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e 104 à Paris en 2008: Un projet de transversalité artistique et sociale ?

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par Elsa Gobert
Université Paris III - Master 1 2007
  

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ELSA GOBERT

Mémoire de Master 1

Université de Paris III-SORBONNE NOUVELLE

Institut d'études théâtrales

Le 104 à Paris en 2008: un projet de transversalité artistique et sociale ?

Direction : Daniel Urrutiaguer Juin 2008

TABLE DES MATIÈRES :

Table des matières.............................................................2

Introduction.....................................................................4

PREMIERE PARTIE :.......................................................

DES FRICHES AU 104 : UTOPIE DU SQUAT.......................9

1) Le phénomène de reconversion..........................................9

A : Les lieux alternatifs............................................................. 9

a : Reconversion d'un mot ..........................................................9

b : Esthétique de l'insertion.........................................................11

c : Les moyens de l'insertion........................................................14

B : Reconversion artistique........................................................16

a : La nouvelle place du spectateur, une place qui découle du mouvement

des performances...................................................................16

b : Quels nouveaux rapports à l'art ?.................................................................18

c : Le théâtre environnemental......................................................19

2) Vers une friche institutionnelle..........................................21

A : Fonctionnement d'un nouveau lieu culturel parisien..............................21

a : Position théorique de deux hommes de théâtre......................................21

b : Un projet de transversalité effectif ?..............................................................23

B : Un nouveau rêve artistique.....................................................24

a : L'institution.....................................................................24

b : Fabrique d'un besoin............................................................27

c : « La norme engendre le déclin »1(*).................................................28

DEUXIEME PARTIE :......................................................

RELATION ENTRE LE SOCIAL ET LE POLITIQUE : ...........

UN NOUVEAU STATUT POUR L'ART..............................30

1) La question du rapport au spectateur et à la population.............30

A : Étude autour d'un événement de médiation au 104 : La Traversée...............30

a : L'événement...................................................................30

b : Mon expérience de médiatrice au 104.............................................32

c : Le médiateur est-il nécessaire ?...................................................................33

B : la transmission.................................................................35

a : Une nouvelle dramaturgie à inventer..............................................35

b : L'exemple d'un artiste résidant 104 qui exerce un art ouvert à la communication :

Nicolas Simarik....................................................................37

c : Espaces-temps-lieux.............................................................38

2) Transversalité sociale.....................................................39

A : Inscription du 104 dans son milieu.....................................................39

a : Exemple d'un espace public culturel parisien : La Villette...........................40

b : Le 104, espace public ?.............................................................................42

c : Le 104 dans le contexte culturel actuel..............................................43

B : les perversions du système......................................................44

a : Vers un art uniquement contextuel................................................44

b : Passer outre l'obligation de production............................................45

c : Institution = modelage ?...........................................................................46

CONCLUSION....................................................................48

BIBLIOGRAPHIE.................................................................51

ANNEXES..................................................................................55

INTRODUCTION

« Ne penser la création qu'en termes d'événements au sens de performance est incompatible avec la constitution d'un espace public dans lequel on partagerait du temps. »2(*) (Marie-José Mondzain)

L'aventure culturelle tend aujourd'hui vers la rencontre sociale entre plusieurs champs artistiques. Le Ministère des Affaires Culturelles a été créé sous De Gaulle en 1959 par André Malraux avec une volonté de rendre la culture accessible à tous. Il met fin à la gestion des acquisitions par le secrétariat des Beaux Arts, en tutelle de l'éducation nationale. Malraux créé et dirige le ministère de la culture avec une volonté de démocratisation de l'art. Par un décret du 24 juillet 1959, il s'engage à faire accéder un maximum de personnes à la connaissance en assurant « la plus vaste audience à son patrimoine culturel »3(*). Parallèlement, les artistes ont théorisé et mis en pratique, individuellement ou spontanément, l'apport réciproque des divers champs de l'art. Mais il n'existe pas de lieu capable d'accueillir tous les arts en création dans un même espace public et institutionnel.

En 1977, le centre Georges Pompidou, construit par les architectes Piano et Rogers concrétise ce désir d'un espace modulable et ouvert, apte à accueillir plusieurs formes d'art. Ce Centre national d'Art et de Culture, situé au centre de la capitale française, comporte un musée d'art contemporain, le centre de création industrielle, des expositions permanentes et temporaires, une bibliothèque, des salles de vidéo, il accueille également (et de plus en plus) des performeurs. Il pratique des politiques culturelles d'accessibilité à un public large. Cependant ce lieu n'est pas conçu ni aménagé pour accueillir toutes les composantes de la scène artistique, et son image globale demeure celle du musée.

Face à la pénurie des lieux de création, les squats d'artistes se sont multipliés depuis le milieu des années 1980. Ils ont été un phénomène culturel d'investissement spontané des lieux délaissés. En exemple : à Grenoble,  l'expression d'une urgence pour la création et « la transmission de cette urgence d'une génération à une autre, d'un lieu à l'autre », donnent naissance à un archipel de squats artistiques ; à Saint Ouen Mains d'Oeuvres, s'installe dans le bâtiment de l'ancien comité des usines Valéo, que l'entreprise a quitté en 1991. Ces aventures culturelles sont multiples. Depuis, nombre ont été expulsées ou dissoutes. Le collectif d'Art Cloche fut contraint de déménager de l'ancien dépôt de la seconde guerre où les artistes s'étaient établis pour s'installer en 1986 dans un ancien garage désaffecté ; plus récemment, la Générale, chassée de Belleville (Paris 19ème) a éclaté en plusieurs sites.

En mai 2001, Michel Duffour, Secrétaire d'Etat à la Culture, au Patrimoine et à la Décentralisation culturelle constate que « le paysage cultuel français s'est profondément transformé au cours de ces vingt dernières années »4(*). Il demande à Fabrice Lextrait de constituer un rapport qui répertorie les nouveaux lieux artistiques. Ce dernier caractérise alors la nature du phénomène à étudier autour de quatre éléments. Le premier est « le rapport physique à l'espace choisi »5(*) qui définit l'identité du lieu, et ce qu'il représente pour les artistes (maisons, fabriques, friches, usines, bases...). Le deuxième définit plus le projet artistique dans le type d'actions menées. S'agît-il d'un laboratoire artistique ? Est-ce un lieu de fabrique, de création ? Une base de travail ? Le troisième indice tient au contenu du projet et à sa mixité. Il définit la ligne artistique du lieu par rapport à l'art et au public, il montre l'intention globale. Un quatrième indice définit le mode d'organisation de l'expérience. S'agit-il d'un collectif, d'un système, d'une compagnie ? Le rapport est construit avec un parti pris monographique, Fabrice Lextrait se rendant dans le lieu à étudier pour s'entretenir directement avec les artistes. Une quinzaine de sites sont répertoriés, et des « fiches d'expériences » sont réalisées sur dix-sept autres. Il s'agit pour le Ministère de la Culture de pouvoir mieux, à l'aide de ce rapport, repérer ces lieux sans pour autant les enfermer ou les catégoriser dans un nouveau label. Le rapport cherche à déceler les mutations culturelles significatives tant au point de vu de l'art que celui de l'urbain.

De ce rapport ressort un terme qui qualifie ce phénomène : Nouveau Territoires de l'Art (NTA). Aujourd'hui, sans s'essouffler, le mouvement des squats se normalise et l'institution cherche à créer des lieux qui se rapprochent de ces formes.

En octobre 2008, à Paris, un nouveau lieu culturel, entièrement institutionnalisé et financé par la Ville ouvrira ses portes dans le 19ème arrondissement : Le 104, Établissement Artistique de La Ville de Paris. Le 104 est annoncé comme le projet « phare »6(*) de la politique culturelle de la Ville de Paris, initié dès le début de sa mandature par Bertrand Delanoë (2001), maire de Paris appartenant au Parti Socialiste, et Christophe Girard, adjoint au maire chargé de la culture. Le coût total de l'opération est de 102 millions d'euros de budget d'investissement. Avec un budget de fonctionnement de 11 millions d'euros par ans, il est subventionné à 70% (huit millions d'euros par ans) par la Ville, le reste se constitue de recettes propres et de mécénat (3 millions d'euros). Soixante-dix personnes travailleront en permanence sur le lieu. Robert Cantarella et Frédéric Fisbach ont été sélectionnés à l'issue d'un appel à candidatures portant sur le projet culturel et artistique, mais aussi sur le développement économique du site pour diriger le projet et le lieu.

Le 104 émane de la transversalité. La transversalité relève par définition de ce qui est transversal. L'adjectif « transversal » qualifie d'après le dictionnaire Larousse « 1. disposé en travers ; qui coupe en travers. » On parle de ligne transversale ou de vallée transversale. 2 Fig : Qui recoupe plusieurs disciplines ou secteur, pluridisciplinaire. 7(*) » Le nom féminin la transversale signifie  « 1. une ligne horizontale. 2 un itinéraire routier ou voie ferrée qui joint directement deux villes sans passer par le centre du réseau. 3 droite coupant une courbe en deux points.8(*) ».

Plusieurs termes se dégagent de ces définitions et s'apparentent à l'image du « 104 ».

La transversalité c'est tout d'abord une notion artistique nouvelle qui vient des mouvements issus de la performance, de la pluridisciplinarité et du désir communs de certains artistes (comme Antonin Artaud et Taddeus Kantor) de joindre l'art à la vie en créant un art qui se situe dans les zones d'intersections.

Le 104 représente, et c'est l'originalité de son programme, une transversale entre un lieu institutionnalisé et un nouveau territoire de l'art comme défini par Fabrice Lextrait. Il est établi dans un ancien espace industriel, 104 rue d'Aubervilliers (son nom 104, est bien référant à sa situation géographique), qui accueillait précédemment les Pompes Funèbres Municipales, et divers services de la ville de Paris, dans un bâtiment de 48 000 m2 datant de 1874, témoignage de l'architecte Delebarre de Bay. Lieu de la création, de la mixité, de l'ouverture et de la démocratisation culturelle, le 104 est proche de l'image du squat artistique. Mais le 104 est un lieu subventionné à 70% par la Ville, un lieu institutionnel avec quelques espaces purement commerciaux ou pratiques : espaces de location pour entreprises ou défilés de mode, caserne de pompiers. Peut-on parler alors de friche institutionnelle ?

Le 104 c'est en plus une transversalité sociale, existante au sein de ceux qui travailleront dans ce lieu. Le chantier de cet équipement qui fut ouvert au public pour La Traversée (29 et 30 décembre 2007), en moment de préfiguration est un exemple significatif. Les « passeurs » recrutés pour présenter le lieu étaient aussi bien des habitants du 19ème arrondissement, des employés du chantier, des employés des anciennes pompes funèbres mais également des comédiens des Feuillets d'Hypnos monté par Frédérique Fisbach (Avignon 2007).

Cette transversalité se trouvera aussi entre les artistes et le public puisque les créateurs résidents auront comme ligne artistique de montrer  l'art en train de se faire. Le lieu demande des échanges réguliers avec le public, pas seulement une simple ouverture d'atelier mais aussi une dimension dialectique et cognitive entre l'art et le public. Les directeurs désirent une « zone d'échanges à inventer ». Ils veulent aussi créer une mise en contact du public et d'associations, des actions avec des écoles primaires,  conservatoires d'art dramatique, etc.

Avec un projet pluridisciplinaire posé dès la proposition du programme, ce lieu accueillera toutes les pratiques.  Il existera alors une transversalité entre les arts et entre les artistes en résidence d'un mois à un an qui pourront investir les ateliers du 104 à partir de juillet 2008. Après ouverture, le 104 pourra accueillir simultanément seize projets artistiques dans dix-sept ateliers différents. Les acteurs/artistes du lieu obtiennent une bourse de 1500 euros par mois.  Les échanges de voisinage seront confortés et encouragés par le fait que les artistes résidants issus de toutes les disciplines artistiques disposeront de divers lieux de création, de réalisation et de présentation communs mis à disposition par la structure. Lieu de la transversalité artistique, les artistes accepteront-ils cet échange ?

Vient alors une question : Quel public pour le 104 ? Sur le site, des espaces sont prévus dans un souci de transversalité sociale qui rapproche ce lieu de l'espace multifonctionnel : librairie, café presse, restaurants, maison d'édition sur les événements du site, jardin suspendu ouvert au public, maison de la petite enfance avec des jouets dessinés par des artistes et destinées à initier les plus jeunes à l'art, incubateur d'entreprises culturelles, avec bail d'une durée de 3 ans, et des espaces pour les artistes amateurs. Dans cet établissement artistique de la ville de Paris, il y a une volonté de créer une autre forme de transversalité aussi bien entre les artistes et les disciplines qui dialogueront ensemble, qu'entre le public du 19ème arrondissement venu là par hasard, celui de la région parisienne, et celui, national ou international, venu spécialement pour un événement. Cette transversalité artistique et sociale peut-elle être opérante ?

J'ai d'abord commencé par étudier le lieu, 104, Etablissement Artistique de la Ville de Paris, en y allant, en consultant son site Internet, en rencontrant les directeurs et en y travaillant pour l'événement de préfiguration La Traversée, le dernier week-end de décembre 2007.

Puis je me suis intéressé au phénomène des friches, en ayant toujours plusieurs questions à l'esprit : En quoi le 104 est-il un « avatar » du mouvement des friches industrielles? Quels points communs des friches au 104, quelles différences ? Un point majeur qui diffère, même à première vue, est la question de l'institution. Ce qui m'a poussé à m'interroger sur la volonté de La Ville de Paris d'ouvrir un lieu où les artistes de tous les horizons artistiques se croisent échangent, entre eux, et avec le public.

En parallèle, le colloque sur « l'impact de l'avant-garde américaine sur les théâtres européens et la question de la performance » qui avait lieu du 21 au 23 janvier 2008 au Théâtre National de la Colline, a orienté ma réflexion sur les questions de pluridisciplinarité mises en jeu au 104, sur la nouvelle place du spectateur dans un art qui favorise l'échange avec le public. Quelles en sont les conséquences sur le spectateur contemporain qui, dans ce dispositif, tend de plus en plus à devenir un spectateur participatif dans un espace multifonctionnel auquel il n'est pas habitué ?

Enfin, une question est restée toujours présente à mon esprit car la remarque m'est parvenue sous différentes formes lors de mes recherches : ce phénomène d'institutionnalisation de modèle établi à l'origine pour pallier les problèmes de temps et d'espace vécus par les artistes ne risque-t-il pas à terme de figer l'art ? d'en modaliser les processus de production ?

Le 104, lieu de la transversalité, peut-il faire avancer la démocratisation artistique à travers l' institutionnalisation d'un espace pluridisciplinaire orienté vers des rapports interactifs avec la population ? ou existe-t-il des risques de sclérose du mouvement des squats artistiques, par l'institutionnalisation d'un lieu basé sur ce modèle, qui finalement serait relativement coupé de la population locale et artistique ?

* 1 LYOTARD, Jean-François, Rudiments païens : genre dissertatif. Paris. Union générale d'éditions. 1977. 249p. p. 246.

* 2 MONDZAIN, Marie-José, 2. la représentation. Paris : Les éditions de l'Amandier, Rencontre du 8 décembre 2002/Paris. 125p. p.24.

* 3 Décret portant sur l'organisation du ministère de la culture, rédigé par André Malraux en 1959.

* 4 LEXTRAIT, Fabrice, Une nouvelle époque de l'action culturelle : rapport à Michel Dufour secrétariat d'état au patrimoine et à la décentralisation culturelle. Mai 2001. Premier volume. 210 p. p.3.

* 5 Ibid.

* 6 DIXMIER, Victor. Rencontre au 104, Samedi 30 Décembre 2007, Annexe 3.

* 7 Dictionnaire. Le Petit Larousse illustré grand format . Paris : Edition 2008 de Larousse.

article transversalité. p. 1029.

* 8 ibid, article transversal.

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