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Conflits identitaires et unité de l' Etat

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par Sarr Massamba
Université Cheikh Anta Diop de Dakar -  2008
  

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A- La polarisation de la société

Les conflits identitaires entraînent une forte polarisation des sociétés. En effet dans ces conflits, la majorité des acteurs, des positions idéologiques et des configurations sociales tendent à se regrouper au sein de pôles antagonistes et très marqués. La complexité et la diversité des interactions sociales tendent à s'atténuer, au moins dans les discours, au profit d'une séparation de la société en communautés identitaires ou idéologiques opposées. Dans une société où existent plusieurs identités collectives, celles-ci se reconnaissent dans la société à des signes extérieurs qui sont parfois impossibles ou très difficiles à cacher ou à simuler : l'apparence physique, le nom, qui indique l'origine ethnique, le prénom, qui indique la religion etc. Dans le cas du Rwanda comme du Burundi, le sentiment de différence a été le fruit des constructions idéologiques et s'est appuyé sur des paramètres peu rationnels mais fonctionnels : la taille, la grandeur et l'épaisseur des narines, la forme du visage. En Côte d'Ivoire la politique «d'ivoirité» a été particulièrement indexée comme une entreprise identitaire qui aurait contribué à catégoriser les ivoiriens et à envenimer les rapports sociaux.

De plus l'administration de certains pays mentionne même l'identité collective sur les papiers d'identité individuelle : la religion au Liban, l'appartenance aux catégories hutu ou tutsi au Rwanda.Ceci contribue considérablement à la polarisation de ces sociétés.

En situation de guerre, ces signes superficiels de reconnaissance remplissent la même fonction que les uniformes des armés réguliers. Ils permettent de distinguer au premier coup d'oeil sur qui on doit tirer et à qui on peut faire confiance. Cette classification immédiate des gens en groupes identitaires est dans certains pays, une donnée permanente de la vie sociale, même en temps de paix. Mais elle devient une préoccupation plus intense en situation de violence, quand devient vitale la rapidité avec laquelle chacun peut distinguer l'ami de l'ennemi. C'est pourquoi les groupes identitaires ont, dans les guerres civiles une efficacité immédiate que les groupes partisans ou les groupes socio-économiques n'atteignent qu'après beaucoup d'efforts et jamais complètement. Et c'est pourquoi aussi la violence renforce toujours les frontières entre les groupes identitaires. Pour qu'un conflit devienne violent, il faut généralement qu'il soit devenu dominant dans une société. Tant au Rwanda, qu'au Burundi tout est dominé par le problème des relations entre les deux ethnies hutues et tutsies qui s'affrontent et éprouvent depuis toujours des difficultés à cohabiter. L'histoire récente des deux pays, émaillée de heurts violents entre les deux ethnies, de massacres même, a développé entre hutus et tutsis une sorte de sentiment de haine viscérale, culturelle et presque devenue héréditaire. L'autre est ressenti comme l'ennemi naturel et inévitable et la confiance entre les deux groupes est presque impossible à imaginer à court terme. Le problème du Burundi et du Rwanda est en effet appréhendé comme celui d'une lutte séculaire entre deux ethnies antagonistes. Au Libéria, le conflit est noué sur la base d'une opposition féroce entre les congoes (américano-libériens) et les « natives » (autochtones). Cette opposition trouve son origine dans la décision prise par les EUA, au début du XIX è siècle, d'installer dans ce territoire leurs esclaves libérés ainsi que les esclaves capturés sur les navires qui se livraient à la traite .Au soudan , le conflit a divisé la population en deux entités distinctes et antagonistes, possédant chacune ses particularités :le nord du pays ou prédomine la culture arabo-musulmane et le sud dont la majorité de la population a conservé la culture negro-africaine plus ou moins modifiée par le christianisme .Mais quoi qu'il en soit on peut retenir que l'administration coloniale à travers la manipulation anthropologique a largement contribué a la polarisation des sociétés africaines .En effet après avoir assimilées les sociétés africaines à des tribus, l'administration coloniale en a tiré toutes les conséquences pour opérer une hiérarchisation de la société africaine de la manière la plus fantaisiste .Cette classification est le fait de l'ethnologie coloniale dont les précurseurs sont justement les missionnaires .Dans une sa tentative de cerner la réalité africaine, l'ethnologie a particulièrement mis l'accent sur les secteurs sensibles stratégiques de l'époque c'est-à-dire les groupes ethniques .La démarche se faisait en deux étapes :

- La première étape consistait à disséquer autant que possible les groupes humains côtoyés au nom de cette règle de la différence propre à la discipline, et qui doit selon les pères fondateurs de l'ethnologie coloniale régir impérativement les africains.

- La seconde étape de la démarche consistait à prendre parti, à marquer ses préférences pour certains groupes ethniques et son aversion pour d'autres.

Cet exercice a, à n'en pas douter, donné lieu aux jugements les plus fantaisistes qui ne reposent sur aucun élément objectif sinon sur l'imagination fertile de ses acteurs.

Incontestablement, le but visé était d'opposer les groupes ethniques, de faire croire aux uns qu'ils sont meilleurs que les autres, pour pouvoir ensuite mieux les exploiter. La carte de la division a été jouée à fond et presque partout en Afrique. Ce matraquage idéologique a fini par porter ses fruits car les populations ont intériorisé le mythe et ont tendance à se regarder en véritable chien de faïence. Les antagonismes ancestraux entre les groupes ethniques autour desquels ont fait beaucoup de bruit et qui, pour certains servent à expliquer les tensions et dissensions actuelles entre groupes identitaires, trouveraient à notre sens leur origine dans cet exercice périlleux auquel l'ethnologie coloniale n'a cessé de se livrer. Au-delà de la polarisation des sociétés, les conflits identitaires entraînent souvent des luttes sanglantes entre communautés étatiques.

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