Chapitre III : DISCUSSIONS ET RECOMMANDATIONS DE
L'ETUDE
DISCUSSIONS
Cette section est structurée en deux points : les
limites de l'étude et la discussion des résultats.
1-1. Limites de l'étude et difficultés
rencontrées
La plus grande limite de cette étude reste
l'incomplétude de la base de données et l'incertitude quant
à la représentativité de l'échantillon. En effet
nous avons adressé une demande à la direction du système
d'information de la CNPS, qui nous a fourni une base constituée de 5069
individus sans toutefois donner la procédure de sélection des
individus. De plus, certaines caractéristiques organisationnelles et
individuelles n'ont donc pas pu être renseignées. Ce sont par
exemple : la taille des entreprises, le nombre d'heures de travail par
travailleur, la nature lésions et le siège des lésions des
accidents qui ont fait l'objet de la présente étude. Ces
renseignements auraient permis le calcul de certains indicateurs couramment
utilisés pour estimer la fréquence et la gravité des
accidents. Ainsi le taux gravité et le taux de fréquence des
accidents n'ont pu être analysés. La seconde difficulté est
le temps imparti pour conduire cette étude. Il fut si bref que nous ne
croyons pas avoir pu explorer tous les contours de la question.
1-2. Discussion des résultats
Trois hypothèses avaient été
formulées au début de cette étude : les travailleurs
de sexe masculin sont plus exposés que les femmes au risque d'accident,
les travailleurs de moins de 25 ans, ceux de 50 ans et plus et les travailleurs
qui ont peu d'expérience dans la profession sont des groupes à
risque et enfin les secteurs du bâtiment, de l'industrie et de la
foresterie et le secteur maritime sont les secteurs où le risque
d'accident du travail est le plus élevé. La démarche de
cette étude nous a permis de tester à chaque fois ces
hypothèses dans le contexte ivoirien.
En ce qui concerne l'effet du sexe sur la survenue des
accidents, les résultats confirment que les femmes sont moins
exposées au risque d'accident que les hommes. Les travailleurs de sexe
masculin courent plus de risque d'accidents que les femmes. Par
conséquent la première hypothèse est pratiquement
vérifiée. Cette situation se justifie par le fait que les femmes
sont affectées aux postes les moins dangereux. Ces résultats sont
identiques à ceux qui découlent des études du Bureau
Internationale du Travail. Rappelons que ces études
révélaient que les femmes ont moins d'accidents que les
hommes.
La présente étude a également
révélé que l'âge a une incidence sur la survenue des
accidents du travail. En effet, les travailleurs de moins de 25 ans ont un
risque d'accident très élevé. Par ailleurs, les
travailleurs ayant plus de 50 ans ont un risque d'accident élevé
et même plus élevé que les travailleurs de moins de 25 ans.
L'hypothèse faite sur la variable âge est vérifiée.
Ajoutons que le BIT estime sur la base d'études faites aux Etats-Unis
que les travailleurs les plus jeunes étaient plus exposés aux
accidents que leurs aînés. Cette étude faite dans le
contexte ivoirien confirme ces conclusions. Les résultats sont
partiellement analogues à ceux obtenus par Gingras S. (1996) qui ont
révélé dans le contexte canadien que le risque d'accident
s'élevait à partir de 50 ans pour les travailleurs du secteur de
la construction. Ces résultats confirment ceux obtenus par Dionne et al
(1992) qui ont identifié la classe d'âge 25 ans et moins comme la
classe la plus exposée au risque d'accident du travail.
L'expérience est un déterminant de la survenue
des accidents du travail. Les travailleurs de moins de 5 ans
d'expérience sont beaucoup plus exposés au risque d'accident du
travail que les autres et font par conséquent, plus d'accidents que ces
travailleurs. On ne peut toutefois pas affirmer que l'expérience
professionnelle est une protection pour le salarié car l'étude
révèle également que les individus ayant plus de 25 ans
d'expérience dans la profession sont très souvent sujets à
des accidents. C'est dire qu'à partir de 25 ans d'expérience, le
risque d'accident semble s'accroître.
L'une des conclusions les plus pertinentes à notre
sens, de la présente étude est qu'elle souligne l'incidence du
secteur d'activité sur la survenue des accidents du travail. Les
travailleurs de certains secteurs d'activité sont beaucoup plus
exposés au risque d'accident. Ainsi cette étude
révèle que les secteurs à risque sont :
l'agriculture, le bâtiment et la foresterie et le secteur de
l'électricité. Cette dernière hypothèse est donc
partiellement vérifiée. Le taux d'accident est très
élevé dans les secteurs du bâtiment et de la foresterie.
La catégorie professionnelle est significative dans le
modèle. Cette étude révèle que les cadres ont un
risque assez faible d'accident en comparaison avec celui des employés et
des agents de maîtrise car les cadres occupent très souvent des
emplois peu dangereux. Les différents taux d'accident et les
résultats du modèle ZIP le démontrent.
Cette étude a permis de savoir que la
nationalité a une incidence sur la survenue des accidents du travail.
Le corps d'emploi est un facteur explicatif de la survenue des
accidents du travail. L'appartenance à un corps d'emploi peu dangereux a
pour effet de réduire le risque d'accident du travail. Par contre un
corps d'emploi très dangereux accroît le risque d'accident du
travail.
1. RECOMMANDATIONS
Sur la base des résultats des différentes
analyses, nous formulons dans cette section une série de
recommandations.
Compte tenu du risque d'accident élevé chez les
travailleurs de sexe masculin, il convient de prendre des mesures d'incitation
à la prévention des accidents du travail portant sur cette
catégorie de travailleurs. Il faut donc inciter les hommes à la
prudence et à l'utilisation rigoureuse des moyens de protection tels que
le port de lunettes, de casque, de vêtements, de gants, de chaussures,
etc. selon que les différentes tâches qu'ils exécutent
l'exigent. En somme, il convient de les inciter au respect scrupuleux des
règles de protection en vigueur ou celles qu'exige leur fonction.
Cette étude a révélé que le
secteur agricole, regroupant les entreprises agroalimentaires, les grandes
exploitations agricoles et les industries agrochimiques, est le secteur
où le risque d'accident est le plus élevé. Le code de
prévoyance social prévoit en son chapitre VI des dispositions
pour augmenter ou diminuer les cotisations des employeurs selon qu'ils
observent des règles de sécurité ou qu'ils
déploient des efforts pour obtenir des résultats en
matière de prévention des accidents du travail. Toutefois, nous
proposons que soient envisagées des sanctions plus sévères
aux infractions à la législation sur l'hygiène et la
sécurité au travail telles que des poursuites judiciaires
à l'encontre des employeurs indélicats et l'augmentation des
charges liées aux amendes infligées à ces derniers. Toutes
ces mesures devront valoir aussi bien pour le secteur agricole que pour les
autres secteurs.
Par ailleurs, l'étude a révélé que
le risque d'accident est élevé chez les travailleurs
inexpérimentés. L'accent devra être mis sur l'application
du code de prévoyance sociale qui oblige les employeurs à
organiser des sessions de formation à l'endroit des nouveaux
employés. De plus, ces actions devront être orientées vers
la familiarisation des travailleurs avec les mesures de protection en vigueur
dans les entreprises. Il faudra par conséquent, accroître au sein
de chaque entreprise les moyens de formation et d'information par des
séminaires et des conférences auxquels devront participer les
nouveaux travailleurs. Cette action pourra intégrer aussi la confection
de brochures de sécurité et l'amélioration des moyens de
communication au sein de l'entreprise.
La présente étude a également
révélé que les travailleurs les plus jeunes,
c'est-à-dire de moins de 25 ans et ceux de 50 ans et plus, courent un
risque d'accident plus élevé que les autres travailleurs. Par
conséquent, ils devront être la cible de mesures de
sensibilisation à l'usage des moyens de protection en vigueur dans
l'entreprise en plus des méthodes citées
précédemment : Celles concernant notamment les actions
éducatives portant sur l'hygiène et la sécurité du
travail.
A côté de ces résultats, il est ressorti
enfin que les individus travaillant dans des conditions dangereuses sont les
plus exposés aux risques d'accidents du travail. Il est donc
impératif pour la CNPS, d'étoffer le nombre de contrôleurs
en prévention en vue d'identifier les entreprises qui ne respectent pas
les règles de sécurité en vigueur. Ainsi, des sanctions
pourront être prises l'encontre de ces dernières.
Toutes ces actions révèlent la
nécessité d'une action concertée impliquant l'ensemble des
partenaires sociaux à savoir les pouvoirs publics, la CNPS, les
employeurs et les employés.
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