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Communication via les médias à  base de réseaux

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par Marie-Josèphe Couturas
Université Paris 1 Sorbonne - DEA Sciences Politiques 2000
  

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1.2. 2 L'idéal d'ouverture ou le refus de la distinction entre vie privée et vie publique :

Comme nous l'avons déjà inscrit un peu plus haut, un certain nombre d'internautes particulièrement militants et croyants paient de leur personne pour montrer les avantages de cet idéal, par exemple en montrant au monde entier via le Réseau leur modeste vie privée.

Le journal Le Monde a consacré sous la plume de Yves Eudes, deux pleines pages à une expérience de ce type conduite dans l'Ohio.

Le reporter décrit ainsi le dispositif : "La grande maison bleue n'est pas un lieu ordinaire (...). Tout ce qui s'y passe peut être vu et entendu par la Terre entière. Erik, l'initiateur du projet Here & Now et ses cinq amis vivent en direct sur Internet vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Neuf caméras fonctionnent en permanence dans le salon et dans la cuisine, la salle de jeux et chacune des chambres à coucher du premier étage. (...) Elles peuvent être déplacées à volonté, pour filmer dans le moindre recoin. Des lampadaires et projecteurs disposés un peu partout fournissent une lumière diffuse, garantissant une image nette, de jour comme de nuit. La prise de son est traitée avec le même soin".

Nous sommes là dans la maison de verre à laquelle chacun peut avoir accès et même y dialoguer en direct, via un canal direct, avec ses occupants. Ces derniers se prêtent au jeu avec célérité. Ainsi Sharon s'arrange-t-elle toujours pour montrer son visage en gros plan lorsqu'elle dormira et elle fait toujours ça quand elle se couche, c'est important, ses visiteurs ont besoin de savoir qui sont ces "acteurs" et il faut que Here & Now soit une émission intime. (...) Elle considère tous les gens qui se connectent comme ses invités, leur parle et prend soin d'eux comme s'ils étaient physiquement parmi eux dans l'émission.

Découvrant encore plus avant qu'il n'est guère possible d'avoir de conversations privées dans un tel contexte, le journaliste demande à Sharon ce qu'elle pense de tout cela : le droit à la vie privée ne serait-il en réalité que le droit à l'opacité ? Here & Now peut nous placer sous la surveillance oppressante de notre entourage, ou au contraire nous aider à nous libérer de nos cachotteries.

La réponse des habitants de la maison de verre est étonnante et nous plonge d'emblée dans un univers de justifications profondes, nous éclairant sur la nature de la croyance en la transparence que permet le réseau. Sharon répond : Je fais partie de ces gens qui peuvent avoir une conversation intime devant n'importe qui. Je n'ai rien à cacher à mes amis, ni à mes parents. Jamais je ne commettrai un acte qui leur ferait honte, avec ou sans caméra." Joe, un autre occupant de la maison, qui a, comme le dit Yves Eudes, "opté pour la transparence", renchérit : "Ma vie est simple, je n'aime pas mentir. (...) Ce qui est sûr, c'est que nous sommes les pionniers d'un mouvement qui va s'étendre. (...) Bientôt, beaucoup de gens vivront comme nous, surtout des jeunes."

La transparence c'est aussi l'ubiquité. En attendant l'interconnexion généralisée, le responsable du projet Erik, imagine dans un premier temps que si une demi-douzaine de maisons équipées comme celles-ci étaient interconnectées (dans le monde entier), nous pourrions créer un espace à la fois réel et virtuel, complètement inédit. (...) Nous nous verrions et nous entendrions en permanence, comme si nous étions dans une seule et même habitation. La vraie promesse de l'Internet, c'est de pouvoir être en plusieurs endroits simultanément, de vivre plusieurs vies en parallèle".

Cette expérience n'est pas unique. Avant qu'elle existe, les internautes se communiquaient déjà des adresses de sites où, avec des moyens techniques ridiculement faibles (les petites caméras qui se branchent sur le Web, ou webcams, et qui permettent d'être vus du monde entier et coûtent à peine quelques centaines de francs), certaines personnes avaient décidé désormais de "vivre en public". On voit bien que l'expression même de "public" est obsolète dans un tel contexte : elle renvoie à une distinction privé / public qui n'a plus cours dans le monde de la transparence.

Ce type d'expérience est en voie de se développer un peu partout dans le monde et peut-être atteindra-t-il même un jour certaines de nos chaînes de télévision publiques, malgré les critiques de tous horizons et le plus souvent négatives concernant la place qui est ainsi représentée de la personne humaine, dans une entreprise dont le propos principal et premier semble bien à tous être l'argent. Ce qui, d'ailleurs, implique que le public soit massivement au rendez-vous... Voici un exemple issu de l'actualité, et qui a ému jusqu'au consortium des évêques de France, puisque après une semaine de diffusion, fait rare, leur porte-parole représentant est intervenu dans les médias pour mettre en garde et poser la question de la considération qui devrait être celle accordée à l'homme et à ses droits en tant que personne, dénonçant notamment le fait que ce genre d'émission n'aide surtout pas les jeunes, qui sont très nombreux dans son auditoire, à "grandir humainement et spirituellement" .

Notons au passage que le positionnement médiatique prend une importance croissante, est désormais une valeur existentielle; c'est une façon d'exister, qui devient même de plus en plus une condition pour exister et se rattache à un droit correspondant.

Presque toujours critiqué et condamné, Loft Story a déjà fait coulé beaucoup d'encre et tous les journaux y sont allés de leurs commentaires. Peut-être son concept est-il très en rapport avec cette notion de Lebenswelt défendue par Habermas. Phénomène médiatique un peu factice suivant certains sociologues, et où, par principe, pour ne pas être en reste face à un évènement télévisuel qui, monté en épingle, finit par passer pour un "phénomène de société", chacun en rajoute un peu...

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