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Les exiles de l'Ocean Indien (Iles Chagos)

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par Aline Mandrilly
Université Bordeaux II - Anthropologie de la sante - Licence anthropologie monde africain 2006
  

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3.Refus sans limites :

Le gouvernement de Tony Blair ne l'entend pourtant pas ainsi. Arguant d'une étude exhaustive sur la faisabilité de la réinstallation d'une communauté de quelque huit mille cinq cents «Chagossiens», il s'est employé à faire traîner l'enquête en longueur1(*)3. Ses experts concluent, aujourd'hui, que la population serait exposée «à des événements naturels de nature à rendre leur existence difficile». A plus long terme, le réchauffement de la planète, et ses conséquences sur le niveau des océans, rendra leur vie impossible. En effet, les trois îles principales (Peros Banhos, Salomon et Diego Garcia) sont sans relief, et une augmentation du niveau des océans (provoquée en majeure partie par les pays industrialisés, dont les Etats-Unis et le Royaume-uni font partie) entraînerait inexorablement leur disparition. Par ailleurs, a souligné Bill Rammel, ministre des Affaires Etrangères des Etats-Unis, une étude de viabilité «indépendante» a conclu qu'un repeuplement de certaines îles des Chagos (Peros Banhos et Salomon) serait «précaire et [que] le gouvernement britannique ne pourrait l'accepter.». Pourtant les Chagossiens ont vécu sur ces îles pendant au moins six générations, et personne ne s'était inquiété alors des conséquences climatiques sur leurs îles. De plus, actuellement, des personnes, militaires et civils, passent de beaux jours dans ce qu'ils appèlent « Fantasy Island ». Ils se baignent, font de la voile, de la plongée, des barbecues, sans être inquiétés d' « événements naturels de nature à rendre leur existence difficile ». Comble du comble, il s'avèrerait que la présence de ces civils et militaires aient des conséquences écologiques graves1(*)4 : Sur l'île du Coin, dans l'atoll de Peros Banhos, lors de la visite de mars dernier, les Chagossiens ont surtout été frappés par l'absence inquiétante d'oiseaux dans les airs et de poissons dans les lagons. Mais la sinistre découverte ne s'arrête pas là. De retour sur la côte, ils notent que tous les coraux sont gris pâle. Or, dans le passé, des coraux de toutes sortes, «tête de mort, roses, bleus, mauves», pullulaient dans les lagons. La mer était peuplée de grandes quantités de poissons, tels les cateaux. Mais plus maintenant apparemment.

Le coût, toujours selon Bill Rammell, serait également beaucoup trop élevé, dans le cas d'un possible retour des Chagossiens dans leurs îles. En effet, il faudrait cinq millions de livres pour faire marcher l'île pendant un an. Cinq millions de livres, c'est le prix d'une Ambassade à Londres. C'est aussi le prix de l'Ambassade du Royaume-Uni à l'Ile Maurice, sans compter, la piscine, les jardins, les cours de tennis... Mais Bill Rammell préfère garder cette somme pour les « living poor in the world », c'est-à-dire les personnes qui sont réellement dans le besoin et qui n'ont pas d'autre choix que de recevoir cette aide, qui est, soit dit au passage, « l'argent du contribuable américain ».

Mais l'argent n'est pas le problème. C'est le pouvoir et le rôle de domination du monde que les Etats-Unis se sont eux-mêmes attribués. La location militaire continue de Diego Garcia en est le parfait exemple1(*)5. Cette base a deux fonctions dans la stratégie de défense américaine : compenser la perte stratégique que représente pour Washington la chute du Shah d'Iran, en 1979, grand allié américain dans la région, mais aussi garantir l'accès au pétrole de Moyen Orient. Malgré la Guerre Froide terminée depuis 1989, Diego Garcia a de plus en plus d'importance au sein du système militaire américain. «Une combinaison de raisons» empêcherait donc le retour permanent des exilés, selon Bill Rammell. «Les Orders in Council sont la façon dont nous légiférons pour nos territoires étrangers. Il n'y a aucune chance qu'ils soient renversés.»

A propos des compensations dues aux Chagossiens, Bill Rammell a expliqué que £14 millions (au prix actuel) avaient déjà été versés au gouvernement mauricien dans les années 1970 et que «cette somme était équitable». Quant aux enfants qui n'arrivent pas à obtenir la nationalité britannique, Bill Rammell a promis «de tenter de résoudre les problèmes». En effet, les Chagossiens détiennent, dans leur immense majorité, un passeport britannique des Territoires Dépendants du Royaume-Uni. Pourquoi donner un tel passeport à un groupe restreint? Pourquoi ne pas le donner à tous les Seychellois et Mauriciens? Parce que les Chagossiens, contrairement au groupe plus large, ont vécu sur ces îles depuis plusieurs générations. Les tombes de ces ancêtres peuvent encore être vues sur plusieurs îles. Les responsables britanniques des Chagos, faisant tout pour effacer le souvenir des Chagossiens, ont interdit à des soldats américains qui se proposaient de le faire, de restaurer ces tombes et les derniers bâtiments de cette époque. Il faut que les constructions tombent pour que le mythe du gouvernement britannique tienne debout. Pourquoi cette hargne? Comment le gouvernement britannique pourrait expliquer qu'en violation de presque tous les Droits de l'Homme on expulse de chez eux une population qui résidait là-bas depuis plusieurs générations, procédant ainsi à un nettoyage ethnique? Et quelle excuse trouver pour expulser les descendants des esclaves qui avaient fait, par leur travail, des Chagos un lieu habitable et habité? En cachant au monde entier leur existence tout simplement. Et en reconnaissant l'existence de ces Chagossiens, en toute discrétion, en leur donnant un passeport britannique. En toute discrétion, afin de ne pas écorner le mythe, cela va de soi. Des documents officiels de l'état britannique montre que les fonctionnaires britanniques des Chagos avaient l'obligation de mentir au sujet des Chagossiens1(*)6. Extrait d'une note envoyée en août 1966 par le Bureau Colonial de Londres à la Mission Britannique aux Nations Unies : « L'objectif de cet exercice étaient d'avoir quelques rochers qui resteront notre propriété ; il n'y aura pas de population indigène, à l'exception des mouettes, qui n'ont pas encore de Comité (le Comité de la Condition Féminine ne couvre pas le droit des oiseaux). Malheureusement, aux côtés des oiseaux, il y a quelques Tarzans et Vendredis, aux origines obscures, qui seront probablement expédiés à Maurice »1(*)7.

Alan Vintacassin (BIOT ) a de bonnes raisons de croire que l'exigence américaine prime sur le droit des îlois. L'atoll de Diego Garcia appartient, certes, au Royaume-Uni, mais par un accord secret de 1961 signé entre Harold Mc Millan et John F. Kennedy, il a été désigné comme «un point d'appui stratégique» anglo-américain dans l'Océan Indien contre l'Union Soviétique. Washington offrait d'y établir un centre de communications et de ravitaillement de sa flotte, à la double condition que l'Archipel des Chagos soit exclu du processus de décolonisation mis en oeuvre par Londres et que ses habitants soient évacués «pour raisons de sécurité». En échange, ils offraient une réduction de quatorze millions de dollars sur l'acquisition de fusées Polaris par le Royaume-Uni pour l'équipement de ses sous-marins nucléaires.

En attendant qu'ils obtiennent réparation, il convient de méditer les oraisons de Tony Blair en faveur des droits de l'homme... Malgré de tels obstacles, les Chagossiens obtiennent parfois de maigres faveurs grâce au statut de peuple autochtone accordé par les Nations Unies.

* 13 Feasibility Study for the resettlement of the Chagos Archipelago, Volumes I, II and III

* 14 http://www.chagosconservationtrust.org/

* 15 http://www.geocities.com/ka9hhu/Diego_Garcia.html

* 16 http://www.johnpilger.com/

* 17 Patel Shenaz, « Le Silence des Chagos », Editions de l'Olivier/Le Seuil, 2005

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