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Les initiatives d'intégration en Afrique

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par Papa Lafatime Sène
Université Pierre Mendès France Grenoble II - Master de Droit international public et européen 2005
  

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1)- Les obstacles endogènes allant à l'encontre de l'intégration

régionale en Afrique

L'observation de la situation générale de l'Afrique nous fait remarquer trois causes principales qui sont de nature à freiner l'intégration régionale en Afrique :

- l'instabilité politique chronique.

- la multiplicité des organisations internationales parfois concurrentes.

- la faiblesse du niveau de développement économique.

Depuis les années 1960, les Etats du tiers-monde, notamment africains, sont des foyers de tension et de déplacement de population. Par exemple en 1993 on relevait dans le monde quatre zones principales de tension (Europe, Asie, Amérique, Afrique) avec 28 Etats dont la majorité se situait en Afrique. Ces tensions rendent évidemment particulièrement instable les régions concernées qui deviennent de ce fait des zones déséquilibrées. Depuis 1948, selon un rapport de la banque mondiale, il y a au moins, par pays en développement une tentative de coup d'Etat tous les cinq ans; le record dans ce domaine est détenu par l'Afrique. Il en résulte une crise politique sur fond de dictature de violence et de rivalité régionales.

L'instabilité politique a ainsi tendance à devenir un fait constant, bloquant le processus d'intégration. La prise de conscience de cet état de fait a conduit les Etats de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), pour ce qui concerne les tensions politiques, à conclure en 1977 des traités multilatéraux de non agression et d'assistance mutuelle en matière de défense et de sécurité.

En dépit de ces accords, on a relevé deux conflits qui ont pu survenir entre le Mali et le Burkina en 1985, la Mauritanie et le Sénégal en 1989. Par ailleurs la région des grands Lacs connaît depuis les années 1990 une crise majeure qui implique sept pays de la régions: la République démocratique du Congo, le Zimbabwe, la Namibie, le Rwanda, le Burundi, l'Ouganda, l'Angola.

Dans un deuxième point, il existe en Afrique une pléthore d'organisations internationales, ce qui ne favorise pas l'efficacité de ces dernières. En effet l'Afrique, dans son ensemble, comptabilise plus d'une cinquantaine d'organisations internationales. La multiplication de ces structures apparaît plutôt comme le fait de la volonté des seuls chefs d'Etat, plutôt que celle des cadres et des chercheurs africains. Ils ont semble- t- il obéi à leurs principaux désirs qu'à une démarche d'efficacité pour trouver une formule viable de regroupement des Etats vers leur unité politique dans la diversité de leurs traditions. De ce fait l'analyse des organisations internationales en Afrique montre une prépondérance de la souveraineté nationale dans les instances décisionnelles, qui se traduit par la supranationalité de la Conférence des chefs d'Etat dans la prise de décision. Comme la plupart des chefs d'Etat africains sont à la tête de régime autoritaire, on se demande comment ils accepteraient d'être soumis à une instance supranationale. Et pourtant dans leurs discours, pendant les conférences officielles et dans les traités, ces dirigeants politiques adhèrent à l'idée d'une plus grande intégration tout en sapant le processus par leurs actions. L'intégration étant d'abord un engagement politique, on ne peut s'empêcher de nous interroger sur légitimité des traités signés par des régimes autoritaires.

Le troisième facteur de blocage concerne le faible niveau de développement économique. En effet la majorité des pays africains sont classés parmi les pays les moins avancés (PMA). Malgré cette relative homogénéité, les pays africains engagés ensemble dans les processus d'intégration, n'ont pas toujours le même niveau de développement économique. Pour des raisons historiques et selon les opportunités de la nature, ces Etats ne son pas dotés de la même manière et ne possèdent pas les mêmes atouts et les mêmes ressources naturelles et industrielles: apparaît ainsi un clivage évident. Certains Etats sont pauvres et pratiquement bloqués dans leur croissance tandis que d'autres sont relativement bien pourvus (ZaÏre, Cote d'Ivoire, Afrique du Sud) et connaissent un développement soutenu.

Cette disparité, qui a été en partie à l'origine de la désintégration de l'Afrique occidentale française (AOF) en 1957 au profit de pays bien dotés en ressources naturelles et qui continuent de freiner le processus d'intégration, est exacerbée par le passé colonial spécifique de l'Afrique.

2) - Les obstacles liés à l'histoire spécifique de l'Afrique

L'Afrique est le continent le plus fragmenté sur le plan géopolitique et aussi le plus cosmopolite sur le plan de la diversité de la population. Dans ce contexte la question l'intégration est plus que jamais au coeur du « mal africain » selon Joseph Ki Zerbo (historien camerounais). Le rêve inassouvi de l'unité africaine se heurte malheureusement à la pesanteur d'un espace éclaté dont l'histoire remonte, pour l'essentiel, au XIXe, lors du partage colonial qui a façonné la configuration des frontières des Etats actuels de l'Afrique. En effet c'est durant la période mercantiliste que l'Afrique, pour la première fois perdit totalement son autonomie, sa fonction essentiel étant de fournir des esclaves aux plantations d'Amérique et des matières premières à l'Europe occidentale (commerce triangulaire). Les processus d'intégration interne, des peuples et de construction de vastes ensembles, qui se développaient à l'époque précoloniale, sont arrêtés au profit d'un émiettement et d'un isolement des peuples. La conquête coloniale a soumis par la force l'ensemble du continent africain, à l'exception de l'Ethiopie et du Libéria à la domination européenne. Ainsi les empires européennes s'efforcèrent de cloisonner les territoires qu'elles conquièrent pour éviter la mainmise des autres puissances concurrentes. Il en est ainsi, par exemple, dans chaque espace conquis où l'objectif fut de réduire au maximum les communications et les échanges entres les colonies françaises et les deux ensembles anglais et portugais par une politique systématique de réorientation des voies commerciales des capitales respectives de chaque colonies vers la côte en direction des Amériques ou de l'Europe. Du Nord au Sud de l'Afrique, Praia, Nouakchot, Dakar, Banjul, Bissau, Conakry, Freetown, Monrovia, Abidjan, Accra, Lomé, Cotonou et Lagos, soit 13 Etats sur 16 ont leur capitale sur la côte et leur économie tournées vers l'Europe laissant l'arrière pays dans l'abandon total .

Ce phénomène a abouti, par exemple, à la réorientation du centre de gravité de l'Afrique de l'Ouest, de la bouche du Niger vers l'Atlantique, créant ainsi un déséquilibre durables entre pays côtiers comme la Côte d'Ivoire ou le Ghana et les pays du centre enclavés comme le Burkina - Faso. A cela s'ajoute les déséquilibres entre la côte mise en valeur et l'intérieur abandonnés à lui-même comme pourvoyeur de main d'oeuvre. On assiste par ailleurs à une séparation des peuples qui appartenaient dans le passé au même ensemble politique. Par exemple le peuple Ewe est partagé entre le Togo français et le Ghana anglais, les Yoruba entre le Nigéria et le Burkina tandis que les Haoussa sont de part et d'autre de la frontière du Nigéria et du Niger. Cette situation est encore plus poussée en Sénégambie, en particulier au Sud où les Joola, les Manding et les Peuls appartenant dans le passé à l'empire du Mali, sont partagés entre les deux Guinées, la Gambie et le Sénégal. Pire encore, la Gambie coupe le Sénégal en deux créant ainsi un déséquilibre majeur entre le Sud et le Nord, ce qui est à l'origine de la rébellion des Joola dans la région sénégalaise de Casamance. En outre ces remparts expliquent les difficultés de rapprochement entre la Guinée-Bissau et le Cap-Vert. L'échec de leur tentative d'intégration est lié à la distance socio-culturelle séparant les deux peuples en raison de leur histoire coloniale particulière. En dépit des liens historiques séculaires entre les deux pays, la politique d'assimilation appliquée au Cap-Vert par le Portugal et l'utilisation de fonctionnaires cap -verdiens en Guinée-Bissau ont créé entre les deux populations une distance sociale qui a voué à l'échec tout effort d'intégration .Il existe un parallèle entre cet exemple et celui de la Gambie et du Sénégal. La crainte de la domination d'un pays par un autre a constitué l'entrave principale à l'intégration dans les deux cas (crainte de la domination de la Guinée-Bissau par le Cap-vert dans le premier cas ; de la Gambie par le Sénégal dans le deuxième cas).

Il faut préciser que les modifications de frontières sont très rares durant la période coloniale, les puissances européennes ayant dans l'ensemble consolidé les conventions signées à la fin du XXe siècle pour matérialiser les limites plus précises de chaque colonie. Avec le mouvement des indépendances, les Etats actuels, héritiers des frontières administratives, entrent dans un processus de construction de l'Etat -Nation, qui entre aujourd'hui en crise. Au fur à mesure que les colonisateurs européens détruisaient rapidement et progressivement les anciens «  Etats » africains et les pouvoirs provinciaux et locaux, ils avaient mis en place des Etats très centralisés qui recevaient des ordres de l'extérieur. Par conséquent les Etats africains indépendants qui ont été constitués à partir des années 1960, ont maintenu les valeurs et traditions centralisatrices, notamment jacobinistes. Ainsi les Etats post coloniaux se sont évertués à fonder des Etats- Nations à travers un processus de destruction des solidarités ethniques, régionales, locales, villageoise, culturelles et autres au profit d'une Nation supposée être unique, en utilisant officiellement la seule langue léguée par les colonisateurs. Pour réaliser un tel projet, les Etats étaient devenus tellement centralisés, qu'ils avaient supprimé toutes velléité d'intégration en Afrique. Dans la pratique, la constitution de l'Etat-Nation fut un échec, le centralisme a plutôt constitué un frein redoutable à l'intégration régionale, même si elle n'a pu empêcher les populations de faire fi des frontières qui leurs sont léguées puis entérinées par l'Organisation de l'unité africaine. Par conséquent le blocage essentiel de l'intégration régionale ne se réduit pas seulement à l'économie, il est d'abord d'ordre politique et culturel. Partout en Afrique éclatent aujourd'hui, les questions sociales et culturelles à travers la remise en cause des pouvoirs politiques centralisateurs et autocratiques qui ont occupé la scène politique depuis les indépendances et qui continuent d'entretenir des relations fusionnelles avec les anciennes puissances coloniales. Les crises actuelles montrent aussi avec évidence que les populations vivent mal à l'intérieure des Etats -Nations et posent avec acuité la gestion de cet héritage qui a fixé des frontières aussi artificielles qu'arbitraires. Les crises touchent aussi bien les grands Etats comme le Nigéria, le Congo, l'Angola, que les petits Etats comme le Rwanda, le Burundi, la Sierra Léone, le Sénégal ou la Guinée-Bissau. Ces crises ont des répercutions sur le plan externe et reposent indirectement le problème de la redéfinition des frontières sinon d'un nouvel espace territorial, économique et culturel susceptible de consolider la paix et la sécurité des populations.

Face à ces barrières multiples, les communautés économiques régionales représentent un palliatif pour réaliser une intégration régionale fiable.

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"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote