsi des proportions importantes, et, deviennent par conséquent difficiles à résoudre. Ici, l'expression « il vaut mieux prévenir que guérir » revêt tout son sens. Ceci exige un système d'information effectif et omniprésent, car pour mieux prévenir, il faut pouvoir mieux informer. Il est donc plus question, d'anticiper sur les difficultés afin de mieux les parer.

Il ressort ainsi clairement des articles 150 et suivants de l'acte uniforme OHADA relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique (AUDSCGIE) que le commissaire aux comptes, au cas où il en existe et les associés, peuvent déclencher la procédure d'alerte et d'expertise de gestion en cas de nécessité. La doctrine pour sa part affirme qu'une bonne utilisation de ces procédures aboutit généralement à de bons résultats en favorisant l'élaboration des plans de redressement viables (Pougoue et Anoukaha, 1999 : 82).

Les mécanismes de prévention - détection consistent, en amont de la cessation des paiements, à repérer tout indice de crise susceptible d'enliser le fonctionnement de l'entreprise et de le résoudre le plus tôt possible. Pour ce faire, il existe deux procédures majeures permettant la réalisation de cet objectif : la procédure d'alerte et la procédure d'expertise de gestion.

La procédure d'alerte est celle par laquelle les commissaires aux comptes ou les associés demandent des explications aux dirigeants lorsqu'ils constatent des faits de nature à troubler la

29 L'article 25 du Code OHADA dispose ainsi : « le débiteur qui est dans l'impossibilité de faire face à son passif

exige avec son actif disponible est en état de cessation des paiements ».

continuité de l'exploitation30.

Il ne s'agit que de prévenir les dirigeants des écueils prévisibles (Y.Chaput, 1999). Ainsi, pour une bonne utilisation de l'alerte, les organes concernés doivent rester en éveil afin de diagnostiquer à temps les difficultés, qu'ils soient internes ou externes. C'est dire que les alertes sont de deux types : l'alerte interne et l'alerte externe. L'alerte interne est mise en oeuvre par les organes normaux de la société. C'est la raison pour laquelle elle est parfaitement intégrée dans le droit des sociétés commerciales et non dans celui des procédures collectives. Elle peut être mise en oeuvre par les associés.

L'alerte externe quant à elle suppose l'intervention des personnes externes à l'entreprise. Contrairement à d'autres législations, l'OHADA n'y s'est pas beaucoup investi. L'AUDSCGIE ne l'a organisé qu'en faveur des commissaires aux comptes. Cela peut se comprendre aisément dans la mesure où cette forme d'alerte nécessite toujours l'existence d'un réseau important de professionnels bien organisé que les États membres de l'OHADA ne fournissent pas toujours.

L'expertise de gestion quant à elle est l'apanage des seuls associés. En effet, organisée par les articles 159 et 160 de l'AUDSCGIE, elle permet à ceux-ci pris collectivement ou individuellement et représentant au moins le cinquième du capital social, de demander au président de la juridiction compétente du siège social la désignation d'un ou de plusieurs experts chargés de présenter un rapport sur une ou plusieurs opérations de gestion. Elle est très restrictive quant à son domaine et aux organes qui l'exercent.

30 Par cette procédure, le législateur OHADA s'est arrimé aux réformes récentes du droit des sociétés dont la

volonté est d'améliorer l'information fournie sur le fonctionnement des sociétés. La procédure d'alerte est d'ailleurs une innovation pour la plupart des pays membres de l'OHADA, dont les droits ignoraient le mécanisme. Voir en ce sens F.M SAWADOGO voir supra, p.36.

CHAPITRE II : PRESENTATION DU MILIEU D'ETUDE

I/ HISTORIQUE ET PRESENTATION DE LA SOCIETE MBALLA ET FILS

L'entreprise a été fondée en 1992 avec le statut juridique d'établissement. Le fondateur M. Jean Ernest Mballa, chaudronnier -soudeur de formation a effectué l'ensemble de sa carrière au sein de l'usine ALUCAM d'Edéa. A son départ en retraite, il occupait la fonction de contremaître principal au sein du service Electrolyse31. Sa carrière au sein de ce département de l'usine ALUCAM a été singulièrement marquée par la mise sur pied d'un système novateur de réparation des caissons d'alumine. Dans cette perspective, il fut encouragé et aidé par son ancien employeur à créer une entreprise sous-traitante qui interviendrait de manière permanente pour effectuer les travaux de maintenance industrielle au sein du service Electrolyse. Un cahier de charges précisant les modalités d'exécution du travail et l'objet des prestations fut établi le 26 juin 1992, entre ce dernier et la compagnie ALUCAM.

L'entreprise fut enregistrée au registre de commerce sous le N°637, le 20 janvier 1992, domiciliée à Edéa, citée d'environ 110 000 habitants d'après les statistiques de 2003 disponibles à la Commune Urbaine d'Edéa, Département de la Sanaga - Maritime, République du Cameroun, avec pour objet la soudure générale, la mécanique, la menuiserie et les prestations diverses. Le capital social à la création était de 500 000 (cinq cent mille) FCFA.

En 1994, le fondateur décède, laissant aux commandes la veuve assistante sociale de formation, retraitée. L'entreprise comptait une quinzaine d'employés.

En 2004, les Établissements MBALLA et FILS changeaient de dénomination sociale et de statut juridique devenant la « Société MBALLA et FILS » S.A.R.L, avec une augmentation du capital qui passait à 1 000 000 (un million) FCFA avec la nomination de la veuve du fondateur comme gérante statutaire.

En fin d'année 2005, les tensions sociales, financières et industrielles conduisaient la gérante à solliciter l'appui stratégique et financier d'un partenaire extérieur et ami de la famille. Ce dernier, a consenti à investir 5 000 000 (cinq millions) FCFA dans l'entreprise, et, s'est engagé à apporter un appui stratégique pour un redressement rapide de l'entreprise.

31 Département de l'usine ALUCAM au sein duquel s'effectue le processus de dissociation chimique de l'alumine

en molécules simples obtenue par l'action d'un courant électrique sur des ions en fusion ou en solution.

I.1 Géographie du capital

En accord avec la loi N°61/20 du 27 juin 1961, le changement de statut et l'augmentation du capital de l'entreprise ont été constatés par acte notarié le 30 décembre 2003: soit une société à responsabilité limitée (SARL) au capital de 1 000 000 (un million) FCFA, divisé en cent (100) parts sociales de 10 000 (dix mille) FCFA de valeur nominale chacune, que les six (06) associés ont décidé de créer et dont le siège social est fixé à Édéa..

Tableau 1 : Géographie du capital de la société Mballa et Fils

N°d'or dre

Noms prénoms et adresse des

associés

Nombre des

parts sociales

attribuées

Valeur nominale d'une part sociale

Montant des

parts sociales

libérées

01

Gérante

50

10 000

500 000

02

Enfant Aîné, BP 532 Edéa

10

10 000

100 000

03

Enfant, Deuxième né, BP 532 Edéa

10

10 000

100 000

04

Enfant, Troisième né, BP 532 Edéa

10

10 000

100 000

05

Enfant, Quatrième né, BP 532 Edéa

10

10 000

100 000

06

Petit Fils Aîné, BP 532 Edéa

10

10 000

100 000

TOTAL

 

100

100 000

1 000 000

(Source : Statuts de la SMF)

I. 2 Caractéristiques de l'activité

L'analyse des facteurs de succès et d'insuccès a révélé combien les caractéristiques de l'entreprise influencent de façon significative l'utilisation des pratiques de gestion et les résultats organisationnels.

La SMF est une entreprise dont l'activité principale est basée sur la vente des services à savoir : > Soudure générale;

> Chaudronnerie;

> Tuyauterie;

> Menuiserie;

> Charpente métallique;

> Électricité;

> Location du personnel.

Un vaste domaine d'activité, mais exploité partiellement. Actuellement, l'entreprise exerce essentiellement dans les domaines de la chaudronnerie ALU (Aluminium), soudure ALU et soudure spéciale sous champ magnétique. Elle exerce ses activités au sein de l'usine ALUCAM depuis 1992. Le cahier des charges prévoit la réalisation des travaux mécaniques de réfection d'une cuve. La cuve d'électrolyse est une marmite géante dans laquelle l'alumine est dissoute dans un bain fluoré d'électrolyses entre 950°C et 1000°C. La SMF réalise des travaux de mécano soudure ardus, en milieu fortement magnétique.

I.2.1- Généralités sur le soudage

Le soudage se définit comme un procédé d'assemblage permanent de deux (02) ou plusieurs pièces par fusion localisée du métal.

Les principaux procédés de soudage sont le soudage au gaz et à l'arc électrique. Le soudage au gaz (au chalumeau) est un procédé de soudure par fusion où la chaleur de soudure est produite

par la combustion de gaz. La composition oxygène-acétylène (oxyacétylénique) est aujourd'huipresque exclusivement employée. On notera qu'une trop forte proportion d'oxygène entraîne une chaleur plus importante, mais, le risque d'oxydation augmente.

Schéma d'un chalumeau soudeur

Dans le second procédé, la chaleur nécessaire à créer la soudure est apportée par un arc électrique. Get arc électrique est transmis au métal de base par une électrode en tungstène et le bain de soudure est protégé par un flux de gaz inerte. L'arc électrique généré est stable, précis, capable de souder des métaux très réactifs comme l'Aluminium ou le Titane. La chaudronnerie quant à elle permet la fabrication de pièces et assemblage métallique de grande taille.

I. 3 Organisation et fonctionnement

La SMF est représentée au sommet stratégique par un conseil d'administration ou comité de direction et sa gérante.

Le conseil d'administration est composé des quatre (04) enfants MBALLA, de la veuve MBALLA et de l'aîné des petits fils. Il ne s'est jusque là jamais réuni de manière formelle. Le nouveau partenaire, agit comme coordinateur des activités stratégiques de l'entreprise, et bénéficie chaque mois de dividendes rémunérant le prêt consenti. Cependant, sa présence n'a pas encore été formalisée dans les statuts de l'entreprise.

La Gérante est l'actionnaire majoritaire et la mandataire sociale dans l'entreprise. Elle jouit des pouvoirs les plus étendus pour agir au nom et pour le compte de la société.

Actuellement l'entreprise compte vingt neuf (29) personnels techniques et six (06) personnels administratifs, soit un effectif de trente cinq (35) personnes répartis en deux directions fonctionnelles : la direction technique et la direction administrative et financière.

La direction technique est chargée du suivi et de la réalisation des travaux, de la prospection et de la recherche de marchés, des études techniques, de la programmation et du planning d'activités du personnel technique.

La direction administrative et financière est chargée de la gestion du personnel, du suivi des relations avec les administrations, de la gestion comptable et financière de l'entreprise.

Sur le plan technique la SMF dispose d'un effectif technique de vingt neuf (29) employés :

> 02 responsables techniques (01 Directeur Technique et 01 Directeur Technique Adjoint); > 01 préparateur planning et qualité (DUT en maintenance industrielle);

> 03 chefs d'équipes (spécialistes chaudronniers soudeurs);

> 06 chaudronniers soudeurs;

> 11 aides soudeurs;

> 2 conducteurs d'engins lourds polyvalents (soudeurs); > 01 électricien polyvalent (aide soudeur);

> 01 chauffeur mécanicien polyvalent (aide soudeur);

> 02 magasiniers polyvalents (aides soudeurs).

L'effectif technique de la SMF est flexible et varie en fonction des périodes de hausse et de baisse d'activité. L'effectif technique est donc majoritairement composé de personnel temporaire. Dans le but de répondre aux commandes de son client qui peuvent survenir de jour comme de nuit, quelque soit le poste occupé, l'accent est mis sur la capacité du personnel à intervenir dans les travaux de réparation mécanique sur le site de l'usine ALUCAM.

Sur le plan administratif et financier :

> 01 Directeur Administratif et Financier;

> 01 responsable Facturation et contrôle qualité des travaux; > 01 comptable;

> 01 chargé d'étude;

> Pool secrétariat (une assistante de direction et une secrétaire).

En outre, la SMF est assistée par un conseiller fiscal (DEN conseils). Ce dernier est chargé de la collecte mensuelle des pièces comptables en vue de l'élaboration des déclarations statistiques et fiscales annuelles.

II/ NATURE DES PROBLÈMES RENCONTRES PAR L'ENTREPRISE MBALLA ET FILS

Ayant été précédemment édifié sur la littérature concernant les difficultés de l'entreprise et de l'entrepreneur africain, nous sommes dans de meilleures dispositions pour nous pencher sur les difficultés rencontrées par la SMF. Les problèmes évoqués ci-dessous sont précurseurs à la demande d'intervention et proviennent de facteurs externes et internes à l'organisation. Avant de s'attaquer dans la deuxième partie de notre travail au processus d'ajustement proprement dit, qui comporte une phase de diagnostic et de mise en oeuvre des mesures retenues, et, à son évaluation, nous faisons ici un état sommaire des faits visibles immédiatement qui auraient pu être à l'origine du désajustement de l'entreprise. Ces signaux d'alertes de la situation de crise émanaient

principalement de l'environnement industriel, financier et social de l'entreprise32.

II. 1 Problèmes au niveau des données industrielles

En 2006, La SMF exerçait 100% de son activité sur le site industriel de la compagnie ALUCAM d'Edéa, comme entreprise sous-traitante sur les travaux de réparation mécanique des cuves servant à la fabrication d'Aluminium. La sous-traitance est un contrat par lequel une entreprise dite « mutuelle » demande à une autre entreprise dite « assujettie » de réaliser une partie de sa production ou des composants nécessaires à sa production. Au début de chaque année, la SMF renouvelle son agrément de travail au service Achat - Approvisionnement d'ALUCAM. Le soustraitant est différent du simple fournisseur, car, il fabrique un produit conçu par le donneur d'ordre ou, souvent, avec lui. Le sous-traitant s'engage exclusivement sur la conformité de son exécution par rapport aux directives du donneur d'ordre33. Les directives d'ALUCAM tournent autour de la qualité des travaux réalisés et du respect des normes internationales relatives à la santé et la sécurité au travail. En effet, les opérateurs sont fréquemment exposés à des risques électriques au sein du service électrolyse.

L'inconvénient de cette activité est qu'elle mettait la SMF dans une situation de dépendance technique et commerciale par rapport à son donneur d'ordre. En effet, l'entreprise était en position de faiblesse subissant la concurrence de ses confrères et celle du donneur d'ordre luiméme qui, lorsque la baisse d'activité arrivait, reprenait une partie de la production sous traitée, pour éviter les conflits avec son personnel.

L'obligation pour la SMF de s'adapter en permanence aux changements techniques et aux rythmes de la production décidés par le donneur d'ordre, générait de lourdes charges pour l'entreprise. Alors que, dans le même temps, la grille de prix des prestations restait statique depuis 1992. Malgré la stagnation de ses prix, la SMF était contrainte de garder une main d'oeuvre d'opérateurs techniques motivée, expérimentée et formée pour une charge salariale dépassant souvent la production mensuelle. Incapable de suivre la cadence imposée par ses concurrents et son client depuis le décès du fondateur en 1994, l'entreprise a vu ses principaux marchés confiés à des concurrents de récente date, tels que la Camerounaise d'Entretien, Equipement Industriel, Bâtiment et Travaux Publics, FRIEDLANDER, la Société Internationale des Travaux Ferroviaires, la Société Grands Travaux du Littoral, la Société des Travaux Industriels du Cameroun. Par exemple, le marché de réparation des caissons faisant partie des cuves d'électrolyses, a été perdu en 2000. Le

32 Cette répartition en trois axes est emprunté à Jean François Daigne (1993 : 22) dans sa définition de la notion d'entreprise en difficulté, Voir supra p 29.

33 Voir www.wikipedia.org - la notion de sous traitance, pour une définition plus exhaustive de la notion. Consulté le 15/03/09.

marché est donc fortement concurrentiel.

Outre cette baisse d'activité globale, une autre difficulté était que le rythme de l'activité de la SMF avec son unique client était cyclique. En hausse du mois de mai à octobre, il baissait du mois de novembre à la mi-mai. Cette variation était liée à la fourniture en énergie électrique par AES SONEL. En effet, près de 1000°C sont nécessaires au fonctionnement des cuves d'électrolyses. L'approvisionnement en énergie électrique, provenant de la centrale hydroélectrique d'Edéa est réduit en période de saison sèche à cause de la fluctuation du débit du fleuve Sanaga. La planification des travaux et le contrôle de leur qualité pour répondre à ces variations posaient d'énormes contraintes techniques à l'entreprise, qui ne disposait pas en 2006 de personnel qualifié dans ce domaine. Le responsable technique avait un niveau de CAP en soudure. Le contrôleur des travaux s'était perfectionné sur le terrain grâce au fondateur de l'entreprise et n'avait pas suivi de formation lui permettant de s'adapter aux évolutions en cours. Les chefs d'équipes sur le terrain et les opérateurs techniques maintenaient tant bien que mal l'entreprise à flot, grace à leurs formations professionnelles dans des centres d'apprentissage, mais surtout grâce à la technicité acquise par le biais du fondateur en soudure sur champ magnétique.

Les fournisseurs réclamaient le paiement de leurs soins, articles, matériels et outillages. Par exemple, Le Supermarché RIDA Sarl, BP 813 Edéa, en date du 13 janvier 2007, écrivait une lettre au Directeur de la SMF, dont l'objet portait sur le rappel d'échéancier. En rappel des impayés de l'année 2005 et 2006, le Centre de Santé Intégré d'Elogbélé, BP 15 Edéa, par le biais de son Chef de Centre rédigeait une lettre au Directeur de la SMF, dont l'objet portait sur la dette de l'entreprise, on lisait : « Messieurs, nous venons par la présente vous signifier notre mécontentement car, vous ne payer jamais les soins de vos agents à temps ni dans l'intégralité [...] nous osons croire que tous ceci n'est qu'un simple oubli et vous saurions gré de bien vouloir remédier à cette situation de paiement tardif qui paralyse et fragilise notre centre de Santé. Dans le cas contraire, nous nous trouverons dans l'obligation de suspendre les soins à votre personnel ».

Les fournisseurs de matériels, d'outillage et de consommables étaient pour la plupart des vendeurs ambulants, qui s'approvisionnaient principalement sur le marché « noir ». On observait leur présence chaque jour dans les couloirs du siège social, l'inquiétude se lisait sur leurs visages. Par exemple, un fournisseur nous a montré un cahier où étaient notés : les quantités de matériel livré, les dates de livraison et les sommes dues, il clamait : « je veux une date précise pour le paiement de mes marchandises, je suis fatigué d'entendre des promesses ». Pour continuer à honorer ses commandes, l'entreprise était contrainte de solliciter de nouveau ces derniers, mais cette fois de longues tractations étaient nécessaires, avec à la clé une énième promesse de paiement.

II.2 Problèmes au niveau des données sociales

Les indicateurs du risque social en hausse (taux d'absentéisme élevé, conflits, accidents de travail, ...) étaient immédiatement perceptible. Par exemple, on pouvait rencontrer certains employés en train de prendre une bière sur la terrasse d'un snack bar de la ville d'Edéa, alors qu'ils devaient se trouver sur les chantiers à ce moment précis. Des opérateurs arrivaient fréquemment saouls sur les chantiers, alors même que les dangers de risques électriques étaient omniprésents, et, représentés par des panneaux avec des têtes de morts et des éclairs. On assistait à des bagarres sur les chantiers parmi les opérateurs. Les insultes et menaces de mort étaient monnaies courantes entre opérateurs et chefs d'équipes. Par exemple, on nous a fait état d'un conflit entre un chef d'équipe, faisant partie de la parentèle, et le responsable technique. La demande d'explication adressée, a été déchirée par le chef d'équipe avec moult menaces à l'endroit du responsable technique en sa présence. On peut aussi relater le conflit survenu entre un membre de l'encadrement et un opérateur. Ce dernier, originaire de la ville de Nanga Eboka a vertement menacé son supérieur de le faire mourir en trois jours, après un séjour au village34. L'interaction entreprise-famille semblait poser un problème à ce niveau.

Aucun mécanisme de gestion de conflit officiel, tel que le conseil de discipline n'existait au sein de l'entreprise. On découvrait néanmoins dans la documentation de l'entreprise, quelques sanctions écrites : mise à pied, mise en garde. Le licenciement ou la sanction n'intervenant qu'à un stade avancé de l'infraction susceptible de mettre en danger la survie de l'entreprise. Le cas le plus frappant pour illustrer ce phénomène est sans doute, celui d'un Sous Directeur, licencié en 2002. Ce dernier, a profité d'un voyage à l'étranger de la gérante pour mettre les employés en chômage technique, et signifier à l'entreprise donneuse d'ordre l'arrêt total des activités de la SMF. Il avait préalablement constitué les dossiers d'une entreprise à son nom, dans le but de reverser les employés et les marchés de l'entreprise dans son giron. Ce n'est qu'après un mouvement d'humeur des employés, que ce dernier a été licencié.

Les membres de l'encadrement technique étaient pour la plupart démotivés. Le propriétaire dirigeant se plaignait d'ailleurs à ce sujet de l'absentéisme quasi-permanent du responsable technique principal, avec pour conséquence un laisser-aller au sein des équipes.

Un groupe d'employés permanent du service technique, a rencontré en fin d'année 2005, le Directeur Technique ALUCAM, pour lui faire mention de l'irrégularité des salaires et des retards de paiement.

Les relations avec les institutions étatiques telles que l'administration fiscale et la Caisse Nationale de Prévoyance sociale (CNPS) étaient tendues. En effet, en regardant la documentation

34 Les populations de cette localité du Cameroun, aurait semble t-il des dons innés dans la sorcellerie.

de l'entreprise, on retrouvait par exemple, de novembre 2005 à mars 2006 des lettres de mises en demeure adressées par le Receveur des Impôts de la localité. On y lisait : « Par avis de mise en recouvrement N°XXX du X le montant des impôts mis à votre charge a été porté à votre connaissance suivant le détail ci-après XXX. Cette dette à ce jour étant demeurée sans effet, je vous enjoins de procéder sans délai au paiement des impôts sus évoqués aux fins de mise à jour du dossier fiscal y relatif. A défaut je me verrai contraint, dans les 48 heures qui suivent réception de la présente mise en demeure, de procéder à la saisie et à la vente de vos biens sans autres formalités. La présente mise en demeure vaut commandement. ». On constatait que depuis quelques mois l'entreprise ne réglait plus ses charges sociales et fiscales de manière régulière. Les bureaux du siège social ont été scellés à plusieurs reprises.

Au niveau de la direction de l'entreprise, l'âge de la gérante (64 ans) et son niveau de formation (CAP couture) semblaient constituer un handicap par rapport à la réactivité de l'entreprise face à ces difficultés. La gérante nous disait à propos de son âge : « mes pieds ne me permettent plus de monter les escaliers pour me rendre au bureau du Directeur Technique ALUCAM pour résoudre les problèmes qui se posent actuellement ». En outre, cette dernière possédait un CAP en couture obtenu en 1982, elle n'avait jusqu'ici suivi aucune formation en management. Différentes études sont arrivées à la conclusion que l'âge est un facteur influençant le comportement du dirigeant, et par conséquent, le succès ou l'échec dans la gestion d'une entreprise (Lalonde, 1985)35. La période entre 25 et 40 ans serait celle ou l'individu acquiert assez d'expérience, de compétence, une maîtrise de soi, pouvant l'amener à prendre plus de risque.

B. Duchéneaut (1996) trouve que la formation n'est pas fondamentale dans l'acte de création, mais qu'elle devient ensuite un facteur déterminant de succès pour une entreprise créée. Dans notre cas d'étude, la formation et l'expérience du fondateur ont été fondamentales dans la création de la SMF. Ce dernier ayant terminé sa brillante carrière à l'usine ALUCAM comme contremaître, après avoir suivi plusieurs formations en soudure et chaudronnerie industrielle notamment au Pays Bas. L'absence de formation et d'expérience de la gérante ne permettait apparemment pas à l'entreprise de s'adapter aux mutations en cours dans son environnement. Les rapports de certaines études indiquent que deux tiers des entrepreneurs qui réussissent avaient déjà une expérience dans leur secteur (B. Duchéneaut, 1996).

En outre, la géographie du pouvoir semblait pêcher par excès de centralisation et l'absence de contre-pouvoir. On remarquait aisément que la gérante prenait des décisions sans consulter les actionnaires. Une assemblée générale des actionnaires ne s'était jamais tenue. La gérante informait généralement ses enfants par téléphone ou de vive voix sur les difficultés en cours. L'irrationalité

35 Voir les recherches de Mayer et Goldstein (1961), Shapero (1971), Cooper (1973), cité par Claude Lalonde (1985) Caractéristiques et pratiques de management des Propriétaires- dirigeants dont l'entreprise a été mise en faillite : une étude en contexte régional au Québec. Thèse : faculté des sciences de l'administration, université de Laval.

des circuits relationnels de l'entreprise ouvrait une voie royale au vieux principe « diviser pour mieux régner ». L'arbre à palabre et la communication informelle étaient omniprésents. Il était possible d'entendre ça et là, « il paraît que », « nous avons entendu que », « un tel à dit que ». Pour gérer ces rumeurs et les cas d'indisciplines, la gérante convoquait généralement, le mis en cause, les membres de l'encadrement, l'épouse de l'intéressé ou des membres influents de la famille de ce dernier, et toutes les personnes de son entourage présents au moment de la rencontre. Il était possible de voir le chauffeur de la gérante assisté à des réunions sensibles de direction, ou, relatives à la gestion de conflits individuels du personnel.

A cela s'ajoutait un organigramme flou, ce qui rendait difficile la détection des circuits opérationnels réels.

II.3 Problèmes au niveau des données financières

Les déséquilibres au niveau des données financières semblaient importants. La SMF manquait de parfaite maîtrise et connaissance de son fonds de roulement, de son cycle d'exploitation, du besoin en fonds de roulement. Le comptable détenait un CAP d'employé de banque obtenu en 1990, il avait depuis son entrée dans l'entreprise en 2001, suivie une seule formation organisée par la CNPS sur les procédures de déclarations des charges sociales.

Les documents présentant une gestion prévisionnelle, basée sur l'élaboration de budgets, de bilans, de plans de trésorerie et d'un tableau de bord articulé sur une batterie de ratios caractéristiques de l'entreprise étaient absents. On voit sur le tableau 1 ci-dessous, que malgré la baisse du chiffre d'affaires de 2003 à 2005, les charges liées au personnel avaient augmenté au cours de ces années.

Tableau 2 : Evolution des Charges de personnel de 2003 à 2005 en rapport avec la production.

Année

Charges de personnel
(FCFA)

Production vendue à ALUCAM (FCFA)

2003

45

828

895

124

590

141

2004

55

992

937

84

903

715

2005

54

201

175

91

715

065

Total sur trois ans

156 023 007

301

208

921

(Source : Déclaration Statistiques et Fiscales 2003,2004, 2005)

En addition aux frais de personnel, les coûts du matériel, des équipements de protection individuels (EPI) sont en hausse. De nouveaux EPI sont apparus à savoir : lunettes, bouchons d'oreilles etc.

Tableau 3 : Evolution des prix des EPI depuis 1992.

EPI ANCIEN (1992)/pers

EPI NOUVEAU/pers

Période de

dotation

Quantité

Bleu simple....6000 Fcfa

Pyrovicel 111 000 Fcfa

2*/an

Effectif technique +
Effectif
Administratif

Bacou..... 4000 Fcfa

Rangers.... 114 000 Fcfa

1*/an

 

Lunettes 2600 Fcfa

4*/an

 

Bouchons d'oreille.1000 Fcfa

4*/an

 

Casques 8000 Fcfa

1*/an

 

Gants ..5000 Fcfa

6*/an

Effectif technique

 

Blouson cuir....95000 Fcfa

1*/an

 

Tabliers ..12000 Fcfa

1*/an

 

Guêtres 9000 Fcfa

1*/an

(Source : Auteur, après entretien avec les responsables techniques, 2006).

Interroger sur l'absence de mécanisme d'alerte financier, l'adjoint du responsable du cabinet conseil fiscal mandaté par la SMF avant l'intervention, pour le suivi comptable et financier et le montage des Déclarations Statistiques et Fiscales, répondait : « Votre maman ne paye pas bien ».

Pourtant, la structure financière de l'entreprise était fragile. L'historique bancaire requis en mai 2006 à la Banque Internationale du Cameroun pour l'Epargne et le Crédit, présentait un découvert bancaire de plusieurs millions de FCFA. Des entretiens réalisés avec la gérante, il ressortait que l'entreprise était aussi endettée auprès des tontines, de la famille, des usuriers, des micro finances. Le taux d'endettement était donc élevé et les fonds propres insuffisants. L'assertion d'André Malraux selon laquelle « à la maîtrise l'enfant substitue le miracle ", semblait être à la base des pratiques de management et particulièrement de gestion financière. En effet, lors d'entretiens tenus pendant certaines réunions du Groupement des Opérateurs Économique de la Sanaga Maritime, des chefs des PME locales disaient qu'ils dirigeaient leurs entreprises grâce à « la sagesse du village " et n'avaient pas eu besoin de connaissances théoriques ou de diplômes pour monter leurs affaires. Malgré la réussite de certains, marqués par des signes extérieurs de richesse (voitures de luxes, villas, polygamie...), les dirigeants d'entreprises africains ne peuvent s'y référer, car cela serait accepter un grand risque dans leur gestion. La maîtrise est une condition sine qua non à toute bonne gestion financière d'entreprise.

Au vu des données financières disponibles, il était possible de constater que l'activité de l'entreprise se poursuivait malgré les handicaps. Le chiffre d'affaires réalisé au cours des trois dernières années, avant l'intervention, étaye cette précédente assertion. Le surendettement de la SMF représentait le problème majeur, gênant le processus de paiement de salaires, et de règlement des charges fiscales et sociales. Toutes les sources de financement possible à savoir : banques, tontines, micro finances, usuriers, famille, avaient déjà été exploitées par l'entreprise, et n'étaient plus disposées à financer l'activité de cette dernière. Un état de l'endettement de la SMF est présenté dans la deuxième partie de ce travail.

Le 21 juin 2005, la gérante adressait une ultime lettre au Chef service approvisionnement ALUCAM, dont l'objet portait sur la demande d'une avance exceptionnelle de 6 millions de FCFA. On pouvait y lire : « Nous venons auprès de votre haute bienveillance, vous réitérez notre demande d'une avance exceptionnelle sur nos prestations. En effet, nous vous rappelons que notre première lettre vous a été adressée le 23 mars 2005 malheureusement, elle est restée lettre morte. Cependant, nous connaissons de sérieuses difficultés financières, raison pour laquelle nous sollicitons une avance de 6 millions de FCFA remboursable en un an et à retenir à la source sur nos prestations mensuelles [...] ». Cette deuxième lettre restée sans suite, comme la précédente, montrait que la situation financière de l'entreprise était devenue insoutenable.

Les nombreuses contre-performances et les désajustements observés dans le fonctionnement des organisations africaines ne doivent pas occulter les expériences à succès qui se déroulent un peu partout sur le continent. Le véritable problème ici n'est donc pas celui de l'africain en tant qu'être humain, mais, bien celui des structures sociales et de production dans lesquelles vit ce dernier. C'est une impérieuse nécessité de redéfinir l'entreprise africaine, et, de réinventer les pratiques de management en respectant la double exigence, de la rentabilité financière et économique, et, de la préservation du lien social tant prisé par les africains36. C'est dans cette perspective que le processus d'ajustement de la SMF a été mis en place.

36 Voir la conclusion de l'ouvrage de Marcel Zadi Kessi (1998) Culture africaine et gestion de l'entreprise moderne, Abidjan, CEDA. Cette conclusion est illustrée par la présentation et la discussion de deux expériences ivoiriennes de restructuration et de privatisation d'entreprises publiques avec succès. Expériences dans lesquelles il a joué un rôle déterminant dans l'élaboration et la mise en oeuvre des projets de réforme.

CHAPITRE I - PRESENTATION DU PROCESSUS
D'AJUSTEMENT DE LA SOCIETE MBALLA ET FILS

L'entrepreneur des PME familiales au Cameroun a besoin de rester à l'écoute des disciplines dont la tâche consiste à mettre en lumière les dimensions qui risquent d'être oubliées, quand il s'agit de comprendre les réalités sociales et de poser les conditions de réussite et d'efficacité de son entreprise. C'est dans cette optique, marquée par un désajustement, au niveau des données sociales, industrielles et financières que la nécessité de parvenir à une cohérence interne et externe rapide de la SMF s'est posée. A cet effet, la mise en place d'un processus d'ajustement de l'entreprise auquel nous avons pris part, a été décidée par les dirigeants de l'entreprise en mai 2006.

I/ HISTORIQUE DE L'INTERVENTION, NEGOCIATION DU MANDAT, ET METHODOLOGIE UTILISEE

Dans cette section, il est question de montrer la phase préparatoire à la démarche d'intervention proprement dite. Après l'historique de l'intervention et la négociation du mandat, nous évoquerons la méthodologie utilisée par l'équipe en charge de conduire le processus d'ajustement.

I.1 Historique de l'intervention et négociation du mandat

En octobre 2005, la SMF était surendettée. Les recours auprès des sources de financement usuelles de l'entreprise étaient épuisés, à savoir : la Banque Internationale du Cameroun pour l'Epargne et le Crédit (BICEC), la micro finance First Investment For Financial Assistance (FIFFA), les tontines et autres associations. Fautes de moyens de paiement pour amortir les dettes contractées auprès de ces institutions, les salaires des employés, les sommes dues aux fournisseurs ainsi que les charges sociales et fiscales furent gelés. Des tractations ont été menées par la gérante avec les institutions de financement à plusieurs reprises. La fibre maternelle utilisée jusqu'ici ne jouait plus. Pour continuer son activité de sous-traitance industrielle avec ALUCAM, la SMF devait au minimum être en mesure de supporter ses coûts de production. Les coûts de production représentent les charges liées au personnel et à l'achat de matériels, consommables et EPI.

En novembre 2005, la crise persistait. Les employés manifestaient ouvertement leur

mécontentement sur le site industriel de l'usine ALUCAM. Les difficultés sociales, financières et industrielles retracés ci-dessus37, rendaient difficiles le respect du cahier des charges signé avec ALUCAM en juin 1992. En novembre 2005, le Sous - Directeur Technique ALUCAM convoquait les responsables de la SMF en réunion restreinte, pour leur faire part d'une éventuelle suspension de l'activité de la SMF, en cas de non résolution des difficultés sociales et industrielles de l'entreprise à court terme.

En Décembre 2005, la gérante de la SMF, sollicitait et obtenait l'appui financier et stratégique d'un ami de la famille. Ce dernier, que nous appelons le commanditaire, cadre retraité depuis peu de l'usine ALUCAM, a consenti à faire un prêt de 5 millions FCFA à la SMF et à contribuer au redressement de l'entreprise.

En janvier 2006, le commanditaire faisait recruter deux agents d'encadrement technique :

- un responsable technique adjoint, né en 1974, de niveau Baccalauréat Technique Métaux en Feuilles/ Chaudronnerie Métallique, avec une expérience de 09 ans dans l'encadrement et le suivi opérationnel des travaux de chaudronnerie et de soudure industrielle.

- un préparateur planning et qualité, né en 1977, titulaire d'un Diplôme Universitaire de Technologie en Génie Industriel et Maintenance, chargé de la planification des travaux et du contrôle qualité.

En mai 2006, suite à un problème d'indiscipline d'un chef d'équipe, le commanditaire souhaitait avoir une connaissance approfondie des sphères sociales, et financières de l'organisation. D'où l'appel à un spécialiste en gestion des ressources humaines, provenant du Centre Régional Africain d'Administration du Travail (CRADAT)38 de Yaoundé, et, à un cabinet spécialisé en conseils fiscal, financier, et du travail, en l'occurrence BIBA conseils Sarl, basé à Edéa, pour constituer l'équipe d'intervention.

Une discussion préalable avec le commanditaire, a permis à l'équipe d'intervention de comprendre que ce dernier s'intéressait principalement à la phase opérationnelle définit en termes de conséquences attendues. Ce dernier s'interrogeait sur les problèmes de fonctionnement de l'entreprise notamment la diminution de la profitabilité, la lourdeur structurelle et l'inefficacité des processus, et voulait satisfaire aux besoins de nouvelles orientations.

Trois attendus majeurs ont été retenus en collaboration avec le commanditaire à savoir :

- le premier portait sur la compréhension du fonctionnement de l'entreprise à travers un état des lieux de la situation organisationnelle et environnementale.

- le deuxième relevait du diagnostic et de la formulation par le groupe d'intervenants de pistes

37 Voir supra, partie 2, du chapitre II, nature des problèmes rencontrés par l'entreprise.

38 Le CRADAT est une institution régionale, regroupant 18 pays africains francophones sous la tutelle du Bureau International du Travail. Il est situé à Yaoundé et a pour but de former les administrateurs du travail de ces différents pays. Il offre depuis 2003 une formation de DESS en Gestion des ressources Humaines.

générales d'amélioration du fonctionnement de l'entreprise opportunes et faisables. Ces

recommandations issues de l'analyse devaient être basées d'une part, sur les suggestions du

personnel rencontré au cours des entretiens et d'autre part, sur l'expérience des intervenants.

- le troisième concernait la modification des comportements réels des acteurs à court et moyen

termes, et leur motivation à entrer dans une nouvelle dynamique organisationnelle.

Par ailleurs, les modalités concrètes de réalisation de l'intervention ont été fixées entre l'équipe d'intervention, le commanditaire et la gérante de la SMF que nous appelons aussi dans cette étude le décideur ou le propriétaire dirigeant. La rétribution financière par l'entreprise du service presté par l'équipe d'intervention a été fixée à 265 000 (deux cent soixante cinq mille) FCFA/mois. La première phase d'une durée de trois mois devait aboutir à un document de synthèse du diagnostic organisationnel. Ensuite, si les résultats obtenus satisfaisaient aux attentes du commanditaire et du décideur, le mandat serait prolongé avec des pouvoirs plus étendus pour la mise en oeuvre des recommandations, dont devait découler la réalisation du troisième attendu.

I.1.1 Calendrier d'activités

Les activités ont été réparties en deux principales phases : la phase de diagnostic et la phase de mise en oeuvre des recommandations issues du diagnostic de l'organisation.

Phases

Activités

15/05/06 Au

19/06/06
(Mois 1)

20/06/06 au

19/07/06
(Mois 2)

20/07/06
au
19/08/06
(Mois 3)

20/08/06 au
19/12/06
(Mois 4, 5, 6,
7)

20/12/06 au
19/02/07
(Mois 8,9)

Diagnost
ic

Attendu 1
Compréhension
du
fonctionnement
de l'entreprise

Littérature grise et observation directe

Analyse de l'environnement

 
 
 

Analyse de l'existant

Entretiens

 
 
 

Attendu 2
Formulation de
pistes
d'améliorations

 
 

Rédaction document de synthèse

 
 
 
 

Présentation du rapport de synthèse au commanditaire.

 
 
 
 
 
 

Validation
phase
diagnostic

 
 

Mise en
oeuvre

Attendu 3

 
 
 

Mise en place des mesures d'ajustement

 
 
 
 
 

Rapport de

suivi des indicateurs des performances sociales et financières, Fin.

(Source : Auteur)

I.2 Méthodologie utilisée et processus de recueil des données

L'équipe d'intervention s'est basée sur la méthode de l'audit organisationnel. L'audit organisationnel est une photographie à un instant T d'une organisation au regard d'une problématique spécifique. Il permet d'identifier les points forts et les points faibles de celle-ci. Les enjeux sont d'améliorer la qualité de service pour accroître la satisfaction des clients et de réduire les coûts de l'entreprise tout en augmentant la rentabilité et la productivité. C'est aussi selon Gilbert Riebold (1976 :151) la recherche systématique des inefficiences d'exploitation. La démarche d'intervention s'est déroulée en deux grandes phases: une phase diagnostique et une phase de mise en oeuvre des mesures proposées dans le rapport de diagnostic. La première phase a permis de définir les objectifs, de réaliser l'analyse de l'existant, rechercher les causes de l'origine du problème (causes externes, internes ou structurelles). Ensuite, les pistes de progrès possibles ont été évaluées en fixant les indicateurs de suivi.

En collaboration avec le cabinet de conseil fiscal et financier BIBA conseils Sarl basé à Edéa, nous avons procédé à l'examen de l'environnement économique de l'organisation, ses ressources humaines, son management, sa production et ses données financières.

Les données provenaient essentiellement de la littérature "grise", c'est-à-dire des documents qui circulent dans l'entreprise ou qui la présentent (procès-verbaux de réunions, règlements intérieurs, dépliants de présentation...), et, de l'observation directe des intervenants. L'équipe d'intervention a procédé au recueil des données par étapes, séparées systématiquement par une période d'analyse de ces informations, ce qui a donné l'occasion de faire évoluer le corpus des hypothèses et d'affiner la connaissance de l'entreprise.

Les entrevues avec le personnel se sont déroulées dans un premier temps, individuellement avec chaque employé, à l'occasion nous exposions les objectifs, le cadre et le dispositif de l'intervention ainsi que les règles déontologiques de confidentialité et d'anonymat, avant de répondre aux questions. Ensuite, dans l'optique de la mise en oeuvre des recommandations issues du diagnostic, une réunion à laquelle prenait part, l'ensemble du personnel, ainsi que le commanditaire et le décideur fut effectuée. La question du cadre de notre action a été systématiquement posée, surtout dans un rôle éventuel (et souhaité) d'administrateur du changement. L'équipe d'intervention a refusé d'assumer cette mission parce que le changement nécessite d'une part des points d'appuis organisationnels (dans les relations de pouvoir, notamment) et une indépendance à l'égard de l'intervenant extérieur (donc nous-mêmes), et d'autre part une présence régulière sur le terrain afin d'opérer régulièrement des diagnostics de l'état d'avancement du projet 39et les ajustements opportuns du dispositif mis en place.

Ces entretiens d'une durée d'une heure se déroulaient dans un premier temps, dans une pièce de l'habitation de la gérante compte tenu du fait que les bureaux administratifs étaient scellés par l'administration fiscale. Après avoir rempli une fiche retraçant les données personnelles sur l'individu (situation familiale et sanitaire, âge, statut et évolution au sein de l'entreprise, ses parcours scolaire et professionnel), l'enquête portait sur sa situation relationnelle de travail, actuelle et idéale et les pratiques culturelles en cours. Une attention particulière était accordée à ses aspirations professionnelles définies par ses ambitions de carrière, la manière dont il percevait l'avenir de l'entreprise et comment il pouvait contribuer à son développement (formation, mutation, amélioration des procédures de travail...).

Pour mettre en place les mesures indispensables à l'ajustement, restaurer la rentabilité et la trésorerie de l'entreprise, il était nécessaire d'avoir une connaissance approfondie du fonctionnement de l'organisation et de son environnement socio-économique. Cette connaissance devait découler des conclusions du diagnostic, et, faciliter l'analyse des lignes de forces et de faiblesse de l'entreprise, conduisant à la correction des écarts les plus significatifs.

39 Cette fonction nécessite une appropriation, par le gestionnaire du changement, de concepts théoriques

suffisants pour comprendre l'évolution de son entreprise.

II/ PHASE DIAGNOSTIQUE DU PROCESSUS D'AJUSTEMENT

Le diagnostic avait pour objectif de déceler les points faibles de la SMF pour les corriger et les points forts pour les exploiter au mieux. Un bon diagnostic se doit être clair, rapide, fiable et définir une stratégie sociale, économique et financière. Le diagnostic proposé mobilisait trois niveaux d'investigation, en poupées russes à savoir :

- l'environnement extérieur ;

- l'environnement proche représenté par les partenaires, clients et autres acteurs influençant ou pouvant être influencés directement par l'entreprise ;

- l'entreprise elle-même.

L'environnement extérieur n'est évoqué que très rapidement, pour mémoire. Puis, l'accent a été mis sur le diagnostic de l'environnement proche. Le diagnostic portait essentiellement sur l'entreprise elle-même, car, la situation de crise exigeait un ajustement interne rapide. Certaines informations sur l'environnement de l'organisation ont été actualisées pour le besoin de cette étude et vont de 2006 à 2008, celles concernant l'entreprise elle-même sont issues du diagnostic réalisé en 2006 suivant le calendrier d'activité ci-dessus.

Graphique 1 : Cadre de Réflexion sur la conduite d'un diagnostic organisationnel

(Source : Ministère Français de l'Economie des Finances et de l'industrie, Direction Générale de l'Industrie, des Technologies de l'Information et des Postes, juillet 2002, www. industries.gouv.fr/biblioth/docu/dossiers/sect/pdf/technorg.pdf)

II. 1 Diagnostic de l'environnement extérieur de la SMF

La compréhension des rapports de force en présence autour de l'entreprise permet de mettre en évidence les menaces et les opportunités externes liées au secteur d'activité ainsi que certains des facteurs clefs de succès correspondants. Connaître mieux l'environnement de la SMF et ses évolutions est un moyen d'anticiper et de contribuer à façonner son devenir, de se prémunir contre d'éventuels risques et d'optimiser l'exploitation de toutes les ressources en fonction du contexte

Les choix du propriétaire dirigeant sont contraints par son environnement qui est fonction de multiples variables, parmi lesquelles: les règles sociales, l'évolution technologique, les fondamentaux économiques (l'inflation, les taux d'intérêt, la croissance,...) et de leur influence sur les activités de l'entreprise (les coüts d'approvisionnement, les coüts salariaux,...), le contexte politique (accords internationaux...).

La SMF est soumises aux lois et règlements qui régissent son domaine d'activité en République du Cameroun. Par exemple, socialement, elle est soumise au respect du code du travail de la république du Cameroun. La loi N°92-007 du 14 août 1992 portant code du travail régit les rapports de travail entre les travailleurs et les employeurs, ainsi qu'entrent ces derniers et les apprentis placés sous leur autorité. Les décrets d'application de cette loi, notamment l'arrêté N°010/MTPS/DT du 20 avril 1971 sur les primes d'ancienneté et les échelons de salaires génère par exemple des augmentations annuelles de la masse salariale, soit une prime d'ancienneté de 4% après deux ans d'ancienneté et 2% par année de service supplémentaire au-delà de la deuxième année. En 2006, 08 employés permanents de l'entreprise totalisaient 14 ans d'ancienneté.

La SMF est soumise à l'application de la Convention Collective des Industries de Transformation de la République du Cameroun, déposée aux greffes du Tribunal de Première Instance de Yaoundé le 20 mars 2002. L'application de ces textes, permet de rassurer les partenaires sociaux et d'installer un climat de confiance au sein du personnel de l'entreprise.

L'entreprise est contrainte par la loi des finances qui à un impact considérable au niveau des données économiques. On a par exemple assisté en 2002 à l'augmentation du taux de la taxe sur la valeur ajoutée, qui est passé de 18,70% à 19.25%, ce qui accroît les coüts d'approvisionnement en équipements de protection individuels (EPI), matériels et consommables de la SMF.

Les accords sur la réalisation des grands projets industriels (Extension usine ALUCAM Edéa et construction du barrage de Nachtigal, projet de yard pétrolier de Limbé, projet de port en eau profonde kribi...) influent sur le positionnement de l'entreprise. C'est dans cette optique de positionnement que la SMF a adhéré en 2007 au Groupement d'Intérêt Economique (GIE) Sanaga Metal and Steel (SMS). Ce GIE constitué grâce à la médiation de la Chambre de Commerce d'Industries des Mines et de l'Artisanat du Cameroun, regroupe 13 entreprises du Département de

la Sanaga Maritime spécialisées dans le domaine de la chaudronnerie et de la soudure industrielle. D'après les Statuts du GIE SMS, la SMF fait partie de ses membres fondateurs. Une réunion effectuée le 22/10/2007 à l'Hostellerie de la Sanaga à Edéa a permis d'adopter la capitalisation du GIE à 80 000 000 FCFA, avec 3 catégories d'actions :

- A- Entreprises Fondatrices avec 60%

- B- Groupe secondaire avec 15%

- C- partenaires étrangers avec 25%

Au-delà de l'environnement évoqué ci-dessus, qui s'impose à l'entreprise, la SMF doit également faire face à un ensemble d'acteurs proches sur lesquels son organisation exerce une influence plus ou moins directe, mais, qui en retour contraignent son développement. Ces acteurs sont les concurrents, les clients, les fournisseurs, les partenaires publics et les institutions financières.

II.2 Diagnostic de l'environnement économique de la SMF

Une entreprise quel que soit son secteur d'activité, ne peut exister sans vendre de produits répondant aux besoins de son marché. Le marché à des exigences, les produits doivent être fiables et compétitifs, en ce qui concerne la qualité et le prix. La SMF effectue des travaux de prestations de services en mécano soudure au sein de l'usine ALUCAM Edéa depuis 1992. A ce titre, le produit qu'elle vend c'est la technicité de sa main d'oeuvre. Le diagnostic économique doit donc répondre à une double interrogation : les produits sont --ils compétitifs ? L'environnement concurrentiel menace t-il le marché traditionnel de l'entreprise ?

II.2.1 Analyse des Marchés, clients et concurrents

Au registre du commerce déposé aux fins d'immatriculation le 20 janvier 1992 au N°637, l'objet du commerce mentionne : soudure générale, mécanique, menuiserie, et prestations diverses. Si l'on s'en tient à l'objet de son activité l'entreprise dispose de plusieurs marchés potentiels. Pourtant, sur le titre de patente de l'année 2008 une seule activité était mentionnée : soudure. Le fondateur de l'entreprise, spécialiste des travaux de mécano soudure au sein de l'usine ALUCAM, s'est vu attribué par son ancien employeur, la réalisation de ces travaux à son départ à la retraite. L'entreprise est restée, depuis 1992, concentrée sur la vente de services de soudure et de chaudronnerie industrielle au sein de l'usine ALUCAM. Cette spécialisation lui a permis d'acquérir

et de conserver un savoir-faire dans le domaine de la soudure et de la chaudronnerie industrielle sur champ magnétique. Le fondateur ayant pris soin de former un noyau de soudeurs faisant toujours partie de l'effectif de l'organisation. L'atout majeur de la SMF est, donc, la technicité de ses opérateurs, ce qui lui permet de se maintenir malgré ses difficultés sur son marché.

La compagnie ALUCAM, fer de lance de la transformation d'aluminium en Afrique est une société anonyme au capital de 17 388 000 000 FCFA. Sur son site industriel d'Edéa, elle dispose d'un portefeuille fournisseurs de soixante cinq (65) entreprises extérieures intervenantes agrées, répartis sur plusieurs segments d'activités, La SMF occupe le segment chaudronnerie ALU, soudure ALU et tiges d'anodes, soudure spéciale. Trois autres entreprises font parties de ce segment d'après la note APP/SB/mn/n°93/08 du 22 décembre 2008, ayant pour objet la liste des entreprises extérieures intervenantes 2009, émise par la Surintendante du service Achat - Chaîne d'Approvisionnement ALUCAM, on y retrouve les entreprises ci-après :

- MPE (Maintenance Polyvalente d'Edéa),

- STIC (Société des Travaux Industriels du Cameroun), - SRM (Société de Réalisation et de Maintenance).

Une analyse réalisée par l'intermédiaire du cabinet de conseil fiscal et financier faisant partie de l'équipe d'intervention a permis d'obtenir les données sur les concurrents directs de la SMF. Le cabinet étant en charge du montage des dossiers administratifs du GIE Sanaga Metal and Steel en 2007, ces informations ont pu être collectées aisément. Pour étayer ces informations, L'équipe d'intervention s'est déplacée sur le terrain pour visiter les installations de ces entreprises et s'entretenir avec certains responsables de ces dernières.

+ Créée en 1981, sous l'appellation Etablissement des ateliers du marché, MPE est depuis l'an 2000 une SARL au capital social de 1 000 000 FCFA, avec son siège social à Edéa. Les valeurs à l'origine de la société étaient le désir de perfection et la reconnaissance d'un savoir faire en mécanique de fabrication acquis notamment à la Maison RENAULT et PECHINEY (France) par le fondateur de la société, ancien cadre du service ingénierie de l'entreprise ALUCAM. Elle disposait d'un camion de chantier et d'un atelier industriel. Depuis la mort du fondateur de l'entreprise en 2006, le chiffre d'affaires de MPE était en baisse. En 2004, la patente de l'entreprise, présentait un chiffre d'affaires de 56 000 000 FCFA, en 2007 il n'était plus que de 28 246 000 FCFA. Sa fille a repris les commandes de l'entreprise après plusieurs conflits de succession au sein de la famille. Le domaine d'activité comprend principalement la soudure, la chaudronnerie, la menuiserie, la vente de gaz industriel. Niveau de menace faible sur les

marchés de la SMF.

+ L'entreprise STIC a été crée en 2000, par un natif du département de la Sanaga Maritime. Après enquête et observation, elle bénéficie d'appuis nombreux des élites du bassin d'emploi et particulièrement au sein de l'usine ALUCAM. Basée à Edéa, elle réalisait des prestations dans d'autres segments d'activités au sein de cette dernière : chaudronnerie moyenne, nettoyage de process, location de personnel. Le chiffre d'affaires estimé en 2006 était de 500 000 000 (cinq cent millions) FCFA. STIC possédait un atelier industriel complet et un parc d'engins lourds. En outre, elle disposait d'un agrément de travail au sein de la Société des Plantations des Fermes Suisses (SPFS) qui produit et raffine de l'huile de palme dans le département de la Sanaga Maritime. Sa faiblesse majeure résidait dans le manque de formation académique et professionnelle de son fondateur. Niveau de menace élevé sur les marchés de la SMF.

+ L'entreprise SRM, était dirigée par deux entrepreneurs associés. SRM réalisait un chiffre d'affaires annuel avec ALUCAM d'environ 200 000 000 (deux cent millions) FCFA en 2006. Elle dispose d'un atelier industriel. L'un des principaux marchés de la SMF à ALUCAM - la réfection des caissons d'aluminium - a été attribué à cette dernière. Niveau de menace moyen sur les marchés de la SMF.

Outre ces concurrents directs sur le segment d'activité de l'entreprise sur son marché de l'usine ALUCAM, d'autres entreprises de dimensions moyennes basées à Edéa telles que la Camerounaise d'Entretien, Equipement industriels, Bâtiment et travaux publics, la société Grands Travaux du Littoral et, des consortiums comme FRIEDLANDER (français) et la Société Internationale des Travaux Ferroviaires basés à Douala, dont le chiffre d'affaires sont estimés en milliards de FCFA, sont des menaces permanentes sur son domaine d'activité au sein de l'usine ALUCAM.

Les exigences de l'unique client de la SMF, ALUCAM, sont principalement la qualité des services, des prix de prestations compétitifs et le respect des normes de sécurité et de santé au travail. Ce marché était susceptible de croître avec la mise sur pied du projet d'extension de l'usine actuelle en gestation depuis 2007, et, la construction d'une nouvelle usine à Kribi. Cependant, ALUCAM pouvait facilement changer de partenaire, ce qui a d'ailleurs généré la chute du chiffre d'affaires de l'entreprise en 2005.

En 2003 et 2004, la SMF a obtenu des marchés à la Société Nationale de Raffinage (SONARA), basée à Limbé. Cet essai de diversification de sa clientèle est représenté notamment par le bon de commande SONARA N°11274 du 02/09/2003 pour les travaux de nettoyage du Bac

301 B01 pour un montant de 978 500 FCFA, et, le bon de commande SONARA N°13002 du 31/05/2004 pour les travaux de réparation station à mousse pour un montant de 3 650 000 FCFA. Ces travaux de mécano soudure représentaient à peine 2% du chiffre d'affaires de la SMF avec ALUCAM au cours de ces mêmes années40. Depuis 2004, plus aucuns marchés n'ont été obtenus à la SONARA.

II.2.2 Relations des partenaires publics avec la SMF

Les principaux partenaires publics de la SMF sont l'administration fiscale, la Caisse Nationale de Prévoyance Sociale (CNPS), la Délégation Départementale du Travail et de la Sécurité Sociale, la Délégation Départementale de l'Emploi et de la Formation Professionnelle, la Sous Préfecture d'Edéa 1er, le Tribunal de Première Instance d'Édéa.

Les relations de la SMF avec le Centre Départemental des Impôts (CDI) de la Sanaga Maritime étaient émaillées de différends. En effet, à plusieurs reprises, les locaux de l'entreprise ont été scellés pour non paiement des taxes, à savoir : Impôts sur les sociétés, charges patronales et salariales fiscales et sociales. D'ailleurs, à notre arrivée en mai 2006, nous avons trouvé les locaux de l'entreprise scellés. Le service des impôts est aussi chargé de collecter les charges sociales dues à la CNPS. Une tentative d'amélioration des relations a été entreprise notamment par la demande d'un moratoire41, car, les pénalités dues aux retards de paiements étaient importantes.

Pour avoir accès à un agrément de prestations de service à ALUCAM, ou, pour d'autres marchés publics ou privés, la SMF a besoin de documents délivrés par la CNPS et l'administration fiscale (patente, certificat d'imposition, attestation pour soumission, carte de contribuable, attestation au régime du réel).

L'entreprise est depuis Juin 2007, sous l'autorité du Centre des Impôts des Moyennes Entreprises situé à Douala. Ce passage correspondait à l'atteinte d'un chiffre d'affaires annuel supérieur ou égal à 100 000 000 (cent millions) FCFA. La Déclaration Statistique et Fiscale 2006 déposée au CDI de la Sanaga Maritime en mars 2007 présentait un chiffre d'affaires hors taxe de 134 413 326 FCFA, d'où le changement de tutelle.

Le Tribunal de Première Instance d'Edéa délivre l'attestation de non faillite, et l'inscription au registre de commerce. Les relations de la SMF avec cette instance n'interviennent en général qu'une fois par an.

La Sous Préfecture d'Edéa 1er , rencontre une à deux fois par an les partenaires économiques de l'arrondissement. Il s'agit la plupart du temps, de rencontres pour solliciter des financements à

40 Voir supra, tableau 1, pour les montants de la production vendue à ALUCAM en 2004 et 2005.

41 Echéancier de paiement accordé sur plusieurs années par le Directeur de la CNPS aux entreprises redevables d'une dette importante auprès de ses services.

l'occasion des fetes nationales.

La Délégation Départementale du Travail et de la Sécurité Sociale de la Sanaga Maritime entre en contact avec la SMF, en réaction à certaines requêtes des employés, ou pour mettre l'accent sur le respect d'une disposition du Code du Travail de la République du Cameroun. Par exemple, dans la documentation de l'entreprise se trouvait la lettre circulaire N°66 MINTSS/DPTSS/L/DDTS/SM du 14/03/2006, signée par le Délégué Départemental du Travail et de la Sécurité Sociale, aux employeurs de la Sanaga Maritime, portant sur les obligations en cas de résiliation ou de rupture du contrat de travail. Des requêtes ont aussi été soumises par le personnel auprès de cette institution, notamment pour la remise à niveau des primes d'ancienneté et des avancements gelés depuis 2004. En outre, l'inspection du travail effectue des contrôles annuels pour la vérification du Registre Employeur et les élections de délégués du personnel. La Délégation Départementale de l'Emploi et de la Formation Professionnelle collecte les données annuelles sur l'état de la main d'oeuvre au sein de la structure.

A l'observation, l'équipe a réalisé que l'entreprise ne se tournait pas suffisamment vers ses partenaires publics, pour solliciter des informations sur les nouvelles normes et réglementations, ce qui constituait un handicap. Elle se contentait d'obtenir les documents administratifs nécessaires à la poursuite de ces activités. Par exemple, en analysant les bulletins de salaires des employés et la masse salariale de l'entreprise, on se rendait compte que le calcul de l'allocation de congés et de la durée totale de congés ne respectait pas la législation en vigueur, à la défaveur de l'entreprise. Ainsi, la durée principale de congés était calculée sur une base de 2 jours par mois de travail, ce qui équivaut à 24 jours ouvrables, avec des bonifications de 2 jours ouvrables par période continue de 2 ans, ce qui correspond aux dispositions prévues par la convention collective du commerce. Pourtant, l'entreprise est régie par la convention collective des industries de transformation, comme son unique client ALUCAM. Cette dernière fixe la durée principale de congés à 1, 5 jours par mois de travail, ce qui équivaut à 18 jours ouvrables. En outre, elle prévoit, une bonification de congés de 2 jours ouvrables par période continue de 3 ans pour les salariés des industries de transformation.

II.2.3 Impact des autres acteurs de l'environnement proche

L'entreprise interagit avec d'autres partenaires en interne tels que les partenaires sociaux (syndicats), en externe (banques, partenaires de la même branche d'activités).

Six salariés de l'entreprise étaient affiliés à la Confédération Syndicale des Travailleurs du Cameroun, lorsque nous effectuons le diagnostic initial en 2006. Après la fête du travail du 1er mai 2008, ces derniers ont décidé de rejoindre l'Union des Syndicats Libres du Cameroun. Ce changement était lié, d'après ces derniers, au fait que leur ancien syndicat ne prenait pas assez soin

d'eux pendant la fête du travail, et privilégiait la réception des cadres du syndicat. L'entreprise compte actuellement 18 personnels syndiqués parmi lesquels 9 employés permanents et 9 employés temporaires tous à l'Union des Syndicats Libres du Cameroun. La SMF ne disposait pas à la date du diagnostic de représentants du personnel ou de délégués du personnel. La présence du syndicat ne se ressentait qu'au moment de la fête du travail et du versement des retenues syndicales. A ce sujet, G. Balandier (1981 :256) affirme que le syndicalisme n'a pas en Asie et en Afrique, l'efficacité que l'on aurait pu escompter, il n'est toujours pas utilisé en fonction de buts précis. Il est fragmenté par le jeu d'une sorte de « particularisme professionnel » en même temps que diviser politiquement.

La SMF détient une attestation de domiciliation bancaire à la Banque Internationale du Cameroun pour l'Epargne et le Crédit (BICEC), agence d'Edéa. Tous les versements effectués par les clients se font à travers ce compte. De ce fait, le chef d'agence BICEC Edéa est un partenaire clé de la SMF. Ce dernier est omniprésent, notamment pour l'obtention de crédits, ou les virements de salaires. En addition, la micro finance First Investment for Financial Assistance joue un rôle majeur dans le paiement d'une grande partie des salaires des employés. En décembre 2006, 30 comptes chèques, représentant l'ensemble du personnel et la gérante étaient ouverts dans les livres de cette micro finance.

La SMF s'est affiliée en 2006, au Groupement des Opérateurs Economiques de la Sanaga Maritime. Ce groupement, Récépissé N°44/RDA/C18/BAPP BP 909 Edéa, n'a pas de pouvoir réel sur l'évolution de l'entreprise. Cependant, il a permis un rapprochement des opérateurs économiques du département de la Sanaga Maritime avec la Chambre de Commerce d'Industrie et des Mines du Cameroun, basée à Douala, le Ministère des Petites et Moyennes Entreprises, de l'Artisanat et de l'Economie Sociale, et, le Ministère des Mines, de l'Industrie et du Développement Technologique, débouchant sur la formation du Groupement d'Intérêt Economique Sanaga Metal and Steel42.

La gérante faisait partie du groupe Edéa Businessmen Corporation (EBC) qui réunit les principaux hommes d'affaires de la ville. Ce groupe se réunissait mensuellement autour d'une tontine. L'épargne ainsi canalisée était estimée à près de 60 000 000 FCFA d'après les listings mis à notre disposition par la gérante en 2006. La possibilité d'obtention de crédits qu'offrait EBC en faisait un partenaire de premier ordre pour l'entreprise.

Nous ne pouvons clore, cette section réservée aux autres acteurs sans mentionner l'impact des nouvelles églises sur l'entreprise. Au début du diagnostic en 2006, l'impact de ces derniers à travers l'église congolaise du MPEDOSSO' Ministry, n'était pas suffisamment perceptible. En 2007, la gérante a totalement abandonné l'église catholique, pour rejoindre cette église réveillée. D'après les dires de la gérante, le pasteur de cette église serait « le conseiller spirituel de

42 Voir supra, p68 et 69, le diagnostic de l'environnement extérieur, pour plus de détails.

l'organisation ». Elle disait à ce sujet : « les enfants de Dieu ont besoin de quelqu'un pour prier pour eux de jours comme de nuits ». A cet effet, après enquête et observation, il ressort que la gérante attribuait à ce dernier les succès au sein de l'entreprise, tandis que les échecs provenaient d'une « main diabolique », ou, des employés qui ne parvenaient pas à accomplir leurs tâches. A ce sujet, J.M Ela (2006 :168) révèle que « dans un univers « risqué » où le soupçon s'attache à toute tentative de réussite personnelle, l'entrepreneur prend conscience de la nécessité de s'entourer de moyens de protection. Il lui faut trouver des « alliés » dans le monde de l'invisible pour se mettre à l'abri des dangers qui le guettent. Dans cette quête de sécurité, « le religieux » réinvestit l'espace quotidien. Il en résulte une réappropriation du divin et des aspects du système religieux d'origines diverses dans les pratiques des affaires ».

II.2.4 Choix marketing et action commerciale

L'entreprise ne disposait pas de politique commerciale formalisée, sous la forme d'un plan de développement ou d'un plan marketing. L'équipe d'intervention s'est rendue compte que l'entreprise perdait peu à peu ces marchés parce qu'une action systématique de lobbying n'était pas entreprise au sein de l'usine ALUCAM. En entretien le 05/07/2006, le responsable de la facturation divulguait : « Au sein d'ALUCAM, nos marchés sont comme des tasses de café que l'on a réservé pour nous, mais n'importe qui peut venir y boire. Il faut savoir se faire des amis, en donnant du vin ou des cadeaux. Nous perdons nos marchés, parce que nous passons notre temps à supplier, les mains vides, à présent, on nous répond que notre maman est trop dure. ».

L'édition de calendriers en fin d'année et de T-shirts pendant la fête du travail, constituait la seule action marketing de la SMF. De ce fait, l'équipe a relevé que la distribution de ces articles en faible quantité, faisait l'objet de nombreuses luttes d'intérêts au sein de l'encadrement de la SMF, car, chacun souhaitait remercier « sa personne » au détriment des connaissances des collègues.

Dans le même temps, le journal de la chaîne de télévision canal 2 diffusait en fin d'année 2008 des spots publicitaires de l'un des principaux concurrents locaux de la SMF. Ce dernier présentait son nouvel atelier industriel entièrement équipé, il était entouré à cette occasion, du Préfet de la Sanaga Maritime et du représentant régional de la BICEC, qui avait financé l'investissement à hauteur de 100 millions FCFA. L'équipe a pu constater, que les gadgets publicitaires de cette entreprise se retrouvaient dans presque tous les bureaux des partenaires publics cités ci-dessus. En addition, par son action de lobbying, elle disposait de nombreux « amis » au sein d'ALUCAM. Un contrôleur de gestion d'ALUCAM révélait : « le Directeur de cette entreprise, m'a demandé de lui présenter quelqu'un qu'il pourrait recruter pour suivre ses travaux dans mon secteur d'activité ». Il va s'en dire, qu'avec de telles recrues dans ses rangs, ce concurrent obtenait plus de facilités au sein

de l'entreprise utilisatrice.

Au vu de ces faits, la SMF avait fortement besoin de mettre en place de tels réseaux pour regagner certains de ses principaux marchés.

II. 3 Diagnostic de la production de la SMF

En terme de conception et développement aucun mécanisme tel que des réunions de production, n'était prévu pour susciter les innovations au sein des équipes. Lors du diagnostic, l'équipe d'intervention a remarqué une politique de production centrée sur le respect des procédures édictées par ALUCAM. Les salariés ne proposaient aucune innovation. Cependant, par rapport à ses concurrents, l'entreprise maîtrisait une technologie qui était celle de la soudure sur champ magnétique. Aucune activité de veille technologique telle que la visite de salons, ou, l'abonnement à des revues n'était menée. La compagnie ALUCAM propose des sessions de formations régulières, et impose le port de certains équipements de sécurité sur ses chantiers, ces mesures visent au respect des standards internationaux sur les normes Environnement, Santé et Sécurité (ESS) au travail. On peut citer à ce propos, la note aux Entreprises Extérieures Intervenantes (EEI) intervenant sur contrat en maintenance (Grands Travaux du Littoral, SMF, Société de Réalisation et de Maintenance) du responsable Série - Captation ALUCAM en date du 11/10/2007, reprise ici : « Messieurs les responsables des EEI, suite aux multiples dérives ESS constatées dans vos équipes, nous venons par la présente vous informer que nous procéderons à une vérification du respect de l'un des engagements majeurs du contrat de prestation qui vous lie à ALUCAM, à savoir les visites systématiques annuelles pour chacun de vos agents permanents dans la Série [...] nous vous rappelons que le non respect des règles ESS peut entraîner des désagréments graves dans notre activité ».

La SMF ne disposait pas d'un atelier et effectuait tous ses travaux de réparation sur le site de l'usine ALUCAM.

Les stocks en équipements et consommables atteignaient le seuil d'alerte au quotidien. L'équipe d'intervention observait par exemple que, la SMF commandait la majorité de ses équipements et consommables à l'informel, pour bénéficier de prix bas. Le tableau 3 ci-dessous, fait un état comparatif des prix des équipements de protection individuels. Ce qui ne permettait pas de constituer des stocks importants, et de mener une comptabilité efficace, les factures étant inexistantes. Ce problème générait de nombreuses difficultés lors des contrôles de vérification des services fiscaux. On relevait dans la documentation de l'entreprise, la notification de redressement adressée le 02/08/2007, suite à la vérification générale de comptabilité au titre des exercices 2005 et

2006 par le Chef de Centre Principal des Impôts du Littoral V, qui précisait en annexe 1, relatif aux faits reprochés : « Du pointage de vos factures de charges il apparaît des écarts entre les montants déclarés et les montants constatés. Les charges ci-après faute d'être justifiées conformément aux dispositions de l'article 07 du Code Général des Impôts seront réintégrées et imposées à l'Impôt sur les Sociétés, l'impôt sur le Revenu des Charges Mobilières, et à l'Impôt sur le Revenu des Personnes Physiques au taux le plus élevé [...] ».

Tableau 4 : Tableau comparatif des prix des EPI Formel et vendeur ambulant

Prix secteur formel (Magasin ALUCAM)

Prix vendeur ambulant

Pyrovicel 111 000 Fcfa

25 000 Fcfa

Rangers.... 114 000 Fcfa

20 000 Fcfa

Lunettes 2600 Fcfa

500 Fcfa

Bouchons d'oreille...1000 Fcfa

100 Fcfa

Casques 8000 Fcfa

5000 Fcfa

Gants ..5000 Fcfa

1000 Fcfa

Blouson cuir....95 000 Fcfa

50 000 Fcfa

Tabliers ..12 000 Fcfa

7 000 Fcfa

Guêtres 9000 Fcfa

3 000 Fcfa

(Source : Bordereau des prix EPI magasin ALUCAM, et observation de l'auteur)

Un autre problème relevé au niveau du diagnostic de la production était celui de la planification des travaux. Les travaux de la SMF au sein d'ALUCAM, étaient rythmés par les cycles de la fourniture en énergie électrique par la centrale hydroélectrique d'Edéa, soit une hausse de l'activité en saison de pluie, et une baisse de l'activité en saison sèche. En période de saison sèche, le débit du fleuve Sanaga sur lequel la centrale est basée est faible. Il résulte un arrét d'une partie des cuves servant à la fabrication de l'aluminium, donc, une baisse du nombre de réparation à effectuer par la SMF. En période de hausse d'activités, toutes les cuves sont en marche, et les travaux sont réalisés de nuits et de jours, de lundi à dimanche, la SMF devait être à même de répondre à toute urgence 24/24 sur les chantiers de l'usine ALUCAM. Cette variation de l'activité nécessitait une certaine flexibilité dans la gestion des équipes de production et la préparation des chantiers. En outre, La compagnie ALUCAM est certifiée ISO 9011, il est donc question pour ses fournisseurs de maintenir un niveau de qualité constant.

Sur proposition du commanditaire, la SMF a recruté en janvier 2006, un Préparateur Planning et Qualité et un Directeur Technique Adjoint. L'objectif de ce recrutement était de développer une maîtrise accrue de la production, de la gestion des stocks et des équipes, notamment grâce à un système assisté par ordinateur. Uniquement les deux nouvelles recrues maîtrisaient l'outil informatique au sein du service technique. En 2006, un seul ordinateur était disponible au

sein de la direction générale.

La grille des prix des prestations établie avec ALUCAM en 1992, n'a pas connu de réajustement depuis lors, malgré les nombreuses lettres de réclamations envoyées par l'entreprise aux dirigeants ALUCAM. L'analyse de la documentation de l'entreprise nous a permis d'apercevoir, notamment :

- Une lettre adressée le 21/10/1998 au Directeur Général ALUCAM, avec pour objet information sur notre situation ;

- Une lettre adressée le 21/06/2005 au Chef Service Approvisionnement ALUCAM avec en objet, Doléances par rapport à notre cahier de charges obsolète.

Les documents de suivi de la production étaient rares, et, d'après les observations de l'équipe d'intervention, en permanence dans la mallette du responsable facturation. L'équipe d'intervention a relevé des difficultés au niveau du système de facturation, ce qui retardait les paiements des factures de la SMF par ALUCAM.

Le Directeur Technique était peu présent sur les chantiers. Après entretien avec ce dernier, l'équipe d'intervention a constaté qu'il était démotivé. D'après lui, les problèmes de l'entreprise proviendraient de la gérante. On apprenait, après enquête dans la ville d'Edéa, qu'il travaillait pour d'autres entreprises sous-traitantes de la localité.

II.4 Diagnostic social de la SMF

Une entreprise en crise doit pouvoir compter sur la valeur et la compétence du management des hommes, sur une bonne organisation et sur de bons circuits d'information interne pour mobiliser toutes les énergies. Au moment du diagnostic social initial en 2006, les données ci après sur l'emploi, les rémunérations, le climat social ont été collectées.

II.4.1 Synthèse sur l'emploi

L'effectif total au 30 avril 2006 était de 43 personnes. On comptait 16 permanents pour 27 temporaires. Huit (08) métiers étaient recensés dans l'entreprise : experts soudeurs, soudeurs, apprentis soudeurs, électriciens, secrétaires, comptable, chauffeur mécanicien, employé de bureau.

Seulement 32% (soit 20 personnes) des employés de la SMF disposaient d'un matricule CNPS, compte tenu du risque encouru par la plupart des employés, 96% d'entre eux étant employés au sein de l'usine, la priorité devait être accordée à ces derniers. Car, en cas d'accident l'entreprise

ferait face à des difficultés importantes.

Nonobstant cet état de chose, 14 personnes sur les 43 que comptaient l'entreprise étaient en cours d'immatriculation et régulièrement déclarés aux administrations fiscales et sociales. Ce qui faisait un total de 34 personnes reconnues par les différentes administrations sociales et fiscales.

Les ouvriers/employés représentaient 75% (soit 37 personnes) du personnel de l'organisation, les catégories variant de 2E à 6D.

Les agents de maîtrise représentaient 19% du personnel de l'entreprise soit 5 personnes comprises entre les catégories 7 D, et 9B.

On recensait seulement 1 cadre dans l'organisation en 10ème catégorie, soit 6% du personnel classé.

L'entreprise était majoritairement constituée de personnes possédant un savoir technique et une expertise professionnelle. Bien qu'une personne ne possédait pas une qualification adaptée au milieu (Cap couture). Cependant le niveau de savoirs théoriques était faible. Ce qui s'expliquait par la nature de l'activité de l'entreprise et l'insuffisance de formation.

Tableau 5: Données sur l'emploi au 30 avril 2006

Sexe

 
 

CSP

Intitulé

Personnel

Titulaire Matricule
CNPS

M

F

Cadre

A.M

Ouvrier/employé

Effectif permanent

16

15

14

2

1

3

12

Effectif temporaire

27

5

26

1

0

2

25

Effectif total

43

20

40

3

1

5

37

(Source: Auteur)

Tableau 6 : Répartition de l'effectif permanent par Fonction/Qualification/anciennetéen 2006.

Sexe

Age

Fonction

Qualification au Diplôme

Ancienneté

1

M

46

Opérateur

Soudeur FOP

14

2

M

46

Opérateur

Soudeur FOP

14

3

M

54

Opérateur

Soudeur FOP

14

4

M

40

Opérateur

Soudeur FOP

14

5

M

48

Contrôleur des travaux et
responsable administratif

Maçon

14

6

M

52

Chef d'équipe

Soudeur/Monteur FOP

14

7

M

40

Opérateur

Chaudronnier FOP

14

8

M

46

Chef d'équipe

Soudeur FOP

14

9

M

35

Chauffeur

Chauffeur/mécanicien

12

10

F

47

Secrétaire

Probatoire G1

12

11

M

57

Chef d'équipe

CAP Chaudronnerie

10

12

M

50

Employé de bureau

CAP Comptabilité

6

13

M

52

Directeur Technique

Chaudronnier

3

14

F

43

Payeur

CAP Couture

2

15

M

35

Électricien

CAP Électricité

5

16

M

32

Soudeur

Soudeur FOP

10

FOP=Attestation de Formation professionnelle (Source : Auteur)

Des 27 Temporaires au sein de l'entreprise, 26 faisaient partie de l'effectif technique affecté à l'usine ALUCAM. 22 étaient des soudeurs disposant d'attestation professionnelle mais peu expérimenté, 02 étaient des conducteurs d'engins lourds, 02 faisaient partie de l'encadrement technique. Une seule employée temporaire dépendait de la Direction Générale, elle occupait la fonction de secrétaire, et possédait une attestation de formation professionnelle en secrétariat.

II.4.1.1 Pyramide des âges

Les statistiques des analyses de 2006 montraient que les catégories d'âges de 20 à 35 ans, étaient composées majoritairement par les nouvelles recrues, qui avaient considérablement contribué à rajeunir la structure des âges de l'organisation. Ces recrues faisaient partie du personnel temporaire. La proportion des individus dont l'âge variait entre 35 et 55 ans était majoritaire. Ainsi, la proportion des individus dont l'âge était supérieur à 35 ans totalisait une ancienneté supérieure à 05 ans ce qui suscitait un possible effet GVT (Glissement - Vieillesse --Technicité) alourdissant la masse salariale. Cette tendance est confirmée par le tableau 5. Ce dernier montre que 8 personnes étaient dans l'entreprise depuis sa création, 4 personnes totalisaient entre 12 et 10 ans d'ancienneté, et 4 autres avaient entre 7 et 2 ans d'ancienneté. Parmi le personnel temporaire, 6 atteignaient déjà 6 ans d'ancienneté, 9 totalisaient 4 ans d'ancienneté, et les 12 autres ont été recrutés en janvier 2006 pour faire face à la hausse d'activité.

Graphique 2 : Répartition des effectifs par âge de janvier - juillet 2006

Effectifs

2,5

0,5

1,5

2

0

1

0 20 40 60

Ages

Répartition des effectifs par âges

(Source : Auteur)

La SMF n'avait pas de politique clairement définie en matière de recrutement, d'intégration des ressources humaines dans l'organisation et de mobilisation en vue d'une performance globale. Le règlement intérieur de l'entreprise établi le 24/04/1994, était le seul document qui donnait quelques renseignements sur les procédures d'embauche, l'article 2 précisait les conditions requises pour l'embauche du personnel. Cependant, aucunes fiches de renseignements sur les employés tel que prévu à l'alinéa (1) n'étaient disponibles, tout comme, une connaissance du règlement intérieur de l'entreprise par les employés, prévue à l'alinéa 2, était discutable après entretien avec le personnel.

L'analyse des besoins en compétence à court moyen et long terme était inexistante. La SMF ne disposait pas de plan de formation. D'ailleurs, il n'existait pas de service du personnel proprement dit, le contrôleur des travaux était chargé de coordonner le processus d'administration du personnel. Ce dernier était maçon de formation, et n'avait pour le moment effectué aucune formation certifiante dans ce domaine. Les recrutements se faisaient généralement par le réseau familial ou d'amis. Par exemple, pour le recrutement de 8 temporaires, en préparation de la période de hausse d'activité de janvier 2006, le responsable technique a apporté une liste de 5 jeunes qui n'ont déposé leurs dossier qu'après avoir été intégré, le fils de la voisine de la gérante avec un niveau de 4è année technique en chaudronnerie a été incorporé dans la liste, puis le contrôleur des travaux a fait venir 2 autres jeunes, susceptibles d'être formés dans la conduite d'engins lourds au sein de l'usine. L'équipe n'a pas trouvé de système au sein de l'entreprise pour évaluer le degré de performances ou de motivation des employés.

II.4.2 Synthèse sur les rémunérations

Dans un premier temps, la masse salariale de l'exercice 2005 a été analysée. Cette dernière s'élevait à 54 201 175 FCFA d'après les chiffres de la Déclaration Statistique et Fiscale au 31 décembre 2005. Au cours de l'année 2005, l'entreprise avait un effectif moyen de vingt-huit (28) personnes. Un (01) employé de la SMF gagnait environ 1 695 482 F CFA de salaire annuel en 2005. En 2005, la masse salariale représentait 51% du chiffre d'affaires annuel.

Deuxièmement, l'impact de la rémunération indirecte sur la masse salariale a été étudié. Les primes et indemnités représentaient 13% de la masse salariale 2005 soit 7 037 174 F CFA. Le coût des primes et indemnités demeurait supportable pour l'entreprise. Les charges sociales prenaient en considération : les frais de médecine et pharmacie, les oeuvres sociales... Les congés payés constituaient 4% de la masse salariale 2005 soit 2 328 500 F CFA. Les charges patronales fiscales et sociales représentaient en 2005, 30% du chiffre d'affaires annuel.

Tableau 6 : Charges sociales et fiscales 2005

Intitulé

Montant des cotisations

Organismes sociaux (CNPS)

3

390

420

Etat

26

220

814

Impôts et taxes

1

692

929

Total

31

304

163

(Source : Auteur)

La masse salariale et les charges patronales sociales et fiscales représentaient à elles seules 69% du chiffre d'affaires annuel de 2005.

En outre, des analyses ont été réalisées sur les rémunérations du premier trimestre 2006. Le total de la masse salariale pour cette période était de 14 810 307 F CFA. Le système de rémunération privilégiait la solution horaire à la mensualisation. Avec vingt-huit (28) personnes recevant un rémunération horaire et quinze (15) un salaire mensuel. Le personnel rémunérer à l'heure était compris entre la 2è Catégorie et la 6è catégorie. Les agents de maîtrise et les cadres percevaient un salaire mensuel. Les stagiaires percevaient un forfait mensuel de 50 000 (cinquante mille) Fcfa. Les rémunérations s'effectuaient sur la base des cartes de pointage renseignées par le magasinier, et, contrôler par le Directeur Technique, avant d'être transmises au comptable et à l'assistante de direction.

Une étude menée sur le système de pointage révélait certaines anomalies. L'équipe a

constaté des collusions entre le magasinier et les opérateurs techniques dans l'attribution du nombre d'heures supplémentaires et des bonus par tâches effectuées. Cette analyse faisait ressortir une perte mensuelle de 250 000 (deux cent cinquante mille) FCFA au détriment de l'entreprise.

En février 2006, on enregistrait une hausse du montant global de la rémunération due aux nouvelles recrues. Les variations continuelles de la masse salariale étaient causées par les évolutions des salaires horaires, ainsi qu'aux heures de bonification.

Graphique 3: Evolution de la masse salariale de janvier - mars 2006

(Source : Auteur)

Les salaires médians du premier trimestre 2006, repris dans le tableau 7 ci-dessous, ont été obtenus en faisant la différence entre le salaire maximum et le salaire minimum de la période.

Tableau 7 : Etude des salaires du premier Trimestre 2006

00 000

211 306 Févri

 

Janvier

Février

Mars

4 453 39

Salaire minimum (Fcfa)

00 000

55 000

47 224

683

13 306

Salaire maximum (Fcfa)

00 000

367 611

367 611

434 170

0

Médiane

 

207 418

223 738

(Source : Auteur)

Les départs en congés et le système de bonification à la tâche influaient considérablement sur la masse salariale.

L'indicateur général d'équilibre du premier trimestre 2006 montrait le poids relatif des salaires sur le chiffre d'affaires trimestriel. Lorsque la courbe représentative du chiffre d'affaires est située au-dessous de celle représentant le poids relatif des salaires, il y a déséquilibre. L'indicateur général d'équilibre s'obtient en calculant le poids relatifs des salaires qui équivaut à Rémunérations/ Chiffre d'affaires.

Tableau 8 : Calcul de l'indicateur général d'équilibre premier trimestre 2006

 

Janvier

Février

Mars

Total rémunérations

4 453 390

5 553 234

5 889 672

Chiffre d'affaires

7 313 096

11 850 495

10 449 479

Poids relatif des salaires

0,608960965

0,468607767

0,563633077

%

60,89609654

46,8607767

56,36330768

(Source : Auteur)

Graphique 4 : Poids relatifs des salaires sur le chiffre d'affaires

 
 
 
 
 
 

vo

 

0

(Source : Auteur)

1
!

00 000

A la lecture de ce graphique l'équipe a pu constater que la masse salariale de janvier 2006

20

prenait le pas sur le chiffre d'affaires mensuel, constituant de facto un déséquilibre important. En

2 000 000 10

février 2006, l'équilibre a été maintenu. A contrario, en mars 2006, on constatait de nouveau un léger déséquilibre.

II.4.3 Synthèse sur le climat organisationnel

Le climat organisationnel se réfère à la concordance entre la structure d'une organisation, ses activités effectives, ses stratégies et sa philosophie. Son étude peut comprendre l'analyse du style de management, des attitudes et des comportements des dirigeants, et des relations de pouvoir dans l'organisation, en même temps qu'elle peut porter sur le climat au niveau des opérations.

L'entreprise possédait un règlement intérieur datant du 28 avril 1994. Ce dernier était d'après le visa de l'inspection départementale du travail de la Sanaga Maritime du 14 octobre 1994, conforme aux normes en vigueur. De légères modifications pouvaient y être ajoutées, pour l'adapter au contexte actuel. L'ensemble du personnel permanent interroger, affirmait connaître l'existence de ce dernier, mais, n'en maîtrisait pas les dispositions. Tous les personnels temporaires ignoraient son existence. Il n'était d'ailleurs affiché nulle part. L'équipe a découvert le règlement intérieur abandonné dans un tiroir de la Direction à moitié rongé. Les dispositions de ce règlement intérieur étaient réparties sur 9 points, à savoir :

- l'embauche du personnel ;

- les obligations du personnel ;

- la hiérarchie des sanctions ;

- la durée du travail ;

- pointage, retard, permissions et absences ; - les congés payés ;

- les rémunérations ;

- les infrastructures disponibles ;

- sa publication.

Le taux d'absentéisme au sein des équipes techniques était élevé. Les bagarres, menaces de mort, insultes, insubordinations sur le site de production de l'usine ALUCAM étaient fréquentes au sein des équipes. Les menaces faisaient généralement référence aux pratiques occultes. Par exemple, un encadreur pensait que les accidents à répétitions qu'il subissait depuis quelques mois étaient provoqués par un des ses collègues, qui serait d'après lui un maître de l'invisible, un voyant lui aurait confirmé ces faits. Il affirmait en entretien : « J'ai subi successivement à deux mois d'intervalles, deux accidents graves sur l'axe lourd Yaoundé - Douala, j'en suis sorti indemne, XXX est venu me voir sur mon lit d'hôpital et m'a dit en me serrant la main, salue moi tu es fort, on t'a bien préparé au village ».

Les statistiques des accidents de travail au cours des trois (03) derniers mois faisaient état de

deux (02) accidents avec arrêt, cinq (05) accidents sans arrêts. La fréquence de délivrance des bons de prise en charge au personnel, pour bénéficier de traitements auprès du Centre de Santé d'Elogbélè à Edéa, était d'environ 4 bons par jours, d'après le carnet de bons de prises en charge mis à la disposition de l'équipe. A l'observation, il existait une grève perlée, qui se manifestait par un ralentissement volontaire du rythme de travail, prolongeant les délais de livraison des travaux.

La présence du syndicat était faible, six (06) salariés étaient affiliés à la Confédération Syndicale des Travailleurs du Cameroun. Ces derniers avaient une connaissance moyenne de la législation du travail en vigueur au Cameroun. Après entretien avec le personnel on découvrait que le personnel avait une connaissance éparse de la législation en matière de travail. Par exemple, beaucoup ignoraient que le travail posté, ne permettait de bénéficier que de 20 minutes de pause, que les heures supplémentaires n'intervenaient qu'après 40 heures de travail par semaine, le dimanche et les jours fériés, et, que le samedi était un jour ouvrable. L'équipe conduit le personnel administratif à l'inspection du travail pour des discussions de formation sur certains aspects de la législation. Les droits les plus connus étaient ceux relatifs à la rémunération, notamment au délai de paiement du salaire, qui doit intervenir au plus tard le 08 du mois.

Les contrats de travail temporaire étaient verbaux, et se prolongeaient sans aucun respect de la législation. Cependant, cette pratique apportait une certaine flexibilité nécessaire à l'activité de la SMF. Uniquement le personnel permanent avait droit aux congés payés dans l'entreprise. Les heures supplémentaires effectuées par le personnel temporaire étaient payées en heures normales, d'après les bulletins de paie de ces derniers. Certains temporaires étaient payés à la caisse, et ne bénéficiaient pas de bulletins de paie.

Les rapports du personnel avec la direction étaient tendus, les employés avaient déposé en fin d'année 2005, plusieurs requêtes devant les dirigeants de l'usine ALUCAM et menaçaient de grever si leurs situations demeuraient inchangées. Le client de la SMF, ALUCAM, envisageait suspendre l'agrément accordé à la SMF si la situation sociale précaire perdurait. En outre certains agents avaient transmis une requête à la Délégation Départementale du Travail, pour que leurs avancements et les primes d'ancienneté gelés soient réajustés. Les entretiens menés révélaient des problèmes profonds entre la direction et les ouvriers, suscitant un manque de confiance vis-à-vis de cette dernière. Par exemple, l'un des ouvriers permanent de l'entreprise, en service depuis sa création en 1992, nous relatait qu'en 2004, une mutuelle du personnelle avait été mise sur pied. Cette dernière fonctionnait très bien, et le montant des contributions atteignait déjà une somme importante. En 2005, d'après ce dernier, la gérante avait entièrement vidé la caisse de la mutuelle, mettant de facto un terme à cette expérience porteuse d'espoir. Ils n'ont eu de cesse de revendiquer le remboursement de leurs cotisations depuis lors.

Un autre exemple nous a été relaté par un responsable technique. Ce dernier nous expliquait

qu'il avait eu à contracter un prêt de 3 millions de FCFA auprès d'un opérateur économique de la ville d'Edéa, faisant partie de ses connaissances, ceci dans l'optique de permettre à la SMF de supporter le paiement des salaires de ses employés. Le remboursement de ce prêt devait avoir lieu dès le paiement des prestations par ALUCAM, soit un mois plus tard, il a plutôt été remboursé un an plus tard, mettant ce dernier dans une situation conflictuel avec son ami.

Les locaux de l'entreprise étaient situés dans la concession de la gérante. Cette proximité pouvait susciter une culture communautaire, mais, aussi favoriser la confusion entre espace collectif et espace privé. Les employés appelaient la gérante « la maman ». Cette dernière interpellait très souvent ses interlocuteurs par le terme « mon fils ou ma fille ». La figure du fondateur décédé était la valeur commune partagée par les anciens employés et la gérante. L'évocation de son nom et de ses valeurs permettait le rassemblement en période de conflit. Nous avons constaté ce fait à plusieurs reprises lors des réunions entre la Direction et les employés, l'on entendait fréquemment : « Lorsque MBALLA était là, cela aurait été différent », « Depuis qu'il nous a quitté, je me bats seul, avec toutes les difficultés que vous connaissez », « le vieux, lui-même savait ce qu'il voulait faire de cette entreprise ».

La valeur de l'encadrement étant fondamentale en période de crise, les données recueillies sur le profil de l'encadrement montraient les éléments ci-après :

Le Directeur Technique était âgé de 54 ans. Il jouissait d'une expérience professionnelle de 28 ans en chaudronnerie et tuyauterie industrielle. Il avait pu mettre ses compétences en exergue notamment aux Brasseries du Cameroun, à la Société Nationale de Raffinage, au sein de l'entreprise FRIEDLANDER. Titulaire d'un Certificat d'Aptitude Professionnelle en chaudronnerie, il était peu présent sur les chantiers. Par exemple, son dossier montrait une mise à pied de 02 jours du 13 janvier 2006, pour son arrivée tardive avec la nouvelle équipe à la formation sécurité à l'usine ALUCAM le 6 janvier 2006.

Le responsable de l'administration, du contrôle des travaux et de la facturation, a acquis son expérience en travaillant avec le fondateur. Âgé de 48 ans en 2006, il n'avait pas de savoirs théoriques dans ses domaines d'activités.

Le comptable possédait un Certificat d'Aptitude Professionnelle d'employé de banque. Il a travaillé à la Banque Internationale du Cameroun pour l'Industrie et le Commerce toute sa carrière, jusqu'à la liquidation de cette dernière. Âgé de 50 ans, il n'était pas coutumier du plan comptable OHADA ou des ratios de gestion financière. Il effectuait le traitement des salaires et les déclarations mensuelles fiscales et sociales.

Les deux nouvelles recrues requises par le commanditaire en janvier 2006 faisaient partie de l'équipe de direction. L'un occupait le poste de Directeur Technique Adjoint, et, était titulaire d'un Brevet de Technicien en Métaux Feuilles et Chaudronnerie Métallique. Âgé de 32 ans, il possédait

une expérience de six (06) ans comme responsable d'équipe sur plusieurs chantiers (Chantier Naval et Industriel du Cameroun, Cameroon Railway...).

Le second était âgé de 29 ans en 2006. Il a été recruté au poste de Préparateur Planning et Qualité, en charge de la conception, de la réalisation et du suivi des plannings et tableaux de travaux. En outre, il était chargé de la gestion des stocks et de l'approvisionnement en matériel de l'entreprise. Ce jeune homme particulièrement doué dans la conception et la mise à jour des bases de données techniques des équipements de production, est titulaire d'un Diplôme Universitaire de Technologie (DUT) en génie industriel et maintenance.

Un conseil d'administration regroupant l'ensemble des actionnaires ne s'est pas tenu depuis la mort du fondateur en 1994.

L'équipe après analyse du système de communication au sein de l'entreprise a réalisé que l'absence de communication entre l'encadrement et les ouvriers facilitait la persistance de la rumeur dans l'entreprise. Ces rumeurs suscitaient la démotivation au sein des équipes. Quelques employés nous faisaient savoir par exemple qu'ils avaient entendu que l'entreprise serait vendue à des européens dans les mois qui suivaient. L'équipe a constaté que la communication était essentiellement descendante (note de service). Les réunions de production et de concertation étaient rares.

II.5 Diagnostic financier de la SMF

Les données financières ont été regroupées suite à plusieurs entretiens avec la gérante. La vision du comptable sur la dette réelle se limitant à la dette fiscale et sociale. L'équipe a recensé plusieurs créanciers (tontines, banquiers, fournisseurs, particuliers).

L'entreprise ne disposait pas de budgets, de procédures comptables et financières formalisées, de ratios de gestion financière. Les dépenses s'effectuaient au jour le jour. L'entreprise n'avait pas de caisse. Les dépenses courantes étaient gérées directement par la gérante, qui prenait la somme requise dans son portefeuille en cas de besoin.

Le comptable collectait les quelques factures à sa disposition, et, les remettait à un cabinet comptable pour la préparation des Déclarations Statistiques et Fiscales annuelles. Le comptable était désemparé lors des contrôles de vérification des services fiscaux et de la CNPS, car les pièces comptables manquaient pour justifier certaines dépenses. Le cabinet comptable était très souvent mis à contribution pour l'achat de factures. Une facture factice se négociait à 10% du montant désiré par le prestataire. Il s'agissait de combler les écarts entre les montants prélevés visibles sur l'historique bancaire et les charges réelles. Les décaissements à la banque étaient exclusivement

réalisés par la gérante. Cette dernière affirmait qu'elle était son propre Directeur Financier.

Le tableau ci-dessous retrace l'évolution du chiffre d'affaires au cours des dernières années d'après les Déclarations Statistiques et Fiscales (DSF).

Tableau 9: Tableau représentatif de l'évolution du Chiffre d'affaires de la SMF

Année

Chiffre d'affaires HT

Pourcentage Réalisé

avec Alucam

Pourcentage réalisé avec la SONARA

2006

134 413 326

100%

0

2005

91 715 065

100%

0

2004

84 903 715

98%

2%

2003

124 590 141

98%

2%

2001/2002

128 544 961

100%

0

2000/2001

70 211 595

100%

0

1999

73 777 833

100%

0

1997/1998

95 796 803

100%

0

(Source: auteur d'après DSF)

L'analyse révélait que l'entreprise ne disposait d'aucunes réserves ou d'épargne en banque ou dans les associations (tontines, regroupement d'entrepreneurs). Les caisses étaient vides, et, l'endettement total net était de 20 000 000 (vingt millions) FCFA en août 2006, après investigation auprès des institutions ci-après :

- la Banque Internationale du Cameroun pour l'Epargne et le Crédit ; - La Micro finance FIFFA ;

- Associations diverses et usuriers.

II.6 Synthèse du diagnostic organisationnel de la SMF

Cette section condense les points faibles et les points forts qui ressortaient du diagnostic de l'entreprise effectué en 2006. Il a permis de déboucher sur le plan d'action.

Principales rubriques

Points faibles

Points forts

Bilan Economique

- Client unique ALUCAM ;

- Forte concurrence sur son marché ;

- Absence d'une démarche d'information sur

les nouvelles réglementations vis-à-vis des partenaires publics ;

- Forte pression de l'administration fiscale ;

- Besoin de conformité aux normes qualité,

environnement, santé et sécurité ALUCAM ; - Absence d'activités de lobby (cadeaux) au
niveau d'ALUCAM et des impôts.

- Constance du marché

avec ALUCAM ;

- Adhésion aux

regroupements d'opérateurs

économiques (GIE Sanaga Metal and Steel, Groupement des Opérateurs Economique de la Sanaga Maritime, et Edéa Businessmen Association).

Bilan de la Production

- Absence d'innovation et de veille

technologique ;

- Approvisionnement à 80% sur le marché

informel (vendeurs ambulants) ;

- Stocks mal tenus ;

- Grille de prix non réajustée depuis 1992 ;

- Système de facturation défaillant ;

- Faible implication du Directeur Technique

sur les chantiers.

- Maîtrise d'un savoir-faire

en soudure spéciale sur champ magnétique ;

- Formation sur site par
ALUCAM ;

- Présence depuis janvier

2006 de deux nouvelles recrues formées et expérimentées dans l'encadrement technique.

Bilan Social

Emploi- Absence de déclaration de la majorité du

personnel temporaire à la CNPS, malgré les risques élevés sur les chantiers ;

- Connaissances théoriques et maîtrise de

l'outil informatique très faible ;

- Savoir technique élevé

- Les personnels expérimentés maîtrisant le

savoir-faire du fondateur sont vieillissants ;

- Absence de plan de formation et de politique
ressources humaines ;

- Recrutement basé sur les affinités familiales

ou amicales.

Rémunération

- Déséquilibre de la masse salariale par rapport

à la production vendue ;

- Système de rémunération

attractif pour les

 

- Fraude constatée sur le système de pointage ;

- Anomalie sur le mode de calcul des congés

payés ;

- Gel des salaires, primes d'ancienneté et

avancement ;

- Système de bonification à la tâche alourdit la

masse salariale.

Climat organisationnel

soudeurs permanents (bonifications à la tâche).

 

- Mauvaise connaissance du règlement

- Faible présence du

 

intérieur au sein de l'entreprise ;

syndicat ;

 

- Absentéisme et conflits élevés ;

- Flexibilité de l'emploi

 

- Taux d'accident de travail en hausse ;

temporaire ;

 

- Grève perlée ;

- Culture communautaire.

 

- Tension persistante gérante et personnel ;

 
 

- Profil des dirigeants non adapté au contexte

de crise ;

 
 

- Absence d'implication des actionnaires.

 

Bilan

- Absence de procédures comptables et

- Chiffre d'affaires annuel en

Financier

financières ;

hausse de 2004 à 2005

 

- Opacité des données financières ;

 
 

- Endettement net de 20 000 000 Fcfa ;

 
 

- Absence d'épargne ou de réserves ;

 
 

- Formation du comptable inadaptée ;

 
 

- Poids important des pénalités fiscales et

sociales.

 

Contraintes

- Remotiver les hommes ;

 

- Rassurer l'environnement ;

 

- Réduire les lourdeurs psychologiques et les résistances au changement.

Au vu des données industrielles, sociales et financières de la SMF, l'équipe a constaté que la dégradation de l'entreprise ne s'était pas réalisée de manière brutale. Elle provenait de causes profondes qu'il convenait très rapidement de connaître, d'analyser et de corriger. Lorsqu'une entreprise en crise a terminé son diagnostic, c'est comme ci elle venait de parcourir près de la moitié du chemin pour retrouver la rentabilité. Un rapport du diagnostic a été remis par l'équipe au commanditaire, qui savait désormais ce qui n'allait pas. Ce rapport contenait surtout les mesures à entreprendre dans les plus brefs délais, pour surmonter les contraintes et retrouver la rentabilité.

II.7 Deuxième attendu du processus d'ajustement : La formulation des mesures à mettre en oeuvre pour ajuster l'entreprise à son environnement socio-économique

Les facteurs essentiels de la crise ayant été identifiés, il était nécessaire de très vite mettre en place les grands axes de redressement en les planifiant dans le temps. L'équipe d'intervention a retenu les trois (03) objectifs suivants, pour parvenir à un ajustement socio économique rapide de la SMF :

- Résorber le déficit de trésorerie de 20 000 000 (Vingt Millions) FCFA ; - Assainir le climat organisationnel ;

- Rassurer les partenaires de l'entreprise.

II.7.1 Propositions pour résorber le déficit de trésorerie

La résorption du déficit de trésorerie était l'élément clé du processus d'ajustement, car, l'entreprise devait être en mesure de prendre en charge ses coûts de production très rapidement. L'équipe souhaitait obtenir un endettement inférieur à 2 millions de Fcfa à la fin du processus, et, de ce fait mettre un terme au découvert bancaire à la Banque Internationale du Cameroun pour l'Epargne et le Crédit (BICEC), qui alourdissait encore plus les charges de l'entreprise. L'historique bancaire et les relevés de compte de l'entreprise à la BICEC ont servis d'instruments de mesure. Pour ce faire, les mesures ci-après ont été proposées :

- Mise en place d'un échéancier de remboursement des dettes ;

- Arrêt momentané des demandes de découvert bancaires ;

- Formation du comptable en élaboration et suivi de ratios financiers, plan comptable OHADA, lois fiscales ;

- Sélection d'un cabinet de conseil fiscal et financier pour la supervision de toutes les activités comptables et financières, avec pour mission principale, l'obtention d'une baisse sensible de la masse salariale et des charges sociales et fiscales ;

- Le poids des rémunérations sur le chiffre d'affaires devait s'équilibrer. L'équipe recommandait notamment, la mensualisation des salaires des services généraux et des cadres. Ensuite, une politique de rémunération devait être mise sur pied tenant principalement compte des différents ratios financiers ;

- Révision du système de pointage (nouvelles cartes de pointages....) ;

- Organisation d'une réunion de concertation avec le personnel pour la révision du système de bonifications en cours dans l'entreprise.

II.7.2 Propositions pour assainir le climat organisationnel

Il était essentiellement question de motiver les hommes, de reconstituer leur savoir-être. Les indicateurs retenus étaient une réduction sensible du nombre de conflits, du nombre de maladies et d'accidents de travail, le paiement régulier des salaires au plus tard le 08 du mois, l'augmentation du nombre de personnels déclarés à la CNPS, la maîtrise du règlement intérieur de l'entreprise par l'ensemble du personnel. Pour obtenir ces résultats, l'équipe proposait:

- La mise en place d'une nouvelle culture d'entreprise basée sur « la performance et la discipline ». Cela passait d'abord par la sensibilisation des employés sur le règlement intérieur de la SMF. Chaque nouvelle recrue devait connaître ses obligations par coeur, et, apposer sa signature avec la mention lue et approuvée sur le Règlement Intérieur ;

- Une nouvelle politique de rémunération basée sur la capacité de payer de l'organisation, et, la prise en compte des performances individuelles et collectives serait la matrice pour le changement ;

- La formation du personnel administratif au respect du code du travail et de la législation sociale en matière d'hygiène et de sécurité au travail ;

- La mise en place d'un système disciplinaire souple, efficace et participatif ;

- Un système d'évaluation annuelle des performances du personnel ;

- La confection des fiches de descriptions des fonctions, et, redessiner l'organigramme pour une compréhension approfondie des rôles et fonctions de chacun ;

- L'immatriculation et la déclaration de l'ensemble des travailleurs temporaires à la CNPS ;

- L'attribution d'une période de congés au personnel temporaire, ce qui pourrait réduire le stress et les tensions au travail, ainsi que préserver les organismes;

- Des réunions hebdomadaires aussi bien dans les services techniques qu'administratifs devaient être tenues pour favoriser le dialogue, et, réfléchir ensemble sur les problèmes et les difficultés rencontrées ;

- Il ne fallait pas chercher à supprimer la rumeur, au contraire, ce qui se racontait devait être su,

il fallait plutôt la remplacée par l'information orientée. La communication est bonne quand le
message est ENTENDU- COMPRIS - CHANGEMENT (retour/réaction). Gérer
l'information devait permettre de décider à qui, comment et à quel moment elle devait être

délivrée ;

- Établir des contrats ouverts et actuels avec les employés ;

- Le recrutement ne devait être entrepris qu'après une analyse judicieuse des besoins, car le recrutement engage des frais sociaux et financiers pesants ;

- La gestion des factures et de la paie devait être améliorée par l'installation de logiciels appropriés. Pour ce faire, l'actualisation du logiciel WINDOWS 2000 actuel, l'ajout d'espace disque dur, l'achat et installation d'un logiciel de paie et de gestion des congés étaient préconisés.

II.7.3 Propositions pour rassurer l'environnement

Pour rassurer l'environnement (le client ALUCAM, les partenaires publics, les fournisseurs, les banques et les associations). L'atteinte de cet objectif devait être caractérisée par l'attribution de nouveaux marchés, des lettres de félicitations ou encouragements verbaux provenant d'ALUCAM et du chef d'agence BICEC, le paiement régulier des allocations familiales par la CNPS, la réouverture des bureaux scellés et le paiement de la totalité de la dette fiscale. Les actions proposées par l'équipe comportaient :

- La demande d'un moratoire de paiement de la dette fiscale et sociale avec échéancier sur 12 mois, au Directeur Général de la CNPS et au Chef de Centre Départemental des Impôts de la Sanaga Maritime ;

- Le paiement mensuel et régulier des cotisations sociales et des retenues fiscales ;

- La mise en conformité des équipements de sécurité aux normes qualités et sécurité ALUCAM ; - L'évaluation du personnel après chaque formation sur le site ALUCAM ;

- Rencontres hebdomadaires des responsables techniques avec les opérateurs afin de recueillir des pistes d'amélioration, et, dresser un état du suivi mensuel de la production à communiquer au client et à la Direction SMF ;

- Rencontres mensuelles avec les responsables de la Délégation Départementale des Impôts, des services locaux de la CNPS, et, de la Délégation Départementale du Travail et de la Sécurité Sociale. Ces rencontres devaient permettre de dresser un état de l'évolution des lois et règlements dans les différents domaines concernés et la mise en place de ces derniers au sein de la SMF ;

- Le paiement des fournisseurs à 30 jours fin du mois, en prévoyant un échéancier de remboursement de la dette fournisseur ;

- La mise en place d'une caisse gérée par le comptable, pour les dépenses courantes et le

paiement des fournisseurs ambulants. Une amélioration du classement des fichiers et archives, l'achat de chronos et d'armoires pour le classement et l'archivage des dossiers. L'étiquetage des armoires par rubrique.

La phase diagnostique s'est déroulée en trois mois, telle que prévue dans le calendrier d'activités. Elle a été matérialisée par la présentation au commanditaire d'un document de synthèse des diagnostics de l'environnement économique, de production, social et financier. Ce document regroupait l'éventail de propositions listées ci-dessus. Après que le commanditaire eu validé le rapport de diagnostic en collaboration avec le décideur, ce dernier donna à l'équipe d'intervention l'autorisation de démarrer la phase d'implémentation des mesures proposées, selon le calendrier d'activités retenu.

CHAPITRE II : ANALYSE DES RESULTATS, DES ECARTS RELEVES, INTERPRETATION DES DONNEES ET RECOMMANDATIONS

Les chercheurs en sciences sociales, et, notamment les sociologues et les anthropologues doivent reconsidérer la gestion des entreprises comme un défi susceptible de renouveler les connaissances sur l'Afrique et de participer au débat sur le développement industriel du continent (J.M Ela, 2006 : 129). Dans cette perspective, ce chapitre présente les résultats obtenus à court terme (à la fin officielle du processus d'ajustement), c'est-à-dire deux mois après la phase de mise en oeuvre des mesures retenues. Dans un deuxième temps, nous montrons les résultats enregistrés dès février 2008. Ensuite, l'interprétation des données permet de vérifier les hypothèses de recherche.

I/ RESULTATS OBTENUS APRES MISE EN PLACE DES MESURES D'AJUSTEMENT

Après la mise en place de la plupart des mesures proposées ci-dessus, les résultats suivant étaient enregistrés en février 2007 par l'équipe d'intervention;

I.1 Résultats obtenus en rapport avec l'objectif 1 : Résorption du déficit de trésorerie

Un échéancier de remboursement mensuel des dettes a été mis en place en collaboration avec le décideur. Les dettes aux particuliers et associations ont été entièrement remboursées.

Suite aux conseils de l'équipe d'intervention et du commanditaire, la gérante s'est abstenue de recourir au découvert bancaire. L'historique bancaire BICEC du 01/03/2007 révélait que le compte bancaire de l'entreprise n'était plus débiteur, et présentait un bénéfice de 720 000 (sept cent vingt mille) Fcfa en février 2007.

La SMF a retenu le cabinet BIBA conseils Sarl, sur proposition du commanditaire pour le suivi de son système comptable et financier. Ce cabinet spécialisé en fiscalité et administration des affaires, localisé à Edéa, disposait aussi de l'expertise d'un inspecteur du travail retraité. Le travail réalisé par ce cabinet a permis un allègement de la masse salariale de près de 1 000 000 (un million) FCFA par mois, notamment grâce à la mise sur pied d'un système de primes non taxables et non cotisables, telles que les primes de lait, de salissure, de déplacement et de représentation.... En effet, tous les éléments dans les anciens bulletins de paie à l'exception de la prime de transport généraient des charges salariales et patronales, cette tendance a été revue. En outre, une réunion regroupant le commanditaire, le décideur, le Directeur du cabinet BIBA conseil, nous-mêmes et

l'ensemble du personnel a permis de faire le point sur le diagnostic réalisé et la situation de crise que traversait l'entreprise. A l'issue de cette réunion, la baisse des taux de bonifications à la tâche a été décidée unanimement.

Après une étude approfondie du système de pointage, l'équipe d'intervention a constaté des pertes mensuelles de 250 000 FCFA sur le système de pointage. Le magasinier a avoué avoir cédé à l'appât du gain, en falsifiant les données sur les cartes de pointage au profit de certains de ses collègues. En outre, l'équipe s'est aperçue que le comptable et l'assistante de direction comptabilisaient les heures de bonifications en heures supplémentaires depuis de nombreuses années, alors qu'elles se comptabilisent en heures normales. Dans l'optique de réorganiser la chaîne du système de pointage au traitement des salaires, de nouvelles cartes de pointage ont été conçues. Le personnel administratif a été sensibilisé à cette démarche.

Les équipes de production sont passées de deux (02) à trois (03) équipes. Ce système de roulement permettait de couvrir les postes de 06 heures à 14heures, de 14 heures à 22 heures et de 22 heures à 06 heures. Ce système a permis de réduire considérablement les heures supplémentaires effectuées et de répondre au rythme de production imposé par le client ALUCAM.

Une hausse de la production vendue au cours de cette période visible sur le tableau 9 a permis d'achever de résorber le déficit de trésorerie.

I.2 Résultats obtenus en rapport avec l'objectif 2 : Assainir le climat organisationnel.

La diffusion de la nouvelle culture d'entreprise « performance et discipline » était la clef de voute de la politique d'assainissement du climat organisationnel. Pour réaliser cet objectif essentiel, nécessaire à l'assainissement du climat organisationnel, les actions ci-après ont été menées.

Dans un premier temps, des photocopies du règlement intérieur ont été distribué à l'ensemble du personnel. Le personnel et particulièrement les plus anciens ont demandé à plusieurs reprises s'il s'agissait d'un nouveau règlement intérieur. Leurs doutes étaient rapidement dissipés en apercevant la signature du fondateur au bas du document.

Ensuite, le règlement intérieur a servi de socle à la mise en place d'un système disciplinaire. Des documents tels que le code du travail et la convention collective des industries de transformation ont complété le cadre réglementaire mis autour de l'entreprise. Des réunions de sensibilisation ont été organisées avec le personnel administratif et l'encadrement technique pour l'utilisation de ces documents.

Un système disciplinaire avait aussi été mis sur pied. Ainsi, en cas d'indiscipline, une demande d'explication était émise, la réponse à cette dernière intervenait dans les 48heures qui suivaient, et donnait lieu à un entretien. Cet entretien avec le mis en cause était mené par nous-

mêmes en collaboration avec deux membres de l'encadrement. Cet entretien permettait au mis en cause de s'expliquer verbalement sur les faits qui lui étaient reprochés. En effet, le niveau théorique étant bas au sein du personnel, la réponse écrite à la demande d'explication ne donnait qu'une vision approximative de la situation. Après cet entretien, une décision était prise collégialement, l'accent étant mis sur la sensibilisation et non sur la répression. L'impression d'un système juste, équitable et participatif était rapidement ressentie par le personnel. Ces impressions étaient collectées aussi bien auprès des employés impliqués que de leurs collègues.

L'équipe a réalisé des fiches de fonctions du personnel administratif. Il était procédé après entretien au découpage des rôles, en attribuant des objectifs à atteindre simples et mesurables.

En février 2007, l'équipe a évalué les performances du personnel temporaire. A cet effet, des fiches d'évaluation des performances du personnel temporaires ont été établies. Les critères de performances ont été fixés en collaboration avec l'encadrement technique. Après avoir effectué les notations, des séances d'entretiens auxquelles participaient le commanditaire et deux membres de l'encadrement technique, ont permis de discuter avec chaque employé sur l'évolution de sa carrière au sein de l'entreprise. Les meilleurs ont bénéficié d'avancements de catégories et d'échelons, ainsi que d'un plan de formation adapté. Les moins performants parmi les employés temporaires ont vu leurs contrats résiliés.

Le personnel temporaire bénéficiait d'une période de repos annuel, lorsque l'activité était en baisse, avec une prime de retour de congés de 20 000 FCFA. La procédure d'immatriculation des temporaires à la CNPS était engagée. Les déclarations de l'ensemble du personnel à la CNPS étaient effectives.

En collaboration avec le cabinet BIBA Conseil Sarl, nous avons rédigé un manuel de procédure sur le traitement des salaires de la SMF. La gestion du problème des avancements et des anciennetés gelés du personnel permanent faisait l'objet de négociations avec les représentants du personnel, sous la tutelle de l'inspecteur du travail territorialement compétent.

Les réunions de coordination se tenaient déjà au sein des services techniques, deux fois par semaines, il était question de favoriser le dialogue au sein des équipes. Deux séances de formation en animation d'équipes et en gestion des conflits à l'attention de l'encadrement technique ont été réalisées.

Depuis le mois de juillet 2006, les salaires étaient payés régulièrement avant le 8 de chaque mois, tel que prévu par l'article 68 (2) de la loi N°92-007 du 14 août 1992 portant Code du Travail de la République du Cameroun.

Pour mettre l'accent sur les performances individuelles, l'équipe a mis en place de nouvelles procédures de recrutement nécessitant une analyse préalable des besoins exacts en personnel en quantité et en qualité. Trois étapes dans le recrutement ont été formalisées, à savoir : La sélection

des candidatures, les entretiens de recrutement et les tests pratiques.

I.3 Résultats obtenus en rapport avec l'objectif 3 : Propositions pour rassurer l'environnement

Pour rassurer rapidement l'environnement de l'entreprise, les actions ci-après ont été engagées.

La sollicitation auprès du Directeur Général de la CNPS, d'un moratoire ainsi qu'une remise gracieuse des majorations et pénalités de retard en vue du nivellement de la dette sociale d'un montant de 7 703 262 FCFA pour la période allant de juillet 2001 à septembre 2005. Par lettre en date du 25 septembre 2006, N°10489/06/DG/DG/DR/SPR/BM/CNPS, le Directeur Général de la CNPS écrivait : « [...] J'ai bien noté que votre société s'acquitte désormais de manière régulière des cotisations courantes et a versé un montant total de francs CFA 2 696 142 à titre d'acompte. Je tiens cependant à vous rappeler que les textes régissant la Prévoyance Sociale ne prévoient pas de moratoire dans leurs dispositions, les cotisations sociales devant être payées sans retard aux échéances prévues par la loi. Toutefois, après un examen bienveillant de votre dossier qui a tenu compte des difficultés que vous évoquez, j'ai décidé de vous accorder pour la période susvisée :

- 50% de remise sur les majorations et les pénalités de retard

- Un moratoire pour le paiement du reliquat de la dette globale de francs CFA 4 182 281 en 12 mensualités à compter du 30 septembre 2006. [...] ».

Les échéances mensuelles de versement des cotisations sociales et celles du moratoire étaient respectées, les quittances de versement CNPS le confirmaient.

Le versement régulier des charges fiscales mensuelles, depuis le mois de novembre 2006, a permis d'améliorer les relations avec la Délégation Départementale des Impôts de la Sanaga Maritime. Il a été convenu avec le Chef de Centre des Impôts que la dette fiscale serait peu à peu épongée. En signe de bonne volonté, un premier versement d'un million de FCFA a été effectué. Les scellés ont été levés sur les bureaux de la SMF. La patente valable du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2007 a été délivrée par le service des impôts, ceci pour permettre à l'entreprise de continuer son activité à ALUCAM.

Les deux nouvelles recrues au sein de l'encadrement (le Directeur Technique Adjoint, et le Préparateur Planning et Qualité) participaient deux fois par semaine à des réunions de production, et de concertation, avec les responsables ALUCAM. En outre, ils prenaient soin de faire parvenir un rapport écrit sur l'état de la production de la SMF à ces derniers, ainsi qu'au commanditaire. Des lettres de félicitations d'ALUCAM sur la réalisation des travaux par les équipes SMF ont été reçues à la Direction de la SMF. Certains employés ALUCAM du secteur d'activité de la SMF, rencontrés dans la ville d'Edéa, témoignaient à l'équipe leur admiration, lorsqu'ils observaient le changement

d'attitude du personnel SMF sur les chantiers.

Les fournisseurs ont été réglés en totalité, et, beaucoup disaient ne plus hésiter au moment de la livraison des matériels et consommables.

Le compte bancaire de l'entreprise étant désormais bénéficiaire, le décideur nous a fait mention des marques de déférences dont elle faisait désormais l'objet de la part du Chef d'agence BICEC Edéa.

Les résultats obtenus montraient que la production vendue était désormais supérieure aux dépenses effectuées par l'entreprise. La dette totale de 20 000 000 (vingt millions) FCFA a été réduite à 4 500 000 FCFA. La somme restante était composée de la somme de 3 500 000 FCFA due à la CNPS, et, d'un million FCFA redevable aux services fiscaux. Le compte de l'entreprise à la BICEC était créditeur de 720 000 (sept cent vingt mille) d'après l'historique bancaire de mars 2007. Après avoir rencontré les responsables des associations et de la micro finance FIFFA, nous avons pu conclure que leurs dettes avaient été entièrement réglées. Les projections sur la production mensuelle à venir, oscillaient entre 5 000 000 (cinq millions) FCFA et 15 000 000 (quinze millions) FCFA.

Les relations de la SMF avec son environnement étaient sereines. Pour le constater, l'équipe a rencontré à plusieurs reprises les partenaires publics, les responsables d'associations et de tontines, les responsables des institutions bancaires et les responsables du service Electrolyse ALUCAM. La culture d'entreprise « performance et discipline » était en cours de diffusion.

L'équipe a pu conclure en mars 2007, que les objectifs fixés étaient quasiment atteints, bien que toutes les mesures proposées n'aient pas pu être mises en oeuvre car la période dévolue à l'ajustement était déjà arrivée à son terme. Ces résultats probants enregistrés à court terme, ont conduit le décideur a prolongé le mandat de l'équipe au sein de l'entreprise, avec une augmentation éventuelle du prix des prestations. L'équipe d'intervention s'est vue confiée le suivi du processus d'ajustement ainsi que la supervision des activités administratives, financières et stratégiques.

Nous réalisons un an après la fin du processus d'ajustement de l'entreprise en mars 2008 que la situation financière de cette dernière s'est de nouveau considérablement dégradée. L'endettement était de 23 000 000 (vingt trois millions) FCFA. Il est à présent nécessaire d'évaluer les écarts constatés à moyen terme par rapport aux objectifs fixés.

II/ FACTEURS EXPLICATIFS DES ECARTS, ANALYSE DES HYPOTHESES ET RECOMMANDATIONS.

Cette partie de l'étude est essentiellement consacrée à l'évaluation du processus d'ajustement et de ses résultats à moyen terme. Nous avons pris en compte les éléments observés de mars 2008 jusqu'au moment de cette étude. En effet, ayant constaté l'essoufflement des effets du processus d'ajustement à moyen terme, nous avons décidé grâce à l'expertise acquise pendant la formation de Master en Développement et Management de Projets de rechercher les causes profondes des difficultés de l'entreprise, de manière à l'ajuster de manière durable à son environnement socio-économique afin de poser les bases de son développement à long terme.

II.1 Résultats et écarts à moyen terme

Un suivi de l'activité de l'entreprise de mars 2008 jusqu'au moment de cette étude, montre que l'entreprise s'enfonce de nouveau peu à peu dans une crise profonde. Cependant, à la différence des premières difficultés constatées au niveau des données industrielles, financières et sociales, en juin 2006, celles-ci se perçoivent principalement au niveau des données financières. Nous avons pu mettre à jour l'état d'endettement ci-après.

Tableau 10 : État d'endettement de la SMF au 29 février 2008

Débit Banque BICEC

15 000 000 Fcfa

Dettes Associations

3 500 000 Fcfa

Dettes Impôts et CNPS

3 000 000 Fcfa

Dettes Fournisseurs

1 500 000 Fcfa

Total Dettes

23 000 000 Fcfa

(Source : Auteur)

De nouveau, les fournisseurs font état des retards enregistrés dans leurs paiements, les banquiers s'inquiètent à la vue de l'augmentation de la dette de l'entreprise, l'Etat et les organismes sociaux assistent peu à peu à un alourdissement de leurs créances. Lentement mais sûrement, l'environnement de l'entreprise perdait confiance.

Pourtant, la situation sociale et industrielle est stable depuis la fin du processus d'ajustement. Les commandes du principal client ALUCAM sont régulières. En outre, quelques

nouveaux marchés ont été gagnés au sein d'ALUCAM. Les chiffres d'affaires 2007 et 2008 sur le tableau 11 ci-dessous illustrent cette régularité.

Tableau 11 : Chiffre d'affaires 2007 et 2008

Année

Chiffre d'affaires avec ALUCAM

2007

114

983

958

2008

121

216

751

(Source : DSF 2007 et 2008)

Ceci est dû à une qualité accrue et maintenue des prestations vendue à ALUCAM depuis la fin du processus. Le suivi de la gestion du personnel présente des indicateurs de risques sociaux stables (nombre de conflits, taux d'absentéisme, nombre de demandes d'explications, turn over...). Le système disciplinaire mis en place semble avoir bien fonctionné dans la mesure où, à présent une demande d'explication est enregistrée après trois mois, alors qu'au moment de la mise en place effective du nouveau système disciplinaire en moyenne 4 demandes d'explications par jour étaient adressées aux opérateurs techniques par leur encadrement.

Les objectifs fixés de résorption du déficit de trésorerie n'ont pu être atteints à moyen terme, créant de facto un impact négatif sur la relation de l'entreprise avec son environnement, lié aux difficultés de paiements des engagements contractés pour son fonctionnement. Le processus d'ajustement n'a pas réussi à stabiliser la trésorerie de l'entreprise, et, particulièrement son taux d'endettement à moyen terme, bien que les données sociales et industrielles soient encore stables, une dégradation rapide de ces dernières est à craindre.

A l'analyse, les difficultés proviennent principalement des données financières. Étant donné que la quantité de la production vendue, visible sur le tableau 11 ci-dessus, était restée relativement stable, la gestion financière de la SMF semblait être à l'origine des écarts constatés à moyen terme. Nous avons donc décidé de l'étudier de manière plus précise.

II.2. Analyse du système de gestion financière de l'entreprise

Le système de gestion financière de la SMF est piloté par la gérante, assistée par le comptable. Le rôle du comptable est de collecter les factures et pièces comptables, pour les transmettre au cabinet fiscal chargé de l'élaboration des Déclarations Statistiques et Fiscales. En outre, il est chargé du règlement des charges fiscales et sociales mensuelles. La gérante effectue

personnellement tous les décaissements de l'entreprise à la banque. Elle est la seule à prendre des engagements financiers au compte de l'entreprise. Elle gère l'ensemble des dépenses de l'entreprise. Elle nous a d'ailleurs confié qu'elle était le Directeur Financier de l'entreprise. Chaque opération financière nécessite donc au préalable son aval.

L'insuffisance de formation du comptable a été révélée lors du diagnostic initial. Ce dernier détient un Certificat d'Aptitude Professionnelle d'employé de banque obtenu en 1990. Il n'a depuis son entrée au sein de l'entreprise en 2001, subit aucune formation en ingénierie financière pour être à méme de conseiller l'entreprise dans ce domaine. Un entretien conduit avec ce dernier, montre qu'il n'a qu'une vision partielle et parcellaire des dépenses engagées par l'entreprise. Sa vision est essentiellement réduite aux charges fiscales et sociales de l'entreprise. Il ne reçoit que quelques factures liées aux frais de carburants et de consommables. Nous avons constaté, qu'en fin d'année c'est un véritable parcours du combattant pour se procurer des justificatifs (factures) nécessaires aux contrôles fiscaux pour combler les écarts. En effet, les écarts entre les montants de la production vendue visible sur l'historique bancaire, et, les quelques pièces comptables sont en fin d'année 2007 de 12 000 000 (douze millions) Fcfa.

Les avis et conseils du cabinet de conseil fiscal et financier retenu par le commanditaire en collaboration avec le décideur, lors de la phase de mise en oeuvre des mesures proposées, pour l'ajustement de l'entreprise en 2006, n'étaient plus pris en compte par la gérante au cours des années 2007 et 2008. Pourtant, un plan financier à moyen terme prévoyant un contrôle de la rentabilité des opérations, et, la bonne utilisation des actifs a été proposé, mais rejeté. Les relations du décideur avec ce cabinet se sont dégradées, car, les prestations de ce dernier n'avaient pas été réglées par la SMF du mois de mai 2007 à juillet 2008. Ce conflit a abouti le 04 août 2008 à l'ordonnance N°0107 de saisie conservatoire des créances, à la requête de la société BIBA Conseils Sarl, BP 625 Edéa, rendue par Monsieur le Président du Tribunal de Première Instance d'Edéa.

Ce pourrissement des relations avec ce cabinet retenu principalement par le commanditaire, a débouché sur une crise de confiance du décideur avec le commanditaire. Ce dernier nous a révélé après entretien, avoir désormais choisi l'adoption d'une stratégie de retrait et observait l'évolution de la situation de l'entreprise.

Les marges dégagées par l'entreprise en février 2007, ont en majorité servies à des dépenses de prestige. Par exemple en mars 2007, ayant appris le projet d'achat d'un véhicule de chantier vieillissant à un prix prohibitif, de marque Toyota Pick up, par la gérante, nous nous sommes empressés de lui présenter l'inopportunité d'une telle dépense, surtout dans un contexte de sortie de crise. La réponse donnée par cette dernière était : « laissez-moi rêver ». En outre, nous avons pu constaté que l'aide du dirigeant était fréquemment requise par les membres de la famille pour les deuils, les mariages, etc. Cette dernière occupe une place de pilier au sein de sa famille et de sa

belle famille depuis la mort du fondateur. Ces prélèvements du dirigeant contribuaient à déséquilibrer la structure financière de l'entreprise. Nous avons notamment appris par un proche de la gérante, qu'un terrain venait d'être acheté par cette dernière, pour la construction d'une église en périphérie de la ville d'Edéa. En outre, un des véhicules de l'entreprise était fréquemment utilisé pour des campagnes d'évangélisation ou des déplacements du pasteur de cette église réveillée. Pour E Kamdem (2002 :352), le chef dans l'organisation africaine contemporaine, parce qu'il très souvent amené à se comporter comme un chef patrimonial (même quand il ne le désire pas) apparaît essentiellement comme un chef paternaliste. En d'autres termes, c'est un dirigeant qui est souvent la cheville ouvrière d'un système généralisé d'échange, de redistribution et de réciprocité, un dirigeant dont l'autorité et la légitimité se mesurent à sa capacité à mobiliser des ressources ainsi qu'à sa générosité vis-à-vis de ceux qui l'entourent et l'adulent (Kamdem, 2002 :352).

Nous avons constaté de nombreux retraits injustifiés sur les relevés de comptes BICEC, la gérante nous ayant déjà fait comprendre que c'était le seul héritage que son mari lui avait laissé et qu'elle comptait en jouir librement, nous nous sommes contentés d'observer seulement les faits, sans plus requérir un nouvel entretien avec cette dernière. Nous avons relevé que certains employés de l'entreprise proches de la famille, étaient fréquemment sollicités pour effectuer des travaux dans les palmeraies du propriétaire dirigeant situées dans la localité, ces derniers se pointaient personnellement des heures supplémentaires indues, qui devaient être payées sur les recettes d'exploitation de l'entreprise. On pouvait par exemple, relever sur leurs cartes de pointage, des heures supplémentaires pouvant aller jusqu'à 15 heures par jour de travail, payable sur la production vendue à la compagnie ALUCAM. En bonne logique comptable, comme le précise P. Delalande (1987 :56), ces aides financières, ces cadeaux aux membres de la famille ou de l'ethnie devaient être prélevés sur les revenus personnels du chef d'entreprise et non sur les recettes d'exploitation de l'entreprise.

Nous avons aussi relevé le manque de volonté du dirigeant à mettre en place un système de gestion et d'information financière adéquat, ce qui fragilise l'entreprise. Nous n'avons jusqu'ici jamais ressenti pleinement l'implication des actionnaires pour un redressement de la gestion financière de l'entreprise. En 2008, une tentative d'implication dans cette sphère par l'un des enfants du décideur a débouché sur un conflit auquel nous avons assisté.

L'absence de stratégie financière est d'après nos analyses et observations le facteur explicatif des écarts constatés. Des problèmes enregistrés au niveau des données financières découlent les difficultés socio--économiques ci-après, à savoir :

- Les problèmes sociaux de l'entreprise, car les employés sont démotivés suite aux retards dans le paiement des salaires ou au gel des avancements automatiques et des primes d'anciennetés.

En outre, les cotisations sociales et les retenues fiscales ne sont pas reversées. Les dettes contractées auprès des institutions bancaires et des tontines sont rééchelonnés avec de nouveaux intérêts ;

- Les difficultés industrielles de l'entreprise, car les fournisseurs ne peuvent livrés les EPI et le matériel sans être payés, ce qui handicape la production. L'absence de matériel conduit à des malfaçons sur les chantiers et au non respect des règles de sécurité. Ces situations amènent généralement les responsables ALUCAM à suspendre les chantiers de la SMF.

Cette lacune au niveau de la gestion financière a des répercussions sur les données sociales et environnementales de l'entreprise. La stratégie financière d'une entreprise est communément appelée « ingénierie financière ». Cette expression nouvelle, qui est un néologisme par francisation du terme anglais engineering, mentionné dans le dictionnaire Grand Robert (1982), inclut l'idée d'ingéniosité. Pour maîtriser la rentabilité globale de l'entreprise, et, sauvegarder son autonomie financière, la stratégie financière ou ingénierie doit en effet faire preuve d'ingéniosité. Les entreprises en difficulté, plus que les autres, ont besoin pour redresser la barre d'ingénierie financière spécialement appliquée à la situation qui leur est propre.

II.3 Analyse des hypothèses de recherche

Cette partie vise à analyser les hypothèses formulées au début de cette étude, pour ajuster l'entreprise de manière durable à son environnement socio économique. Certains facteurs semblent expliquer l'incapacité du processus d'ajustement à maintenir une cohérence externe et interne de la SMF à moyen terme :

II.3.1 Influence de l'environnement proche

L'environnement proche de l'organisation a tout d'abord été évoqué comme la cause principale dans l'incapacité du processus d'ajustement à maintenir une cohérence interne et externe de la SMF. En effet, la synthèse du diagnostic organisationnel effectué en 2006 révélait que l'entreprise était dans une situation de dépendance sur le marché unique de l'usine ALUCAM. Elle y réalisait 100% de son chiffre d'affaires annuel.

Depuis quelques années ce marché acquis de longue date, en 1992, faisait l'objet d'une concurrence accrue. Avant l'intervention de 2006, les causes conjuguées de la démotivation de

l'encadrement technique et des opérateurs, les difficultés liées à la planification des travaux, et, l'absence d'action commerciale « actives » par l'utilisation de lobby ont causé la perte d'une grande partie de prestations de la SMF au sein de l'usine ALUCAM.

A l'issue du processus d'ajustement, l'entreprise donneuse d'ordre a maintenu les marchés de la SMF, en transmettant des félicitations pour la l'amélioration de la qualité des travaux et du comportement des hommes sur le terrain. L'ingéniosité de la nouvelle équipe technique, notamment à travers ses deux nouvelles recrues, a permis à l'entreprise de gagner quelques nouveaux marchés, malgré la non réévaluation de la grille de prix fixée en 1992 entre ALUCAM et le fondateur de l'entreprise. Cette grille de prix ne tient pas compte de l'augmentation des prix des EPI, des consommables et du matériel, et de l'effet GVT43 qui alourdit la masse salariale de la SMF au fil des ans. Par exemple, une opération telle que celle consistant à souder les équipotentiels44, facturée 2600 FCFA par pièce par ALUCAM, nécessitait en 1992, la présence d'un soudeur confirmé et d'un aide pour des taux horaires de 450 FCFA et de 256 FCFA chacun. Aujourd'hui, cette opération est toujours facturée à 2600 FCFA, mais, nécessite en plus des deux opérateurs rémunérés à des taux horaires de 700 FCFA et de 450 FCFA, la présence d'un vigile qui assure la sécurité sur le chantier. Le chiffre d'affaires réalisé au sein d'ALUCAM reste stable (entre 95 millions et 120 millions) depuis 2005 jusqu'au moment de l'étude.

Les autres acteurs de l'environnement tels que les fournisseurs de l'entreprise ont une action relativement limitée sur l'entreprise. Cependant, nous avons vu que la menace d'un recouvrement forcé des créances par les fournisseurs était toujours possible. L'exemple du recours en justice du cabinet conseil BIBA Sarl le prouve. Les fournisseurs ambulants permettent à l'entreprise de bénéficier de matériels et EPI à moindre coüt, l'illégalité dans laquelle ils exercent réduisent la portée de leurs actions vis-à-vis de l'entreprise.

Les services fiscaux et sociaux réagissent au non versement des cotisations et taxes, et, profitent des irrégularités observées dans la gestion de l'entreprise pour mettre la pression sur l'entreprise et bénéficier de cadeaux. Cependant, dès que les versements s'effectuent conformément à la législation en vigueur, leurs pressions se relâchent.

Nous pouvons dire que la principale difficulté pour l'entreprise est de s'adapter en continue aux sollicitations de son unique client ALUCAM, malgré la grille de prix qui demeure inchangée depuis 1992. Cependant, le maintien du chiffre d'affaires réalisé, à environ cent millions par an depuis trois ans, et, les quelques marchés glanés depuis la fin du processus d'ajustement, nous permettent d'établir que le désajustement de la SMF vis-à-vis de son environnement économique et

43 L'effet Glissement Vieillissement Technicité (GVT) est produit par l'ancienneté du personnel au sein de

l'entreprise. En effet, plus le personnel vieillit au sein de l'entreprise, plus la technicité s'accroît générant une augmentation de la masse salariale en termes d'avancement automatique et de primes d'ancienneté.

44 L'équipotentiel est une pièce placée sur les cuves servant à la fusion du métal qui permet de vérifier si l'équilibre est maintenu sur les cuves.

industriel est à présent minime. Le rôle joué par l'environnement proche dans l'incapacité constatée du processus d'ajustement à maintenir ses effets à moyen terme est donc limité. Nous pouvons dire après analyse que l'environnement proche de la SMF réagit à ses impulsions.

II.3.2 Style de management utilisé par le propriétaire dirigeant

Le style de management utilisé au sein de l'entreprise est à l'origine de nombreuses difficultés au sein de l'entreprise. Les problèmes de management proviennent tout d'abord de l'absence de formation et du manque de volonté du propriétaire dirigeant à accepter la mise en place de procédures de gestion financière pérennes. G Balandier (1981 :254) évoque la possibilité de déséquilibre et de « choc », liés à la projection brutale du paysan africain dans le secteur industriel, en passant du village à l'entreprise, c'est le passage d'un milieu social à un autre, d'un age des techniques à un autre, sans qu'il y'ait de ceux-ci à ceux-là les transitions nécessaires. Et le dépaysement est d'autant plus total que l'entreprise est plus contraignante. Dans le cas de la SMF, le propriétaire dirigeant est passé brusquement à la mort de son mari, du statut d'assistante sociale retraitée, titulaire d'un CAP Couture à celui de Gérant d'une PME industrielle, d'un effectif de plus d'une trentaine d'employés, réalisant un chiffre d'affaires annuel entre 95 millions FCFA et 100 millions de FCFA. Cette rupture pose le problème de l'absence de phase de transition, et, de préparation au management d'une unité économique de cette dimension. Pour G. Balandier (idem) diverses enquêtes réalisées en Amérique Centrale, ont pu prouver que les problèmes d'adaptation technique étaient plus faciles à résoudre que les problèmes d'adaptation aux nouvelles conditions sociales.

Les mesures d'ingénierie financière et le plan social proposés par le cabinet de conseil fiscal et financier BIBA conseils Sarl n'ont pas reçu le quitus du décideur. Ces mesures devaient permettre un ajustement socio-économique à long terme de l'entreprise. Elles avaient pour objectifs de rendre l'entreprise plus compétitive, en ajustant ses charges sociales au niveau de ses concurrents et de sa production vendue, ainsi que de contrôler ses flux financiers, pour assurer la rentabilité de l'organisation. La gestion financière de l'entreprise est opaque, et, seul le propriétaire dirigeant en connaît tous les méandres, le comptable se contentant de jouer le rôle de collecteur et d'archiviste de « rares » factures et autres documents comptables et financiers. Tracy Goss et al (2000 :112) constatent, à travers un article paru dans le Harvard Business Review, qu' « après 35 années de recherche, d'écriture, d'enseignement et de conseils auprès d'entreprises à quel point les dirigeants, et notamment les plus hauts placés, négligeaient de réfléchir avec rigueur et patience

sur eux-mêmes et sur leurs idées. Ils sont retranchés sur leur perchoir comme une aristocratie en danger, drapés dans leur titre, sombres et isolés >>. Dans le cas de la SMF, aux interpellations des intervenants, le propriétaire dirigeant préférait se tenir à une gestion au jour le jour, disant que certaines réformes se feront après son « départ >>. A ce sujet, Roger Martin (2000 :129) partageant son expérience de consultant en stratégie d'entreprise dans le Harvard Business Review, commence seulement à mesurer à quel point les organisations résistent mécaniquement aux vérités nouvelles et à quel point cette résistance peut devenir émotionnelle. Il semblerait comme le suggère G. Balandier (1981 :251), que pour nombre de sociétés le sacrifice de leur intégrité culturelle apparaît comme un prix trop élevé payé au progrès.

Pour E. Kamdem (2002 :347), la résistance à l'élaboration et à la mise en oeuvre des procédures formelles et transparentes de gestion, favorise le développement d'un flou organisationnel qui est une source considérable de pouvoir pour les personnes en position d'autorité. Le contrôle total des aspects financiers de la SMF par le propriétaire dirigeant annihile toute tentative de prise de pouvoir forcé par ses enfants, qui sont aussi les actionnaires de l'entreprise. Ces derniers s'exposeraient dans un premier temps au refus catégorique d'accès aux comptes de l'entreprise par les banquiers, car, ne sont autorisées que la signature du propriétaire gérant et sa carte nationale d'identité. Nous avons d'ailleurs pu nous apercevoir que les responsables des banques appelaient la gérante par téléphone pour se rassurer, à chaque fois qu'une personne (peu importe son statut) se présentait dans leurs institutions avec son autorisation verbale ou écrite. Dans un deuxième temps, la sanction utilisée pouvait être pécuniaire, l'aide mensuelle adressée à certains était susceptible de s'interrompre à tout moment. Un membre de la famille nous disait que son refus manifeste de ne pas participer aux cultes de l'église réveillée, dont faisait désormais partie la gérante, lui avait valu une suspension temporaire de son aide financière mensuelle. Pour E. Kamdem (2002 :351), ce type de pouvoir revêt une forme néo-patrimoniale, mettant en jeu un double mécanisme : accumulation à partir d'une position occupée dans l'organisation, contrôle des biens et des services ; puis redistribution et contrôle des personnes bénéficiaires.

Une contribution théorique est apportée par Kamdem (2002 :144), lorsqu'il fait allusion au profil de l'entrepreneur pleurnicheur. C'est celui qui refuse généralement de voir les problèmes en face, s'engage dans une fuite en avant délibérée et cherche toujours ailleurs les causes de ses contreperformances ou de ses échecs. Par exemple, comme dans le cas dans le SMF, il en voudra au banquier d'exiger le remboursement d'un crédit obtenu quelques années plutôt et dont les délais de remboursement sont largement dépassés ; à l'administration fiscale d'exiger le paiement des impôts dus et pour lesquels plusieurs moratoires ont déjà été accordés ; au concurrent local qui innove d'abuser de ses relations et ressources financières pour obtenir des marchés ; à l'entreprise

donneuse d'ordre de ne pas lui accorder les mémes facilités qu'à ses concurrents ; au fournisseur de ne pas être assez patient, alors qu'il a d'autres clients indélicats et suffisamment de revenus pour vivre. Se sentant fragile et frileux, il est plus porté à afficher ses faiblesses, méme s'il a des potentialités réelles qui ne demandent qu'à être développées.

Les relations du décideur avec le personnel sont gérées à travers le rapport mère - enfants. Les canaux de communications sont donc principalement informels et laissent libre cours à la rumeur et à la manipulation. La proximité du siège avec l'habitation du propriétaire dirigeant maintient cette culture communautaire, et rend la relation entre la famille et l'entreprise floue.

Le propriétaire dirigeant a écarté toutes les mesures susceptibles d'avoir un impact sur un ajustement à moyen et long terme, à savoir : les procédures d'ingénierie financière ; déplacement des locaux de l'entreprise ; plan social.... Exaspérer par l'insistance de l'équipe d'intervention sur ce que ce dernier semblait percevoir comme une menace voilée sur les zones d'incertitudes sous son contrôle.

Tous ces éléments confirment que le style de management utilisé par le propriétaire dirigeant a considérablement endigué les effets recherchés par la mise en oeuvre d'un processus d'ajustement socio-économique de l'organisation.

II.3.3 Méthode utilisée pour conduire le processus d'ajustement et les résultats obtenus

Le processus d'ajustement a été conduit selon la méthode de l'audit organisationnel. L'équipe d'intervention a réalisée une investigation consistant à confronter la situation réelle de la SMF à une situation de référence, à rechercher la cause des écarts et à proposer des procédures et des dispositions propres à les réduire. Cette démarche a nécessité dans un premier temps, la mise en place d'un diagnostic organisationnel à travers une analyse de son environnement économique, de ses aspects sociaux, managériaux, financiers, et de production. Il s'est agit de rechercher les causes profondes des symptômes caractérisant les déséquilibres au niveau des données financières, sociales et industrielles. La période de trois mois dévolue à la phase de diagnostic, a conduit à mettre en évidence les éléments constitutifs des difficultés de l'entreprise.

Les données ont été collectées grâce aux documents internes à l'organisation, aux entretiens et à l'observation directe. Les informations, conclusions, jugements donnés par les personnes interrogées ne suffisant pas, il a fallu généralement les confronter avec les indicateurs des faits auxquels ils se rapportent (statistiques, chronologie, ratios). Le contrôle de ces informations avait pour objectif de détecter les difficultés de l'entreprise afin de proposer des solutions d'ajustement rapides, pratiques et adaptées à la situation de l'entreprise. Après, l'équipe d'intervention a porté un jugement sur les phénomènes observés, en appréciant les écarts, leur caractère significatifs ou non,

leur gravité, et les causes, pour recommander les mesures à mettre en oeuvre afin d'améliorer le fonctionnement de l'entreprise, et, de parvenir à un ajustement rapide des déséquilibres constatés.

La deuxième phase, essentiellement pratique, a consisté à mettre en oeuvre les mesures d'ajustement proposées dans le rapport d'audit organisationnel. Les indicateurs retenus pour le suivi des ces mesures devaient être simples et mesurables. Par exemple, la dégradation de l'image de l'entreprise était mesurée en tenant compte : du nombre de chantiers arrêtés par les agents ALUCAM en charge du contrôle qualité et sécurité, de la quantité de travaux effectués, du nombre de lettres de mise en demeure en provenance des services fiscaux et sociaux. Des dysfonctionnements coüteux comme l'absentéisme était mesurée par un taux calculé en divisant le nombre d'heures d'absence pendant une période P sur les heures théoriques de travail pendant la même période P. Un taux de moins de 5% devait être atteint. Les conflits se mesuraient à leur fréquence (nombre de manifestations d'antagonisme ouvert), leur extension (nombre de personnes ayant suivi le mouvement), leur intensité (nombres d'heures ou de journées de travail perdues). Le suivi des coûts de production, du chiffre d'affaires mensuel réalisé, du nombre de dettes contractées et réglées.

Après un relevé des indicateurs retenus en février 2007, à la fin de la période consacrée au processus d'ajustement, l'équipe d'intervention a conclu que les objectifs fixés avaient été atteints.. Des indicateurs tels que le niveau d'endettement réduit, le compte bancaire créditeur, le niveau de l'indicateur général d'équilibre etc. ainsi qu'un environnement rassurée (marques d'encouragement du client pour l'amélioration dans la qualité des travaux et l'attitude des hommes sur les chantiers, quittances de versement des cotisations sociales et des retenues fiscales à jour, fournisseurs prêt à livré, ....) ont servi de base pour rendre compte des résultats obtenus.

Une analyse critique de l'intervention montre que les actions entreprises ont eu une portée limitée. La dégradation constatée en mars 2008, un an après la fin officielle du processus d'ajustement le montre. L'équipe d'intervention a crié trop tôt victoire. John P. Kotter (2000 :18) dans un article intitulé « conduire le changement : huit causes d'échecs », de la Harvard Busines Review, révélait à ce sujet qu' « au bout de quelques années de dur labeur, la tentation est grande de crier victoire au premier résultat sérieux perceptible. S'il est réconfortant de savourer les premiers fruits de ses efforts, croire pour autant que la guerre est gagnée peut s'avérer catastrophique. Avant que le changement ne soit profondément ancré dans la culture de l'entreprise, il peut se passer de cinq à dix ans, et les nouvelles pratiques sont fragiles et sujettes à régression. ». Le temps consacrer à l'intervention se révèle avoir été bref et insuffisant pour redynamiser un climat social délétère, tandis que, pour que « la mayonnaise prenne », il faut que le changement passe dans les habitudes, dans le sang de l'entreprise. G. Balandier (1981 :299) affirme

qu'une révolution ne suffit pas à faire surgir une société radicalement nouvelle et durable ; elle n'agit que durant un temps, puis c'est la retombée dans « l'institué », dans l'ordre soucieux de sa propre conservation. C'est d'une manière plus constante que les acteurs sociaux doivent saisir les chances qu'ils créent eux-mêmes selon une « révolution permanente ».

Des mesures pérennes et répétitives n'ont pas été prises pour maintenir les effets du processus d'ajustement sur l'organisation. L'intervention n'a rien prévu pour minimiser les effets du management dans l'entreprise, sans outils de contrôle, de contre pouvoir qui empêcheraient un retour rapide à une situation de déséquilibre. L'influence du décideur dans la dégradation de l'entreprise a été sous estimée, l'accent ayant plutôt été mis à endiguer les effets de la situation de crise. Par exemple, l'équipe d'intervention n'a pas fait savoir directement à la gérante que ses nombreux prélèvements injustifiés, opérés sur les comptes de l'entreprise, menaçaient sa survie. La réalisation des mesures d'ingénierie financière et le plan social prévu, sensés avoir un impact à long terme était toujours en attente de validation par le décideur un après. Pour les intervenants, la décision d'évoluer vers une transformation durable de l'organisation devait être prise par le propriétaire dirigeant. Gilbert Riebold (1976 :152) affirme à ce sujet que « c'est la situation du malade qui consulte un médecin. Fréquemment les craintes du patient ne correspondent pas au

diagnostic du praticien. Quand les déclarations du manager s'avèrent incorrectes, le consultant luiexplique que le mal n'est pas là où il croit, qu'il confond syndrome et affection, et que l'action

corrective est à engager ailleurs. A lui de décider ».

La résistance de la gérante à l'implémentation de mesures d'ingénierie financière n'a pas été prévue, ainsi que le pouvoir d'action limité du commanditaire. L'équipe d'intervention n'a pas donné une copie de ses recommandations aux actionnaires de l'entreprise. Ces derniers auraient pu faire pression pour que des mesures durables soient prises.

Les résultats probants obtenus à court terme sont confirmés par le maintien de l'équipe d'intervention pour assurer le suivi des activités stratégiques, administratives et financières de l'entreprise au delà de la période prévue pour le processus d'ajustement. Les prestations du cabinet conseil fiscal et financier se sont limitées après la fin officielle de la démarche d'intervention au montage des bulletins de paie, au suivi des éléments comptables pour la réalisation des Déclarations Statistiques et Fiscales et à l'action contentieuse avec le personnel, les services fiscaux et la CNPS. Ce cabinet a finalement arreté ses activités avec l'entreprise en aoüt 2008. Pour deux raisons, à savoir:

- Le non paiement de ses prestations par la SMF sur une période de un an six mois ; - La contestation par le décideur de ses compétences.

Nous-mêmes avons suspendu partiellement nos prestations liées au suivi administratif et

financier en octobre 2007, pour rejoindre les rangs de l'Université Catholique d'Afrique Centrale à Yaoundé. Nos prestations se réalisaient un jour par semaine, de ce fait, nous avons perdu le contact des réalités financières et des dettes qui se contractaient au fil du temps. Aux échéanciers de remboursement qui n'étaient pas encore terminés sont venus s'ajoutés de nouvelles dettes.

La qualité du processus d'ajustement et de ses résultats à moyen terme est liée au manque de volonté du décideur de coopérer pleinement au processus, autant qu'à l'incapacité de l'équipe d'intervention à suivre le processus engagé sur plusieurs années.

II.4 Recommandations pour ajuster l'entreprise de manière durable à son environnement socio économique

Cette étude sur l'ajustement d'une PME familiale à son environnement socio économique, nous a permis de déceler l'amplitude des problèmes de management sur le devenir des organisations de production économique au Cameroun. Dans le but de faire de ce travail un outil d'analyse pratique, à la disposition de la communauté scientifique et économique, nous avons fait quelques propositions dans l'optique de contribuer à un ajustement durable de la SMF au sein de son environnement socio-économique.

II.4.1 Comment améliorer la gestion financière de l'organisation


· Pour gagner en efficacité le système de gestion financière de la SMF doit faire l'objet d'un contrôle actif des actionnaires, qui constituerait un contre pouvoir, avec notamment un système de double signature au niveau du compte entreprise à la BICEC. En outre, il s'agira de mettre en place des procédures de suivi et de vérification comptables et financières transparentes, dont les données seront transmises aux actionnaires et communiquer au personnel le cas échéant. Nous avons vu ci-dessus qu'il ressort des articles 150 et suivants de l'acte uniforme OHADA relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique (AUDSCGIE) que le commissaire aux comptes, au cas où il en existe et les associés, peuvent déclencher la procédure d'alerte et d'expertise de gestion en cas de nécessité. L'Etat Camerounais prévoit aussi le recours aux centres de gestion des PME sous la tutelle du MINPMEESA, pour l'aide à la gestion et la prévention des difficultés au sein des PME.


· L'age de la gérante ne pouvant permettre un renforcement de ses capacités de management, nous préconisons, la nomination d'un administrateur issu si possible des rangs de la famille, bénéficiant d'aptitudes et de connaissances appropriés au management de l'entreprise. Un planning de formation pourra lui être proposé. Une nouvelle recrue de niveau BTS comptabilité finance avec un salaire forfaitaire, outillée dans le suivi des indicateurs de performance de la PME, pourrait remplacer le comptable, ce qui permettrait à la fois de faire baisser les coûts en termes de rémunération et de fournir un travail de qualité.

· Le comptable et l'assistante de direction devraient bénéficier de mesures de départ anticipé et négocié, ou à défaut dans un premier temps être mis en chômage technique. Le responsable technique devrait se voir attribuer de nouvelles missions technico- commerciales, pour une recherche de nouveaux marchés par exemple à la SONARA, aux Brasseries du Cameroun etc.

· Les chauffeurs devraient bénéficier de salaires forfaitaires, pour endiguer notamment les heures supplémentaires des travaux champétres et celles liées aux campagnes d'évangélisations. Un salaire de 200 000 FCFA pour un chauffeur dans une PME en crise est exagéré d'après nous.

· Les contrats avec le personnel doivent être renégociés et actualisés pour faire baisser la masse salariale.

· La gérante devrait uniquement faire usage de son salaire mensuel fixe dans son compte privé, et bénéficier de dividendes en fin d'années, et, délaisser le recours intempestif au compte de l'entreprise pour faire face à ses dépenses familiales ou personnelles.

II.4.2 Pour un meilleur alignement de l'entreprise sur son environnement

· Nous préconisons le tri sélectif des meilleurs potentiels au sein de la famille ou de l'extérieur pour intégrer l'entreprise. Les recrutements doivent être entrepris uniquement en cas de besoin réel en personnel, et non pour aider un membre de la famille ;

· La mise en place d'un système de veille et de suivi de conformité technologique, normative, réglementaire (législation sociale, fiscale...) ;

· La SMF doit constituer une réserve de fonds pendant la période de hausse d'activité pour pallier les périodes de baisse d'activités d'un montant minimum de 5 000 000 (cinq millions) FCFA. En outre, l'ouverture d'un compte réservé à l'achat du matériel et aux actions commerciales et de développement permettra de rendre l'entreprise réactive dans la quête de nouveaux marchés, et, d'être à même de respecter ses délais de livraison à tout moment ;

· Les paiements des cotisations et taxes diverses aux échéances prévues doivent permettre de stabiliser les relations de l'entreprise avec les services fiscaux et sociaux ;

· Des crédits de communication devraient être attribués à l'encadrement technique et

administratif afin de faciliter les appels d'urgence et de mieux coordonner les actions entre les différents services.

· Prévoir la mise en place d'un compte fournisseur, et le règlement régulier de leurs factures et prestations.

· La construction d'un atelier industriel, avec un module de formation en soudure, pourrait à la fois permettre la réalisation de nouveaux marchés et de reconvertir les soudeurs vieillissants dans la formation.

II.4.3 Pour un partenariat social renforcé

· Paiement régulier des salaires du personnel et mise en place d'un système d'avancement et de gestion des carrières au mérite et selon des critères correspondant à la culture organisationnelle désiré par le management ;

· Formation du personnel aux droits et obligations du travailleur et des représentants syndicaux, et mise en place d'un système disciplinaire adapté et préventif, qui ne rechigne pas à sanctionner les membres de la famille coupables d'infractions;

· Le management doit communiquer sa vision au personnel. Une vision suppose un type particulier d'objectif 3A (Ambition, audace et aventure), qui s'applique sur dix à trente ans;

· Améliorer les canaux de communication (réunions, notes de service, rencontres informelles, management baladeur...) par rapport à l'impact organisationnel souhaité par le management, on ne saurait galvaniser les troupes sans une communication massive et crédible. Pour assurer une bonne communication, il faut que les dirigeants fassent passer leurs messages à tous les niveaux. Il s'agira d'apprécier dans chaque réunion, par exemple, comment les solutions proposées correspondent (ou non) au schéma global. On examinera lors de séances d'évaluation comment l'attitude de tel ou tel employé concorde ou non avec cette vision, on s'intéressera, lors des bilans trimestriels, non seulement aux chiffres mais aussi à la contribution qu'apportent les responsables de services au changement souhaité ;

· Attribution de lettres de félicitations au personnel, médailles d'honneur du travail. Paiement régulier des allocations familiales ;

· Le siège social de l'entreprise devrait quitter la concession familiale. Cette proximité semble créer une confusion entre la gestion de l'entreprise et la gestion des affaires familiales. De nouveaux locaux pourraient être construits ou loués.

L'ajustement d'une Petite et Moyenne Entreprise familiale à son environnement socioéconomique : la thématique mérite sürement l'intérêt, car, depuis le milieu de l'année 2007, une crise financière et économique frappe le monde. Dans cet environnement économique incertain, Blaise Pascal Talla dans le numéro spécial N°375 de Jeune Afrique Economie pense que « la leçon est claire : nul ne détient la recette miracle du développement économique. Chaque pays doit explorer son potentiel, sa vision et sa stratégie, et trouver son chemin, sa formule magique sans complexe ». Dans cette quête de développement économique personnalisé, le gouvernement Camerounais accorde une place de choix aux Petites et Moyennes Entreprises. Au-delà de cette reconnaissance marquée par la création d'un Ministère des Petites et Moyennes Entreprises, de l'Economie Sociale et de l'Artisanat par le Décret N°2004/320 du 8 décembre 2004, les PME sont le pilier de l'objectif arrété en 2009 par le gouvernement camerounais de devenir un pays émergent à l'horizon 2035. Le dynamisme de ces très petites, petites et moyennes entreprises soutien le tissu socio --économique camerounais en stimulant l'emploi et la création de richesse. Au Cameroun comme dans la plupart des pays africains, le réseau familial lorsqu'il n'est pas à l'origine de la création de ces entreprises est présent tout au long leurs développements. La famille, pourvoyeuse en financement, en hommes et en conseils permet notamment de combler la frilosité des institutions bancaires à accorder des prêts à long terme, de s'allier les acteurs étatiques utiles à leur fonctionnement, et de faciliter l'accès à de nouveaux marchés. Le désajustement de ces entités à leur environnement socio-économique porterait donc un coup fatal au développement socioéconomique du Cameroun.

Pour pallier cette éventualité un projet de loi sur les PME, envisage la mise en place de structures d'incubations des PME visant à assurer le développement, l'appui et l'assistance aux PME. Il prévoit en outre un plan de mise à niveau sur la base d'un diagnostic visant à faire ressortir les forces et les faiblesses de ces dernières. En attendant la mise sur pied de ces organismes, et face aux difficultés quotidiennes qu'elles enregistrent, elles ne peuvent faire appel qu'à une expertise locale privée. C'est dans cette perspective et dans un contexte social, industriel et financier délétère que les dirigeants de la SMF ont fait appel en 2006 à une équipe d'intervenants dans l'optique de parvenir à un ajustement rapide de l'entreprise. Les objectifs de ce processus étaient triples :

- Résorber le déficit de trésorerie ;

- Assainir le climat organisationnel ;

- Rassurer l'environnement proche de l'entreprise.

L'équipe d'intervention dont nous faisions partie s'est basée sur la méthode de l'audit organisationnel. Un diagnostic organisationnel a permis de mettre en lumière les lignes de forces et de faiblesses sociales, financières, environnementales et de production de la SMF. La mise en

oeuvre des mesures proposées dans le rapport d'audit a conduit l'équipe a affirmé en février 2007, que les objectifs fixés étaient quasiment atteints. Cependant, l'embellie ressentie par les dirigeants de l'entreprise, les partenaires, le personnel et les intervenants, a été de courte durée, car, tout juste un an après la fin officielle de ce processus d'ajustement, en février 2008, et jusqu'au moment de cette étude des signaux de dégradation et de déséquilibres étaient de nouveaux perceptibles, principalement au niveau des données financières de cette moyenne entreprise.

L'objet de cette étude était donc grace au nouveau corpus théorique acquis à l'institut Catholique de Yaoundé, d'évaluer à moyen terme les résultats obtenus par le processus d'ajustement conduit de mai 2006 à février 2007 au sein de la SMF. Notre souci était à la fois de participer à la préservation d'une unité économique de moyenne dimension, employant une trentaine de personnes, et de contribuer à l'essor du couplage recherche - pratique dans le contexte africain.

Pour de nombreux auteurs de l'école de la contingence comme H. Mintzberg, H. Sylvestre et R.Goujet, G. Paché, les PME de part leur taille sont soumises aux contraintes de leur environnement et doivent s'aligner sur lui. Pour d'autres en revanche, à l'exemple de Crozier et Friedberg, cela serait envisagé l'entreprise uniquement sous l'angle de l'adaptation, de la réaction, évacuant l'éventualité d'une action volontaire de ses dirigeants. Pourtant, pour E. Kamdem, dans une société africaine en mutation, l'entrepreneur doit être essentiellement pro actif, adaptant son activité économique en permanence aux réalités de son contexte social et culturel. Les difficultés de l'entreprise et de l'entrepreneur africain sont résumées dans cette phrase, du banquier et chef d'entreprise camerounais P. Kammogne Fokam (1993) « être entrepreneur en Afrique c'est demander à David chaque jour de se lancer quotidiennement dans un combat de front contre Goliath ». Ce combat quotidien conduit de nombreuses PME à « se casser la gueule » selon l'expression de B. Tano Kouadio, un entrepreneur africain.

Ce survol de la littérature sur l'analyse des organisations en rapport avec leur environnement nous a permis de faire ressortir l'interrogation ci-après : quels sont les facteurs explicatifs de l'incapacité du processus d'ajustement à assurer la cohérence externe et interne de l'entreprise à moyen terme ? L'inefficacité du processus d'ajustement à moyen terme pouvait provenir aussi bien de l'environnement proche (concurrents, clients, fournisseurs, partenaires publics, institutions financières) de l'organisation, du style de management utilisé par le propriétaire dirigeant, que de la méthode utilisée pour conduire le processus d'ajustement et des résultats qui en découlent.

La problématique de recherche et les hypothèses définies, la démarche à suivre devait être rigoureuse. Nous avons choisi de travailler sous l'éclairage de la méthode de la recherche intervention en sciences de gestion. Cette méthode privilégie la recherche de terrain comme lieu d'émergence de la connaissance pratique et de la théorie. Particulièrement adapté à l'étude et à la

mise en place de processus de changement organisationnel, elle nous a permis de disposer d'une boite à outils adapté au contexte de notre étude. Les trois principes d'investigation prospective, de conception et de libre circulation entre niveaux théoriques ont servis de socle à la conduite de notre recherche. Par ailleurs, la prise en compte des mutations à l'intérieur comme à l'extérieur de l'entreprise, nous a amené à emprunter l'approche de la sociologie des mutations dans les sociétés « traditionnelles » ou « sous développées » de G. Balandier. Cette approche nous a été utile dans la compréhension du processus de changement organisationnel engagé par l'équipe d'intervention, ainsi que des ruptures et résistances qui en découlaient au sein de l'entreprise. Nos données ont été collectées sur la base de la documentation présente dans l'entreprise, de l'observation participante, et de la méthode d'investigation prospective proposée en recherche intervention qui privilégie des entretiens sur le modèle de l'enquête policière.

L'armature de notre travail comprend deux principales parties, réparties en deux chapitres. La partie I pose le cadre opérationnel des PME familiales au Cameroun, elle évoque dans un premier temps les caractéristiques générales des entreprises familiales au Cameroun, puis présente le milieu de l'étude. La deuxième partie porte sur l'évaluation du processus d'ajustement et l'interprétation des écarts. Le chapitre I de cette partie présente le processus d'ajustement. Le deuxième chapitre de cette partie est consacré à tout d'abord à la présentation des résultats enregistrés en rapport avec les objectifs fixés à l'issue du processus d'ajustement, et, ensuite à l'analyse des résultats et des écarts enregistrés à moyen terme. La section II de ce dernier chapitre nous permet d'analyser les hypothèses de la recherche et de faire des recommandations pour un ajustement durable de l'organisation.

Les résultats obtenus montrent que le système de gestion financière de l'entreprise est à l'origine des écarts constatés à moyen terme. Une analyse des hypothèses retenues révèle que l'environnement proche soumet la SMF à une pression essentiellement normative. L'environnement proche réagit aux actions entreprises au sein de la SMF, il a donc une portée limitée sur l'incapacité du processus d'ajustement à atteindre ses objectifs à moyen terme. Une analyse de la deuxième hypothèse portant sur le rôle joué par le style de management utilisé par le propriétaire dirigeant, confirme que ce facteur a joué un rôle important sur l'inefficacité avérée du processus d'ajustement à atteindre ses objectifs a moyen terme. L'analyse de la troisième hypothèse a permis de montrer les insuffisances de la méthode utilisée pour conduire le processus. Les résultats obtenus à moyen terme sont liés notamment à l'incapacité de l'équipe d'intervention à mener un suivi approprié du projet de transformation/amélioration engagé.

Nous avons pu conclure que les facteurs conjugués du management du propriétaire dirigeant et de la méthode utilisée par les intervenants ne permettaient pas un ajustement socio-économique durable de l'organisation. Notre recherche se voulant pratique, nous avons fait un certain nombre de

recommandations à l'entreprise pour parvenir à redresser et à maintenir sa situation socioéconomique.

Les limites de cette étude peuvent provenir de notre collaboration au processus d'ajustement. Cette position de juge et partie peut poser des problèmes de rigueur à se distancier du processus conduit par l'équipe d'intervention pour l'évaluer de manière impartiale. La méthode de la recherche intervention autorise et favorise cette double attitude du chercheur intervenant.

Les difficultés rencontrées pendant notre recherche proviennent de la distance (environ 200 kilomètres) entre le milieu d'étude et l'Institut Catholique de Yaoundé. La ville d'Edéa ne disposant pas de bibliothèque adaptée au cadre de notre recherche, nous devions revenir sur Yaoundé pour façonner un cadre théorique adéquat et bénéficier des conseils avisés de notre encadreur. Notre implication dans l'activité de l'entreprise à travers la gestion du personnel et de l'administration générale, en favorisant la collecte de données, à aussi contribuer à rallonger la durée de l'étude. Par conséquent, la rédaction de notre travail de recherche ne pouvait convenablement s'effectuer que pendant les heures de pauses, à la sortie du travail, ou lors de permissions accordées exceptionnellement.

Cette expérience de changement organisationnel, nous a permis de réaliser que la conduite du changement au sein des PME ne peut être efficace à moyen terme qu'à travers une implication totale de tous les acteurs concernés. C'est un processus à mener sur le long terme et sans état d'âme de la part des dirigeants comme des intervenants.

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"Et il n'est rien de plus beau que l'instant qui précède le voyage, l'instant ou l'horizon de demain vient nous rendre visite et nous dire ses promesses"   Milan Kundera