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L'estime de soi dans la philosophie de Kant

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par Thomas Giraud
Université Paris I Panthéon-Sorbonne - Master 2 Recherche 2010
  

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2.3. Le rôle de l'estime de soi esthétique dans la vie morale selon les derniers écrits.

Nous voudrions explorer dans cette section 2.3 la dernière conception kantienne de la dimension subjective de la moralité. Nous avons vu que l'estime de soi pouvait être interprétée, à la lecture de la Critique de la raison pratique, non pas comme distincte, mais comme concomitante avec le respect, à la manière d'un moment ou d'un aspect introspectif du même sentiment moral, dont le respect pour la loi serait l'aspect « extraspectif ». Et, de ce point de vue, on peut assigner un rôle à l'estime de soi dans la vie morale : le respect (de soi) sert de condition subjective à la moralité en ce sens qu'il fournit son mobile à la moralité. Cette fonction du respect est d'ailleurs réaffirmée dans la Doctrine de la vertu, ouvrage postérieur à la Critique de la raison pratique, signe d'une profonde adhésion de Kant à cette conception du respect : « le mobile moral », ce n'est rien d'autre que « la représentation de la loi », laquelle s'incarne dans un sentiment de respect devant « la dignité de la pure loi rationnelle », nous dit Kant dans l'introduction de la Doctrine de la vertu149.

Mais, comme nous l'avons vu à l'occasion de la question de savoir si l'estime de soi était un devoir ou non, l'estime de soi fait dans la Métaphysique des Moeurs l'objet d'une présentation qui est absente des analyses de la Critique de la raison pratique, puisqu'elle apparaît dans la Doctrine de la vertu comme une des « Prénotions esthétiques qualifiant la réceptivité aux concepts du devoir » , au même titre que le sentiment moral, la conscience et l'amour du prochain. Comme telle, elle apparaît certes à nouveau comme une condition subjective de la moralité puisque ces qualités morales sont des « conditions

subjectives de la réceptivité au concept du devoir », des fondements subjectifs de

la vertu. Il y a donc une certaine continuité entre le concept de l'estime de soi qui se manifeste dans l'introduction de la Doctrine de la vertu et celui qui se manifestait dans la philosophie critique. Mais s'agit-il vraiment dans celle-là de reprendre ou de développer ce qui avait déjà été évoqué dans celle-ci, à savoir de présenter à nouveau le respect, et donc l'estime de soi, comme le mobile moral ? La continuité dont nous parlions ne masque-t-elle pas en réalité une rupture ? N'y a-t-il pas des différences notables dans la manière dont Kant caractérise le respect

(de soi) entre les deux ouvrages ? On peut par exemple être surpris de constater la
différence entre l'unicité du respect comme « unique mobile moral »150 dans

l'oeuvre critique, d'une part, et, d'autre part, la pluralité des « prénotions esthétiques qualifiant la réceptivité de l'esprit aux concepts du devoir », comme le dit l'intitulé du paragraphe XII de l'introduction à la Doctrine de la vertu ? On peut aussi être surpris de voir que, tandis que la Doctrine de la vertu semble

distinguer le sentiment moral et le respect en leur consacrant deux paragraphes
distincts dans son introduction151, la Critique les identifiait : « C'est pour cela

même que ce sentiment peut être aussi appelé un sentiment de respect pour la loi

morale, mais, pour les deux raisons ensemble, on peut le désigner sous le nom de
sentiment moral »152. On voit donc que l'enjeu de ce questionnement sur la

manière dont la présentation du rôle de l'estime de soi a évolué dans la philosophie kantienne est de taille : il s'agit de savoir comment sa conception de la motivation morale a évolué entre la période critique et les derniers écrits.

Malgré leur importance, il est difficile de répondre avec certitude à ces questions à la seule lecture des pages de la Doctrine de la vertu où elles sont

150 CrPr, p. 703

151 DV, pp. 681-686

152 CrPr, p. 699

traitées. Le paragraphe de l'introduction qui se consacre aux « Prénotions esthétiques qualifiant la réceptivité de l'esprit aux concepts du devoir en général » est un court paragraphe, où Kant s'efforce moins de préciser sa conception de la part subjective de la moralité, que de montrer que les conditions subjectives qu'il y présente, en tant précisément que subjectives, ne sont pas des devoirs. Le sousparagraphe qui est consacré au respect et à l'estime de soi est encore plus court. On peut sans doute se référer à d'autres passages des écrits tardifs pour essayer de former une idée plus sûre de la dernière conception kantienne de la motivation morale, mais il ne s'agit que de passages épars, qui ne peuvent fournir que des indications. Nous nous contenterons donc ici, dans cet effort pour répondre à nos questions, de formuler des hypothèses et de nouvelles questions.

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