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L'insécurité alimentaire dans la région du Nord au Cameroun: représentations sociales, stratégies de lutte et enjeux

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par Alain Christian ESSIMI BILOA
Université de Yaoundé I - Master en sociologie 2010
  

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V- LES AUTRES STRATÉGIES

MATAPIT Othon a vu juste lorsqu'il pense que : « les populations du Nord sont plus réceptives aux techniques de vilgarisation et aux innovations technologiques que partout ailleurs. »

Ainsi, lorsque les foulbés l'ont introduit dans la région, ces populations n'ont pas hésité à adopter le mil de sécheresse par rapport aux multiples avantages qu'il est susceptible de présenter. Nourriture de base de la population, il joue un rôle important dans leur vie sociale et religieuse. C'est en fonction de lui que sont élaborées les systèmes agricoles. Il est en outre le pivot autour duquel gravitent les rites agraires ; et les greniers à mil constituent l'élément dominant dans les enclos familiaux. Les champs de mil constittuent l'élément dominant des paysages agricoles, même comme il fait face à une cocurrence farouche du coton.

La multiplicité des formes cultivées de mil est un des traits originaux de la céréaliculture. Il y a deux grands types de mil : ceux de saison de pluie et ceux de saison sèche. Les premiers suivent le cycle habituel des cultures pratiquées à cette altitude : semés à l'arrivée des pluies en avril et juin, ils sont récoltés à la fin de la saison pluvieuse ou au début de la saison sèche. Les seconds sont cultivés sur des sols à texture argileuse, appelés « kare » (singulier « karal ») en fufuldé. Ils se présentent parfois en culture de décrue. Semés en pépinières, ils sont repiqués à la fin de la saison des pluies et mûrissent en saison sèche, utilisant pour leur croissance les réserves d'eau retenues dans le sol.

Pour BOUTRAIS,

« Alors que les mils de saison des pluies, auxquels conviennent la majoritédes sols, sont cultivés dans toute la région, la culture des mils de saison sèche est

conditionnée par la présence des kare, c'est-à-dire des vertisols lithomorphes ou hydromorphes ; les premiers, formés sur roches grenues, sont situés sur des interfluves aplanis, les seconds, sur matériaux alluviaux, occupent des dépressions périodiquement inondées par les eaux de pluie ou les déversements de fleuves. Ces deux types de vertisols sont imbriqués avec d'autres sol sur une grande partie de la plaine, mais sont absents dans la région montagneuse y compris des hauts-plateaux encastrés entre zones accidentées.

C'est donc uniquement dans les plaines que les mils de saison sèche peuvent être cultivés»91.

91 Jean BOUTRAIS, op.cit.

Avec leur cycle cultural décalé par rapport aux autres cultures, ces mils présentent en effet l'intérêt de ne réclamer la main d'auvre paysane qu'après la période de grosse activité agricole. Ils permettent ainsi un étalement des travaux, où l'on sait que la concentration des activités pendant les quelques mois de saison pluvieuse est le principal handicap dont souffre l'agriculture à cette latitude.

Les mils de saison sèche sont des sorghos se rattachant à deux grands groupes dénommés en fufuldé « muskuuwari » et « babouri », et comprenant chacun de nombreuses variétés. Il sont repiqués fin septembre et récoltés en février.

La culture du muskuuwari réclame des techniques particulières par rapport au mil de saison pluvieuse et une main-d'auvre importante. L'emploi systématique de manSuvres amène les agriculteurs à s'endetter pour pouvoir repiquer à temps. Ils peuvent emprunter auprès de « courtiers » ou de chefs coutumiers, avec remboursement à la récolte en nature ou en espèces, en revendant les bSufs achetés quelques mois plus tôt. Quand les prix augmentent en période de soudure, ceux qui ont les moyens de stocker (commerçants, fonctionnaires, chefs traditionnels...) écoulent les céréales acquises à bon compte.

. Le terrain est préalablement débarassé totalement de sa végétation. Les plants sont repiqués dans des trous creusés à l'aide de pieux et remplis d'eau : long et pénible travail nécessitant une main d'auvre abondante. Les travaux d'entretien sont par contre assez réduits, les sarclages sont inutiles. Lorsque le grain mûrit, il est fortement exposé aux dégâts causés par les oiseaux ; et des guetteurs chargés de les effrayer se postent parfois dans les champs. Ceux-ci, pour cette raison, sont toujours regroupés, formant de vastes étendues dont le vert contraste en saison sèche avec la brousse avoisinante brûlée par le soleil.

HAMITI TIZI confirme que

« quand on travaille le muskuuwari en saison sèche on fait souvent les champs côte à côte. Comme ça, quand le mil est déjà mûr, on envoie souvent les enfants les surveiller parce que comme les oiseaux aiment ça, il faut toujours les chasser sinon il vont tout manger. Les enfants les chassent avec les cailloux ou bien il font beaucoup de bruits en criant ou en tapant sur les trucs pour que les oiseaux là fuient. Parfois aussi on fait les épouvantails et quand les oiseaux voient ça ils croient qu'il y a quelqu'un et ils passent. Mais dès que ces oiseaux voient que ça ne bouge pas, tant pis ils vont entrer dans le champ et faire les dégâts. »

Le muskuuwari peut être cultivé de longues années de suite sans épuiser le sol. Le plus souvent, il revient chaque année aux mêmes emplacements, mais il peut alterner avec le coton sur certains vertisols lithomorphes assez bien drainés.

Au niveau de l'exploitation, chaque famille cultive simultanément plusieurs parcelles de mil de saison des pluies, réparties entre ses membres, tandis que le muskuuwari se présente sous forme d'un seul grand champ. Le développement du muskuuwari a transformé la physionomie agricole des plaines de la région et a facilité l'essor de la porduction cotonnière ; mais il ne peut plus se poursuivre au même rythme, car l'on approche du terme où toutes les réserves de kare disponibles vont être mises en valeur.

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