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Le féminisme islamique: l'islam "au féminin"-dessous sociologiques et historiques d'un mouvement féministe pour une nouvelle lecture du Coran.

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par Nejwa El Kettab
Université de Picardie Jules Verne - Master 1 recherche sociologie 2012
  

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Analyse des critiques et des discours sur la religion, les femmes et les droits :

« Aux yeux des féministes européennes très eurocentrées et qui se sentent porteuses de valeurs universelles , le féminisme est par essence laïque et donc fondamentalement incompatible avec l'islam »19.

Ceci nous amène à réfléchir sur cette trinité « religion, femmes et droits » , le phénomène de la laicité a accentuer l'idée selon laquelle spiritualité et égalité sont incompatible et en particulier concernant l'Islam. Le droit des femmes a toujours été confronté à des critiques virulentes, que l'on se situe d'un point de vue politique ou religieux les controverses sont la source de la perpétuation de la domination masculine. S'agissant du féminisme religieux ces critiques peuvent donc être considérés comme un prétexte de plus visant a freiner l'émancipation féminine.

19 Laure Rodriguez Quiroga, présidente de l'Union des femmes musulmanes d'Espagne

En effet, si on se penche sur la situation des discours féministes de manière général, on constate qu'ils font tous à des remises en causes profondes, des remises en question internes et externes. C'est une mobilisation complexe et qui englobe des diversités culturelles et historiques faisant de chaque revendication l'objet d'un débat ou d'une controverses remettant en question la crédibilité de cette contestation.

Féminisme laïque et féminisme islamique : deux courants différents mais une même motivation et
faisant face à des critiques similaires.

L'ouvrage de Joan W. Scott20 questionne le mouvement féministe laïque en France en retraçant l'Histoire de celui ci pour en desceller les failles et les raisons pour lesquelles il fait l'objet de certaines critiques. L'intérêt de cet ouvrage est que l'auteure aborde le sujet du féminisme en déconstruisant son discours tout au long de l'Histoire, c'est une réflexion critique qui peut être considérée plus au service de ce mouvement qu'à son encontre. Il serait intéressant d'exposer la réflexion principale de notre auteure sur le féminisme laïque.

« Comment, sans mettre en avant le problème de la différence des sexes, lutter contre la discrimination quand celle-ci attribue, en fonction de leur sexe, des caractéristiques de groupe biologiquement féminin? »

C'est dans cet état d'esprit que Joan W.Scott questionne les mouvements féministes dans leur discours dès la Révolution, des discours qui se sont multipliés et qui ne cessent de faire l'objet de débats et de controverses jusqu'à nos jours.

Cette historienne américaine, est connue en France pour ses travaux d'histoire ouvrière française et pour la réflexion qu'elle a développée depuis les années 1980 sur l'écriture de l'histoire des femmes et du genre. S'inspirant d'auteurs français (tels que Foucault, Derrida, ou Lacan), elle mène une approche dé-constructive et élabore un champ d'analyse en perpétuel relation avec le contexte et les multiples significations des discours des catégories étudiées.

C'est à la lumière de cette technique analytique que l'auteure nous offre une lecture nouvelle de l'Histoire du féminisme.

20 Joan W. Scott, La citoyenne paradoxale : les féministes françaises et les droits de l'homme, Paris, Albin Michel, 1998

Elle commence dans un chapitre introductif par nous présenter des personnages féminins clés de la Révolution française de 1789. Des personnages ayant marqués l'Histoire du féminisme en France par leur position forte dans la lutte féministe et leur discours républicain. Il s'agit entre autre de la révolutionnaire Olympe de Gouges, guillotinée en 1793 ; la saint-simonienne Jeanne Deroin (1805- 1894), qui se présente aux élections législatives de la Seconde République et s'exile en Angleterre après avoir connu la prison ; Hubertine Auclert (1848-1914), suffragette française accusée d'hystérie et comparée à la Méduse ; Madeleine Pelletier, première femme médecin des asiles, féministe radicale qui finit sa vie à l'hôpital psychiatrique.

Toutes ces figures témoignent, de part leur parcours et leurs idées, de la lutte idéologique et théorique qui s'est développée dès la fin du 18ème siècle. L'auteure nous expose le parcours et le discours de ces femmes pour nous révéler les paradoxes qui sous tendent leurs revendications.

Elle commence par nous expliquer que la différence biologique entre hommes et femmes a longtemps justifié la marginalisation des femmes de la scène politique et publique. C'est cette différenciation sexuelle que l'on retrouve dans les discours féministes, d'où nous dit l'auteure le paradoxe centrale de ces revendications.

L'auteur cite Jeanne Deroin, ( Jeanne Deroin et la révolution de 1848 ):« Le fait que les femmes soient aussi des ouvrières , et que les décrets promettant le droit au travail les reconnaissant comme telles, créait un problème. Car si le travail conférait l'individualité et si les femmes travaillaient, comment pouvait-on leur refuser la citoyenneté? » . Ici l'auteure nous montre que les valeurs républicaines se sont retrouvées confrontés à leurs propres contradictions. Les valeurs prônées par la République ne sont pas respectées.

De plus l'auteure nous rappelle que ces mouvements ont longtemps justifié leur droit à la citoyenneté par leur devoir social accompli (celui de « mère », « épouse »,...). Elles sont inconsciemment (ou non) soumises à ce schéma traditionnel: page 103: « Elles fondèrent alors leur revendications de la citoyenneté sur cette figure exemplaire du devoir et du dévouement *...+ : la mère ».

On voit bien ici le lien qui se tisse entre le statut politique des femmes et leur rôle social attendu. Ce qui renforce cette conception de l'importance de ce rôle social lié à la maternité, l'auteure nous rappelle que c'est une fonction sacrée constituant un travail social de grande valeur et la référence à la vierge Marie reflète parfaitement la capacité féminine à produire en toute autonomie, sans l'intervention de l'homme. Cette référence religieuse a été longuement utilisée par quelques groupes féministes, c'est une instrumentalisation du religieux pour justifier leurs revendications. C'est une manière, bien que discutable, de révéler l'autonomie des femmes. La maternité devient un support à la singularité de leur identité.

L'auteure continue son analyse du discours de Jeanne Deroin: en effet, celle-ci dénonce l'attribution du nom du père à la famille, elle propose comme Olympe de Gouge de donner le nom de la mère. Ainsi la question de la maternité revient. L'auteure nous expose la position du philosophe et économiste anarchiste Pierre Joseph Proudhon qui s'oppose à ces vagues de contestations féministes en émettant l'idée selon laquelle l'égalité politique des sexes constitue « un de ces sophismes que repousse non seulement la logique mais encore la conscience humaine et la nature des choses ». Ce discours d'une misogynie classique et répandue en cette période de naissance de la république illustre ceux contre quoi ces femmes (Olympes de Gouges, Jeanne Deroin, ...) luttent au travers d'un discours tentant de démontrer les qualités propres aux femmes faisant d'elles des individus en mesure d'être des citoyennes à part entière. Cependant la pensée de Jeanne Deroin met en évidence la difficulté de formuler l'égalité des femmes dans les termes de leurs différences. On revient à l'idée centrale de l'auteure: comment penser l'égalité donc la revendiquer en termes de différences : différences de genres, de rôles, de statut,...On voit bien ici que J.W Scott décrit la sérieuse difficulté à laquelle ont toujours été confrontés les mouvements féministes : c'est ce paradoxe dans leurs discours qui alimente les critiques des mouvements qui s'y oppose. D'où une autre critique formulée par Proudhon : « L'homme, à mesure que sa raison se développe, peut voir la femme comme son égale, mais il ne la considérera jamais comme semblable à lui ».

Si on revient sur le concept de la maternité selon Jeanne Deroin, celle-ci oublie la part de l'homme dans la conception de l'enfant, elle revendique une autonomie féminine dans la production des enfants qui est en réalité est inexistante puisque l'apport de l'homme est indispensable à cela.

Ce sont ces arguments suscitant une controverse quasi-automatique qui décrédibilisent ses propos. Les critiques faites par l'auteure et que l'on peut faire nous même des idées de Jeanne Deroin continues s'agissant de sa conception de la femme en politique : « En politique, l'opinion des femmes quelque soient leurs tendances républicaines ou aristocratiques peut encore se résumer en une pensée d'amour et paix »; alors que les hommes sont: « [...] égoïstes, cruels, et faisaient preuve d'un penchant pour la destruction... ». On voit ici que le discours de Jeanne Deroin n'est pas fondé sur une approche rationnelle ou scientifique lui permettant d'avancer de telles affirmations. Attribuer des traits spécifiques à un sexe et à un autre va à l'encontre du principe d'égalité revendiqué par le féminisme. Ce sont là des contradictions qui vont à l'encontre de l'intérêt des mouvements féministes.

En retraçant l'histoire du féminisme français et en analysant les positions de ces figures féministes françaises, J .W Scott nous amène à réfléchir sur la réelle fonction des mouvements féministes et ce qui découle de leurs discours. Cette étude critique de l'auteure nous amène a se demander s'il faut revendiquer l'égalité au nom de l'individu (abstrait) ou faire une différenciation sexuelle dans l'expression politique?

Rappelons que à la différence du féminisme laïque, le féminisme musulman revendique l'égalité mais en affirmant une différence de droits et de devoirs, une différence qui doit tendre à l'équilibre et à la justice. Ainsi, ce courant ne fait pas face à un paradoxe dans son discours dans la mesure où il prend en compte une différence de genre mais revendique une égalité entre les deux sexes. Ceci dit; ceci ne protège pas le féminisme musulman de critiques virulentes mais qui eux sont d'ordres idéologiques, politiques et religieux rendant ce mouvement soumis à une pression encore plus forte de la part de l'opinion publique.

L'étude de J.W Scott on constate comme son titre l'indique que la difficulté majeur à laquelle est confronté ce mouvement c'est le paradoxe et les contradictions que le féminisme à longuement connu. Ainsi, l'intérêt serait ici de voir la manière dont est perçu un tel courant de pensée qui s'étend sur à peu près tous les continents. Perçu néanmoins de manières différentes selon les sociétés, ce courant revendicatif reste confronté à des critiques souvent violentes même dans le contexte politique actuel où les valeurs républicaines y sont souvent prônées.

Il est évident que l'opinion politique aujourd'hui est souvent assez violente vis-à-vis du féminisme. Un mouvement ayant pris une connotation quelque peu péjorative, souvent sujet de moqueries ou de critiques le décrédibilisant. Les féministes sont souvent étiquetées ou catégorisées.

Pourquoi un mouvement pourtant issu de l'aboutissement de nombreuses luttes pour une véritable démocratie et en faveur des droits de l'homme a connu tout au long de son histoire des difficultés et des obstacles pour asseoir sa place sans être sans cesse perçu comme étant « déplacé »?

Ceci dit le point commun de ces deux types de mouvements féministes peut se résumer ainsi : tout comme le féminisme français, le féminisme islamique se retrouve face à des critiques remettant en cause le fondement même de ces revendications. Pour certains intégristes et réactionnaires musulmans, l'Islam (l'Islam patriarcal tel qu'ils l'interprètent) en lui même devient un outil qui décrédibilise et fausse les théories féministes islamiques même si ces femmes s'appuient sur des interprétations religieuses pour défendre leurs droits.

Tout comme les femmes en France ont utilisé les valeurs républicaines pour revendiquer leur droit à la citoyenneté, les féministes musulmanes utilisent les écrits religieux (et s'inspirent de la vie du prophète) pour avancer l'idée selon laquelle c'est une religion qui offre autant de droits à l'homme qu'à la femme.

Ces deux courants s'appuient sur un discours qui dans les faits les opprime mais qu'elles remettent en cause pour mettre en valeur une interprétation à leur avantage.

On comprend alors que ces deux aires culturelles21 ayant chacun une Histoire, une idéologie dominante et un système social diffèrent présentes des similitudes dans leur manière de traiter le féminisme: deux mondes renfermant des inégalités certes différentes mais qui entretiennent une relation souvent conflictuelle avec le féminisme.

Cette analyse nous permet d'avoir un autre regard sur la manière dont se construit un discours revendicatif afin de comprendre les maux et les difficultés de celui-ci à s'affirmer dans la réalité des mouvements sociaux. Ceci nous permet d'avoir une méthode analytique sociologique pour la compréhension et l'explication de la place qu'occupe un mouvement social: selon un cadre théorique, un contexte historique, politique et social, le discours d'un mouvement revendicatif quel qu'il soit ne peut être détaché des critiques auxquelles il fait face afin de comprendre son statut et sa place dans la société.

21 l'Occident et les sociétés arabes et/ou musulmanes

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault