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Le graffiti à  Beyrouth: trajectoires et enjeux d'un art urbain émergent

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par Joséphine PARENTHOU
Sciences Po Aix-en-Provence - Aix-Marseille Université - Diplôme de Sciences Politiques 2015
  

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3. L'utilisation de personnalités ou de références symboliques au Liban

Enfin, l'adaptation locale du graffiti passe par l'utilisation de références claires et largement diffusées dans la culture libanaise qui contribueraient à développer, dans la culture graffiti beyrouthine, un imaginaire libanais ou libanité. Cela est particulièrement visible chez Yazan Halwani, spécialisé dans le « mix entre portrait et calligraphie ». On retrouve ainsi des figures « emblématiques » (voir Annexe IX « Graffitis et réappropriation de l'espace »), du Liban ou de la culture arabe et particulièrement appréciés au pays du cèdre : Fairouz, Dalida, Mahmoud Darwich, Asmahan... Il explique lui-même qu'il souhaite remplir les murs de « figures qui font l'unanimité à Beyrouth et dans le monde arabe ». Ashekman reprend parfois le même type de sujet, comme la fresque de Fairouz réalisée sur le boulevard Mar Mitr. D'autres éléments peuvent être insérés : billets de banque libanais, tarbouche, etc. Quoique ces adaptations soient comprises et émanent de la culture libanaise, on perçoit une sorte d'aller-retour continuel entre territoire libanais et

113 BOURDIEU, Pierre, op. cit., p. 428.

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appartenance plus large à la « culture arabe ». La réalisation de pièces sur lesquelles figurent Fairouz ou Mahmoud Darwich par Yazan en Tunisie montre que ce type de référence culturelle paraît facilement transposable et recevable d'un pays à l'autre. Cela nous amènera à nous questionner sur ce qui pourrait véritablement faire de Beyrouth un monde de l'art local car, si l'on peut parler d'une glocalisation de la pratique du graffiti au regard des scènes européennes et américaines par exemple, sa définition en tant que telle se heurte aux ressemblances qui peuvent exister avec les pays voisins. En d'autres termes, est-ce spécifiquement libanais, ou plutôt « arabe » ?

Avant cela, rappelons que le Liban occupe une place unique au Moyen-Orient, grâce à sa diversité communautaire et le cosmopolitisme de sa capitale. Cette diversité est réaffirmée par le graffiti, en particulier celui de Phat2. Il s'attache à adapter ses graffitis au quartier dans lequel il pose, ainsi qu'à sa culture. Ainsi, dans le quartier arménien il modifie son blase, qui passe de Phat2 à « Phatian », tout comme à Furn es-Chebbak, où une importante communauté française réside, il se renomme lui-même en « Jean-Phat » (voir Annexe IX), non sans humour. Observer ce type d'adaptation nous renseigne abondamment sur ce que le graffiti produit comme effets sur le communautarisme dans l'espace urbain. Si ces adaptations rendent visibles les communautés résidant dans tel ou tel quartier, elles n'opèrent pas tant dans une optique communautaire ou confessionnelle (et donc de segmentarisation urbaine) que culturelle et humoristique, sorte de clin d'oeil positif aux différentes composantes du Liban.

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