REPUBLIQUE DU
SENEGAL
UNIVERSITE GASTON BERGER DE
SAINT-LOUIS
UFR SCIENCES JURIDIQUES ET
POLITIQUES
SECTION DROIT DE L'ENTREPRISE
Sujet :
Les différentes formes de fraude et leurs impacts
négatifs prévisibles sur la filière industrielle :
l'éxemple de la Compagnie Sucrière Sénégalaise
(C.S.S).
|
Présenté Par :
Abdoulaye BASSE
Etudiant en 4éme Année
De Droit de l'Entreprise
Sous la Direction de :
Dr Mady Mary BOUARE et
Mr Abdoulaye DIOUF
Maître-Assistant à l''Ufr-SJP
Chef du service Qualité/Formation
Titulaire d'un CAPA (Certificat De la Compagnie
Sucrière Sénégalaise. D'aptitude à la profession
d'avocat).
Année Académique 2004-2005.
AVANT-
PROPOS
« Il y'a quelque chose de pire dans
la vie que de ne pas avoir réussi : c'est de ne pas avoir
essayé.»
S'inspirant des paroles de l'ancien Président
américain Franklin D. Roosevelt, je me suis
engagé, d'un commun accord avec mes encadreurs, à
réfléchir sur la problématique actuelle, complexe et
difficile de la fraude au Sénégal.
Loin d'être une prise de position partisane, ce travail
se veut scientifique et neutre vis-à-vis des controverses et
débats suscités par la question. Il se borne à cet effet
de décrire avec la plus grande précision et objectivité la
réalité du phénomène de la fraude et ses incidences
sur l'économie nationale.
Nous espérons que le contenu de ce travail servira de
base recherche et de collecte d'informations pour des travaux ultérieurs
à entreprendre par tout étudiant, enseignant ou chercheur
intéressé par la problématique soulevée et devant
contribuer à son amélioration.
A coté de la difficulté est, certes
une facilité !
A coté de la
difficulté est, certes une facilité !
Quand tu te
libères, donc, lève-toi,
Et à ton seigneur
aspire. »
Coran, Sourate
94, Versets 5 à 8.
ABREVIATIONS
Art. : Article.
Al. : Alinéa.
APETI : Artisans Paysans Eleveurs Travailleurs
Industriels
BAD : Banque Africaine de Développement.
BICIS : Banque Intérnationale pour le Commerce et
l'Industrie du Sénégal.
CA : Cour d'appel.
CAF : Coût -Assurance- Fret.
CAPA :
CBAO : Compagnie Bancaire de l'Afrique Occidentale.
CCEE : Caisse Centrale de Coopération
Economique.
CD : Code des Douanes.
CEDAO : Communauté Economique des Etats de
l'Afrique de l'Ouest.
CGU : Contribution Générale Unique.
CMS : Crédit Mutuel du Sénégal.
CNCAS : Caisse Nationale de Crédit Agricole du
Sénégal.
CNCR : Conseil National de concértation des
Ruraux.
CNES : Conseil National des Employeurs du
Sénégal.
CNP : Conseil National du Patronat.
CNTS : Confédération Nationale des
Travailleurs du Sénégal.
CNTS : CNTS / Force du Changement.
CM : Conseil des Ministres.
COSEC : Conseil Sénégalais des
Chargeurs.
CPI : Coût de Production Intérieur.
CSA : Confédération des syndicats
Autonomes.
CSS : Compagnie Sucrière
Sénégalaise.
DD : Droits de Douane.
DRH : Directeur des Ressources Humaines.
€ : Euro.
FA : Frais d'Approches.
FCFA : Franc Communauté Financière de
l'Afrique.
GMI : Groupement Mobile d'Intervention.
GPS : Groupement des producteurs de Sucre.
ICS : Industries Chimiques du Sénégal.
JORS : Journal Officiel de la République du
Sénégal.
KG : Kilogramme.
LPDA : Lettre de Politique de Développement de
l'Agriculture.
NCPS : Nouveau Code Pénal
Sénégalais.
NTIC : Nouvelles Téchnologies de l'Information et
de la Communication.
NTS : Nomenclature Tarifaire Statistique.
OCAAIS : Association des Commerçants,
Agriculteurs, Artisans et industriels du Sénégal.
OMC : Organisation Mondiale du Commerce.
PCS : Prélèvement Communautaire de
Solidarité.
PD : Prix de Déclenchement.
PGME : Prix Garanti Marché Union
Européenne.
PGMUSA : Prix Garanti Marché United State of
América.
PIB : Produit Intérieur Brut.
PM : Police Municipale
PMS : Prix Marché Spot.
PNB : Produit National Brut.
RD-TOLL : Richard-Toll.
ROES : Rassemblement des Opérateurs Economiques du
Sénégal.
RS : Redevance Statistique.
SODEFITEX : Société de Développement
des Fibres et Textiles.
SONATEL : Société Nationale des
Télécommunication.
SOTEXKA : Société des Textiles de
Kaolack.
ST : Sénégalaise de Tuyauterie
T : Tonne.
TCI : Taxe Conjoncturelle à l'Importation.
TD : Tribunal Départemental.
TDP : Taxe Dégressive de Protection.
TEC : Tarif Extérieur Commun.
TR : Tribunal Régional.
TSA : Tout Sauf Armes.
TVA : Taxe sur la Valeur Ajoutée.
UDTS : Union Démocratique des Travailleurs du
Sénégal.
UEMOA : Union Economique et Monétaire Ouest
Africain.
UNACOIS : Union National des Artisans Commerçants
et Industriels du Sénégal.
UNSAS : Union Nationale des Syndicats Autonomes du
Sénégal.
INTRODUCTION GENERALE
Compétitivité et exercice de la libre
concurrence constituent aujourd'hui les principaux socles sur les quels repose
une économie mondiale de plus en plus libéralisée. Elles
consacrent un changement radical de l'environnement économique mondial
désormais régi par les accords de l'Organisation Mondiale du
Commerce (OMC)1(*).
Sous l'effet de la mondialisation, les constructions
politico-économiques régionales s'accélèrent, les
échanges internationaux explosent, les progrès en matière
de nouvelles technologies de l'information et la communication participent
à un rétrécissement des distances, un raccourcissement des
délais et les frontières traditionnelles sont
démantelées2(*) pour laisser place au « village
planétaire »3(*) de MAC LUHAN4(*) devenu une réalité.
Au Sénégal, l'organisation et le fonctionnement
du marché notamment dans les secteurs de la production industrielle et
des services n'échappent pas à cette vague d'ouverture vers le
monde extérieur. Pour mieux exister, les industries locales se doivent
d'être plus productives et compétitives en proposant des produits
de qualité consommables au niveau local et exportables vers le reste du
monde. Aussi elles doivent faire face à l'importation massive de
produits agricoles subventionnés et à moindre coût en
provenance des pays industrialisés.
Cette nécessité d'adaptation au contexte
économique mondial caractérisé par l'ouverture des
marchés nationaux à la concurrence extérieure ne risque
pas de s'estomper de si tôt et apparaît comme une exigence
primordiale pour la survie de nos entreprises nationales. Si dans le cadre des
accords internationaux portant sur le commerce international, la concurrence,
aussi féroce soit-elle, s'exerce dans un environnement assaini et
structuré dans lequel les acteurs compétissent de façon
plus ou moins loyal et sincère. Par contre, il existe une autre forme de
concurrence tout aussi illégale, déloyale et ruineuse pour nos
économies nationales à la quelle les industries locales doivent
faire face.
Il s'agit de la problématique de la fraude dans les
importations de produits qui se pose avec acuité dans l'ensemble de la
sous-région ouest africaine notamment au Sénégal.
D'où donc la nécessite de procéder à une analyse du
phénomène de la contrebande communément appelée
fraude au Sénégal.
C'est dans cette perspective que s'inscrit ce rapport de stage
dont la thématique de recherche porte sur le sujet suivant :
Les différentes formes de fraude et leurs impacts négatifs
prévisibles sur la filière industrielle : l'exemple de la
Compagnie Sucrière Sénégalaise (C.S.S).
Relativement à la fraude, il faut dire qu'il s'agit
d'un concept polysémique qui peut revêtir plusieurs significations
en fonction du domaine d'activité politique, sociale et
économique dans lequel la pratique sévit. A ce titre on entend
parler de fraude fiscale, fraude électorale etc. Aussi entend t-on
parler de « petits fraudeurs » et de « grands
fraudeurs » ou de fraude documentaire.
Pour le LAROUSSE, elle s'entend d'un acte de mauvaise foi
accompli en contrevenant à la loi et aux règlements et nuisant au
droit d'autrui. Elle nécessite trois conditions : il faut que la
règle qui a été tournée ait un caractère
obligatoire, que le « fraudeur » ait eu l'intention de se soustraire
à cette règle et enfin, que le procédé frauduleux
utilisé ait eu un résultat efficace, c'est-à-dire qu'il
ait abouti à un résultat légal.
Elle est parfois confondue ou désignée sous
l'appellation de contrebande qualifiée comme l'introduction de
marchandises dans une maison ou un bâtiment avant leur conduite au bureau
des douanes ou, encore, le franchissement d'une frontière par un avion
qui ne respecte pas la voie aérienne ou, enfin, le fait pour des
transporteurs routiers de modifier un itinéraire.
A notre niveau, il s'agit de s'intéresser à
cette fraude douanière sur les produits qui peut se manifester sous la
forme d'une tromperie sur la nature, l'origine, la quantité ou la
qualité des marchandises. Elle constitue un acte de concurrence
déloyale défini par l'art.10 bis de la Convention d'Union de
Paris (Convention de Bruxelles) comme tout acte de concurrence contraire aux
usages honnêtes en matière industrielle ou commerciale. De
même selon l'art.1 de l'annexe de l'Accord de BANGUI5(*) est « illicite tout
acte de commerce contraire aux usages en matière industrielle,
commerciale, artisanale ou agricole. » en effet, la fraude participe
à une désorganisation de toute entreprise sur son marché.
C'est tout le sens de l'adage Fraus omnia corrumpit, « la fraude
corrompt tout » qui a elle seule suffit à illustrer la
nécessité de lutter contre une telle pratique.
D'une manière plus générale, elle vise
toute violation des dispositions légales et réglementaires
relatives à la détention et au transport des marchandises
à l'intérieur d'un territoire douanier. C'est donc dire qu'il
s'agit d'une notion très large qui englobe un nombre
élevé de manquements à la loi et à la
réglementation douanière.
Constitue une infraction douanière au sens de l'art.219
de la LOI n°87-47 du 28 Décembre 1987 portant Code des Douanes
(CD) : « toute action, omission ou toute abstention qui viole
les lois et règlements et qui est passible d'une peine prévue par
le présent code. »
Appliqué aux importations sur le sucre, le délit
d'importation frauduleuse de marchandises étrangères entre dans
le champ d'application de certaines dispositions législatives notamment
celles des arts. 49, 55 bis et 63 du CD.
Il peut conduire, si on n'y prend pas garde, à des
conséquences dramatiques pour l'emploi et l'industrie locale. C'est dans
ce sens que cette pratique anti-concurrentielle déloyale et immorale
constitue un ennemi redoutable pour des entreprises locales telle que CSS qui,
faudrait-il le préciser, est devenue ce qu'elle est aujourd'hui,
à la suite d'une longue évolution parfois mal connue du
public.
Implantée à RICHARD-TOLL6(*) depuis 1970, la CSS est la
concrétisation d'un vieux projet initié bien avant les
indépendances. En effet, c'est au 19°siècle que tout a
débuté avec un horticulteur français Mr RICHARD dont le
nom ajouté à « TOLL » composa le nom de
la ville de RICHARD-TOLL7(*). Tombé dans l'oubli, le projet fut
relancé dans les années 30 avec la promotion de la culture du
coton, du riz et de la canne à sucre. Mais c'est surtout dans les
années « 60 » que « l'opération
canne à sucre » comme l'appelait ses initiateurs avait
vu le jour.
A l'issue dans conseil interministériel sur le sucre,
le Président SENGHOR8(*) confia le projet à de jeunes
sénégalais parmi les quels M. Amadou Tidiane WANE9(*) alors tout jeune
ingénieur spécialiste en agro-industrie et qui est aujourd'hui
considéré comme le « père » de la
canne à sucre au Sénégal10(*).
Au détriment de Matam et de la Casamance ou des
études avaient été réalisées, RD-TOLL fut
choisi grâce à l'excellence de son environnement naturel où
la culture du riz commençait à se développer. Au regard
de ces résultats concluants réalisés par l'équipe
de jeunes sénégalais, des hommes d'affaires seront convaincus de
la faisabilité du projet taxé auparavant par ses
détracteurs de « canne à sel ».
M Jacques MIMRAN11(*), homme d'affaires français ami de SENGHOR, va
hériter du projet au début des années
« 70 » et c'est ainsi que l'histoire de la compagnie
sucrière sénégalaise fut lancée12(*).
Avec un capital de 14. 552.100.000, la CSS exploite un
périmètre de 8200 ha entièrement irrigués. Elle
bénéficie d'un réseau de 600 Km de canaux, 400 Km de
drains et 300 km de piste.
Elle dispose d'un parc de 600 véhicules et engins
spécialisés, et d'une centrale électrique d'une
capacité de 23 MVA. Actuellement, la CSS produit 850000 à 900000
Tonnes de cannes qui, une fois transformées, aboutissent à
l'équivalent de 85000 à 90000 Tonnes de sucre raffiné dont
elle se sert pour alimenter le marché national. Si depuis sa
création la CSS avait le monopole de la production et de la
commercialisation du sucre, il faut dire que depuis l'arrivée à
terme de la convention entre l'Etat du Sénégal et la CSS en 2000,
le marché du sucre est aujourd'hui libéralisé comme c'est
notamment le cas pour les autres pays membres de l' Union Economique et
Monétaire Ouest Africain (UEMOA)13(*).
Première entreprise privée en terme de
création d'emploi, la CSS emploi environ 6000 travailleurs. Avec un
chiffre d'affaires de 44 Milliards, sa masse salariale est estimée
à 11 Milliards. La CSS vérse dans les caisses de l'Etat au titre
d'impôts 14 à 15 Milliards annuellement14(*).
Aussi, elle contribue à hauteur de 376
Millions15(*) sous forme
d'impôts fonciers et de patente dans le budget de la municipalité.
Pour l'année 2005, sa part est estimée à plus 60% du
budget global de la commune.
Mais aujourd'hui, ce symbole de la réussite d'une
politique d'auto-suffisance alimentaire et de renforcement du tissu industriel
local déjà précaire est entrain de voir son avenir
s'assombrir par la pratique généralisée de la fraude sur
l'ensemble du territoire national.
Les récents développements faits par la presse
nationale sur la situation de la CSS et la polémique suscitée par
la quéstion de la libéralisation dans le secteur du sucre
viennent à leur tour conforter la pertinence de notre thème de
recherche.
Par ailleurs' le choix du sujet se justifie par le fait qu'il
touche et intéresse tous les pans de la vie économique, sociale
et politico-administrative. Aussi, il interpelle toutes les forces vives de la
nation soucieuses de l'essor économique et social du
Sénégal à savoir : l'Etat, le patronat, les
organisations syndicales et les associations de défense des
consommateurs.
D'abord, au plan économique, la fraude pose le
problème de la protéction et du devenir de nos industries locales
et de ses impacts négatifs sur l'économie nationale de
façon générale. Aussi, elle soulève la question de
notre attitude face à la mondialisation quant on sait que le
phénomène est intimement lié à l'évolution
du marché mondial des matières premières notamment pour ce
qui concerne le sucre.
Ensuite, au plan social, la fraude soulève
l'épineuse question du pouvoir d'achat des populations
confrontées à la cherté des produits locaux, mais aussi,
celle du devenir des salariés d'une entreprise confrontée
à une telle concurrence. Le même risque pèse aussi sur la
santé des populations au regard de la qualité douteuse des
produits proposés et non contrôlés.
Enfin, au niveau politico-administratif, elle pose la question
du choix des autorités sur le modèle d'organisation et de
fonctionnement du commerce intérieur. En ce sens, le sujet a un
intérêt juridique considérable d'autant plus que les
gouvernants sont amenés à définir le cadre de la
répression et de respect des règles du jeu de la concurrence car
la fraude crée pour l'Etat un manque à gagner important en terme
de taxes et d'impôts.
C'est à cet effet, il convient d'analyser le sujet
autour de la problématique suivante : la
structuration du marché local est-elle de nature à justifier
voir favoriser un système d'importations frauduleuses de sucre et dans
quelle mesure cette concurrence déloyale constitue-t-elle un danger dont
il faut lutter pour protéger l'industrie nationale notamment la
Compagnie sucrière sénégalaise ?
L'objéctif première de notre projet de recherche
est d'analyser, aussi bien du point de vue historique que contemporain, le
comportement de la fraude sur le sucre au Sénégal au regard de la
législation sur le commerce intérieur dans un premier temps puis
essayer de montrer l'urgence d'une lutte efficace contre une telle pratique
dans un second temps.
Ainsi il s'agit d'une part de monter l'acuité avec
laquelle le problème s'est posé en fonction des
différentes mutations subies par les règles d'organisations et de
fonctionnement du marché : composition et le comportement des
acteurs de la filière, fixation du prix et des politiques
économiques définies par l'Etat sénégalais
après les indépendances.
En effet, le cadre institutionnel et réglementaire du
marché a beaucoup évolué. D'une politique protectionniste
avec l'instauration d'un monopole et d'une exclusivité dans les
importations accordés à la CSS, le marché s'est
progressivement libéralisé avec l'avènement de la
dévaluation du Franc de la Communauté Financière de
l'Afrique (FCFA) intervenue en 1994 et l'application des reformes entreprises
par l'UEMOA avec la mise sur pied du dispositif du Tarif Extérieur
Commun (TEC)16(*)
même si on note une tendance vers un néo-protectionnisme dans la
filière. Et l'analyse de l'acuité de la fraude montre qu'elle
s'est structurée autour de différents circuits parallèles
parfaitement organisés. Ses formes peuvent revêtir la forme de
pratique de survie de la part des populations riveraines ou prendre une forme
organisée et mafieuse comme c'est le cas de la contrebande
illustrée par un commerce de transit ou de réexportation. Les
incidences négatives engendrées par la fraude ne se sont pas
toujours reflétées de la même façon selon qu'on se
trouve avant ou après la libéralisation dans le secteur du sucre.
Ce qui de ce fait donne des résultats différents en ce qui
concerne les impacts de la fraude sur les résultats de la CSS.
D'autre part, il s'agira de procéder d'abord à
une déclinaison par secteur des différentes conséquences
négatives prévisibles que la fraude pourrait causer à
notre industrie locale notamment la CSS et, par ricochet, aux populations qui
dépendent directement ou indirectement des activités de
l'entreprise.
Ensuite, il sera question, tout au long de notre travail, de
procéder à un état des lieux de la lutte contre cette
concurrence déloyale pour enfin terminer par une prescription de
solutions entrant toujours dans le cadre de la lutte contre la fraude qui
continue de ruiner notre économie déjà fragile.
C'est donc sur la base de ces différentes qu'il
s'agira à cet effet de consacrer la première partie de notre
travail à la question de l'organisation et le fonctionnement du
marché face à la problématique de la fraude dans le
secteur du sucre, puis analyser dans une seconde et dernière partie le
problème des Impacts négatifs prévisibles de la fraude sur
la CSS et stratégies de lutte contre ladite concurrence.
PREMIERE PARTIE :
L'organisation et le fonctionnement du marché
face la problématique de la fraude dans le secteur du sucre.
PREMIERE
PARTIE : L'organisation et le fonctionnement du
marché face
à la
problématique de la fraude dans le secteur du
sucre.
|
Une des grandes priorités que les nouvelles
autorités sénégalaises s'étaient fixées au
lendemain des indépendances c'était de relever le défi de
l'industrialisation en dotant le Sénégal d'entreprises viables,
compétitives et pérennes. En ce sens l'installation de la CSS a
contribué à concrétiser ce choix en favorisant la
création de richesses pour l'ensemble de l'économie nationale.
Toutefois l'existence d'une telle structure est aujourd'hui menacée par
la poussée grandissante de la fraude. D'où l'intérêt
de procéder à une analyse de la problématique de la fraude
au regard des mutations subies par les règles d'organisation et de
fonctionnement du marché du sucre.
Dans un premier temps l'accent sera mis sur la
détermination des règles de fonctionnement et d'organisation du
marché. En d'autres termes à une analyse du cadre institutionnel
et réglementaire du marché avant et après la
libéralisation.
Dans un second et dernier temps nous allons procéder
à une analyse de la problématique de la fraude sur le
marché du sucre à travers d'une part une description des
différentes formes de fraude rencontrées sur le marché et
d'autre part à démontrer dans quelle mesure la fraude se pose
avec acuité dans le secteur du sucre.
CHAPITRE I :
LE CADRE INSTITUTIONNEL ET
REGLEMENTAIRE DU MARCHE.
CHAPITRE
I : LE CADRE
INSTITUTIONNEL ET REGLEMENTAIRE DU MARCHE.
|
De prima bord, il convient de donner une définition de
la notion de marché. Celle-ci est considérée,
conformément à la note 4 de l'annexe N° 1 AU
RÈGLEMENT N°03/2002/CM/UEMOA Relative aux procédures
applicables aux ententes et abus de position dominante à
l'intérieur de l'UEMOA: notes interprétatives de certaines
notions comme le résultat de la combinaison entre le marché des
produits en cause et le marché géographique en cause.
Cette même note définit dispose que :
« Le marché de produits en cause comprend tous les produits
et/ou services que le consommateur considère comme interchangeables ou
substituables en raison de leurs caractéristiques, de leurs prix et de
l'usage auquel ils sont destinés » alors que « le
marché géographique en cause correspond quant à lui au
territoire sur lequel les entreprises concernées contribuent à
l'offre de produits et de services, qui présente des conditions de
concurrence suffisamment homogènes et qui peut être
distingué des territoires limitrophes par le fait notamment que les
conditions de concurrence y sont sensiblement
différentes. »
Deux étapes importantes ont marqué de
façon considérable et indélébile le processus de
création du marché du sucre au Sénégal.
La première était caractérisée
par une situation de monopole conféré à la CSS par les
textes réglementaires notamment la convention d'établissement du
29 juin 1970 modifiée à quatre reprises. Ces règles
caractérisées pour l'essentiel par leur caractère
protectionniste influaient considérablement sur la composition des
acteurs du marché et les modes de détermination du prix du sucre
sur le marché.
La deuxième étape repose pour l'essentiel sur
des textes particulièrement favorables à la concurrence. Ils
avaient vocation de favoriser la libre concurrence dans le secteur.
Enclenchée après la dévaluation17(*) du FCFA18(*) en 1994, la
libéralisation s'est poursuivie avec la mise en oeuvre du TEC de
l'UEMOA. Toutefois, malgré la libéralisation des importations et
du prix, les Etats ont mis en place un dispositif d'atténuation des
effets de cette nouvelle donne. C'est le cas notamment de la Taxe
Conjoncturelle à l'Importation (TCI).
Section I : le cadre juridique
du marché avant la libéralisation
Analyser le cadre juridique du marché avant la
libéralisation revient à apprécier les
caractéristiques des règles régissant le marché
puis déterminer leurs manifestations.
Ces règles sont constituées par celles de la
convention d'établissement signée entre l'Etat
sénégalais et la CSS. Elles subiront plusieurs modifications
avant la libéralisation.
Leurs incidences portaient de façon significative sur
la composition du marché et les modes de détermination du prix du
sucre.
Paragraphe
I : les caractéristiques de ces
règles
L'étude portera sur les caractéristiques de la
convention d'établissement du 29 juin 1970 d'une part et celles
relatives aux différents avenants modifiant ladite convention.
A :
les règles protectionnistes de la
convention d'établissement du 29 juin
1970.
La convention d'établissement du 29 juin 1970
passée entre le gouvernement du Sénégal et la CSS,
approuvée par le décret n° 70-898 du 20 juillet 1970 portant
agrément de la CSS en qualité d'entreprise agrée est le
texte de base qui organise les rapports entre les parties signataires à
ladite convention.
Comme l'indique l'art.1 al.1 du texte sus visé :
« l'objet de la présente convention est de définir les
conditions dans lesquelles la société devra créer et
gérer dans la zone de Richard-Toll une exploitation agro-industrielle
destinée à la culture de la canne à sucre ainsi
qu'à la fabrication du sucre, et d'autres produits
dérivés, à partir de la canne produite par ladite
société. »
La réalisation de ce projet d'un
« investissement de neuf milliards de franc CFA au moins »
vise d'une part à assurer l'équilibre extérieur de
l'économie et d'autre part augmenter « le
bénéfice social que l'économie du Sénégal
tire de cette région. » C'est pour cette raison qu'il a fallu
nécessairement définir un certain nombre de garanties juridiques
et d'avantages fiscaux conférés à la CSS pour favoriser
son développement. Aussi il était prévu qu'elle allait
bénéficier d'un bail emphytéotique d'une durée de
99 ans sur les terres qu'elle aura à exploiter.
C'est ce qui ressort des dispositions de l'art.1 al.2 de la
présente convention : « les terres sur les quelles
seront établies les installations agro-industrielles de la
société resteront la propriété de l'Etat. Ces
terres seront louées à bail emphytéotique, pendant une
durée de quatre-vingt-dix neuf ans à la société
pour la somme symbolique d'un franc (1). » Ce délai constitue
au regard des règles relatives au droit des sociétés la
durée légale de vie d'une société comme l'indique
à cet effet l'art.28 infine de l'acte uniforme de l'OHADA sur les
societés dispose : « la durée de la
société ne peut excéder quatre-vingt-dix neuf
ans. » Une gratuité dans l'approvisionnement et l'utilisation
des eaux du Sénégal 19(*)et du lac de Guiers20(*) lui est aussi accordée.
Les art.3, 4 et 5 traitent respectivement des délais de
réalisation du programme fixé entre l'Etat et la CSS, des
conditions d'interventions de la caisse de péréquation et de
celles relatives à l'utilisation des entreprises
sénégalaises dans le cadre de la réalisation du
programme.
La question de l'utilisation de la main d'oeuvre de
nationalité sénégalaise et des conditions d'emploi du
personnel est traitée par les arts. 6 et 7 de la même convention.
Les intérêts qui s'attache à ce dernier article est qu'il
met à la charge de la CSS l'obligation d'assurer à son personnel
« le bénéfice des avantages sociaux et sanitaires
prévus par la législation en vigueur. »
Par rapport aux garanties juridiques, cette convention
constitue la première base textuelle du monopole accordé
à la CSS aussi bien en ce qui concerne la production d'une part et les
importations du sucre nécessaire à la réalisation du
premier programme dont la durée maximum était de 7 ans. C'est
l'art.11 de la convention initiale qui prévoyait expressément
l'engagement de l'Etat à édicter des normes contraignantes et
restrictives de concurrence afin de mettre la CSS dans une situation de
monopole sur le marché national relativement à la production de
sucre. De même, cet article faisait état de la position prise par
l'Etat de n'accorder d'agrément à toute autre entreprise
potentiellement concurrente de la CSS.
Pour ce faire le gouvernement s'était engagé
à prendre toutes les mesures contraignantes devant permettre à la
société créée d'écouler sa production
destinée à assurer de façon prioritaire la couverture de
la consommation nationale. Cette même convention détermine les
modalités d'intervention de la caisse de péréquation et de
stabilisation des prix, de l'utilisation de la main-d'oeuvre
sénégalaise et l'emploi du personnel.
Outre les facilités accordées à la CSS
pour son approvisionnement en combustible conformément à l'art.14
qui dispose : « le gouvernement s'engage à
permettre à la société, d'obtenir à un prix tout au
plus égal au prix international, la totalité de ses besoins en
fuel-oil nécessaires à la réalisation de son
programme. », elle bénéficie de garanties
financières relatives :
- au mouvement de capitaux entre le Sénégal et
les pays de zone -franc,
- d'exonération sur les Bénéfices
Industries commerciaux (BIC).
- sur les patentes et annexes,
- sur la contribution foncière des
propriétés bâties et non bâties et taxes annexes.
Il faut rappeler que la convention étendait l'ensemble
de ces avantages fiscaux aux filiales créées pour participer
à la réalisation du programme confié à la
société mère.
Des exonérations sur les droits de douanes portant sur
« les matériels et matériaux ni produits, ni
fabriqués dans l'union douanière des Etats de l'Afrique de
l'ouest, importés et destinés à la réalisation des
investissements du programme agrée » sont accordées
à la société ou à ses filiales dés lors
qu'il est fait la preuve de « l'impossibilité de se procurer
des matériels et matériaux équivalents originaires du
Sénégal ou d'un pays de la zone franc. » Ce
régime douanier préférentiel a été
étendu à l'ensemble des pièces détachées
spécifiques dudit matériel.
L'annexe 1 de la convention prévu pour une durée
de 25 ans conformément aux dispositions de l'art.29 fixe les conditions
de détermination des prix de vente garantis à la CSS. Le
mécanisme de fixation repose sur une formule préfixée qui
permet de mettre en jeu le système de la péréquation. De
même l'annexe dispose que « les modalités de
révision de prix garanti seront définies par arrêté
du Ministre des Finances et des Affaires économiques. »
L'annexe 2 de la convention fixe la durée et taux des
amortissements applicables aux immobilisations de la société.
En définitive, on peut dire que cette convention
initiale comporte de nombreuses dispositions qui présentent un
caractère purement avantageux pour la CSS. Cela s'explique en son temps
par le fait qu'il fallait lui donner les moyens financiers juridiques
nécessaires à la réalisation du complexe sucrier de
RD-TOLL.
Du fait de l'évolution économique de la
situation de la CSS et de l'économie nationale, ce texte a subi
diverses modifications nécessaires à sa réadaptation.
B : Les
différentes modifications apportées au texte
initial
Quatre avenants ont été signés afin
d'apporter de nouvelles modifications à la convention
d'établissement du 29 Juin 1970. Il s'agit principalement des :
? Avenant N° 1 du 18 février 1972
modifiant la convention du 29 juin 1970 passé entre le gouvernement de
la République du Sénégal et la CSS.
Elle visait à modifier sur initiative de la CSS
certaines dispositions relatives aux :
- Conditions d'utilisation des ressources en eaux pour
ses besoins.
La gratuité était certes maintenue mais l'emploi
de cette eau est mieux réglementé avec la clé de
répartition suivante : 23000 m3 pour le lac de Guiers et la
Taouey21(*) et 8000 m3
à partir du fleuve.
L'art.1 de l'avenant apportait des aménagements
relatifs au délai de réalisation du programme défini par
la CSS et l'Etat. Des dispositions des arts.3 al.1, 2 et 3 ont modifié
les délais de réalisation du programme pour les proroger.
Toutefois en ce qui concerne les conditions
d'approvisionnement sur le marché international du sucre
nécessaire à la réalisation des objectifs assignés,
les dispositions restaient maintenues.
L'art.2 de l'avenant abrogeait l'art.14 du texte initial.
Outre les engagements pris par le gouvernement pour faciliter un bon
approvisionnement en combustible sur le marché international, celui-ci
accorde à la société de nouvelles exonérations
totales sur tous les droits et taxes portant sur ces produits sur une
période de 10 ans.
- Aussi, l'Etat accorde de nouveaux privilèges
portant sur les impôts sur BIC conformément aux art.3, 4, et 5 de
cet avenant.
Les modifications apportées à l'art.19
étendaient le champ d'application de ces exonérations. En lieu et
place des « sociétés ou entreprises
d'études ou d'engineering » le texte actuel emploie les termes
suivantes « les sociétés ainsi que les entreprises
de toutes natures ». Il étaient aussi ajouté à
l'art.19 infine qu' « elles seront en conséquence
dispensées de produire aux services des contributions les
déclarations fiscales correspondantes » à la seule
condition qu' « elle n'exerceront aucune autre activité
au Sénégal ». Cette extension avait pour
conséquence logique de modifier les dispositions des art.24 portant sur
le droit fiscal d'entrée, taxe forfaitaire représentative et taxe
de statistique et art. 25 portant sur le chiffre d'affaire. Toutes ces
exonérations ou privilèges fiscaux seront accordés
à la société, ses filiales ou toutes autres
sociétés et entreprises visées à l'art.19 de la
convention initiale.
- L'art.6 de l'avenant abroge l'annexe 1, partie
intégrante de la convention, relative à la fixation des prix de
vente garantis à la CSS. Des modifications étaient aussi
apportées au mode de calcul du prix du sucre en pains. Il en
était de même pour la formule d'indexation des prix garantis.
L'annexe 2 relative à la durée et au taux d'amortissement n'avait
subit aucune modification.
? Avenant N° 2 du 07 décembre 1984 à
la convention d'établissement de la CSS passé le 29 juin 1970 et
modifié le 18 février 1972.
La signature de cet avenant d'une durée de 10 ans
approuvé par le décret 84- 1450 du 7 décembre 1984 entrait
dans le cadre d'une adaptation des clauses conventionnelles de 1970 devenue
nécessaire avec l'évolution de la situation économique
générale et l'arrivée de la CSS à un niveau de
production performant. A travers ces nouvelles dispositions plus
réstrictives que les textes antérieurs, le gouvernement visait
« une meilleure connaissance et dune maîtrise des prix de
revient ». Ainsi, la CSS s'était vue soumise à
l'exécution de nouvelles clauses contraignantes.
En ce qui concerne le maintien du monopole, elle implique pour
la CSS la satisfaction totale de la demande nationale à partir du sucre
raffiné issu de sa production. Celle-ci conditionne toute exportation
future. C'est ce qui ressort des dispositions de l'a. 1 al. 1 et 2
modifiés « il ne peut être exporté
qu'après satisfaction de la demande nationale ».
Quant aux droits et obligations, ils voyaient leur champ
d'application mieux réglementé. L'art.2 al.3 exigeait leur
application uniquement pour les filiales de la société
créées « exclusivement pour la réalisation et
l'exploitation directe de son programme et des activités
connexes ».
L'avenant apportait aussi de nouvelles modifications à
l'art.3 relatif au « délai de réalisation »
du programme assigné à la CSS pour la période allant
jusqu'au 31 juillet 1986 tel qu'indiqué à son annexe 1.
L'exclusivité dans les importations de sucre roux
restait maintenue. Toutefois, les parties étaient convenues qu'
« à compter du 1er août 1986, la société
ne sera plus autoriser à importer du sucre roux pour atteindre lesdits
tonnages, sauf en cas de force majeure . »
A la lecture de ces nouvelles dispositions, on constate que le
gouvernement avait entendu restreindre les possibilités d'importations
offertes jadis à la CSS. Cette dernière s'est engagée
auprès des pouvoirs publics à couvrir la totalité de la
consommation nationale à partir de sa canne. Il faut aussi
préciser que même si l'interdiction de recourir à des
importations n'est pas absolue et qu'en cas de force majeure la CSS devait en
recourir pour respecter ses engagements, il reste que cette dernière
possibilité est rigoureusement réglementée. Le pouvoir
d'appréciation du cas de force majeure invoqué restant
souverainement dévolu aux services gouvernementaux chargés du
commerce.
Des modifications majeures sont apportées à
l'art.11 notamment le prix. L'ancien système est remplacé par un
nouveau mécanisme de fixation.
Contrairement à la législation
antérieure, cet avenant intègre à travers l'art.11 (bis)
ajouté à la convention, les sous-produits industriels. Leurs
achats, commercialisation et utilisation entraient désormais dans les
rapports entre la CSS et l'Etat à travers la Caisse de
Péréquation et de Stabilisation des Prix (CPSP)22(*).
Le caractère restrictif des dispositions de cet avenant
apparaît aussi dans le fait que désormais le gouvernement
n'accorde aucune exonération sur les droits d'entrée sur le
diesel destiné aux voitures de tourisme. Cette disposition s'applique
aussi bien à la société qu'à ses filiales.
Les arts. 8, 9, 10, 11, 12, 13 et 14 venaient apporter des
précisions supplémentaires sur la durée de validité
de certains avantages et privilèges accordés à la CSS. A
ce titre, les art.15 et 16 venaient modifier la durée des effets de la
convention fixée au 31 juillet 2000. Ces modifications portaient aussi
sur les modalités de sa révision.
L'art.17 intégrait à la convention une nouvelle
annexe relative au « programme de mise en production pour la
consommation nationale.»
? Avenant N°3 du 22 Mai 1987 à la
convention d'établissement de la CSS passé le 29 juin 1970 et
modifié les 18 février 1972 et 29 novembre 1984.
Il faut d'emblée préciser que la signature de
cet avenant le 22 mai 1987 entre la République du Sénégal
et la CSS et approuvé par la décret n° 87- 679 du 22 mai
1987 a été précédée par la signature d'un
protocole d'accord le 3 mars de la même année.
Il s'agissait dans le cadre de cet accord préliminaire
signé par la CSS et ses différents partenaires à savoir
l'Etat et la Caisse Centrale de Coopération Economique (CCCE)23(*) de définir le projet
relatif à la restructuration financière de la CSS. Les
différentes réunions tenues à Dakar par les
différents acteurs les 11, 12 et 13 février 1987 ont abouti
à un certain nombre de mesures qui feront l'objet de cet avenant.
Au terme de celui-ci et conformément aux dispositions
arrêtées par les parties lors de la signature du protocole
d'accord, de nouvelles modifications ont été apportées
à l'art.3 de la convention d'établissement : d'une part, la
société s'engageait à satisfaire à partir de la
canne locale la totalité de la consommation nationale avant le 1
août 1987, d'autre part elle conservait le monopole sur l'importation du
sucre roux et du sucre blanc.
Dans ces relations avec l'administration de nouvelles charges
pesaient sur la CSS notamment en ce qui concérne la livraison de
renseignement statistique sur sa situation générale :
production, main-d'oeuvre et utilisation de produits.
Au plan comptable, conformément au plan de
restructuration financière, dont elle fait l'objet, la CSS était
soumise à l'obligation de livraison annuelle de son bilan comptable. Le
contrôle exercé sur elle étant plus rigoureux.
L'abandon du système de la péréquation
était consacré par les modifications apportées à
l'art.11 de la convention en ce sens que ces dispositions « cesseront
de s'appliquer aux ventes opérées à partir du 1 novembre
1987 ».
Aussi, « ces ventes seront facturées au prix
fixé par l'état selon les modalités prévues
à l'annexe 3 qui fait partie intégrante de la
convention ». C'est ce qui ressort de la lecture de l'art. 3 al. 1,
2°. Cette annexe fixe le prix de vente à partir du 1 novembre
1987.
L'art.5 de l'avenant proroge les échéances
prévues les 31 juillet et les rapporte au 31 octobre suivant la
même année. L'article 6 vient modifier les dispositions de
l'art.31 de la convention, relative à l'arbitrage.
? Avenant N° 4 du 1er décembre
1992 à la convention d'établissement passée par le
gouvernement du Sénégal et la CSS et modifié les 18
février 1972, 29 novembre 1984 et 22 mai 1987.
A travers la signature de cet avenant, les parties ont voulu
harmoniser l'ensemble des dispositions antérieures et nouvelles de la
convention dont la durée a été prorogée jusqu'au 31
octobre 2000 et celle de certains de ses effets au 31 octobre 2005.
En effet, avec la création de l'OMVS24(*) (Organisation pour la Mise en
Valeur du fleuve Sénégal), le gouvernement a été
dessaisie de tout pouvoir en matière de gestion des eaux du fleuve
Sénégal au profit de la nouvelle entité
créée. La CSS perdit alors un certain nombre d'avantages relatifs
à la gratuité du pompage des eaux du fleuve et du lac de Guiers.
L'utilisation de cette eau pour les besoins de son activité agricole
étant désormais subordonnée au paiement à l'office
de l'OMVS d'une taxe sous la forme de redevance. Pour compenser ces nouvelles
charges, le gouvernement a senti la nécessité de consentir de
nouveaux allègements fiscaux à la CSS. Dans ce cadre, l'Etat
s'engageait à ce que les exonérations fiscales partielles sur les
patentes et taxes annexes soient égales au montant de la redevance
acquittée la même année par la société. Si
les sommes effectivement versées sont supérieures au total des
allègements fiscaux, de nouvelles exonérations seraient
accordées à la CSS pour compenser ce différentiel
intervenu lors du paiement de la redevance due à l'office.
Tel est l'objet principal de cet avenant n° 4
signé le 1 décembre 1992 et publié au Journal Officiel de
la République du Sénégal (JORS) du 19 juin 1993.
Contrairement aux avenants 2 et3, il présentait un
caractère favorable à la CSS dans la mesure où il venait
compenser la pérte d'un certain nombre d'avantages accordés
auparavant à la CSS par l'Etat.
Ces règles ont des incidences sur le marché.
Paragraphe II : Leurs
maniféstations sur le marché
Leurs manifestations se perçoivent à travers
l'étude de la composition du marché et des modes de
détermination du prix du sucre sur le marché avant la
libéralisation.
A :
Relativement à la composition des acteurs du
marché
La période d'avant libéralisation du
marché du sucre se caractérisait par une situation de monopole.
Ce monopole de nature légale était conféré à
la CSS par l'Etat du Sénégal à travers la signature de la
convention d'établissement de 1970 et quatre autres avenants
respectivement de 1972, 1984, 1987 et 1992 venus modifier certaines
dispositions du texte initial.
Comme corollaire de cette situation, la CSS constituait
l'acteur principal du marché qu'elle dominait. Cette position
privilégiée lui offrait un double avantage : d'une part,
elle détenait le monopole de la culture de la canne à sucre et de
la production du sucre raffiné issu de cette activité, d'autre
part la société détenait un monopole sur les importations
lorsque celles-ci sont nécessaires à, la réalisation de
son programme de couverture de l'ensemble de la consommation locale.
Relativement à la production, il faut dire que l'Etat
du Sénégal avait pris divers engagements auprès de la CSS.
Il visait pour l'essentiel à interdire l'arrivée d'un concurrent
nouveau à ce titre, l'art. 11 infine de la convention de 1970 est
très explicite « le gouvernement s'engage de même
à n'accorder d'agréments à une autre entreprise similaire
que si la situation du marché autorise une installation nouvelle sans
porter atteinte à la rentabilité de la Compagnie Sucrière
Sénégalaise ».
Jusqu'en 1995, début de la période de la
libéralisation, cette disposition n'avait jamais fait l'objet d'une
modification. Bien que l'article mentionne la possibilité d'accorder un
agrément à une nouvelle entreprise, à la seule condition
suffisante et nécessaire que la situation du marché l'exige, le
constat est que la CSS constituait le seul producteur de sucre au
Sénégal. L'Etat s'était aussi engagé à lui
faciliter l'écoulement de sa production sur le marché
intérieur notamment par un renforcement de la législation
douanière et celle répressive afin de lutter contre la fraude.
Cette immixtion très forte de l'Etat dans la régulation du
marché constituait le principal obstacle à une
multiplicité des sources locales d'approvisionnement en sucre. En
d'autres termes cet intérventionnisme ne favorisait pas l'arrivée
de nouveaux acteurs pouvant concurrencer directement la CSS. Le marché
du sucre était placé sous le signe de la concurrence interdite.
Il y'a concurrence intérdite lorsqu'une personne est
privée d'exercer telle activité proféssionnélle
d'après le Pr. AZEMA25(*). Cette interdiction ne peut résulter que d'une
loi. Des sanctions civiles et pénales pèsent sur les personnes
qui violeraient ces dispositions légales.
Relativement aux importations, le gouvernement avait aussi
accordé un monopole sur les importations du sucre. Des garanties ont
été prises pour favoriser les approvisionnements que la
société serait amenée à faire sur le marché
international ou mondial du sucre. Elle devait y recourir pour combler le
réste de la demande nationale. Toutefois les modifications
apportées à l'av. 2 de la convention ont mieux encadré et
limité cette opportunité.
En effet, l'art.3 al.3 modifié disposait
« à compter du 1 août 1986, la société ne
sera plus autorisée à importer du sucre roux pour atteindre
lesdits tonnages hors le cas de force majeure ». L'al. 4 du
même article ajoute « pendant la durée de la
présente convention, la société sera seule
autorisée à importer les tonnages complémentaires au sucre
en provenance de RICHARD-TOLL... »
Il faut dire que ces importations étaient soumises au
régime de la péréquation. Les restrictions
découlaient en réalité de l'arrivée en pleine
capacité des unités de production de la CSS. Ces mêmes
articles consacraient l'interdiction faite à toute autre personne de
recourir à des d'importations sur le sucre. Le monopole de la CSS sur
les importations du sucre roux ou du sucre blanc sera maintenu par les avenants
n° 3 et 4 sur la libéralisation.
En résumé on peut dire que le marché
d'avant libéralisation était caractérisé par une
domination absolue de la CSS. Celle-ci se manifestait par l'absence de
concurrents légalement agrées tant au niveau de la production
qu'au niveau du recours aux importations complémentaires de sucre. Cette
situation était la conséquence directe des règles
d'organisation du marché qui, en même temps qu'elle limitait le
nombre d'acteurs, fixait les modes de détermination du prix du sucre sur
le marché
B :
Relativement aux modes détermination du prix
Les mêmes règles qui régissaient
l'architecture et la composition du marché avaient par ailleurs vocation
à fixer les modes de détermination du prix du sucre. Les
relations financières entre l'Etat et la CSS étaient
encadrées par la CPSP.
Le prix du sucre était garanti à la CSS. Ce prix
garanti ou de référence faisait l'objet d'une
réévaluation annuelle selon une formule convenue entre les
parties.
Elle était de
Mo÷Moo×0,60+1g÷Igo×0,10+ipi ÷Ipio×0,30
conformément à l'annexe 1 de la convention initiale. La prise
d'effet de cette formule ne devait intervenir que pour une variation
supérieure à 10%. Et dans ce cas de figure, un
arrêté du ministre des finances et des affaires économiques
d'alors devait fixer les modalités de cette révision. Cette
formule n'était pas inchangeable et devait dans ce cas subir des
modifications en fonction de l'évolution de l'environnement
économique de la CSS et de l'économie nationale. L'indexation des
prix garantis devait subir des variations.
Les premières modifications étaient intervenues
avec l'avenant n°2 de la convention. L'ancienne formule adoptée
lors de la signature de la convention de 1970 était remplacée par
un système ou mécanisme à double niveau : la
première variante était relative au prix de vente des produits
raffinés d'origine sénégalaise. Le prix était
garanti par le gouvernement sénégalais sur le marché local
du sucre alors que la seconde variante concerne le différentiel entre le
prix de vente et d'achat pour les produits raffinés à partir du
sucre importé. A ce titre, l'intervention de la CPSP est
déterminante dans la mesure ou l'art.11 al.1 modifié disposait
que « la CSS versera à la caisse de
péréquation ou de stabilisation des prix ou recevra d'elle
selon les cas une péréquation calculée par rapport aux
prix de vente du sucre et en outre, pour les produits d'origines
extérieures, par rapport au coût d'achat réel rendu
entrepôt de la société à Dakar.»
Les prix garantis et différentiels constituaient les
prix de référence et comprenaient un coût de production et
rémunération des capitaux. Ils étaient calculés
à la tonne et faisait, conformément à l'annexe 2 de
l'avenant n°2 du 7 décembre 1994 à la convention du 29 juin
1970, l'objet d'une réévaluation devant intervenir au 1er
août de chaque année. Limitée à la composante main
d'oeuvre du coût de production, celle-ci devait avoir lieu à
chaque fois que le prix de la main -d'oeuvre calculée sur la base du
SMIG et des charges sociales et fiscales enregistrait une hausse d'au moins 10%
par rapport à la précédente réévaluation.
L'avenant n°3 à la convention
d'établissement venait mettre fin au système de la
péréquation basée sur un mécanisme de compensation
des dettes mutuelles nées des relations entre les parties. Elle
était effective depuis le 1er novembre 1989. En lieu et place de
l'ancien système, un prix homologué allait entrer en vigueur. Il
devait faire l'objet d'une révision périodique selon la formule
suivante : P=Po×I×Y.
Po et P représentait respectivement le prix à
réévaluer et le prix réévalué. Le terme Y
renvoie correspond à la neutralisation partielle temporaire de
l'indexation à partir du terme I égal à :
aA/Ao+bB/Bo+cC/Co+dD/Do+eE/Eo.
Les lettres A et B représentent
réspèctivement le prix de la main d'oeuvre et le prix
facturé hors taxe du gasoil, au 1er juin précédant la
réévaluation alors que C et D renvoient respectivement à
l'indice des biens intermédiaires et à l'indice des prix à
la consommation familiale.
E/Eo est égal à 1/3 K÷Ko+2/3 L÷Lo
avec K et L représentant réspèctivement la somme de
l'invérse des coefficient de réévaluation et l'indice
provision pour le renouvellement du matériel fixé par le ministre
de l'économie et des finances pour la même année tandis que
Ao, Bo, Co, Do, Ko, Lo représentent les mêmes variables au
même dates un an au paravent. Pour 1989, l'antériorité sera
de deux ans. Pour les coefficients a, b, c, d, e, la somme est de 1.
Fixé à 0,98, il constituait une contrepartie
normale de la situation de monopole dans la mesure ou il introduit pour la
période 19989-1992 une variation correspondant à la part devant
être répercutée aux consommateurs des gains de
productivité du plan de restructuration 19987-1991. La
réévaluation des prix de ventes intervenait à cet effet
les 1er novembre de chaque année. Ce mode de calcul restera
appliqué jusqu'à ce qu'intervienne la libéralisation.
On le voit donc, la période d'avant
libéralisation était caractérisée par un dirigisme
économique propre aux Etats ayant adoptés le système
socialiste comme modèle de développement économique.
L'analyse des différentes modes de détermination des prix du
sucre montre l'absence de consécration du principe de la liberté
des prix. La fixation du prix par les pouvoirs publics et non par le libre jeu
du marché est une conséquence dirècte des règles
contraignantes qui ont conférés le monopole à la CSS.
En résumé, il faut dire que le cadre juridique
du marché avant la libéralisation n'était pas de nature
à favoriser une concurrence dans le secteur du sucre. Les textes ont
octroyé à la CSS un monopole sur la production et les
importations. A cette situation, s'oppose une nouvelle phase
caractérisée par l'ouverture du secteur à la concurrence.
Il s'agit d'étudier le cadre juridique du marché après la
libéralisation.
Section II : le cadre
juridique du marché après la libéralisation
L'analyse du cadre juridique du marché portera sur deux
volets : le premier sur l'étude des nouvelles
caractéristiques des règles régissant le marché
notamment celles du protocole d'accord de 1994 et des règles relatives
à la mise en ouvre du TEC de l'UEMOA ; le second volet concernera
la détermination des manifestations de ces nouvelles règles
notamment en ce qui concerne la nouvelle recomposition des acteurs du
marché et l'encadrement des règles de fixation du prix du sucre
par le mécanisme de la TCI.
Paragraphe 1 : Les
nouvelles caractéristiques de ces règles
Il s'agit d'éplucher les caractéristiques des
dispositions du protocole d'accord portant réaménagement de la
convention d'établissement de la css d'une part et de celles des
règles portant mise en ouvre du TEC dans l'Union.
A : Le protocole d'accord de 1994, premier
jalon vers la libéralisation du marché
au niveau national.
La signature de ce protocole d'accord portant
réaménagement des dispositions de la convention entre la
République du Sénégal et la CSS approuvée par le
décret du 30 janvier 1995 entre dans le cadre d'une restructuration
globale de l'économie nationale notamment la soumission au libre jeu de
la concurrence du marché de plusieurs entreprises telles que les
Industries Chimiques du Sénégal (ICS), la Société
pour le Développement des Fibres Textiles (SODEFITEX), la
Société des Textiles de Kaolack (SOTEXKA) et la CSS. Aussi, elle
entre dans le cadre d'une meilleure application de la Lettre de Politique de
Développement Agricole (LPDA) du gouvernement datant d'août
1994.
Relativement à la CSS, ce protocole visait
« la suppréssion de toute forme de protection administrative
constituant une entrave à la concurrence, une atteinte au pouvoir
d'achat du consommateur et un frein à la
compétitivité ». C'est ce que soulignait dans son
exposé des motifs le décret du 30 novembre 1994 qui consacra
ainsi définitivement la libéralisation dans le secteur du
sucre.
La nécessité de sauvegarder la production
nationale contre les pratiques anticoncurrentielles et l'avènement de la
dévaluation du FCFA en 1994 ont conduit les autorités nationales
à vouloir assainir l'environnement économique du pays afin
d'atteindre une croissance économique soutenue et durable. A cet effet,
diverses dispositions et mesures de caractère libéral ont
été prises pour atteindre les objectifs que se sont
assignés les pouvoirs publics. Dans ce protocole, il est
expressément consacré les points suivants :
- une libéralisation de la production du sucre en ce
sens que le monopole sur cette production accordée par la convention de
1970 en son art. 11 infine a été supprimé par l'art.1 al 1
du protocole d'accord qui dispose : « les dispositions de
l'art.11 infine de la convention du 29 juin 1970 sus-visée sont
abrogées. Le monopole de la production du sucre prévu par la
convention sus-visée est ainsi supprimé.»
Néanmoins, cette libéralisation reste
encadrée dans la mesure où l'éventuelle installation des
nouvelles unités de production industrielle est subordonnée au
respect par le nouveau promoteur des différentes phases du processus de
fabrication du sucre raffiné conformément aux prescriptions
posées à l'art.1 infine du protocole :
« toutefois, aucune nouvelle entreprise industrielle ne sera
autorisée à s'implanter dans la filière sucre si elle
n'assure au Sénégal, pour les produits écoulés sur
le marché national le processus industriel depuis la transformation de
la matière végétale brute(canne,betterave ou autre)
jusqu'au stade de son intervention. »
- une libéralisation des importations est aussi
affirmée. La CSS perd le monopole qui lui avait été
accordé relativement au recours à des importations de sucre
nécessaire à la réalisation de son programme. Mais il
reste que « l'industrie sénégalaise du sucre existante
ou à créer sera protégée contre les pratiques
sanctionnées par la loi n°94-68 du 22 août 199426(*) sus-visée, par
l'adoption d'une valeur de référence considérée
comme normale au sens de la loi du 22 août 1994 sus-visée.»
d'après l'art.2, al. 2 du même protocole d'accord. Cette valeur
de référence qui était de 270 FCFA /Kg sur la base de
1FF=100 FCFA de sucre cristallisé au 1er novembre 1994 devait
variée à partir de 1996 en fonction des indices figurant à
l'annexe de ce protocole
Cette loi constituait la base de lutte contre la concurrence
déloyale et les ententes illicites qui, à l'intérieur du
territoire national, pourraient affecter l'industrie sénégalaise.
Elle vise à sauvegarder la production nationale fortement menacée
par la concurrence internationale. Comme mesure d'accompagnement de cette
libéralisation du processus déclenché, il est
stipulé qu'il sera déterminé une valeur de
référence dont le différentiel avec le prix d'importation
sera compensé par une péréquation perçue en
matière de douanes.
Ainsi, les importations faites par la CSS sont donc soumises
à une fiscalité de droit commun sur les intrants pour le sucre
roux : « le sucre importe par la CSS sera soumis à
la fiscalité de droit commun sur les intrants. La marge
dégagée entre le prix de vente et le coût sera
versée à l'Etat du Sénégal. »
d'après l'art.6, al.1 du protocole.
Le sucre blanc est aussi soumis au droit
commun : « les importations de sucre blanc seront soumis
aux dispositions de l'art.2 du présent protocole et à la
fiscalité de droit commun. » c'est le sens de l'art. 6,
infine.
- Ce protocole d'accord en son art. 3 abrogea aussi les
dispositions de l'art.11 al.1 de la convention initiale et consacra
désormais le principe de la liberté du prix de vente du
sucre : « les dispositions de l'article 11, alinéa 1 de
la convention du 29 juin 1970 modifiées les 29 novembre1984 et 22 mai
1987 sont abrogées. En conséquence, les prix de vente du sucre
sont libres. Ceux de la CSS sont plafonnés à leur niveau
actuel jusqu'au 31 octobre 1996.»
Ainsi, la détermination du prix du sucre
commercialisé sur le marché était soumise au régime
de la compétition entre les différents acteurs du marché
qui composent la filière.
- du point de vue fiscal, la CSS perd d'une part les
avantages liés la redevance pour l'utilisation des eaux du
fleuve : « le paragraphe 19 portant sur la gratuité
de l'utilisation des eaux du fleuve Sénégal dans l'exposé
des motifs de la convention du 29 juin 1970 ainsi que des dispositions de
l'article 2 de l'avenant n°4 du 1er décembre 1992
sus-visé sont abrogés à partir du premier janvier
1995. » (art.4) et d'autre part ceux concernant les impôts sur
les BIC : « les dispositions de l'article 19 de la
convention du 29 juin 1970 modifiées le 18 février 1972 sont
abrogées. » (art. 5, al.1).
C'était pour compenser les conséquences et
pertes d'avantages intervenues avec l'entrée en vigueur de ces nouvelles
dispositions libérales et contraignantes que l'état, avait
entendu accorder à la CSS la possibilité de diversifier ses
activités en exploitant les terres mise à sa disposition à
d'autres fins que la culture de la canne à sucre.
En effet, l'art.8 de ce protocole soulignait
qu' « en raison de la libéralisation de la production et
dans les perspectives d'une évolution consécutive de ses parts du
marché du sucre, la CSS pourra exploiter les terres qu'elle
détient, à d'autres fins que la culture de la canne à
sucre et autres produits dérivés ».
Concernant les effets de la convention d'établissement
le protocole d'établissement maintient sa durée de vie jusqu'au
31 octobre 2000 mais ramène la date de certaines exonérations et
avantages au 31 octobre 2003.
En définitive, ce protocole d'accord constitue à
bien des égards le premier jalon posé pour une
libéralisation du secteur du sucre au Sénégal. D'autres
dispositions prises dans le cadre de l'UEMOA notamment avec la mise en place
du TEC viendront régir le marché national et communautaire.
B : Extension du
processus par la mise en oeuvre du TEC
Pour mieux atténuer les conséquences nées
de la dévaluation du FCFA et faire face aux exigences du nouvel ordre
économique mondial, les états membres de l'UEMOA ont senti la
nécessité de procéder à une refonte de leurs
économies par la fédération et l'harmonisation des
législations nationales. C'est dans cette perspective que s'inscrit la
mise en oeuvre du dispositif tarifaire de l'UEMOA.
Elle repose sur le TEC adopté par le règlement
n° 2/97/CM/UEMOA du 28 novembre 1997 portant adoption du tarif
extérieur commun de l'UEMOA.
A coté d'une Nomenclature Tarifaire Statistique (NTS),
on note un tableau des droits et taxes auquel s'ajoute la Taxe sur la Valeur
Ajoutée (TVA)27(*)
au taux unique de 18% pour le Sénégal sauf pour les produits
exonérés.
L'art.4 du règlement dispose : « la NTS
de l'union est basée sur la NTS de la Communauté Economique des
Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO)28(*).»
En ce qui concerne les droits et taxes, il faut rappeler que
l'art.5 du même règlement dispose : « outre le
prélèvement communautaire de solidarité, le tableau des
droits et taxes applicables aux produits importés comprend le droit de
douane, la redevance statistique et, le cas échéant une taxe
conjoncturelle à l'importation et une taxe dégressive de
protection ».
Dans le cadre de la protection du sucre local, la TCI
constitue le mécanisme complémentaire de protection de la
filière mais il faudra, pour mieux comprendre son application, exposer
le dispositif de taxation du tarif extérieur commun afin de pouvoir
mieux la cernée.
Relativement aux droits et taxes certains ont un
caractère permanent d'autres sont complémentaires.
Ont un caractère permanent : le
Prélèvement Communautaire de Solidarité (PCS), le Droits
de Douane (DD) et la Redevance Statistique (RS).
- Le PCS : son taux est fixé à 1% et
s'applique à l'ensemble des marchandises importées de pays tiers
par les états membres. Son assiette est la valeur en douane des
marchandises originaires de ces pays et mises à la consommation à
l'exception des privilèges diplomatiques, produits pétroliers
etc. On peut aussi citer le cas du prélèvement communautaire de
la CEDEAO qui se divise comme suit : 0,5% pour les produits non
originaires de cet espace et 0,2 % pour les produits importés par voie
maritime au profit du Conseil Sénégalais des Chargeurs
(COSEC).29(*)
- La RS : au terme de l'art.8 du règlement
02/97/CM/UEMOA : « le taux de redevance statistique est
fixé à 1% pour les produits exonérés ou
non. » Cet article modifié par l'art.1 du règlement
n° 2/2000/CM/UEMOA modifiant et complétant l'art.8
précité dispose : « Le taux de la Redevance
Statistique est fixé à 1%. Sont exonérés de la
Redevance Statistique : - les biens acquis dans le cadre de
financements accordés par des partenaires étrangers, sous
réserve d'une clause expresse exonératoire de tout
prélèvement fiscal ou parafiscal ; -les biens importés au
titre des privilèges diplomatiques ; » Elle a pour fonction de
remplacer le timbre douanier.
- Le DD : depuis le 1 janvier 2000 les taux du droit de
douane ont été fixés selon une catégorisation des
produits conformément à l'article 7 du règlement portant
adoption du tarif extérieur commun. Sont comprises dans la
catégorie zéro : les médicaments et livres, dans la
catégorie 1 les biens de première nécessité, les
matières premières de base, les biens d'équipements, et
les intrants spécifiques. Dans la catégorie 2 on retrouve les
autres intrants et produis intermédiaires. Enfin, dans la
catégorie 3 on pourrait citer les biens de consommation finale et touts
les autres biens non repris ailleurs.
L'assiette de ces droits et prélèvements
supplémentaires constitue la valeur en douane. Cette fiscalité
pour les droits et taxes fixés à l'intérieur de l'espace
UEMOA se décline comme suit :
PRODUITS
|
DD
|
PCS
|
RS
|
TOTAL
|
CATEGORIE 0
|
0%
|
1%
|
1%
|
2%
|
CATEGORIE 1
|
5%
|
1%
|
1%
|
7%
|
CATEGORIE 2
|
10%
|
1%
|
1%
|
12%
|
CATEGORIE 3
|
20%
|
1%
|
1%
|
22%
|
Sont des droits et taxes à caractère
complémentaire : la Taxe Dégressive de Protection (TDP) et
la TCI. Pour cette dernière, une étude particulière lui
sera consacrée au niveau de la partie consacrée aux
manifestations de ces règles sur le marché local dans la mesure
où c'est à ce niveau qu'elle entre en jeu.
Concernant la TDP, elle visait à compenser
temporairement de façon dégressive la baisse de la protection
tarifaire de certaines entreprises à cause de la mise en place du TEC.
Elle s'appliquait au produit relevant de l'industrie ou l'agroalimentaire.
Etabli en 1994, elle devait s'expirer en principe le 31 décembre 2002
mais avait été reconduite jusqu'au 31 décembre 2003. Son
taux était fixé à 10% pour les produits
nécessitant une protection complémentaire faible et 20% pour ceux
nécessitant une protection plus importante. Il faut noter que
l'application de la TDP n'a pas toujours été effective au niveau
des Etats.
Il est à noter l'existence d'une Valeur de
Référence (VR) qui est l'unique mesure spécifique que la
commission a envisagé de mettre en place. Adoptée par le
règlement N°04/99/CM/UEMOA du 25 Mars 1999 portant adoption d'un
système d'évaluation en douane, la VR au sein de l'UEMOA est une
mesure qui permet de lutter contre la fraude, les pratiques commerciales
illicites et de protéger les activités de production. Elle vise
les mêmes objectifs que la TCI. D'où le caractère non
cumulatif de ces deux mesures. Elle est actualisée au moins une fois
par an.
La dévaluation a facilité l'émergence
d'un cadre économique nouveau caractérisé par de nouvelles
règles à vocation libéralisatrices. Celle-ci se
manifestant sur le marché local.
Paragraphe 2 : Leurs
manifestations sur le marché local
Ces règles consacrent d'une part la fin du monopole qui
a eu pour effet de favoriser l'arrivée de nouveau acteurs sur le
marché local et prévoit d'autre part l'encadrement du processus
de libéralisation par la mise en oeuvre de la TCI comme mécanisme
de régulation du prix du sucre importé.
A : Fin du monopole par l'intervention de
nouveaux acteurs sur le marché
Le protocole d'accord portant réaménagement des
dispositions de la convention entre la République du
Sénégal et la CSS a posé les premiers jalons de la
libéralisation du marché du sucre. Comme
précédemment souligné, il consacre la fin du monopole sur
la production d'une part et celle sur les importations de sucre sur le
marché international d'autre part.
Sur le marché local, la suppression du monopole de la
production qui avait été consacré à l'article 11 de
la convention du 29 juin 1970 par l'article 1er du protocole
d'accord n'a pas permis l'arrivée d'un nouveau producteur et
l'installation d'une nouvelle unité industrielle de production du sucre
sur le marché sénégalais. La CSS reste pour le moment la
seule société implantée au Sénégal. Elle se
charge de cultiver la canne à sucre nécessaire à la
production du sucre raffiné qu'elle commercialise uniquement sur le
marché local.
A la concurrence interdite et au monopole légal s'est
substitué un monopole de fait. Le marché est aujourd'hui
caractérisé par une concurrence limitée par la puissance
irrésistible de la CSS. Celle-ci domine à bien des égards
le marché national de la production du sucre.
A l'inverse, la suppression du monopole sur les importations
de sucre raffiné a permis l'arrivée de nouveaux acteurs sur le
marché. De nombreux commerçants du secteur informel s'active dans
la filière. Ils sont en général affiliés à
des structures syndicales telles que l'UNACOIS30(*) (Union Nationale des Commerçants et
Industriels du Sénégal) par le biais de qui ils dénoncent
ce qu'ils appellent un monopole déguisé dont jouirait la CSS. A
cet effet auprès des autorités nationales une
libéralisation encore plus poussée dans le secteur. Parmi ses
importateurs certains ont été cités dans une affaire
d'importation frauduleuse de sucre31(*).
Conséquence de cette libéralisation des
importations, le marché local est aujourd'hui inondé de nouveaux
produits autres que ceux proposés par la CSS. C'est le cas par exemple
des boîtes de sucre désignées sous l'appellation de Bejing
ou Saint-Louis importé de la France ou ORIGNY : C'est La Vie.
Fait novateur, on retrouve sur le marché local des
sachets de 200 g de sucre conditionné à Dakar par la
société UNIPARCO appelé Sucre à la menthe le
GOURMET vendu à 100 Fcfa.
En résumé, l'abrogation des dispositions de
l'article 11 al.1 de la convention du 29 juin 1970 modifié le 29
novembre 1984 et le 22 mai 1987 a favorisé la concurrence dans le
secteur relativement aux acteurs et à la fixation des prix de vente du
sucre. Mais pour assurer aux producteurs nationaux une
compétitivité de leurs produits, par rapport au sucre
importé, les Etats membres de l'UEMOA ont entendu mieux encadrer le
processus de libéralisation par l'instauration d'une TCI.
B : Un processus
encadré par l'instauration de la TCI
Adopté par le règlement n° 06/99/CM/UEMOA
du 17 septembre 1999 portant adoption du mécanisme de la TCI, la taxe
conjoncturelle à l'importation est destinée à amortir les
effets de la variation erratiques des prix internationaux de certains produits
dans l'ensemble de l'UEMOA d'une part et à contrecarrer les pratiques
commerciales déloyales telles que les subventions dont
bénéficient certains produits européens vendus moins
chers. Elle trouve son fondement juridique dans la clause de sauvegarde
spéciale de l'accord de l'OMC sur l'agriculture. Lors des
négociations de l'Uruguay round32(*) les Etats de l'UEMOA n'avaient pas manifesté
leur désir de bénéficier de cette clause. Cependant ils
disposent de la latitude de procéder à une renégociation
des concessions tarifaires à la faveur des niveaux élevés
de droit considérés individuellement par les pays et de l'offre
d'une grande couverture de la nomenclature du système harmonisé.
Cette clause a été maintenue pour les négociations
post-Doha33(*).
D'une durée indéterminée la TCI sera
appliquée dans l'ensemble de l'union jusqu'à son remplacement par
les mesures de sauvegarde édictées par l'OMC telles que le code
anti-dumping, la législation communautaire sur les subventions et les
mesures compensatoires. En règle générale, elle a vocation
à s'appliquer sur les produits importés des pays tiers. La TCI
est perçue sur les produits relevant de l'agriculture, l'agro-industrie,
l'élevage ou des pêches lors de leur importation dans l'union.
Elle est exclue pour les poissons et produits à base de poissons. Pour
être éligibles, ces produits doivent subir la volatilité
des cours mondiaux. On doit aussi noter l'exigence d'un dumping, de subvention
à l'exportation mais aussi que ce produit doit être en mesure
d'être produit localement et couvrir les besoins de l'union.
En tant que mécanisme communautaire mais d'application
nationale, le bénéfice de la TCI est soumis à une
procédure spécifique à deux étapes.
Relativement à la procédure d'agrément
de la TCI, il faut dire qu'elle nécessite l'intervention des
entreprises, du comité national de gestion du dispositif
complémentaire de taxation du TEC et de la commission de l'UEMOA.
- L'entreprise requérante soumet un dossier de
candidature au comité national. Il se compose d'une fiche
signalétique de l'entreprise requérante, d'une fiche technique du
produit ayant pour objet de fournir l'ensemble des informations sur le produit
fini, les consommations intermédiaires du produit et d'une fiche
constitutive d'un mémorandum apportant sur la base de preuves
chiffrées que le produit est éligible à la TCI. Dans ce
mémorandum, il doit être présenté la situation au
plan national du produit, la nature de la menace ou du préjudice au quel
le produit est confronté ainsi que des données chiffrées
de cette menace. Un dossier est constitué pour chaque produit soumis
à la procédure d'agrément ; autant de dossier seront
nécessaire pour le nombre de produits souhaités éligibles
par la partie requérante. Pour une branche dans laquelle interviennent
beaucoup de producteurs le dossier doit mentionner les informations relatives
à l'association nationale des producteurs concernés.
- Le comité national a dans un premier temps pour
mission, de centraliser l'ensemble des demandes relatives à un
même produit. Aussi le comité mène des démarches
auprès des producteurs et entreprises pour recueillir leur demande afin
de couvrir l'ensemble du secteur concerné. Il procède en
collaboration avec le service national chargé des statistiques au calcul
des données agrées pour l'ensemble du secteur et
déterminer les évolutions des importations ainsi que l'importance
du préjudice subi par la branche de production concernée. Dans un
second temps, le comité organise une réunion
plénière avec les représentants du corps professionnel
concerné, des associations de consommateurs pour délibérer
sur le bien fondé de la demande. A la suite de cette réunion, un
rapport de synthèse donnant l'avis du comité sera
rédigé. Dans un troisième temps, le comité, sous
couvert du ministre de tutelle transmet à la commission de l'UEMOA un
dossier type d'une demande d'agrément précédemment
constitué par l'entreprise requérante auquel on adjoint son
rapport.
- La commission de l'UEMOA se charge de soumettre le dossier
à un comité d'experts nationaux pour avis, après quoi elle
donnera sa réponse à la requête introduite qui doit
intervenir au plus tard deux mois après le dépôt par le
comité national de son rapport.
Relativement à la décision d'application
pour les produits déjà agrées, elle détermine le
prix de déclenchement de la TCI. Il faut rappeler l'existence d'une
liste de base comprenant certains produits agrées d'office figurant
à l'annexe 2 du règlement portant TCI. A cet effet, il est
nécessaire de distinguer différentes hypothèses pour
lesquelles les états requérants doivent fournir des
données relatives aux produits dont les prix ne sont pas garantis sur
les marchés du nord et ceux dont les prix sont garantis dans ces
marchés. La livraison de ces données est nécessaire au
calcul du prix de référence qui se manifeste sur le
marché.
- S'agissant du prix, il est fixé par la commission
par voie de décision sur la base d'informations fournies par les Etats.
Il est ajusté tous les six mois pour tenir compte de l'évolution
des prix internationaux et des coûts de production intérieure. La
TCI peu être déclenché soit par l'application d'un taux de
10% de la valeur déterminée à partir du prix de
déclenchement soit par le mécanisme de la
péréquation par laquelle elle est perçue sur le sucre.
Sous cette forme, elle est perçue lorsque, à l'occasion
d'importation de sucre fini destiné à la consommation courante,
la valeur Coût Assurance Fret (CAF) à la frontière
communautaire est inférieure au Prix de Déclenchement (PD) qui
constitue la valeur minimale ou de référence. Le montant de la
péréquation exigible est constitué par le
différentiel entre la valeur déterminée à partir du
prix de déclenchement et la valeur CAF déterminée à
partir du cours (spot). A ce titre elle ne saurait faire l'objet d'un cumul
avec le mécanisme de la valeur de référence.
Le déclenchement du prix de référence est
basé sur les formules figurant à l'annexe 1 du règlement
TCI. La première concerne les produits comme le sucre garantis sur les
marchés du nord alors que la seconde est relative aux produits non
garantis.
- pour les produits à prix
garantis, les Etats doivent fournir à la commission de
l'UEMOA : la valeur CAF en FCFA, la quantité en kilogramme (KG) et
la moyenne des Frais d'Approches (FA) unitaires pour les importations en
régime de droit commun en provenance de pays tiers, au cours des trois
derniers semestre ainsi que le Prix sur le Marché Spot (PMS), le Prix
Garanti Marché Union Européenne (PGME) et le Prix Garanti
marché United States of América (PGUSA). La formule de calcul du
Prix de Déclenchement (PD) est la suivante : PD=
(PGUE+PDUSA+PMS) +FA3.
Dans le cas du sucre, la commission de l'UEMOA a fixé
le prix de déclenchement selon les valeurs ci dessous :
Nomenclature tarifaire
|
LIBELLÉ DU PRODUIT
|
Prix de déclenchement (F CFA / tonne)
|
17. 01
|
Sucre de canne ou de betterave et saccharose chimiquement pur,
à l'état solide :
|
|
-sucre brut sans addition d'aromatisants ou de colorants :
|
|
sucre
roux en granulés
|
261.464 F
|
sucre
roux en morceaux
|
321.464 F
|
- Autre sucre :
|
|
sucre
blanc en granulés
|
325.056 F
|
sucre
blanc en morceaux
|
385.059 F
|
Source : www.douanes.sn
- pour les produits à prix non
garantis, la commission doit recevoir auprès de la
direction des douanes la valeur CAF en franc CFA la quantité en
kilogramme (KG) et la valeur unitaire pour les importations en régime de
droit commun en provenance des pays tiers au cours des trois derniers
semestres auprès de la direction de l'industrie, de l'agriculture
ou de l'office nationale de statistique. L'ensemble de la production nationale
en quantité et en valeur unitaire pour les trois derniers semestres. la
formule est : PD= (0,3×CM) + (0,7×CPI) avec CM et CPI signifiant
respectivement Cours mondial du produits et coûts de productions
intérieurs du produits (moyenne du pays).
CHAPITRE II :
Analyse de la problématique de la fraude sur le
marché du sucre.
Chapitre 2 :
Analyse de la problématique de la fraude sur le marché du
sucre.
|
Il apparaît ainsi que deux formes de fraude sont
à distinguer : la fraude de « survie »
pratiquée par les populations frontalières et la fraude
administrative opérée par de puissants lobbies commerciaux
disposant de moyens financiers et matériels très consistants.
Elles présentent des caractéristiques et justifications
économiques, sociales et historiques propres. Aussi, chaque forme de
fraude présente ses propres manifestations.
Au regard du danger constitué par ces formes de fraude,
le législateur a défini un cadre répressif dont la
rigidité varie en fonction de l'importance de la règle
violée.
Le phénomène de la fraude présente une
acuité qui s'est manifestée avant et après la
libéralisation. L'année 2000 étant pris comme
référence pour déterminer ses impacts sur les
résultats commerciaux réalisés par la CSS au cours de ces
deux périodes distinctes. La raison principale étant qu'elle
marque l'éxtinction de la plupart des effets de clauses de la
convention initiale et de ses différents avenants ayant
survécues à la libéralisation.
Section I : Les formes
actuelles de fraude
Elles tournent autour de la fraude de
« survie » ou « occasionnelle »
pratiquée par les populations transfrontalières et la fraude
structurée du fait de trafiquants professionnels parfois appelée
fraude administrative.
Chacune des ces deux catégories de trafic fait l'objet
d'une répression qui lui est propre.
Paragraphe I : La fraude de
« survie » ou « occasionnelle » du fait
des populations frontalières
L'accent sera mis sur ses justifications et manifestations
d'une part et à sa répression d'autre part.
A : Les justifications et manifestations de
cette forme de fraude.
Concernant les justifications, il faut dire qu'elles sont de
deux ordres : socio-historiques et économiques.
S'agissant des premières, il est nécessaire de
préciser que le Sénégal partage une longue
frontière terrestre et maritime avec la Gambie, la Guinée-Bissau,
le Mali et la Mauritanie34(*). Les populations de ces différents Etats
gardent une longue tradition historique d'échanges commerciaux.
Celles-ci parfois liées par le sang ignorent les frontières
politiques.
Du point de vue socio-historique, le développement du
commerce transfrontalier qui favorise la fraude de certains produits dont le
sucre trouve sa source dans les valeurs de solidarité africaine
précoloniale d'une part, et la floraison dans le passé, de
réseaux commerciaux internationaux. Ces dernières dont
l'existence date de bien avant la colonisation, sillonnent l'ensemble du
continent africain.
A ce titre, l'Afrique de l'Ouest était une zone de
prédilection où sévissait le commerce interafricain.
Pour certains auteurs, le commerce traditionnel constituait
une sorte de résistance au système déjà en place
notamment les frontières de la colonisation. De même qu'il
permettait d'assurer une certaine équité dans la redistribution
des richesses entre hommes et femmes de ces zones. Toutefois, il y a lieu de
préciser que cette vision empirique des relations commerciales
inter-étatique est battue en brèche par de nombreux auteurs qui
s'opposent à l'idée selon laquelle ce commerce serait une reprise
aux obstacles du commerce entre les pays de la sous région. En
réalité, il s'agit d'un commerce basé sur des
réseaux d'éxportation illégale permettant de se procurer
des devises utilisées pour importer illégalement d'autres
marchandises35(*).
Cependant, à l'heure actuelle il faut dire que ces
échanges commerciaux continuent de marquer l'imaginaire collectif des
populations de ces Etats qui perpétuent malgré l'avènement
d'Etats indépendants avec des frontières distinctes cette
tradition d'échange. Les enquêtes menées sur le terrain
dans les villes de RD-TOLL et Rosso Sénégal36(*) confirment cette tendance.
La nécessité de maintenir les liens familiaux
entre les populations des deux rives du Sénégal entraîne
une certaine familiarité et occasionne des visites mutuelles entre ces
dernières. Au retour, divers produits sont offerts à l'hôte
pour ses besoins de consommation courante. C'est le cas notamment du sucre
produit très prisé et utilisé pour les thés et
boissons. Selon un agent des douanes interrogé « les
populations frontalières expliquent que les marchandises
importées (frauduleusement) sont destinées à leur
l'habillement ou alimentation. »
La pauvreté des populations qui n'ont pas toujours les
moyens de s'offrir le sucre produit par la CSS en grande quantité et
leur faible pouvoir d'achat sont venus accentuer cette situation de
dépendance au sucre importé frauduleusement de la Mauritanie ou
de la Gambie par exemple. Il faut aussi prendre en compte le fait que le prix
de ce sucre est sensiblement inférieur à celui proposé par
la CSS. Alors que le sucre de la CSS coûte 500 FCFA/kg pour le sucre en
morceau, celui importé de la Mauritanie est commercialisé entre
300 et 350 FCFA/kg pour le sucre cristallisé. Les autorités de
ces pays encouragent la réexportation à partir de leur territoire
de produits importés sur le marché mondial, notamment le sucre
vers le reste de la sous-région plus particulièrement au
Sénégal.
A titre d'illustration, on peut citer un rapport de la Banque
Africaine de Développement (BAD) qui évaluait à 40% en
1987 les importations gambiennes destinées à la
réexportation37(*).
Ce qui n'a cessé de créer une tension entre le
Sénégal et la Gambie. Déjà en 1969, Jean
Collin38(*) disait
que le Sénégal était victime d'une
« agression économique »39(*) par la Gambie.
A ces raisons s'ajoutent d'autres parmi lesquelles
l'existence de monnaies différentes et de systèmes fiscaux
divergents entre le Sénégal et les pays précités.
Cette situation constitue un facteur de développement de la fraude sur
le sucre. Sur le terrain, dans les localités de Rosso
Sénégal et RD-TOLL, les populations riveraines échangent
du franc CFA contre l'Ouguiya40(*) d'une valeur deux fois inférieure au FCFA.
Ceci leur permet d'obtenir en Mauritanie le double de ce qu'il devrait
normalement avoir au Sénégal. . Cette situation perceptible au
niveau de la frontière sénégalo-mauritanienne est
similaire à celle rencontrée au niveau de la Gambie. Dans ce
pays, la valeur du Dalassi41(*) est aussi inférieure à celle du FCFA ce
qui, forcement pousse les populations frontalières et les
commerçants locaux à convertir le FCFA en Dalassi pour
s'approvisionner sur le marché gambien. Ce décalage
économique accentue le phénomène de la fraude.
Si au Sénégal le sucre est produit localement
par la CSS qui doit supporter des charges fiscales et salariales par contre,
ces pays importent le surplus de la production des pays
développés en sucre puis le réexportent frauduleusement
sur le marché local pour y être vendu. Les producteurs de ces
Etats développés bénéficient de subventions
étatiques à l'éxportation raison pour laquelle leurs
produits valent moins chèrs. Cette situation est désignée
sous le vocable de « dumping économique. »
Toutes ces raisons socio-historiques et économiques
accentuent cet état de fait dont l'ampleur est de plus en plus
grandissante et dangereux pour notre économie nationale. Quant aux
manifestations, elles sont perceptibles dans ces zones de façon
notoire.
La fraude « occasionnelle » ou
à petite échelle apparaît comme une activité
très lucrative pour les populations riveraines qui prennent goût
à la développer davantage. Elle constitue une source
considérable de revenu et un moyen efficace pour faire face aux
difficultés de la vie économique et ainsi lutter contre la
pauvreté qui gangrène ces populations défavorisées.
S'il est vrai que dans le passé ce trafic ne nécessitait pas de
gros moyens pour son épanouissement, le constat est qu'aujourd'hui cette
forme de fraude est en train de subir de profondes mutations. Son ampleur est
de plus en plus grandissante et son impact économique croît dans
la mesure où de grosses quantités de sucre sont
commercialisées frauduleusement par le biais de cette contrebande.
Du fait que RD-TOLL constitue un lieu de passage obligatoire
pour les voyageurs de la région et que sa population augmente
considérablement, ce qui justifie la forte demande actuelle, la fraude
transfrontalière est en train de prendre des proportions industrielles.
La grande majorité des populations de la vallée du fleuve, plus
particulièrement dans la zone où les enquêtes ont
été menées, consomment du sucre importé
illégalement de la Mauritanie au détriment de celui produit
localement par la CSS, elle-même installée dans cette même
zone.
Sur la route nationale qui traverse la ville de RD-TOLL, il
n'est pas surprenant pour un habitué des lieux d'apercevoir hommes,
femmes, enfants de tout âge et de divers horizons détenir quelques
kG de sucre entre les mains pour les proposer soit aux voyageurs en escale soit
aux simples passants. Le moindre ralentissement d'une voiture en transit dans
la ville entraîne une ruée de ses « petits
fraudeurs » vers les passagers pour leurs proposer leur sucre
conditionné sur des sachets d'un kG. Les lieux les plus
fréquentés à cet effet reste surtout la gare
routière située en face de la mairie42(*), les deux stations d'essence
que compte la ville et le pont-barrage de la Taouey.
Pour mieux échapper aux contrôles des forces de
l'ordre, le sucre est dissimulé dans des seaux appartements
destinés à un autre usage mais qui en réalité
servent de cachette au sucre frauduleusement importé de la mauritanie.
Il est important de noter aussi l'utilisation des téléphones
portables pour échanger des informations entre fraudeurs et se
communiquer le bon moment et l'endroit idéal pour procéder au
débarquement. Aujourd'hui, ce commerce est étendu aux
habitations qui servent de lieux de stockage et de vente du sucre. Les
chambres et dessous de lits sont utilisés à cette fin par les
commerçants fraudeurs. Il est facile de s'en procurer pour les besoins
de la consommation courante thé et fabrication de boissons
sucrées en l'occurrence ou des grands événements familiaux
ou religieux.
L'importance grandissante de la fraude occasionnelle qui a
tendance paradoxalement à se pérenniser est favorisée par
la professionnalisation croissante des trafiquants qui ravitaillent de plus en
plus les commerçants de l'informel.
Au regard de l'étendue de la frontière et des
difficultés liées au milieu naturel, on constate le
développement de points de passage sur le fleuve qui sont devenus
incontrôlables et servent de lieux de débarquement de produits
issus de la contrebande dont l'huile, la farine, la tomate, les tissus et le
sucre en particulier. Dans la ville de RD-TOLL, on pourrait citer les quartiers
de NDIAW43(*),
DIAMAGUENE44(*) et
RD-TOLL-ESCALE où sont localisés les principaux points de passage
et de débarquement clandestins de sucre.
De l'autre cote de la rive, le point de passage de
Bagdad45(*) sert de lieux
d'approvisionnement et de conditionnement du sucre avant son entrée dans
le territoire sénégalais.
A longueur de journée, on aperçoit charrettes ou
piétons entrain d'acheminer le sucre dans les maisons environnantes
pour les soustraire provisoirement au contrôle de la douane. Ensuite, le
sucre sera commercialisé sur le marché à des prix
extrêmement favorables pour les consommateurs. Ces points sont aussi
bien utilisés par les petits trafiquants que par les fraudeurs
professionnels.
C'est au regard de l'importance de la place qu'occupe cette
forme de fraude dans le développement des importations illégales
de sucre que le législateur sénégalais n'a pas
hésité à lui définir un cadre de répression.
B : la
répression de ce trafic
L étude de la répression de la fraude
transfrontalière montre que les sanctions prévues pour ce trafic
sont intégrées au régime général de celles
appliquées aux infractions douanières portant sur les
marchandises.
Cette forme de fraude d'une origine très ancienne
était et reste aujourd'hui pour l'essentiel destinée à
satisfaire les besoins de la consommation familiale courante. Raison pour la
quelle elle implique à priori de faible quantité de sucre
frauduleusement vendu sur le marché local. Toutefois, les dispositions
législatives et réglementaires répriment à leur
juste mesure ce trafic quelque puisse être les justifications
socio-économiques.
La circulation et la détention de sucre issu de la
contrebande ne respecte pas les conditions posées aux art.199, prg
1er et 200 du CD qui dispose respectivement
que : « les marchandises ne peuvent circuler dans la zone
terrestre du rayon des douanes sans être accompagnées d'un
passavant ou d'une expédition de douane en tenant lieu. » et
que aussi « 1. Les marchandises soumises à la formalité
du passavant provenant de l'intérieur du territoire douanier qui
pénètrent dans la zone terrestre du rayon des douanes doivent
être conduites au bureau ou au poste de douane le plus proche pour y
être déclarées dans les mêmes formes que
l'acquittement des droits. »
2.les transporteurs des dites marchandises doivent
présenter aux agents des douanes à la première
réquisition : a) les titres de transports dont ils sont
porteurs ; b) le cas échéant, les titres de régies et
autres expéditions accompagnants les marchandises ; c) des
quittances attestant que ces marchandises ont été
régulièrement importées ou des factures
d'achats,bordereaux de fabrication ou toutes autres justifications d'origine
émanant des personnes ou sociétés
régulièrement établies à l'intérieur du
territoire douanier. »
La possession et la détention de marchandises
importées frauduleusement restent aussi incriminées par
l'art.295 qui dispose : « ceux qui ont acheté ou
détenu, même en dehors du rayon, des marchandises importées
en contrebande ou sans déclaration en quantité supérieure
à celles des besoins de leur consommations familiales sont passibles de
sanctions contraventionnelles de la quatrième classe. »
Il faut noter que l'imprécision du législateur quant au seuil
minimum acceptable peut occasionner des abus de droit de la part de certains
agents des forces publiques qui peuvent selon leur gré laisser passer
certaines personnes avec leur marchandises alors que pour la même
quantité d'autres passants peuvent voir leurs achats confisqués.
Par conséquent il est impérieux de déterminer avec
précisions la quantité de marchandises admises pour les besoins
de la consommation familiales. Cette ambiguïté ou
imprécision n'est pas souhaitable car il faut concilier le respect des
droits des populations avec les prérogatives dont doivent disposer les
forces publiques pour mieux exercer leurs missions de défenses de
l'économie nationale.
Relativement aux incriminations, l'activité de
contrebande viole les règles posées par les arts. 42 et 51 du
CD. En effet, dans le cadre de la fraude transfrontalière, le recours
à l'utilisation de points de passage clandestins sur les voies de
navigations fluviale ou maritime pour le débarquement des marchandises
reste très déterminant et indispensable pour la survie de ce
commerce. Par voie de conséquence, les personnes qui utilise ce
procédé viole l'art 49, prg 1er précité
qui dispose : « il est interdit aux navires et embarcations de
toutes sortes de pénétrer dans les eaux intérieures
autrement que par les estuaires, passes ou rivières conduisant au
premier bureau ou poste de douane. » L' art.56 énonce
que : « toutes les marchandises importées par voie
terrestre doivent être conduites au plus proche bureau ou poste de douane
par la route la plus directe, dite route légale, désignée
par arrêté du ministre chargé des finances »
alors que l'art.60, prg 1er en disposant que : «
sont interdits tout débarquement et jet de marchandises en cours de
route » pose une interdiction totale de soustraire les marchandises,
conformément à leur quantité initiale, au contrôle
de la douane.
L'analyse du phénomène de la fraude
transfrontalière montre aussi que les fraudeurs font recours aussi
à ces différentes pratiques incriminées pour
échapper à la vigilance des agents de la douane ou des autres
membres des forces de sécurité.
Relativement aux sanctions, la remarque est que certains
agents sont moins sévères avec les détenteurs de petites
quantités de sucre destinées à la consommation familiale.
Ce constat est toutefois à relativiser car cette attitude ne fait pas
obstacle à la répression et s'accompagne souvent de la
dépossession ou confiscation du sucre litigieux.
A ce titre l'art.306 prévoit qu' « est
passible de la confiscation de marchandise et d'une amende égale au
double de leur valeur sur le marché intérieur, toute infraction
aux dispositions, lois et règlements que l'administration des douanes
est chargée d'appliquer lorsque cette régularité se
rapporte à des marchandises de la catégorie de celles qui sont
prohibées à l'entrée ou à la sortie ou fortement
taxées et qu'elle n'est spécialement réprimée par
le présent code. » Il s'agit principalement des contreventions
douanières de la quatrième classe.
L'art.308 sanctionne pénalement les délits
douaniers de la première classe en ce sens que
sont « passibles de la confiscation de l'objet de fraude, de la
confiscation des moyens de transport, de la confiscation des objets servant
à masquer la fraude, indépendamment d'une amende égale au
double de la valeur de l'objet de fraude sur le marché intérieur
et d'un emprisonnement de trois mois à trois ans les infractions si
après lorsqu'elles portent sur des marchandises prohibées
à l'entrée ou à la sortie ou fortement taxées
à l'entrée ou soumises à des taxes intérieures ou
de sortie :- tout fait de contrebande autre que ceux visés à
l'art.309 ci-après, accompli par un ou plusieurs individus.- tout fait
d'importation ou d'exportation sans déclaration de marchandises
d'une valeur inférieure ou égale à 2.500.000.»
La sanction est plus sévère pour le
détenteur de grosses quantités de produits issus de la
contrebande avec les pays voisins. En effet, l'accroissement exponentiel de la
quantité de sucre issue de la fraude transfrontalière oblige
aujourd'hui la douane à traduire en justice les auteurs de cette
contrebande.
Ils sont soit traduits devant le Tribunal Départemental
(TD) du lieu de commission de la contravention douanière, soit devant le
Tribunal Régional (TR) pour ce qui concerne les délits.
Cette nécessite de lutter contre le trafic conduit le
législateur à assimiler le détenteur de la marchandise
frauduleuse comme principal auteur de l'infraction. C'est ce qui ressort de
l'art 287, prg 1er qui dispose : « le
détenteur de la marchandise est réputé responsable de la
fraude ».
Toutefois une exception importante est apportée par le
texte pour ce qui concerne les transporteurs de véhicules de transport
en commun. Ils voient leurs responsabilités exonérées
lorsqu'ils fournissent aux autorités compétentes l'ensemble des
informations nécessaires pour la capture du vrai coupable de
l'infraction. Dans ce sens, on peut citer l'exemple de l'arrêt C.A.
Dakar chambre civile n 136 du 08 juin 1973 USIMA c/ DIBA dans lequel il est
affirmé qu'il ressort « d'une jurisprudence
française issue d'une règle qui a été introduite
dans la législation douanière de France, et qui permet au
transporteur de bonne foi d'échapper aux sanctions douanières
lorsqu'il indique l'auteur de la fraude à l'administration, pour
permettre à celle-ci d'exercer utilement son recours contre le
fraudeur » et que « force est au transporteur si
l'administration a décidé de saisir son véhicule,
d'obtenir la main levée de celle-ci en se pliant aux exigences
légalement imposées par la douane »
Le législateur n'exclut pas aussi l'application des
peines complémentaires prévues aux art.319, 320 et 321 du CD
portant respectivement sur la confiscation, l'astreinte et aux peines
privatives de droits.
Au plan civil, la responsabilité des
propriétaires des marchandises peut être engagée. Dans ce
cas ils peuvent être condamnés par le juge à payer les
droits de confiscation, d'amendes et de dépens.
A la lumière de ce qui précède, on peut
dire que la répression de la fraude transfrontalière s'inscrit
dans la logique du législateur de sanctionner toutes les formes de
contrebandes tendant à violer les règles relatives aux
importations de marchandises à l'intérieur du territoire douanier
national.
En raison des circonstances particulières de
développement de ce trafic illégal et de l'importance des
dispositions qu'elle viole, la fraude transfrontalière restait moins
sanctionnée que la fraude administrative. Toutefois, la tendance
actuelle est qu'elle est sévèrement réprimée pour
annihiler toute ambition expansionniste du phénomène qui
risquerait de devenir incontrôlable et structurée à l'image
de la fraude administrative.
Paragraphe II : la
fraude structurée du fait de trafiquants professionnels.
Il sera question de voir d'une part le caractère
organisé de ce trafic et d'autre part déterminer les
modalités de sanctions de la fraude administrative.
A : le caractère très
organisé de cette forme de trafic
Les trafiquants disposent de moyens très
considérables et s'adonnent à des pratiques illégales qui
favorisent la commercialisation du sucre issu de cette forme de fraude.
Relativement aux moyens, cette catégorie de fraude
qualifiée aussi d'administrative regroupe des professionnels avertis,
bien structurés et très organisés. Le trafic repose sur
des circuits et réseaux très performants.
A l'opposé de la fraude transfrontalière
pratiquée par les populations riveraines, elle est plus coûteuse
et dangereuse pour l'économie nationale. Lors d'une audience
accordée aux représentants des organisations patronales et
syndicales, le président Abdou DIOUF46(*) s'est vu exposé par le porte parole de l'Union
Nationale des Artisans, Commerçants et Industriels du
Sénégal (UNACOIS) la catégorisation des fraudes qui
existent au Sénégal. Il faisait état de l'existence de
«la fraude noire dont l'exemple est le fraudeur qui n'a qu'un
(anée) de sucre, la fraude intellectuelle consistant à se
procurer des papiers sous-facturés et la fraude masquée
consistant à ne déclarer que le dixième de ses
importations »47(*).
Cette déscription bien que peu récente est
toujours valable jusqu'a nos jours.
En effet, la première forme correspond à la
fraude pratiquée par les populations des localités
frontalières alors que les deux autres correspondent à la fraude
pratiquée par les grands commerçants de l'informel
spécialisés dans les importations au Sénégal. Ils
disposent de moyens financiers et matériels colossaux et font
préssion sur les pouvoirs publics pour obtenir la fin d'un
prétendu monopole détenu par la CSS.
Lors de l'arrestation d'un célèbre
commerçant impliqué dans une affaire d'importation frauduleuse
de sucre49(*), ses
camarades de l'UNACOIS ont entendu faire pression sur l'Etat
sénégalais pour obtenir sa libération en menaçant
de boycotter les produits des autres entreprises détenues par le Groupe
Mimeran dont la Compagnie Bancaire de l'Afrique Occidentale (CBAO). Ils
accusaient la CSS d'être liée à cette arrestation. Ce que
les autorités de l'entreprise ont toujours nié50(*).
A cette capacité d'organisation s'ajoute une assise
financière très large. Contrairement aux « petits
fraudeurs » qui se contentent de faire entrer et écouler des
quantités modestes de sucre, ils font importer illégalement des
milliers de tonnes de sucre sur le marché. Les importantes saisies
faites par la douane dans le cadre de la lutte contre la fraude suffisent
à confirmer cette situation. On peut citer l'exemple de la saisie de 2T
de sucre par le service du commerce intérieur de Sédhiou qui
avait lancé une opération de lutte dans le Pakao-Balantacounda
près de la frontière gambienne et
bisseau-guinéenne51(*). On peut aussi citer la saisi opérer par
« le poste de police de Sicap-Mbao a mis la main sur dix personnes
avec six tonnes de sucre frauduleux. C'était au marché de
Grand-Mbao et à Thiaroye Azur, les 9 et 13 juin
dernier. »52(*)
Concernant les pratiques, certains commerçants de
l'informel familiarisés avec les procédures de
dédouanement usent de méthodes apparemment légales pour
faire entrer frauduleusement du sucre au Sénégal. Tous les
procédés utilisés reposent sur de fausses affirmations
telles que les modifications de quantité, prix et fausses
déclarations sur la destination finale de du sucre parfois
déclaré en transit au Sénégal pour le MALI plus
particulièrement.
Concérnant les modifications de quantité, les
fraudeurs ne s'acquittent pas de la totalité des taxes dues. A
l'occasion des contrôles, leurs complices font soustraire une partie de
la marchandise aux vérifications aux quelles elles doivent être
soumises.
Aussi, certains commerçants commandent du sucre de
l'étranger et procèdent légalement à leur
dédouanement. Mais avec les mêmes papiers ils procèdent
à de nouvelles importations sur la base de ses mêmes papiers qui
ne sont plus valables. Ainsi, ce sucre sera commercialisé sans pour
autant que les droits de douane ne soient acquittés.
Concernant les modifications de prix, elles consistent
à l'utilisation de fausses factures établies en complicité
avec le fournisseur lors de la déclaration en douane de la valeur de la
marchandise. Les factures mentionnent des prix inférieurs à la
réalité. Ce procédé permet de payer moins de taxes
lors des dédouanements et ce faisant réaliser des
bénéfices lors de la commercialisation du sucre qui, à
priori est légalement importé. C'est donc lors de la
déclaration qu'intervient la fraude administrative.
A ces mensonges sur les quantités et prix du sucre
s'ajoutent celles relatives à la destination finale du sucre en transit
au Sénégal pour certains Etats voisins.
En effet, les réseaux des commerçants
entretiennent des relations privilégiées avec d'autres
partenaires notamment les commerçants originaires des pays limitrophes.
Ils importent les uns pour les autres en utilisant le procédé du
transit afin de bénéficier de certaines exonérations
douanières et s'acheter entre eux. Ainsi, ils transportent des
marchandises qui vont servir à alimenter la contrebande dans le pays de
transit et n'arriveront jamais au pays déclaré
bénéficier de cette importation. A titre d'illustration on peut
prendre l'exemple du commerçant qui déclare importer du sucre
pour le Mali par le biais du port de Dakar. Mais au moment de l'acheminement
par voie terrestre vers la destination finale le sucre sera dissimilé
et vendu sur place.
De même, ils procèdent à un camouflage sur
la véracité du produit importé. Il s'agit de fausses
déclarations sur l'identité du produit importé car
: « pour avoir déclaré à la douane importer
des poupets par exemple on constate que certains font rentrer frauduleusement
du sucre dans les containers » affirme un leader syndical53(*) de la CNTS interrogé
sur la question. On pourrait rapprocher ces affirmations à celles faites
par le Directeur des Ressources Humaines (DRH) de la CSS dans un journal de la
place à propos des fausses déclarations faites par les fraudeurs
au cours de leurs déclarations d'importations : « ils
déclarent des containers de poupets à Dakar. Mais à part
quelques caisses de poupets, le réste c'est du
sucre. »54(*) On
le voit donc des fortunes et privilèges dépendant de cette
fraude.
Il convient de préciser que le développement de
ce trafic se fait en marge des circuits légaux. Dans certains pays, le
trafic frauduleux est devenu une « affaire
d'Etat »55(*)
Les trafiquants font entrer d'importantes quantités de sucre sans les
déclarer à l'administration des douanes.
Tout au long de la frontière
sénégambienne ou sénégalo-mauritanienne se
développent aussi des zones d'entrée de sucre frauduleusement
importé. Très bien organisés, les grands fraudeurs
disposent de magasins de stockage et de moyens de transport efficaces tels que
les pirogues, charrettes ou camions pour l'acheminement du sucre
importé. Parfois, ils sont armés et n'hésitent point
à user d'armes contre les agents de douane pour acheminer leurs
produits.
Le sucre, soigneusement gardé, sert à
ravitailler d'une part les propres auteurs de la pratique et d'autre part
à approvisionner les clients détaillants de ces
commerçants pour les besoins de leur commerce. Les grands
commerçants importateurs organisés sur la base de ramifications
extrêmement larges et complexes, s'activent autour de certaines villes
saintes comme Touba, Prokhane, Médina Gounass56(*) ou Dahara-Djoloff. Les
marchés hebdomadaires ou « LOUMA » sont des lieux de
prédilection pour la commercialisation du sucre issue de la fraude. On
peut à ce titre citer l'éxemple du marché
hébdomadaire de Diawbé dans la région de Kolda57(*).La présence massive de
ce sucre sur l'ensemble du territoire fait que la consommation de celui
proposé par la CSS est réduite à néant dans
certaines régions du Sénégal.
Donc, on pourrait dire que le sucre frauduleux est aujourd'hui
commercialisé sur l'ensemble du Sénégal. Cette fraude se
caractérise par son ampleur grandissante à l'échelle
nationale et sa dangerosité pour les populations qui consomment un sucre
dont la qualité n'est pas contrôlée. La vente de ce sucre
est entrain de gagner du terrain au détriment de celui produit par la
CSS. C'est le cas des zones frontalières telles que Saint-Louis, Kolda,
Tambacounda ou Ziguinchor. Cette tendance est aujourd'hui constatée
à Dakar et Thiès qui étaient traditionnellement moins
exposés. Au niveau de la capitale, des zones comme les baies de Hann ou
Soumbédioune servent de lieux de débarquement du sucre frauduleux
acheminé par des pirogues en provenance de la Gambie. Ses
conséquences sont plus que dévastatrices pour les industries
telles que la CSS.
B- La Sanction de la
fraude administrative :
Comme pour la fraude transfrontalière, la fraude
administrative, dans le cadre de sa répression obéit aux
mêmes principes généraux posés par le
législateur.
D'abord le principe posé à l'article 287,
alinéa 1er reste appliqué dans la mesure où il
pèse une présomption de responsabilité sur le
détenteur de la marchandise frauduleuse. Il est réputé
être l'auteur de l'infraction douanière. Toutefois, cette
présomption n'est pas irréfragable. Elle est susceptible
d'être évincée par une preuve contraire comme c'est le cas
pour les transporteurs publics qui peuvent s'exonérer en donnant
à la douane les informations nécessaires à la capture du
ou des vrais auteurs de la fraude. Les règles de compétences
matérielles et territoriales restent maintenues. Le TD est
compétent en matière de contraventions et le TR l'est en
matière de délit douanier.
Dans la pratique, les auteurs de ce trafic sur le sucre font
recours à de nombreuses pratiques incriminées et
réprimées par le législateur.
Les mensonges (ou fausse déclaration) portant sur les
poids, les quantités ou la représentation de sucre
déclaré importé sont prévus et sanctionnés
par les dispositions de l'article 304 : « Est passible d'une
amende égale au triple des droits et taxes dus , étudiés
ou compromis, sans préjudice du paiement des droits et taxes exigibles,
toute infraction aux dispositions des lois et règlements que
l'Administration des douanes est chargée d'appliquer lorsque cette
irrégularité a pour but ou pour résultat d'étudier
ou de compromettre le recouvrement d'un droit ou d'une taxe quelconque et
qu'elle n'est pas spécialement réprimée par le
présent code. »
Les infractions relatives aux fausses déclarations ou
désignations auprès de l'Administration sont sanctionnées
par l'article 305 qui prévoit le cas échéant que :
« sont passibles de la confiscation des marchandises litigieuses et
d'une amende de 50.000 à 100.000 francs :
1. tout fait de contrebande ainsi que tout fait
d'importation ou d'exportation sans déclaration lorsque la faute porte
sur des marchandises de la catégorie de celles qui ne sont ni
prohibées ou fortement taxées à l'entrée, ni
soumises à des taxes intérieures, ni prohibées ou
taxées à la sortie.
2. toute fausse déclaration dans
l'espèce, la valeur ou l'origine des marchandises mises à la
communication ou placées sous un régime suspensif lorsqu'un droit
ou une taxe quelconque se trouve éludé ou compromis par cette
fausse déclaration.
3. toute fausse déclaration dans la
désignation du destinataire réel ou de l'expéditeur
réel. »Elles relèvent toutes de la compétence du
TD.
Le délit de contrebande réalisé
individuellement ou en groupe avec des moyens de transports très
sophistiqués tels que « les véhicules attelés
ou autopropulsé », les navires, embarcations ou aéronef
est pénalement sanctionné par l'article 309 du CD.
L'article sanctionne aussi « le recours à des importations
effectuées sans déclaration portant sur des
« marchandises [..........] d'une valeur supérieure à
2.500.000 francs.»
A ces infractions, il faut ajouter celles relatives aux
« soustractions ou substitutions en cours de transport de marchandise
expédiées sous un régime suspensif, l'inobservation sans
motif légitime des itinéraires et horaires fixés, les
manoeuvres ayant pour but ou pour résultat d'altérer ou de rendre
inefficaces les moyens de scellement, de sûreté ou
d'identification et, d'une manière générale, toute fraude
douanière relative au transport de marchandises expédiées
sous un régime suspensif. » prévues à
l'art.310,2,d) et au transbordement frauduleux incriminé 2,b) de ce
même article. L'importance de l'obligation de déclaration
posée par l'art. 56 du CD conduit le législateur a ainsi
légiférer à l'art.310, prg3 : « Sont
assimilés à des actes de contrebande les importations ou
exportations sans déclaration lorsque les marchandises passant par un
bureau de douane sont soustraites à la visite du service des douanes par
dissimulation dans des cachettes spécialement aménagées ou
dans des cavités ou espaces vides qui ne sont pas normalement
destinés au logement des marchandises. »
Autres pratiques en cours dans la fraude administrative
incriminée par le législateur, on peut noter les exemples
d'importations ou d'exportations sans déclaration prévus à
l'art.313 :
- 1. Les importations ou éxportations par les
bureaux de douane, sans déclaration en détail ou sous le couvert
d'une déclaration en détail non applicable aux marchandises
représentées ;
- 2. Les soustractions ou substitutions de marchandises
sous douanes ;
- 3. Le défaut de pot, dans les délais
impartis, des déclarations complémentaires prévues
à l'article 87 ci-dessus.
Aussi les dispositions des art.314, prg.1er ,315 et
316,3° incrimine et assimile respectivement à des importations
sans déclaration :
- « les marchandises déclarées
pour le transport avec emprunt du territoire étranger ou de la mer pour
l'exportation temporaire [.....] En cas de non représentation ou de
différence dans la nature ou l'espèce entre les dites
marchandises et celles présentées au départ
» ;
- « sont réputés
importés ou exportés sans déclaration les colis
excèdent le nombre déclaré » ;
- « les fausses déclarations dans
l'espèce, la valeur ou l'origine des marchandises ou dans la
désignation du destinataire réel ou de l'expéditeur
réel lorsque ces infractions ont été commises à
l'aide de factures, certificats, ou tous autres documents
faux,inexacts,incomplets ou non applicables. »
L'art.317, prg3 incrimine à tour « le
détournement de marchandises prohibées ou non de leur destination
privilégiée. »
Outre les peines principales prévues en cas
d'infraction à la législation douanière, le
législateur donne la possibilité au juge d'infliger au
délinquant des peines complémentaires notamment celles
prévues à l'art.34 du Nouveau Code Pénal
Sénégalais (NCPS). En effet, il ressort des dispositions de
l'art.322, al.1er que : « le tribunal peut
à la requête de l'administration frapper les individus
condamné pour un délit douanier des peines prévues
à l'article 34 du code pénal. » il s'agit
principalement de la perte du droit de vote, du droit
d'éligibilité, de certains droits familiaux etc.
Mais au regard des importants flux financiers en jeu dans ces
contentieux, l'administration de la douane à le plus souvent tendance
à transiger avec les personnes coupables de ces délits. Cette
procédure moins coûteuse pour les deux parties permet de gagner du
temps et d'éviter le procès pénal très ruineux pour
les affaires. En ce sens, l'exemple de la transaction opérée avec
Moustapha TALL a permis à la douane de rentrer dans ses fonds d'une part
et de permettre à la personne responsable de la fraude de reprendre ses
activités commerciales.
Il est à noter l'existence d'autres textes
législatifs et réglementaires relatifs à la
répression de la fraude. C'est le cas notamment de la LOI n°66-48
du 27 Mai 1966 relative au contrôle des produits alimentaires et de la
répression de la fraude qui en son art.6
dispose : « quiconque aura fabriqué,
transformé,importé,détenu en vue de la vente des produits
visés à l'article 1er de la présente loi sans
être titulaire de l'autorisation prévue au même article,
sera puni d'un emprisonnement de trois mois à deux ans et d'une amende
de 24.000francs à 1.200.000francs ou de l'une de ces deux peines
seulement. »
En effet l'art.1er de cette loi soumet à une
autorisation préalable de l'autorité administrative la vente ou
la transformation de produits destinés à l'alimentation des
hommes et des animaux. Il en est de même pour ce qui concerne
« la mise en vente en gros, en demi-gros ou en détail des
produits ainsi fabriqués. » Désormais, les
modifications apportées à cette loi font que les personnes
désireuses de transformer ou d'importer des produits alimentaires ne
sont tenues que de faire une déclaration préalable auprès
des services compétents de l'administration
L'art.3 du décret n°68-508 du 7 Mai 1968 fixant
les conditions de recherche et de constatation des infractions de la loi
n°66-48 du 27 Mai 1966 confère aux agents des douanes le pouvoir
de « procéder aux recherches, d'opérer des
prélèvements et, s'il y'a lieu d'effectuer des saisies ou
interdire provisoirement la mise en vente des lots suspects. »
Qu'elle soit transfrontalière ou administrative, la
fraude constitue une infraction à réprimer à sa juste
valeur et dont il faut prémunir l'industrie locale. L'acuité
avec la quelle elle se pose aujourd'hui nécessite qu'on se penche sur la
trajectoire prise par la fraude avant et après la
libéralisation.
Section 2 : L'acuité
du problème de la fraude
Il s'agira, à travers une étude comparative, de
montrer l'évolution des ventes de la css au regard de l'acuité de
la question de la fraude aussi durant la période de monopole que celle
d'après libéralisation. L'année 2000 sera prise comme
année de référence marquant définitivement la fin
du monopole et le début de la libéralisation effective. Ce choix
se justifie par le fait que c'est le 31 octobre de la même année
que la convention d'établissement signée entre l'Etat du
Sénégal et la CSS en 1970 a pris a effectivement pris fin .
Ainsi, on analysera l'acuité du problème de la
fraude durant la période de monopole d'une part puis dans le contexte
actuel de libéralisation d'autre part.
Paragraphe I : durant
la période de monopole
Etudier la question de l'acuité de la fraude durant la
période de monopole revient pour notre part à essayer d'analyser
dans un premier temps la problématique de l'ampleur et de l'attitude de
l'Etat vis-à-vis de cette pratique et dans un second temps à
essayer d'analyser le comportement des ventes de la CSS au regard de
l'acuité constituée par la fraude.
A: la question de l'ampleur de la fraude et de
l'attitude de l'Etat
De prima bord, il faut préciser que la question de
l'analyse de l'ampleur de la fraude et de l'attitude de l'Etat vis-à-vis
de ce phénomène en cours dans le secteur du sucre n'est pas
à dissocier des problèmes soulevés par l'exercice de cette
pratique sur les autres produits importés ou produits localement et de
la bataille pour l'accès direct aux importations.
D'emblée, il faut rappeler que pour mieux rentabiliser
les lourds investissements faits par les promoteurs du complexe sucrier de
RD-TOLL lors de son implantation, l'Etat du Sénégal a entendu
conférer à ces derniers un monopole exclusif sur la production et
les importations nécessaires à la couverture de la demande
nationale en consommation de sucre.
A cet effet une convention modifiée par quatre
avenants réspectivement de 1972, 1984,1987et 1992 a été
signée le 29 juin 1970 entre le gouvernement du Sénégal
et la CSS. Elle a été réaménagée par un
protocole d'accord en date du 30 novembre 1994 qui mis partiellement fin aux
privilèges accordés antérieurement à la css et fixa
pour le 31 octobre 2000 l'arrivée à terme de ladite
convention.
Jugée protectionniste, elle a toujours
été décriée par les opérateurs
économiques de l'informel qui ont toujours souhaité son
abrogation. Se pose alors la question de l'acceptation et de
l'intériorisation des normes étatiques. Ces dernières
remettaient en cause des habitudes intégrées dans la psychologie
des populations et justifieraient une fraude grandissante.
Considérée comme stratégie de survie par les populations,
la fraude a été, à cet effet, pratiquée au
mépris des lois en vigueur. Non par ignorance, les auteurs trafiquants
s'adonnent à la pratique pour se procurer des conforts matériels.
C'est le cas des fraudeurs professionnels qui disposent grâce à ce
commerce d'une assise financière énorme. A l'inverse d'une
catégorie de fraudeurs qui, pour des raisons socio-historiques
liées à l'ancienneté des réseaux de commerce,
s'adonne à la fraude transfrontalière, ces « fraudeurs
au col blanc » de l'informel agissent en connaissance de cause de
l'état de la législation en vigueur.
Pour ce qui les concerne, la fraude apparaît comme
« une stratégie de survie pour détourner la
législation non adaptée à la logique commerciale ou
contraire aux habitudes. »58(*) Au regard des contraintes administratives
imposées par la rigueur des normes douanières jugées
obsolètes, la fraude sur le sucre apparaît et continue
d'être une attitude de résistance. Commerçants et
populations trouvent leur compte dans cette fraude qui permet d'une part, de
soustraire les produits tels que le sucre au contrôle des services
étatiques et d'autre part, de se procurer moins chers le sucre
importé frauduleusement.
C'est dans ce contexte de revendications que de nombreuses
structures ont été créées pour défendre les
intérêts des commerçants de l'informel. Parmi ces
structures organisées sous la forme de syndicats on peut citer l'exemple
du Rassemblement des Opérateurs économiques du
Sénégal (ROES), de l' Association des Commerçants,
Agriculteurs, Artisans et industriels du Sénégal (OCCAIS) et de
l'UNACOIS. Cette dernière créée en 1989 une structure de
défense des intérêts des ses membres.
A cet effet, une des vieilles revendications de la structure
était de lutter contre le monopole conféré à
certaines entreprises et par conséquent obtenir la libéralisation
totale de tous les secteurs d'activités de la vie économique dont
le sucre. Dans ce cadre, le retrait du soutien de l'Etat au groupe Mimeran par
une libéralisation dans la filière allait permettre de diminuer
la fraude dans ce contexte de monopole. D'où leur attitude critique
à l'égard de l'Etat sénégalais obligé de
prendre position dans ce débat.
Analyser cette attitude de l'Etat par rapport à la
question de la fraude ne revient pas pour notre part ici à faire un Etat
des lieux des moyens engagés pour la lutte contre la fraude même
si certains considèrent que l'accentuation du phénomène
résulte de l'incapacité des autorités à
contrôler les transactions commerciales. Apprécier l'attitude des
pouvoirs publics vis-à-vis de la fraude revient à voir dans
quelle mesure, durant cette période de monopole, ces derniers ont
parfois eu à tolérer l'existence d'une certaine fraude sur bon
nombre de produits. Cela ne voulant pas dire que l'Etat a joué un
rôle d'incitateur ou aider les fraudeurs à maintenir leurs
activités prospères.
En effet, l'installation de la CSS a coïncidé avec
la volonté de l'Etat d'atteindre l'auto-suffisance alimentaire dans bon
nombre de secteur puis à la rupture des relations avec la CAPA qui
approvisionnait le marché en sucre. Aussi, l'Etat
sénégalais n'était pas toujours en mesure d'assurer le bon
approvisionnement des populations en produits et denrées de
premières nécessités. Il en était de même
pour la CSS qui n'avait pas atteint la pleine possession de sa capacité
de production. Cette situation est plus perceptible surtout en période
de crise et de pénurie de certains produits sur le marché
international ou à l'occasion de mauvaise saison des pluies. A ce titre
on peut citer l'exemple de l'hivernage 82/83 durant la quelle la faible
pluviométrie enregistrée a hypothéqué les
rendements pour la campagne 83/84. Le nombre de tonnages broyés est
passé de 628.087 T à 570.000 T59(*).
Dans ces circonstances, il n'est pas surprenant d'assister
à une tolérance ou un relâchement des services
chargés de lutter contre la fraude. Par ce comportement, l'Etat permet
aux populations de se procurer sans rupture des produits de base et ce faisant
se prémunir d'une éventuelle accentuation des revendications
sociales.
L'analyse de l'acuité de la question de la fraude
durant la période de monopole reste cependant incomplète si on ne
se réfère pas à quelques données présentant
l'évolution des ventes de la css pour corroborer notre analyse.
B : Ses
conséquences sur les résultats de la CSS
Il s'agira à travers l'analyse de ces différents
graphiques de voir dans quelle mesure la fraude a affecté les ventes de
la CSS au cours de la période de référence allant de 1993
à 1999.
Schéma
n°1 : Evolution des Ventes de 1993 à
1999.
Source : Sérvice
Commércial de la CSS.
L'analyse de cette courbe montre une évolution en deux
étapes.
La première qui va de 1993 à 1996 montre une
hausse croissante des ventes de la CSS qui atteignent leur summum en 1995. A
l'exception de l'année 1993 durant la quelle les ventes étaient
de 98 774 T, celles réalisées au cours des années 1994 et
1995 ont atteint respectivement 120 084 T , 135 479 T et
123 486 T.
Mais après cette date qui coïncide avec le
début de la libéralisation on constate paradoxalement une
tendance vers la chute vertigineuse des ventes de la CSS qui a atteint son
niveau le plus bas au cours de cette période en 1999 avec 79 608 T.
Sans doute la dévaluation du FCFA qui a
occasionné une hausse du niveau de vie a stimulé la fraude et
favorisé le recours au sucre frauduleusement importé et moins
cher. Par ailleurs la mise en oeuvre du TCI n'a pas permis de juguler le
phénomène de la fraude. L'harmonisation de la législation
communautaire a montré ses limites face à la question de la
fraude même si les conséquences de cette dernière ont moins
affecté les résultats de la CSS ce qui n'est pas le cas pour la
période de libéralisation.
La comparaison des ventes par régions
réalisées pour l'année 1995 et 2004 le démontre.
Schéma
2 : Etat comparatif des ventes par région 1995
(01/01-30/09)
2004 (01/01-30/09)
Source:
Sérvice Commércial de la CSS.
L'analyse de ce graphique montre un bon comportement des
ventes de la CSS pour cette année. Les régions du centre et de
l'ouest à savoir Dakar, Diourbel, Thiès, Kaolack et Louga
arrivent en tête des ventes. Comparativement à l'année
2004, même les zones transfrontalières enregistraient un niveau de
vente impossible d'atteindre aujourd'hui.
Paragraphe II : Apres
la libéralisation
L'analyse de la question de l'acuité de la fraude
après la libéralisation du secteur du sucre portera d'une part
sur la délimitation de l'étendue actuelle du problème de
la fraude et d'autre part sur ses incidences sur les ventes actuelles de la
CSS.
A : l'étendue actuelle du
problème
En vue de redynamiser l'économie
sénégalaise et pallier ou atténuer les conséquences
devant découler de la dévaluation du FCFA , les Etats de l'UEMOA
ont entrepris de profondes reformes économiques tendant à la
restructuration de l'environnement industriel et concurrentiel.
Au Sénégal, ces reformes se sont traduites par
l'avènement d'un nouveau vent de libéralisation économique
concrétisée par la disparition progressive des monopoles
détenus par des entreprises nationales ou par certaines entreprises
conventionnées à l'image de la css.
Relativement au marché du sucre, cette
libéralisation bien que encadrée par un mécanisme
communautaire mais d'application nationale à savoir la TCI n'a pas tout
de même permis l'installation d'une unité de production pour
concurrencer la CSS. Mais d'un autre coté, elle a permis
l'arrivée de nouveaux acteurs sur le marché s'activant dans le
domaine des importations. Sur le principe, la libéralisation devait
permettre de réduire de façon substantielle le
phénomène de la fraude sur le sucre car la législation
jugée protectionniste par ses détracteurs avait disparu pour
laisser place à de nouvelles normes devant favoriser la concurrence.
Mais le constat est que le débat posé lors de la période
de monopole est toujours actuel malgré le changement de contexte
réglementaire. Autant que dans le passé, la question de la fraude
continue de se poser avec acuité au risque de menacer l'avenir de
certaines entreprises telles que la CSS.
Cette dernière avec une production de 90.000 T de sucre
raffiné n'est pas en mesure de couvrir l'ensemble de la consommation
nationale estimée à 140.000 T. la grande marge non couverte par
la production de la CSS devait permettre à certains de ces nouveaux
importateurs de faire entrer régulièrement du sucre sans recourir
à des pratiques interdites. Le polémique s'est davantage
accentuée au courant du mois de Mai 2004, période durant la
quelle la CSS s'est retrouvée avec 50000 T de sucre invendu. Les
récents développements faits par la presse nationale sur des
affaires relatives à la fraude montrent dans quelle mesure le
problème de la fraude est devenu un enjeu à dimension nationale.
C'est le cas par exemple de l'affaire du bateau chinois arrêté au
large des côtes sénégalaises entrain de transporter
frauduleusement des marchandises et produits non autorisés à
entrer sur le territoire douanier. Le débat s'est encore accentué
avec les récents événements survenus à
MBOUR60(*) et DAGANA. Dans
le cadre de cette dernière affaire, un agent des douanes a tué un
jeune ressortissant de la localité accusé de s'adonner à
la fraude. Il s'en est suivi des marches de protestation et des agressions
contre les agents de la douane et leurs familles finalement
évacués. Il a même fallu recourir à l'appui des GMI
pour rétablir le calme dans ville. Des accusations ont
été portées sur la douane dans la mesure où ces
populations estiment que ses agents excédent parfois leurs pouvoirs dans
l'accomplissement de leurs missions de recherche de fraudeurs.
Aussi, comme dans le passé, les commerçants de
l'informel considèrent que l'absence de simplicité de la nouvelle
loi n'est pas de nature à favoriser une diminution de la fraude. Elle
pousse certains commerçants à contourner la loi pour
réaliser des marges bénéficiaires que la soumission
à la procédure normale de dédouanement n'aurait pas
permise. Cette dénonciation porte essentiellement sur ce qu'ils
appellent « la valeur minimale ». Pour le secrétaire
général de l'UNACOIS Dame NDIAYE, la législation actuelle
ne colle pas avec la réalité de l'économie mondiale. Cette
valeur constitue le prix de dédouanement de certains produits
importés notamment le sucre. Or dans la réalité actuelle,
le prix du sucre acheté sur le marché international est
très inférieur à cette valeur minimale. De ce fait, elle
contraint l'importateur à débourser plus que ce qu'il ne devait
payer pour importer du sucre, ce qui l'empêche de réaliser des
profits pour amortir ses investissements. Cette position n'est pas en phase
avec celle prise par la douane pour qui la valeur minimale permet de lutter
contre la fraude.
Tout comme pour la période de monopole, nous allons
essayer de nous référer à quelques données
chiffrées pour mieux cerner la problématique de l'acuité
de la fraude dans le contexte actuel de libéralisation.
B : ses incidences
sur les ventes de la CSS.
L'analyse des données ci après va nous permettre
d'apprécier l'évolution des ventes au niveau de la CSS entre la
période allant de 2000 à 2004.
Schéma
n°3. Etat comparatif des ventes/région : 2003 et
2004.
Ce schéma représentatif de l'évolution
des ventes est une parfaite illustration de l'impact de la fraude sur les
ventes de la CSS dans les différentes régions.
Source : Sérvice Commércial de la
CSS.
L'interprétation qu'il y'a lieu de donner à
cette figure est que les régions de Dakar, Thiès, Diourbel et
Louga, zones non frontalières arrivent en tête en 2003. En 2004 ce
sont les mêmes qui arrivent en tête.
Par contre, dans les zones frontalières, la vente est
peu considérable. Cette fraude d'habitude centrée dans les zones
frontalières s'est étendue jusque dans les zones non
frontalières telles que Dakar et Thiès.
La baisse des ventes à Dakar explique la chute des
ventes en 2004. On peut donc dire qu'elle se généralise dans tout
le pays. Donc, on pourrait dire que le sucre frauduleux est aujourd'hui
commercialisé sur l'ensemble du Sénégal.
A titre de comparaison des ventes réalisées par
régions pour les années 1995 et 2003 à l'exception de
celles enregistrées dans la région de Dakar ont subi des baisses
pour les régions de Thiès et Diourbel et un effondrement pour les
autres régions. Les exemples des régions de Kaolack et de
Ziguinchor sont très illustratifs de cette situation. Pour
l'année 1995 les ventes étaient respectivement de 11464 T et 4725
T pour ces deux régions. En 2003, elles étaient
évaluées à 562 T et 49 T. Ces baissent sont dues pour
l'essentiel à la progression de la fraude transfrontalière qui
est très importante dans ces régions. Le sucre consommé
est importé de la Gambie ou de la Guinée -Bissau en passant par
la cote sénégambienne ou à travers les voies de passage
sur le fleuve gambie. La compétitivité supérieure de ce
sucre importé d'Europe résulte des soutiens agricoles et des
subventions à l'exportation dont bénéficient les
producteurs européens. L'Europe revend à perte sur le
marché mondial du sucre. Le sucre est revendu en dessous du prix
réel sur les marchés africains. Le prix sucre subventionné
importé d'Europe est de 304 € contre un prix local du sucre produit
par la CSS qui est de 609 €. D'où l'impossibilité pour la
CSS de produire du sucre sans protection comme le souligné le directeur
général de la CSS déjà en 200261(*).
Schéma
n°4 : Evolution des ventes du 01/01/04 au
31/10/04.
Source : Sérvice
Commércial de la CSS.
Cette tendance s'est confirmée en 2004 comme nous le
montre ce schéma ci- après. On constate que la css est
confrontée à une situation de mévente surtout pour le
premier semestre. Cela est du à une recrudescence de la fraude qui a
provoqué la mévente de 50000 T de sucre et une interpellation des
autorités pour lutter contre la fraude.
Schéma
n°5 : Evolution totale des ventes de 2000 à
2003.
Source : Sérvice
Commércial de la CSS.
Si au cours des années 2000(100120) et 2001(117332) les
ventes de la CSS se sont relativement bien comportées dépassant
la barre des 100.000 T telle n'a pas était le cas pour les exercices
2002 et 2003 durant lesquelles les ventes ont tendu progressivement vers une
baisse continue avec respectivement 97490 T et 87518 T. Tout comme pour le
schéma précèdent, cela s'explique par une
généralisation de la fraude qui s'est étendue dans
certaines régions qui traditionnellement s'alimentent du sucre produit
par la CSS comme en atteste les schémas précédents. Cette
chute des ventes s'est poursuivie pour l'année 2004 durant laquelle les
ventes entre la période du 01/01/04 au 30/09/04 ont chuté de
près de -46,76% comparativement au ventes réalisées au
cours de la même période pour l'année 1995.
Il apparaît à la lumière de ces
résultats que la fraude constitue un danger qui risque de mettre en
péril l'avenir de notre industrie locale. Ses incidences
négatives sur les résultats de la CSS ne sont plus à
démontrer. D'où l'intérêt de porter un regard sur
ses impacts négatifs prévisibles sur la filière
industrielle avant de dégager des solutions pour atténuer ses
effets sur l'économie nationale.
SECONDE PARTIE :
Des impacts négatifs prévisibles de la
fraude sur la CSS et stratégies de lutte contre ladite concurrence.
Seconde Partie: Des impacts négatifs
prévisibles de la fraude sur la filière industrielle notamment
la CSS et stratégies de lutte contre ladite concurrence.
|
De la fraude, découle des impacts négatifs pour
l'industrie sénégalaise d'où la définition de
stratégies claires de lutte contre ladite concurrence.
Relativement aux impacts négatifs prévisibles,
il faut dire qu'elles sont à la fois économiques et
socio-politiques. S'agissant des impacts économiques négatifs,
ils se maniféstent au niveau national par une diminution des recettes de
l'Etat et des pertes importantes en chiffres pour l'industrie locale alors
qu'au niveau local, le secteur formel et informel local risque de subir les
conséquences de la mévente subie par la CSS. Concernant les
impacts socio-politiques, la fraude risque d'entraîner au plan social la
perte de milliers d'emplois et une hausse de la demande sociale, d'une
part ; au plan politique, elle met en échec les politiques de
développement définies par les autorités politiques
centrales et décentralisées.
Relativement à la lutte contre ladite concurrence,
elle se résume à la lutte en cours et aux perspectives dans la
lutte contre la fraude. S'agissant de la lutte en cours, elle est
engagée d'abord par l'Etat au niveau central et local, ensuite par les
syndicats au niveau national et local, et enfin par la CSS au niveau interne et
externe. Pour se qui concerne les perspectives, il y'a les mesures
immédiates se résumant au renforcement des moyens de la douane et
de la sensibilisation sur le « consommer local » et
à la définition du volet marketing par la CSS. Les mesures
à long térme sont relatives à l'assainissement de
l'environnement fiscal et concurrentiel du marché puis à
l'implication des organes de l'UEMOA.
CHAPITRE I :
Des impacts négatifs prévisibles de la
fraude sur l'industrie locale notamment la CSS
Chapitre I : Des impacts
négatifs prévisibles de la fraude sur l'industrie
locale notamment la CSS
|
Ils se rencontrent aussi bien au plan économique que
socio-politique.
Dans le premier cas, la fraude a des incidences sur
l'économie nationale et locale. Au plan national, elle entraîne
une diminution des recettes de l'Etat et cause aux entreprises locales des
pertes importantes en chiffres d'affaires. Sur le plan local, la fraude a des
conséquences sur le secteur formel et informel local.
Dans le second cas, la fraude a aussi des conséquences
sur le plan socio-politique. S'agissant des incidents sociaux, la fraude
entraîne la suppression de milliers d'emplois et une hausse de la demande
sociale. Concernant les impacts politiques, la CSS contribue à faire
échouer d'une part les politiques de relance de la croissance
économique et la réduction de la pauvreté définies
par le pouvoir central ; d'autre part, la fraude met en échec les
politiques de décentralisation définies par les
collectivités locales.
Section I: Des impacts
économiques négatifs prévisibles
Le développement de la fraude entraîne des
conséquences néfastes à la fois sur l'économie
nationale et sur celle des localités qui dépendent directement de
l'activité de la CSS.
Par rapport à l'économie nationale, il faut dire
que la fraude cause à notre industrie locale des pertes en chiffres
d'affaires très importantes. De même, l'Etat subit à son
tour des pertes en recettes fiscales considérables.
L'économie locale de RD-TOLL et sa
périphérie seront aussi touchées en cas de crise frappant
de plein fouet la CSS. Tout comme le secteur formel local composé
d'entreprises ayant principalement pour clientèle les travailleurs de la
CSS, le secteur informel local auront à subir les conséquences
d'un éventuel ralentissement de l'activité de production de la
CSS.
Paragraphe I: Sur
l'économie nationale
La fraude a pour conséquence d'entraîner des
pertes considérables en chiffres d'affaires pour l'industrie locale,
d'une part et, une diminution des recettes fiscales de l'Etat, d'autre part.
A: des pertes en chiffres d'affaires pour
l'industrie locale.
L'économie sénégalaise à travers
son industrie est aujourd'hui asphyxiée par le phénomène
de la fraude. L'ampleur de ce désastre se mesure à travers les
pertes en chiffres d'affaires estimées en centaines de milliards.
L'analyse de l'évolution des chiffres d'affaires de certaines
entreprises locales suffit à informer du poids très important
pris par les produits issus de la contrebande dans l'économie
sénégalaise.
Relativement à la CSS, il faut dire que celle-ci a vu
ses chiffres d'affaires baisser de prés de 40% dans un contexte
où sa production totale est insuffisante pour couvrir la totalité
de la demande nationale en consommation de sucre. Pour un marché de
140.000 T, elle ne produit de 90.000 T. Les difficultés
enregistrées dans la commercialisation de son sucre auraient fait subir
des pertes de 22 milliards de ses chiffres d'affaires62(*).
Outre la CSS, d'autres entreprises sont touchées de
plein fouet par le phénomène. Ce qui se traduit
concrètement par des baisses importantes en termes de chiffres
d'affaires. En effet, dans une étude menée auprès de 14
entreprises sénégalaises, le SPIDS a eu à recueillir des
données chiffrées qui confirment la dangerosité de la
fraude sur notre industrie locale.
Le secteur de la confiserie est particulièrement
touché par la fraude. L'exemple de la CDA qui a subi une chute de
20% de ses ventes est assez illustratif.
L'huilerie n'est pas épargnée. La SONACOS
connaît un effritement des ventes qui ont subi une chute de 15%. Sa
production est fortement concurrencée par l'huile frauduleusement
importée de la Mauritanie et ou de la Gambie.
La SIGELEC qui s'occupe de la production des piles, à
son tour, connaît aussi des baisses de prés de 20% en termes de
chiffres d'affaires. FULMEN a aussi enregistré une chute libre de ses
chiffres d'affaires.
Le secteur du textile n'est pas aussi épargné.
L'industrie textile locale avec ses 6 milliards de chiffres d'affaires ne
couvre à peine que 5% du marché estimé 132 milliards.
Les industriels ne sont pas les seuls à subir les
conséquences de la fraude. Les commerçants importateurs de bonne
foi qui s'acquittent normalement des taxes qui leurs sont imposés pour
leurs importations et fournissent aux services de la douane des papiers en
bonnes et dues formes subissent à leur tour les agressions de
commerçants véreux et peu respectueux des règles de
dédouanement. En d'autres termes, ces « commerçants
professionnels de l'informel » sont concurrencés par les
« commerçants occasionnels de l'informel.» A cet effet,
« la différence de degrés se situe au niveau des taxes
payées : les occasionnels ne paient que le prix du transport pour
eux-mêmes et pour leurs marchandises ; les gens de l'informel
paieraient une partie des droits de douane et la patente, en plus du fret des
marchandises ; par contre ceux du formel paieraient, en plus des charges
ci-dessus, un impôt sur le bénéfice et des charges
liées au personnel, telles que les cotisations sociales. »
Les pertes pour l'industrie locale en termes de chiffres
d'affaires sont chiffrées à plus de 275 milliards durant
l'année 2003 selon le Spids dans ce même rapport qui fait un
état de la diminution des recettes fiscales.
B: Une diminution
des recettes fiscales pour l'Etat
A l'image des entreprises du secteur formel et
commerçants professionnels de l'informel de bonne foi, la fraude
n'épargne pas aussi l'Etat sénégalais.
Au plan fiscal, la fraude entraîne pour l'Etat des
conséquences dommageables très énormes.
Des difficultés naissent dans le recouvrement des
droits de portes et taxes intérieures que les importateurs et les
consommateurs devraient verser dans ses caisses.
Aujourd'hui, des études menées ont eu à
montrer que la fraude, compte tenu de ses incidences fiscales, des pertes
énormes au service du fisc car : « elle minore les
recettes tant au niveau de la fiscalité de portes (droits de douanes)
qu'au niveau de la fiscalité intérieure (TVA et
éventuellement taxes spécifiques).»63(*) C'est le cas notamment de son
impossibilité de créer de nouveaux hôpitaux,
établissements scolaires, branchements sociaux en eau et
électricité et de nouvelles routes. Face à la hausse du
nombre de chômeurs, l'Etat n'aura plus à mener des politiques de
recrutements. La diminution des recettes fiscales ne sera pas du genre à
insister l'Etat à augmenter les salaires.
Paragraphe II : Sur
l'économie locale
Les entreprises du secteur formel installées à
RD-TOLL et sa périphérie auront à subir les
conséquences négatives nées de la fraude. Les entreprises
détenues par des professionnels évoluant dans le secteur de
l'informel seront à leur tour touchées par les méfaits de
cette concurrence déloyale.
Constitue une concurrence déloyale, un ensemble de
procédés concurrentiels contraires à la loi ou aux usages
du commerce constitutifs d'une faute intentionnelle ou non et de nature
à causer un préjudice aux concurrents.
La jurisprudence qualifie le dénigrement, les moyens de
désorganisation de l'entreprise rivale, l'utilisation de
procédés commerciaux illégitimes et l'utilisation
illégitime de la réputation d'autrui d'acte de concurrence
déloyale.
A: Sur le secteur formel
local
Depuis son implantation en 1970, la CSS a contribué
à favoriser l'essor économique et social de la ville de
Richard-Toll et sa périphérie. Avec ses 6000 travailleurs, elle a
favorisé l'arrivée de d'autres entreprises évoluant dans
des activités relevant du secteur formel. C'est le cas notamment de la
Banque Intérnationale pour le Commerce et l'Industrie du
Sénégal (BICIS), Caisse Nationale de Crédit Agricole du
Sénégal (CNCAS), CBAO et Crédit Mutuel du
Sénégal (CMS) évoluant dans les secteurs de
l'épargne et de la distribution de crédits. Ces banques et
établissements financiers ont principalement pour clientèle les
travailleurs de la CSS à qui elles octroient des prêts
destinés à la consommation ou aux investissements dans le secteur
de l'immobilier.
Par ailleurs, de son activité dépend la survie
de certaines branches d'activités qui connaissent aujourd'hui une
prospérité certaine. Prés de 5 Milliards de chiffres
d'affaires sont crées par la CSS au profit des entreprises aux quelles
elle est liée par la sous-traitance A ce titre, on peut citer l'exemple
de la ST (Sénégalaise de Tuyauterie) qui redéploie une
partie de son personnel à la CSS.
Ainsi, de façon indirecte, la css créée
de la valeur ajoutée considérable au profit de ces autres
entreprises du secteur formel qui ont trouvé en Richard-Toll et sa
périphérie un pole économique ou faire prospérer
leurs activités.
Par conséquent, il apparaît clair que toute
menace sur la continuité de l'activité industrielle de la CSS
causera implacablement des dommages collatéraux importants sur la survie
et le maintien de ces organismes bancaires et financiers par exemple.
Le licenciement de travailleurs pour cause de
difficultés économiques dues à la fraude entraîne
pour ces derniers la rupture des liens contractuels les unissant à leur
banque. Le manque à gagner demeure considérable surtout lorsque
ces clients ont eu à bénéficier de prêts qu'ils
n'ont pas encore remboursés intégralement. Devant
sécuriser leurs investissements, elles se tourneront vers d'autres
horizons pour rentabiliser leurs activités. Cette délocalisation
aura pour conséquence de provoquer des licenciements en cascade qui se
feront sentir tant au niveau social qu'économique surtout sur le chiffre
d'affaires d'entreprises évoluant dans les secteurs stratégiques
de l'eau, l'électricité et le téléphone.
En effet, les travailleurs de la CSS constituent l'essentiel
des abonnés de la SDE, SENELEC et SONATEL. Ces dernières seront
par conséquent obligées de retirer leurs abonnements à ces
travailleurs désormais sans emplois. Des réductions de personnel
s'imposent à leur tour pour ces entreprises qui vont subir une baisse de
leurs activités.
Le secteur informel local subira à son tour les
conséquences négatives nées de la progression de la
fraude.
B: Sur le secteur
informel local
Il faut rappeler que la CSS a favorisé
l'émergence de nouvelles couches sociales qui ont su tirer pleinement
profit de l'essor de celle-ci. La migration de nouvelles populations a
contribué à enrichir des commerçants évoluant dans
le secteur informel. Ces derniers ont principalement pour clientèle des
travailleurs de la CSS. Cette situation est illustrée par l'engouement
que suscite l'approche de la date du « 4 » de chaque
début de mois qui coïncide avec la période de paiement des
salaires. Cette date vient remplacer la fameuse date du
« 8 » qui participait au rayonnement de la ville de
Richard-Toll. A l'inverse, la période d'inter-campagne signifie pour ces
commerçants à une période de morosité
économique illustrée par une baisse de leur chiffre
d'affaires.
A un autre niveau, ces commerçants de l'informel qui
s'acquittent régulièrement des taxes subissent la concurrence
déloyale des fraudeurs qui déversent sur le marché les
mêmes produits à des prix imbattables.
Le secteur de l'immobilier a aussi connu une explosion car il
fallait construire de nouvelles habitations destinées à la
location pour les nouveaux arrivants. Les populations autochtones tirent de
grands profits en s'adonnant à cette activité qui procure des
revenus considérables.
Sur ses réseaux de canalisation, les populations
riveraines puisent l'eau nécessaire pour arroser des parcelles
destinées au maraîchage. De même, ce réseau facilite
l'irrigation de milliers d'hectare de terres destinées à la
riziculture qui constitue la deuxième source de revenu derrière
les 11 milliards de masse salariale annuelle versée par la CSS soit plus
de 700 Millions par mois.
Par ailleurs, il faut souligner que des marchés de
fournitures de matériels et de confection de blousons et tenues de
travail pour les employés sont attribués chaque année aux
artisans de la ville. Ce marché destiné à
l'équipement des travailleurs en « blousons, masques,
lunettes, gans et autre accessoires » est aujourd'hui estimé
à 120 millions. Il en était de même pour ce qui concerne la
fourniture journalière de sandwichs destinés à
l'alimentation des ouvriers agricoles chargés de la coupe manuelle de la
canne. Dans ces secteurs s'activent des milliers de travailleurs
professionnels qui dépendent de l'activité de la CSS.
Par conséquent, il apparaît clair que la CSS a
contribué à la transformation de Richard-Toll et de sa
périphérie. Ce pôle économique accueille de
nombreuses autres entreprises évoluant aussi bien dans le secteur formel
que celui de l'informel. La survie de leur activité demeure intimement
liée à celle de la CSS qui doit faire face à une
poussée de la fraude qui risque de produire des conséquences
négatives tant au plan social que politique.
Section II : Des impacts
socio-politiques négatifs prévisibles.
La fraude entraîne des conséquences
négatives prévisibles tant au niveau social que politique. D'une
part, au plan social, elle risque de causer la suppression de milliers
d'emplois à cause de la fermeture de nombreuses entreprises
confrontées à une mévente chronique. Aussi, la fraude
risque de favoriser une hausse de la demande sociale due à la
suppression des milliers d'emplois.
Au niveau politique, cette situation a pour corollaire de
mettre en échec les différentes politiques de
développement définies soit par les autorités centrales ou
par les collectivités locales dans le cadre de la
décentralisation.
Paragraphe I : Au niveau
social
La fraude entraîne au niveau social des
conséquences dramatiques que sont : d'une part, la suppression de
milliers d'emplois et d'autre part, une hausse de la demande sociale du fait
surtout des couches défavorisées.
A : La suppression de milliers
d'emplois
En contribuant à la baisse de prés de 40% de
chiffres d'affaires de leur valeur ajoutée, la fraude a contribué
à remettre en cause la survie des entreprises locales qui constituent
les principaux créateurs d'emplois. Cette situation a pour corollaire de
provoquer la perte de milliers d'emplois. Des entreprises jadis florissantes
ont mis la clé sous la porte. Travailleurs et travailleuses sont
jetés dans la rue et « vivent un drame social
poignant ». Ces entreprises symboles de la renaissance d'une
industrie locale en mutation à l'image de la CAFAL ont disparu. C'est le
cas notamment des sociétés BATA, Biscuiterie De Médina
(BDM) et Nocose.
Le secteur du textile reste de loin la branche
d'activité la plus touchée par la progression fulgurante de la
fraude. La Gambie et la Mauritanie constituent les principaux lieux
d'importation de ces marchandises frauduleuses.
Aujourd'hui, des entreprises à la dimension de la
Sotiba, la NSTS et la SOTEXKA se sont disloquées. Les pertes d'emplois
se chiffrent en milliers. Le marché de l'emploi s'est donc
progressivement effrité pour compter actuellement moins de deux milles
employés (2000).
Le secteur de la métallurgie est
particulièrement touché par la fraude. La fermeture de
l'unité de production de la SAFOR a entraîné le
redéploiement du personnel vers d'autres usines du groupe. Cette
délocalisation des activités de cette société a
causé des pertes considérables d'emplois.
Relativement à la CSS, il faut dire qu'une persistance
voir une aggravation de la mévente de son sucre fortement
concurrencé par le sucre importé frauduleusement pourrait avoir
pour conséquence d'hypothéquer l'avenir de plus de 6000 milles
travailleurs qui vont à nouveau allonger la très longue liste de
personnes à la recherche d'emplois.
En effet, des entreprises de la dimension de la CSS qui
constitue le second employeur privé derrière l'Etat et verse
annuellement prés de 11 milliards à titre de salaire sont
difficiles à reconstituer. Ceci nécessite de lourds
investissements matériels et financiers que des investisseurs
étrangers ou nationaux ne sont pas toujours capables de supporter dans
un environnement économique fortement marqué par la fraude.
Les conséquences sociales de cette pratique sont
évaluées, en terme de pertes d'emplois, à prés de
8328. Par ailleurs, la masse salariale non distribuée est estimée
à plus de 25, 4 milliards.64(*)
B : La hausse
de la demande sociale
Cette hausse de la demande sociale est surtout le fait des
couches sociales les plus défavorisées. De nouvelles
catégories sociales aux situations économiques très
précaires viennent grossir la masse de cas sociaux déjà
existant. Il s'agit en réalité d'ex-travailleurs qui ont vu leurs
anciennes sociétés mettre la clé sous la porte du fait de
la fraude.
En effet, celle-ci en causant la perte de milliers
d'emplois crée un drame social incommensurable et contribue à
accroître la pauvreté à laquelle la majorité des
sénégalais est confrontée.
Aussi, s'il est vrai que le consommateur en se procurant de la
marchandise issue de la fraude notamment le sucre paie moins cher
comparé à celui produit industriellement par la CSS, par contre,
l'un des inconvénients majeurs du recours à ce genre de produits
est qu'ils ne font l'objet d'aucun contrôle sanitaire.
En causant à l'Etat des pertes en termes de recettes
fiscales, la fraude pour ce dernier à définir et créer de
nouvelles taxes fiscales que les consommateurs doivent
régulièrement s'acquitter pour couvrir ses besoins. Ce qui
constituent des charges supplémentaires pour des populations
confrontées à la pauvreté.
Autre conséquence sociale négative
prévisible, c'est la dislocation des familles que risque
d'entraîner la perte d'emploi de la personne en charge des besoins
familiaux. Cette situation engendre dans certains cas des difficultés
dans la satisfaction des besoins en éducation et en santé des
personnes qu'elle a sous sa responsabilité.
A travers le drame social qu'elle crée, la fraude
participe aussi, à bien des égards, à une intensification
des revendications populaires. Par conséquent, elle devient une source
d'instabilité politique et sociale. Les autorités politiques se
voient confrontés à une série des réclamations
tournant autour des questions de la création de nouveaux emplois pour
les ex travailleurs qui ont vu leurs sociétés fermées
à cause de la fraude. La fermeture d'entreprises favorise l'exode des
populations qui viennent grossir le rang des populations de la banlieue
confrontées à des problèmes liées à
l'aménagement de leur cadre de vie et la satisfaction de leurs besoins
sociaux. Ces zones à fortes concentrations de chômeurs constituent
des lieux potentiels où se développent les contestations à
l'endroit de l'autorité de l'Etat qui ne serait plus en mesure de
remplir ses missions les plus essentielles.
L'Etat sera confronté par ailleurs à des
revendications syndicales relatives à la protection des emplois et
à une hausse de salaires.
Par conséquent, on peut dire que la fraude, lorsqu'elle
n'est pas combattue, constitue un facteur d'instabilité sociale et
politique susceptible de menacer l'organisation sociale et économique
d'un Etat.
A cet effet, l'Etat est souvent interpellé pour
apporter les solutions les plus idoines à ses problèmes sociaux
à travers la définition de nouveaux programmes
économiques. La réussite de ces politiques restant aujourd'hui
compromise à cause de la fraude.
Paragraphe II :
Au niveau politique
La fraude a pour conséquence de mettre en
échec d'une part, les politiques de relance de la croissance
économique et de réduction de la pauvreté définies
au niveau étatique par le pouvoir central et, d'autre part, elle
contribue à compromettre l'exécution des programmes de
développement définis au niveau local par les
collectivités locales.
A : Une mise en échec des politiques de
relance de la croissance économique et de réduction de la
pauvreté définies par le pouvoir central.
Relever le défi du développement et inscrire le
Sénégal dans la catégorie des pays émergents
constituent la principale priorité de toutes les équipes
dirigeantes qui ont eu à se sont succéder à la tête
de l'Etat. Les différentes politiques définies ont toujours eu
pour but de favoriser des investissements privés dans tous les domaines
de la vie économique plus particulièrement dans le secteur des
industries. Ces investissements devraient permettre la création et
l'installation de nouvelles unités de production industrielle qui, d'une
part vont permettre la création de valeur ajoutée à
distribuer au profit des populations, d'autre part soutenir la croissance
économique nationale.
En effet, le niveau de développement d'un pays se
mesure à travers l'analyse d'un ensemble d'indices
macro-économiques que sont le Produit Intérieur Brut (PIB) et
le Produit National Brut (PNB). Et les industries participent pour une part
très pondérante au calcul de ces différents indicateurs
précités. Ainsi, atteindre un taux de croissance à deux
chiffres demeure un préalable à l'inscription du
Sénégal dans la catégorie des nouveaux pays
émergents et le sortir de sa situation de pays pauvre très
endetté dans laquelle elle se meut actuellement. Une nouvelle dynamique
enclenchée depuis l'alternance politique par les nouvelles
autorités politiques a permis d'atteindre une croissance
économique remarquable de 6% pour l'année 2004. Ce qui place le
Sénégal en tête des pays de l'UEMOA.
Mais aujourd'hui ces efforts sont entrain d'être
anéanti par le développement exponentiel de la fraude qui freine
l'essor de l'industrie locale. A travers les pertes financières qu'elle
cause à nos industries, la fraude constitue une menace très
sérieuse pour la survie de nos industries qui sont les principaux
soutiens de la croissance économique. La fraude en réduisant les
marges industrielles et en participant à la fuite d'investisseurs
potentiels a fait subir à l'économie nationale une perte de
prés de 40% de sa valeur ajoutée évaluée à
plus de 110 milliards.
Par ailleurs, la fraude constitue un obstacle à
l'arrivée de nouveaux investisseurs privés qui se soucient
d'abord de rentabiliser leurs investissements. En ne recevant pas des garanties
relatives à l'écoulement de leurs productions, ils se
détourneront de notre pays pour aller investir dans d'autres
marchés beaucoup plus avantageux. Les propos recueillis auprès du
DRH de la CSS sont assez illustratifs de l'état d'esprit qui anime la
plupart des investisseurs privés. Pour ce dernier « si
la contrebande n'existait pas, la CSS aurait construit une seconde unité
de production de sucre à Dagana pour couvrir la totalité de la
demande nationale. Mais face aux difficultés rencontrées pour
vendre ses 90.000 T, elle ne s'engagerait pas dans de tels
investissements. »
L'économie nationale sera désorganisée
à tel point que le tissu industriel n'existerait plus. A la production
nationale, succédera l'importation de produits étrangers qui
auront pour conséquence d'entraîner des pertes en devises.
L'économie sénégalaise aura à ressembler à
un souk où viennent compétir des produits aux origines parfois
douteuses. La compétitivité de nos entreprises au sein de l'Uemoa
sera remise en cause. Et l'objectif d'atteindre une croissance
économique à deux chiffres ne serait qu'une ambition
irréalisable.
Et il aura à découler de cette perte de
compétitivité de nos entreprises locales, un risque
d'instabilité politique et sociale majeure.
B : une mise en échec des
politiques de développement définies
par les collectivités
locales.
Entre 1970 et aujourd'hui, la ville de Richard-Toll a connu un
essor économique et social très considérable. Elle doit
son titre de pôle économique du nord grâce à la
réussite industrielle et commerciale de la CSS. Cette dernière
contribue à hauteur de plus de 60% du budget de la municipalité.
Cette manne financière demeure la seule source de revenu
conséquente qui puisse permettre à la mairie de prendre en charge
les principales préoccupations des populations locales.
Dans le cadre de l'approfondissement du processus de
décentralisation enclenchée depuis le vote de la loi 96-06 du 22
Mars 1996 portant décentralisation, de nouvelles compétences ont
été transférées aux collectivités locales.
Les responsabilités de ces dernières se sont
considérablement accrues. Il demeure par conséquent
impératif pour ces dernières d'assurer la plénitude des
tâches qui leurs sont dévolues. Les domaines relatifs à
l'éducation et à l'assainissement demeurent par exemple des
responsabilités entièrement réservées aux
collectivités locales.
Une éventuelle diminution des redevances et taxes
versées par la CSS et d'autres entreprises établies localement
à la municipalité se fera sentir négativement dans la
réalisation des programmes socio-économiques.
Dans ce sens, une mévente au niveau de la CSS aboutira
à des retards dans le versement de la taxe municipale. D'ailleurs, les
retards récurrents intervenus dans le versement de cette redevance
entame la bonne marche de la mairie qui se retrouve bloquée à
cet effet. Une éventuelle fermeture de la CSS aura pour incidence de
provoquer une paralysie des institutions communales. Les investissements
communaux prévus seront par conséquent bloqués pour
indisponibilité des ressources de financement.
Par contre, favoriser l'installation et la
pérennisation d'entreprises à l'instar de la CSS contribuera
à mieux lutter contre la pauvreté en milieu rural d'une part et,
permettra les collectivités locales à mieux assumer leurs
responsabilités dans le cadre de la décentralisation, d'autre
part.
Aussi indirectement, la CSS crée de la valeur
ajoutée considérable au profit de la municipalité
à travers les taxes et impôts versés par d'autres
entreprises dont la clientèle est essentiellement constituée par
ses travailleurs.
En outre, la disponibilité immédiate des
ressources des recettes tirées de l'acquittement des impôts dus
par ces sociétés permettra à l'Etat de mieux se
désengager au profit des collectivités locales. Les
activités les plus coûteuses et les priorités nationales
reviendront à sa charge.
CHAPITRE II :
Des stratégies de lutte contre la fraude sur le
sucre
Chapitre II :
Des stratégies de lutte contre la fraude sur le sucre
|
L'étude et l'analyse des stratégies de lutte
contre la fraude porteront sur deux parties : la première sera
consacrée à la lutte qui est en cours alors que la seconde
consistera à des recommandations dans le cadre de la lutte contre la
fraude.
Relativement à la lutte en cours, il faut dire qu'elle
est essentiellement engagée par l'Etat, les organisations syndicales et
les entreprises telles que la CSS victimes par la fraude. Celle-ci a eu
à prendre des mesures de lutte tant au niveau interne qu'externe.
Quant à l'Etat, il a entrepris des séries de
mesures au niveau national et qui font l'objet d'une application de la part de
ses services décentralisés. La forte implication des syndicats se
manifeste tant au niveau national que local.
Concernant les perspectives dans la lutte contre le
phénomène de la fraude, il faudra les appréhender sous
l'angle des mesures à court terme ou immédiates, d'une part et,
sous celui des mesures à long terme nécessitant une
définition dans le futur du cadre de répression de la fraude,
d'autre part.
Dans l'immédiat, il s'agira de renforcer les moyens
dont dispose la douane tout en incitant les populations à consommer les
produits issus de la production locale. Aussi, il faudra, pour ce qui concerne
la CSS, définir une bonne politique de marketing de ses produits.
Pour le long terme, il faudra assainir l'environnement fiscal
et concurrentiel du marché national et communautaire. Aussi, il faudra
élargir les bases de la lutte contre la fraude en l'érigeant
comme priorité au sein de l'UEMOA.
Ainsi, il s'agira de traiter en premier lieu la question
relative à la lutte en cours puis, en second et dernier lieu, essayer
d'envisager des perspectives dans le cadre de la lutte contre la fraude.
Section I : De la lutte en cours
Aujourd'hui, la lutte contre le
phénomène de la fraude a pris une nouvelle dimension nationale
très considérable. En ce sens qu'il touche tous les secteurs de
la vie politique, économique et sociale, les différents acteurs
qui s'activent dans tous ces domaines précités à savoir
Etat, patronat, syndicat et association de consommateurs ont senti la
nécessité de s'impliquer dans cette lutte.
D'abord, au niveau étatique, des séries de
mesures ont été prises au niveau national. L'Etat sera au niveau
local à travers les services gouvernementaux.
Ensuite, les organisations professionnelles
représentant les travailleurs se sont fortement impliquées dans
cette lutte contre la fraude qui menace la survie de leurs propres emplois.
Enfin, la CSS particulièrement touchée par la
croissance exponentielle de la fraude sur le sucre s'est
particulièrement distinguée en développant des
stratégies de lutte tant au niveau interne qu'externe.
Ainsi, il s'agira de procéder successivement à
l'analyse des différentes actions menées par l'Etat, les
syndicats et la CSS.
Paragraphe I :
De la lutte engagée par l'Etat
En vue de mieux atténuer les conséquences
nuisibles engendrées par fraude, l'Etat a mené diverses actions
de lutte contre ladite pratique tant au niveau national que local.
A : Des mesures prises au niveau
national
A travers une série de mesures, l'Etat a montré
son engagement à lutter vigoureusement contre la fraude. Depuis la
libéralisation, il a entrepris un certain nombre de « garde
fous » pour atténuer les conséquences néfastes
devant découler de cette politique d'ouverture du marché
à la concurrence extérieure. Pour preuve, la loi 94-63 du 22
Août 1994 sur le prix, la concurrence et le contentieux économique
précise dans son exposé des motifs
qu' : « en marge de l'organisation de la concurrence dont
le destinataire final est le consommateur, des règles de protection de
celui-ci sont posées pour pérmettre à l'autorité
administrative de faire face aux insuffisances du marché et aux
fraudes. »
Les dispositions du CD viennent réprimer convenablement
les infractions relatives à la circulation et la détention de
marchandises ne respectant pas les prescriptions légales, à la
possession ou la détention de marchandises frauduleuses
importées, aux fausses déclarations ou désignations, aux
mensonges portant sur les poids et quantités de marchandises
importées.
Afin de mieux lutter contre la fraude et accroître les
recettes douanières nécessaires à l'accomplissement de sa
mission régalienne, l'Etat a engagé depuis quelques années
des actions considérables pour équiper la douane en moyens
humains et matériels.
Relativement aux moyens humains, il faut noter que le
gouvernement du Sénégal a entrepris des efforts de recrutement
de personnels pour renforcer les ressources humaines de la douane.
Relativement aux moyens matériels, l'Etat a
équipé le Port Autonome de Dakar (PAD) matériels de
détéction issus de la technologie de pointe. Ces scanners
permettent de passer en radio l'ensemble des containers sans procéder
à leur ouverture. D'une part, ils permettent de gagner du temps et
d'autre part, à lutter contre les dissimulations et fausses
déclarations portant sur la quantité des marchandises
importées.
À travers le « Système
Gaindé », l'Etat a entrepris des efforts d'informatisation des
services de la douane. Il s'agit d'un outil efficace qui permet d'effectuer en
toutes simplicités les procédures de dédouanement en
faisant des économies en temps. Il renforce la transparence dans
l'accomplissement des différentes formalités nécessaires
au paiement des droits de douane.
Dans la lancée du « système
Gaindé », le « système Orbus
2000 » a été lancé pour permettre aux
différents démembrements de la douane de communiquer plus
facilement entre eux. Il constitue une passerelle entre l'administration et
ses clients. En effet, « la célérité dans
le traitement des transactions commerciales et financières constitue un
impératif de premier ordre pour la compétitivité de nos
entreprises et surtout un instrument d'incitation et de promotion des
investissements au Sénégal »65(*) selon le DG des Douanes. Cet
outil permettra une simplification et une facilitation des formalités
liées au dédouanement de marchandises. De même, sa mise en
oeuvre permettra la réduction des délais de traitement des
formalités, l'amélioration de l'efficacité des traitements
effectués par les services de la douane. Ce nouveau système est
un prolongement de la nouvelle version du système informatique
« Gaindé » 2000 de la douane
spécialisé dans la collecte électronique des documents
nécéssaires au dédouanement. De ce fait, il permet de
mieux lutter contre la corruption qui favorise la fraude douanière
notamment celle administrative.
Par ailleurs, l'Etat a eu à équiper
l'administration de la douane en dotant celle-ci de « 100
véhicules de poursuites » d'après un agent haut
placé de la douane66(*).
L'engagement des autorités s'est manifesté par
la tenue le 14 Avril 2004 d'un conseil présidentiel sur la fraude. La
décision majeure qui était ressortie de cette réunion
portait sur la création de l'observatoire national de lutte contre la
fraude. Les parlementaires se sont à leur tour impliqués dans la
lutte. Ils ont eu à organiser des tournées et visites à la
CSS pour s'imprégner de la question de la fraude et exprimé leur
engagement à voir renforcer les moyens de lutte.67(*)
La douane a eu à tenir à son tour des
concértations sur la question de la fraude. Les journées
nationales organisées les 11 et 12 Mai 2005 illustrent l'engagement des
services de la douane à lutter contre cette concurrence déloyale.
Pour l'année 2004, les recettes douanières ont
été estimées à un peu plus de 277 milliards. Elles
ont subi une hausse de 15 milliards par rapport à ceux de 2003. Les
résultats contentieux fournis par la direction de la répression
de la fraude sont évalués à 2 milliards pour 150 affaires
traitées. Les amendes ont généré des recettes de
plus de 7 milliards.68(*)
Les actions menées par ses services ont permis de mettre la main sur des
quantités importantes de marchandises frauduleusement entrées sur
le territoire douanier. On peut citer la saisie de marchandises frauduleuses
d'une valeur de plus de 200 millions de Fcfa par la douane
sénégalaise. C'est à bord du navire Zhu-yu 629 battant
pavillon Chine populaire que les soldats de l'économie ont mis la main
sur ces articles : ustensiles de cuisines, draps de lits, serviettes,
tissus, moteurs etc.69(*)
La valeur cumulée des marchandises et du bateau appartenant la
société "China Industrial Shipping" est éstimée
à 1.5 Milliards. Il s'agit d'une des saisies les plus importantes depuis
les 15 dernières années.
Relativement au sucre, il faut dire que les saisies
ont très fortement progressé, comme nous l'indique le tableau
suivant. Il s'agit d'un tableau récapitulatif de l'ensemble des saisies
opérées par la douane sur l'ensemble du territoire national
depuis l'année 2005. Pour l'année 2005, seuls les données
recueillies pour les mois de janvier, février, mars, avril et mai sont
considérées.
Schéma 6 :
Récapitulatif Sucre Saisi par la Douane sur l'ensemble du
Térritoire National par
année : 2002-2003-2004-2005
Source : Sérvice
Commércial de la CSS.
Nous pouvons constater une forte progression des
saisies sur l'ensemble du térritoire national au cours de cette
période. De 3044 en 2002, elles sont passées à 8570 en
2003 puis à 21323 sacs de 50 kgs pour l'année. Rien que pour les
quatre premiers mois de l'année en cours, le total des saisies
chiffré à 5453 est supérieur à celui de
l'année 2002.
Cela est dû en grande partie à la forte
mobilisation de l'Etat qui a doté la douane de moyens substantiels de
lutte contre la fraude. Le dynamisme de ses services a permis cet
accroissement des saisies. Le point culminant a été atteint en
2004. Les pressions faites par la CSS confrontée à une
mévente y ont sans doute étaient pour quelque chose. Il en est de
même de la forte implication des services déconcentrés de
l'Etat.
B : Des
actions menées par les services déconcentrés au niveau
local
La lutte contre la fraude est organisée au niveau
local par les services de la douane, de la gendarmerie nationale et de la
police municipale de RD-TOLL qui collaborent entre eux pour enrayer le
phénomène de la fraude.
S'agissant de la douane, il faut dire que c'est la brigade
commerciale de Rosso communément appelée brigade mobile de Rosso
qui a pour mission d'organiser de façon permanente la lutte contre la
fraude. Cette dernière a connu une évolution dans son
organisation et son fonctionnement.
En effet, il s'agissait au départ d'une brigade mobile
qui a été par la suite transformée en poste de douane. Par
la suite, un bureau auquel a été rattachée une brigade
mobile commerciale a été érigée en lieu et place de
ce poste.
La brigade commerciale apporte son concours au bureau afin
qu'elle puisse accomplir convenablement sa mission. Elle a un rôle
dissuasif car, à travers les déplacements effectués par
ses agents, la brigade pousse les gens à aller directement
dédouaner leurs marchandises auprès du bureau de la douane.
Aussi, elle contrôle puis reprend les excédents de marchandises
non déclarées.
Pour cela, la brigade procède à des
« opérations coups de point » sur l'ensemble de sa
zone d'action qui va de kheud à Bokhol sur la longueur et de Rosso vers
Gouye Mbeuth en profondeur. A cet effet, les agents ont le plus souvent
recours à des barrages posés sur les principaux point
d'entrées et de sorties des villes et villages situés sur son
périmètre d'intervention.
La douane collabore avec des populations civiles qui lui
servent d'informateurs pour identifier les personnes responsables de ce trafic.
Il s'agit pour l'essentiel de trafiquants reconvertis.
Cependant, « la douane ne recrute pas de pisteurs ou
d'indicateurs »70(*)
selon ce même un haut responsable de la douane interrogé sur la
situation professionnelle de ces civils qui travaillent avec leurs
sérvices.
Le mauvais état des pistes dans cette zone rend plus
difficile le travail que les agents de la douane ont à accomplir. Mais
ces « soldats de l'économie » ne jouissent pas d'une
grande estime de la part des populations locales qui ont tendance à les
considérer comme des spoliateurs qui retirent à de
« pauvres citoyens » leurs seuls moyens de survie dont
elles disposent pour mener une vie normale. Les relations sont souvent
très heurtées et aboutissent dans certains cas à des
affrontement qui se soldent par des pertes en vies humaines. On en voudra pour
preuve les récents incidents survenues à Dagana entre la douane
et les populations de cette localité. Lors d'une opération de
poursuite contre des fraudeurs, un agent de la douane a eu à tuer un
ressortissant de cette localité accusé par la douane d'être
un trafiquant. Cette version des faits sera par la suite contestée par
les populations qui s'en sont pris aux agents de la douane. Celle-ci subira des
blessés dans ses rangs. Ils feront l'objet d'un transfert vers Dakar
pour y recevoir des soins. La tension ne sera retombée qu'après
évacuation des douaniers et de leurs familles L'intervention de
personnes de bonnes volontés a permis de faire baisser la tension.
Toutefois la méfiance reste de mise entre ces populations et la
douane.
Le constat qu'il y'a lieu de faire est que cette situation
dépasse les frontières du département de Dagana dans son
ensemble. Elle s'est généralisée sur l'ensemble du
territoire national. Les douaniers, dans le cadre de leurs missions de
sauvegarde de l'économie nationale, font face à une
résistance des populations locales ou des fraudeurs qui sont parfois
armés pour s'opposer à ces derniers. Des incidents similaires
à ceux de Dagana ont été notés dans le passé
entre la douane et les populations de la localité de Bongo. Aussi
récemment, l'intervention des services de la douane de Mbour contre des
fraudeurs s'est soldée par la mort d'une personne. C'est donc dire que
la mission de ces agents n'est pas du tout des plus aisée.
Toutefois, ces services sont parvenus tant soit peu à
donner un coup de frein au développement de la fraude. Leurs actions sur
le terrain ont permis de procéder à l'arrestation des fraudeurs
et la diminution des points de vente sur la route nationale. Des vendeurs
continuent malgré les interventions inopinées de la douane
à s'adonner quotidiennement à la vente de sucre sur l'ensemble de
la ville de RD -TOLL et ses environs.
La brigade commerciale de Rosso appuyée dans
l'accomplissement de sa mission par la brigade de la gendarmerie de RD-TOLL qui
l'assiste matériellement et humainement en procédant à des
arrestations et intérpéllations. Des opérations
combinées sont souvent menées par ces deux services.
La police municipale (PM), en charge de gérer la
circulation sur la route nationale appuie aussi les services compétents
de la douane en procédant à des fouilles sur les calèches
ou voitures. Elle procède à des interpellations et arrestations
de personnes suspectées de s'adonner à la fraude sur le sucre.
C'est le cas des petits vendeurs ou commerçants établis sur les
voies publiques. L'immixtion de la PM dans la lutte contre la fraude
s'explique selon le contrôleur de la PM par le fait
que « la CSS est un partenaire de la commune dont la police
municipale dépend. Agresser un partenaire de la commune, c'est
agrésser la commune elle-même. »71(*)
A cet effet, il avoue que ses agents sont intransigeants avec
les fraudeurs qui détiennent du sucre frauduleux.
On peut noter l'implication de la municipalité de
RD-TOLL dans la lutte contre la fraude sur le sucre. Fortement
dépendante de la CSS qui contribue à plus de 60% de son budget,
les autorités locales ont eu à prendre des mesures pour lutter
contre la fraude. Ainsi par les arrêtés n°00011/ CRT/ SGM du
30 Mai 2003 et n°007/ CRT/ SGM du 20 Avril 2004 portant interdiction de
ventes sur la voie publique sans autorisation, les autorités ont voulu
de façon indirecte porter un coup à la vente de sucre
frauduleusement importé de la Mauritanie. Par ailleurs, il est à
signaler que la municipalité est entrain de finaliser un protocole
d'accord de partenariat avec la CSS. En voie de signature, cet accord va
intégrer le volet lutte contre la fraude même s'il est à
noter que le document qui nous avait été montré au cours
de nos enquêtes n'en fait pas spécialement
référence. En des termes génériques, la mairie
s'est montrée disponible à l'aider au développement de
son exploitation.
Au niveau départemental, on note l'existence d'un
comité de pilotage de lutte contre la fraude composé des
différents maires des communes de Rosso, RD-TOLL et Dagana ou de leurs
représentants, du préfet du département, du
contrôleur de la PM, du chef de brigade de la GN et de la CSS. Au plus
fort de la crise de mévente rencontrée par la CSS, le
comité avait organisé des séries de réunions
auxquelles les différentes autorités précitées ont
assisté.
Mais le constat est que ces différentes mesures non pas
de façon visible encore eu d'effet sur la commercialisation du sucre
frauduleusement importé de la Mauritanie. Les populations continuent de
vendre ce sucre en toute impunité sur la route nationale n°2 et sur
l'Avenue Jacques Mimeran au vu et su des autorités communales et des
forces de l'ordre. Le contraste est accentué par le fait que le point
de vente le plus important de la ville est localisé à la gare
routière située en face de la mairie et de la PM et à
moins de 100m de la brigade de la GN.
Néanmoins, il faut noter que la lutte a permis un
accroissement des saisies de sucre réalisées au niveau de la
région de Saint-Louis. Ceci est illustré par ce tableau
ci-après.
Schéma 7:Total saisi
région de Saint-louis : 2002/2003/2004/2005.
Source : Sérvice
Commércial de la CSS.
A l'analyse, on s'aperçoit que les saisies dans la
région de Saint-Louis ont connu une forte progression dans la mesure
où elles ont progressé de 1441 en 2002 à 6098 en 2004. en
2003, les saisies ont aussi progressé en passant de 1441 en 2002
à 2520 en 2003. Rien que pour les quatre premiers mois de l'année
2005, elles sont évaluées à 1250 sacs. La forte hausse de
2004 s'explique par les efforts fournis lors de cette année pour
combattre la fraude. C'est d'ailleurs durant cette période que le
problème a pris une telle ampleur alarmante au point d'inquiéter
l'opinion nationale. La grave crise de mévente rencontrée par la
CSS en mai 2004 en est une illustration convaincante.
Autorités centrales et décentralisées se
sont engagées dans la lutte contre la fraude qui connaît des
résultats mitigés et ne va pas sans grandes
difficultés.
A l'image des services étatiques, les organisations
syndicales se sont aussi fortement impliquées dans la lutte pour
l'éradication de cette pratique nuisible.
Paragraphe II :
De la forte implication des organisations syndicales
La forte implication des syndicats se manifeste à
travers l'importance des actions de lutte contre la fraude qu'ils ont
engagés à l'échelon national et local.
A : Au niveau national
Diverses actions ont été entreprises par les
syndicats représentés au niveau de la CSS pour venir à
bout de la fraude sur le sucre. Elles s'inscrivent, « ces actions de
sensibilisation », pour l'essentiel dans le cadre d'une
stratégie unitaire définie par toutes les composantes du
mouvement syndical pour intéresser populations, décideurs
politiques, partenaires sociaux et opérateurs économiques sur les
dangers liés à la pratique de cette catégorie de
concurrence déloyale72(*). Néanmoins, « chaque syndicat peut
de façon autonome décider de mener des actions en dehors de
toute concertation avec les autres organisations »73(*) comme le souligne un
responsable syndical interrogé sur la question.
Inquiétés par la poussée grandissante du
phénomène de la fraude qui s'est généralisée
à travers le pays, ils ont eu à mener des actions de
sensibilisation dés le début de la crise de la mévente en
Mai 2004.
Dans ce cadre, de multiples campagnes de sensibilisation ont
été menées. On peut à ce titre citer par
exemple :
- l'organisation par l'inter-syndicale d'une
réunion en date du 26 Mai 2004 à 16h à la maison du
travail de l'Union Démocratique des Travailleurs du
Sénégal (UDTS) sis à Pikine Tally-Boubess portant
exclusivement sur la situation de crise que traverse la CSS. A l'issue de
cette réunion à laquelle ont pris part Alioune Sow SG de UDTS,
Mody Guiro SG de la CNTS, Cheikh Diop SG de la CNTS/FC, Mamadou Doumbia SG
Adjoint de la Confédération des Syndicats Autonomes (CSA) et
Bounama Diallo de l'Union Nationale des Syndicats Autonomes du
Sénégal (UNSAS), a été prise la décision de
tenir une conférence de presse sur la situation de la fraude au
Sénégal le vendredi 28 Mai 2004 à 11h à
l'hôtel Indépendance. La présence effective de ces
différents leaders montre l'importance que les syndicats accordent
à cette question.
- l'organisation d'une série de rencontres avec le
Ministre d'Etat, DC du Président de la République par ailleurs
président du comité de lutte contre la fraude, le DG des douanes
et les autorités de la gendarmerie.
- l'organisation d'une rencontre à Kaolack avec les
membres du Conseil National de Concertation des Cadres Ruraux du
Sénégal (CNCR) pour les sensibiliser sur le problème de la
fraude ainsi que les risques qu'elle fait peser sur la commercialisation de
leur produit. Ces mêmes actions ont été menées
auprès des associations d'éleveurs, d'artisans et de
consommateurs.
- visites auprès d'entreprises comme la SIPS,
SEDIMA, SIGELEC, SONACOS et BD. Tout comme la CSS, elles rencontrent des
difficultés de commercialisation de leurs produits à cause de la
fraude.
- rencontres avec le patronat et les industriels
nationaux notamment le Conseil National du patronat (CNP), Conseil National des
Employeurs du Sénégal (CNES) et le Syndicat des Professionnels
de l'Industrie et des Mines du Sénégal (SPIDS). Et dans une
perspective à long terme, « les syndicats envisagent de mener
la lutte sur un plan global notamment en intéressant les autres
entreprises touchées par la fraude »74(*) comme le souligne le
même interlocuteur pour qui aussi, « l'idée est de
créer une coalition fédérale de tous les acteurs de la
production industrielle pour lutter contre la fraude »75(*). De même, ils envisagent
d'initier un projet de coopération intér-entreprises qui
favoriserait selon eux les échanges de produits entre les
industries : chaque entreprise devenant du coup fournisseur de l'autre
pour les produits qu'elle fabrique. Ces deux projets au niveau national
étaient en cours de réalisation au moment de notre enquête.
Il faut rappeler qu'individuellement, certaines centrales ont
eu à mener des actions de sensibilisation pour leur propre compte. C'est
le cas notamment de la CNTS qui a organisé une marche pacifique le
vendredi 09 juillet 2004 à Dakar « pour attirer l'attention
des pouvoirs publics et populations sur les dangers de la fraude qui plongent
également des milliers de personnes et mères de familles dans la
pauvreté.76(*)»
Tout comme au plan national, les organisations syndicales ont
eu à engager des actions au plan local pour lutter contre la fraude.
B : Au plan
local
A l'échelon local, la lutte contre la fraude a
été engagée dans le cadre de l'inter-syndicale. Si des
actions ciblées ont été menées à titre
individuel, il faut dire qu'elles restent marginales par rapport à
celles entreprises de façon collégiale.
A ce titre, on peut citer par exemple :
- l'organisation de visites d'information sur les impacts
négatifs de la fraude sur l'économie de RD-TOLL et ses environs
auprès des Imams des mosquées de la commune afin qu'ils relayent
le message auprès des populations.
-l'organisation et la participation à de nombreuses
émissions de sensibilisation sur les dangers de la fraude
diffusées sur les ondes de l'antenne FM de la radio DUNYA-RD-TOLL.
- l'initiation de séries de rencontres avec les
différents délégués de quartiers de la commune et
les conseillers municipaux dont 11 sur 52 sont des travailleurs de la CSS.
Cette sensibilisation a été élargie auprès des
différentes associations féminines, sportives et culturelles. Les
artisans locaux, fortement dépendant de la CSS, ont été
approchés par l'inter-syndicale.
Au plan administratif, les syndicats ont organisé
différentes missions auprès des autorités
douanières et celles de la gendarmerie locale. A titre d'exemple, on
peut citer l'organisation d' « une mission composée de
Mamadou DIOP, Ablaye SAMB, Baidel SARR et Souleymane SY respectivement
secrétaire général adjoint de l'UDTS, de la CNTS, de
l'UNSAS et de la CNTS/FC qui s'est rendue le 20 octobre 2004 à
saint-louis. »77(*)
Dans ce cadre, l'objectif était de rencontrer
« les responsables des forces de douanes et gendarmerie des
régions de Saint-Louis et Matam. » Et il ressort clairement de
la conclusion du compte rendu de cette mission qu'elle « a permis
à la commission de raffermir les relations, déceler un
partenariat basé sur le renseignement pour faire face à ce
fléau qui est la fraude. » Ces différentes actions ont
permis de poser le débat sur l'acuité de la problématique
de la fraude et ont par conséquent permis à stimuler la lutte
contre la fraude au Sénégal.
Et pour finir, il faut rappeler que les membres de la CNTS
(Section CSS) on eu à participer à la rédaction du
mémorandum sur la fraude initié par la CNTS qui constitue l'acte
majeur qui concrétise les efforts de lutte, au plan national et local,
contre la fraude et résume la position des syndicats par rapport
à cette forme de concurrence.
Les auteurs de ce document commencent :
- d'abord, par une description de la situation actuelle des
entreprises locales rongées par le phénomène de la fraude
qui touche tous les secteurs de la vie économique ;
- ensuite, ils procèdent à une analyse des
incidences fiscales, économiques et sociales négatives
qu'entraîne la fraude sur notre économie ;
- et enfin, ils terminent par présenter une
série de propositions qui vont dans le sens d'un combat plus
accentué et permanent contre la fraude.
Ce document remis au Président de la République
a fait l'objet d'une félicitation de la part de ce dernier comme en
atteste cette correspondance n°0769 en date du 16 juillet 2004
adressée au Secrétaire général de la CNTS.
On peut dire que les organisations syndicales se sont
particularisées, dans la lutte contre la fraude, par leur forte
implication qui se manifeste par l'importance des mesures et actions
menées tant au plan national que local.
La CSS, en tant qu'entité directement
menacée et interpellée par la question de la fraude, a eu,
à son niveau, à prendre des mesures au niveau interne et
entrepris des démarches avec ses partenaires au niveau externe.
Paragraphe III :
Des initiatives prises par la CSS
Afin de répondre aux différentes critiques
auxquelles elle fait l'objet, la CSS a eu à définir une
série de mesures tant au niveau interne qu'externe.
A : des mesures prises au niveau
interne
Plusieurs griefs, parmi lesquels la cherté du sucre
qu'elle produit, l'absence de marketing de ses produits et la qualité
supposée inférieure de son sucre par rapport à celui
importé de l'étranger, sont adressées à l'endroit
de la CSS.
Aujourd'hui, conscients des remarques faites sur l'entreprise
et ses produits, les dirigeants ont entrepris d'inscrire leurs actions dans une
nouvelle dynamique d'ouverture et d'adaptation à la concurrence
extérieure.
Sur le premier point, l'entreprise envisage pour les
années à venir de diminuer les prix de son sucre pour être
plus compétitifs sur le marché local. En effet, le niveau
élevé du sucre produit par la CSS participe au
désintéressement des populations qui s'alimentent le plus souvent
avec le sucre importé frauduleusement de pays voisins. Ce sucre
coûte moins cher que celui produit par la CSS.
Concernant le volet marketing, il est placé dans la
catégorie des programmes à développer
ultérieurement par l'entreprise. Pour le DRH interrogé sur la
question, la CSS envisage de développer ce volet qui n'est pas encore
pris en compte dans l'entreprise, une fois que le sucre redeviendra moins cher
et plus compétitif par rapport au sucre importé.
Quant à l'amélioration de la qualité du
produit, des efforts sont entrain d'être faits pour rendre beaucoup plus
conforme le produit final aux attentes du consommateur. Il faut cependant noter
que pour le responsable de la qualité au sein de cette entreprise que
« la blancheur ne devrait pas être elle seule plus
déterminante pour apprécier la qualité du sucre par les
consommateurs mais plutôt le pouvoir sucrant.78(*) »
Différentes mesures ont été prises pour
atteindre un certain nombre d'objectifs jugés permanents.
Pour ce faire,
- des contrôles et suivis journaliers de la
qualité du sucre sont opérés à tous les maillons de
la chaîne de production.
- l'entreprise procède à l'achat des meilleurs
produits de traitements et des jus et sirops nécessaires à la
fabrication du sucre.
- un contrôle régulier est fait par les services
en charge de la culture de la canne à sucre.
- le maintien d'un taux d'humidité à la sortie
de 0,2% du sucre raffiné.
- le maintien d'un taux d'impureté de 0.2% au maximum
pour la blancheur du sucre raffiné à sa sortie.
Il ajoute que l'omission ou le non respect d'une de ces
conditions entraîne la non commercialisation de ce produit qui sera
retraité à nouveau pour être mis à nouveau sur le
marché sous réserve du respect des exigences de
qualité.
Toutefois, il faut préciser que la plupart de ces
points sus-évoqués ne sont qu'à l'état de projet
à l'exception du volet amélioration de la qualité du sucre
produit par la CSS. Ceci présume de l'inefficacité de ces
mesures internes dans la lutte contre la fraude. En d'autres termes, la part de
ces mesures dans la baisse de la fraude est relativement faible.
La réalisation de ces mesures dans le long terme
devrait permettre à la CSS de convaincre le consommateur à
recourir à son sucre pour ses besoins en consommation. En favorisant la
compétitivité de son produit, la CSS parviendra à
écouler ses produits sans grande difficulté et résister
aux agressions du sucre importé frauduleusement.
Il faut aussi dire que la direction mène à
l'intérieur de l'entreprise, auprès des travailleurs, une
politique de sensibilisation sur les menaces qui pèsent sur la CSS.
Ceci, participe à leur conscientisation et permet d'attirer leur
attention sur les conséquences néfastes de la fraude et les
dangers qui guettent leurs emplois. La diréction de l'entreprise demeure
sévère contre les travailleurs et leur famille qui s'adonnent
à la fraude. L'exercice d'une telle activité par un travailleur
apparaît comme une violation de la clause de non-concurrence qui lie tout
employé à son employeur. Par conséquent, sur la base de ce
motif, un licenciement le cas échéant ne serait pas
illégal.
Ces mesures prises en interne seront appuyées par
d'autres prises en externe pour venir à bout de la fraude.
B : des
démarches entreprises au niveau externe.
Même si elle n'a vocation à organiser la
répression contre la fraude, la CSS participe, de part ses contributions
au fond national de lutte contre la fraude, au renforcement du dispositif de
lutte mis en place pour enrayer cette pratique.
Premier contributeur à ce fond, elle apporte assistance
matérielle et financière aux équipes et services en charge
de la lutte contre la fraude. A ce titre, elle collabore avec les douanes, la
GN et la PM de la ville de RD-TOLL et du département de Dagana.
A la PM, la CSS avait, au moment de l'intensification de la
lutte contre la fraude qui a coïncidé avec la période de
mévente, à mettre à sa disposition un véhicule et
un chauffeur pour l'appuyer dans sa lutte contre la fraude. Ceci a permis,
selon le contrôleur de la PM, d'accroître la saisie de
marchandises frauduleuses. Toutefois, il est à déplorer selon
notre interlocuteur le fait que cette assistance ne se soit pas
pérenniser car la CSS a par la suite retirée l'ensemble des
moyens mis à la disposition de son service.
Aussi, la CSS dispose d'un large réseau d'informateurs
privés. Par le biais de celui-ci, elle aide les services gouvernementaux
engagés dans la lutte contre la fraude à obtenir des informations
relatives aux différents points de passage et de stockage du sucre
frauduleux et à l'identité des trafiquants.
Précisons que dans sa collaboration avec la douane,
celle-ci restitue à la CSS les quantités de sucre saisies dans le
cadre de la lutte contre la fraude. Le sac est revendu à 15.000 Fcfa
à la CSS nous révèle le responsable de la vente dans
ladite entreprise. Cependant, il précise que ce sucre est
retraité avant sa mise en vente. Ceci permet de respecter les normes de
qualité et de sécurité auxquelles la CSS est
soumise79(*).
De même, elle se sert de lobbies composés de
syndicats des travailleurs et des organisations patronales pour faire pression
sur l'Etat pour qu'il accentue davantage la lutte contre la fraude et
accroît la répression de cette forme de concurrence
déloyale.
Par ailleurs, la CSS soutient des initiatives prises tant au
niveau national que local pour organiser des marches et émissions radios
portant sur la sensibilisation sur les dangers de la fraude.
Section II : Des
pérspéctives dans la lutte contre ladite concurrence.
On se contentera dans le cadre de l'étude de ces
perspectives de préconiser des solutions consistant en des mesures
à court terme d'une part et des mesures à long terme d'autre
part.
La nécessité de les prendre au plus vite trouve
sa justification dans le fait que les fraudeurs n'attendent guère pour
faire prospérer leurs activités. Et les conséquences
néfastes sur l'activité industrielle ne cessent de s'aggraver.
S'agissant des mesures immédiates ou à court
terme, elles tournent pour l'essentiel autour de la question du renforcement
des moyens de la douane et de la sensibilisation sur le « consommer
local » d'une part et de celle relative à la
définition et au développement par les services compétents
de la CSS d'une politique claire et expressive de marketing de leurs produits
et à la préservation de l'image de l'entreprise auprès du
public.
S'agissant des mesures à long terme
préconisées, elles devront premièrement s'articuler autour
de la question de l'assainissement de l'environnement concurrentiel et fiscal
du marché. Deuxièmement, elles doivent conférer à
la lutte contre la fraude un caractère sous-régional à
travers l'implication de certaines organisations communautaires telles que
l'UEMOA.
Paragraphe I : Des
mesures à court terme.
Elles doivent dans un premier temps tendre vers un
renforcement des moyens de la douane et de la sensibilisation sur le
« consommer local » puis dans un second temps, viser le
développement par la CSS d'une politique expressive de marketing de ses
produits.
A : le renforcement des moyens de la
douane et de la sensibilisation sur
le « Consommer
local »
Avec ses 700 Kms de frontière maritime, le
contrôle du territoire national demeure difficile pour les soldats de
l'économie. A cela s'ajoute
l'hétérogénéité de l'environnement
économique national et sous régional caractérisé
par des conflits d'intérêts entre opérateurs
économiques ou Etats de la zone géographique ouest-africaine.
Certains pays favorisent leurs propres ressortissants ou des opérateurs
économiques étrangers à s'adonner
irrégulièrement et de façon intensive à
l'importation frauduleuse de produits vers le Sénégal.
Face à cette situation, il semble nécessaire de
renforcer les moyens techniques, humains et opérationnels des services
de contrôle de l'Etat : douanes, police et gendarmerie. Des efforts
considérables ont été consentis par l'Etat qui a pris
conscience de la nécessité de lutter contre ce trafic aux
conséquences désastreuses pour l'industrie locale. Ces mesures
méritent d'être renforcées de façon
significative.
A cet effet, des efforts de recrutement en personnel doivent
être consentis pour mieux enrayer les conséquences
négatives liées à la fraude. En effet, face à
l'ampleur du travail qui les attend sur le terrain, l'Etat se doit de garantir
aux agents de la douane une meilleure protection à travers un
renforcement des moyens matériels et du cadre de travail afin de mieux
faire face aux fossoyeurs de l'économie nationale. La situation
matérielle dans laquelle nous avons trouvé durant nos
enquêtes les agents de la brigade commerciale de la douane de Rosso et
plus généralement les services de répression de la fraude
n'est pas du genre à faciliter une lutte efficace contre les
contrebandiers. Seul 12 agents y compris le chef de brigade ont la lourde
mission de surveiller un territoire allant de Kheud à Bokhol puis de
Rosso vers Gouye Mbeuth en profondeur. Un seul véhicule était
à la disposition de ces agents qui sont installés dans des locaux
qui appartiennent à l'ancienne ORTAL d'après les dires de l'agent
interpellé sur la question. Selon ce dernier « on ne peut
pas assurer la surveillance avec le peu de moyens dont on dispose. Il nous faut
20 personnes au minimum. C'est la raison pour la quelle on travaille avec
des civils et la gendarmerie qui détache un agent tous les deux
ans pour venir nous appuyer. »80(*)
A ces difficultés, il faut ajouter celles liées
à l'hostilité du milieu naturel durant la saison des pluies. Le
fleuve devient inaccessible à cause de la crue pour pourchasser les
fraudeurs. Face à ce manque de moyens, les services locaux de la douane
ont le plus souvent recours à la vedette du Groupement National des
Sapeurs Pompiers (GNSP) de RD-TOLL pour traquer les fraudeurs qui utilisent des
pirogues pour déverser des marchandises en provenance de la Mauritanie.
L'exemple de sous équipement matériel et humain
sus évoquer est assez illustratif pour pousser l'Etat à envisager
le renforcement des moyens des services de la douane notamment ceux
situés dans des zones frontalières. La mise en oeuvre du plan
« Equipement Douane Plus » de 100 millions FCFA s'annonce
comme un début de solutions de ce problème lié aux sous
équipements de ses services.81(*)
Par ailleurs, il faudra envisager de renforcer la
collaboration exemplaire qui existe entre la douane, la gendarmerie et la
police. Cette synergie des forces permettra de mettre hors d'état de
nuire ces fossoyeurs de notre économie nationale. C'est là sans
doute l'explication des résultats encourageants obtenus dans le cadre de
la lutte contre la fraude sur le sucre. Cette collaboration a permis de faire
reculer la progression de la fraude sur le sucre. La CSS commence à
redresser la vente au niveau de ses ventes. La figure ci-après en est
une illustration convaincante.
Schéma 7 : EVOLUTION
DES VENTES DU 01/01/04 AU 30/04/05.
Source : Service Commercial de la CSS
L'étude de ce tableau offre deux avantages : d'une
part, il permet de retracer l'évolution des ventes
réalisées par la CSS durant la période allant du
1er juin 2004 au 30 avril 2005 ; d'autre part, il permet
d'apprécier l'impact de la lutte contre la fraude.
Entre le mois de Mai 2004 (3724 T) et le mois d'Avril 2005
(7767 T), on constate une hausse progressive des ventes réalisées
par la CSS. Les meilleurs résultats ont été atteints
durant les mois d'Août, Septembre et Octobre 2004 avec respectivement
9028 T, 9504 T et 14552 T de sucre vendu. D'ailleurs, les ventes du mois
d'Octobre constituent la seconde meilleure performance des 10 dernières
années (février 1995 : 15223 T). L'influence du Ramadan est
sans doute pour quelque chose dans cette hausse.
Aussi, si l'on compare l'évolution des ventes
réalisées entre les quatre premiers mois de l'année 2004
et ceux de l'année 2005, on note une évolution constante des
ventes pour l'année 2005. « A ce rythme de 8000 T/mois, la CSS
sera en mesure d'écouler la totalité de sa
production »82(*) nous confie le responsable du service commercial.
Au regard de ces résultats, il semble nécessaire
d'encourager une telle collaboration devant permettre de venir à bout de
la fraude. Ce partenariat doit aussi être étendu au secteur
privé car une confiance mutuelle doit exister entre les
opérateurs économiques et les services chargés de la
sécurité économique de nos frontières. La
concertation entre les différents acteurs de la vie économique
doit être encouragée. L'organisation de rencontres entre la douane
et le secteur privé sur des thèmes comme
celui-ci : « Quel partenariat entre la douane
sénégalaise et les entreprises pour renforcer la confiance des
entreprises et la sécurité aux frontières
»83(*) est
à encourager afin de lever tout équivoque entre ces acteurs de
l'économie et les populations.
En effet, en plus de l'hostilité
généralement manifestée par les populations riveraines
à l'égard des soldats de l'économie, il faut noter qu'on
est entrain d'assister à une proféssionnalisation et une
criminalisation de la fraude. L'utilisation des nouvelles technologies de
l'information et de la communication par les fraudeurs rend difficile le
travail des douaniers. A cause du recours aux armes à feu par les
fraudeurs, la douane subit annuéllement d'importantes pertes en vies
humaine. Les incidents survenus le Vendredi 20 Mai 2005 à Baila,
localité située à 16 Km de Bignona, suffisent à
rendre compte de cette situation : lors d'une fouille effectuée sur
des voitures de transports en commun, des agents de la douane ont fait l'objet
d'une attaque par une bande armée. Un ancien agent de la douane
reconverti en indicateur au profit de ses anciens collègues est
tombé sous les balles de ce groupe de malfaiteurs. Trois autres agents
on été blessés dont un grièvement. Il faut rappeler
que cet incident est intervenu au moment où le DG de la Douane
effectuait une tournée d'inspection des services placés sous son
autorité dans cette zone.84(*) En guise de réponse à ces
problèmes récurrents d'insécurité, ce dernier
affirmait déjà lors de la cérémonie d'ouverture
des journées nationales sur la surveillance douanière
que « notre réflexion porte sur la meilleure
manière de faire usage de l'arme à feu en cas de
nécessité surtout d'entretenir avec nos concitoyens des relations
à prévenir des incidents tels que ceux que nous avons eu à
déplorer dans le passé.»85(*)
Aussi, la douane se doit de mener une campagne d'information
et de proximité vers les populations pour les sensibiliser sur les
dangers de la fraude et les objectifs qu'elle poursuit en luttant contre la
fraude. Ceci permettra de mieux dissiper les incompréhensions entre elle
et les populations qu'elle protège à travers la défense de
notre économie.
C'est la raison pour la quelle il semble nécessaire
d'essayer de définir un cadre de défense et de valorisation des
produits locaux. Le « consommer local » doit être
favorisé afin de permettre un meilleur écoulement des produits
locaux. C'est pour cette raison que la démarche entreprise par certains
producteurs locaux en association avec les associations de consommateurs
demeure salutaire. Grâce à cette collaboration, la CPCN (coalition
pour la production et la consommation nationale) a été
portée sur les fonds baptismaux.
Le mouvement Artisans- Paysans- Eleveurs- Travailleurs-
Industriels (A.P.E.T.I) « se veut d'être à l'avant
garde pour le développement de notre cher Sénégal par la
consommation des produits faits par les sénégalais, pour les
sénégalais. » De même, cette coalition qui doit
cultiver le sens du patriotisme « refuse donc que notre
économie soit phagocytée par une mondialisation dont les
règles du jeu sont faussées au départ. » Aussi,
« elle dit non à la concurrence déloyale des
excédents de production subventionnés que nous
dévérsent les pays développés transformant ainsi le
Sénégal en SOUKS. »86(*)
A l'analyse de ces idées véhiculées, on
serait tenté de la rattacher à une branche du mouvement
alter-mondialiste qui lutte pour une meilleure équité dans le
commerce international. La promotion de la production nationale devra
nécessairement passer par un développement d'une politique
expressive de marketing pour sensibiliser les populations.
B : le
développement d'une politique expressive de marketing par la CSS.
S'il y'a un domaine dans lequel la CSS s'illustre et se
singularise foncièrement des autres grandes entreprises, c'est sans
nulle doute son absence sur le marché publicitaire local.
Malgré la libéralisation intervenue dans le
secteur du sucre, elle semble être victime de son passé
d'entreprise en situation de monopole. Le sucre produit par la CSS ne semble
faire l'objet d'aucune publicité. De même, il est à noter
l'absence d'un service chargé de cette mission particulière dans
ladite entreprise. L'entreprise semble être mal préparée
au changement de contexte législatif et réglementaire du
marché. Raison pour laquelle, un réaménagement interne
allant dans le sens d'une meilleure promotion de son sucre s'impose.
La qualité de son sucre est parfois indexée par
certains consommateurs qui la juge incompatible avec le thé, produit
très prisé par les sénégalais.
Il faudra par conséquent envisager l'organisation de
campagnes publicitaires aux fins d'informer et de sensibiliser les
consommateurs sur l'ensemble du processus de fabrication de son sucre depuis la
culture de canne à sucre au stade de conditionnement. Ceci permettra
aussi de mettre en exergue les garanties sécuritaires offertes par son
sucre par rapport à celui frauduleusement importé.
La promotion de la qualité au sein des entreprises
demeure par conséquent un préalable pour accroître la
productivité et la compétitivité des produits locaux sur
le marché national et international. La soumission à ces normes
de qualité permettra de mieux faire face à la concurrence
déloyale des produits importés frauduleusement et à
moindre coût.
Il incombe à la CSS d'aller dans le sens d'un
rapprochement et d'une meilleure proximité avec les consommateurs.. Ses
sigles et effigies doivent être présentent dans toutes les grandes
manifestations locales et nationales afin d'offrir une meilleure
visibilité de ses produits. La publicité demeure de plus en plus
un maillon fort de toute une politique commerciale. Pour mieux faire face
à la concurrence, les entreprises, qu'elles soient multinationales ou
nationales développent des stratégies publicitaires, usent des
Nouvelles Technologies de l'Information et de la Communication (NTIC) et
collaborent à cet effet avec les médias qui sont les instruments
de propagande par excellence. Des sommes colossales sont prévues et
injectés dans le marché publicitaire. Un devoir d'information de
l'entreprise à l'égard de ses clients et plus
généralement des consommateurs s'impose aux entreprises. La
confection d'un site Web s'impose à la CSS au regard de sa dimension
En effet, « La culture de la qualité aussi bien au
niveau des industries qu'au niveau des services est aujourd'hui fondamentale
pour nos économies. La conquête des marchés
étrangers passe par la promotion de la qualité.»87(*) De même, « Les
entreprises doivent se conformer avec la modérnité. La promotion
de la qualité doit être leur priorité. Mais, cette culture
de la qualité doit aussi se faire au niveau des services.»88(*) Ceci illustre bien cette
nécessité d'adaptation au contexte actuel du marché
caractérisé par la liberté de concurrence. Certes, la CSS
est connue à travers le pays mais il s'impose donc à elle de
soigner son image à l'endroit des populations.
Par ailleurs, il faut ajouter que la CSS souffre d'un
problème d'intégration et d'acceptation par son milieu.
Malgré son impact économique et social indéniable su la
localité de RD-TOLL et sa périphérie, une frange de la
population locale considère qu'elle doit davantage s'impliquer de
façon plus poussée dans les politiques de développement et
de réalisations d'infrastructures socio-politiques et sportives dans la
ville. Dans ce même ordre d'idées, la CSS est parfois
opposée à des entreprises telles que la Société
Nationale de Télécommunications (SONATEL) qui, selon les
populations, invéstissent dans le social pour améliorer les
conditions de vie des populations dans les zones ou elles se sont
implantées. 89(*)
Selon les dirigeants de l'entreprise, celle-ci s'acquitte
régulièrement des taxes à la mairie qui il revient de
biens gérer ces deniers. « La CSS n'a pas vocation à
investir dans le social »90(*) déclare à cet effet le DRH qui en
même temps révèle que son entreprise ne cesse de s'activer
dans ce domaine pour venir en aide aux populations.
Face à ces critiques, il y'a lieu pour la CSS de mener
une large campagne d'information et de sensibilisation sur ses actions
quotidiennes et réalisations pour les populations. Ceci dissipera les
malentendus avec les populations et accroîtra l'estime de ces
dernières à son égard. Aussi, elle doit envisager un
marketing poussé dans les régions qui se trouvent
éloignées des sites de productions. Les dirigeants de
l'entreprise devraient voir comment dans la mesure du possible installer un peu
partout à travers le pays des services commerciaux afin de se rapprocher
davantage de ses clients. Celle-ci permettra à ses partenaires d'entrer
directement en contact avec l'entreprise.
Ces actions, alliées aux mesures à long terme
permettront de venir à bout de la fraude.
Paragraphe II : Des
mesures à long terme
Ces mesures devront aller dans le sens d'un assainissement de
l'environnement concurrentiel et fiscal du marché d'une part et donner
un caractère sous-régional à la lutte contre la fraude en
impliquant les organisations communautaires notamment l'UEMOA d'autre part.
A : Aller vers un assainissement de
l'environnement concurrentiel et fiscal
La non appartenance de certains pays frontaliers du
Sénégal à la même zone économique et
monétaire constitue une des principales sources d'accroissement de la
contrebande. Une telle configuration est entrain de faire subir à l'Etat
du Sénégal et à son industrie locale des pertes
considérables en térme de recéttes fiscales et en chiffres
d'affaires. Des entreprises mettent la clef sous la porte et des milliers de
travailleurs se sont retrouvés au chômage à cause de la
fraude.
Face à cette situation, il appartient à l'Etat
sénégalais de jouer la carte de la fermeté face à
ces Etats et aux trafiquants afin d'éradiquer la fraude. Certes, les
Etats sont libres de définir la nature de la politique économique
qui leur convient, cependant leur mise en oeuvre ne doive pas porter
préjudice à l'économie des pays limitrophes. La Mauritanie
et la Gambie s'adonnent à une politique de rééxportation
qui porte préjudice à l'industrie sénégalaise.
L'essentiel des produits importés frauduleusement au
Sénégal proviennent de ces Etats voisins.
Des mesures de rétorsions économiques peuvent
être prises dans le cadre de l'UEMOA afin de pousser ces autres pays
à collaborer dans le cadre de la lutte contre la fraude avec ces Etats.
Par ailleurs, un renforcement des moyens juridiques de lutte contre la fraude
s'impose. L'impunité « ZERO » contre les fraudeurs
doit être de mise. Cette fermeté doit aller dans le sens de
l'imposition d'un certain nombre de quotas d'importations attribués
à des commerçants légalement agrées pour permettre
les entreprises nationales d'écouler leur production. Dans le cas
précis de la CSS, le gouvernement peut prendre des décrets
d'interdictions de toute forme d'importation sur le sucre durant la
période de campagne agricole pour lui permettre de vendre sans grandes
difficultés ses 90.000 T de sucre. Le marché national
étant aujourd'hui estimé entre 140.000 et 150.000 T, le reste
devra être partagé entre ces importateurs. Les services
chargés du commerce intérieur doivent à cet effet se
charger de l'application de cette mesure. Le retour au monopole demeurant
impossible dans le contéxte actuel de mondialisation. En effet,
l'art.6.1 infine relatif aux pratiques anticoncurrentielles imputables aux
Etats du Règlement N° 02/2002/CM/UEMOA du 22 mai 2002 relatif aux
pratiques anticoncurrentielles à l'intérieur de l'UEMOA dispose
que Les Etats membres s'interdisent en outre, d'édicter des mesures
permettant aux entreprises privées de se soustraire aux contraintes
imposées par l'article 88 paragraphes (a) et (b) du Traité de
l'UEMOA.
Face à cette globalisation de l'économie
mondiale, il faut veiller à ce que la libéralisation n'aboutisse
pas à un démantèlement progressif du tissu industriel
local déjà précaire. Même les pays
industrialisés procèdent à une protection de leurs
industries contre les dangers de la libéralisation sauvage. L'UE et les
USA protégent leurs industries du textile contre les exportations
chinoises à destination de leur marché.
Le gouvernement ivoirien est allé dans le sens d'une
interdiction totale des importations pour sauver son industrie
locale : « en vue de lutter contre la fraude qui met en
difficulté notre industrie sucrière, le gouvernement a pris un
décret suspendant pour une période allant jusqu'au 31
décembre 2006, toute importation de sucre en cote -d'ivoire »
indique le communiqué du conseil des ministres91(*).
Au plan fiscal, une application renforcée et
intégrale des règlements portant mise en oeuvre de la TEC et la
TCI demeure nécessaire. En effet, malgré l'adoption du TEC le
1er Janvier 2000,de la TDP instituée le 25 Mars 1999, de la
TCI adoptée le 17 Septembre 1999 et plus récemment le
règlement d'exécution de la valeur minimale pris le 13 Mars 2002,
on constate un accroissement excessif des importations frauduleuses. La chute
des ventes de la CSS est assez illustrative de cette situation. Une comparaison
des ventes réalisées avant et après la
libéralisation permet de constater cette recrudescence92(*).
Les mesures prises dans le cadre du TEC n'ont pas permis
à leur tour la pleine promotion de la croissance des exportations de nos
produits vers de marché mondial d'une part, et le contrôle des
importations frauduleuses en direction des Etats membres. Les produits locaux
sont fortement concurrencés par ceux bénéficiant de
subventions gouvernementales étrangères. Qu'il s'agisse de la
TDP, la TCI et la VR, mesures communautaires, elles sont d'application
nationale, le principal problème réside au niveau de leur
efficacité. En effet, si dans le cadre d'une importation de sucre entre
deux pays membres de l'UEMOA, l'un refuse d'appliquer la TCI, ce pays pourra
importer du sucre puis le réexporter frauduleusement dans l'autre pays.
Ces produits échappent au contrôle des services de la douane et
mettent en péril l'avenir de l'industrie locale.
Relativement à la TDP, il faut dire qu'elle n'a pas
connu un franc succès car n'ayant pas permis de compenser, de
façon temporaire, une baisse importante de la protection tarifaire
liée à la mise en oeuvre du TEC. D'application temporaire aussi,
la TDP s'appliquait aux importations en provenance de pays tiers.
L'inconvénient réside dans le fait qu'un produit, originaire de
l'union, importé par un pays tiers et réexporté vers un
autre pays membre de l'union, pouvait coûter moins cher. Par ailleurs,
les modes de calcul du taux de protection effectif ignorent les variations
subies par certaines composantes retenues. Dans le cas du
Sénégal, la mesure était impopulaire.
S'agissant de la TCI, elle est aussi d'application nationale
et s'applique aux importations en provenance de pays tiers. Un produit
originaire de l'Union pourra y coûté plus cher s'il provient d'un
pays tiers. Destinée à protéger la production
communautaire contre les variations erratiques des prix internationaux de
certains produits et contre les pratiques commerciales déloyales, la TCI
ne prend en compte que certaines catégories de produits à un taux
de 10%.
Sur le plan intérieur, le principal problème
réside dans l'acquittement des taxes et impôts. Ceci entrave la
concurrence entre les différents acteurs du marché. Par rapport
au secteur informel, il faudra accentuer le contrôle pour ne pas
permettre aux différents opérateurs économiques
évoluant dans le dudit secteur de se soustraire à leurs
obligations fiscales. Ceci permettra non seulement d'augmenter les recettes
fiscales d'une part, mais aussi d'éviter l'imposition d'un prix maximum
susceptible de rompre les règles de la concurrence entre leurs produits
importés et ceux des industriels d'autre part. La création de la
Contribution Générale Unique (CGU), impôt
synthétique destiné à simplifier les procédures
fiscales applicables au secteur informel constitue un début de
règlement du problème.
Les efforts entrepris dans le cadre de la réforme
fiscale de 2004 sont à redoubler afin de mieux améliorer
l'environnement fiscal des entreprises. C'est ainsi que des mesures de baisses
de 35 à 33% de l'Impôt sur les Sociétés (IS) ont
été prises. La décision prise lors du
cinquième conseil présidentiel de l'investissement par le chef de
l'Etat de réduire l'IS de 33% à 25% à partir de 2006 est
salutaire en ce sens qu'il s'agit d'une mesure de soutien au secteur
privé93(*). On
devra aussi envisager de définir un cadre fiscal spécifique
temporaire pour les entreprises confrontées à la fraude. Cet
allégement de régime fiscal pourra leur permettre de mieux
résoudre les problèmes auxquels elles doivent faire face. La
réduction de la TVA sur certains produits de grande consommation comme
le sucre permettra aux produits locaux d'être plus productif. Il en est
de même pour la suppression de la Taxe d'Egalisation (TE) de 2%.
Il s'agit d'une solution alternative à la question des
subventions et aides d'Etat que le gouvernement pourrait accorder à
certaines entreprises en difficultés ou à des productions
menacées par la concurrence extérieure. Mais au regard des
faibles moyens dont disposent nos Etats, une telle mesure semble improbable.
Ces aides d'Etat ou publiques sont définies par l'art.1. b) du
règlement n°4/2002/CM/UEMOA relatif aux aides d'Etat à
l'intérieur de l'UEMOA et aux modalités d'application de l'art.88
(c) du traité comme « toute mesure qui : (i) entraîne un
coût direct ou indirect, ou une diminution des recettes, pour l'Etat, ses
démembrements ou pour tout organisme public ou privé que l'Etat
institue ou désigne en vue de gérer l'aide; et (ii)
confère ainsi un avantage sur certaines entreprises ou certaines
productions. »
Si sur le principe, l'art.4 de ce même règlement
dispose que « sont interdites de plein droit sans qu'un examen
conformément aux dispositions de l'article 2.2 soit nécessaire :
a) les aides publiques subordonnées, en droit ou en fait, soit
exclusivement, soit parmi plusieurs autres conditions, aux résultats
à l'exportation vers les autres Etats membres ; b) les aides
subordonnées, soit exclusivement, soit parmi plusieurs autres
conditions, à l'utilisation de produits nationaux de
préférence à des produits importés des autres Etats
membres. », il faut néanmoins préciser que le
législateur communautaire a pris le soin de déterminer un
certains nombres d'aides jugées compatibles avec le marché
commun. Il s'agit notamment « les aides destinées à
promouvoir la réalisation d'un projet important d'intérêt
communautaire ou à remédier à une perturbation grave de
l'économie d'un Etat membre » tel que précisé
à l'ar.3.1 (c) du règlement n°4 précité. En
effet, au regard des méfaits qu'elle cause à l'économie
locale, la fraude apparaît comme un phénomène qui perturbe
et désorganise la composition et l'organisation d'un marché. Il
faut donc envisager un réaménagement des dispositions de
protection et fiscale pour permettre une application des mesures
inhérentes à la mise en oeuvre du dispositif tarifaire dans
l'union.
B : Donner un
caractère sous régional à la lutte contre la fraude
notamment dans le cadre de l'UEMOA.
Au regard des proportions de plus en plus inquiétantes
prises par la progression de la fraude, il urge pour les gouvernements des
Etats membres de l'UEMOA élargissent les bases de la lutte contre ladite
concurrence. Plusieurs textes communautaires ont été
élaborés pour réguler la concurrence l'espace de l'UEMOA.
C'est à cet effet que le Règlement N° 02/2002/CM/UEMOA du 22
mai 2002 relatif aux pratiques anticoncurrentielles à l'intérieur
de l'UEMOA a été adopté. A travers celui-ci, les Etats
ont voulu d'une part « renforcer l'efficacité et la
compétitivité des activités économiques et
financières des Etats membres dans le cadre d'un marché ouvert,
concurrentiel et favorisant l'allocation optimale des ressources » et
d'autre part considéré que « le libre jeu de la
concurrence est le cadre idéal pour l'épanouissement des
entreprises opérant sur le marché communautaire.» les
pratiques anticoncurrentielles visées sont, conformément aux
dispositions de l'art.88 du traité interdites à
l'intérieur de l'Union. Il s'agit : des ententes
anticoncurrentielles (art.3), de l' abus de position dominante (art.4), des
aides d'État (art.5) et des pratiques anticoncurrentielles imputables
aux Etats membres(art.6).
L'implication des organisations patronales et syndicales doit
être envisagée afin de mieux faire face à ce
phénomène.
En effet, il est certain qu'un seul Etat ne saurait faire face
efficacement à la montée de la fraude favorisée par la non
appartenance de certains pays à l'espace UEMOA. L'exemple du
Sénégal cerné par la Gambie et la Mauritanie est assez
illustratif de cette hétérogénéité de
l'espace ouest-africaine. Ces pays alimentent pour l'essentiel les
réseaux de contrebande à destination du Sénégal.
Intéresser les institutions communautaires de l'UEMOA
reviendrait à faire adhérer les Etats membres à des
principes communs acceptés par tous.
D'une part, il permettra de définir un cadre
juridique pertinent de lutte et de répréssion du trafic
frauduleux de marchandises entre les différentes parties. A ce titre,
l'édification par les organes de l'UEMOA d'un règlement portant
code des douanes94(*) est
un pas très important qu'il faut davantage saluer. Aussi, les efforts
d'harmonisation des législations portant sur les transactions
internationales sont à consolider.
D'autre part, il devra aboutir à une harmonisation des
positions notamment pour ce qui concerne les négociations commerciales
de l'OMC. Cette unité devra permettre de dénoncer d'une seule
voix la pratique des subventions agricoles octroyées aux producteurs de
coton et de sucre des pays du nord par leurs gouvernements. La récente
condamnation de l'UE par l'OMC à propos des subventions destinées
aux producteurs de sucre suffit à motiver les Etats membres de l'UEMOA
à adopter une position commune lors des débats internationaux
portant sur le commerce international.
Dans cette perspective, il revient à ces différents
pays de faire déclarer certains produits et secteurs tels que le sucre,
le coton ou le textile des questions d'intérêt national. Elles
doivent bénéficier, en raison de l'importance des recettes
fiscales versées dans les caisses du trésor public ou des emplois
créés, d'une plus grande attention. La position prise par l'UE et
les USA sur la question du textile chinois montre bien qu'il est du rôle
des Etats de protéger efficacement leurs industries nationales. C'est
dans ce sens que doit être apprécier à sa juste valeur
la proposition des pays les moins avancés (PMA) à
l'union européenne concernant l'adaptation de l'initiative TSA
concernant le sucre et le rôle des PMA dans l'orientation future du
régime du sucre UE. 95(*)
Adressée le 3 mars 2004 « la présente
proposition constitue une base sur laquelle ce processus pourrait être
réalisé pour le sucre. »
Une unification des stratégies doit aussi aller dans le
sens d'une restriction de l'accès de certains produits au marché
de l'UEMOA. Des mesures de sauvegarde s'imposent nécessairement. Il faut
par conséquent limiter les importations de certains produits qui
menacent la survie de l'industrie sénégalaise. La démarche
visant à interdire l'importation d'oignons durant 4 mois pour permettre
l'écoulement de la production nationale est à reproduire dans le
cas du sucre pour protéger la CSS. Il en est de même pour les
autres secteurs de production industrielle menacés par la fraude.
Cette protection devra par ailleurs permettre une meilleure
compétitivité des produits nationaux face à ceux
importés de l'Occident ou de l'Asie. Une concurrence déloyale
contre nos entreprises ne fera qu'accroître la morosité
économique dans la zone UEMOA. Les efforts consentis depuis la
dévaluation du FCFA resteront vains et le taux de chômage subira
une hausse galopante.
A l'image des organisations patronales et syndicales
nationales, les organisations professionnelles doivent s'organiser au niveau
communautaire pour pousser les Etats membres de l'UEMOA à porter plus
d'attention à leur sort lors des négociations internationales.
Le regroupement des acteurs de la filière sucre dans
l'UEMOA et la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique
Centrale (CEMAC) au sein d'une même structure pour défendre leurs
intérêts constitue une démarche à imiter dans les
différentes branches d'activités.
« Structure professionnelle de rencontre et
d'échange élargie aux deux zones régionales UEMOA et
CEMAC »96(*), le
Groupement des Producteurs de Sucre (G.P.S) a été
créé à Abidjan lors de la réunion des 7 et 8 Avril
2004 portant sur l'harmonisation des positions face aux règles
communautaires des deux espaces. Le GPS-CEMAC regroupe les Etats
suivants : Cameroun, Congo, Gabon, Tchad, République Centre
africaine alors que le GPS-UEMOA est composé par les pays
ci-après : Burkina-Faso, Côte-d'Ivoire, Mali et
Sénégal.
L'importance prise par ce secteur et sa contribution dans le
tissu économique de ces Etats est illustrée par les
données suivantes :
- 500.000T de sucre produit en 2004.
- 30.000 salariés employés par la
filière.
- 40 Milliards de masse salariale et autant en valeur
ajoutée.
- 100 Milliards investis ces deux dernières
années.
- 50 Milliards versés à titre de recettes
fiscales.
Ces organisations et lobbies sont des outils efficaces de
pression sur ces différents gouvernements.
Au regard de ces données, il apparaît claire
qu'un soutien croissant doit être apporté par les institutions
communautaires à cette filière afin de mieux protéger
l'industrie locale.
CONCLUSION GENERALE
La fraude, phénomène ancien de par ses causes et
ses manifestations, revêt aujourd'hui des formes multiples. Elle
entraîne des conséquences dommageables inestimables pour
l'industrie locale. L'exemple de la CSS confrontée à la fraude
sur le sucre en est une illustration convaincante.
Concernant les formes actuelles de fraude, on pourrait
distinguer entre la fraude transfrontalière pratiquée par les
populations de localités riveraines de la Mauritanie et de la Gambie par
exemple d'une part, et la fraude structurée pratiquée par des
commérçants de l'informel disposant d'une bonne assise
financière et matérielle, d'autre part.
Dans le premier cas, la fraude transfrontalière trouve
sa justification dans l'hétérogénéité de
l'environnement économique, fiscal et monétaire dans lequel se
meut le Sénégal. En effet, il partage ses frontières avec
la Gambie et la Mauritanie qui n'adhère pas au Traité de l'UEMOA.
Ces pays fondent leur économie sur une politique de réexportation
de produits importés sur le marché mondial à des prix
dérisoires vers le Sénégal. Ceci explique un
différentiel de prix énorme entre le sucre produit par la CSS et
celui frauduleusement importé. Il faut aussi ajouter que la fraude est
un phénomène très ancien fondé sur des
échanges commerciaux long temps pratiqués par les populations de
ces Etats respectifs qui ont toujours ignoré les frontières
coloniales puisque étant liées par les mêmes origines
historiques et familiales.
Quant à la fraude structurée, elle est le fait
de trafiquants Professionnels et organisés disposant de moyens
financiers et matériels très importants. Habitués des
rouages de l'administration, ils usent des imperfections du système de
contrôle douanier pour faire entrer irrégulièrement des
marchandises sur le territoire sénégalais. Aussi, ils
détiennent de nombreux circuits de commercialisation de leurs produits
à travers tout le pays.
C'est la raison pour laquelle, le législateur
sénégalais a défini un cadre de répression de cette
forme de concurrence déloyale. Enfreint ainsi la loi, celui qui s'adonne
à cette forme d'activité. L'exercice de cette pratique
illégale est punie par les dispositions de la LOI n°87-47 du 28
Décembre 1987 portant code des douanes. La sévérité
de la répression varie en fonction de la pratique à la quelle
s'est adonnée le contrevenant. Ces dispositions vont dans le sens d'une
meilleure protection de la production nationale. Dans le cas de la CSS, elle a
subi de façon directe les méfaits liés à cette
pratique. Une analyse des ventes de la CSS durant la période de monopole
et après la libéralisation intervenue dans le secteur du sucre a
permis d'apprécier l'acuité de la question de la fraude sur le
marché national du sucre.
Relativement à ce dernier, il faut dire que son cadre
juridique a eu à subir de profondes mutations en raison des multiples
transformations de l'environnement économique national et international.
Du monopole, on est passé à la libéralisation
complète mais encadrée.
En effet, entre la signature de la convention
d'établissement de la CSS le 29 Juin 1970 et celle du protocole d'accord
de 1994 approuvé par le décret du 30 janvier 1995 mettant fin aux
monopoles détenus par certaines entreprises comme la SOFEFITEX, les ICS
et la CSS, le marché était caractérisé par une
domination de la CSS en situation de monopole sur la production industrielle
et les importations de sucre. Ces règles protectionnistes avaient pour
conséquence de configurer le marché d'une manière telle
que la CSS était seul acteur du marché. Elles produisaient des
conséquences sur les modalités de détermination du prix du
sucre qui était fixé d'un commun accord par l'Etat et la CSS.
Mais depuis que le protocole d'accord de 1994 a posé
les premiers jalons de la libéralisation du marché national
favorisée par la dévaluation du FCFA, une vague d'ouverture
progressive a soufflé dans le secteur du sucre. Au monopole,
succède une nouvelle ère de libéralisation. La CSS a perdu
les avantages qui lui étaient conférés par la Convention
d'établissement du 29 juin 1970 et ses avenants respectifs. De nouveaux
acteurs sont venus investir le marché en se spécialisant dans les
importations de sucre. Toutefois, cela n'a pas permis l'installation d'un
nouveau complexe agro-industriel de production du sucre. Les prix ont
été à leur tour libéralisés.
Cependant, pour mieux encadrer ce processus, l'Etat a, dans le
cadre de la politique d'intégration économique et
monétaire mise en place par l'UEMOA, adhéré au dispositif
tarifaire commun aux Etats parties au traité de cette organisation
sous-régionale ouest-africaine : le TEC. Il a abouti à
l'application de la TCI qui n'a pas totalement endigué la poussée
grandissante de la fraude qui met en péril la survie de l'industrie
sénégalaise.
En effet, qu'elle soit transfrontalière ou
structurée, la fraude constitue de façon indéniable une
menace grave et permanente pour l'industrie sénégalaise notamment
la CSS. Elle a des répercutions graves dans touts les domaines de la vie
économique, sociale et politique de notre pays.
A l'Etat, elle cause des pertes en recettes fiscales et
douanières considérables. L'industrie locale subit des pertes en
chiffres d'affaires très énormes. Certaines entreprises
confrontées à des problèmes de méventes mettent la
clef sous la porte jetant ainsi des milliers de travailleurs au chômage.
C'est la raison pour laquelle, il a fallu définir des stratégies
concrètes et efficaces de lutte contre ce phénomène qui a
pris de nouvelles dimensions inquiétantes : il s'agit de sa
criminalisation et de sa professionnalisation grâce aux NTIC.
S'agissant de la lutte en cours, il faut dire qu'elle est
engagée simultanément par :
- l'Etat à travers les différents services
nationaux ou déconcentrés compétents en matière de
lutte contre la fraude sur le territoire national ;
- les organisations syndicales qui se sont fortement
impliquées dans la lutte tant au niveau national que local ;
- et la CSS dont l'engagement se manifeste à travers
les différentes actions qu'elle a eu à mener au niveau interne et
externe.
Quant aux perspectives dans le cadre de la lutte
engagée contre ladite concurrence, il faut dire qu'elles reposent sur
des stratégies à court et long terme.
Concernant les premières, il faudra envisager de
renforcer les moyens de la douane en travers la dotation de celle-ci en moyens
matériels et humains devant permettre à ces soldats de
l'économie de venir à bout des fossoyeurs de l'économie.
Aussi, il convient de renforcer la sensibilisation pour inciter les populations
à consommer les produits locaux. Aussi, il incombe à la CSS de
développer une bonne politique de marketing qui lui permettrait d'une
part de vanter les qualités de son produit par rapport au sucre
importé frauduleusement et d'autre part de soigner son image
extérieure pour mieux valoriser ses actions et réalisations aux
plan national et local.
S'agissant des secondes, il reviendra à l'Etat
d'assainir l'environnement concurrentiel et fiscal du marché. Un
renforcement et réaménagement du dispositif tarifaire de l'UEMOA
s'imposent à cet effet. Par ailleurs, il faudra élargir les
bases de la lutte contre la fraude en y associant tous les pays qui composent
l'espace UEMOA.
A la lumière de ce qui précède, on peut
dire que la fraude constitue une menace pour l'industrie
sénégalaise et qu'il revient à tous les acteurs de la vie
économique, sociale et politique de s'impliquer dans cette lutte pour
venir à bout du phénomène qui risque d'hypothéquer
l'avenir de notre économie.
Il revient aux entreprises de prôner et d'adhérer
au concept d' «entreprise citoyenne » pour
intéresser travailleurs et populations sur leur devenir. Elles doivent
faire preuve d'intelligence économique et sociale pour
réussir leur intégration dans le nouvel ordre économique
mondial. L'intégration de notre pays dans la mondialisation doit
nécessairement s'accompagner d'une protection efficace de notre
industrie locale. L'Etat doit favoriser le développement d'une
industrie locale compétitive capable de produire la totalité de
la consommation nationale. A l'importation, doit se substituer
l'industrialisation. Celle-ci doit être le seul moyen de relever le
défi du développement. Selon l'Organisation des Nations Unies
pour le Développement Industriel (ONUDI) : « pour un
pays en développement, l'industrialisation signifie plus que le simple
fait d'augmenter le revenu et le volume de production. Elle constitue pour lui
un moyen de moderniser sa structure primitive de production et de transformer
toute la tradition socio-économique qui y est associée. De ce
contexte, il est important de mesurer l'industrialisation sous toutes ses
dimensions, c'est-à-dire à la fois quant à son
étendue et quant à son intensité.97(*) »
Bibliographie :
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La contrebande : Commerces parallèles ou
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complétant l'art.8 du règlement N° 02/97/CM/UEMOA du 28
novembre 1997 portant adoption du tarif extérieur commun de l'union
Règlement N° 02/97/CM/UEMOA du 28 novembre 1997
portant adoption du tarif extérieur commun de l'UEMOA.
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douane des marchandises.
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vigueur le 1er janvier 1999.
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Dossier :
Saint-Louis : Riz local, la vallée de tous les
espoirs publié le Lundi 20 décembre 2004.
Articles à consulter dans ce
dossier :
- Boyo, un oasis de marchandises sur l'autre rive
- Echanges frontaliers, randonnée avec un repenti
sur les chemins de la fraude.
- Une large passoire au nord de Saint-Louis.
- Non loin de la CSS, une intense activité
illicite.
- La contrebande se sucre à Richard-Toll
- Coalition des travailleurs : un sacré
« Apeti » de consommer national
SANE I., Journées national de la
qualité : Macky SALL invite les entreprises à se moderniser.
Edition du jeudi 03 février 2005.
NDIAYE M.B., Saisi de produits frauduleux.
NDIAYE I., Lutte contre la fraude : la douane et le
secteur privé à l'unisson des stratégies, le Soleil
du Samedi du 10 mai 2003.
MBODJI A., Contrebande : Un chalutier chinois
arraisonné dans les eaux sénégalaises, édition
du 26 février 2005.
SY M., Dédouanement
éléctronique : Orbus 2000 entre officiéllement dans
sa phase de production, édition du jeudi 13 mai 2004, p.7.
NANKASSE F., Marché du sucre,
fiscalité : l'UNACOIS rappelle ses revendications,
édition du jeudi 13 mai 2004, p.7.
Sud Quotidien.
Dossier Economie : Fraude et
Contrefaçon au Sénégal : le Sénégal
paye une facture de 500 Milliards, réalisé par Malick NDAW,
Sud Quotidien N°3562 du mardi 22 février 2005, p. 6-7.
Articles à consulter dans ce
dossier :
- La menace sur l'économie
Sénégalaise.
- On ne peut admettre.
- Pas de fraudeur sans administration.
- Vous arrivez avec un produit, on vous le
réplique.
- Beaucoup d'argent à gagner
NDAW M., Bateau de fraude saisi au port : le
chalutier chinois était une véritable casérne d'Ali Baba,
Sud Quotidien- Samedi 26 et dimanche 27 février 2005.
L'Info 7
Dossier Economie-
Social : L'Economie sénégalaise
asphyxiée par la fraude, l'Info 7 du mercredi 7 juillet 2004-Numero
1701-p.3.
Articles à consulter dans ce
dossier :
BORE T., L'environnement économique : une des
causes du développement de la fraude, Interview de Abdoulaye DIOP,
Ministre d'Etat, Ministre de l'Economie et des Finances.
NDIAYE A., L'UNACOIS et l'UNACOIS -Defs dégagent en
touchent : « la fraude ne frappe que le sucre »,
Interview de Dame NDIAYE (SG l'UNACOIS) et Moustapha DIOP (SG l'UNACOIS
-Defs).
YALLY M. A., Plus de 110 Milliards de pertes de chiffres
d'affaires par an.
BORE T., Le textile : un secteur durement
touché.
Autres.
LEPEYTRE L., La côte d'ivoire protége son
sucre : Le gouvernement interdit les importations pendant deux ans,
lundi 16 avril 2004
MORADIAN M.A., L'UE fait appel à l'OMC dans le
dossier du sucre, Chronique ACP du 15/07/2005 sur RFI.
FAYE D., Lutte contre la fraude : l'UNACOIS demande
à l'Etat de se positionner clairement, Le populaire N° 1347 du
mercredi 12 mai 2004.
SOW B., Fraude sur le sucre : le CNP milite pour le
protectionnisme, Le populaire N° 1361 du samedi 29, dimanche 30 et
lundi 31 mai 2004.
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TABLE DES MATIERES
AVANT- PROPOS
DEDICACE
REMERCIEMENTS
SOMMAIRE
ABREVIATIONS
INTRODUCTION: 1
PREMIERE PARTIE: L'organisation et le fonctionnement du
marché face à la problématique de la fraude dans le
secteur du sucre....................................11
CHAPITRE I : LE CADRE INSTITUTIONNEL ET REGLEMENTAIRE DU
MARCHE.......................................................................13
Section I : le cadre juridique du marché avant
la libéralisation...................15
Paragraphe I : les caractéristiques de
ces règles 15
A : les règles protectionnistes
de la convention d'établissement du 29 juin 1970. 15
B : Les différentes
modifications apportées au texte initial 19
Paragraphe II : Leurs maniféstations
sur le marché 25
A : Relativement à la
composition des acteurs du marché 25
B : Relativement aux modes
détermination du prix 27
Section II : le cadre juridique du
marché après la libéralisation 30
Paragraphe 1 : Les nouvelles caractéristiques de ces
règles...........................30
A : Le protocole d'accord de 1994,
premier jalon vers la libéralisation du marché au niveau
national. 31
B : Extension du processus par la mise en oeuvre du
TEC..........................................34
Paragraphe 2 : Leurs manifestations sur le
marché local 38
A : Fin du monopole par l'intervention
de nouveaux acteurs sur le marché.......38
B : Un processus encadré par
l'instauration de la TCI 40
Chapitre 2 : Analyse de la problématique de la fraude
sur le marché du
sucre................................................................................................................................................45
Section I : Les formes actuelles de
fraude.............................................................46
Paragraphe I : La fraude de
« survie » ou « occasionnelle » du fait
des populations
frontalières.........................................................................................................47
A : Les justifications et manifestations de cette
forme de fraude.....................47
B : la répression de ce
trafic.................................................................................................53
Paragraphe II : la fraude structurée du fait de
trafiquants professionnels
............................................................................................................................................................57
A : le caractère très organisé
de cette forme de
trafic.........................................58
B : La Sanction de la fraude
administrative :..................................................................63
Section 2 : L'acuité du problème de la
fraude.........................................................67
Paragraphe I : durant la période de
monopole 68
A: la question de l'ampleur de la fraude et de l'attitude
de l'Etat.........................68
B : Ses conséquences sur les résultats
de la
CSS.........................................................71
Paragraphe II : Apres la
libéralisation........................................................................73
A : l'étendue actuelle du
problème 74
B : ses incidences sur les ventes de
la CSS 76
Seconde Partie: Des impacts négatifs
prévisibles de la fraude sur la filière industrielle notamment
la CSS et stratégies de lutte contre ladite
concurrence..................................................................................................................................80
Chapitre I : Des impacts négatifs prévisibles
de la fraude sur l'industrie locale notamment la
CSS......................................................................................................82
Section I: Des impacts économiques négatifs
prévisibles..................................83
Paragraphe I: Sur l'économie
nationale........................................................................84
A: des pertes en chiffres d'affaires pour l'industrie
locale.....................................84
B: Une diminution des recettes fiscales pour
l'Etat....................................................86
Paragraphe II : Sur l'économie
locale...........................................................................86
A: Sur le secteur formel
local...............................................................................................87
B: Sur le secteur informel
local............................................................................................88
Section II : Des impacts socio-politiques négatifs
prévisibles........................90
Paragraphe I : Au niveau
social........................................................................................90
A : La suppression de milliers
d'emplois............................................................................90
B : La hausse de la demande
sociale....................................................................................92
Paragraphe II : Au niveau
politique...............................................................................93
A : Une mise en échec des politiques de
relance de la croissance économique et de réduction de la
pauvreté définies par le pouvoir central.
..................................94
B : une mise en échec des politiques de
développement définies par les collectivités
locales...................................................................................................................96
Chapitre II : Des stratégies de lutte contre la
fraude sur le sucre..........98
Section I : De la lutte en
cours....................................................................................100
Paragraphe I : De la lutte engagée par
l'Etat......................................................100
A : Des mesures prises au niveau
national......................................................................100
B : Des actions menées par les services
déconcentrés au niveau local..............105
Paragraphe II : De la forte implication des organisations
syndicales......110
A : Au niveau
national...............................................................................................................110
B : Au plan
local...........................................................................................................................112
Paragraphe III : Des initiatives prises par la
CSS.............................................115
A : des mesures prises au niveau
interne........................................................................115
B : des démarches entreprises au niveau
externe.......................................................117
SECTION II: Des perspectives dans la lutte contre la fraude
...............118
Paragraphe I : Des mesures à court
terme............................................................119
A : le renforcement des moyens de la douane et de la
sensibilisation sur le « Consommer
local ».................................................................................................................119
B : le développement d'une politique
expressive de marketing par la CSS. ...125
Paragraphe II : Des mesures à long
terme.............................................................128
A : Aller vers un assainissement de l'environnement
concurrentiel et fiscal..128
B : Donner un caractère sous régional
à la lutte contre la fraude notamment dans le cadre de
l'UEMOA.....................................................................................................133
CONCLUSION: 138
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXE
TABLE DES MATIERES
* 1 Organisation internationale
chargée de favoriser les libres échanges commerciaux. Crée
depuis le 15 Avril 1994 sur les cendres du GATT, lors des accords de Marrakech,
elle a débuté ses activités le 1er janvier
1995.
* 2SALL Alioune, in :
La Compétitivité future des économies africaines,
Actes du forum de Dakar, mars 1999. Futurs africains, Karthala et
éd. Sankoré.2000. p.
* 3 SALL Alioune, in :
La Compétitivité future des économies africaines,
Actes du forum de Dakar,mars 1999. ibidem. P.
* 4 (1911-1980) Sociologue
Canadien ayant attiré l'attention sur l'importance dans la communication
des nouveaux médias de l'age électronique et annonce la fin de
la « Galaxie de Gutenberg ».
* 5 Convention qui constitue le
texte de base en matière de propriété intellectuelle en
Afrique noire francophone. Signée le 02 mars1977, elle fut
révisée le 27 février 1999. Elle institue l'Organisation
Africaine de la Propriété Industrielle (OAPI) composé de
16 Etats membres et dont le siége est à Yaoundé au
Cameroun y ont adhéré. Elle remplace Office Africain et Malgache
de la Propriété Industriélle (OAMPI) instituée par
la convention de Libreville de 1962.
* 6 Ville située au nord
du Sénégal dans la vallée su fleuve. Elle est distante de
105 Km de Saint-Louis et 376 Km de Dakar. Frontalière de la Mauritanie
et d'un accès facile grâce à la route nationale n°2
qui la travérse, Richard-Toll est la deuxième commune la plus
importante derrière la ville de Saint-louis dans la région du
même nom.
* 7 Nouvel Horizon. N° 431.
DU 23 Juillet 2004. p.14.
* 8 Poète,
académicien, il fut le premier président de la république
du Sénégal de 1960 à 1980. Né à Joal en
1906, il est décédé le 26 décembre 2001 en France.
Il est enterré à Dakar.
* 9 Homme politique. Actuel
maire de la commune de KANEL située dans la région de Matam.
* 10 Nouvel Horizon. N°
432. DU 30 Juillet 2004. p.10.
* 11 Homme d'affaires
français (1913-1975), il est le fondateur du Groupe Mimeran
propriétaire de la CSS, actionnaire dans d'autres entreprises telles que
les GMD et la CBEAO.
* 12 Nouvel Horizon. N°
432. op. cit. p.11.
* 13 Créée par le
traité du même nom signé à Dakar le 10 janvier 1994,
il remplace la défunte UMOA disparue au lendemain de la
dévaluation du FCFA et regroupe actuellement 8 Etats qui partagent en
commun l'usage du francs CFA.
* 14 Nouvel Horizon. N°
431. op. cit. p. 15.
* 15 Donnée valable pour
l'année 2004.
* 16 Dispositif tarifaire
instauré par le règlement n°02/97/CM/UEMOA du 28 novembre
1997 signé à ouagadougou. Il a pour but de promouvoir la mise en
place d'une union douanière entre les Etats membres de l'UEMOA.
* 17 Mesure d'ordre
économique prise par les Etats de l' UMOA le 11 Janvier 1994 à
Dakar consistant à un changement de parité ente entre le FCFa
et l'ancienne FF et qui a abouti à une perte de 50% de sa valeur. Elle
est aujourd'hui indexée sur l'Euro : 1€=655,957 dont
l'entrée n'a pas modifiée cette parité.
* 18 Monnaie nationale des 8
pays de la communauté financière africaine à savoir :
Bénin, Burkina-Faso, Côte-d'Ivoire, Guinée -Bisseau, Mali,
Niger, Sénégal, Togo.
* 19 Nom donné au fleuve
du même nom d'une longueur de 1750 Km. Prenant sa source dans les
montagnes du Fouta-djalon, il traverse la Guinée, le Mali, et sert de
frontière entre le Sénégal et la Mauritanie.
* 20 D'une longueur de 50 Km,
le Lac de Guiers est le plus grand lac du sénégal. Situé
à proximité de Richard-Toll, constitue un grand réservoir
d'eaux douces. Il alimente Dakar et sa région en eau potable.
* 21 Bras du fleuve
Sénégal qui relie celui-ci au Lac de Guiers. Il traverse la ville
de Richard-Toll.
* 22 Dissolue en Février
1996.
* 23 Organisme gouvernemental
français devenu Caisse Française de Développement puis
Agence Française de Développement intervenant sur des projets,
soit sur participation à des programmes d'ajustement structurel
bilatéraux (prêts).
* 24 Organisation sous
régionale regroupant le Mali, la Mauritanie et le Sénégal.
Elle est chargée de la gestion des eaux du Sénégal. Ses
réalisations majeures restent la construction des barrages anti-sel de
Diama et hydro-électrique de Manantali.
* 25 Consulter l'ouvrage du
professeur AZEMA, Le Droit Français de la
Concurrence, Thémis 1989, p.98.
* 26 Loi sur le prix, la
concurrence et le contentieux économique adoptée au lendemain de
la dévaluation du FCFA afin d'assainir l'environnement économique
national. Certaines de ses dispositions sont abrogées par le
règlement n°2/2002/CM/UEMOA relatif aux pratiques
anti-concurrentielles à l'intérieur de l'union.
* 27 Impôt indirect
prélevé sur la plupart des produits commercialisés au
Sénégal qu'ils soient nationaux ou importés. Dans le cadre
de l'harmonisation de la législation dans l'UEMOA, le
Sénégal a fourni des efforts pour simplifier et unifier son taux
à 18% depuis le 18 septembre 2001. Neutre pour le commerçant,
indolore pour le consommateur, il constitue une source considérable de
fonds pour l'Etat.
* 28 Organisation
sous-régionale destinée à favoriser le
développement économique, social et culturel de l'Afrique de
l'Ouest. Institué en 1975 par le traité de Lagos, elle entra en
vigueur en 1977.Elle compte aujourd'hui 15 membres : Bénin,
Burkina, Cap-Vert, Côte d'Ivoire, Gambie, Ghana, Guinée,
Guinée-Bissau, Liberia, Mali, Niger, Nigeria, Sénégal,
Sierra Leone, Togo.
* 29 Il a pour mission de
défendre et de représenter les intérêts des
chargeurs ainsi que de promouvoir le secteur des marchandises à
l'importation aussi qu'à l'exportation.
* 30 Syndicat
représentatif d'une franche importante des commerçants de
l'informel notamment les partisans de Dame NDIAYE qui s'oppose à ceux de
Moustapha Diop de l'UNACOIS/Defs Elle tend de plus en plus à se
formaliser et participer à un meilleur encadrement de ses membres.
* 31 Quotidien Le Soleil.
Edition du Jeudi 03 février 2005.
* 32 Négociations
commerciales multilatérales à Punta Del Este en 1986 et
achevées à Genève en décembre 1993. L'acte final
représentant les résultats de ces négociations ont
été signé à Marrakech le 15 Avril 1994.Dernier des
huit cycles du GATT, il en constitue également le plus long et le
fondamental. Il a ouvert le champ d'application de ces négociations
à de nouveau secteur tels que le textile, l'agriculture, les services et
la propriété intellectuelle.
* 33 Renvoie aux
différentes conférences ministérielles de l'OMC qui se
tiendront après celle de Doha qui a eu lieu en 2001 dans la capitale du
Qatar et qui fait suite à l'échec de la conférence de
Seattle en 1999. A ce titre, on peut citer la conférence de Cancun qui a
eu lieu du 10 Mars au 23 Septembre 2003 au Mexique.
* 34 Pays frontaliers avec le
Sénégal.
* 35 Kate MEAGHER. Le
commerce parallèle en Afrique de l'Ouest : Intégration
informelle ou subversion économique. In :
Intégration et coopération régionale en Afrique de
l'Ouest. (Sous la direction de Real LAVERGNE). p.213.
* 36 Ville située sur la
rive gauche du fleuve Sénégal. Principal poste frontalier entre
le Sénégal et la mauritanie. La densité des
échanges entre les deux pays y est très importante. Toutes sortes
de produits y sont commercialisés : sucre, tomate, portables,
tissus boissons etc. elle est distante de Richard-Toll de 13 Km.
* 37 Lire les travaux d'
Ebrahima SALL. Sénégambie :
Territoires, frontières et réseaux sociaux
publiés dans la série n°36 de l' Institut de
développement économique et social de l'université Paris I
en 1992. p.10.
* 38 Homme politique
sénégalais qui occupé de nombreux postes
ministériels sous Senghor et Abdou Diouf.. Il fut ministre des finances
et des affaires économiques, président du comite des
investissements. A ce titre, il a participé à la signature de la
convention d'établissement de l CSS en 1970. En sa qualité de
ministre d'Etat, secrétaire général de la
présidence de la république, il a signé au nom de l'Etat
l'avenant n°2 à la convention de 1970 et le protocole d'accord de
1987 sur la restructuration de la CSS.
* 39 Ebrahima
SALL. Sénégambie : Territoires,
frontières et réseaux sociaux. op. cit. p. 11.
* 40 Monnaie nationale de la
République islamique de Mauritanie (R.I.M)
* 41 Monnaie nationale de la
République de Gambie.
* 42 L'accent est mis sur le
proximité entre la mairie et le garage ou se déroule à la
vue et au su des autorités locales. Paradoxe accentué par le fait
que la police municipale se trouve à l'intérieur de la mairie.
* 43 Quartier situé
à l'entrée de la ville de Richard-Toll et derrière la CSS.
Un des quartiers ou le trafic de marchandises entre le Sénégal et
la Mauritanie est très important.
* 44 Quartier situé au
centre de Richard-Toll. D'un accès très difficile, il est le plus
important des portes d'entrées de la fraude à Richard-Toll. C'est
la ou nous avons réalisé la plupart de nos observations pour
apprécier l'intensité de la contrebande.
* 45 Village situé du
coté de la Mauritanie et qui fait face au quartier de Richard-Toll
Escale. Principal poste de ravitaillement et de conditionnent du sucre
importé frauduleusement de la Mauritanie.
* 46 Homme d'Etat
sénégalais né en 1935 à Louga, 2éme
président de la république du Sénégal de 1981
à 2000, il est élu lors du sommet de Beyrouth dans la capitale
libanaise en 2002 à la tête de l'organisation internationale de la
francophonie. Il a assisté à toute les étapes majeures de
la vie de la CSS : de son installation en 1970 en tant que premier
ministre à la libéralisation du marché en 1995 à la
tête du pays.
* 47 48 Lawrence
MARFAING. , Mariam SOW. Les opérateurs économiques au
Sénégal : Entre le formel et l'informel
(1930-1995) .Dakar -Hambourg. 1998. p.242.
* 49 La marchandise a
été estimée à 600 millions de FCFA.
* 50 Quotidien le Soleil, op.
cit.
* 51 Quotidien Walfadjiri du 22
juillet.
* 52 Publié sur le web
le 22 Juin 2004. www.allAfrica.com
* 53 Extrait de l'entretien
réalisé au cours de mon stage avec Mr Makhary SAMB,
secrétaire général de la CNTS section CSS le Mardi 03
novembre 2004.
* 54 Quotidien le Soleil, op.
cit.
* 55 Propos du responsable des
ventes à la CSS
* 56 Ebrahima
SALL. Sénégambie : Territoires,
frontières et réseaux sociaux. op. cit. P.16.
* 57 Il s'agit du plus grand
marché hébdomadaire de la sous-région.
* 58 Lawrence MARFAING. ,
Mariam SOW. Les opérateurs économiques au
Sénégal :Entre le formel et l'informel (1930-1995)
.Dakar -Hambourg. 1998. op.cit. p.27.
* 59 SUCRE CONTACT
N°1-Juillet 1984- p.10.
* 60 Un agent de la douane a
tué accidentellement un présumé fraudeur.
* 61 Lire La revue
Marchés Tropicaux et Méditerranéens (MTM) du 09 Août
2002 ou la communication aux 20émes journées de l'ATM de Nancy
présentée par François NKOA de
l'Université de Yaoundé II (Cameroun) sur le thème :
Libéralisation commerciale informelle: Impact de la contrebande sur
le bien-être économique en Afrique subsaharienne.
* 62 Etudes
réalisées par le SPIDS reprises par le Sud quotidien du mardi 22
février 2005. Page 6
* 63 Sud quotidien du mardi 22
février 2005. Page 6.op.cit
* 64 Etudes
réalisées par le SPIDS précitée.
* 65 Le Soleil. Jeudi 13 MAI
2004. p.7.
* 66 Intervention du Colonel
Dialo Kane Zator dans le journal parlé en français de 22H de la
radio Walfadjiri du 21 février 2005.
* 67 Consulter le quotidien
Walfadjiri dans sa parution du Jeudi 22 juillet 2004.
* 68 WalFadjri du 26
février 2005 publié sur le web le 28 Février
2005 :
www.allAfrica.com.
* 69 WalFadjri du 26
février 2005 publié sur le web le 28 Février
2005 :
www.allAfrica.com.
op. cit.
* 70 Interview du Colonel Dialo
Kane ZATOR accordée à la radio Walfadjiri le 21 février
2005 dans son journal parlé en français de 22 H. op. cit.
* 71 Interview
réalisée le 23 Novembre 2004 avec le commissaire Adama GUEYE de
la PM de Richard-Toll.
* 72 Lire le quotidien
Walfadjiri du 22 Juillet 2004.
* 73 Extrait de l'entretien
réalisé le 03 Novembre 2004 avec Mr Ablaye SAMB,
secrétaire général adjoint de la CNTS/séction
CSS.
* 74 Entretien avec Mr
Abdoulaye SAMB, op. cit.
* 75 Entretien avec Mr
Abdoulaye SAMB, op. cit.
* 76 Lettre circulaire du 21
Juin 2004 adressée par la CNTS aux secrétaires
généraux des organisations syndicales pour les informer de
l'organisation de sa marche contre la fraude.
* 77 Extrait du compte rendu de
la mission de la mission de l'inter-syndicale des travailleurs de la CSS fait
à Richard-Toll, le 26 Octobre 2004.
* 78 Extrait de l'entretien
réalisé le vendredi 26 Novembre 2004 avec Mr Abdoulaye DIOUF,
résponsable de la qualité à la CSS.
* 79 Extrait de l'entretien
réalisé le Vendredi 08 avril 2005 avec le responsable du service
commercial de la CSS.
* 80 Extrait de l'entretien
réalisé avec notre intérlocuteur au niveau de la brigade
des douanes de Rosso. op. cit.
* 81 Extrait de l'entretien
accordé par le DG de la douane à la radio WalFadjri dans son
journal parlé en français du mercredi 25 mai 2005 à 12h00
à la suite de sa tournée effectuée dans la partie sud du
pays.
* 82 Extrait de l'entretien
réalisé le Vendredi 08 avril 2005 avec le résponsable du
sérvice commércial de la CSS. op.cit.
* 83 Lire l'article Lutte
contre la fraude : la douane et le sécteur privé à
l'unisson des stratégies publié dans l'édition du
Samedi 10 Mai 2003.
* 84 Information
diffusée par la radio Walfadjiri dans son journal parlé en
français de 12h du vendredi 20 mai 2005.
* 85 Extrait du quotidien
Walfadjiri du jeudi 12 Mai 2005.
* 86 Extrait de la
première déclaration de la coalition sortie en novembre 2004.
Vous pouvez aussi consultez le quotidien le soleil dans son Edition du
Jeudi 3 février 2005.
* 87 Propos tenus par le
ministre d'Etat, ministre de l'Industrie et de l'Artisanat, Landing SAVANE lors
des journées nationales de la qualité. Extrait du quotidien le
Soleil, Edition du Jeudi 3 février 2005. op.cit.
* 88 Propos du premier ministre
Macky SALL à la même occasion. Extrait du quotidien le Soleil.
op.cit.
* 89 Nouvel Horizon-°431,
op.cit.
* 90 Nouvel Horizon-°431,
op.cit.
* 91 Communiqué du
conseil des ministres du vendredi 13 août 2004.
* 92 Se rapporter à la
partie consacrer à l'incidence de la fraude sur les ventes de la CSS.
page
* 93 Le soleil. Mardi 21 juin
2005. page 4.
* 94 Code des douanes de
l'UEMOA dont le LIVRE I est entré en vigueur le 1er janvier
1999.
* 95 Le règlement du
Conseil n°416/2001 (l'Initiative Tout sauf les Armes ou TSA).
* 96 Walfadjiri du 04 Mai 2004.
N°3640.p.3.
* 97 ONUDI, Industrie et
développement dans le monde. Rapport 1990/91, p.27.
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