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Evaluation de l'impact environnemental : le rôle des outils de gestion

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par Iouri Sorokine
ESSCA - Master gestion/finance 2008
  

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    1

    Mémoire de Master 2006-2008

    Evaluation de l'impact

    environnemental : le rôle

    des outils de gestion.

    Iouri SOROKINE

    1103511 -- Promotion 2003 - 2008

    Spécialisation de 5ème Année : Finance - contrôle
    Tuteur de mémoire
    : M. Joël JUSTIN

    Sommaire

    Sommaire 2

    Introduction 5

    Première partie : Cadre théorique 8

    I. L'émergence des stratégies environnementales 8

    1. La responsabilité environnementale des entreprises 8

    a) L'émergence de la responsabilité sociale et environnementale 8

    b) La vision « gagnant - perdant » 8

    c) La vision « gagnant -gagnant » 9

    d) La quête de l'éco - efficience 10

    e) Une typologie des stratégies environnementales 12

    2. Evaluer l'impact environnemental : à la recherche de données adéquates 13

    a) La notion d'impact environnemental et son évaluation 13

    b) Comment évaluer l'impact environnemental ? 14

    c) Les limites des systèmes comptables classiques 15

    d) Le rôle du contrôle de gestion dans les problématiques environnementales. 17

    II. L'utilisation des outils de gestion environnementaux 18

    1. La vaste sphère des outils de gestion 18

    a) Le concept d'outil de gestion 18

    2. Une typologie des outils de gestion selon leur finalité 19

    a) Les outils de pilotage 19

    b) Les outils de suivi 21

    c) Les outils de diagnostic 21

    3. Des outils répondant aux stratégies environnementales 22

    a) Les normes : un cadre pour la mise en place d'outils de gestion environnementaux 22

    b) Classification des outils de gestion environnementaux 24

    4. Les outils d'évaluation de l'impact environnemental 26

    a) L'écobilan 26

    b) Les comptes verts et les budgets environnementaux 27

    c) L'évaluation des coûts externes environnementaux 27

    d) Le tableau de bord vert 28

    e) Les limites principales de ces outils 28

    Conclusion du cadre théorique et annonce des hypothèses de recherche 29

    Les hypothèses de recherche : 30

    Deuxième partie: étude empirique 31

    I. La démarche empirique : étude du terrain 31

    1. Une méthodologie adaptée au contexte 31

    a) Une démarche qualitative 31

    b) Des évolutions dans la démarche 32

    2. Le choix de l'échantillon 32

    a) Une enquête multi-sites axée sur les grands groupes 32

    b) Un échantillon réduit mais diversifié 33

    3. Caractéristiques des répondants 34

    a) Des interlocuteurs concernés par la problématique environnementale 34

    b) Une vision stratégique des outils de gestion 34

    4. Le déroulement de l'étude terrain 35

    a) La prise de contact 35

    b) Les rendez vous 35

    5. Le guide d'entretien 36

    a) La composition du guide 36

    b) Le déroulement d'un entretien 36

    II. Test des hypothèses 39

    1. Des hypothèses dont la validation varie selon les outils 39

    2. Un pilotage environnemental qui se met en place 41

    a) ACV et écobilans: des outils de diagnostic avant tout 41

    b) Des tableaux de bord qui offrent des solutions 42

    c) Un pilotage qui nécessite encore une mise en place 42

    2. Une prépondérance des données physiques 44

    a) Bien distinguer les "inputs" et les "outputs" 44

    b) Des données physiques en entrée 45

    c) A la recherche d'unités pertinentes 45

    d) Les données financières ne permettent pas de traduire l'impact environnemental 46

    III. Discutions sur les résultats obtenus 47

    1. Les rôles respectifs et évolutions possibles des outils 47

    a) Les tableaux de bord verts: des outils adaptés pour le pilotage 47

    b) Les bilans carbone et les éco bilans: des outils de diagnostic avant tout 48

    c) Une nouvelle logique à intégrer dans le processus de gestion 49

    2. Vers la mise en place d'une compta-carbone? 50

    a) Des priorités à prendre en compte 50

    b) Une généralisation de l'outil possible 50

    VI. Apports et limites de la recherche 51

    1. Un point de vue plus clair sur la littérature étudiée 51

    a) J. DESMAZES et J-P. LAFONTAINE: un point de vue partagé 51

    b) La prise en compte des normes environnementales par les grands groupes (O. BOIRAL, M. ESSID) 52

    2. Regard sur une démarche en pleine évolution 53

    3. Les principales limites 53

    a) Limites liées au sujet d'étude 53

    b) Limites du terrain de recherche 54

    c) Principaux biais cognitifs lors des entretiens 54

    d) Savoir prendre du recul et garder son objectivité 55

    Conclusion 56

    Bibliographie 58

    Annexes 61

    Tableau de synthèse des principales lectures 62

    Matrices d'analyse des entretiens 70

    Introduction

    Au fur et à mesure que des progrès scientifiques et techniques s'effectuent en matière d'environnement, de plus en plus d'entreprises sont amenées à prendre en compte leur responsabilité environnementale (Capron, Quairel, 2006) dans leurs problématiques de gestion, comme en témoigne le nombre sans cesse croissant d'entreprises certifiées ISO 14001 (Desmazes, Lafontaine, 2006). Agissant tantôt sous contraintes, tantôt de façon totalement volontaire et dans une démarche préventive, ces entreprises sont de plus en plus amenées à mettre en place un système de management environnemental (SME) et à procéder à une amélioration continue de leurs performances environnementales, telles que la réduction des émissions polluantes, le retraitement de plus en plus efficace des déchets, une amélioration de l'excellence manufacturière ou encore une amélioration de la communication environnementale en externe (envers les parties prenantes) et en interne (envers les employés)(Essid, 2007).

    La prise en compte de la responsabilité environnementale comporte plusieurs aspects comme la mesure de l'impact en soi, sa réduction et la communication environnementale envers les parties prenantes. Le mot « mesure » évoque l'obtention d'une donnée précise et se rapporte au passé ou au présent. Etant donné que l'impact environnemental n'est pas seulement un fait passé et qu'il est important de pouvoir l'évaluer à priori dans une optique de démarche préventive (Kamto, 1996), nous parlerons d' « évaluation » de l'impact environnemental. Le mot « évaluation » évoque également une certaine imprécision qui s'avère être une réalité en ce qui concerne l'impact environnemental, étant donné qu'il mobilise des connaissances très pointues (chimie, physique, biologie, médecine, écologie...) (Desmazes, Lafontaine, 2006) qui ne font généralement pas partie des compétences attendues des décideurs au sein de l'entreprise.

    Parmi les décideurs au sens large au sein de l'entreprise, le contrôleur de gestion se trouve particulièrement impliqué dans la démarche environnementale puisqu'il possède un rôle stratégique dans l'évaluation des performances de l'entreprise. L'émergence des problématiques environnementales contribue à élargir son rôle et à le soumettre à des problématiques parfois contradictoires entre enjeux économiques et enjeux environnementaux.

    L'évaluation de l'impact environnemental passe inévitablement par la mise en place d'outils spécifiques ou l'adaptation d'outils existants. « En adoptant une logique d'innovation incrémentale, ces outils s'adaptent à la démarche environnementale » (Dreveton, 2005). Directement issus de cette approche, les outils de gestion environnementaux se développent et sont adoptés par les entreprises novatrices en la matière. Parmi ces outils, on distingue ceux dont le but est d'encadrer la stratégie environnementale (les normes, certifications, chartes et procédures d'audit) et des outils plus techniques (tableau de bord vert, écobilan, évaluation monétaire des impacts environnementaux...) développés par des groupes de travail sur la mesure de la performance environnementale (Tyteca, D., Carlens, J., Berkhout, F., Hertin, J., Whermeyer, F. et Wagner, M., 2000) qui viennent intégrer le système de gestion une fois que le cadre est posé.

    Au vu de ces faits, nous sommes amenés à nous poser une question se situant en amont des processus d'amélioration : « Quel est le rôle des outils de gestion dans la l'évaluation de l'impact environnemental ? » Cette problématique constituera notre champ de recherche dans le cadre de ce travail. Deux autres questions nous aideront à y répondre : « Quelles données mesurent l'impact environnemental ? » et « Quelle est la nature des outils de gestion à même d'évaluer l'impact environnemental d'une entreprise ? ».

    L'intérêt managérial d'une telle étude est de montrer comment les outils de gestion contribuent à la démarche environnementale de l'entreprise et quelles données ces outils utilisent à cette fin. Ces outils sont encore peu répandus et un travail de recherche et développement considérable reste à fournir en la matière, mais comme il est probable que de nombreuses sociétés de taille diverse vont être amenées à se pencher sur ce problème il est important de mener un travail de

    recherche sur ce qui se fait actuellement, afin de mieux anticiper les évolutions qui auront lieu dans les années à venir. « L'intégration d'outils environnementaux au management des organisations n'est pas simplement un enjeu d'ordre technique , il s'agit aussi et surtout d'enjeux stratégiques et organisationnels » (Dreveton, 2005).

    Ce travail s'articule en deux parties. La première est une revue de littérature débouchant sur des hypothèses de recherche, qui nous permettra de bien cerner le terrain de recherche, les différents auteurs ayant effectué des études sur le sujet et les enjeux divers que les outils de gestion environnementaux suscitent.

    Dans le premier chapitre de la revue de littérature, traitant des stratégies environnementales, nous évoquerons l'émergence de la responsabilité environnementale de l'entreprise, ses contraintes, ses enjeux et ses problématiques et nous nous interrogerons sur la manière dont une entreprise peut évaluer son impact environnemental. Nous réfléchirons sur le type de données nécessaires à cette évaluation. Dans un second chapitre, nous définirons précisément le concept d'outil de gestion en énonçant les théories importantes se référant à ce concept. Nous établirons ensuite une typologie et une classification de ces différents outils, avant de décrire plus en détail les outils qui permettent de mesurer ou d'évaluer un impact environnemental. Suite à ces deux chapitres, nous exposerons une problématique détaillée directement en lien avec notre sujet de recherche et nous formulerons des hypothèses qu'il s'agira de valider, ou invalider, lors de l'étude empirique.

    La seconde partie est un guide méthodologique de l'étude empirique. Nous y expliquerons les modalités de l'étude terrain, le choix des populations à interroger et la manière dont il faudra procéder lors de l'étude.

    Cette structure nous permet de progresser doucement d'un angle de vue théorique et descriptif vers une approche très pratique de la problématique étudiée.

    Première partie : Cadre théorique

    I. L'émergence des stratégies environnementales 1. La responsabilité environnementale des entreprises

    a) L'émergence de la responsabilité sociale et environnementale

    L'entreprise est un acteur essentiel de l'économie évoluant dans un cadre complexe et sujet aux diverses pressions émanant des parties prenantes : actionnaires, salariés, consommateurs, autorités ainsi que certaines ONG. C'est dans ce cadre que le management est sans cesse influencé par des « valeurs socialement acceptables par son environnement social » (CAPRON, QUAIRELLANOIZELÉE, 2006).

    La responsabilité à l'égard de l'environnement est un sujet dont l'intérêt ne cesse de croître, et pourtant, au fur et à mesure que des travaux de recherche s'y intéressent, la problématique se complexifie. Pour parler de responsabilité environnementale, il faut inclure dans le modèle économique la notion d'environnement naturel et ses ressources. On est alors amené à parler d'écologie, qui peut se définir comme une « science qui a pour objet les relations de toute nature entre des êtres vivants entre eux et avec leur environnement naturel » (J.P. Lafontaine, 2003).

    b) La vision « gagnant - perdant »

    La notion d'externalités négatives (Coase, 1960) inclut l'impact qu'une entreprise inflige à son environnement en exerçant son activité. Pour des raisons de confort et de simplicité économiques, cette notion a longtemps été écartée des préoccupations principales des dirigeants et l'entreprise fut considérée comme une entité possédant des frontières étanches avec son environnement. En suivant cette vision, une externalité, faisant référence à son aspect « externe », ne peut donc plus faire partie des préoccupations de l'entreprise et ne représente en aucun cas un coût caché. Mais les frontières entre l'entreprise et son environnement devenant floues, voire quasi inexistantes, il est facilement envisageable que, l'environnement naturel

    n'étant pas illimité, les entreprises devront assumer en partie ou en totalité le coût de ces externalités (Dundas et Richadson, 1980) qui sera différé dans le temps mais probablement majoré.

    Du fait de ce nouveau coût, le modèle économique classique considère les problématiques environnementales comme étant contraires aux intérêts économiques de l'entreprise. Pour répondre aux pressions sociales des parties prenantes, les entreprises doivent avoir recours à des mesures coûteuses et nuisibles à leurs intérêts économiques. Cette vision considère la pollution comme « une externalité négative dont la prise en compte entraîne des coûts pouvant hypothéquer la productivité des entreprises » (Boiral, 2004). Cette vision est appelée la vision « gagnant - perdant » des stratégies environnementales. (Boiral, 2004). Jusqu'à une époque relativement récente, « Les actions environnementales reposaient surtout sur des changements techniques ponctuels en réponse à des pressions sociétales » (O. Boiral, 2000). En effet, le principal intérêt d'une stratégie environnementale consistait à véhiculer une image positive aux parties prenantes. Elle était donc avant tout perçue comme un outil de communication. Les investissements « verts », considérés comme peu productifs, passent au second plan, en rapport avec la vision économique classique.

    c) La vision « gagnant -gagnant »

    Depuis la fin des années 80, de nombreux auteurs défendent la thèse contraire à celle des économistes classiques : l'environnement n'est pas seulement une contrainte externe mais d'avantage un enjeu économique. En internalisant les coûts environnementaux, une entreprise prend en compte le risque lié à la mutation de l'environnement et adopte une méthode pour réduire son coût environnemental, coût qui est pour le moment caché, mais qu'elle devra un jour ou l'autre assumer. Selon M. Porter, « les pressions environnementales et les investissements verts contribuent à améliorer la compétitivité des entreprises ainsi que celle des nations où la réglementation est la plus sévère » (Porter, 1991; Porter et Van Der Linde, 1995). Cette vision « gagnant - gagnant » a beaucoup gagné en popularité depuis l'émergence du la notion de développement durable.

    Apparue pour la première fois en 1987, la notion de « développement durable » fait référence à un développement économique soutenable pour l'environnement, autrement dit qui n'épuise pas le capital naturel de la planète. Parler du capital naturel implique que celui ci a des limites et qu'il existe « un seuil d'exploitation des ressources au delà duquel la croissance économique d'aujourd'hui peut porter préjudice à la croissance économique de demain » (J.P. Lafontaine, 2003). Mais cette notion implique également que le respect de l'environnement doit s'accompagner d'une croissance, d'un développement. Pour répondre à cette problématique, certaines organisations mettent en place des « stratégies environnementales ». Ces stratégies permettent de répondre aux attentes des différentes parties prenantes (M. Essid, 2007 ; Mercier, 2001 ; Jounot, 2003). Au fur et à mesure que l'opinion publique évolue en faveur des entreprises « vertes », la stratégie environnementale devient un argument de communication efficace. Les enjeux d'une stratégie environnementale sont donc d'ordre légal (répondre aux normes strictes mises e place dans certains états), d'ordre économique (procéder à une réduction de coûts en améliorant par exemple sa consommation de matières premières et d'ordre sociétal (avec la prise de conscience du grand public des problématiques environnementales, le fait d'avoir une démarche environnementale constitue pour une entreprise un argument de vente supplémentaire).

    Un exemple de l'encouragement public pour les entreprises « durables » : en novembre 2007, la valorisation boursière des groupes Théolia et EDF énergies nouvelles correspondait à respectivement 45 e 85 fois leur résultat annuel prévisionnel de 2007 (prévisions assez précises puisque observées en fin d'année), alors qu'en moyenne, ce taux de valorisation (appelé PER pour « price / earnings ratio ») était compris entre 12 et 18 sur les marchés français1. Cet exemple concerne des entreprises très spécifiques et n `est donc pas un modèle économique. Son rôle est d'illustrer l'ampleur du phénomène sur l'opinion publique et les investisseurs.

    d) La quête de l'éco - efficience

    L'une des grandes limites des visions « gagnant - gagnant » et « gagnant - perdant » est de se baser sur des approches réductrices d'analyse « coût -

    1 Données récoltées en novembre 2007 sur le site http://www.boursorama.com

    bénéfice ». Des recherches empiriques effectuées dans ces domaines ont tour à tour confirmé et infirmé les deux hypothèses (Boiral, 2004). S'il est aisé de trouver des cas d'entreprises ayant réussi grâce à leur politique environnementale, il existe également une multitude de cas dans lesquels les pressions environnementales des acteurs externes ont sérieusement compromis la pérennité d'entreprises,voir causé leur mort. D'autre part, les visions évoquées ont tendance à subordonner complètement les enjeux environnementaux aux intérêts économiques des entreprises.

    La réduction des coûts environnementaux apparaît souvent comme une solution nécessaire à laquelle les entreprises doivent faire face. Elles effectuent donc souvent un arbitrage entre toutes les solutions environnementales possibles et choisissent parmi celles dont les bénéfices à l'égard de l'environnement sont les plus élevés et ayant un coût raisonnable par rapport à l'activité de l'entreprise. Cette démarche es qualifiée d'éco-efficience.

    O. Boiral a développé cette nouvelle approche et mis en avant cinq facteurs de réussite d'une stratégie environnementale pour les sociétés de production (voir figure 1)

    Figure 1 : contingence des relations entre environnement et productivité

    e) Une typologie des stratégies environnementales

    Pour répondre au mieux aux différentes pressions qui s'exercent sur les entreprises en matière d'environnement, celles ci adoptent des stratégies environnementales. Ces stratégies peuvent se décliner de nombreuses façons différentes, mais il est possible de les classer selon deux critères: la conformité à la réglementation et l'engagement de ressources (Roome, 1992 ; Hart, 1995).

    Ayant étudié l'axe de conformité à la réglementation, Roome (1992) classe les entreprises sur un axe allant du degré « non conformité » au degré « proactive » qualifiant les organisations dont le degré d'intégration du système de management environnemental le plus élevé. Une entreprise ayant un degré élevé de conformité à la réglementation est également qualifiée d'entreprise « réactive » (Essid, 2006).

    Hart (1995) établit un axe classant les organisations en fonction de leur engagement de ressources dans la politique environnementale. La classification va du degré « end of pipe » 2 (qui correspond à une vision uniquement interne de

    2 Littéralement « fin de chaîne » en français

    l'activité, sans prise en compte des impacts externes) au degré « sustainable development »3 qui qualifie une organisation ayant une vision long terme de son activité et mettant en place des procédés pour gérer ses retombées sur l'environnement. Une entreprise ayant un degré élevé d'engagement de ressources est également qualifiée d'entreprise « active » (Essid, 2007).

    De nombreux autres auteurs ont traité au sujet de l'intégration de la composante écologique au sein de leur stratégie (Bensedrine, 2001 ; Sharma, 2001 ; Kaiser et Forsberg, 2001 ; Persais, 2001). Dans le cadre de ce mémoire, nous nous intéresserons plus particulièrement à une composante de la stratégie environnementale : la mesure de l'impact environnemental.

    2. Evaluer l'impact environnemental : à la recherche de données adéquates

    a) La notion d'impact environnemental et son évaluation

    La norme ISO 14001 définit l'impact environnemental comme étant « toute modification de l'environnement, négative ou bénéfique, résultant totalement ou partiellement des activités, produits ou services d'un organisme ». Selon le réseau d'expertise E74, l'impact environnemental est « une réaction à un changement dans l'environnement résultant d'une activité liée à un projet ».

    L'Organisation des Nations Unies considère l'évaluation de l'impact environnemental comme « une étude au cours de laquelle les effets potentiels physiques, biologiques, économiques et sociaux d'un projet de développement proposé sur l'environnement à la fois proche et distant sont identifiés, analysés et prédits ». Pour M. Kamto, l'étude d'un impact environnemental est une procédure d'évaluation concernant un projet ou une activité et devant avoir lieu avant l'exécution de ceux ci (Kamto, 1996). L'importance de l'évaluation à priori réside dans la volonté d'avoir une démarche préventive.

    3 « développement durable » en français

    4 Réseau d'expertise réunissant les grands acteurs dans la production d'électricité.

    Malgré une certaine quantité d'études et de publications à son sujet, l'impact environnemental reste une notion encore floue et inexplorée. Tout comme il est difficile de définir les frontières d'une organisation, il est extrêmement difficile d'observer et mesurer en totalité l'impact environnemental de l'activité d'une entreprise. Il est cependant possible de transformer en données chiffrées certains de ses aspects qui sont directement contrôlables et mesurables par les entreprises. Selon certains auteurs (Barret, Dreveton, Naccache, 2006) la mesure l'impact environnemental implique que celui-ci doit être « monétisé », c'est à dire transformé en données financières pour pouvoir être internalisé au sein de l'organisation.

    b) Comment évaluer l'impact environnemental ?

    Une entreprise ne peut évaluer l'ensemble de son impact environnemental et ce pour plusieurs raisons :

    - Les interactions ente l'activité humaine et l `écosystème terrestre sont

    d'une complexité telle que les technologies actuelles ne permettent d'en entrevoir qu'une infime partie.

    - L'entreprise étant une notion dont les limites sont floues, il est difficile

    de déterminer où s'arrête sa responsabilité environnementale, tant d'un point de vue déontologique que d'un point de vue légal.

    Si la globalité de l'impact d'une entreprise est extrêmement difficile à évaluer, celle ci peut en revanche procéder à différentes mesures de ses flux physiques entrants (matières premières, ressources, énergie, acquisition de nouveaux équipements...) et sortants (déchets, rejets de gaz et de liquides, émissions de rayonnements, mise en rebut d'équipement usé...).

    Essayons à titre d'exemple de schématiser les flux physiques possibles engendrés par un processus d'activité (figure 2).

    Figure 2 : Schéma des flux physiques

    Consommation de
    matières premières

    Rejets et déchets

    Processus
    A

    Produit (ou service) fini

    Mise en rebut
    d'équipement

    Processus
    B

    Acquisition
    d'équipement

     
     

    Consommation de
    ressources : eau, énergie...

     

    Flux réguliers

     

    Flux occasionnels

    Ces différents flux sont d'ordre physique, ont souvent une contrepartie financière liée à leur coût ou à leur prix et ont pour conséquence un impact sur l'environnement. Si les systèmes de gestion classiques basées sur les performances financières, font abstraction des coûts engendrés par les impacts environnementaux, les entreprises peuvent faire appel à des outils plus innovants qui prennent en compte ces derniers (Lafontaine, 2003)

    c) Les limites des systèmes comptables classiques

    Traditionnellement, l'évaluation de la performance d'une entreprise se base sur des informations purement financières, d'une part parce qu'il s'agit là de la finalité des investisseurs (le retour sur les investissements) et d'autre part parce qu'il est plus aisé de schématiser l'activité de l'entreprise en traçant des flux financiers. Cependant, de nombreux chercheurs se sont penchés sur la question de la responsabilité sociale et environnementale des entreprises et dénoncé l'incapacité des systèmes d'information classiques à rendre compte de la performance environnementale (Desmazes, Lafontaine, 2005). L'évaluation de la performance environnementale doit donc passer par la mise en place d'un système d'information environnementale.

    Le système d'information environnementale peut être défini comme «une structure capable de capter les informations relatives à l'environnement par rapport à l'entreprise, du fait de son activité, et de les lui restituer sous une forme permettant leur exploitation au niveau des décisions stratégiques et de gestion quotidienne à prendre » (Bascourret, 1997, p. 186). La mise en place d'un tel système fait appel à l'élaboration de nouveaux outils comptables , incluant des données financières et non financières. Ces innovations (tableau de bord verts, budgets environnementaux, comptes verts...) sont appelées la « comptabilité environnementale » (CE). L'intégration de tels outils dans le processus de gestion au quotidien peut en théorie poser problème, étant donné que les dirigeants se servent habituellement de données financières pour la coordination de leur entreprise (Bollecker, 2004). Cependant, Jean Desmazes et Jean - Philipe Lafontaine (2005) prouvent par une étude empirique qualitative et quantitative que l'assimilation des tableaux de bord vert (TBV) par les entreprises est plus « harmonieuse » et réussie que celle des budgets environnementaux. Cette situation peut paraître paradoxale étant donné que les TBV utilisent essentiellement des informations physiques, ce qui n'est pas habituel pour des indicateurs de performance, alors que les budgets environnementaux contiennent des informations uniquement financières. Néanmoins, cette conclusion s'explique par le fait que les TBV sont « pilotés par des acteurs spécialisés (fonction et responsables environnement) qui se juxtaposent au système traditionnel d'évaluation de la performance des entreprises (le système de contrôle de gestion) ». (Desmazes, Lafontaine, 2005). La moindre réussite des budgets environnementaux peut s'expliquer, selon les mêmes auteurs, par la complexité de la procédure budgétaire et par es tensions entre les différents acteurs utilisant et outil.

    Nous sommes à présent amenés à dire que la réussite de l'utilisation d'un outil dans le gestion de l'impact environnemental n'est pas simplement due à la forme et la substance5 de cet outil mais également par l'interaction entre les acteurs amenés à utiliser cet outil. Nous ne devons donc pas en avoir une approche purement instrumentale mais également comportementale (Hatchuel et Weil, 1992; Moisdon, 1997).

    5 Voir la partie : « définition des outils de gestion »

    d) Le rôle du contrôle de gestion dans les problématiques environnementales.

    En tant qu'acteur ayant une vue globale de l'activité de l'entreprise, le contrôleur de gestion a un rôle important à jouer dans la mise en place et la promotion des stratégies environnementales.

    Il n'existe pas encore de contrôle de gestion environnemental en tant que tel, mais deux évolutions sont envisageables : celle de l'émergence d'un contrôle de gestion orienté environnement en parallèle avec le contrôle de gestion « standard » ou celle d'une évolution des pratiques de contrôle de gestion existantes vers une prise en compte de l'aspect environnemental. La première possibilité sous entend la co-existence de deux entités aux intérêts divergents au sein d'une même organisation qui seraient génératrices de conflits majeurs. La deuxième sous entend une prise de conscience progressive des enjeux environnementaux par les contrôleurs de gestion et une adaptation de leurs outils de façon à prendre en compte l'aspect environnemental. L'analyse des outils de gestion environnementaux actuels penche en la faveur de la deuxième possibilité, celle d'une innovation incrémentale (Dreveton, 2006).

    Mais l'intégration d'outils environnementaux dans le système comptable traditionnel des entreprises reste une problématique non résolue : comme le montre l'étude de J. Desmazes et J.P. Lafontaine (2006) sur les TBV et les budgets environnementaux, les acteurs ont parfois du mal à se mettre dans une démarche environnementale.

    Il est néanmoins évident que le contrôleur de gestion doit participer de manière active à la mise en place et l'utilisation d'outils de gestion environnementaux. Bien que ces outils sont élaborés à l'aide de savoirs scientifiques et techniques pointues, qui n'entre pas dans les compétences habituelles du contrôleur de gestion (Desmazes, Lafontaine, 2005), celui-ci a un rôle important à jouer dans le pilotage de cette utilisation. Au stade actuel, ces outils en sont à leurs débuts et ne sont pas encore au coeur de la stratégie de l'entreprise. « Il s'agit d'une démarche qui met

    d'avantage l'accent sur l'apprentissage que sur les résultats » (Caron, Boisvert, Mersereau, 2006).

    II. L'utilisation des outils de gestion environnementaux 1. La vaste sphère des outils de gestion

    a) Le concept d'outil de gestion

    Les outils de gestion sont un ensemble large dans lequel rentrent à la fois les indicateurs de performances financières et non financières, les tableaux de bord, les normes (ISO 14001 par exemple), les chartes de management, ainsi que d'autres objets. Il est pourtant utile d'en former une définition commune dans le but de savoir ce qui caractérise un outil de gestion et de pouvoir les classer en différentes catégories.

    Le mot outil est défini dans le petit Robert comme « un objet façonné, transformé, de manière à pouvoir être utilisé commodément et efficacement pour accomplir un certain genre d'action ». Ce n'est pas forcément quelque chose de fixe mais peut s`adapter ou être adapté par l'organisation pour mieux répondre à ses besoins. Toujours selon le petit Robert, la gestion d'une entreprise, c'est à dire l'acte de gérer celle ci se définit comme l'acte d'administrer. Le dictionnaire de comptabilité précise la définition en stipulant que la gestion « vise à garantir la pérennité de l'entreprise par le recours à des moyens spécifiques permettant de concilier les exigences contradictoires de court terme et de long terme ».

    De nombreuses définitions existent pour le concept d'outil de gestion. Il peut se définir comme un ensemble de « raisonnements et de connaissances reliant de façon formelle un certain nombre de variables issues de l'organisation, qu'il s'agisse de quantités, de prix, de niveaux de qualité ou de tout autre paramètre, et destiné à instruire les divers actes classiques de la gestion, que l'on peut regrouper dans les termes de la trilogie classique : prévoir, décider, contrôler » (Moisdon, 1997). Selon David (1997), l'outil de gestion est « un dispositif formalisé qui permet l'action organisée ».

    Selon J. Justin, l'outil de gestion est un objet comportant une substance, une forme et une finalité. La forme d'un outil permet de le catégoriser : indicateur, tableau de bord... La substance est directement liée à ce qui compose l'outil, à ces éléments substantiels. Ceci suppose que l'outil soit alimenté par un ou plusieurs flux d'information (les « intrants ») et qu'il génère lui même de l'information (les « extrants »). Enfin la troisième et plus importante propriété de l'outil de gestion est une recherche de finalité, d'un but en lien direct avec la gestion de l'entreprise. Les outils de gestions peuvent par exemple être des instruments aidant à la prise de décisions du type « faire ou faire faire ? » (B. Gump, 2003), mais les outils peuvent également servir à donner des lignes directrices au management, à se référer à une norme, à évaluer une performance à posteriori... Si les finalités peuvent être multiples, leur présence est en revanche nécessaire.

    Par exemple, un taux de rentabilité nette des capitaux est un outil de gestion ayant pour but de mesurer le retour sur investissement des détenteurs du capital (« finalité »). Par sa forme, ce taux est un indicateur et sa substance réside dans les informations qui l'alimentent, c'est à dire le résultat net et le montant du capital.

    2. Une typologie des outils de gestion selon leur finalité

    En s'appuyant sur les travaux de H. Bouquin (1991) et de P. Mevellec (1992), J. Justin a mis en avant une typologie des outils de gestion différenciés selon leur finalité. Cette classification les divise en trois catégories : les outils de pilotage, les outils de suivi et les outils de diagnostic.

    a) Les outils de pilotage

    Les « outils de pilotage » servent à « assurer la cohérence entre la stratégie opérationnelle » (Mevellec P. 1992). Pour faire le lien entre la stratégie et son application sur le terrain, une organisation fait appel aux outils de pilotage qui lui permettent de fixer des objectifs et d'orienter leurs actions dans le but de les atteindre. Les outils de pilotage sont des outils opérationnels qui utilisent le plus souvent des unités monétaires. Ils ne peuvent exister indépendamment de leurs utilisateurs, lesquels doivent être en mesure d'interpréter les données et de mettre si

    besoin en place des actions correctives. Le principe d'action E--)réaction immédiate est essentiel car il est au coeur de la fonction de l'outil.

    Une autre caractéristique des outils de pilotage est d'avoir une vision non seulement orientée vers le présent mais également de guider les actions à venir, via des objectifs que l'outil permet de mettre en place (Etienne, Wicker, 2005).

    Les sources émanant du milieu professionnel parlent parfois d'un ensemble d'outils de pilotage mis en place au sein des entreprises comme en employant le terme « système de pilotage ». Celui ci est défini comme « l'ensemble des éléments lui permettant de tendre en permanence vers les objectifs qu'elle poursuit » 6 et se décompose en trois modules : un sous-système d'information, un « pilote » (opérateur) et des leviers d'actions qui « permettent d'orienter l'entité dans le direction désirée ».

    Cette vision est en accord avec les écrits de P. Lorino, qui parle du rôle important des indicateurs de performance dans le pilotage des projets. Ces indicateurs doivent être associés à des « variables d'action », c'est à dire des « leviers» qui permettent de faire évoluer l'indicateur (Lorino, 1997). L'existence d'objectifs est également prise en compte. L'interaction entre ces trois notions est schématisé dans le « triangle d'or du pilotage » (Figure 3).

    Figure 3 : Le triangle d'or du pilotage7

    6 Source : < http://www.innovence.fr/Les-outils-de-pilotage-et-les.html > consulté le 25/11/07

    7 Source : LORINO P., « Méthode et pratiques de la performance », Paris, Editions d'Organisation, 1997, p. 521

    b) Les outils de suivi

    Les « outils de suivi » ont pour but une surveillance à posteriori de l'activité de l'organisation et sont une interface entre le management et les subordonnés dans le contrôle des résultats (Justin, 2005). Les utilisateurs des outils de suivi ne peuvent pas en outre pas intervenir directement sur les données. Cette définition est basée sur les apports de J.L. Lemoigne (1974) qui met en avant la distinction entre les outils servant au guidage de l'action (rôle d'avantage attribué aux outils de pilotage) et sa surveillance à posteriori.

    La définition fait également référence aux théories de W.G. Ouchi (1978) dans la mesure ou les outils de suivi « renvoient à une vision classique du processus de contrôle hiérarchique » et servent de canaux de transmission entre les différents échelons hiérarchiques.

    c) Les outils de diagnostic

    Les « outils de diagnostic » permettent de « disposer d'une image de la trajectoire de l'entreprise » (Bouquin, 1993) en se posant la question : « est-elle en accord ou non avec la stratégie, se dirige t'elle vers les buts définis ? » La notion de diagnostic implique une utilisation à intervalles de temps pré - établis, ainsi qu'un recul par rapport à l'activité : il ne s'agit pas d'observer les différentes activités une par une mais bien de voir l'organisation dans sa globalité. Le diagnostic peut être externe, auquel cas il s'agit d'observer l'environnement de l'entreprise, ou interne, auquel cas on s'intéresse à l'entreprise uniquement.

    Un même outil de gestion peut avoir plusieurs rôles s'il est utilisé par différents acteurs. Si l'on prend l'exemple d'une entreprise commerciale, des indicateurs de performance relatifs au chiffre d'affaires sont un outil de pilotage pour les managers opérationnels qui peuvent immédiatement orienter les décisions sur le terrain et fixer des objectifs. Pour la direction, ces mêmes indicateurs peuvent avoir un rôle de suivi de l'activité : ils permettent de surveiller les performances au niveau opérationnel et de mesurer les écarts avec les prévisions afin de prévoir, si nécessaire, un ajustement de la stratégie.

    Dans le cadre de notre étude empirique nous serons amenés à nous poser la question de savoir si les outils utilisés dans le cadre d'une démarche environnementale sont ou non des outils de pilotage.

    3. Des outils répondant aux stratégies environnementales

    a) Les normes : un cadre pour la mise en place d'outils de gestion environnementaux8

    Face aux enjeux et aux contraintes écologiques développés précédemment, certaines organisations, notamment celles considérées comme les plus polluantes, mettent en place des outils de gestion environnementaux (M. Essid, 2007). Lors d'une étude sur les grands groupes français du CAC 40, Moez Essid met en avant l'utilisation de 4 outils généraux, donnant un cadre à la mise en place d'une stratégie environnementale : les normes, les systèmes de managements environnemental et chartes établies en interne par les entreprises, le reporting concernant le données environnementales et l'audit environnemental interne ou externe.

    Les normes environnementales de référence sont les normes de la série ISO 14000 (ISO 14001, ISO 14021...) et la norme européenne EMAS (Environnemental Management and Audit Schème). La norme ISO 14001 est un guide de mise en place d'un système de management environnemental (SME) en plusieures étapes : analyse environnementale du site, vérification de conformité à la législation, définition de la politique environnementale de l'entreprise et des responsabilités, mise en place des procédures du SME, engagement de progrès continus et de transparence de l'entreprise en matière de ces impacts environnementaux. Finalisée en 1996 et définie à partir de recherches et de groupes de travail dans le domaine environnemental, elle préconise une approche par processus de l'activité de l'entreprise afin de procéder à une amélioration en continue des performances environnementales des entreprises. La norme ISO 14001 « s'inscrit dans le mouvement de systématisation et de normalisation de la gestion environnementale ».

    8 Souce : < http://www.iso.org/iso/fr/iso 14000 essentials >, consulté le 25/11/07

    A titre d'exemple, la société de chimie et électrolyse Alcan, en adoptant les normes ISO 14001, est passée d'une logique de « projets » à une logique de « processus » pour une meilleure évaluation de son impact environnemental (Boiral, 2000). Ce nouvel objectif a obligé l'entreprise à axe son contrôle de gestion sur chaque processus, de manière à mesurer et diminuer chaque année ses rejets dans l'atmosphère. Cette démarche de progrès continu a été effectuée dans le cadre de la norme ISO 14001 qui définit un cadre pour la mise en place d'une stratégie environnementale.

    Figure 4 : modèle global de gestion environnementale9

    *SGE : Système de gestion en environnement

    9 Source : norme ISO 14001 et revue de littérature sur la gestion environnementale réalisée dans le cadre d'une thèse de doctorat (Boiral, 1996).

    La mise en place d'indicateurs environnementaux tant au niveau du management (formation du personnel aux problématiques environnementales) que sur du point de vue technique (consommation d'énergie, rejet de substances polluantes...) est guidée par la norme ISO 14031. Celle ci permet de suivre le SME dans son amélioration et de participer à la démarche d'amélioration continue.

    b) Classification des outils de gestion environnementaux

    Un groupe de chercheurs travaillant dans le cadre du MEPI10 (Tyteca, D., Carlens, J., Berkhout, F., Hertin, J., Whermeyer, F. et Wagner, M., 2000) ont montré que les entreprises développent tout un panel d'indicateurs utilisés dans le cadre d'une démarche environnementale et mobilisant beaucoup de savoir technique dans plusieures disciplines (chimie, physique, biologie, médecine, écologie...).

    En considérant les travaux de J.P. Lafontaine, J. Desmazes et M. Essid traitant des outils de gestion environnementaux, ainsi que la classification des outils de gestion selon leurs trois rôles principaux, il est possible de construire une matrice qui classe les outils de gestion selon deux critères importants : leur rôle et le type de données que ces outils traitent. Nous obtenons ainsi un tableau schématique qui nous permet d'isoler les outils qui nous intéressent dans le cadre de nos recherches : les outils qui permettent de mesurer l'impact environnemental (figure 5).

    La classification selon le type de données utilisées permet de séparer les outils en 3 catégories : ceux qui utilisent des données financières, des données physiques (quantitatives) et des données qualitatives. Certains outils utilisent plusieurs types de données et/ou accomplissent plusieurs rôles et sont donc représentés dans plusieurs cases. Comme nous l'avons vu précédemment, la mesure de l'impact environnemental requiert des données physiques et financières. Les données qualitatives peuvent uniquement compléter les données chiffrées mais ont essentiellement un rôle de communication envers les parties prenantes.

    10 Le projet MEPI (Measuring Environmental Performance of Industry) a été créé dans le cadre du 4ème programme sur l'environnement et le climat mis en oeuvre par la Commission européenne. Ce projet réunis des chercheurs de plusieurs universités et de pays différents (Royaume-Uni, Hollande, Italie, Autriche et Espagne) et a pour objectif d'étudier les pratiques des entreprises industrielles en matière d'évaluation de leur performance environnementale.

    Figure 5 : Classement des outils de gestion environnementaux selon leur finalité et les
    données qu'ils utilisent.

    Rôle des outils de

    gestion

    Information exploitée et/ou fournie

    Outils de pilotage

    Outils de suivi

    Outils de
    diagnostic

    Financière

    - Budgets verts

    - Tableau de bord verts/ indicateurs environnementaux

    - Evaluation des coûts externes

    environnementaux

    - Comptes verts - Valeur ajoutée négative

    - Tableau de bord verts/ indicateurs environnementaux

    - Audit environnemental

    Physique

    - Budgets verts

    - Tableau de bord verts/ indicateurs environnementaux

    - Ecobilan

    - Tableau de bord verts/ indicateurs environnementaux

    - Ecobilan

    - Audit

    environnemental

    Qualitative

    - Norme ISO14001

    - Norme EMAS - Système de management environnemental

     

    - Audit environnemental

    Dans ce contexte, le système de management environnemental, les normes, les chartes et l'audit environnemental jouent un rôle particulier : ils donnent un cadre à la mise en place d'outils plus techniques de mesure, d'évaluation ou de suivi de l'impact environnemental. Ces derniers sont représentés dans le tableau descriptif (figure 6) également construit à partir des travaux de travaux de J.P. Lafontaine, J. Desmazes (2005) et M. Essid (2006) et nous permettant de connaître l'impact mesuré et le type de données utilisées par ces outils.

    Figure 6 : description des outils d'évaluation de l'impact environnemental.

    Outil

    Impact mesuré

    Données
    utilisées

    Comptes verts en comptabilité financière

    Dépenses liées à l'environnement

    Financières

    Ecobilan

    Impact environnemental des produits tout au long de leur cycle de vie

    Physiques

    Budgets environnementaux

    Investissements et dépenses liées à l'amélioration de l'impact environnemental

    Financières

    Evaluation des coûts externes environnementaux

    Analyse et évaluation des risques et des dommages potentiels (pollutions, atteintes à l'intégrité physique des personnes...).

    Financières +
    probabilités
    d'occurrence

    Tableau de bord

    vert

    Impact environnemental de différentes activités de l'entreprise

    Physiques et
    financières

    Ce tableau de synthèse apporte des éléments de réponse quant à la nature des données employés par les outils de gestion environnementaux. Il nous permet de confirmer d'un point de vue théorique l'hypothèse disant que l'information la plus pertinente concernant l'impact environnemental de l'entreprise se présente sous forme de données physiques ou de traduction en unités financières de différents risques et dommages environnementaux provoqués.

    4. Les outils d'évaluation de l'impact environnemental a) L'écobilan

    L' analyse du cycle de vie (ACV), ou écobilan est un outil d'aide à la décision qui prend en compte l'efficacité environnementale des projets, produits ou activités, leurs coûts et les contraintes qu'ils impliquent sur le plan économique (Loerincik, Jolliet, 2007). Il permet d'évaluer l'impact environnemental d'un projet ou d'un produit tout au long de son cycle de vie, du développement jusqu'à l'élimination. « C'est avant tout un outil comparatif, visant à évaluer la charge environnementale de plusieurs produits, processus ou systèmes ainsi qu'a comparer les différentes étapes de production d'un même produit » (Loerincik, Jolliet, 2007).

    L'écobilan existe sous plusieurs formes. L'une d'elles consiste à « évaluer la performance environnementale à partir de ratios qui combinent des mesures physiques et financières que l'entreprise compare aux dépenses environnementales et à leur impact environnemental » (Christophe, 1995). L'avantage de cet outil est la combinaison entre les mesures physiques et financières qui peut permettre d'évaluer

    si une stratégie environnementale induit des coûts supplémentaires (ce qui peut être le cas de nouveaux investissements) ou au contraire, diminue les coûts existants (ce qui peut être le cas lors d'une meilleure optimisation des matières premières).

    b) Les comptes verts et les budgets environnementaux

    Les comptes verts sont des comptes spécialisés permettant d'inclure des informations environnementales dans la comptabilité financière classique. Les dépenses environnementales diverses ou encore les risques liés à l'environnement, traduit en données financières et inscrits dans les comptes verts permettront à l'entreprise d'améliorer le pilotage de sa performance environnementale (Raimbault - Guilbaud, 1995). L'ordre des experts comptables (1996) préconise alors d'isoler les investissements environnementaux (tels que les investissements anti-pollution ou de dépollution) dans des comptes spéciaux et de prévoir des adaptations de la comptabilité afin de rendre en compte les problématiques environnementales. Le principe de risque et charges s'applique par exemple au risque environnemental après avoir procédé à l'évaluation de ces conséquences financières.

    c) L'évaluation des coûts externes environnementaux

    L'évaluation des externalités environnementales est nécessaire afin de pouvoir les internaliser, c'est à dire attribuer un coût équivalent à leur impact environnemental. Elle permet aussi de comparer les répercussions environnementales des différentes formes de production en utilisant un étalon commun - la monnaie. Il s'agit d'un instrument d'aide à la décision, et donc de pilotage. L'évaluation des coûts externes environnementaux s'effectue en deux étapes : la première consiste à analyser les répercussions physiques, par exemple d'un réservoir sur l'environnement, et la deuxième à évaluer les coûts sociétaux reliés à ces impacts (Weissenberger, 2000).

    Pour Antheaume (2001), il s'agit d'évaluer le coût monétaire des dommages que l'entreprise effectue à son environnement. Par exemple, lors de la destruction d'un site naturel, il s'agit de déterminer le coût que supporte la collectivité. Ce genre d'évaluation est difficile à mener en l'absence de normalisation comptable, précise l'auteur. Christophe (1995) crée quand à lui la notion de valeur ajoutée négative en enregistrant une consommation de patrimoine naturel (comptes 62...) qui vient

    s'équilibrer à l'aide d'une provision (comptes 15...) et permet ainsi d'intégrer cette consommation dans le résultat comptable de l'entreprise. L'Union Européenne a, quand à elle crée en 1993 la possibilité d'associer comptabilité classique et comptabilité environnementale en créant pour cela quatre nouveaux comptes : le compte de flux de pollution, de dépenses de protection de l'environnement, de ressources naturelles et l'évaluation des flux non marchands.

    d) Le tableau de bord vert

    La norme ISO 14031 préconise l'utilisation d'indicateurs environnementaux qui se regroupent au sein d'un outil appelé tableau de bord environnemental ou tableau de bord vert. Ces indicateurs sont de trois types : les indicateurs de performance du management environnemental (IPM - par exemple le nombre d'heures de formation aux problématiques environnementales par employé), les indicateurs de performance environnementale (IPE - par exemple, la quantité de déchets par produit fabriqué) et les indicateurs de condition environnementale (ICE - par exemple les kilos de CO2 émis par heure de travail). Le groupement de ces indicateurs permet de fournir un outil à vocation de pilotage fournissant des données environnementales sur les différentes activités.

    e) Les limites principales de ces outils

    L'essentiel des limites des outils de gestion « techniques » a été développé par B. Dreveton (2005) qui a mis l'accent sur le côté arbitraire et illusoire de l'évaluation en termes financiers de l'impact environnemental : « comment «évaluer l'impact environnemental de tout un projet d'investissement ? » (Dreveton, 2005). Il est également difficile de répartir l'imputation des coûts ou des gains de productivité entre ceux dus à une meilleure performance environnementale et ceux dus à une meilleure performance économique. Deux autres aspects ont contribué dissuader les entreprises d'intégrer certains outils dans leur système de gestion : l'ignorance relative des professionnels comptables dans es données véhiculés par ces outils (biologie, chimie, physique...) et le manque de formalisation des systèmes d'outils comptables environnementaux. Quand aux outils qui sont déconnectés des systèmes de gestion « classiques », le principal risque réside dans leur marginalisation et le fait de les reléguer « au second plan » par rapport aux outils de gestion classiques.

    La prise en compte de données environnementales dans les systèmes comptables et le contrôle de gestion reste une problématique complexe et non résolue, mais ceci est très largement du au fait qu'il s'agit d'un système en phase de développement qui nécessite encore beaucoup de travail avant de devenir opérationnel.

    Conclusion du cadre théorique et annonce des hypothèses de recherche

    Nous avons pu aborder durant cette revue de littérature les différents types d'outils de gestion ainsi que les apports qu'ils pouvaient fournir dans la mesure des performances environnementales. Il nous reste à faire le lien entre ce recueil théorique et notre problématique qui est d'ordre pratique vu qu'il s'agit de déterminer le rôle des outils de gestion dans la mesure de l'impact environnemental d'une entreprise. Cette problématique nous amènera à formuler deux sortes d'hypothèses : une hypothèse concernant la finalité des outils de gestion, puisque c'est bel et bien de leu rôle dont il est question et deux sur le type de données utilisées, puisque l'impact environnemental est une notion complexe qui comporte une très grande quantité de variables.

    Les hypothèses de recherche :

    Question centrale de recherche :

    Quels est le rôle des outils de gestion dans l'évaluation de l'impact environnemental ?

    Question de recherche n°1 : Question de recherche n°2 :

    Quelle est la nature des outils de Quel type de données permet d'évaluer

    gestion environnementaux ? l'impact environnemental ?

    Hypothèse de recherche n°1.1 :

     

    Hypothèse de recherche n°2.1 :

    Les outils environnementaux des entreprises sont des outils de pilotage.

     

    L'impact environnemental est mesuré par des données physiques.

     

    Hypothèse de recherche n°2.2 :

    L'impact environnemental est traduit en unités financières.

    Deuxième partie: étude empirique

    I. La démarche empirique : étude du terrain

    1. Une méthodologie adaptée au contexte

    a) Une démarche qualitative

    Les points que je vais développer ci dessous constituent des arguments pour le choix d'une démarche qualitative.

    Les problématiques que je pose dans le cadre de ce travail de recherche sont relativement nouvelles et commencent tout juste à être prises en considération par les entreprises. Il faut donc, dans le cadre de l'étude terrain s'intéresser aux sociétés qui ont bien saisi ces enjeux et mises en place des stratégies environnementales, si possible « proactives », c'est à dire en avance sur toutes les réglementations communes. Les stratégies environnementales varient énormément selon les entreprises, les outils de gestion sont également très différents, souvent mis en place en interne et en phase de développement.

    Si la réglementation a commencé à prendre ces enjeux en compte, elle le fait de façon progressive, se cantonne pour le moment au grands groupes et reste floue et incomplète sur de nombreux points. Par exemple : la loi sur les nouvelles réglementations économiques (ou loi NRE) oblige les entreprises cotées à fournir des indicateurs sociaux et environnementaux (consommation de matières, rejets de CO2...) chaque année mais ne leur donne aucune indication sur les unités dans lesquels ces indicateurs doivent être chiffré. De fait, on observe encore peu de standardisations ou de normes bien définies à l'intérieur des entreprises.

    La mise en place et le suivi des mesures concernant les impacts environnementaux sont des actions qui s'inscrivent dans la stratégie globale de l'entreprise. Ce sont des enjeux d'une complexité parfois étonnante et dont la réponse réside dans des décisions managériales à haut niveau hiérarchique.

    Il est donc pertinent de dire que les stratégies environnementales sont aujourd'hui dans une phase « expérimentale », c'est à dire en phase de mise en place, de tests. La démarche à adopter dans le cadre d'une étude terrain sur le sujet est donc la démarche qualitative qui se révèle être plus ciblée et plus flexible que la démarche quantitative. De plus, étant donné le public averti capable de répondre à un tel sujet, il est tout simplement très difficile de mener ne démarche quantitative.

    Enfin, le troisième argument justifiant le choix du qualitatif réside dans la forme de la démarche : une démarche qualitative nécessite le contact direct entre l'auteur du travail de recherche et ses interlocuteurs. La relation est plus personnelle, plus sujette à une confiance mutuelle et au dialogue. Etant donné le caractère confidentiel des informations communiquées, c'est inévitablement la démarche qualitative qui se prête le plus à ce genre d'étude.

    b) Des évolutions dans la démarche

    Par rapport à l'étape théorique du travail de recherche, le choix de la démarche n'a pas changé. Il a cependant été amené à évoluer au fur et à mesure. Les principales évolutions résident dans le choix de l'échantillon, de sa taille et de sa composition. Les raisons de cette évolution sont détaillées dans la partie suivante.

    2. Le choix de l'échantillon

    a) Une enquête multi-sites axée sur les grands groupes

    Il était prévu à la suite de la recherche théorique d'effectuer les entretiens auprès d'une quinzaine d'entreprises de taille moyenne (entre 50 et 300 personnes), pour ensuite compléter cette étude par deux ou trois entretiens auprès de cabinets spécialisés dans le développement durable et la mise en pace d'une démarche environnementale.

    Lors de la conduite de l'étude, j'ai préféré réduire l'échantillon de moitié tout en me concentrant sur des entreprises beaucoup plus importantes (nationales ou multinationales) : le nombre d'entreprises étudiées est 6 et le nombre d'employés - plusieurs milliers dans la plupart des cas. En effet, lorsqu'il s'agit de parler d'impact environnemental, les grands groupes sont en général montrés du doigt en premiers.

    Ils subissent donc des pressions plus importantes de la part de différentes parties prenantes (autorités légales, clients, investisseurs, grand public...) et doivent être très innovants en matière de stratégies environnementales pour pouvoir répondre de façon suffisante à ces pressions. Leur taille leur permet également de disposer de ressources suffisantes pour internaliser leur démarche en créant un département de développement durable au sein même du groupe. C'est pourquoi il es relativement aisé de trouver une personne dont le poste exige une attention constante sur des points tels que les impacts environnementaux engendrés par l'entreprise : le responsable développement durable est l'interlocuteur par excellence.

    Géographiquement, les entreprises de l'échantillon se trouvent, comme prévu, en France et en Belgique, mais la plupart ont un siège social en région parisienne.

    b) Un échantillon réduit mais diversifié

    L'étude devait à la base porter sur un échantillon composé à 75% de groupes travaillant dans le secteur industriel ou assimilé car ces entreprises doivent être particulièrement touchées par la question de l'impact environnemental.

    Cette affirmation est globalement vraie mais j'ai très vite compris que pour enrichir mon étude terrain, il convenait de diversifier les secteurs d'activité. La thématique de mes recherches n'étant pas ciblée sur un secteur particulier, ce choix m'a permis de valider les hypothèses d'une manière plus fiable: il est en effet difficile d'admettre une hypothèse comme vraie si elle n'est validée que sur les entreprises d'un seul secteur d'activité. Logistique, industrie destinée à la grande consommation, industrie lourde, média et immobilier ont fait parti de mon échantillon. Cette diversité s'est beaucoup fait sentir car, selon le secteur, les problématiques environnementales des entreprises varient beaucoup. Cependant, les entreprises industrielles ou de logistique ont été une cible prioritaire toujours pour les mêmes raisons : les pressions exercées par les parties prenantes sont plus fortes.

    Plus de 80% de l'échantillon est constitué par des groupes cotés ou leurs filiales, ce qui est également une caractéristique intéressante. Ces entreprises sont soumises depuis quelques années aux exigences de la loi NRE et doivent fournir

    tous les ans un rapport environnemental de leurs activités, en plus du rapport annuel financier déjà exigé auparavant.

    L'échantillon étudié, bien que réduit, est constitué par des entreprises dont la taille, les caractéristiques et la situation est propice à l'innovation en matière de développement durable et à une démarche proactive en matière d'impact environnemental. C'est dans ces entreprises que j'ai pu rencontré des interlocuteurs privilégiés pour mon étude.

    3. Caractéristiques des répondants

    a) Des interlocuteurs concernés par la problématique environnementale

    Le public de base prévu pour répondre à mes entretiens est constitué de contrôleurs de gestion et de directeurs de développement durable des entreprises. Dans les faits, c'est plus souvent le chargé de développement durable ou une personne occupant un poste comparable assimilé (directeurs de départements sécurité, RSE...) que j'ai été amené à rencontré tout simplement parce que la problématique environnementale se situe au centre de ses préoccupations. Cependant, qu'il s'agisse d'un responsable financier ou d'un chargé de développement durable, j'ai pu obtenir des réponses ciblées très pertinentes car je m'adressais à des acteurs stratégiques de l'entreprise.

    b) Une vision stratégique des outils de gestion

    Les interlocuteurs auxquels j'ai eu affaire au cours de mon étude terrain occupaient une place qui leur permettait de parler des outils de gestion d'un point de vue stratégique. Dans la plupart des cas, un département de développement durable travaille sur des échéances assez éloignées dans le temps et doit donc raisonner sur le long terme (qui est l'essence même du « durable ») et anticiper les évolutions économiques à venir, afin de se préparer le plus tôt possible à y faire face. De fait, mes interlocuteurs ne se contentaient pas d'une vision statique de ce qui existe déjà mais pouvaient parler de ce qui se mettait en place et de la manière dont les outils actuels étaient amenés à évoluer.

    D'un point de vue technique, même si la plupart des répondants ne prétendaient pas avoir des connaissances très pointues en matière d'outils de mesure, ils pouvaient les expliquer de façon suffisamment détaillée pour répondre aux exigences de l'étude terrain.

    4. Le déroulement de l'étude terrain

    a) La prise de contact

    Avant d'entamer un entretien, il faut bien évidemment trouver l'interlocuteur adéquat. Cette phase est très importante car la qualité de l'entretien peut fortement varier en fonction de l'approche qu'on adopte en amont. Il faut soigner cette approche au maximum et mettre l'interlocuteur en confiance avant même de l'avoir rencontré.

    La première prise de contact avec les interlocuteurs s'est généralement effectuée via l'e-mail, mais j'ai également pu rencontrer des personnes de manière directe lors d'animations consacrées au développement durable et organisées par les entreprises.

    La manière privilégiée de rencontrer des interlocuteurs consistait cependant à passer par mes contacts dans différentes entreprises. Ces contacts pouvaient notamment être des personnes déjà interviewées.

    b) Les rendez vous

    A l'exception d'un entretien qui s'est déroulé par téléphone pour des raisons de distance géographique, tous les autres ont été effectués sur les lieux de travail des interlocuteurs respectifs. Il est en effet beaucoup plus facile de convaincre un interlocuteur potentiel d'accepter un entretien en face à face lorsque l'on s'engage à se déplacer. La personne est également d'avantage en confiance et plus disposée à parler lorsqu'elle se trouve dans un contexte qui lui est familier, son bureau ou une salle de réunion proche.

    5. Le guide d'entretien

    a) La composition du guide

    Les entretiens ont pour base le guide d'entretien (voir annexes) qui a été élaboré d'après les recherches réalisés lors de l'étude théorique. Les sept questions du guide permettent de rentrer dans le sujet de manière graduelle et d'aborder chacune des hypothèses en y apportant des réponses précises. Les questions sont ouvertes et peuvent donc conduire à tout genre de réponses, de la plus floue à la plus détaillée, centrées sur le sujet ou complètement déconnectées. C'est pourquoi les questions importantes telles que "Quels outils vous permettent de mesurer ces impacts [environnementaux]?" sont suivies par une question semi fermée dont le but est de vérifier que les notions clés ont bien été citées (par exemple: "Utilisez-vous les outils suivants?" suivi d'une liste d'outils dont on veut parler).

    Les entretiens ont généralement été menés de manière assez libre, le but du guide étant de d'orienter le meneur de l'entretien et de s'assurer que l'essentiel à bien été abordé. Etant donné qu'il s'agit d'entretiens qualitatifs, certaines questions sont approfondies pour obtenir plus de détails, aborder un sujet sur un autre point de vue et enfin étoffer les réponses. Sur ce point, on peut dire que le guide représente plus le "strict minimum" en termes de sujets à aborder, plutôt que la norme. Cependant, l'ordre des questions a été pensé en imaginant le déroulement du dialogue, afin qu'une question ne vienne pas "couper" la conversation. Cet ordre s'est révélé très adapté à cette démarche.

    A chaque question du guide d'entretien correspond une ou plusieurs hypothèses que les réponses peuvent permettre de valider ou d'invalider.

    b) Le déroulement d'un entretien Voici la manière dont l'entretien doit être mené en s'appuyant sur le guide :

    Avant d'aborder les différentes questions, il est nécessaire de définir les principaux concepts dont on va parler et qui peuvent à priori paraître flous. Dans mon cas, il s'agit principalement des concepts « outil de gestion » et « impact environnemental ». L'interlocuteur est ainsi informé des définitions spécifiques que

    j'adopte de ces concepts dans le cadre de mon travail. Il est également plus à l'aise pour poser, si nécessaire, des questions à son tour. Il est nécessaire à ce stade de lui demander si l'explication a été claire et s'il est possible de démarrer l'entretien.

    L'entretien est rythmé par les questions figurant dans le guide, mais il est absolument clair qu'en fonction de ce que répond l'interlocuteur et de la volonté d'approfondir, de détailler, de varier ou de diriger les réponses, une multitude de petites questions d'appoint vont se glisser entre les questions principales et ajouter de la fluidité à l'échange.

    1) La question environnementale fait elle partie des préoccupations de votre entreprise ?

    2) Votre entreprise évalue-t elle certains de ses impacts environnementaux ? si oui, lesquels ?

    Ces deux questions ont pour but d'introduire l `entretien et de rentrer petit à petit dans le contexte étudié. La première question est accessoire et suppose nécessairement une réponse positive, surtout lorsque l'interlocuteur est chargé de développement durable. Par conséquent, il est possible de l'éviter.

    La deuxième question aborde le thème de la mesure des impacts. Elle est très importante car doit nécessairement mener à se demander le « comment ? » et le « pourquoi ? » de cette mesure. Elle sert également à introduire la suite.

    3) Quels sont les outils qui vous permettent d'évaluer ces impacts?

    Cette question permet de passer en revue un à un les outils de gestion qui permettent l'entreprise d'évaluer son impact environnemental. Elle permet de donner des éléments de réponse à l'hypothèses H 1.1 dans la mesure où, selon la forme des outils utilisés, on peut émettre des possibilités sur leur nature (voir figure 5). Il convient dans cette de laisser l'interlocuteur parler spontanément des outils qui lui paraissent les plus important.

    4) Utilisez vous les outils suivants ?

    - Ecobilan

    - Tableau de bord vert/ indicateurs environnementaux - Evaluation des coûts environnementaux externes

    - Budgets environnementaux

    - Comptes verts

    - Autres (lesquels) ?

    Au fur et à mesure que la question précédente est traitée, le meneur de l`entretien passe en revue les différents outils de la liste. Quand l'interviewé a fini de répondre, le meneur l'interroge sur les outils e la liste qui n'ont pas été cités. En traitant cette question, ainsi que la précédente, on est amené à parler des types de données qui alimentent les outils en question, afin de pouvoir vérifier les hypothèses H 2.1 et H 2.2. Pour approfondir cette recherche, il convient de traiter la question suivante :

    5) A l'aide de quelles données alimentez vous ces outils ? Quelles sont les données sortantes ?

    6) Ces données sont elles : - Physiques ? - Qualitatives ? - Financières ?

    Ces deux questions doivent permettre de récolter toutes les informations nécessaires à valider ou invalider les hypothèses H2.1 et H 2.2. Il est probable que les réponses soient différentes selon les outils de gestion dont on parle. Il faut donc récolter assez d'informations pour adopter parla suite un point de vue analytique.

    7) Pour les utilisateurs, la finalité de ses outils de gestion est plutôt :

    - De guider la gestion de l'entreprise au quotidien ?

    - De surveiller de manière indirecte les performances des unités opérationnelles ?

    - D'établir à intervalles réguliers un diagnostic global des performances de la société ?

    - Une autre finalité (laquelle) ?

    Avec cette question nous revenons à l'hypothèse H 1.1. Cependant, il n'est utile de la poser qu'après avoir traité les questions précédentes, car elle s'inscrit comme leur suite logique : après avoir déterminé comment marchent les outils de gestion, quels impacts ils mesurent et quelles données sont rentrées/ressorties de ces outils, il convient de parler d'avantage de leur intérêt managérial et de leur rôle pour les différents acteurs de l'entreprise.

    Après avoir "exploré le terrain" et récolté des témoignages, il est temps de les confronter aux suppositions de départ, qui ont été, elles, élaborées à partir de recherches purement théoriques.

    II. Test des hypothèses

    La phase durant laquelle on confronte la théorie aux différentes observations qui ont pu être effectuées sur le terrain est de loin la plus intéressante. On a en effet l'occasion de remettre en question certaines théories mais il faut également se munir d'un regard critique pour éviter à tout prix de se faire piéger par les différents biais qui ont pu intervenir lors de la recherche (voir la partie "apports et limites de la recherche").

    Les témoignages que j'ai eu l'occasion de récolter m'ont permis de mettre en place des matrices (voir annexes) dans lesquelles j'ai testé la validité de mes différentes hypothèses, tout en y apportant les preuves nécessaires par des verbatim tirés de mes entretiens.

    1. Des hypothèses dont la validation varie selon les outils

    Lors de la phase théorique du mémoire, j'ai mis en avant différents outils de gestion que je m'attendais à rencontrer lors de la phase empirique. Voici les outils auxquels j'ai principalement eu affaire sur le terrain:

    - Le bilan carbone

    - L'analyse du cycle de vie ou ACV (qui est une version plus standardisée de l'écobilan)

    - Les tableaux de bord verts

    Le bilan carbone et l'ACV présentent quelques similitudes entre eux dans le sens ou il s'agit dans chaque cas de dresser un bilan des impacts environnementaux engendrés durant tout le circuit d'un produit. La différence principale réside dans le fait que dans un bilan carbone, tous les impacts sont traduits en équivalent carbone, via une échelle définie dans l'outil, alors que l'ACV doit recenser 7 types d'impacts différents11.

    Le bilan carbone peut également être appliqué à un site, un ensemble de site ou même à une entreprise dans sa globalité. Il n'a pas été traité dans la partie théorique mais son intérêt est tout de suite ressorti lors de la phase terrain: étant donné les pressions qui surgissent actuellement suite à la mise en place de la lutte contre le réchauffement climatique, beaucoup d'entreprises placent le carbone dans leur priorités. Autre point intéressant, au niveau pratique cette fois: contrairement à l'ACV, il n'utilise qu'une seule unité et rend donc comparables des impacts qui à la base ne le sont pas du tout. Cet avantage induit également des limites car il est difficile de trouver une échelle de conversion en équivalent carbone qui soit pertinente.

    Le tableau de bord vert est un nom générique qui regroupe tous les tableaux de bord mis en place en interne par les entreprises. Ces tableaux de bord contiennent des indicateurs divers qui sont mis à jour régulièrement, soit pour répondre à des exigences externes de reporting environnemental, soit pour suivre en interne des performances liées à l'environnement. Leur mise en place et leur structure sont beaucoup moins normées que celles d'une ACV, il existe donc une

    11 N.BOEGLIN & D.VEUILLET, "Introduction à l'Analyse de Cycle de Vie (ACV)", Département Eco- Conception & Consommation Durable / Direction Clients, note de synthèse externe : mai 2005

    multitude de possibilités de tableaux de bord en fonction des indicateurs que ceux-ci intègrent.

    Il est clair que ces outils ne sont pas construits de la même façon et ne jouent pas essentiellement le même rôle au sein des organisations. C'est pourquoi il est possible qu'une hypothèse soit valide sur l'un d'entre eux et non valide sur les autres. Pour tester la validité de mes hypothèses, je vais donc me concentrer sur chaque outil séparément. Leur nombre restreint par rapport au panel de départ va permettre de réduire la complexité de cette analyse.

    2. Un pilotage environnemental qui se met en place

    Valider l'hypothèse H 1.1 consiste à démontrer que les outils de gestion environnementaux sont utilisés comme outils de pilotage, c'est à dire que leurs données servent de base à des décisions de gestion de manière régulière.

    a) ACV et écobilans: des outils de diagnostic avant tout

    Sur l'ACV (ou écobilan), l'hypothèse est globalement invalidée. En effet, cet outil est en général très lourd à mettre en place, demande beaucoup de temps et de ressources. "C'est une démarche très lourde, coûteuse en temps et en ressources" comme on a pu le voir sur le terrain. De plus, il s'agit d'un outil global et dont la précision reste très relative. Il est souvent mis en place de manière ponctuelle et permet de mettre en valeur les sources des différents impacts, ainsi que leur importance relative. C'est donc bel et bien d'un outil de diagnostic qu'il s'agit. Le diagnostic peut définir des cibles d'action potentielles (celles qui génèrent l'impact le plus important), voire même être utilisé comme outil de communication.

    Le schéma est identique en ce qui concerne les bilans carbone dont la mise en place est également très complexe.

    Ces deux outils sont actuellement à un stade de développement relativement avancé et bénéficient d'une certaine standardisation grâce à des lois comme la loi NRE ou des organismes comme l'ADEME12. Cette standardisation pose d'ailleurs

    12 Agence de l'environnement et la maitrise des énergies - http://www.ademe.fr

    inévitablement certaines règles et contraintes qui rendent l'outil moins flexible et moins pratique pour les entreprises.

    b) Des tableaux de bord qui offrent des solutions

    L'outil qui offre la flexibilité la plus totale est le tableau de bord vert. Celui ci se présente comme une série d'indicateurs que les entreprises mettent à jour régulièrement et adaptent entièrement à leur activité. Selon la nature de ces indicateurs, il est possible de cibler cet outil sur certains aspects de l'activité, par exemple sur les rejets des usines dans le cadre d'une production industrielle, ou sur une consommation de papier dans le cadre d'une activité tertiaire.

    On retrouve là un outil qui peut permettre de suivre régulièrement une série de données précises dans le cadre d'un pilotage d'activité. Il s'agirait de traduire le coût environnemental d'un produit et nous basculeraient vers une démarche assez classique en gestion qui consiste à optimiser les coûts au maximum.

    c) Un pilotage qui nécessite encore une mise en place

    Il est apparu lors des entretiens que des indicateurs de tout genre étaient suivis de façon très régulière par les entreprises, des indicateurs qui souvent "étaient suivis depuis peu", "pourraient servir de tableau de bord". Des remarques telles que « on va passer dans une nouvelle ère » ou « tout est encore à construire » nous prouvent que l'on a affaire à des outils en évolution, en développement... mais qui ne sont pas encore utilisés dans une démarche de pilotage.

    Grâce aux matrices d'analyse, il a été possible de confronter deux points de vue qui constituent en quelque sorte le « pour » et le « contre » de l'hypothèse H 1 .1. D'un côté il est clairement ressort que les tableaux de bord spécifiques constituaient des outils de pilotage adéquats en matière `environnement. De plus, il est apparu que des décisions managériales basées sur es critères environnementaux sont effectivement mises en place au sein des entreprises et répondent à une démarche d'amélioration des performances environnementales.

    Mais il s'est avéré que les tableaux de bord en question n'étaient pas encore en place en tant que tels, mais bel et bien en phase de développement. Quand aux décisions managériales, il s'agit bien souvent de démarches ponctuelles plus souvent basées sur des raisonnements de bon sens, ou sur la volonté de réaliser des économies tout en effectuant un geste pour l'environnement. Des actions implémentées de la sorte, pouvant être appelées « quick-wins » ou gains rapides sont souvent observables, mais ne reposent globalement pas sur des données fournies par les outils.

    On est encore dans une phase ou la plupart des entreprises mettent en oeuvre les outils servant à évaluer leurs impacts environnementaux dans la globalité et à en déterminer les sources, pour mieux cibler leurs actions. C'est une phase de diagnostic qui va servir à construire les outils permettant de piloter leurs performances.

    Diagnostic
    global des
    impacts.

    Identificati
    on des
    champs

    Mise en
    place
    d'outils de

    Mise en
    place
    d'objectifs

    Suivi des
    indicateurs
    liés aux

    Prise en considération progressive des aspects environnementaux

    Sur cette progression chronologique, certaines entreprises sont plus avancées que d'autres. Elles ont déjà achevé leur phase de diagnostic et commencent à suivre une série d'indicateurs de manière annuelle, avec à la clé des objectifs de réduction, également annuels. Ces objectifs concernent en général les émissions de gaz à effet de serre, la consommation d'énergie, la consommation de matières premières ou encore la part de matières recyclées utilisée pour la production.

    Suivre la consommation de carbone est une tendance générale que l'on retrouve chez la majorité des grands groupes et dont la principale motivation à ce jour consiste à anticiper l'évolution des réglementations en matière d'émissions de

    CO2. Il est également important pour les entreprises de réfléchir aux moyens à mettre en oeuvre pour réduire leur dépendance aux énergies fossiles.

    Ces indicateurs servent cependant principalement d'outils de suivi: la question à laquelle ils permettent de répondre est du type "ai-je bien atteint mes objectifs annuels en terme de ...?" ce qui rejoint la notion de "surveiller à postériori" présente dans la définition des outils de suivi.

    Au vu de cela, il n'est pas possible à ce jour de valider l'hypothèse H 1.1. Il est assez probable malgré tout que celle ci soit validée au cours années à venir.

    2. Une prépondérance des données physiques

    a) Bien distinguer les "inputs" et les "outputs"

    La deuxième question de recherche que je suis amené à traiter porte sur le type de données utilisées par les outils de gestion environnementaux. La première hypothèse à ce sujet, nommée H 2.1 est que l'impact environnemental d'une entreprise soit exprimé à l'aide de données physiques.

    Avant de parler des données utilisées par les outils, il faut noter qu'un bon nombre de ceux ci comportent des données entrantes (que l'on peut appeler des "inputs") et des données sortantes (que l'on peut appeler des "outputs"). C'est notamment le cas des ACV, des bilans carbone et des tableaux de bord. En schématisant cette affirmation, on obtient ceci:

    Données entrantes: "inputs"

     
     
     
     

    Données sortantes: "outputs"

     
     

    OUTIL

     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     

    L'outil servant à rendre des données lisibles, interprétables, ou à effectuer des analyses, il est possible que les données entrantes et sortantes ne soient pas du même type.

    Il est par exemple possible d'avoir en entrée, des données physiques et des données financières en sortie: si on traduit des émanations de carbone par les couts

    qu'elles engendrent en taxes. Autre exemple envisageable avec des données physiques en entrée et des données qualitatives en sortie: un outil qui permet de fournir une analyse commentée à partir de chiffres relatifs aux différents impacts (production de déchets, matières consommées, rejets...).

    b) Des données physiques en entrée

    D'après ce qui a été observé sur le terrain, les données servant d'inputs aux différents outils de gestion environnementaux sont bel et bien des données physiques. On parle de "litres d'essence", de "kilos de gaz", de "kilos de déchets", de "kilowattheures d'énergie" et d'autres flux physiques de diverses natures, qui dépendent des paramètres mesurés.

    Tous ces flux vont alimenter les outils. Qu'il s'agisse d'un bilan carbone, d'une analyse de cycle de vie ou de tableaux de bord, les mesures de base sont effectuées en données physiques.

    Ceci nous permet de valider de manière tout à fait certaine l'hypothèse H 2.1.

    Dans le cadre des tableaux de bord, des données financières peuvent venir compléter les informations fournies par les données physiques. Une dépense d'énergie chiffrée en Kilowattheures peut par exemple s'accompagner d'un suivi des coûts liés à cette dépense, mais la recherche d'une meilleure efficience énergétique vise à réduire la quantité d'énergie consommée (directement contrôlable) plutôt que son coût, qui dépend à la fois de la quantité consommée que du prix de l'énergie sur les marchés (sur lequel les entreprises n'ont pas d'emprise).

    c) A la recherche d'unités pertinentes

    Concernant les données entrantes, la recherche d'efficience passe par la récolte de données les plus précises possible. A côté de cela, le but des données sortantes est d'en fournir l'interprétation la plus pertinente possible. Ces données peuvent être de plusieurs types:

    Dans le cadre d'une ACV, il s'agit d'agréger les mesures des impacts mesurés tout le long de la chaîne de production et les répartir sur ses différentes étapes. Les unités sortantes sont donc identiques aux unités entrantes mais le point de vue fourni est global et permet de les analyser. On peut par exemple voir à quelle étape la production des déchets est la plus importante, quelle étape est la plus gourmande en énergie... ce qui n'est absolument pas possible en utilisant directement la multitude de mesures effectuées sur le terrain. La limite de cette démarche réside dans le fait de ne pas pouvoir comparer entre eux de façon pertinente les différents types d'impacts.

    Le bilan carbone fonctionne sur le même principe mais convertit cette fois l'ensemble des impacts en équivalent carbone, c'est à dire qu'au lieu de comptabiliser une consommation de matières premières (exprimées en poids de cette matière consommé), on calcule la quantité de CO2 dégagée pour produire la matière en question. Rien ne change à ce niveau là vis à vis de notre hypothèse (on a toujours des données physiques en entrée et en sortie) mais on obtient cette fois une échelle de comparaison des différents impacts, bien qu'elle soit centrée sur le carbone, au détriment d'autres aspects.

    d) Les données financières ne permettent pas de traduire l'impact environnemental

    Même si les informations financières peuvent permettre de compéter des données physiques au sein d'un tableau de bord, il est clairement apparu que les outils permettant de traduire un impact environnemental en unités financières ne sont pas mis au point.

    Des outils tels que l'ACV et le bilan carbone n'intègrent pas du tout l'aspect financier car leur but est justement de se concentrer sur les flux physiques. Les tableaux de bord les intègrent parfois mais en tant que complément d'information.

    La question de savoir si l'entreprise traduit ses impacts environnementaux en unités financières, la réponse a été négative dans tous les cas. D'une manière

    générale, aucune recherche d'équivalence directe entre les unités financières et impacts environnementaux n'a été mise en avant au cours de l'étude terrain.

    III. Discutions sur les résultats obtenus

    1. Les rôles respectifs et évolutions possibles des outils

    a) Les tableaux de bord verts: des outils adaptés pour le pilotage

    Lorsque j'affirme que l'hypothèse H 1 .1 ("Les outils de gestion environnementaux sont des outils de pilotage") ne peut pas encore être validée à ce jour, il convient de bien insister sur les notions "encore" et "à ce jour" qui intègrent la notion de temps et évoquent de probables évolutions dans les années à venir. Il est clair que le pilotage environnemental des activités se met en place au fur et à mesure que les outils adéquats se construisent et que les enjeux des entreprises évoluent. Mais quels sont les arguments qui me permettent de l'affirmer?

    Tout d'abord, il est clair que suite aux pressions que subissent les acteurs de l'économie en termes d'environnement, des outils environnementaux de plus en plus aboutis se mettent progressivement en place, car leur but est de répondre aux exigences imposées dans ce domaine. Or, ces exigences croissent au fil des années, et il est très probable que dans les années qui viennent, la règlementation exigera aux groupes cotés non seulement de fournir des données sur leurs impacts environnementaux, mais également d'acquérir une maitrise de ces impacts et d'accomplir des objectifs chiffrés en termes de réduction de ces impacts. C'est déjà le cas dans quelques domaines restreints, mais il est clair que l'historique des impacts n'est pas encore assez riche pour pouvoir définir les objectifs avec précision. Nous sommes encore en phase d'observation. La taxe carbone représente à l'heure actuelle la principale obligation légale poussant les entreprises à travailler sur les réductions de leurs impacts et représente à la fois un challenge environnemental et économique. Il en sera de même pour les autres exigences environnementales de la part des parties prenantes, dans la mesure où les efforts en matière d'environnement seront également bénéfiques sur d'autres aspects.

    D'autre part, ce qui ressort de l'étude terrain, c'est que les entreprises prennent déjà des décisions de gestion basées sur des critères environnementaux,

    mais il se trouve que ces décisions ne sont pour le moment pas pilotées via des outils de gestion dans bien des cas. D'ici à ce qu'un système de pilotage plus normalisé se mette en place, il n'y a qu'un pas. Dans le cadre de prestations sur mesure ou de gestion de projets, certains groupes proposent déjà à leurs clients différentes alternatives pour un même projet qui implique des impacts environnementaux différents. Pour cela, elles mettent en place des outils précis mais ne pilotent pas directement dans le mesure ou le choix est pris par un acteur externe.

    Si les outils de gestion environnementaux ne sont pas encore des outils de pilotage, leur mise en place est actuellement une tendance globale et il ne serait pas surprenant de voir d'ici quelques années des outils de pilotage opérationnels qui commenceront à se généraliser.

    b) Les bilans carbone et les éco bilans: des outils de diagnostic avant tout

    Mis en place depuis 2003 et adapté au fil des années, le bilan carbone est un outil que l'ADEME tente de généraliser et d'adapter à tout type d'entreprises. Il s'agit par l'intermédiaire de cet outil d'analyser les principales activités de l'entreprise et de les traduire en une quantité équivalente d'émissions de carbone.

    Il s'agit là véritablement d'un outil de diagnostic: il permet de dresser un bilan de l'entreprise en termes d'émissions et a vocation d'orienter les décisions stratégiques quand aux moyens mis en place pour les réduire.

    Comme l'écobilan et l'analyse du cycle de vie, le bilan carbone est une démarche lourde à mettre en place et qui ne peut être répétée fréquemment. Ces trois outils répondent bien à la définition d'outil de diagnostic de H. BOUQUIN qui les définit comme des outils servant à "donner une image de la trajectoire de l'entreprise d'un point de vue externe". L'outil de diagnostic est ponctuel mais précis. Il a également vocation à être global, et c'est effectivement le cas du bilan carbone qui s'intéresse à l'ensemble de l'activité de l'entreprise. On retrouve la notion de point de vue externe dans le fait que ces outils soient élaborés ou validés par des organismes à vocation neutre (comme l'ADEME, par exemple) et donc relativement normalisés.

    La notion d'image traduit le caractère ponctuel de la démarche. Les outils tels que le bilan carbone ou l'ACV donnent effectivement une image statique, prise à un instant t.

    c) Une nouvelle logique à intégrer dans le processus de gestion

    La principale raison pour laquelle les données financières sont encore très peu présentes dans la mesure de l'impact environnemental est qu'il est très difficile de trouver une équivalence entre deux logiques qui se retrouvent confrontées pour la première fois: la logique environnementale et la logique économique. Comme l'illustrent Pierre BARRET et Benjamin DREVETON (2006), l'évaluation des impacts environnementaux est aujourd'hui très imprécise et approximative.

    Il est pour le moment difficile d'intégrer réellement une logique environnementale dans le processus de décision classique qui implique une multitude de paramètres mais dans lequel on a historiquement tendance à beaucoup s'appuyer sur les arguments financiers. Cependant, cette tendance est actuellement en train d'évoluer: de plus en plus, les entreprises mettent en avant des arguments d'ordre environnemental pour justifier leurs décisions, et cette démarche bénéficie de plus en plus de l'appui des parties prenantes au fur et à mesure que les mentalités évoluent.

    Il n'en est pas moins nécessaire à ce jour de faire un lien entre les politiques économiques et environnementales des entreprises, pour que des arguments d'ordre financier puissent appuyer les décisions environnementales.

    Un exemple de ce qui est développé précédemment: le système de la taxe carbone et des émissions de droits à polluer mis en place via le protocole de Kyoto. Il s'agit le d'une passerelle simple et directe entre la logique financière et environnementale: une émission équivaut à un cout. Réduire ses émissions permet donc également de performer en termes économiques. Cette mesure incite les entreprises à fournir des efforts en termes d'environnement, mais elle les oriente également en les incitant à agir en priorité sur les gaz à effet de serre.

    2. Vers la mise en place d'une compta-carbone?

    a) Des priorités à prendre en compte

    La recherche d'une unité commune est très importante: dans une logique purement financière, l'unité monétaire sert d'étalon de référence et rend possible calculs, comparaisons, agrégations et facilité la tâche des outils de pilotage. Dans un contexte d'impacts environnementaux ou les données sont exprimées dans une multitude d'unités différentes, il devient beaucoup plus complexe de construire des outils de pilotage. Comment en effet interagir sur un tas d'indicateurs qui n'ont, à priori rien à voir les une avec les autres? Il faut bien évidement fixer des priorités.

    La solution émane peut être du contexte géopolitique du moment. Deux préoccupations d'ordre à la fois écologique et économique prédominent l'actualité: le réchauffement climatique et l'épuisement des ressources énergétiques à base de carbone. Le rejet de CO2 fait le lien entre ces deux problématiques car le CO2 est le principal gaz à effet de serre émis par l'activité humaine et qu'il implique en amont, une consommation de ressources carbonées. Le protocole de Kyoto pose un cadre légal à cette problématique prioritaire et pousse les sociétés à se préoccuper de façon prioritaire de leurs émissions.

    b) Une généralisation de l'outil possible

    La notion de comptabilité carbone sous-entend deux choses:

    - D'une part que l'intégralité des impacts environnementaux mesurable puisse être convertie en rejets de CO2 équivalents, ce qui permettrait d'utiliser cette unité de mesure sur l'étendue de toute une activité d'entreprise. Cette équivalence convertirait tous les processus, les quantités de matière utilisées ou les rejets en une seule unité et permettrait de comparer des impacts environnementaux jusque la incomparables. Ces équivalences se heurtent néanmoins à certaines limites: la pertinence des conversions et la non possibilité de convertir certains impacts. Comment, par exemple, considérer les activités d'une centrale nucléaire, très performante sur le plan du CO2 mais dont les déchets restent radioactifs durant plusieurs millions d'années? Qu'en est il des autres formes de pollution?

    - D'autre part que ce système ne soit plus seulement utilisé dans le cadre d'un diagnostic environnemental, mais également de manière plus régulière dans la gestion au quotidien de l'entreprise. Il devra donc être intégré dans les systèmes de pilotage, les tableaux de bord et les autres outils qui accompagneront cette gestion.

    Si ces deux conditions sont réunies, il sera possible de chiffrer tous les impacts environnementaux dans une unité commune, et ainsi de mieux pouvoir les traiter et les comparer, comme il est possible de le faire aujourd'hui avec les recettes et les coûts des différentes activités. Par extension, il sera plus simple d'établir une équivalence entre les unités financières et celles qui permettent de chiffrer es impacts environnementaux pour mieux allier logique financière et logique environnementale.

    Beaucoup de "si" et de suppositions finalement nous séparent de cette hypothétique évolution des stratégies environnementales, mais si cette évolution peut être évoquée avec tant de pertinence, c'est bel et bien grâce aux observations du terrain qui la confortent en tous points.

    VI. Apports et limites de la recherche

    1. Un point de vue plus clair sur la littérature étudiée

    a) J. DESMAZES et J-P. LAFONTAINE: un point de vue partagé

    Les deux auteurs ont publié en 2005 un article de recherche intitulé « L'assimilation des budgets environnementaux et du tableau de bord vert par les entreprises », article que j'ai cité à plusieurs reprises lors de l'étude théorique. Ils y démontrent par une étude terrain que les entreprises ont tendance à mieux assimiler les tableaux de bord "verts" que les budgets environnementaux.

    Ces résultats se sont confirmés sur le terrain: les entreprises ont en effet plus de facilités à mettre en place des tableaux de bord dédiés aux performances environnementales, qui sont alimentés par des données physiques et répondent donc à une logique tout à fait nouvelle, que des budgets environnementaux, spécialement destinés à l'amélioration des performances environnementales.

    On voit bien ici le problème qui se pose d'un point de vue gestion: tant que la vision financière d'une activité restera complètement déconnectée de tout aspect environnemental (et vice versa), il sera difficile de prendre des décisions sur critères environnementaux et de piloter une activité via des tableaux de bord verts. Une intégration des problématiques environnementales sera d'autant plus facile si on crée des passerelles entre logique financière et développement durable. Une démarche dans laquelle la marge de progrès est encore énorme.

    b) La prise en compte des normes environnementales par les grands groupes (O. BOIRAL, M. ESSID)

    Ces deux auteurs, largement présents dans les ressources bibliographiques qui alimentent la partie théorique du mémoire, traitent des nouvelles formes de management qui se mettent en place dans les entreprises. Ces normes, dont la plus généralisée est la norme ISO 14001, incitent les sociétés à prendre en considération de nouveaux enjeux jusque là peu considérés.

    Sur le terrain, j'ai effectivement pu observer une grande influence des normes sur les décisions managériales concernant les outils. A ce jour, les grands groupes fournissent beaucoup d'éfforts pour se faire certifier et appliquer des systèmes de management environnemental à la plus grande partie de leurs activités. Ces efforts sont également très influencés par les obligations règlementaires telles que la loi sur les nouvelles réglementations économiques (loi NRE).

    On entend beaucoup dire "l'outil, c'est la règlementation", ce qui sous entend que les acteurs économiques accordent à la règlementation le rôle de choisir sur quels impacts agir en priorité. Ce schéma est celui d'une stratégie réactive, telle que la définit M. ESSID dans son travail de recherche.

    Mais se plier à la règlementation ne suffit pas toujours, et certaines sociétés l'ont bien compris en essayant d'aller plus loin en la matière. En anticipant les évolutions futures en termes d'exigence des parties prenantes, ces entreprises cherchent à obtenir une sorte d'avantage concurrentiel sur les autres. Il s'agit

    également de gagner du temps pour s'adapter aux mutations à venir dans le paysage économique.

    2. Regard sur une démarche en pleine évolution

    Une tendance a été repérée chez quasiment tous les interlocuteurs rencontrés: en répondant aux questions, ils parlent du présent mais se projettent également beaucoup dans l'avenir. On sent que beaucoup de choses sur le plan environnemental sont en phase de construction, en phase de test, voire en projet. La problématique environnementale se révèle être en quelque sorte un moteur de dynamisme et d'innovation pour les entreprises.

    "Il faut rester humble. On ne peut être sûr que les logiques dominantes aujourd'hui seront aussi pertinentes dans quelques années." Cette pensée à été évoquée au cours d'un échange et illustre très bien un contexte particulièrement incertain dans lequel les entreprises sont aujourd'hui plongées. Les démarches environnementales sont censées fournir les réponses à des problèmes urgents, de grande ampleur et qui étaient complètement absents de la logique économique il y a seulement quelques années de cela.

    Comme nous avons pu le voir dans la partie précédente, la prise en compte de l'impact environnemental passe par différentes phases. Beaucoup d'entreprises établissent aujourd'hui des diagnostics et des suivis de leurs impacts, ce qui a été accompagné par un développement d'outils adéquats. On s'attend donc à une évolution des outils de suivi et à une mise en place plus généralisée d'outils de décision basées sur les performances environnementales des entreprises.

    3. Les principales limites

    a) Limites liées au sujet d'étude

    Les outils de gestion environnementaux constituent un sujet relativement récent, portant sur des notions nouvelles aussi bien pour un chercheur effectuant un travail académique que pour les acteurs économiques eux-mêmes qui travaillent avec ces outils. Il n'est donc pas anodin de se trouver face à des résultats incertains et qui manquent d'observations historiques sur le terrain.

    b) Limites du terrain de recherche

    La démarche terrain entreprise dans le cadre de ce mémoire est très orientée qualitatif, c'est à dire que toutes les problématiques sont traitées de la manière la plus exhaustive possible. Cette démarche pose toutefois des limites au niveau de la taille de l'échantillon étudié. Un nombre d'interlocuteurs réduit rend moins certain le test des hypothèses. Pour être proche de la certitude, il faudrait compléter l'étude par une phase quantitative, portant sur un plus grand nombre d'interlocuteurs et constituée par des questions fermées.

    Encore une fois, étant donné la spécificité du public considéré comme "idéal", le nombre de ceux ci est limité, et il est donc compliqué de mener une étude quantitative sur ce terrain, contrairement, par exemple, à une étude portant la grande consommation, pour laquelle il est relativement aisé de trouver un grand nombre de répondants.

    Afin de palier à cette difficulté, des études statistiques réalisées sur les entreprises sont donc des documents utiles à la recherche.

    c) Principaux biais cognitifs lors des entretiens

    Lors de la conduite d'un entretien, il est fréquent de se heurter à des biais cognitifs, qui peuvent remettre en cause l'objectivité des données récoltées.

    L'un d'eux réside dans la manière de poser les questions, qui peut inconsciemment orienter la réponse de manière à obtenir exactement ce que l'on cherche.

    Un autre biais peut survenir de la manière dont les interlocuteurs interprètent les concepts principaux du travail de recherche. Il est donc nécessaire, avant chaque entretien, de définir ces concepts tels qu'on les a définis dans le cadre de la phase théorique du mémoire.

    Ces biais sont souvent difficiles à éviter en entretien, mais en les recensant et en y accordant une attention particulière lors du traitement des données, il est possible de minimiser leur incidence sur l'étude.

    d) Savoir prendre du recul et garder son objectivité

    Lors de la conduite de l'étude terrain, le "chercheur" (car c'est la position qu'on adopte alors) est plongé dans le vif du sujet beaucoup plus qu'il ne l'est au cours de l'étude théorique. Cela peut paraitre évident, mais il convient néanmoins de préciser que pour mener une étude de manière objective et pertinente, il est nécessaire de prendre du recul lors de la rédaction pour ne pas dévier du sujet. Le point le plus délicat réside sans doute de l'influence que les opinions personnelles du chercheur peuvent avoir sur la manière de rendre par écrit les résultats. Il est évident que l'aspect humain est (heureusement) omniprésent dans tout type de travail, mais je tiens à préciser qu'un effort particulier à été fourni pour rendre ce travail le plus objectif et pertinent possible.

    Conclusion

    Ce travail de recherche avait pour but d'explorer la sphère des outils de gestion environnementaux et de se pencher sur ceux dont l'utilisation était la plus répandue. Le but final était de pouvoir valider d'une part l'hypothèse supposant qu'il s'agit d'outils de pilotage, et d'autre part de déterminer quelles sont les données utilisées pour mesurer et traduire l'impact environnemental.

    Derrière ce travail se cachait en fait un challenge: celui de faire un pas de plus dans l'étude théorique et empirique des nouveaux outils, qui permettent aux entreprises de répondre à des problématiques émergentes, encore peu étudiées. Ce sujet m'a tout de suite incité à découvrir les processus mis en place au sein des entreprises pour répondre à ces problématiques. Des outils comme l'éco-bilan et le bilan carbone, commencent à se généraliser et sont relativement standardisés. Ils répondent bien aux demandes actuelles des entreprises en matière d'environnement, à savoir de dresser un bilan global de leurs impacts et poser des repères pour les progrès à réaliser.

    Mon sujet de recherche, qui concernait d'avantage le pilotage au quotidien et la prise de décision, m'a orienté vers des outils plus "expérimentaux", souvent mis en place en interne par les entreprises pour répondre à des besoins de suivi environnemental, avec, pour certains groupes, des objectifs de réduction des impacts d'une année sur l'autre.

    Ces tableaux de bord environnementaux sont les outils les plus adaptés pour valider la première hypothèse, car ils sont, en théorie, parfaitement adaptés pour le pilotage. L'observation sur le terrain a confirmé le fait que ces outils sont adéquats, mais l'hypothèse est cependant invalidée car le pilotage environnemental n'est pas encore mis en place au sein des entreprises. L'impact environnemental est souvent l'objet d'un suivi ou d'un diagnostic, qui permet de situer l'entreprise et de définir les champs d'action, de communiquer sur les progrès réalisés et potentiel. Elle est également beaucoup utilisée comme outil de communication interne ou externe. En interne, il est important que les collaborateurs soient imprégnés des messages que

    veut véhiculer l'entreprise. En externe, se sont principalement les investisseurs, les clients et les autorités légales qui sont visées. Il est très clairement ressorti que sensibiliser les parties prenantes fait partie des priorités des entreprises.

    En ce qui concerne les données utilisées, il s'est avéré qu'il s'agissait dans une très grande proportion de données physiques, ce qui valide l'hypothèse de départ à ce sujet. Les données financières sont un complément d'information précieux, mais on ne peut pas encore, à ce jour, traduire de façon précise un impact environnemental en unités financières. De part cette différence, il est difficile à ce jour de faire un lien entre la logique financière et la logique environnementale, et répondre à des questions de type "un projet plus couteux mais moins impactant est il plus avantageux qu'un projet peu couteux mais lourd en termes d'environnement?". Pouvoir établir un lien direct entre les deux logiques permettrait de prendre des décisions rationnelles en incluant à la fois les paramètres économiques et environnementaux.

    Les émissions de carbone contribuent néanmoins à faire le lien entre la logique environnementale et la logique financière: la mise en place de quotas d'émissions de carbone négociables sur le marché incite de façon très claire les entreprises à se concentrer en priorité sur cet impact environnemental, tout en l'associant à un enjeu économique: celui de minimiser ses dépenses en "droits à polluer". Si les entreprises parviennent à traduire un bon nombre de leurs impacts en équivalent carbone, elles auront une vision nettement plus claire des conséquences financières que représentent ces impacts. Encore faut il que l'innovation en la matière atteigne un stade plus avancé.

    Ces conclusions représentent la réalité à ce jour. Ce n'est pas une réalité figée mais inscrite dans une dynamique qui veut que la problématique environnementale prend de plus en plus d'ampleur au sein des entreprises et les oblige à y répondre de façon de plus en plus pertinente. Il serait donc très utile de reconduire une étude de ce genre d'ici quelques années afin d'observer l'évolution qui sera opérée au niveau des outils de gestion environnementaux et reconsidérer les hypothèses ici posées.

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    Annexes

    Tableau de synthèse des principales lectures

    Ouvrage

    Objectif de la recherche

    Résultats

    ESSID M. (2007)

    « Quels outils de contrôle pour décliner les
    stratégies

    environnementales ? »

    Identifier les principaux

    outils de contrôle que les

    entreprises françaises du

    CAC 40 utilisent pour

    décliner leurs stratégies
    environnementales.

    Classement des entreprises du

    CAC 40 selon les outils utilisés en quatre catégories : les entreprises réactives, adaptatives, actives et proactives.

    LAFONTAINE J.P.,
    (2003),

    « Les techniques de

    comptabilité

    environnementale, entre

    innovations comptables

    et innovations

    managériales »

    S'interroger sur la nature de la comptabilité environnementale (CE) afin de l'assimiler à une innovation comptable ou une invention managériale.

    Prise dans sa globalité, la CE est
    une innovation managériale car
    elle mobilise de nouvelles

    connaissances et a un impact

    direct sur le management. Cependant, quatre méthodes de CE peuvent être assimilées à des innovations comptables.

    BOIRAL O., (2000),
    « Vers une gestion
    environnementale des
    entreprises ? »

    Déterminer quels sont les

    fondements implicites et les enjeux de la norme ISO 14001 et si ces fondements sont en accord avec les tendances générales actuelles en termes de management.

    La norme ISO 14001 sensibilise les acteurs de l'entreprise à des enjeux qui jusqu'à présent n'étaient que peu considérés. Ses principes rappellent certains lieux communs du management

    traditionnel : aspects

    bureaucratiques, ambiguïté,

    incertitudes sur l'efficacité
    réelle...

    DESMAZES J. et
    LAFONTAINE J-P.,
    (2005),

    « L'assimilation des
    budgets
    environnementaux et du
    tableau de bord vert par
    les entreprises »

    La mise en place d'outils de
    gestion peut poser des

    problèmes d'assimilation puisque certains de ces outils sont des innovations managériales. L'objectif est d'étudier l'assimilation de

    deux outils : les budgets

    environnementaux et le
    tableau de bord vert.

    Etant donné que la procédure

    d'évaluation environnementale est, pour le moment, assurée par la fonction environnement en dehors des processus de contrôle de

    gestion, l'assimilation des tableaux de bord verts pose moins e problèmes que celle des budgets environnementaux. En effet, ces derniers sont directement intégrés dans le système comptable traditionnel.

    En prenant une posture de recherche active (immergé dans le sujet), l'auteur participe à la mise en place d'un outil de gestion pour déterminer comment celui ci peut être détourné de ces objectifs initiaux.

    L'étude participative sur le terrain amène a élargir la conception des outils de gestion. Ces derniers sont désormais vus comme des objets « polymorphes », qui intègrent des dimensions très diverses : politique, symbolique, culturelle... L'étude conduit également à s'interroger sur la posture du chercheur vis à vis des autres acteurs et à se demander s'il est préférable d'étudier depuis le terrain ou avec du recul.

    BOIRAL O. (2005),

    « Concilier environneme nt

    et compétitivité, ou la quête de l'éco-
    efficience»

    GUMB B., (2003),

    « De la pertinence des outils de gestion : logique décisionnelle ou logique managériale »

    Aller au delà des réflexions actuelles sur les stratégies environnementales qui se limitent souvent à une approche « win-win » ou « win-loose » du problème.

    Illustrer un aspect dynamique de la pertinence des outils de gestion. Etudier un nouveau concept : le coût temps.

    Les recherches ont déterminé cinq
    aspects déterminant dans

    l'efficience des actions environnementales. L'excellence manufacturière, une stratégie axée sur l'innovation et une prise en compte des attentes des parties prenantes font partie de ces aspects.

    Au travers de trois situations de gestion, l'auteur conclut que dans un contexte purement mécaniste, les outils utilisés ne sont pas pertinents et risquent au contraire d'induire le décideur en erreur. Mais les outils de gestion ont d'autres propriétés, à savoir se faire manipuler par les acteurs et diffuser une culture de gestion.

    LOERINCIK Y., JOLLIET
    O., (2007),

    « ACV et Ecoconception :
    comparaison des filières
    de production
    d `électricité »

    Etudier la mise en place d'une analyse de cycle de vie (ACV) et la manière dont celle ci contribue au management

    environnemental à travers un exemple précis : les filières de production d'électricité.

    Ce document est très analytique et technique, mais son intérêt majeur pour ce mémoire de recherche est une définition claire et précise de l'ACV ainsi que de ses différentes caractéristiques.

    DREVETON B., (2005),

    Démontrer que l'intégration
    des outils de monétisation de

    Apres avoir présenté les

    différentes techniques de

    « L'outil de gestion des

    l'impact environnemental

    monétisation de l'impact

    activités

    n'est pas simplement un

    environnemental, l'auteur se

    environnementales : Une

    enjeu technique mais

    penche sur des cas concrets. Il

    technique comptable ?Le

    également un enjeu d'ordre

    déduit que le but des outils n'est

    cas des collectivités

    stratégique et

    pas la généralisation, puisqu'ils

    locales »

    organisationnel.

    sont conçus pour s'adapter aux caractéristiques de chaque organisation. Quand à la fonction des outils, l'auteur montre que

    dans plusieurs cas, il s'agit
    véritablement d'outils de pilotage.

    BARET P., DREVETON

    Présenter les méthodes de

    Les auteurs démontrent la

    B., (2006),

    monétisation de l'impact

    environnemental, ainsi que

    complémentarité des méthodes

    économiques d'évaluation des

    « l'évaluation des

    les solutions mises au point

    externalités parallèlement aux

    impacts environnementaux, une

    par les gestionnaires

    concernant la prise en

    méthodes comptables. Cependant,
    une évaluation monétaire d

    grille de lecture »

    compte de la responsabilité

    l'impact environnemental est

     

    sociale et environnementale.

    souvent limitée car approximative

     

    Appliquer la théorie au cas

    et doit s'accompagner

     

    des problématiques

    d'argumentation de la part du

     

    environnementales

    manager pour conduire à une

     

    rencontrées par le ministère de la défense.

    décision stratégique.

    Dictionnaire des concepts

    Impact

    « Toute modification de l'environnement, négative ou

    environnemental

    bénéfique, résultant totalement ou partiellement des activités, produits ou services d'un organisme » (ISO 14001). Cette définition est large mais englobe de multiples notions comme la pollution, le réchauffement climatique, les incidences sur les espèces animales ou encore les nuisances sonores.

     

    Strategie

    Les stratégies environnementales sont « les réponses données

    environnementale

    et les actions mises en place par les organisations afin de faire
    face aux enjeux et aux contraintes écologiques »
    (Essid, 2007).

     
     

    Roome (1992) et Hart (1995) classent les entreprises selon leurs implications dans la stratégie environnementale au niveau de la conformité à la réglementation (Roome, 1992) et de l'engagement de ressources (Hart, 1995). Une entreprise qui se démarque par une stratégie en avance sur le marché concernant les deux axes adopte une « stratégie proactive »

     

    (Essid, 2007).

    Outil de gestion

    Un outil de gestion est un « dispositif formalisé qui permet l'action organisée » (David, 1997).

     
     

    Pour Moisdon (1997), il s'agit d'un ensemble de

     

    « raisonnements et de connaissances reliant de façon formelle un certain nombre de variables issues de l'organisation, qu'il s'agisse de quantités, de prix, de niveaux de qualité ou de tout autre paramètre, et destiné à instruire les divers actes classiques de la gestion, que l'on peut regrouper dans les termes de la trilogie classique : prévoir, décider, contrôler ».

     

    Un outil de gestion peut prendre de nombreuses formes mais a obligatoirement trois attributs qui sont sa forme, sa substance et sa finalité (J Justin, 2005). L' « outil de contrôle » est un objet potentiellement alimenté, dans le temps et dans l'espace, par des flux d'information. Il est possible d'en établir une typologie en les classant selon leur finalité : les outils de pilotage, les outils de suivi et les outils de diagnostic.

    Outil de pilotage

    Les « outils de pilotage » servent à « assurer la cohérence entre la stratégie opérationnelle » (Mevellec, 1992). Ils permettent d'avoir une vision de l'organisation axée sur l'avenir ( Etienne, Wicker, 2005). Composés d'indicateurs et de variables servant de « leviers » d'action, ils permettent à leur utilisateur d'orienter les décisions managériales dans le but d'atteindre les objectifs visés (Lorino, 1997).

     

    Outil de suivi

    Ayant pour but une surveillance à posteriori de l'activité de l'organisation (Justin, 2005), les outils de suivi renvoient à la notion de contrôle hiérarchique (Ouchi, 1978) et servent de courroie de transmission entre les différents niveaux de l'organisation.

     

    Outil de

    Les « outils de diagnostic » permettent de « disposer d'une image de la trajectoire de l'entreprise » (Bouquin, 1993). Ils servent à déterminer la cohérence de la trajectoire avec la stratégie en prenant généralement un point de vue externe.

    diagnostic

     

    Dictionnaire des théories

    Théorie de la

    « L'entreprise est un acteur majeur de la société et son

    Responsabilité

     

    management dépend des valeurs acceptables par son

    environnementale

     

    environnement social. Les pressions exercées par les

    des entreprises

     

    actionnaires, les salariés, les consommateurs, certaines

    (M. CAPRON, F. QUAIREL-

     

    ONG et le cadre réglementaire influencent de plus en plus
    les dirigeants »
    . La responsabilité sociale et

    LANOIZELÉE, 2006

    ;

    environnementale (RSE) découle de ces pressions externes

    Bollecker, 2004

    ;

    et constitue pour l'entreprise à la fois une contrainte et un

    Boiral O., 2004)

     

    enjeu majeurs. Pour répondre à cette problématique,

    certaines entreprises mettent en place des stratégies
    environnementales.

    Théorie des outils de

    Trois éléments caractérisent les outils de gestion et

    gestion : typologie

    permettent de les définir dans un ensemble commun malgré

    selon leur finalité

    les différences qu'ils présentent : leur forme, leur substance

    (Bouquin, 1993

    ;

    et leur finalité. Il est possible de classer les outils de gestion

    Justin, 2005

    ;

    selon leurs finalités en trois catégories : les outils de

    Mevellec, 1992

    ;

    pilotage, es outils e suivi et les outils de diagnostic. Ces trois

    Ouchi, 1978)

     

    formes d'outils sont définis avec précision dans le

    dictionnaire des concepts.

    Guide d'entretien

    Interlocuteur :

    Date de l'entretien :

    Objectif de l'entretien : récolter de l'information sur l'utilisation d'outils de gestion dans le cadre de la mesure de l'impact environnemental des activités de l'entreprise. Déterminer quels aspects de l'impact environnemental sont pris en compte.

    Hypothèses
    à vérifier

    Questions

     

    1) La question environnementale fait elle partie des préoccupations de votre entreprise ?

     

    2) Votre entreprise évalue-t elle certains de ses impacts
    environnementaux ? si oui, lesquels ?

    H 1.1

    3) Quels sont les outils qui vous permettent d'évaluer ces impacts?

     

    4) Utilisez vous les outils suivants ?

    H 1.1

    - Ecobilan

     

    - Tableau de bord vert/ indicateurs environnementaux

    H 2.1

    - Evaluation des coûts environnementaux externes

     

    - Budgets environnementaux

    H 2.2

    - Comptes verts

     

    - Autres (lesquels) ?

    H 2.1

    5) A l'aide de quelles données alimentez vous ces outils ? Quelles

    H 2.2

    sont les données sortantes ?

     

    6) Ces données sont elles :

    H 2.1

    - Physiques ?

    H 2.2

    - Qualitatives ?

     

    - Financières ?

     

    7) Pour les utilisateurs, la finalité de ses outils de gestion est plutôt :

     

    H 1.1

    - De guider la gestion de l'entreprise au quotidien ?

     

    - De surveiller de manière indirecte les performances des unités opérationnelles ?

    - D'établir à intervalles réguliers un diagnostic global des performances de la société ?

    - Une autre finalité (laquelle) ?

    Matrices d'analyse des entretiens

    Hypothèse de recherche 1.1: Les outils de gestion environnementaux sont des outils de pilotage.

    Concepts clés

    Résultats

    Eléments de preuve

    Tableau de bord

    vert

    Les entreprises mettent peu a peu en place des tableaux de suivi d'indicateurs liés à l'environnement que l'on peut qualifier de "tableaux de bord verts"

    "On est en train de créer une série

    d'indicateurs qui [...] pourraient servir de
    tableaux de bord" (Interlocuteur 2)

    "Par contre, le tableau de bord, nous avons des retours réguliers, des retours même après avoir pris une décision" (Interlocuteur 1)

    "Donc, la première chose à faire, c'est de

    mettre en place des objectifs d'économie, et de
    mesurer l'achèvement des démarches

    d'économie [...] Je pourrai vous sortir un tableau d'indicateurs dans lequel j'ai aussi mes objectifs et chaque année, je regarde ou j'en suis" (interlocuteur 4)

    "On a commencé il y a 4 ans à définir les
    indicateurs pour les tableaux de suivi [...] On a
    défini trois indicateurs principaux, le premier

    étant le taux de matériaux recyclés"
    (interlocuteur 6)

    Outils de pilotage

    Des tableaux de bord rendant compte des aspects environnementaux servent à prendre des décisions de gestion.

    "Nous allons effectuer une formation à l'éco conduite pour nos chauffeurs, c'est une décision de gestion" (interlocuteur 1)

    "Oui, on prend des décisions, pareil lorsque je
    vous parlais du remplacement des

    équipements, de certains équipements"
    (interlocuteur 1)

    "Clairement, l'activité au quotidien, ça va avoir un impact puisque c'est une volonté du groupe de suivre l'environnement, donc je pense que ca va faire partie de notre mission de plus en plus" (interlocuteur 2)

    "On n'en est pas encore à se dire "j'appuie sur le bouton et il y a tout qui remonte", mais on est en train d'y arriver" (interlocuteur 6)

    Outils de pilotage

    Les tableaux de bord ne

    jouent pas encore le rôle
    d'outils de pilotage

    "Au niveau du pilotage, clairement, tout est à construire" (interlocuteur 5)

    "Je ne pense pas qu'on va piloter

    l'environnement immédiatement, il est clair que

     
     

    suite aux recommandation, on sera amené à en utiliser quelques unes, mais c'est pas du pilotage au quotidien" (interlocuteur 2)

    Diagnostic

    Un diagnostic

    environnemental de

    l'entreprise est nécessaire avant de mettre au point un système de pilotage

    "D'abord je mets en place le diagnostic, je collecte et je quantifie et ensuite je mesure et je pilote" (interlocuteur 5)

    Principaux facteurs qui poussent les entreprises à évaluer leurs performances environnementales

    Facteurs explicatifs

    Concepts clés

    Spécificité des tableaux de bord environnementaux

    Facteurs économiques

    Intérêt financier

    Les objectifs en terme d'environnement sont parfois en accord avec les objectifs en termes financiers, d'ou un plus grand intérêt dans leur atteinte.

    - Interlocuteur 4: "Oui, en fait ça rejoint l'objectif

    d'économie financière évidement puisque le coût de l'énergie a inévitablement augmenté."

    Facteurs règlementaires

    Conformité aux

    lois

    Des règlementations plus sévères en termes de

    reporting environnemental obligent à suivre les
    indicateurs environnementaux.

    - Interlocuteur 2: "On a un objectif au niveau du groupe [...] côté à la bourse de Londres, d'être plus "verts" avec des réductions dans l'atmosphère de 5% par an et 8% pour les déchets"

    - Interlocuteur 4: "Depuis 2001, la loi sur les nouvelles règlementations économiques oblige les entreprises à faire un reporting sur leurs performances environnementales. [...] donc ça définit tout un tas de domaines dans lesquels on va forcément mettre en place une mesure, et des objectifs de réduction"

    - Interlocuteur 5: "L'outil principal, c'est la

    règlementation"

    Facteurs sociologiques

    Image

    Les parties prenantes accordent de plus en plus

    d'importance aux performances environnementales des entreprises, d'ou la nécessité pour celles ci de communiquer à propos de leurs efforts.

    - Interlocuteur 1: " Après, l'écobilan, c'est aussi, et

    surtout d'ailleurs, un argument commercial"

    - Interlocuteur 4: " L'enjeu numéro un, j'en viens à mes
    histoires de contenu, c'est la protection du public, en

     
     

    termes éthique et déontologique. Le deuxième, et la on revient tout de suite sur notre sujet, c'est le rôle de sensibilisateur que nous avons vis à vis de l'opinion sur les grands problèmes, les grands enjeux notamment vis à vis du changement climatique"

     
     

    - Interlocuteur 3: "En tant que fabriquant de produits jetables, il est important de préciser que nos produits sont légers pour l'environnement"

    Volonté d'anticipation

    Objectifs

    Au delà de ce qu'imposent les règlementations, les entreprises tentent d'anticiper les changements à venir.

     
     

    - Interlocuteur 4: "Alors, il y a les obligations de la loi

     
     

    NRE qui concernent les entreprises cotées, mais

    maintenant généralement, les entreprises vont au delà"

     
     

    - Interlocuteur 5: "Notre parti pris a été d'anticiper. Déjà
    aujourd'hui on est 1 0%de mieux que la règlementation.

     
     

    [...] On prend une longueur d'avance pour anticiper, pour être plus compétitifs."

     
     

    - Interlocuteur 2: "Donc nous, en fait, la mission

    consiste à voir quel est le chemin qu'il nous reste à parcourir pour atteindre le "Zéro émissions""

    Hypothèse de recherche 2.1: L'impact environnemental est mesuré par des données physiques.

    Concepts clés

    Résultats

    Eléments de preuve

    Données

    Pour mesurer un impact

    "Nous procédons à une catégorisation, un tri et

    physiques

    environnemental, des unités

    une valorisation des déchets. Donc il s'agit de

     

    physiques telles que les

    comptabiliser les poids enlevés par catégorie"

     

    quantités de matière ou

    d'énergie utilisées

    (interlocuteur 1)

     
     

    "On a les nombres d'unités pour tout ce qui est ordinateurs, appareils électriques. On a les quantités: litres d'essence, kilos de gaz, kilos de déchets, l'énergie en kilowattheures, les grammes de CO2 émis" (interlocuteur 1)

     
     

    [Donc ce que vous faites à l'heure actuelle, c'est
    plus une étude de tous les impacts par des
    données physiques?] "Exactement, oui"

     
     

    (interlocuteur 2)

     
     

    "J'ai des données physiques en amont, j'ai des consommations d'eau, des consommations de matériaux, j'ai des litres, j'ai des tonnes de papier, des litres de carburant..." ( interlocuteur

     
     

    5)

     

    Ces informations peuvent

    "Donc la, le bilan carbone, c'est quelque chose

     

    être complétées par des

    données financières

    qui se base sur des remontées de toute nature,
    des flux financiers, des consommations..."

     
     

    (Interlocuteur 4)

     
     

    "Les données c'est quoi? C'est du chiffre

    d'affaires, ca peut être un volume de
    matériaux..."

     
     

    (interlocuteur 6)

    Hypothèse de recherche 2.2: L'impact environnemental est traduit en unités financières.

    Concepts clés

    Résultats

    Eléments de preuve

    Données

    Les données financières ne

    [Est ce que vous faites une évaluation des coûts

    Financières

    permettent pas, à ce jour

    environnementaux externes en termes

     

    d'exprimer un impact

    financiers?] "Aujourd'hui, non, on n'a pas

     

    environnemental

    d'évaluation des coûts environnementaux"

     
     

    (interlocuteur 2)

     
     

    "On a des budgets mais on n'a pas de budgets définis comme environnementaux"

     
     

    (interlocuteur 1

     
     

    [Est ce que ce sont les flux physiques qui

    priment?] "Oui; toujours. Enfin, d'après la
    méthode d'aujourd'hui"

     
     

    (interlocuteur 4)

    Résumé de problématique en français :

    L'émergence des problématiques environnementales pousse de plus en plus les entreprises à mettre en place des outils de gestion ayant pour but d'évaluer l'impact environnemental de leurs activités. Cette démarche place le contrôleur de gestion devant une nouvelle problématique aussi bien sur le plan technique que sur le plan managérial. La problématique de notre recherche va être la suivante : « Quel est le rôle des outils de gestion dans la l'évaluation de l'impact environnemental ? .

    Dans le cadre de notre recherche, nous nous intéressons a type de données que doivent intégrer les outils de gestion environnementaux afin de pouvoir évaluer l'impact environnemental d'une entreprise. Nous essayerons de démontrer que ces outils doivent intégrer des données financières, physiques et être en mesure de fournir une évaluation financière des impacts environnementaux. Nous tâcherons également de prouver que ces outils ont pour but d'aider les décideurs au pilotage de l'organisation en jouant un rôle dans l'arbitrage et la prise de décision.

    Mots clés : outil de gestion, outil de pilotage, impact environnemental, stratégie environnementale






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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery