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La lutte contre le terrorisme en droit international

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par JEAN-PAUL SIKELI
Université d'Abidjan-Cocody - DEA droit public 2006
  

Disponible en mode multipage

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      REMERCIEMENTS

      Pour la réalisation de ce mémoire, nous avons bénéficié de près ou de loin, du concours fort appréciable de certaines personnes. Nous voudrions ici leur témoigner notre profonde gratitude.

      Nos remerciements vont à l'endroit de tous nos illustres maîtres de la faculté de droit des Universités de Bouaké et d'Abidjan qui ont suscité en nous l'amour de la recherche.

      Nous remercions de façon toute particulière, le Professeur MELEDJE DJEDJRO qui a accepté de diriger nos travaux malgré ses lourdes responsabilités. Nous profitons de l'occasion pour marquer toute notre admiration pour ce monument intellectuel, aux qualités insoupçonnées.

      SOMMAIRE

      Introduction.................................................................................5

      Chapitre préliminaire : Considérations générales sur la notion de terrorisme en droit international...........................................................................12

      Section 1 : L'émergence de difficultés dans la recherche

      d'une définition du terrorisme..........................................13

      Section 2 : La spécification de l'infraction de terrorisme...........................32

      PREMIERE PARTIE : L'ENCADREMENT NORMATIF DE LA

      LUTTE CONTRE LE TERRORISME.................................52

      Chapitre 1 : Le dispositif préventif de lutte antiterroriste...........................53

      Section 1 : Les obligations des Etats dans la prise mesures internes...............53

      Section 2 : Les obligations de coopération des Etats aux

      fins de prévention............................................................66

      Chapitre 2 : Le dispositif répressif de lutte antiterroriste..............................77

      Section1 : Les mesures de contrainte applicables au terrorisme......................................................................................77

      Section 2 : La répression pénale du terrorisme..........................................96

      DEUXIEME PARTIE : LA LUTTE CONTRE LE TERRORISME

      A L'EPREUVE DES FAITS ............................................................................111

      Chapitre 1: Une approche dangereuse dans le traitement du terrorisme.........112

      Section 1 : Le changement de posture dans le traitement du terrorisme.............113

      Section 2 : La violation des normes internationales dans la campagne antiterroriste terrorisme.....................................................................................133

      Chapitre 2 : Une approche non pertinente dans le traitement du terrorisme........153

      Section 1 : La relative efficacité des mesures coercitives pacifiques

      décidées dans le cadre de la lutte antiterroriste...........................153

      Section 2 : La justice contemporaine, une réponse inadaptée à l'infraction de terrorisme....................................................................................168

      Conclusion........................................................................180

      PRINCIPAUX SIGLES ET ABREVIATIONS

      I- Annuaires, recueils et revues

      AJIL American Journal of International Law

      AFDI Annuaire français de droit International

      Ann. CDI Annuaire de la Commission du droit international

      Ann. IDI Annuaire de l'Institut du droit international

      DAI Documents d'actualité internationale

      EJIL European Journal of International Law

      JDI Journal de droit international

      RBDI Revue belge de droit international

      RCADI Recueil des cours de l'Académie de droit international

      de la Haye

      Rec. CIJ Recueil de la Cour internationale de justice

      RGDIP Revue générale de droit international public

      RICR Revue internationale de la Croix-rouge

      RSA Recueil des sentences arbitrales

      II- Institutions et organisations

      AIEA Agence internationale de l'énergie atomique

      CAERT Centre africain d'études et de recherche sur le terrorisme

      CCT Comité de lutte contre le terrorisme des Nations Unies

      CICTE Comité interaméricain contre le terrorisme

      GAFI Groupe d'action financière sur le blanchissement d'argent

      IDI Institut de droit international

      OACI Organisation de l'aviation civile internationale

      OCI Organisation de la Conférence islamique

      OIP-Interpol Organisation internationale de police criminelle

      OMI Organisation maritime internationale

      ONUDC Organisation des Nations Unies contre la drogue et le crime

      SFDI Société française pour le droit international

      TPIR Tribunal pénal international pour le Rwanda

      TPIY Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie

      Introduction

      Notre histoire, l'histoire de l'humanité est aussi celle des contradictions, des antagonismes et de la confrontation. Elle s'est bâtie et continue de se construire sur le ciment de l'horreur, de la terreur, et des hécatombes. Elle s'écrit au fil des jours avec l'encre du sang, sous la plume de la violence. Cette violence qui empoisonne l'existence humaine est omniprésente et protéiforme. Le terrorisme est l'une des formes de violence les plus répandues dans le monde1(*). Il a traversé les époques et a survécu au temps, marquant l'histoire humaine d'une empreinte indélébile. Ce phénomène s'est révélé en effet, être un élément catalyseur dans la survenue des tragédies qui ont bouleversé le cours de l'histoire ancienne2(*) et contemporaine3(*). Pour ce qui de l'histoire contemporaine, deux événements majeurs retiennent particulièrement notre attention : il s'agit de la Première Guerre mondiale et des attentats du 11 septembre 2001.

      Les évènements qui précèdent immédiatement la Première Guerre mondiale sont bien connus en raison des conséquences cataclysmiques qu'ils devaient avoir sur l'ordre mondial. On se souvient que c'est un membre d'une jeune organisation terroriste « Jeune Bosnie », Gavrilo PRINCIP, qui, en assassinant à Sarajevo l'archiduc François-Ferdinand de Habsbourg le 28 juillet 1914, mit en branle la succession des évènements qui aboutit au déclenchement du premier conflit mondial4(*)...

      Tournée la sombre page des conflits mondiaux qui ont charrié des millions de victimes, l'effondrement des deux blocs idéologiques est et ouest qui marqua la fin de la guerre froide5(*), offrit au monde une trêve éphémère. L'humanité qui sortait fraîchement de plusieurs décennies de blessures entra dans une nouvelle ère, faisant désormais face à une nouvelle forme de menace.

      Le 11 septembre 2001, notre histoire s'ouvrit sur une nouvelle page sombre. Le monde venait de basculer en ce début de 21ème siècle dans une forme de violence d'une gravité inqualifiable. L'Occident, sinon la planète terrifiée, crut vivre un horrible cauchemar. En quelques minutes seulement, l'humanité fut plongée dans « un nouveau désordre mondial »6(*), mettant à rude épreuve l'équilibre déjà précaire du système géopolitique international. On se souvient en effet, que ce jour-là, des islamistes sunnites détournèrent quatre avions de lignes américaines, les transformant en missiles humains. Le monde assista alors médusé par l'effet de l'instantanéité de l'information, à la réalité sanglante de l'acte terroriste. La tragédie laissa voir un spectacle de ruines, des milliers de familles d'innocents endeuillées. D'une certaine manière, l'onde de choc du drame américain remit au goût du jour la fameuse théorie du « clash des civilisations »7(*) empruntée au célèbre sociologue américain Samuel HUNTINGTON qui inscrivit dès 1993 les relations interculturelles et par delà les relations internationales dans une vision manichéenne.

      Face à la montée en puissance du terrorisme de type nouveau « mythifié » par le 11 septembre - que l'on désigne volontiers sous le vocable « d'hyperterrorisme »8(*) ce « nouveau totalitarisme » qui a « grandi, mûri et (...) devenu désormais adulte »9(*) - l'on ne peut que s'interroger sur l'efficacité des mécanismes de prévention et de répression mis en place pour vaincre ce fléau. Le fait marquant, c'est que les attentats contre les deux tours jumelles du World Trade Center semblent avoir achevé de convaincre les plus sceptiques, de la vulnérabilité et de la porosité des mécanismes de prévention et de règlement des conflits mis en place depuis plus de 60 ans, et ce en dépit des progrès technologiques réalisés ces dernières années1(*)0.

      Au de là de son actualité, le sujet témoigne d'un grand intérêt scientifique. Il est vrai que le droit international constitue depuis longtemps l'un des instruments privilégiés par lesquels les Etats dans leur ensemble, ont entendu articuler leur réponse aux activités qu'ils ont fait entrer dans la catégorie des actes de terrorisme international. Il est tout aussi vrai que la question de l'adéquation du corpus de règles qui composent ce droit à la lutte contre le terrorisme, fut posée avec acuité et une insistance toutes particulières à la suite des attentats du 11 septembre 2001. L'on ne compte plus, en effet, les constats de carence qui furent dressés à cet égard dans les jours et les semaines qui ont suivi ces terribles évènements1(*)1. Dans un premier temps, comme l'observe Monsieur Luigi CONDORELLI1(*)2, la référence au droit international fut tout simplement absente du discours des responsables politiques ; le droit apparu aux yeux de ces derniers comme dépourvu de pertinence, incapable de jouer un rôle dans l'appréciation des faits et dans le choix des actions à mener. Ce n'est que dans un second temps que les débats juridiques enflèrent et que se multiplièrent les remises en cause du cadre offert par les normes juridiques internationales existantes pour répondre à des actes d'une telle gravité. Ainsi que le note un observateur de la scène internationale, « le droit international lui, aussi semble frappé de stupeur, incapable de nommer ce qui venait de se produire et qui n'obéissait à aucune de ses catégories homologuées »1(*)3. Le droit existant se révéla alors inadapté, « atone ». La question de sa nécessaire adaptation, de son évolution à la suite des évènements en cause et dans un certain sens de sa pertinence paru donc logiquement appeler un examen approfondi des normes internationales. Parallèlement, dans un contexte plus politique, plusieurs des Etats les plus activement engagés dans la lutte contre le terrorisme mirent avec insistance l'accent sur le caractère exceptionnel des situations auxquelles ils avaient à faire face pour justifier la mise à l'écart d'un certain nombre de normes internationales, en particulier dans le domaine de la protection des droits de la personne humaine. A cet égard encore, le cadre juridique existant se révéla peu adapté et pouvait dès lors être ignoré ou, à tout le moins, mis entre parenthèse. Comme le souligne avec perspicacité le Professeur Pierre KLEIN, que ce soit en raison du prétendu ou du réel « vide juridique » diagnostiqué par plusieurs observateurs ou du caractère exceptionnel des situations en cause, qui auraient rendu inadéquates ou non pertinentes un certain nombre de règles existantes, l'ordre juridique international contemporain a subi une considérable « mise à l'épreuve »1(*)4. Ce sont en effet, plusieurs de ses composantes les plus essentielles qui furent remises en cause et souvent mises à mal dans ce cadre.

      Malgré tout, la lutte contre le terrorisme reste un défi constant et permanent pour le droit international. Il apparaît évident que pour éradiquer la violence terroriste, il ne suffit pas de la nier, ni de la dénoncer seulement, mais voir lucidement ce qu'elle est, ses effets, et la manière dont on peut lui résister1(*)5. « Il s'agit au fond de transformer un problème qui pourrait paraître abstrait en une réalité concrète »1(*)6. Cette réalité est appréhendée par le droit, parfois maladroitement, mais avec la volonté affirmée de l'abolir. Expliquer le terrorisme, le nommer et le caractériser pour ensuite organiser la lutte, tel est l'essentiel de l'éventail des tâches qui incombe au juriste. Or, si pareille initiative peut paraître exaltante et hardie, elle n'en demeure pas moins périlleuse et ardue. En effet, dans un premier temps, l'entreprise de définition du terrorisme en droit en général et en droit international en particulier relève d'un travail si  herculéen que le Professeur Jean-Marc SOREL s'est interrogé sur le point de savoir si on pouvait définir le terrorisme, et si on devait le définir1(*)7. Car, ainsi que le souligne avec justesse Mme Marie-Hélène GOZI, souvent abordé avec passion, le thème de terrorisme tient la raison en échec1(*)8.

      Dans un second temps, l'impossibilité ou du moins la difficulté de parvenir à une définition consensuelle et tangible du terrorisme en droit international augure assurément bien d'incertitudes dans la lutte contre ce phénomène. Et, on pourrait à bon droit se demander, comment lutter efficacement contre un mal qu'il est difficile de circonscrire ; ou plus encore, comment circonscrire le champ d'extension d'un combat contre un mal insaisissable parce qu'indéfinissable. La pratique révèle pourtant que l'absence de définition générale et consensuelle du terrorisme n'empêche pas la communauté internationale de combattre le phénomène en question.

      Il apparaît dès lors tout indiqué de nous poser un certain nombre de questions qui intéresse l'étude. Un faisceau de questionnement effleure l'esprit lorsqu'on aborde la question de la lutte contre le terrorisme sous le jour du droit international ; et on pourrait légitiment se poser les questions suivantes :

      - Quels sont les mécanismes de prévention pour contrer la menace terroriste ?

      - Quels sont les mécanismes de répression pour vaincre, à tout le moins pour

      faire face au terrorisme ? Plus particulièrement, quelle est la place du recours à la force armée dans la lutte contre le terrorisme ? Sur quel fondement juridique et dans quelles conditions l'option militaire est-elle envisageable ?

      - Quel est impact réel des mesures de contrainte non armée dans le cadre de la lutte antiterroriste ?

      - Quelle est la place de la justice dans la lutte contre le terrorisme ?

      Une telle étude ne saurait se passer de l'examen des faits, ce qui nous amène tout naturellement à nous interroger sur les aspects pratiques de la question.

      - Comment alors, dans les faits la lutte contre le terrorisme a été perçue et menée dans le cadre multilatéral de sécurité collective et comment elle est engagée dans une perspective unilatérale depuis l'avènement des Nations Unies à nos jours en passant par les tragiques évènements du 11 septembre 2001.

      Les réponses données au terrorisme ne sont-elles pas plus dangereuses que le terrorisme lui-même ? Il s'agit en un mot de réfléchir sur les aspects relatifs à l'organisation de la lutte contre le terrorisme en droit international pour en faire ressortir éventuellement les faiblesses et les limites.

      Nous tenterons de répondre à toutes ces interrogations à travers deux parties : La première partie sera consacrée à l'encadrement normatif de la lutte contre le terrorisme ( Première partie) et la seconde partie consistera à examiner les aspects factuels de cette lutte, d'où la lutte contre le terrorisme à l'épreuve des faits (Deuxième partie). Toutefois, étant donné que le terrorisme pose a priori des problèmes quasi insolubles de définition, cette démarche bipartite s'enrichira d'un chapitre préliminaire qui portera sur la notion même de terrorisme en droit international ( Chapitre préliminaire).

      CHAPITRE PRELIMINAIRE

      CONSIDERATIONS GENERALES SUR LA NOTION DE TERRORISME EN DROIT INTERNATIONAL

      La notion de terrorisme est source d'étonnement pour tout chercheur qui s'intéresse au sujet. En effet, le chemin de la recherche d'une définition tangible de ce phénomène semble parsemé d'embûches (Section 1), au point même où certaines sciences sociales et humaines, à l'instar de la sociologie, de la science politique ou de la philosophie semblent avouer leurs limites eu égard aux confusions conceptuelles qui sont parfois maladroitement entretenues entre cette violence et d'autres formes de violence. Dans cette grisaille intellectuelle, le droit tente lui aussi, tant bien que mal d'apporter des éléments de réponse par un exercice de spécification de l'incrimination (Section 2).

      Section 1 : L'émergence de difficultés dans la recherche

      d'une définition du terrorisme

      Face au caractère quasi insaisissable du terrorisme (Paragraphe1), la nécessité de parvenir à une définition consensuelle et acceptable du phénomène en droit, a cédé le pas à la tentation de qualifier diversement le phénomène criminel, non sans créer des confusions (Paragraphe 2).

      Paragraphe 1 : Le terrorisme, une notion insaisissable

      Le concept de « terrorisme » est bien difficile à appréhender et constitue une gageure intellectuelle saisissante. Bien que familier, le mot est « mystérieux » 1(*)9 et controversé2(*)0, utilisé pour signifier des situations hétérogènes et disparates2(*)1. Il n'existe toujours pas du terrorisme une perception unique, ni une définition recueillant l'assentiment général. Le terrorisme serait l'un de ces concepts que l'on croit connaître de prime abord mais qui se révèlent, à la réflexion et une fois que la question de leur signification posée, bien difficile à circonscrire2(*)2. Il s'agit là d'une notion diffuse, aussi fuyante que complexe. Le mot n'a pas un sens constant et n'a pas couvert, selon les époques, les mêmes réalités2(*)3. Il est difficile de trouver les germes d'une définition tangible de ce phénomène dans l'histoire car l'actualité reflète largement les incertitudes du passé. La science politique2(*)4 aussi bien que la sociologie ou la philosophie2(*)5 ne parviennent à fournir une définition univoque du fléau. On constate ici des renversements de significations, des querelles sémantiques réduisant ou étirant la notion en raison de son potentiel émotionnel, de la résonance affective du mot, et la conceptualisation du terrorisme semble à plusieurs égards inaccessible. Le droit n'est pas non plus d'un grand secours. Ici également, on constate l'échec d'une définition générale du terrorisme (A) qui trouve sa source dans des obstacles (B) liés au caractère relatif de la notion qui reste, de toute évidence, un terrain d'affrontement des idéologies et des intérêts corrélatifs des Etats.

      A- Le constat d'échec d'une définition générale et tangible du

      terrorisme en droit International

      A la question de savoir, « existe-t-il une définition universelle du terrorisme ? », la réponse est probablement : non2(*)6. A l'instar de la notion d'agression, la notion de terrorisme échappe depuis des décennies au droit international, qui n'est pas parvenu à en donner une définition généralement acceptée et faisant autorité. La première tentative conventionnelle et internationale d'organisation de la répression du terrorisme date de l'élaboration par la SDN de deux conventions signées à Genève le 16 novembre 1937. A la suite de sa saisine, le Comité d'experts de l'Organisation élabore deux textes. L'un intitulé « Convention pour la prévention et la répression du terrorisme », l'autre « Convention pour la création d'une Cour pénale internationale ». La Convention pour la prévention et la répression du terrorisme offre une première caractérisation de ces actes. L'article 1 alinéa 2 énonce que ce sont «  les faits criminels dirigés contre un Etat et dont le but ou la nature est de provoquer la terreur chez des personnalités déterminées, des groupes de personnes ou dans le public ». L'article 2 donne une liste des différents actes qui constituent des infractions de terrorisme au sens de l'article 12(*)7. Cependant, le recours à la notion de terreur ne faisait qu'inscrire la définition du terrorisme au centre d'un cercle vicieux. En effet, n'est-il pas vrai que, caractériser un concept par un autre imprécis relève de l'aporie2(*)8 ?, le mot « terreur » étant lui même sujet à questionnement. En définitive, il ne ressort de cette Convention aucune définition tangible de l'acte. Une caractérisation aussi large peut fort bien comprendre toute sorte de faits délictueux, même peu graves, dont la nature serait de répandre la terreur. Néanmoins, elle offre à la notion un premier critère concret ; l'infraction nécessite effectivement l'emploi intentionnel de moyens de nature à provoquer la frayeur. Ce caractère de l'acte servira à déterminer les éléments de l'infraction terroriste2(*)9. Les critiques formulées sur les travaux de Genève expliquent certainement que ce texte n'ait pas abouti. Toutefois, son incidence politique est à remarquer. En effet, les débats de Genève sont l'occasion d'une condamnation internationale du terrorisme. La question de sa définition a encore été posée dans le cadre des négociations sur le Statut de Rome portant création de la Cour pénale internationale. Une fois de plus, les difficultés consécutives à toute tentative d'élaboration d'une théorie juridique du terrorisme sont d'une telle importance, que les efforts déployés tant par la doctrine que par les juristes, dans les congrès et les conférences internationales sont restés vains. Cependant, comme précédemment annoncé, cet obstacle n'empêche pas la communauté internationale de condamner unanimement ce phénomène3(*)0. Nous pouvons néanmoins regretter avec Madame Marie-Hélène GOZI, que la facilité et l'opportunisme aient cédé la place à la recherche nécessaire de la nature juridique du terrorisme3(*)1. N'est-il pas étonnant de condamner un acte sans lui avoir donné au préalable un contenu précis ?

      Ainsi, de lege lata, Il n'existe à ce jour, aucune définition de la notion de terrorisme qui recueille le consensus suffisant pour permettre son insertion dans un texte conventionnel de droit international général32. Du moins, le seul texte de portée internationale en vigueur qui prohibe expressément et de façon générale le terrorisme reste l'article 33 de la Quatrième Convention de Genève, du 12 août 1949 sur la protection des personnes civiles en temps de guerre. Cependant, il ne vise que les cas des conflits armés internationaux. C'est pourquoi, il est inadapté au terrorisme que vivent actuellement les Etats3(*)3. C'est de façon très différente que la question du terrorisme et, dans une certaine mesure de sa définition, a été abordée par la suite par le biais de diverses conventions, souvent qualifiées de « sectorielles »3(*)4. Du reste, les obstacles à l'établissement d'une définition unanimement admise du terrorisme ont principalement pour source sa subjectivité. C'est avant tout le fait que le terme « terrorisme » est lourdement connoté qui rend son utilisation problématique dans un contexte strictement juridique, c'est-à-dire prétendant à une certaine objectivité. Abordé la plupart du temps sous l'angle idéologique, le terrorisme pose une nouvelle fois le problème de l'infraction politique. C'est pourquoi l'ensemble des débats internationaux portant sur ce fléau est marqué par un désaccord des Etats s'agissant de sa définition.

      B- Les obstacles : Les pierres d'achoppement et la question des
      exclusions

      L'émergence d'une définition générale consensuelle du terrorisme en droit international est principalement tenue en échec par la vive controverse née autour de l'exclusion des mouvements de libération nationale (1) et la lancinante question du terrorisme d'Etat (2).

      (1)- La vive controverse sur l'exclusion des actes des mouvements de libération nationale des actes de terrorisme

      Suite à l'échec de la défunte Société Des Nations (SDN), l'Organisation des Nations Unies (ONU) s'est engagée, elle aussi, sur le chemin tortueux de la recherche d'une définition générale acceptable du terrorisme. Les réflexions qui ont débuté dans les années 19403(*)5 se sont finalement cristallisées en 1996, date du début des travaux relatifs au Projet de Convention générale sur le terrorisme3(*)6. Cependant ces discussions n'ont pas connu de progrès significatifs depuis 2002. Les raisons de ce blocage tiennent à l'impossibilité de dégager un accord entre les Etats sur l'opportunité d'exclure les actes des mouvements de libération national du champ d'application de la future convention.

      La controverse née autour de la signification de la terreur, de la portée et des bénéficiaires réels du droit à l'autodétermination, ainsi que des moyens et des méthodes utilisés pour assurer sa réalisation a été le principal obstacle auquel s'est heurtée la mise au point d'une définition exhaustive du terrorisme et d'un traité exhaustif sur le terrorisme3(*)7. Les clivages idéologiques et les divergences de vues qui ont empêché au cours de la période de décolonisation, l'obtention d'un large consensus persistent encore aujourd'hui dans les relations internationales. Le droit à l'autodétermination est le droit collectif d'un peuple de déterminer son statut politique, et d'assurer librement son développement économique, social et culturel. Il occupe une place de choix dans la charte des Nations Unies3(*)8. Consacré par les deux Pactes internationaux de 1966 relatifs aux droits de l'homme3(*)9, il est réaffirmé dans certaines résolutions majeures de l'Assemblée Générale des Nations Unies, notamment la résolution 1514 (XV) du 14 décembre 1960 relative à la Déclaration sur l'octroi de l'indépendance aux pays et aux peuples coloniaux. Il relève aussi du droit coutumier et la CIJ y voit « un des principes essentiels du droit international contemporain »4(*)0. Ce droit est même parfois qualifié de norme de jus cogens4(*)1, alors que la CIJ a vu dans l'obligation de le respecter, une obligation erga omnes4(*)2. Le droit à l'autodétermination comporte nécessairement le droit de l'exercer et le droit de prendre des mesures dans cette perspective4(*)3. Il reste que la portée précise de ce droit en tant que droit de recourir à la force armée (jus ad bellum) et de s'engager dans des guerres de libération nationale a toujours constitué un sujet majeur de dissension. Avant que l'application du droit international humanitaire ait été étendue, en 1977, aux guerres menées par l'exercice du droit à l'autodétermination4(*)4, l'Assemblée Générale des Nations Unies avait adopté un certain nombre de résolutions dans lesquelles elle laissait entendre que l'emploi de la force dans les luttes de libération était légal dès lors qu'il constituait une mesure de légitime défense contre le colonialisme, et indiquait que le DIH dans son intégralité s'appliquerait aux luttes de libérations nationales. A ce titre, cette instance a estimé que les pays sous domination coloniale pouvaient user de tous « les moyens en leur pouvoir »4(*)5 ou « nécessaires » en qualifiant ce droit d' « inhérent »4(*)6. De nombreux pays4(*)7 du tiers-monde parvenus à l'indépendance adoptèrent cette terminologie selon laquelle, tout individu ou tout mouvement qui luttaient contre l'oppression coloniale et / ou la domination coloniale ne devaient pas être qualifiés de « terroristes » mais méritaient plutôt le titre de « combattants de la liberté ». Les Etats en développement ont tiré de la légitimité et de la licéité des luttes de libération nationale4(*)8 l'idée-force selon laquelle les mouvements de libération nationale, en situation d'infériorité, peuvent avoir recours à tous les moyens à leur disposition. Cette position a été exprimée par certains Etats au sein du Comité spécial du terrorisme international créé par l'AGNU en 1972 : « (...) les luttes de libération anticoloniale, la lutte des peuples combattant contre des agresseurs et des envahisseurs pour recouvrer leur liberté sont légitimes parce que fondées sur le droit inaliénable des peuples à l'autodétermination et autorisent ceux qui les mènent à utiliser tous les moyens à leur disposition y compris la force »4(*)9. Cette solution est vivement dénoncée par certains analystes occidentaux qui voudraient bien y voir la boîte de pandores ouverte à toutes les dérives. Pour eux, la position des Etats du Sud entretiendrait une confusion entre le jus ad bellum, c'est-à-dire le droit de recourir à la force armée, et le jus in bello5(*)0, le droit régissant les conflits armés indépendamment de la licéité du recours à la force. En effet, le jus in bello étant indifférent aux causes poursuivies par les belligérants, l'argument avancé par les Etats du Sud suivant lequel la légitimité des luttes de libération nationale justifie que l'on ferme les yeux sur la manière dont la lutte est conduite, est critiquable. Reconnaître le droit des mouvements de libération nationale à employer tous les moyens introduirait une discrimination entre les parties au conflit et reviendrait à exonérer les mouvements de libération nationale des obligations élémentaires qu'impose le DIH. Qui plus est, l'exigence des Etats du Sud d'exclure les actes des mouvements de libération nationale des conventions antiterroristes, et donc de les dissocier des actes terroristes quelle que soit la nature des moyens employés, semble ambiguë : le bloc des Etats du Sud accepte la qualification terroriste quand il s'agit d'en examiner les causes sous jacentes, les ferments (le colonialisme, la domination et l'occupation étrangères) ; mais il refuse le mot seulement quand il est question d'organiser juridiquement la répression5(*)1. De sorte à faire dire à Monsieur Pierre D'ARGENT5(*)2 qu' « on ne sait pas trop cependant si ces Etats considèrent qu'il existe une forme de terrorisme légitime (auquel cas il y aurait une exception au sein de la définition du terrorisme lorsque des actes correspondant matériellement à la définition sont perpétrés en vue de la libération d'un peuple sous domination coloniale), ou s'ils considèrent que les actes posés dans le cadre d'une guerre de libération nationale ne peuvent jamais par la nature de leur finalité, revêtir les caractéristiques objectives d'un acte terroriste ». Cette analyse bien que fondée, appelle tout de même quelque remarque. En effet, en situation de légitime défense, d'extrême nécessité, le droit n'exclut pas absolument le droit de la victime d'une attaque d'user de tous les moyens dont elle dispose, aussi longtemps que sa réaction sera proportionnée à l'attaque5(*)3.

      La question du terrorisme d'Etat se pose avec autant d'acuité.

      (2)- La lancinante question du terrorisme d'Etat et de

      son exclusion des actes de terrorisme 

      En ce qui concerne les actes des forces armées et du terrorisme d'Etat, la question s'est posée de savoir dans quelle mesure les instruments conventionnels visant à réprimer le terrorisme pouvaient leur être appliqués. Celle-ci a été soulevée dans le cadre de la Convention de 1997 pour la répression des attentats terroristes à l'explosif. L'article 19 de ce texte exclut assez largement les agissements des forces armées de son champ d'application, en disposant que : « Les activités des forces armées en période de conflit armé, au sens donné à ces termes en droit international humanitaire, qui sont régis par ce droit ne sont pas régies par la présente convention, et les activités menées par les forces armées d'un Etat dans l'exercice de leurs fonctions officielles, en tant qu'elles sont régies par d'autres règles de droit international, ne sont pas non plus régies par la présente convention ». Une disposition identique a finalement été incluse dans l'article 4, paragraphe 2, de la Convention de 2005 sur la répression des actes de terrorisme nucléaire5(*)4, non sans avoir préalablement suscité d'important débats au cours des travaux qui ont mené à l'adoption de ce texte5(*)5.

      Le raisonnement qu'on pourrait tenir est le suivant : en application de cette clause d'exclusion, des destructions à l'explosif ( dans le 1er cas) ou l'utilisation de matières ou engins radioactifs (dans le 2ème cas) par des membres de forces armées, même dans un contexte autre que celui de conflit armé, ne seraient donc jamais susceptibles d'être qualifiés de terrorisme sur pied de l'une ou de l'autre convention en cause. Or, autant l'exclusion du champ d'application de ces instruments d'actes accomplis par les forces armées en période de conflit armé pouvait se comprendre eu égard au fait de l'interdiction et de l'incrimination de ces actes dans le cadre du droit international humanitaire, autant l'exclusion des actes commis en dehors de tels contextes du simple fait qu'ils sont « régis par d'autres règles de droit international » soulève des difficultés. Plus généralement, il est manifeste que l'ensemble du débat renvoie inévitablement au concept de « terrorisme d'Etat ». Dire que les actes des forces armées échappent au champ d'application des différentes conventions visant à lutter contre le terrorisme, ne reviendrait-il pas en fin de compte à remettre en cause le fait que le terrorisme puisse aussi être « d'Etat » ?5(*)6

      Les difficultés inhérentes à l'entreprise de définition du terrorisme a souvent occasionné des amalgames entre le terrorisme et certains crimes internationaux.

      Paragraphe 2 : Quelques confusions dans la qualification de certains actes criminels

      La réflexion sur la construction juridique de l'incrimination du terrorisme a une finalité : garantir l'indispensable jugement, trouver le moyen juridique d'engager des poursuites pénales contre les auteurs des actes de terrorisme, leurs complices, leurs organisateurs. Or, on le sait désormais, le droit international, tergiverse, balbutie et bégaie devant l'impérieuse nécessité de proposer une définition générale satisfaisante du terrorisme. Ce vacuum juris n'empêche pas pour autant la qualification juridique d'actes criminels. Et, il n'est pas rare de constater qu'au moment de la détermination de la sanction applicable, l'extrême gravité de certains actes criminels5(*)7 conduise à opérer des confusions entre, d'une part, terrorisme et crime contre l'humanité (A), et d'autre part, entre terrorisme et crime de guerre (B).

      A- Terrorisme et crime contre l'humanité

      La notion de crime contre l'humanité relève d'une rare complexité comme en témoignent les divergentes de vues au sein de la doctrine. Celle-ci a connu une évolution notable en droit international, depuis sa consécration au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, pour poursuivre tous les crimes commis en application du plan d'attaque du gouvernement du IIIème Reich contre des individus appartement à certains groupes raciaux, ethniques etc. Cette évolution s'est traduite par un assouplissement progressif de la notion5(*)8 qui facilite aujourd'hui le rapprochement avec la notion voisine du terrorisme. Cet assouplissement est particulièrement visible à l'article 7 du Statut de la Cour pénale internationale adopté le 17 juillet 1998, qui définit le crime contre l'humanité comme : « (...) l'un des actes ci-après commis dans le cadre d'une attaque généralisée ou systématique lancée contre une population civile et en connaissance de cette attaque (...) ». L'article poursuit : « Par attaque lancée contre une population civile, on entend le comportement qui consiste en la commission multiple d'actes visés au paragraphe 1 à l'encontre d'une population civile quelconque, en application ou dans la poursuite d'un Etat ou d'une organisation ayant pour but une telle attaque ». L'analyse de cette disposition appelle quelques développements ; pour être constitué, l'élément matériel du crime contre l'humanité doit répondre à deux conditions cumulatives : d'une part, les actes énumérés doivent être commis de « façon  systématique ou sur une grande échelle » (conditions alternatives). D'autre part, ces actes doivent être perpétrés à l'instigation ou sous la direction d'un « Etat ou d'une structure organisée » (conditions alternatives). Il faut entendre par le terme façon systématique, le fait que les actes doivent s'inscrire dans un plan ou une politique préconçue5(*)9. Cela se traduirait par la commission répétée et continu d'actes inhumains6(*)0. Ce critère n'est pas exclusif du crime contre l'humanité et ne permet pas de faire le détachement des deux notions, dans la mesure où le recours au terrorisme peut bien répondre à une politique préconçue. Le caractère continu et répété fait généralement partie de la logique du terrorisme, comme l'illustrent très bien les situations en Palestine, en Espagne, en Algérie6(*)1... En outre, l'acte de terrorisme peut répondre à l'exigence d'une multiplicité de victimes comme en témoigne d'ailleurs la tragédie du 11 septembre 2001, avec l'effondrement des tours jumelles du World Trade Center qui a coûté la vie, on s'en souvient, à 2973 victimes de toutes nationalités confondues, au point même où ces attentats avaient fait l'objet de qualificatifs divers, épouvantables pour certains, effroyables pour d'autres. En ce qui concerne l'autre condition, celle qui met en évidence, l'entité instigatrice de ces actes criminels, il ne s'agit plus exclusivement de l'implication d'un Etat6(*)2.

      On considère désormais qu'à l'instar de l'Etat, toute autre structure organisée peut planifier la perpétration de crimes contre l'humanité6(*)3. Il suffit simplement que les auteurs soient pourvus d'un pouvoir de fait ou organisés en bandes ou en groupes criminels. Or de toute évidence, le terrorisme est presque toujours imputable à un groupe ou une organisation plus ou moins structurés6(*)4 qui revendiquent le plus souvent leurs actions terroristes. Ainsi qu'on vient de le voir, le critère matériel ne permet pas à lui seul de distinguer le crime contre l'humanité du terrorisme. C'est d'ailleurs ce chevauchement de qualifications qui a poussé certains juristes de renom à l'instar de Yann JUROVICS à qualifier les évènements du 11 septembre de crimes contre l'humanité6(*)5, lesquels en porteraient effectivement les stigmates, en présenteraient les symptômes6(*)6. En revanche, cette argumentation apparaît insuffisante pour d'autres auteurs dont William A. SCHABAS et Clémentine OLIVIER6(*)7 qui rappellent à dessein, et à toutes fins utiles les termes de l'article 22 (2) du Statut de Rome selon lesquels : « La définition d'un crime est d'interprétation stricte et ne peut être étendue par analogie (...) ». Pour eux, s'il est vrai que des actes susceptibles de terroriser les populations civiles et ayant des objectifs politiques peuvent également, dans certains cas précis, constituer des crimes contre l'humanité, des crimes génocides, des crimes de guerre, ces notions se recoupant de toute évidence, il n'en demeure pas moins que ces crimes graves gardent chacun toute leur singularité. Ce qui explique d'ailleurs qu'ils aient fait l'objet d'une catégorisation spécifique dans le Statut de la CPI et non de confusion. L'un des arguments de poids qu'on avance généralement au soutien du détachement entre le terrorisme et les autres crimes graves en général, et tout particulièrement du crime contre l'humanité, puisque c'est de lui qu'il s'agit ici, serait son absence très remarquée du Statut de la CPI6(*)8. De ce fait, qualifier le terrorisme en tant que tel de crime contre l'humanité serait sans conteste néfaste pour cette catégorie de crimes dont la consistance doit être préservée. Faire entrer tous les actes terroristes, d'une grande diversité et de degrés et gravité variables, dans la catégorie des crimes contre l'humanité supposerait d'opérer une mutation décisive et irréversible de la notion de crime contre l'humanité qui reviendrait à la dénaturer. Le professeur Brigitte STERN a prévenu que « (...) l'ambiguïté même du terme   humanité invite à toutes les dérives et le crime contre l'humanité risque fort d'être instrumentalisé pour remplir tous les vides répressifs auxquels la communauté internationale doit faire face »6(*)9. Il ne faudrait pas aborder la notion de crime contre l'humanité comme une notion « fourre-tout », permettant d'appréhender tous les actes répréhensibles non incriminés ailleurs. Le terme   contre l'humanité ne signifie pas « horrible » ou « hautement condamnable » mais recouvre un sens technique très précis7(*)0. A bien y regarder, le détachement des deux notions n'apparaît en réalité évident qu'en considération de l'élément moral. Par exemple, la qualité des victimes pourrait constituer un élément déterminant dans l'entreprise de sépécifcation des différents crimes. En effet, outre la notion de « population civile », la qualification de crime contre l'humanité nécessiterait l'appartenance de la victime à un groupe racial, national, ethnique ou politique7(*)1. Pour le Professeur GRYNFOGEL, «  (...) la part prise par la qualité de la victime, dans l'élément moral, est essentielle. Si le criminel cherche à l'atteindre, c'est parce qu'elle appartient- et uniquement parce qu'elle appartient- à telle race, à telle religion ou à telle ethnie réputée inférieures et /ou nuisible »7(*)2. Dans ces conditions, le terrorisme ne saurait répondre à la qualification de crime contre l'humanité, dans la mesure où en général, ce crime frappe indistinctement, sans discrimination. Il s'agirait ci d'une violence aléatoire qui ne s'embarrasse pas de mobile discriminatoire.

      Les développements antérieurs nous autorisent à refermer cette page, sans toutefois oublier de paraphraser Jean-Christophe MARTIN, pour qui le terrorisme et le crime contre l'humanité répondent à des politiques de terreur différentes, ce qui empêche le télescopage des deux concepts7(*)3.

      Quid du crime de guerre ?

      B- Terrorisme et crime de guerre

      Répondre à la question de savoir si le terrorisme constitue un crime de guerre- un problème de droit international qui a été âprement débattu au sein de la doctrine- revient à résoudre l'énigme, l'épineuse équation de la nature même du terrorisme, puisque le crime de guerre ne se définit a priori que par rapport à une situation de guerre ou plus exactement de conflit armé7(*)4. De la qualification juridique de conflit armé dépendra en retour le corpus de règles applicables en la matière : il s'agit ici- on le sait déjà- du droit des conflits armés ou le droit international humanitaire ou encore le jus in Bello7(*)5. La question se pose alors de savoir si le terrorisme est un conflit armé au sens des règles du jus in bello. D'un point de vue théorique, la question garde toute son importance quand on sait que dans le cadre particulier du conflit armé, la belligérance- et donc l'usage de la force armée par les combattants, dans une mesure définie7(*)6- est légale.

      D'un autre point de vue, celui-là plus pragmatique, la question prend toute son importance, dans le contexte particulier des attentats du 11septembre 2001,

      lesquels ont souvent été qualifiés d' « actes de guerre »7(*)7. Mais le contexte de conflit armé- condition première du crime de guerre- était-il avéré en l'espèce ? Rien n'est certain78. Nous sommes donc invités à réfléchir sur le terme de conflit armé en droit international. A défaut de fournir une définition tangible du conflit armé- en raison notamment, de l'absence de définition du seuil à partir duquel une violence considérée peut être qualifiée de conflit armé, le DIH propose des critères de base sans lesquels on ne saurait parler de conflit armé. En effet, un conflit armé suppose au moins l'existence de deux parties identifiables, ce qui n'est pas le cas des terroristes qui opèrent généralement dans la clandestinité, n'ont pas de signes distinctifs et ne portent pas les armes ouvertement. L'article 1er paragraphe 2 du Protocole additionnel II de 1977 complétant les Conventions de Genève de 1949, applicables aux conflits armés non internationaux exclut expressément de son champ d'application les « situations de tensions internes et de troubles intérieurs (...) comme les meurtres, les actes isolés ou sporadiques de violence et autres actes analogues »7(*)9. En outre, la jurisprudence du TPIY dans l'Affaire Tadic8(*)0 retient deux autres critères qui permettent, pour le moins de faire le distinguo entre un conflit armé interne et les situations d'insurrections armées, de banditisme : il s'agit de l'intensité des affrontements, leur prolongement dans le temps et l'organisation des parties belligérantes. Chacun de ces critères supposerait un certain degré à partir duquel la situation peut être juridiquement qualifiée de conflit armé. De manière générale, le terrorisme ne franchirait pas ces seuils8(*)1 comme le laisse supposer le CICR : « (...) des actes de violence sporadiques n'étant pas suffisants pour rendre le droit humanitaire applicable, les actes de terrorisme qui frappent sans discrimination le public de pays en paix ne relèvent pas de ce droit »8(*)2. On en déduira tout naturellement que le terrorisme ne pouvant être considéré comme un conflit armé au sens classique du terme8(*)3, au sens que voudrait lui imprimer le jus in Bello, seuls certains actes terroristes commis en temps de guerre8(*)4, peuvent être couverts par ce droit.

      En définitive, les confusions entretenues entre le terrorisme et les autres crimes graves répréhensibles par le droit international nous invitent à spécifier l'infraction en question.

      Section 2 : La spécification de l'infraction de terrorisme

      La définition des actes de terrorisme en tant qu'infractions pénales se présente comme l'articulation de deux éléments, l'un matériel et l'autre moral. Par élément matériel, on entend l'acte accompli, alors que l'élément moral s'intéresse à l'intention de l'auteur de l'acte. En matière de terrorisme, l'élément moral ne se réduit pas au dol général, volonté consciente de commettre une infraction, mais le terrorisme se distingue d'autres crimes en ce qu'il comporte un dol spécial, une intention spéciale qui se traduit par un objectif déterminé le but que l'auteur se propose d'atteindre. La qualité de la définition du terrorisme dépend donc de la manière dont sont définis et combinés les éléments matériel (Paragraphe 1) et moral (Paragraphe 2), l'objectif étant de parvenir à une définition qui couvre l'ensemble des actes terroristes.

      Paragraphe1: L'élément matériel des infractions terroristes

      Face au défaut d'accord général sur une définition unanimement admise du terrorisme et à la difficulté d'une telle entreprise, les Etats ont opté pour une approche sectorielle du problème, qui s'est traduite par l'élaboration progressive de traités ne couvrant que certaines manifestations du terrorisme (A). Mais depuis quelques années, des définitions générales du terrorisme ébauchées au plan régional connaissance une consécration au plan international (B).

      A- L'approche sectorielle ou fragmentaire

      L'approche sectorielle ou fragmentaire dans l'entreprise de définition du terrorisme répond au défaut de conceptualisation du phénomène, tant il peut apparaître à première vue, rebelle à toute caractérisation, à toute systématisation, du fait de sa complexité. Les conventions universelles qui qualifient les infractions terroristes sont considérées comme antiterroristes, alors même que plusieurs d'entre elles n'ont pas été élaborées pour lutter spécifiquement contre le terrorisme8(*)5. On observe ainsi que la plupart des conventions ne font aucune mention du mot « terrorisme » 8(*)6. Elles sont cependant considérées comme telles, soit par des traités postérieures8(*)7 qui utilisent une définition par renvoi8(*)8, soit par les résolutions de l'Assemblée générale des Nations Unies8(*)9.

      Dans l'ensemble, les conventions actuelles sur le terrorisme ont un champ de compétence limité dans la mesure où elles ne couvrent qu'une catégorie bien définie d'actes. Les actes terroristes en question ne correspondent pas à des catégories homogènes. Pour les besoins de l'étude, nous tenterons de les regrouper au regard des moyens utilisés et du mode opératoire (1) et au regard de la cible visée (2).

      (1) - Les actes terroristes au regard des moyens

      et du mode opératoire

      Peuvent entrer dans cette catégorie d'actes terroristes, les prises d'otages (a), les attentats terroristes à l'explosif (b), le terrorisme nucléaire (c), auxquels il faut ajouter le financement des activités terroristes (d).

      a) Les prises d'otages 

      Les Conventions de Genève de 1949, relatives à la protection des personnes civiles en temps de guerre, prohibent la prise d'otages et la considère comme un crime de guerre9(*)0. Ainsi, le caractère de gravité de l'infraction est déjà reconnu quand, en 1979, la République fédérale d'Allemagne demande à l'ONU d'élaborer un texte sur ce point9(*)1. Cet Etat souhaite faire de ce méfait une infraction non exclusive de l'état de guerre. Le 17 décembre 1979, l'AGNU adopte à New York une Convention internationale contre les prises d'otages. Ce traité considère dans son préambule les actes de prise d'otages comme des « manifestations du terrorisme international » et il définit cette infraction comme le fait de s'emparer ou de détenir une personne et de menacer de la tuer, de la blesser ou de continuer à la détenir9(*)2. L'acte en question doit avoir pour but de contraindre une tierce partie, à savoir un Etat, une organisation intergouvernementale, une personne physique ou morale ou un groupe de personnes à accomplir un acte quelconque ou à s'en abstenir en tant que condition explicite ou implicite de la libération de l'otage9(*)3.

      b)- Les attentats terroristes à l'explosif

      Les attentats à l'explosif constituent une des méthodes les plus usitées par les terroristes9(*)4. La communauté internationale consciente de cette menace récurrente va adopter, par le truchement de l'AGNU, la Convention internationale pour la répression des attentats terroristes à l'explosif le 15 décembre 1997. L'infraction définie à l'article 2 est commise quand « toute personne, illicitement et intentionnellement, livre, pose, ou fait exploser ou détonner un engin explosif ou autre engin meurtrier dans ou contre un lieu public, une installation gouvernementale ou une installation publique, un système de transport public ou une infrastructure » soit « dans l'intention de provoquer la mort ou des dommages corporels graves » soit « dans l'intention de causer des destructions massives de ce lieu, cette installation, ce système ou cette infrastructure, lorsque ces destructions entraînent ou risquent d'entraîner des pertes économiques considérables ». L'intention de tuer ou de blesser des individus ou de détruire des biens constitue le dol général exigé pour que de tels attentats entrent dans le champ de la convention. Cependant, comme nous le verrons, cet élément ne permet pas à lui seul, de déduire une intention terroriste spécifique inhérente à l'utilisation d'explosifs. Du reste, il est à relever que cette convention incrimine certaines des formes de « terrorisme de destruction massive » en ce qu'il vise expressément les attentats terroristes à l'explosif au moyen « de toute arme ou de tout engin qui est conçu pour causer la mort (...) par l'émission, la dissémination, ou l'impact de produits chimiques toxiques, d'agents biologiques, toxines ou substances analogues ou de rayonnement ou de matières radioactives»9(*)5.

      c)- Le terrorisme nucléaire 

      Le terrorisme nucléaire est visé par la Convention du 3 mars 1980 sur la protection physique des matières nucléaires. Cette convention définit comme infraction, les faits intentionnels suivants : « le recel, la détention, l'utilisation, la cession, l'altération, l'aliénation ou la dispersion de matières nucléaires, sans y être habilité, et entraînant ou pouvant entraîner la mort ou des blessures graves pour autrui ou des dommages considérables pour les biens », ainsi que le vol, le détournement et autre appropriation indue de matières nucléaires, et le « fait d'exiger des matières nucléaires par la menace, le recours à la force ou

      par toute autre forme d'intimidation »9(*)6. Il faut souligner que le 8 juillet, la Conférence des Etats parties à cette convention a adopté au siège de l'AIEA (Vienne), un amendement substantiel. Ainsi, l'article 7 susmentionné vise désormais « un acte dirigé contre une installation nucléaire, ou un acte perturbant le fonctionnement d'une installation nucléaire, par lequel l'auteur provoque intentionnellement ou sait qu'il peut provoquer la mort ou des blessures graves pour autrui ou des dommages substantiels aux biens ou à l'environnement par suite de l'exposition à des rayonnements ou du relâchement de substances radioactives, à moins que cet acte ne soit entrepris en conformité avec le droit national de l'Etat partie sur le territoire duquel l'installation nucléaire est située ». Cette infraction de sabotage couvre donc les actes de nature terroriste contre les installations nucléaires ; encore que la détention d'un certain type d'armement à haut risque, même s'il elle fait l'objet d'interdiction par certaines conventions9(*)7, demeure une question qui se pose avec une extrême acuité en droit international9(*)8.

      d)- Le financement du terrorisme

      Le financement du terrorisme, bien que ne consistant pas en la commission d'attentats9(*)9, tombe néanmoins sous le coup d'une incrimination par la

      Convention du 9 décembre 1999 relative à la répression du financement du terrorisme, ainsi que certains textes subséquents1(*)00. Il constitue une infraction internationalement définie connexe par rapport aux infractions terroristes et autonome. Cette autonomie se caractérise par le fait que le financement du terrorisme constitue en lui-même un crime indépendamment de tout attentat. De la sorte, l'infraction de financement du terrorisme est constituée même en l'absence d'attentat. La notion de financement de terrorisme est définie de manière très extensive par la Convention de 1999 susmentionnée. En effet, son article 2 incrimine non seulement le fait de fournir des fonds, mais aussi de réunir des fonds à des fins terroristes. Peu importe d'ailleurs que les fonds soient issus d'activités illégales ou légales. De plus, l'article 1 paragraphe 1 de la même convention retient une définition très large  du terme « fonds »: « Fonds s'entend des biens de toute nature, corporels ou incorporels, mobiliers ou immobiliers, acquis par quelques moyens que ce soit, et des documents ou instruments juridiques sous quelque forme que ce soit, y compris sous forme électronique ou numérique, qui attestent un droit de propriété ou un intérêt sur ces biens, et notamment les crédits bancaires, les chèques de voyage, les chèques bancaires, les mandats, les actions, les titres, les obligations, les traites et les lettres de crédit, sans que cette énumération soit limitative ».

      (2) - Les actes terroristes au regard des cibles

      Ces actes terroristes visent des cibles particulières : il s'agit soit de lieux stratégiques en raison de leur caractère très sensible ou de personnes protégées par le droit international en raison de leur qualité officielle. Peuvent entrer dans cette autre catégorie, le terrorisme aérien (a), le terrorisme maritime (b), et le terrorisme contre les personnes jouissant d'une protection internationale (c).

      a)- Le terrorisme aérien

      Le terrorisme aérien trouve ses manifestations les plus courantes dans la piraterie aérienne et certains actes illicites contre la sécurité de l'aviation civile1(*)01.

      Le caractère particulièrement meurtrier de ces actes1(*)02 a suscité de nombreuses réflexions au sein de la communauté internationale, ce qui s'est traduit dans l'adoption de quatre traités internationaux sur la sécurité aérienne. Les Conventions de Tokyo (1963) et de la Haye (1970) réagissent aux tentatives à l'époque de détournements d'aéronefs en vol1(*)03. Le champ d'application de la première Convention est général et très extensif puisque, aux termes de l'article 1er, le traité s'applique aux infractions aux lois pénales et aux « actes qui, constituant ou non des infractions, peuvent compromettre ou compromettent la sécurité de l'aéronef ou de personnes ou de biens à bord, ou compromettent le bon ordre et la discipline à bord ». On le voit, cette convention n'est pas exclusive aux actes de terrorisme

      puisque son champ d'application s'étend aux infractions aux lois pénales relatives à la sécurité aérienne1(*)04. La Convention de la Haye (ou Convention pour la répression de la capture illicite d'aéronefs) vise les actes de toute personne à bord d'un aéronef qui « illicitement et par violence ou menace de violence s'empare de cet aéronef ou en exerce le contrôle ou tente de commettre l'un des ses actes », c'est-à-dire la capture illicite d'aéronefs. La Convention de Montréal de 1971, quant à elle, concerne les destructions d'aéronefs en vol. L'article 1er de cette convention1(*)05 retient une énumération assez longue d'actes considérés comme infractions. Ce faisant, la Convention de Montréal complète de manière assez satisfaisante les deux conventions antérieures.

      d)- Le terrorisme maritime 

      Tout comme le terrorisme aérien, le terrorisme maritime se manifeste dans la piraterie maritime ainsi que certains actes illicites contre la sécurité de la navigation maritime. Le phénomène de la piraterie maritime n'est pas nouveau et était jusqu'en 1958 sous l'empire d'une règle coutumière1(*)06. La Convection de Genève du 29 avril 1958 sur la haute mer qui la codifie, n'incrimine pas toutes les formes de violence pouvant être commises contre un navire et ses occupants. L'adoption par l'OMI, le 10 mars 1988, de la Convention de Rome pour la répression d'actes illicites dirigés contre la sécurité de la navigation maritime, répondait en partie au besoin de combler une telle lacune. Cette dernière fait largement référence dans son préambule au terrorisme. Son article 3 oblige les Etats à réprimer le fait de s'emparer d'un navire, de causer au navire ou à sa cargaison des dommages qui sont de nature à compromettre la sécurité de la navigation du navire, de placer ou de faire placer à bord d'un dispositif de nature à mettre le navire en danger, de mettre en danger la sécurité de la navigation en endommageant gravement des installations de navigation maritime ou en communiquant de fausses informations. Sont aussi visées très généralement les faits de blesser ou de tuer toute personne lorsque ces faits présentent un lien de connexité avec l'une des infractions susmentionnées. Ainsi qu'on peut le noter, bien qu'étant plus ancienne que la piraterie aérienne, la piraterie maritime n'a pas fait l'objet de nombreuses réflexions1(*)07. Pourtant cette tendance pourrait se renverser dans la mesure où on assiste à une forte progression de cette forme de criminalité1(*)08. De façon plus décisive, les cas récurrents de piraterie maritime en Somalie1(*)09, et plus encore ceux qui ont eu cours ces derniers mois dans le golfe d'Aden et aux larges des côtes kenyanes et tanzaniennes1(*)10, pourraient constituer - si ce n'est déjà le cas - une sorte d'électrochoc au sein de la communauté internationale, dans la perspective de l'approfondissement des réflexions en cette matière1(*)11.

      b)- Le terrorisme contre les personnes jouissant d'une protection

      internationale 

      Depuis longtemps, le droit international a posé un certain nombre de règles fondamentales relatives à l'inviolabilité, aux privilèges et aux immunités diplomatiques1(*)12. A leur suite, chaque Etat de résidence s'est engagé à assurer le respect des privilèges et immunités et à prendre toutes les mesures de protection nécessaires. Cependant, la fin des années 1960 marque une recrudescence de la délinquance en la matière. Ainsi, devant la difficulté d'augmenter les obligations des Etats de résidence et celle de mettre en oeuvre leur responsabilité, l'AGNU saisit la Commission du droit international aux fins d'examiner la question et de faire des propositions1(*)13. Ses travaux aboutissent en 1973 et se soldent par l'adoption aux Nations Unies, de la Convention sur la prévention et la répression des infractions contre les personnes jouissant d'une protection internationale, y compris les agents diplomatiques1(*)14. La Convention en question vise les attentats contre les chefs d'Etat, chefs de gouvernement, et ministres des affaires étrangères qui se trouvent dans un Etat étranger, ainsi que les membres de leur famille qui les accompagnent. Elle vise de même les attentats contre tout « représentant, fonctionnaire ou personnalité officielle » d'un Etat ou d'une organisation internationale qui a droit à une protection officielle. Elle vise enfin les attaques, par recours à la violence contre les locaux officiels, le logement privé ou les moyens de transport d'une personne jouissant d'une protection internationale, de nature à mettre sa personne ou sa liberté en danger1(*)15. Il est à noter que cette convention suppose, pour que l'infraction y définie soit réalisée, que l'auteur d'une attaque ait eu connaissance du statut spécial de la personne protégée, ce qui tranche avec l'esprit de la Convention sur les prises d'otages.

      La compilation des définitions de manifestations du terrorisme offre ainsi qu'on vient de le voir, une définition fragmentaire et partielle, « par agrégation », de l'infraction de terrorisme selon le droit international. Si l'approche sectorielle peut apparaître, intellectuellement peu satisfaisante, il faut bien reconnaître que la codification par étapes a eu le mérite de pallier l'impossibilité de parvenir à une définition générale du terrorisme. En cela, l'approche sectorielle illustre bien la formule de Mme Mireille DELMAS-MARTY selon qui « (...) l'incomplétude des idées peut apparaître comme une faiblesse féconde si, en évitant le dogmatisme et l'idéologie, elle facilite la recherche de solutions » 1(*)16.

      B- L'approche générale

      On le sait désormais, les premières tentatives de définition générale du terrorisme au plan universel n'ont pas abouti. Cependant, des définitions globales nous sont fournies par certaines conventions régionales. Deux techniques distinctes sont utilisées pour décrire l'élément matériel de l'infraction terroriste : l'énumération analytique et la formulation synthétique. L'énumération est un procédé utilisé par certaines conventions dans le but de caractériser l'infraction terroriste. L'avantage d'une telle définition est lié à sa précision : elle permet en effet, d'éviter que n'entrent dans la définition des actes qui ne devraient pas y figurer, alors même que leurs caractéristiques correspondent à la description de la définition. De la sorte, les définitions par énumération analytique laissent de manière générale aux pouvoirs publics, mais et surtout au juge, une marge de manoeuvre très restreinte dans la qualification des faits1(*)17. Cette technique est par exemple utilisée par les rédacteurs de la Convention de l'Union européenne sur le terrorisme contenue dans la position commune du Conseil européen 2001/931/PESC (27 décembre 2001), puis la décision-cadre 2002/475/JAI du 13 juin 2002. L'article 1 énumère in extenso, tous les actes terroristes considérés comme tels1(*)18. En revanche, les définitions analytique ont le défaut, outre leur lourdeur, d'être limitatives et donc lacunaires, puisqu'il apparaît quasiment impossible d'énumérer dans une seule et même convention tous les actes entrant sous la qualification terroriste. Or, comme le fait remarquer à juste titre Ghislaine FRAYSSE-DRUESNE1(*)19, il y a «  (...) un risque d'imprécision par l'omission de tel ou tel détail » ainsi que des problèmes d'interprétation. De l'autre côté, si la définition synthétique peut paraître intellectuellement plus satisfaisante, il n'en demeure pas moins qu'elle est techniquement plus complexe1(*)20 à trouver. Pourtant, plusieurs instruments contiennent aujourd'hui une définition synthétique du terrorisme qui se révèle ainsi, plusieurs décennies après la Convention de la SDN de 1937, un gage de modernité dans la lutte contre le terrorisme. On citera à titre d'exemple la Convention de l'OUA dont l'article 1 paragraphe 3 définit l'élément matériel du terrorisme comme « tout acte ou menace d'acte en violation des lois pénales de l'Etat partie susceptible de mettre en danger la vie, l'intégrité physique, les libertés d'une personne ou d'un groupe de personnes, qui occasionne ou peut occasionner des dommages aux biens privés ou publics, aux ressources naturelles, à l'environnement ou au patrimoine culturel (...) ». Les Conventions de la ligue arabe et de l'Organisation de la Conférence islamique dégagent, quant à elles, une définition commune de l'élément matériel du terrorisme qui couvre « tout acte de violence ou menace de violence, quels que soient ses motifs ou ses fins, perpétré pour exécuter un projet criminel, individuel ou collectif » ( article 1 § 2)1(*)21. Au plan universel, on note une ébauche de définition générale du terrorisme dans les Conventions de 1999 sur le financement du terrorisme. L'article 2 du traité de 1999 complète les définitions des actes de terrorisme des conventions sectorielles, en ce qu'il vise « Tout autre acte destiné à tuer ou à blesser grièvement un civil, ou tout autre personne qui ne participe pas aux hostilités dans une situation de conflit armé1(*)22, lorsque, par sa nature ou son contexte, cet acte vise à intimider une population ou à contraindre un gouvernement ou une organisation internationale à accomplir ou à s'abstenir d'accomplir un acte quelconque ». Si cette définition constitue à bien d'égards un grand pas vers un consensus autour d'une définition internationale générale du terrorisme, elle pèche toutefois par son caractère restrictif et limité dans la mesure où elle fait référence aux situations de conflits armés.

      En définitive, deux éléments méritent d'être combinés pour définir de manière synthétique, l'élément matériel du terrorisme : les comportements (modes opératoires) et les dommages qui en résultent (cibles et gravité), la pertinence des auteurs1(*)23 des actes terroristes ne paraissant pas s'imposer prima facie.

      Quid de l'élément moral de l'infraction terroriste ?

      Paragraphe 2 : L'élément moral des infractions terroristes

      L'élément moral du terrorisme se rapporte à une intention spécifique, qui suppose que l'infraction terroriste est exclusivement intentionnelle. L'auteur de l'acte criminel doit non seulement être conscient de la terreur qui pourrait résulter de ses actes, mais que c'est précisément le résultat qu'il en attend1(*)24. L'effet terrorisant de l'acte ne suffit donc pas, encore faut-il que la terreur constitue le but principal de l'auteur. C'est là résumé, le dol spécial de l'infraction terroriste. Il convient de voir, dès à présent, la définition qui nous est offerte de l'intention spécifiquement terroriste (A), ainsi que de ses manifestations (B).

      A- Les définitions de l'infraction spécifiquement terroriste 
      Il ressort grosso modo de l'étude des différentes conventions, deux buts spécifiquement terroristes : provoquer la terreur ou intimider (1) et contraindre une autorité à certaines décisions (2).
      (1)- Provoquer la terreur ou intimider

      C'est la composante élémentaire du dol spécial du terrorisme qu'on retrouve en substance dans toutes les définitions conventionnelles du terrorisme. La Convention antiterroriste mort-née de 1937 incriminait ainsi en son article 1er les « faits criminels dirigés contre un Etat et dont le but ou la nature est de provoquer la terreur1(*)25 chez des personnalités déterminées, des groupes de personnes ou dans le public »1(*)26. Les formulations sont aussi nombreuses que variées et retiennent deux effets psychologiques de masse : terreur et intimidation. Ces deux notions se recoupent assez largement. Le mot terreur est défini dans le langage usuel comme « une peur extrême qui bouleverse, paralyse »127, alors que le verbe intimider signifie quant à lui « remplir (quelqu'un) de peur en imposant sa force, son autorité ». Le TPIY définit également la notion de terreur comme une « peur extrême »1(*)28. Pour certains esprits critiques, définir le terrorisme par sa racine étymologique terreur relève tout simplement de la tautologie. Pourtant, il faut bien admettre qu'une telle définition est certes, intellectuellement décevante, mais elle a le mérite d'être réaliste et pragmatique, d'autant plus qu'elle semble satisfaire les exigences pratiques du droit. En effet, définir ainsi le dol spécial du terrorisme, rend l'incrimination opératoire au regard du sacro-saint principe nullum crimen nulla poena sine lege. Du reste, l' « option tautologique » est classiquement suivie par les codificateurs, car il semble a priori difficile de substituer à la notion de terreur, une expression explicite plus satisfaisante129.

      (2)- Contraindre une autorité à certaines décisions

      Plusieurs conventions définissent aussi l'intention spécifique du terroriste comme étant de contraindre des centres de décisions à changer d'attitude. La Convention de 1999 sur le financement du terrorisme qualifie de terroristes, certains actes1(*)30, s'ils visent « à contraindre un gouvernement ou une organisation internationale à accomplir ou à s'abstenir d'accomplir un acte quelconque ». Cette intention dolosive est considérée comme but alternatif du terroriste. Même si en effet, l'effet terrorisant peut être le but recherché par le terroriste, le but peut être plutôt de contraindre que d'intimider1(*)31.

      Enfin, il faut noter que de plus en plus, on assiste à un certain élargissement du dol spécial dans les conventions régionales. Celles-ci, il faut le dire, ajoutent trois finalités terroristes à celles précédemment étudiées. Il s'agit notamment de créer

      une situation de crise1(*)32, de créer une insurrection générale ou mettre en danger l'unité de l'Etat1(*)33, d'endommager l'environnement1(*)34.

      B- Les manifestations de l'intention spécifiquement terroriste 

      On peut observer que les actes de terrorisme consistent parfois dans des procédés criminels communs (tels que les assassinats), alors que d'autres procédés semblent plus exclusifs au terrorisme (attentats suicide, détournements d'avions par exemple). Ainsi, l'intention spécifique du terrorisme est inhérente à la nature (1) de

      certains actes, mais elle peut aussi ressortir du contexte (2) d'actes dont le caractère n'est pas avéré par leur nature1(*)35.

      (1)- Les actes terroristes par leur nature

      La nature de certains actes pourrait en révéler la finalité terroriste. Dans ces cas, il est inutile de prouver si l'auteur a recherché le résultat de semer la terreur, la nature de l'acte criminel en attestant déjà de la finalité terroriste. Peuvent être considérés prima facie comme actes terroristes par leur nature, ceux qui sont visés par les conventions universelles, de portée sectorielle, qui sont classiquement considérées comme antiterroriste. Ces conventions définiraient des infractions « purement objectives », sans exiger la recherche d'une intention spécifique. Le dol spécial serait ici inhérent au choix des modes opératoires considérés (utilisation des explosifs, prise d'otages...) ou des cibles (aéronefs, navires, personnes jouissant d'une protection internationale...). La difficulté, comme il a été souligné un peu plus haut, c'est que la plupart des conventions n'ont pas été rédigées spécifiquement pour lutter contre le terrorisme1(*)36.

      (2)- Les actes terroristes par leur contexte

      Certains actes dont la nature ne révèle pas la finalité terroriste recherchée par l'auteur peuvent aussi être considérés comme terroristes. Il le sont au regard de leur « contexte », selon les définitions de la Convention de 1999 précitée. Par exemple, un assassinat, l'attaque d'une installation publique ou un incendie volontaire peuvent relever du terrorisme, mais ici, l'intention spécifique du terrorisme n'est pas inhérente à l'acte et doit être établie au regard du contexte de la commission de l'acte. Mais, la définition du terrorisme par référence au contexte des actes est assez critiquable puisque la notion de contexte n'est pas définie, qu'aucune indication supplémentaire n'est apportée sur le sens et la portée du mot, qui est vague et incertain. Cette définition du terrorisme se révèle à l'analyse, teintée d'imprécisions, donc susceptible de générer des interprétations diverses, offrant ainsi une grande marge d'appréciation quant à son application. Ces développements montrent bien l'immensité de la difficulté qui réside dans l'entreprise de définition du terrorisme. Et la crise ivoirienne du 19 septembre 2002 pourrait en fournir des preuves éloquentes1(*)37.

      Cependant l'équarrissage ou le polissage de cette notion était nécessaire, tant il est vrai que l'un des plus grands drames de l'homme est d'être jugé sans lois1(*)38, sans règles précises. Au fond, tout ce déblayage aura permis, pour reprendre les termes du Doyen Jean-Marc SOREL, de trouver la « molécule »1(*)39 du terrorisme, sans d'ailleurs être certain que le vaccin éventuel qui pourrait couronner cette recherche se révèle efficace pour combattre le virus, tant ce dernier est multiforme, sournois et s'attaque à toutes les parties du corps international1(*)40. Car à l'évidence, le caractère peu tangible de la notion de terrorisme en droit international se présente à l'esprit, comme l'un des symptômes pathologiques les plus visibles caractéristiques de ce mal pernicieux, apparemment incurable et rebelle à tout remède, qu'il soit préventif ou curatif.

      PREMIERE PARTIE

      L'ENCADREMENT NORMATIF DE LA LUTTE CONTRE LE TERRORISME

      Le dispositif normatif de lutte antiterroriste a une double orientation : c'est un dispositif a priori, c'est-à-dire un dispositif orienté vers la prévention ( Chapitre 1 ) et a posteriori, c'est-à-dire un dispositif orienté vers la répression ( Chapitre 2 ).

      CHAPITRE I: LE DISPOSITIF PREVENTIF DE LUTTE

      ANTITERRORISTE

      Nous étudierons successivement les obligations internationales qui pèsent sur les Etats de prendre des mesures internes (Section 1) et les mesures de coopération qui lient les Etats entre eux (Section 2).

      Section 1 : Les obligations des Etats dans la prise

      de mesures internes

      On peut distinguer parmi les obligations pour les Etats de mettre en oeuvre des mesures internes, les obligations qui puisent leur source dans l'ordre international (Paragraphe 1), lesquelles sont complétées par celles découlant des conventions régionales (Paragraphe 2).

      Paragraphe 1 : Les obligations universelles

      Dans l'ordre international les obligations qui pèsent sur les Etats dans la prise des mesures internes afin de prévenir le terrorisme sont secrétées par les Conventions internationales (A) et certaines résolutions des Nations Unies dont notamment la Résolution 1373 (B).

      A- Les obligations conventionnelles de prendre des mesures

      internes 

      De ces obligations on peut distinguer les obligations préventives d'action (1) et les obligations préventives d'abstention (2).

      (1)- Les obligations préventives d'action

      (obligation de faire)

      Il semble que la première convention antiterroriste à traiter de la prévention du terrorisme de manière générale est la Convention de Montréal de 1971 pour la répression d'actes illicites dirigés contre la sécurité de l'aviation civile, dont l'article 10 paragraphe 1 est ainsi rédigé : « Les Etats contractants s'engagent, conformément au droit international et national, à s'efforcer de prendre les mesures raisonnables en vue de prévenir1(*)41 les infractions visées à l'art. 1er ». L'obligation de prévention est générale dans cette convention puisque les Etats doivent prendre les mesures nécessaires de prévention avant l'embarquement comme après, que l'aéronef soit en vol ou non. Nous notons l'utilisation ici de l'expression « mesures raisonnables » qui suppose un équilibre entre plusieurs intérêts. Les Etats doivent concilier certains impératifs, ce qui apparaît à la fois comme une garantie contre des mesures trop radicales et comme une manière de préserver les différences entre systèmes juridiques. Monsieur G.KYRIAKOPOULOS commente ainsi l'adjectif « raisonnable » en estimant, à la lumière de l'article 3 bis de la Convention de Chicago du 7 décembre 19441(*)42, que les mesures « (...) ne doivent pas être de nature à compromettre la vie des passagers et des membres de l'équipage ou la sécurité de l'aéronef concerné ( en ce qui concerne les mesures préventives au vol), ainsi que la santé des passagers et l'intégrité des bagages contrôlés (quant aux mesures de prévention appliquées au sol) »1(*)43. Ce traité parle de « prévention », de manière générale, mais ne contient aucune précision sur sa substance. Certains traités contiennent en revanche des obligations complémentaires en matière de prévention. Par exemple, l'article 4 de la Convention de New York sur la prévention et la répression des infractions contre les personnes jouissant d'une protection internationale y compris les agents diplomatiques énonce que « Les Etats parties collaborent à la prévention des infractions à l'article 2, notamment : - en prenant toutes les mesures possibles afin de prévenir la préparation, sur leurs territoires respectifs, de ces infractions destinées à être commises à l'intérieur ou en dehors de leur territoire ; - en échangeant des renseignements et en coordonnant les mesures administratives et autres à prendre, le cas échéant, afin de prévenir la perpétration de ces infractions ». Les obligations ainsi formulées souffrent à notre sens d'un trop grand laxisme dans la mesure où la disposition en elle-même manque de précision quant aux mesures à mettre en oeuvre. Les Etats bénéficieraient donc d'une grande marge de manoeuvre dans le choix des moyens à utiliser pour la prévention du terrorisme. C'est ce que semble traduire l'idée de « toutes les mesures possibles », nonobstant l'indication de quelques mesures telles l'échange de renseignements, la coordination de mesures administratives1(*)44... Enfin, il faut noter que la Convention de 1972 relative aux armes biologiques et celle de 1993 relative aux armes chimiques, bien que ne contenant aucune référence au terrorisme, sont des instruments importants de l'action préventive internationale contre ce crime1(*)45. La convention de 1972 a pour but d'interdire l'obtention d'armes bactériologiques et à toxines. Son article 4 engage les Etats parties « (...) à prendre, selon les procédures (...), les mesures nécessaires, pour interdire et empêcher la mise au point, la fabrication, le stockage, l'acquisition ou la conservation des agents, des toxines, des armes, des équipements et des vecteurs dont il est question dans l'article premier de la Convention sur le territoire d'un tel Etat, sous sa juridiction ou sous son contrôle en quelque lieu que ce soit ». Cette disposition, qui attend des Etats la mise en place d'un régime juridique interne approprié vise aussi bien la fabrication que l'acquisition d'armes biologiques dans la sphère de compétence des Etats parties. La Convention de 1993 sur les armes chimiques1(*)46 a une portée similaire à celle de 1972 pour ce qui est de l'interdiction de la fabrication, de l'acquisition et de la conservation d'armes chimiques. L'article 1 paragraphe 1 de cette convention interdit aux Etats parties, à l'instar de la Convention de 1972, de « (...) transférer directement ou indirectement, des armes chimiques à qui ce soit ». Son article VII paragraphe 1, qui régit les « mesures d'application nationales » et précise les interdictions, se lit comme suit : « Chaque Etat partie adopte, conformément aux procédures prévues par sa constitution les mesures nécessaires pour s'acquitter des obligations qu'il a contractées en vertu de la présente Convention. La convention oblige donc les Etats parties à modifier leur législation pénale nationale en vue d'interdire aux personnes tant physiques que morales d'entreprendre les activités interdites aux Etats, soit le développement, la production, l'acquisition, le stockage et les transferts d'armes chimiques.

      (2)- Les obligations préventives d'abstention

      (obligations de ne pas faire)

      Les obligations de ne pas faire se résument en l'interdiction faite à un Etat de ne soutenir en aucune manière le terrorisme, ce soutien pouvant être actif ou passif. Si la plupart des traités internationaux gardent le silence sur le soutien de l'Etat au terrorisme1(*)47, l'interdiction y est implicite puisque les Etats s'engagent à lutter contre le terrorisme. Toutes les conventions obligent les Etats parties à mettre en oeuvre des mesures de prévention et de répression et un Etat qui ne remplit pas ses obligations, par négligence, manque de volonté ou par simple choix délibéré devient laxiste à l'endroit des terroristes et leur confère ipso facto un soutien passif1(*)48. Cela est particulièrement patent en ce qui concerne l'obligation pour les Etats de prendre « toutes les mesures possibles » pour empêcher que leur territoire ne soit utilisé pour préparer des actes terroristes (destinés à être commis à l'intérieur ou à l'extérieur de leur territoire). Cette obligation conventionnelle de l'interdiction qui est faite aux Etats de soutenir le terrorisme, même passivement, trouve ses racines dans le principe exprimé par la maxime Sic utere tuo ut alienum non laedas. Selon ce principe général de droit international, un Etat voit sa liberté de conduire certaines activités, même non interdites, limitée par le droit des autres Etats de ne pas subir de préjudice1(*)49. Le devoir de vigilance ou de diligence (due diligence en anglais) qui en découle suppose donc qu'un Etat ne saurait tolérer sur son territoire des activités nuisibles pour les Etats1(*)50 ; il couvre par conséquent le refuge de terroristes sur le territoire d'un Etat et frappant à l'extérieur1(*)51. La CDI a ainsi qualifié de « bien établi » le principe de droit international « selon lequel tout Etat doit faire en sorte que son territoire ne soit pas utilisé pour la préparation d'infractions destinées à être commises dans d'autres Etats »1(*)52. A Ceci, il convient d'ajouter que la prévention du terrorisme doit aussi et nécessairement s'orienter vers la lutte contre les moyens de cette criminalité, notamment le financement des activités terroristes. Toutefois la convention générale de 1999 sur le financement du terrorisme porte non pas sur la prévention du terrorisme, mais plutôt sur la répression de son financement comme en témoigne son intitulé. Mais on peut le penser, cette solution imprime à la convention une ambition plutôt dissuasive, et on y voit incriminé toute forme de financement, cette notion y étant elle-même définie de manière très extensive1(*)53.

      B- Les obligations préventives de la Résolution 1373 des

      Nations Unies

      Adoptée après les attentats du 11 septembre 2001 contre les tours jumelles du World Trade Center, la Résolution 1373 (2001) des Nations Unies1(*)54 est un instrument de référence de lutte contre le terrorisme. Elle très édifiante en matière de prévention du terrorisme, et investit un champ de compétence assez élargi. Cette résolution réaffirme l'obligation qui pèse sur les Etats de s'abstenir de soutenir, de quelque manière que ce soit, toutes activités terroristes1(*)55. Aussi les Etats se voient-ils obligés d'interdire à « leurs nationaux ou à toute personne ou entité se trouvant sur leur territoire de mettre des fonds, avoirs financiers ou ressources économiques ou services financiers ou autres services connexes à la disposition, directement ou indirectement, de personnes qui commettent ou tentent de commettre des actes de terrorisme, les facilitent ou y participent, d'entités appartenant à ces personnes ou contrôlées, directement ou indirectement, par elles et de personnes et entités agissant au nom ou sur instruction de ces personnes »1(*)56. Elle impose également à tous les Etats d'« empêcher que ceux qui financent, organisent, facilitent ou commettent des actes de terrorisme n'utilisent leurs territoires respectifs pour commettre de tels actes contre d'autres Etats ou contre les citoyens de ces Etats (...) »1(*)57. Le Conseil de sécurité tire de cette obligation deux mesures corollaires ayant trait à l'infiltration et à la circulation d'éléments terroristes. Il s'agit notamment du refus d'accorder l'asile et le statut de réfugiés aux terroristes (1) et le contrôle aux frontières pour empêcher l'infiltration ces terroristes (2).

      (1)- Le refus d'accorder l'asile et le statut de

      réfugiés aux terroristes

      L'asile en droit international a été défini par l'Institut de droit international comme « (...) la protection qu'un Etat accorde sur son territoire ou dans un autre endroit relevant de certains de ses organes à un individu qui est venu la chercher »1(*)58. Cette protection contre les poursuites par un autre Etat peut être accordée souverainement par un Etat, dont la responsabilité internationale ne peut être engagée en principe : l'asile est une protection accordée dans des considérations d'humanité par un Etat à un individu ressortissant d'un autre Etat qui craint des persécutions. Dans son arrêt du 20 novembre 1950 en l'Affaire Droit d'asile, la CIJ avait présenté ainsi l'articulation du principe et de l'exception : « En principe donc l'asile ne peut être opposé à l'action de la justice. Il n'y a d'exception à ce principe que si, sous le couvert de la justice, l'arbitraire se substitue au règne de la loi ». Tel serait le cas si l'administration de la justice se trouvait viciée par des mesures clairement inspirées par l'esprit politique. L'asile protège le criminel politique contre toutes mesures que le pouvoir prendrait ou tenterait de prendre contre ses adversaires politiques et dont le caractère extralégal serait manifeste »1(*)59. L'asile est donc une exception au principe de la coopération en matière judiciaire liée au caractère discriminatoire des poursuites. La question connaît une acuité particulière en matière de crimes politiques. Il est en revanche reconnu que le droit d'asile ne peut être invoqué dans le cas des poursuites réellement fondées sur un crime de droit commun ou sur des agissements contraires aux buts et aux principes des Nations Unies1(*)60. Or de manière générale et abstraite, il ne fait désormais aucun doute que les actes terroristes sont contraires aux buts et principes des Nations Unies, puisqu'ils constituent une menace contre la paix et la sécurité internationales1(*)61. A cet égard, l'importante Déclaration contenue dans la Résolution 49/60 (9 décembre 1994) de l'AGNU le confirme. Selon le paragraphe 5 (f ), les Etats « doivent également remplir les obligations que leur imposent la Charte des Nations Unies et d'autres dispositions du droit international dans la lutte contre le terrorisme (...) dont celle de prendre les mesures voulues, avant d'accorder l'asile, pour s'assurer que le demandeur d'asile n'a pas eu d'activité terroristes et, après avoir accordé l'asile, pour s'assurer que le statut de réfugié n'est pas mis à profit pour contrevenir aux dispositions de l'alinéa a) ci-dessus »1(*)62. Nous pouvons conclure de cette formulation et en particulier de l'emploi du mot « obligation » que la norme a une portée coutumière1(*)63. L'exception terroriste à l'asile et au statut de réfugié relève donc certainement du droit international général1(*)64. Il n'est donc pas surprenant que la Résolution 1373 impose aux Etats en son paragraphe 2 (c) de ne pas accorder l'asile aux terroristes et à leurs soutiens : les Etats « refusent de donner l'asile à ceux qui financent, organisent, appuient ou commettent des actes de terrorisme ou recèlent les auteurs ». Un Etat pourrait voir sa responsabilité internationale engagée pour avoir accordé l'asile en méconnaissance de cette disposition. Ainsi, la mise en oeuvre de cette obligation suppose en principe l'identification des personnes impliquées dans le terrorisme et une procédure de vérification pour chaque demandeur d'asile ou jouissant de l'asile.

      2- Les contrôles aux frontières pour empêcher

      l'infiltration des terroristes

      La Résolution 1373 contient par ailleurs une autre obligation, celle de ne pas laisser son territoire être utilisé par les terroristes. Il s'agit de l'obligation d'exercer un contrôle aux frontières et un contrôle des documents de voyage. Le paragraphe 2 (g) de la résolution est ainsi formulé : les Etats « empêchent les mouvements de terroristes ou de groupes de terroristes en instituant des contrôles efficaces aux frontières, ainsi que des contrôles lors de la délivrance de documents d'identité et de documents de voyage et en prenant des mesures pour empêcher la contrefaçon, la falsification ou l'usage frauduleux de papiers d'identité et de documents de voyage ». Le Conseil de sécurité ne faisait que rappeler la nécessité du renforcement d'un tel contrôle. Cette attitude ne peut être interprétée pour autant comme une immixtion dans les « affaires qui relèvent essentiellement de la compétence nationale d'un Etat »  selon les propres termes de l'article 2 paragraphe 7 de la Charte des Nations Unies1(*)65. En effet, en agissant ainsi, l'organe sécuritaire ne s'écarte pas de la légalité, puisque le même article l'y autorise pour les besoins du maintien de la paix1(*)66. Ainsi que le concluent les Professeurs Alain PELLET et Patrick DAILLIER, « (...) dans l'intérêt général, exprimé par le Conseil de sécurité, les souverainetés étatiques doivent s'incliner devant les exigences du maintien de la paix »1(*)67. Ajoutons enfin que la Résolution 1373 n'est cependant pas complètement innovante puisque en la matière des obligations équivalentes figurent déjà dans certaines Conventions régionales.

      Paragraphe 2 : Les mesures complémentaires des

      conventions régionales

      Avant d'exposer les mesures préventives des conventions régionales, quelques précisions méritent d'être faites. Contrairement aux conventions internationales qui ont une vision sectorielle, fractionnelle ou fragmentaire du terrorisme, les conventions régionales appréhende le phénomène à travers une approche globale ou générale. On analysera successivement, de façon arbitraire, pour les besoins de l'étude, les mesures préventives de la Convention africaine (A) et celles de la Convention européenne (B).

      A- Les mesures préventives de la Convention africaine

      L'Afrique n'est pas épargnée par le terrorisme. Les évènements survenus en août 1998 avec la tentative de destruction des ambassades des Etats-Unis d'Amérique à Nairobi, ont montré l'ampleur du phénomène, son caractère pernicieux et dévastateur. Ce fléau en rajoute aux difficultés aiguës1(*)68 que connaît le continent noir, lesquelles le maintiennent implacablement dans le sous développement. La menace à la paix et à la stabilité que représente le terrorisme commande des actions concertées et conjointes, des ajustements et réformes législatifs et une harmonisation des procédures. C'est, de ces impératifs que procèdent l'élaboration et la mise en oeuvre de la Convection de l'OUA sur la prévention et la lutte contre le terrorisme, adoptée à Alger le 14 juillet et entrée en vigueur le 6 décembre 20021(*)69. La convention africaine fait apparaître en filigrane l'opposition tranchée entre les pays du Sud et ceux du Nord au sujet de l'exclusion des actes des mouvements de libération nationale des actes de terrorisme. En effet, son préambule réaffirme « le droit légitime des peuples à l'autodétermination et à l'indépendance »1(*)70. Il est à noter que l'intitulé même de cette convention entretient une certaine ambiguïté, puisqu'elle semble faire la part des choses entre prévention et lutte contre le terrorisme. Or, il ne fait aucun doute que la prévention participe de la lutte contre le terrorisme. Il faut peut être comprendre cette formulation comme une insistance toute particulière sur l'aspect préventif de la lutte. Des similitudes se dégagent entre la convention africaine, la Convention de la Ligue arabe1(*)71 et la Convention de l'Organisation de la Conférence islamique1(*)72. Elles obligent d'abord les Etats parties à renforcer la protection et la sécurité de personnalités, missions diplomatiques ou consulaires ou organisations internationales1(*)73. Cette obligation tient compte de leur qualité de cibles privilégiées, qui supposent logiquement une protection spéciale. Celles-ci emboîtent ainsi le pas à la Convention de New York de 1973 sur la prévention et la répression des infractions contre les personnes jouissant d'une protection internationale, y compris les agents diplomatiques. Au titre de ces dispositions, les Etats se doivent de prendre toutes les mesures afin d'empêcher que des actes terroristes soient commis sur leur territoires contre des personnalités d'autres Etats. Cette obligation trouve son fondement dans l'obligation générale de vigilance (due vigilance)1(*)74 visant pour un Etat à protéger les droits des autres Etats sur son territoire. Ces obligations supposent des mesures appropriées aux situations et aux risques, et la protection attendue des missions diplomatiques ou consulaires ou des organisations internationales est clairement renforcée de par leur nature de cible potentielle. Les trois textes régionaux obligent ensuite les Etats parties à traiter les données relatives au terrorisme1(*)75. Ils envisagent la création de bases de données nationales en vue de la collecte et de l'analyse des renseignements relatifs aux « éléments, groupes, mouvements et organisations terroristes ». Une des finalités de ce traitement systématique des données pertinentes est l'échange d'informations entre Etats. Les traités africain, arabe et islamique prévoient enfin que les Etats doivent établir des liens de coopération entre services nationaux de sécurité et les citoyens pour les « sensibiliser » et les encourager à livrer des renseignements1(*)76.

      B- Les mesures préventives de la convention européenne

      La Convention européenne pour la prévention du terrorisme adoptée le 16 mai 2005, à Varsovie, dans le cadre du Conseil de l'Europe, engage les Etats-parties à mettre en oeuvre des politiques nationales en vue de prévenir les infractions terroristes et leurs effets négatifs. Ces politiques nationales sont complexes et portent sur quatre aspects disparates. Il s'agit notamment de : - la formation, la culture, l'information, les médias et la sensibilisation du public1(*)77 : chaque Etat est laissé libre de définir les modalités de mise en oeuvre de cette disposition, mais il est précisé que les mesures préventives adoptées par les Etats doivent garantir le respect des droits de l'homme1(*)78.

      - La coopération entre les autorités nationales1(*)79 : cette coopération porte notamment sur l'échange d'informations, le renforcement de la protection des personnes et des infrastructures ainsi que l'amélioration « des plans de formation et de coordination pour des situations de crise . Cette disposition porte ainsi tant sur la prévention des actes terroristes que sur la lutte contre leurs effets.

      - La promotion de la tolérance1(*)80 : les Etats sont tenus d'encourager « le dialogue inter religieux et transculturel, en impliquant, le cas échéant, des ONG et d'autres acteurs de la société civile à participer, en vue de prévenir les tensions qui pourraient contribuer à la commission d'infractions terroristes ».

      - La coopération des citoyens avec les autorités compétentes1(*)81 : les Etats doivent « mieux sensibiliser le public à l'existence, aux causes, à la gravité et à la menace que représentent les infractions terroristes et « envisager d'encourager le public à fournir aux autorités compétentes une aide factuelle et spécifique, qui pourrait contribuer à la prévention des infractions terroristes (...) ».

      Si la Convention européenne de 2005 apparaît originale concernant les mesures des paragraphes 1 et 3 de l'article 3, on constate que, s'agissant de la coopération entre autorités nationales et de la coopération des citoyens avec les autorités, ce traité recoupe certaines mesures des conventions de la ligue arabe, de l'OCI et de l'OUA, comme pour les trois autres conventions, dans la « dénonciation » et la fourniture de renseignements.

      Au-delà de l'obligation faite aux Etats de prendre des mesures internes afin de prévenir le terrorisme dans ces différentes manifestations, la nécessité d'une coopération s'est aussi imposée.

      Section 2 : Les obligations de coopération des Etats aux

      fins de prévention

      La dimension internationale du terrorisme contemporain a révélé au grand jour l'importance de la coopération en matière de prévention, tant et si bien que ce vocable en est devenu le maître mot1(*)82. La coopération des Etats aux fins de coopération emprunte diverses voies, dont deux classiquement identifiées. Les Etats peuvent coopérer directement entre eux selon le modèle relationnel (Paragraphe 1). La coopération peut aussi être institutionnalisée, c'est-à-dire organisée au sein des organisations internationales (Paragraphe 2).

      Paragraphe 1 : La coopération préventive inter étatique

      selon le modèle relationnel

      La coopération préventive inter étatique en matière de lutte contre le terrorisme est adossée à une obligation majeure, celle d'échanger des renseignements (A), laquelle cohabite avec d'autres mesures de coopérations (B). Il convient donc de les examiner les unes après les autres.

      A- L'obligation d'échanger des renseignements

      Les conventions antiterroristes traitant de la prévention du terrorisme contiennent toutes l'obligation d'échanger des renseignements. Cette obligation constitue à n'en point douter le moyen principal privilégié de collaboration aux fins de prévention, ainsi que l'a souligné la Résolution 49/60 de l'AGNU1(*)83. D'ailleurs, l'AGNU considère l'échange de renseignements comme une obligation de droit international général puisque, par une formulation elle « (...) demande instamment à tous les Etats de se conformer aux obligations que leur impose le droit international (...) dont coopérer entre eux en échangeant des informations relatives à la lutte contre le terrorisme et à sa prévention »1(*)84. Dans leur grande majorité, les obligations d'échanger des renseignements à titre préventif sont rédigées avec une grande simplicité, à l'image de la Convention de 1973 sur la prévention et la répression des infractions contre les personnes jouissant d'une protection internationale, y compris les agents diplomatiques, dont l'article 4 se lit, pour ce qui nous intéresse comme suit : « Les Etats parties collaborent à la prévention des infractions (...) en échangeant des renseignements (...) ». Cette simplicité confère un caractère très général à l'obligation, dont l'exécution n'est liée à aucune condition, aucune situation. De plus la nature des informations est laissée à l'entière discrétion des Etats. Il est dès lors difficile d'apprécier le respect de cette disposition par les Etats parties, mais tout au plus peut-on affirmer que l'Etat qui ne fournit pas de renseignements aux fins de prévention la viole. Encore cela suppose-t-il que l'Etat ait des renseignements à communiquer, ce qui est bien difficile à prouver. La Convention de l'OMI sur la sécurité maritime de 19881(*)85, la Convention de 1997 sur les attentats terroristes à l'explosif et la Convention de 2005 sur le terrorisme nucléaire reprennent à leur compte cette disposition avec quelques aménagements pour les deux dernières citées1(*)86.

      Les Etats peuvent en outre être liés par une obligation nettement plus précise de transmission préventive de renseignements, celle d'alerter les autres de la préparation d'un attentat. C'est l'obligation d'alerte. Elle est insérée dans la Convention de Montréal de 1971 sur la sécurité aérienne dont l'article 12 prévoit que : « Tout Etat contractant qui a lieu de croire que l'une des infractions prévues à l'article 1er sera commise fournit, en conformité avec les dispositions de sa législation nationale, tous renseignements utiles en sa possession aux Etats... ». Cette obligation pèse sur les Etats qui ont connaissance d'un projet d'attentat concernant un autre Etat. La disposition a été reprise à l'article 14 de la Convention de 1988 sur la sécurité maritime et, plus récemment, la Convention de 2005 sur la répression des actes de terrorisme nucléaire a aussi inclus une disposition relative à l'alerte. L'article 7 paragraphe 1 (b) de ce traité, relatif à l'échange de renseignements, prévoit qu' « en particulier, tout Etat Partie fait le nécessaire pour informer sans délai les autres Etats (...) de toute infraction visée à l'article 2 et de tous préparatifs de telles infractions dont il aurait eu connaissance, ainsi que pour en informer, le cas échéant, les organisations internationales ». Dans la Résolution 1373 (2001), le Conseil de sécurité a enfin décidé que les Etats « prennent les mesures voulues pour empêcher que les actes de terrorisme ne soient commis, notamment en assurant l'alerte rapide d'autres Etats par l'échange de renseignements »1(*)87.

      B- Les autres mesures de coopération

      L'obligation d'échanger des renseignements aux fins de prévention du terrorisme est accompagnée, dans les traités antiterroristes, de l'obligation générale sinon abstraite de prendre d'autres mesures de collaboration. Les conventions ajoutent ainsi à l'obligation d'échanger des renseignements, celle de « (...) coordonner les mesures administratives et autres à prendre, le cas échéant, afin de prévenir la perpétration de ces infractions ». La remarque d'ordre général qui s'impose à leur lecture est que, en ce domaine, les Etats conservent une grande marge de manoeuvre et restent libres dans le choix des mesures à prendre, puisque les traités ne précisent pas la nature des mesures à prendre. Ainsi, la CDI commentant un projet d'article relatif à la Convention de New York (1973) sur la prévention et la répression des infractions contre les personnes jouissant d'une protection internationale, y compris les agents diplomatiques, explique que : « (...) l'article se borne à énoncer le principe général et n'entre pas dans le détail du mode d'exécution et des obligations imposées. La nature et la portée (...) des mesures administratives (...) devraient être déterminées par les Etats sur la base de leur propre expérience et de leurs propres besoins. Elles comporteraient naturellement aussi bien une action policière qu'une action judiciaire, selon les exigences variables des circonstances »1(*)88. Le contenu de l'obligation est donc particulièrement flou, la disposition étant rédigée en termes très généraux. L'utilisation de la mention « le cas échéant » confère un caractère assez contingent à l'obligation et la mention est susceptible d'interprétations divergentes de la part des Etats parties. Au-delà de l'obligation de coordonner des mesures administratives ou autres, les conventions régionales prévoient d'autres mesures moins précises qu'on pourrait qualifiées de « fourre-tout ». On relève par exemple que les Conventions de la Ligue arabe et de l'OCI se bornent simplement à imposer aux Etats de « coopérer et coordonner l'action entre les pays contractants, notamment ceux qui sont voisins et qui pâtissent des crimes terroristes, de façon similaire ou commune »1(*)89 On note le silence de la disposition quant à la nature des mesures à mettre en oeuvre. La convention de l'OUA présente, quant à elle, une formulation particulièrement souple : « Les Etats membres s'engagent (...) à encourager la coopération entre les organes chargés d'appliquer la loi en matière de détection et de prévention en matière des actes terroristes »1(*)90. On constate ici que les Etats s'engagent non pas à coopérer mais à encourager la coopération.

      Paragraphe 2 : La coopération préventive institutionnalisée

      Nous nous intéresserons ici à l'action opérationnelle des organisations internationales (A), mais aussi au renforcement des capacités Etats en matière de lutte préventive (B).

      A- La coopération préventive des organisations internationales

      La lutte contre le terrorisme est une tâche pour laquelle la coopération entre organisations internationales apparaît de plus en plus développée. On constate une coopération croissante entre les organisations du système des Nations Unies, ainsi qu'à d'autres niveaux, par exemple entre l' OTAN et l'Union européenne. La collaboration de nombreuses organisations internationales avec le Comité de lutte Contre le Terrorisme (CCT) des Nations Unies est notamment remarquable, celui-ci jouant un rôle de coordination de l'action des institutions internationales dans la lutte contre le terrorisme1(*)91. Ainsi, le texte issu de la réunion spéciale du CCT avec cinquante-sept organisations internationales et régionales le 6 mars 2003 a défini une « approche coordonnée » fondée sur la complémentarité de l'action des organisations internationales pour éviter «  les doubles emplois et le gaspillage des ressources » et l'effort indépendant par lequel « dans la structure de coordination globale, chaque organisation poursuivra son mandat et ses initiatives propres avec plus de rigueur »1(*)92. Une structure d'action concertée ambitieuse, menée par le CCT, se dessine donc. L'action des organisations internationales pour la prévention du terrorisme embrasse diverses activités. Nous avons vu précédemment que les conventions antiterroristes imposent aux Etats d'échanger mutuellement des informations aux fins de prévenir la réalisation d'actes terroristes. L'échange d'informations peut aussi passer par la voie institutionnelle. Plusieurs organisations internationales sont compétentes en ce domaine et assurent une centralisation et une diffusion de données pertinentes. La principale d'entre elles est sans conteste l'Organisation Internationale Police Criminelle OIPC-Interpol. Le but de cet organe est « d'assurer et de développer l'assistance réciproque la plus large de toutes les autorités de police criminelle, dans le cadre des lois existant dans les différents »1(*)93. Si les membres de cette instance sont des organismes officiels de police désignés par leur pays, il faut toutefois préciser que, contrairement à une idée répandue, il ne s'agit pas d'une force de police internationale. Interpol n'exerce en soi aucune fonction opérationnelle de police et ne peut, par exemple, conduire une enquête ou arrêter des individus. Il s'agit principalement d'un forum institutionnalisé d'échange de renseignements. Ainsi, « tous les actes de coopération policière internationale sont accomplis par des policiers nationaux agissant sur leur propre territoire et dans le cadre de leur législation »1(*)94. Interpol qui est une organisation sui generis1(*)95, jouissant de la personnalité juridique à laquelle le Conseil économique et social de l'ONU a reconnu en 1971 la qualité d'organisation internationale1(*)96, n'est pas compétente pour connaître des infractions de caractère politique1(*)97, ce qui l'a empêchée de connaître pendant longtemps des actes de terrorisme1(*)98. L'OIPC face à l'ampleur du phénomène terroriste a toutefois estimé que les crimes « inacceptables » ne sauraient êtres considérés comme politiques, quel qu'en soit leur mobile. Cette volonté manifeste d'estomper le fléau, à tout le moins d'en amoindrir les effets, s'est traduite par l'adoption de deux résolutions dans lesquelles, l'institution a réaffirmé la nécessité de le combattre1(*)99. L'OIPC, on peut l'affirmer, est compétente en matière de terrorisme, puisque l'article 3 de son Statut qui exclut de son champ de compétence les crimes politiques, semble ne pas viser les actes terroristes. Concrètement l'OIPC-Interpol cumule les fonctions d'échange d'informations, ce qui constitue l'activité principale de coopération centralisée, et d'analyses de données pour dégager des évaluations des menaces régionales ou globales, des tendances du terrorisme et de ses modes opératoires. D'autres organisations internationales permettent aussi l'échange d'informations entre Etats membres. A cette fin, l'Union européenne s'est dotées de l'Office européen de police criminelle (Europol), créé par une convention internationale2(*)00 et effectif depuis le 1er juillet 1999. Europol, dont la compétence s'étend au terrorisme2(*)01, a pour fonction principale l'échange d'informations2(*)02 et la convention prévoit la création d'un « système d'informations » de centralisation et diffusion des renseignements2(*)03. L'OTAN a quant à elle spécialement créé une « Unité de renseignement sur la menace terroriste » au lendemain du 11 septembre 2001, qui est devenue permanente à la fin de 20032(*)04. On peut encore citer le Centre africain d'études et de recherche sur le terrorisme (CAERT) de l'Union africaine dont l'une des premières missions est l'échange de renseignements opérationnel entre Etats membres2(*)05... A côté des activités ayant pour objet essentiel de prévenir le terrorisme, d'autres actions peuvent participer à la prévention de manière incidente ou intégrer une dimension préventive sans que cela soit forcément leur but premier. Ainsi d'une manière générale, les opérations de maintien de paix peuvent intégrer une dimension opérationnelle de prévention2(*)06. La KFOR (la force militaire de l'OTAN) a ainsi mené en République fédérale de Yougoslavie des activités sécuritaires qui relèvent de la prévention du terrorisme22(*)07. La police de la MINUK, outre ses fonctions de maintien de l'ordre public, a fourni une formation et des conseils en vue de la création d'une force de police au Kosovo. La MINUK a aussi promulgué des législations contre la criminalité organisée et le terrorisme2(*)08. Enfin, bien que cette liste ne soit pas exhaustive, il convient de terminer tout en rappelant le rôle essentiel de l'Agence Internationale de l'Energie Atomique (AIEA) dont les activités de protection ou de contrôle de matières sensibles et de détection des trafics, telles que les matières nucléaires ou radioactives participent à n'en point douter à la prévention du terrorisme, plus précisément du terrorisme nucléaire2(*)09. La coopération préventive institutionnalisée sera plus efficace si elle est accompagnée de mesures visant à renforcer les capacités des Etats.

      B- Le renforcement des capacités des Etats aux fins de

      prévention

      Le renforcement de l'aptitude des Etats à lutter contre le terrorisme repose à titre principal sur l'assistance technique qui peut leur être apportée dans le perfectionnement de leur législation et le renforcement de leurs capacités. Le Conseil de sécurité et l'Assemblée générale ont particulièrement insisté sur cet aspect de la lutte. Dans la déclaration visant à compléter la résolution 1373 (2001) adoptée dans la résolution 1456 (2006), le Conseil a affirmé que les Etats « doivent s'entraider pour renforcer leur capacité de lutte contre le terrorisme et prévenir les actes de terrorisme ; le Conseil note qu'une telle coopération facilitera l'application prompte et intégrale de la résolution 1373 (2001) et invite le Comité contre le terrorisme (CCT) à redoubler d'efforts pour faciliter cette assistance, notamment dans le domaine technique, en définissant, dans ce domaine, des objectifs et priorités de portée mondiale »2(*)10. Il s'agit certes de coopération internationale, mais l'objectif est clairement de renforcer l'aptitude de chaque Etat à lutter contre le terrorisme. Ainsi, le Comité contre le terrorisme créé par la Résolution 1373 (2001) joue un rôle cardinal en matière d'assistance technique dans la lutte contre le terrorisme en ce qu'il contribue à l'octroi de cette assistance technique, sans toutefois la fournir directement. Précisons que le CCT ne fournit pas lui-même l'assistance aux Etats ou organisations internationales, mais il dispose à cette fin d'une équipe d'assistance technique qui coordonne l'assistance en proposant une grille des requêtes d'assistance, permettant d'évaluer les besoins d'assistance en vue de l'application de la Résolution 1373, et des informations sur les programmes d'assistance technique dont elle a connaissance. Le CCT apparaît ainsi comme une plate-forme de coordination et de centralisation de l'assistance technique et travaille de ce fait en étroite collaboration avec l'Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC). L'ONUDC quant à lui assiste les Etats dans l'élaboration de leur législation antiterroriste et la mise en oeuvre des obligations internationales2(*)11. Au plan régional, le Protocole de 2004 à la Convention de l'OUA de 1999 sur la lutte contre le terrorisme, donne pour mission au commissaire chargé des questions de paix et de sécurité de la Commission de l'Union africaine, aidé par le CAERT (Centre africain d'études et de recherche sur le terrorisme), de « fournir l'assistance technique concernant les questions juridiques et l'application de la loi, y compris les questions relatives à la lutte contre le financement du terrorisme, la préparation de législations et de lignes directrices types afin d'aider les Etats membres à formuler des législations et autres mesures connexes de préventions et de lutte contre le terrorisme »2(*)12.

      Nous refermons ainsi cette page qui a servi à analyser sommairement les règles relatives à la prévention du terrorisme, pour en ouvrir une autre qui servira cette fois-ci à examiner celles relatives à la répression du terrorisme.

      Chapitre II : Le dispositif répressif de lutte

      antiterroriste

      Par opposition aux mesures préventives qui interviennent en amont, c'est-à-dire bien avant la commission des actes terroristes, les mesures répressives sont destinées à punir. L'observation de la pratique montre que les Etats utilisent une panoplie très diversifiées de mesures destinées soit à donner une riposte appropriée à une agression armée caractérisée soit à exercer des pressions sur d'autres Etats, lesquelles sont loin d'être constituées par des moyens militaires ; le point commun de ces mesures, c'est qu'elles sont toujours présentées par les Etats comme une réponse au comportement illicite de l'Etat contre lequel elles sont dirigées. Selon les circonstances de leur adoption, et leurs caractères, ces réactions constituent des actes de contrainte (qu'elle soit armée ou non) ou des « sanctions »2(*)13 (A). Et, dans cette phase répressive, il n'est pas n'exclu la possibilité de recourir à la sanction pénale pour punir les criminels (B).

      Section 1 : Les mesures de contrainte applicables au

      terrorisme

      Le système de sécurité des Nations Unies est adossé a une gamme variée de mesures répressives applicables au terrorisme. Ces mesures vont de la mesure la plus punitive, les mesures les plus radicales, qui font appellent à des moyens militaires (Paragraphe 1), aux mesures les moins sévères de coercition, de contrainte destinées à faire pression sur un Etat indélicat pour l'amener à renoncer à son comportement illicite. Ces dernières ont ceci de particulier, qu'elles se juxtaposent au cadre onusien, mais font l'objet d'une reconnaissance par le droit international (Paragraphe 2).

      Paragraphe 1 : Les mesures de contrainte militaire en

      réaction au terrorisme

      Nous entendons par mesures de contrainte2(*)14 militaires toutes mesures utilisant des moyens militaires y compris l'usage de la force armée. A priori, la force et le droit sont inconciliables puisque, de manière générale, le droit interdit le recours à la force et que de manière plus particulière, le système international de sécurité collective est fondé sur l'interdiction du recours à la force, même si dans les faits les conflits armés restent omniprésents. Mais en réalité, le droit et la force sont indissociables puisque non seulement le respect du droit est assuré par la contrainte mais encore le droit est, tout au moins en partie, l'expression à un moment donné de rapports de force. Les liaisons dangereuses entretenues par la force et le droit ont retenu l'attention des philosophes, des juristes de droit interne et de droit international2(*)15. Jusqu'au début du vingtième siècle, le recours à la force était considéré comme le mode de régulation des rapports inter étatiques, l'usage de la force constituant un attribut de la souveraineté des Etats2(*)16. Mais la nécessité de vivre dans une société solidaire de paix et de démocratie, dans laquelle la valeur de la vie humaine pourrait être reconnue et protégée, s'est imposée comme un idéal. Ainsi la licéité du recours à la force a progressivement cédé le pas à l'interdiction du recours à la force dans les relations inter étatiques2(*)17. La prohibition du recours à la force, sorte de révolution copernicienne en droit2(*)18, va connaître un réel épanouissement, une généralisation avec la Charte des Nations Unies2(*)19. Mais, faut-il le préciser, ce principe d'interdiction du recours à la force n'a qu'un caractère relatif dans la mesure où la Charte légalise ses exceptions2(*)20 au nombre desquelles, la possibilité d'agir en légitime défense (A). C'est donc principalement sous l'angle de cette institution que les Nations Unies entendent réprimer toute agression armée, non sans poser de sérieux problèmes relativement à l'applicabilité ou à l'extension de cette mesure au terrorisme. Il faut ajouter à cette contrainte armée, les mesures militaires de l'article 42 de la Charte des Nations Unies (B).

      A- L'usage de la force armée au titre de la légitime défense
      (article 51 de la Charte des Nations Unies)

      La notion de « légitime défense » a de l'importance dans les communautés juridiques où la protection du droit (entendez droit objectif) et des droits (entendez droits subjectifs) est une fonction exclusive d'organes appropriés et où il est interdit aux membres de ces communautés de se faire justice eux-mêmes. Cette institution apparaît alors comme une exception vivante de l'exclusion du recours à la justice privée, à la force dans le commerce juridique, là où le droit est amené à reconnaître et à régler bien parfois la question de l'autoprotection des sujets2(*)21. C'est d'une façon générale le cas dans les relations internationales où un sujet de droit international, notamment un Etat, peut être victime d'une agression armée. Il est alors tentant de se demander ce qui pourrait advenir en pareille occurrence, en terme de réaction de la part de la victime. La réponse à cette interrogation nous est fournie par les termes de l'article 51 de la Charte des Nations Unies2(*)22 qui fait de la légitime défense un droit naturelou inhérent (dans la version anglaise). La victime d'une attaque est donc fondée à réagir tout naturellement sur la base de la légitime défense en guise de riposte. Cet article permet l'emploi de la force armée seulement en réaction à une agression armée et à condition que soient observées les normes de procédure qui prescrivent que le Conseil de sécurité soit « immédiatement » informé de l'action armée en légitime défense. Il apparaît donc clairement que la condition de fond de mise en oeuvre de la légitime défense est la constatation d'une « agression armée » (armed attack » dans la version anglaise), c'est-à-dire le recours à la force armée d'un type caractérisé. L'utilisation de la contrainte physique est donc exigée, excluant la controverse sur l'agression idéologique ou économique2(*)23. L'article 51 semble en outre imposer que l'agression soit réalisée, c'est-à-dire qu'il ne couvre a priori pas la menace d'agression. La difficulté réside dans le fait que la notion d'agression elle-même n'est pas définie dans la Charte, bien qu'elle s'y trouve employée à plusieurs reprises. Une définition nous est, en revanche, fournie par l'AGNU dans sa Résolution 3314 (XXXIX), adoptée par consensus le 14 décembre 1974. L'article 1er prévoit que l'agression « (...) est l'emploi de la force armée par un Etat contre la souveraineté, l'intégrité territoriale ou l'indépendance politique d'un autre Etat2(*)24, ou de tout autre manière incompatible avec la Charte des Nations Unies (...) »2(*)25. De façon stricte l'agression armée est donc le fait d'un Etat contre un autre Etat2(*)26, et la légitime défense apparaît comme relevant d'un rapport interétatique. Cette solution trouve une confirmation dans un avis récent de la CIJ d'un intérêt très particulier pour notre étude, en ce qu'il concerne des actes terroristes : « L'article 51 de la Charte reconnaît ainsi l'existence d'un droit naturel de légitime défense en cas d'agression armée par un Etat contre un autre Etat (...) »2(*)27. Il s'ensuit logiquement qu'un acte de terrorisme, quelle qu'en soit la gravité, ne saurait en principe, selon la théorie classique, déclencher la légitime défense, à moins d'être directement imputable à un Etat. La condition de procédure tient, quant à elle, à l'obligation d'informer « immédiatement » le Conseil de sécurité. L'information du conseil de sécurité qui ne peut s'analyser en une demande d'autorisation préalable, s'expliquerait par la préférence pour une réponse multilatérale institutionnalisée à la réaction unilatérale décentralisée de l'Etat victime de l'agression2(*)28. La lecture de l'article 51 de la Charte donne à constater que la réaction en situation de légitime est rigoureusement enfermée dans des limites de deux ordres : temporel et matériel. Ratione temporis, il ne fait l'ombre d'aucun doute que la légitime défense ne peut être mise en oeuvre, en principe, qu'à partir du moment de la réalisation de l'agression armée2(*)29. On peut le noter, elle a un caractère provisoire et subsidiaire dans la mesure où son maintien n'est en réalité subordonné qu'à l'impossibilité pour le Conseil de sécurité de prendre les mesures qui lui semblent nécessaires aux fins de rétablissement de la paix et de la sécurité internationales. Autrement dit, un Etat est en situation de légitime défense « jusqu'à ce que le Conseil de sécurité ait pris les mesures nécessaires pour maintenir la paix et la sécurité internationales ». Ce qui signifie a contrario, que la réaction en légitime défense doit normalement s'estomper si le Conseil de sécurité décide de régler lui même, de quelque manière qu'il juge nécessaire le problème. La clarté de la mention n'occulte pas cependant les difficultés d'interprétation de l'expression « mesures nécessaires ». Que faut-il entendre par « mesures nécessaires » ?, ou plutôt dans quelle mesure le Conseil prend-il des mesures « nécessaires » ?. Toutes les mesures qu'il peut adopter sont considérées comme nécessaires, ou cela doit-il s'apprécier dans chaque espèce ? Toutes ces interrogations se justifient au regard de la réaction américaine aux attentats du 11 septembre 2001. En effet, on se souvient que les mesures américaines mises en oeuvre au titre de la légitime défense n'ont pas été levées malgré la Résolution 1373 (2001) du Conseil de sécurité, adoptée sous le Chapitre VII et imposant de strictes obligations aux Etats pour lutter contre les terroristes coupables. Ces mesures, pour nécessaires qu'elles étaient, paraissaient suffisantes2(*)30 pour interrompre les droits des Etats-Unis d'Amérique de recourir à la force armée en Afghanistan ? Pourtant le Conseil de sécurité y « réaffirmant le droit naturel de légitime défense (...) » dans le préambule2(*)31, celui-ci semble ne pas avoir suspendu le droit de légitime défense nonobstant l'adoption de mesures d'une portée juridique certaine. On peut le penser, il y a ici une juxtaposition de deux catégories de mesures différentes, la légitime défense d'une part, et d'autre part les  mesures nécessaires prises dans le cadre de la monumentale Résolution 1373. Cette situation a d'ailleurs été dénoncée par Monsieur Luigi CONDORELLI qui estime qu'« (...) il y a simultanément prise de mesures par le Conseil et reconnaissance de la persistance du droit de légitime défense » ce qui constitue une « anomalie »2(*)32 évidente. De plus, il est à noter que les opérations militaires américaines se sont poursuivies en Afghanistan même après l'adoption par le Conseil de sécurité des résolutions 1368 (2001) et 1390 (2002), cette dernière Ayant pourtant mis en place une opération de maintien de la paix2(*)33.

      Ratione materiae la réaction en légitime défense est sujette à deux autres limites : il s'agit de la nécessité de la réaction et de sa proportionnalité2(*)34. En vertu du critère de nécessité, l'emploi de la force armée ne doit être justifié que par la nécessité pour l'Etat de se protéger. En effet, l'agression armée est une violation manifeste et caractérisée des droits souverains de la victime, laquelle en ayant recours à la légitime défense, ne fait rien d'autre que d'agir pour la réalisation de ses droits. Ceci implique qu'une fois l'agression armée repoussée, la légitime défense tombe en caducité, elle doit donc cesser d'exister. En conséquence, la victime de l'agression ne doit pas occuper le territoire de l'agresseur, à moins que cela ne soit strictement nécessaire pour l'empêcher de continuer l'agression avec d'autres moyens, en tout cas jusqu'à ce que cesse un tel danger imminent et grave. Ainsi pour Monsieur Antonio CASSESE, l'article 51 de la Charte ne permet pas une action militaire qui aille au-delà de ce qui est nécessaire pour repousser l'agression2(*)35 ; il s'agirait donc ici d'une interdiction implicite qui est faite à l'agressé, d'occuper militairement et de façon prolongée le territoire de l'agresseur, a fortiori de l'annexer2(*)36. En vertu du critère de proportionnalité, les mesures de l'Etat victime d'une agression ne doivent pas être disproportionnées, car la légitime défense ne relève pas d'une logique de vengeance mais d'ultime protection. La légitime défense apparaîtra alors ici, rarement comme un droit que possède « naturellement » l'Etat pour lutter contre le terrorisme.

      Un pont s'établit à coup sûr entre l'institution de la légitime défense en tant que moyen militaire de faire face à une agression armée et les mesures de contraintes militaires de l'article 42 de la Charte des Nations Unies.

      B- Les mesures de contrainte militaire ( de l'article 42 de la Charte des

      Nations Unies)

      La constatation de l'existence d'une menace contre la paix, d'une rupture de la paix ou d'un acte d'agression constitue le « sésame » sans lequel il n'est pas d'accès au pouvoir de coercition découlant du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies2(*)37. Si le Conseil de sécurité entend faire usage des importantes prérogatives que lui confère l'article 42 de la Charte, il lui incombe de procéder au préalable, en principe, à ce jugement tout à fait déterminant. Il semble que des trois situations visées à l'article 39, la menace contre la paix et la sécurité internationales est la plus large2(*)38. Rien n'empêche en effet d'y recourir pour qualifier des faits qui auraient pu ressortir à la rupture de la paix, de l'agression et pourquoi pas au terrorisme. La menace contre la paix suppose simplement l'existence d'un danger actuel et non pas simplement virtuel. Mais si à l'origine l'actualité de la « menace contre la paix et la sécurité internationales » était comprise de façon stricte, du seul point de vue sécuritaire, la fin de la guerre froide a consacré la prise en compte de d'autres formes de menace. Ainsi, le Conseil de sécurité a déclaré le 31 janvier 1992 que « la paix et la sécurité internationales ne découlent pas seulement de l'absence de conflits armés. D'autres menaces de nature non militaires à la paix et à la sécurité internationales trouvent leur source dans les domaines économique, social humanitaire ou écologique2(*)39 ». Dans le prolongement de cette déclaration, le Secrétaire général a affirmé que les nouvelles menaces trouvent tout autant leur source dans des conflits internes et des problèmes économiques et sociaux que dans des conflits interétatiques2(*)40. Le rapport du groupe de personnes de haut niveau qui fait suite à la demande du Secrétaire général d'évaluer les menaces contre la paix et la sécurité internationales concluait clairement que « tout évènement ou phénomène meurtrier qui compromet la survie et sape les fondements de l'Etat constitue une menace contre la paix et la sécurité internationales »2(*)41. Sur cette base, six catégories de menace ont été listées au nombre desquelles le terrorisme2(*)42. C'est donc tout naturellement que les Nations Unies ont réaffirmé dans certaines de leurs résolutions que le terrorisme constituait une menace à la paix et la sécurité internationales2(*)43. Qualification qui est bien trop souvent mal accueillie au sein de la doctrine. L'article 42 donne au Conseil le pouvoir d'entreprendre des actions militaires coercitives dans le cadre du système de sécurité collective. A cet égard, il est considéré comme le pendant de la légitime défense2(*)44. La tendance dominante de la doctrine contemporaine voudrait bien y voir le cadre juridique de la légalité des opérations multilatérales2(*)45. Si l'on garde à l'esprit que la Charte offre deux solutions alternatives, ou du moins successives en cas de besoin, la légitime défense et l'action coercitive de l'article 42, la tendance à privilégier la seconde formule traduit le souhait de bénéficier au maximum de l'effet légitimant de cette base juridique, effet supposé plus marqué que celui de l'autorisation de la légitime défense qui ne fournit que la confirmation que la réaction armée est licite2(*)46.

      La décision de recourir aux mesures de coercition armée de l'article 42 relève de la seule compétence du Conseil de sécurité. En effet, l'article en question bénéficie du champ d'application du Chapitre VII de la Charte, qui « confère au Conseil tous les pouvoirs nécessaires pour traiter de tous les types de menace contre la paix et la sécurité internationale auxquels les Etats sont confrontés »2(*)47. Il reste que la formulation de l'article 42 donne lieu à une interprétation controversée au sein de la doctrine. L'activation de l'article 42 est-elle subordonnée à la mise en oeuvre préalable de l'article 41? Tout porte à le croire à première vue dans la mesure où il y est fait recours « si le Conseil de sécurité estime que les mesures prévues à l'article 41 seraient adéquates ou qu'elles se sont révélées telles ». Une telle interprétation pour simple qu'elle paraisse, même si elle est défendable, ne manque pas toutefois de susciter quelques contestations. En effet, il est brandi au soutien de la thèse contraire, l'esprit même de l'article 42 qu'il faut rechercher dans les travaux préparatoires. A ce propos, un auteur2(*)48 nous rapporte que les travaux préparatoires montrent clairement que le Conseil de sécurité peut prendre directement des décisions en vertu de l'article 42 sans devoir s'en référer au préalable à l'article 41. Un autre argument de poids- la théorie des pouvoirs implicites de l'Organisation internationale2(*)49- est avancé pour faire accepter le pouvoir discrétionnaire de l'organe sécuritaire en la matière. Une autre question qui surgit est la suivante : quels sont les Etats susceptibles d'être visés par les mesures de contrainte militaire de l'article 42 ? Théoriquement et juridiquement, il est possible d'admettre que tous les Etats sont susceptible d'être visés par l'article 42. Mais sur le plan politique, il faut probablement soustraire de cette catégorie, tous les Etats dotés de l'arme nucléaire. On voit mal en effet quelle serait la crédibilité de la menace d'un recours à des mesures coercitives réellement dissuasives de la communauté internationale à l'égard de ces Etats. On pourrait en outre s'interroger sur la nature même de ces mesures. La lecture de l'article 42 offre un tableau assez riche et diversifié des mesures militaires envisageables pour réagir à toute menace à la paix et à la sécurité internationales, et donc à toute attaque terroriste. Il s'agit entre autres des « démonstrations »2(*)50, des « mesures de blocus » et d'autres opérations menées par des forces aériennes, navales ou terrestres de Membres des Nations Unies. L'emploi de l'expression « autres opérations » montre bien l'étendue des actions militaires susceptibles d'être entreprises, celles-ci pouvant couvrir tout l'espace territorial de l'Etat visé à savoir, l'espace terrestre, l'espace maritime et l'espace aérien. Les conditions d'emploi de l'article 42 laissent aussi entendre que le principe d'efficacité mais aussi celui de proportionnalité ont leur place et un rôle à jouer dans le choix du moment, de la durée et de l'intensité des mesures coercitives armées2(*)51. Il reste qu'à la différence des Opérations de maintien de la paix (OMP), les mesures coercitives de l'articles 42 n'ont pas à s'inscrire dans la problématique d'impartialité et de neutralité non plus que du consensualisme : le destinataire de ces mesures

      n'est en réalité pas en position de revendiquer de telles garanties2(*)52. Enfin, peut-être, faut-il s'étonner avec le Professeur Patrick DAILLIER du curieux destin juridique de l'article 42, dont l'utilité comme fondement juridique n'est jamais explicitement reconnue, alors qu'il est admis qu'elle constitue la pierre angulaire ou la garantie ultime face aux échecs des autres moyens de pression du système de sécurité collective2(*)53.

      Paragraphe 2 : Les mesures de contrainte non militaire

      contre le soutien étatique au terrorisme

      L'article 2 paragraphe 4 de la Charte des Nations Unies interdit de manière générale le recours à la force ; bien que cela ne soit pas précisé par cette disposition, il est établi que la notion de recours à la force couvre non seulement le recours direct à la force par les troupes régulières d'un Etat, mais embrasse aussi le recours « indirect » par le soutien apporté par un Etat à des groupes privés qui mènent des attaques armées contre un autre Etat2(*)54. Soit le soutien se traduit par un contrôle effectif de l'Etat et les actes de terrorisme sont alors imputables à l'Etat, soit le soutien est moins substantiel et se limite par exemple à la fourniture de fonds d'armes ou à un appui logistique, alors les actes terroristes ne sont pas en principe imputables à l'Etat. Dans ce dernier cas, le soutien relève moins d'un recours à la force prohibée que d'une intervention dans les affaires intérieures d'un Etat2(*)55. En effet, le soutien de l'Etat au terrorisme peut également constituer une intervention prohibée alors qu'un acte de terrorisme déterminé n'est pas attribuable à l'Etat2(*)56. De telles hypothèses appellent des mesures autres que la légitime défense qui nécessite pour sa mise en oeuvre- on l'a déjà dit- la perpétration d'une attaque directe, plus exactement d'une agression armée contre la souveraineté d'un Etat. Le jus gentium ou droit des gens reconnaît alors aux Etats la faculté de mettre en oeuvre des mesures unilatérales contre un Etat pour l'amener à changer d'attitude et cesser un comportement manifestement illicite. De façon rigoureuse, on distingue les mesures de rétorsion (A) des contre-mesures (B), bien que la tendance actuelle conduise à opérer des confusions entre les deux catégories de mesures.

      A- La consistance des mesures de rétorsion contre le soutien

      étatique au terrorisme

      Les Etats peuvent réagir au soutien d'un Etat au terrorisme en adoptant des mesures inamicales mais intrinsèquement licites2(*)57. Les mesures de rétorsion ne supposent donc pas pour leur mise en oeuvre l'atteinte à un droit subjectif de l'Etat qui les met en oeuvre. Un Etat peut en effet adopter des mesures de rétorsion sans que le comportement d'un autre Etat l'affecte directement. De ce pas, les mesures de rétorsion peuvent bien répondre à un fait internationalement illicite, tel que le soutien d'un Etat au terrorisme. Elles consistent plus généralement en des mesures vexatoires à l'égard des ressortissants de l'Etat mis en cause et concernent des domaines aussi sensibles que la diplomatie et l'économie. La Déclaration de Tokyo du G7 du 6 mai 19862(*)58 constitue la consécration de la rétorsion « contre le terrorisme et contre ceux qui le commandent ou le soutiennent ». Les sept puissances les plus industrialisées y envisageaient plusieurs mesures dont le « refus d'exporter des armes », la « limitation stricte de la taille de leurs missions diplomatiques », une « immigration plus stricte »... La plupart de ces mesures inamicales composent le régime des mesures de rétorsion face au soutien prétendu d'un Etat au terrorisme. Au nombre de ces dernières, on peut citer la rupture des relations diplomatiques2(*)59 qui se traduit notamment par le rappel des agents diplomatiques représentant un Etat accusateur auprès de l'Etat accusé de soutenir le terrorisme, la fermeture des ambassades de celui-ci sur le territoire de celui-là. C'est ensuite le cas des mesures prises dans le domaine économique. Sur cette base, un Etat peut souverainement mettre en oeuvre des mesures de contrainte affectant ses relations économiques et commerciales avec un autre Etat. Les mesures de contrainte économiques consistent généralement en la cessation des vols internationaux en provenance ou en direction des pays, la cessation du commerce de matériel et de toute formation de personnel militaire, l'arrêt des investissements, la cessation progressive des achats de matière premières et de produits énergétiques etc. La CIJ a jugé dans son Arrêt de 1986 qu'il n'y a pas d'interdiction en droit international général de telles mesures2(*)60. Au constat, les mesures précédemment énumérées se rapprochent très sensiblement et très substantiellement des mesures de l'article 41 de la Charte des Nations Unies qui ne revêtent pas pour autant la qualification de mesures rétorsion. En effet, le Conseil de sécurité en vertu du Chapitre VII de la Charte peut décider sur le fondement de cet article quelles « mesures n'impliquant pas l'emploi de la force armée doivent être prises (...) et peut inviter les Membres des Nations Unies à appliquer ces mesures. Celles-ci peuvent comprendre l'interruption complète ou partielle des relations économiques et des communications ferroviaires, maritimes, aériennes, postales, télégraphiques, radiophoniques et des autres mesures de communications, ainsi que la rupture des relations diplomatiques »2(*)61. On notera que la Résolution 1373 (2001) a été très décisive, très incisive en ce qui concerne les mesures économiques à prendre contre les Etats soutenant le terrorisme, en ce qu'elle impose à tous les Etats de geler « (...) sans attendre les fonds et autres avoirs financiers ou ressources économiques » des terroristes eux-mêmes ainsi que des personnes morales ou physiques qui les soutiennent2(*)62. Mais, à la différence des mesures prises dans le cadre du Chapitre VII de la Charte, lesquelles font suite à une menace contre la paix et la sécurité internationale2(*)63, les mesures de rétorsion ne répondent pas forcément à cette exigence. Elles sont prises unilatéralement soit par un seul Etat, soit par plusieurs Etats de concert, en dehors du cadre onusien, alors que les mesures de l'article 41 de la Charte sont des décisions du Conseil de sécurité qui jouit de la faculté de les imposer ou non aux Etats parties. Du reste, on peut supposer que les décisions collectives présentent une efficacité plus grande que les mesures d'un Etat isolé. Au niveau politique, la désapprobation est mieux affirmée ; sur le plan économique, les conséquences des mesures restrictives sont aussi, normalement plus dissuasives. Les mesures de rétorsion peuvent par ailleurs viser non seulement un Etat isolé pour son soutien au terrorisme, mais la pratique des relations internationales montre que des mesures de rétorsion identiques peuvent être prises simultanément contre plusieurs Etats accusés ensemble de soutenir le terrorisme2(*)64.

      Si les mesures de rétorsion ont l'avantage de bénéficier d'une certaine légitimité, leur licéité étant acquise, il en va différemment des contre-mesures qui sont plus ou moins contestées.

      B- La licéité des contre-mesures contre le soutien étatique au

      terrorisme en question

      De manière générale, le droit international prohibe le recours aux représailles armées dans les relations internationales. A moins de répondre aux critères de la légitime défense ou d'en remplir les conditions, les représailles armées se présentent comme des actes de contrainte militaire contraire au droit international mis en oeuvre pour répondre à un comportement d'un autre Etat lui-même contraire au droit international2(*)65. Cependant, si la licéité des représailles armées est plus que douteuse, celle des contre-mesures, c'est-à-dire les représailles non armées est admise. On entend par « contre-mesures », l'ensemble des actes par lesquels un Etat riposte à une mesure prise par un autre Etat et qui seraient illicites dans des circonstances normales, mais deviennent licites du fait qu'ils répondent à un comportement lui-même illicite2(*)66. En d'autres mots, ce sont des mesures intrinsèquement illicites mais dont l'illicéité est exclue par l'antériorité du fait illicite d'un autre Etat. Elles consistent plus généralement en l'inexécution temporaire par l'Etat lésé de ses obligations internationales envers l'Etat responsable. Les Etats peuvent donc invoquer le droit que leur reconnaît la coutume internationale2(*)67 de recourir à des contre-mesures pour justifier leur réaction contre un Etat qu'ils accusent de soutenir le terrorisme. Leur but est limité, et elles ne peuvent être mises en oeuvre que pour amener l'Etat responsable à s'acquitter de ses obligations. Par conséquent, « il doit être mis fin aux contre-mesures dès que l'Etat responsable s'est acquitté des obligations qui lui incombent à raison du fait internationalement illicite (...) »2(*)68. Les contre-mesures sont des instruments subjectifs puisque l'illicéité du comportement initial est appréciée unilatéralement par l'Etat qui en est l'auteur2(*)69. De ce fait, les contre-mesures peuvent apparaître comme un instrument privilégié de lutte contre le terrorisme. Encore faut-il pour leur mise en oeuvre, qu'elles soient soumises à certaines conditions qu'il convient d'énumérer. Suivant la jurisprudence Naulilaa2(*)70, deux conditions suffisent pour établir le droit d'un Etat de recourir à des contre-mesures pour réagir au comportement illicite d'un autre Etat. Cette jurisprudence est d'un intérêt particulier en matière de lutte contre le terrorisme, en ce qu'un Etat, sur le fondement de cette dernière, peut recourir à des contre-mesures en réaction au soutien d'un autre Etat au terrorisme. La première condition est relative à la qualité de réagir en contre-mesures. En effet, l'Etat qui met en oeuvre des contre-mesures doit être lésé par une violation du droit international attribué à un autre Etat, et prouver le caractère illicite et l'imputation à l'Etat du comportement contre lequel il réagit. Tout Etat n'est donc pas habilité à adopter des contre-mesures en réaction au fait illicite d'un autre Etat2(*)71, car « la légalité des contre-mesures est (...) subordonnée à l'existence d'un titre, d'une compétence de réaction dont un sujet dans une espèce donnée, c'est la qualité d'agir »2(*)72. Selon la théorie classique de la responsabilité internationale de l'Etat, par « qualité pour agir », il faut entendre l'atteinte à un droit subjectif concrétisé par un dommage matériel. Ainsi seul l'Etat qui subit un dommage matériel résultant de la violation d'une obligation peut recourir à des contre-mesures. Recentré dans le contexte de la lutte antiterroriste, l'Etat qui agit en contre-mesures doit faire la preuve que l'Etat contre lequel il entend agir, a lésé ses droits du fait de son soutien avéré au terrorisme. L'intérêt à agir résulte donc d'une atteinte réelle et spéciale à l'Etat. L'autre condition tient à une exigence procédurale : L'Etat qui entend réagir en contre-mesures doit sommer préalablement l'Etat cible, en l'invitant à respecter ses obligations. L'Etat qui notifie ses intentions à l'autre Etat ne pourra alors recourir aux contre-mesures contre ce dernier, si et seulement si la sommation restait vaine, sans suite. La sommation aurait alors pour effet de permettre à l'Etat considéré comme fautif, d'ajuster son comportement, ou alors d'entrer en négociations. Cette exigence minimale fait croire à Messieurs Jean COMBACAU et Serge SUR que « les contre-mesures demeurent un instrument de communication entre Etats et se situent dans un contexte de négociation, pouvant contribuer au règlement pacifique des différends en rétablissant l'équilibre des droits et des intérêts »2(*)73. Par ailleurs, il faut souligner le fait que la réaction en contre-mesures est tout comme la légitime défense, enfermée dans des limites. Selon la CIJ, une contre-mesure doit être dirigée contre l'Etat responsable du fait illicite, elle doit viser les biens de l'Etat responsable ou ses ressortissants2(*)74. Une contre-mesure ne saurait donc viser un Etat tiers au différend. Les contre-mesures doivent en outre être limitées dans leur impact conformément au principe bien établi de proportionnalité, et la CDI a aussi retenu leur caractère temporaire ou réversible. Si la riposte ne respecte pas le standard de proportionnalité, l'Etat réagissant pourra voir sa responsabilité internationale mise en jeu par l'Etat visé2(*)75.

      En pratique, des problèmes se posent lorsqu'il s'agit de définir la limite, d'établir la frontière entre les contre-mesures et les mesures de rétorsion. A quel moment peut-on considérer qu'un Etat réagissant à un acte terroriste recourt aux contre-mesures ou aux mesures de rétorsion ? La question n'est pas dénuée de sens quand on sait que les contre-mesures peuvent aussi bien consister en la rupture des relations diplomatiques et/ou économiques (par l'imposition par exemple d'embargo sur des produits) et correspondre aux mesures de rétorsion. Il n'est donc pas aisé de répondre à la question et l'intérêt de la distinction n'est en réalité que théorique. La confusion terminologique entretenue entre les deux catégories de mesures rend bien compte de cette difficulté2(*)76. En sus, le problème de leur contrôle se pose avec une extrême acuité, puisqu'à priori contre-mesures et mesures de rétorsion sont envisagées unilatéralement, en dehors du cadre des Nations Unies. En tout état de cause, la nécessité d'articuler ces mesures avec celles de l'article 41 de la Charte des Nations Unies s'imposent d'autant plus que toutes ces mesures se recoupent, se rejoignent.

      L'étude du régime de coercition en réponse au terrorisme ayant fait l'objet de larges développements, aussi convient-il dans les développements qui vont suivre d'aborder la question de la répression pénale.

      Section 2 : La répression pénale du terrorisme

      Cette section aurait pu s'intituler « Répression judiciaire du terrorisme », et contenir le problème de la responsabilité judiciaire des Etats pour soutien au terrorisme, cette dernière étant essentiellement de nature civile. Bien que cette question paraisse d'une grande importance à nos yeux, nous l'avons occultée à dessein pour nous intéresser principalement et essentiellement à la responsabilité pénale des individus pour actes terroristes. Ce choix se justifie par l'abondance de la doctrine en cette matière, étant entendu que les développements précédents se sont largement appesantis sur la mise en oeuvre de la responsabilité de l'Etat par des mesures coercitives, et que nous réservons le traitement de cette dernière question à la deuxième partie de nos travaux.

      La délimitation de notre champ d'étude ayant étant établie, nous entendons traiter dans la présente section, successivement le problème de la répression du terrorisme par les juridictions pénales nationales (Paragraphe 1)  et celui de la répression par les juridictions internationales pénales (Paragraphe 2).

      Paragraphe 1 : La répression pénale du terrorisme par les

      juridictions nationales

      La compétence est un aspect important de la souveraineté. Aussi, consciente de l'importance de cette question, la CPIJ avait énoncé que « tout ce que l'on peut demander à un Etat, c'est de ne pas dépasser les limites que le droit international trace à sa compétence »2(*)77. De ce pas, les juridictions nationales sont fondées à établir leurs compétences traditionnelles aux fins de répression du terrorisme (A). Le caractère particulier du terrorisme a en revanche nécessité l'élargissement, dans les conventions internationales antiterroristes, de la compétence des juridictions nationales à un titre de compétence spéciale dit « compétence universelle » (B).

      A- Les titres de compétence traditionnels

      Le droit international identifie différents types de compétences classiques dont peut se prévaloir un Etat en vertu de sa souveraineté, pour poursuivre certaines infractions graves y compris le terrorisme. Le premier titre de compétence est la compétence territoriale, c'est le titre de compétence de base2(*)78, en ce que l'Etat est en principe compétent pour tout ce qui se produit sur son territoire. Ratione loci, la souveraineté de l'Etat s'étend sur la zone géographiquement délimitée constituant le territoire exclusif de l'Etat. Le principe de la compétence exclusive de l'Etat en ce qui concerne son propre territoire est un principal cardinal du droit international qui découle directement du principe de l'égalité souveraine des Etats. L'Etat sur le territoire duquel est commis un acte de terrorisme est compétent pour juger les auteurs dudit acte, selon un titre général sans nul besoin qu'une convention internationale n'ait à le prescrire. Les conventions antiterroristes universelles mentionnent quasiment toutes2(*)79 la compétence territoriale. C'est ainsi que la Convention de Montréal de 1971 établit cette compétence par une formulation on ne peut plus claire: un Etat partie a compétence obligatoire « si l'infraction est commise sur le territoire de cet Etat ». On notera la spécificité de la Convention de 1999 sur le financement du terrorisme, selon laquelle un Etat est aussi compétent si l'infraction de financement avait pour but ou a eu pour résultat la commission d'une infraction terroriste sur son territoire2(*)80. On note que Ces conventions internationales ne définissent pas les conditions dans lesquelles un acte est considéré comme commis sur le territoire d'un Etat, alors que la notion de commission peut être interprétée de diverses manières et viser la préparation, la consommation, les effets...si certains Etats exigent que l'acte criminel lui-même soit commis sur leur territoire2(*)81, beaucoup acceptent que leur compétence se fonde seulement sur les effets que l'acte criminel - commis à l'étranger - produit sur leur territoire2(*)82. L'autre difficulté qui apparaît sous-jacente, c'est celle relative à la notion de double incrimination2(*)83. Il est certes vrai que les conventions internationales antiterroristes consacrent la compétence territoriale des Etats en la matière, mais encore faut-il que l'ordre juridique interne de l'Etat poursuivant incrimine comme tel l'acte délictueux, sinon sur quel fondement établirait-il sa compétence, quand on connaît la valeur du sacro-saint principe nullum crimen nulla poena sine lege en matière pénale. A supposer par exemple que les attentats manqués contre le 1er Ministre ivoirien reçoivent après coup, les enquêtes ayant livré leurs conclusions, la double qualification de terrorisme aérien (Convention de Tokyo de 1963 sur la sécurité aérienne) et d'attentat à l'explosif (Convention internationale pour la répression des attentats terroristes à l'explosif du 15 décembre 1997)2(*)84. Sur quel fondement les criminels pourraient-ils être poursuivis en Côte-d'Ivoire, quand on sait que l'ordre juridique pénal ivoirien méconnaît le crime terroriste2(*)85. Qu'adviendrait-il alors en pareille hypothèse ? Pour ainsi dire, un Etat pourra établir sa compétence territoriale en matière de terrorisme pour autant que son ordre pénal interne le lui permettra, c'est-à-dire en faisant de l'acte criminel une incrimination expresse.

      De là, il appert que la compétence territoriale se double d'un autre titre de compétence non moins essentielle, la compétence matérielle (ratione materiae) dont les conventions internationales antiterroristes sectorielles précédemment étudiées ne sont que le reflet, les manifestations. Lorsqu'un Etat ne peut fonder sa compétence sur le critère territorial, il peut agir sur le fondement de la compétence extraterritoriale dite « personnelle » : ratione personae, certains actes commis à l'étranger peuvent entrer dans la compétence d'un Etat du fait de la nationalité des protagonistes impliqués. La nationalité, en tant que lien d'allégeance primordial et manifestation de la souveraineté de l'Etat, constitue un titre à agir classique et légitime de l'Etat. Il faut à cet égard distinguer néanmoins la compétence personnelle dite « active » et celle dite « passive », selon que le ressortissant de l'Etat est auteur présumé de l'acte ou victime. En vertu du titre de compétence personnelle active, l'Etat peut juger le comportement de ses ressortissants à l'étranger. Ce titre de compétence est un élément crucial du dispositif répressif car il permet d'assurer la poursuite des criminels alors que de nombreux Etats refusent l'extradition de leurs nationaux. En outre, la possibilité est offerte aux Etats dans les conventions, d'étendre leur compétence personnelle active pour des actes commis à l'étranger par des individus qui n'ont pourtant pas leur nationalité. Tel est le cas de l'apatridie qui révèle une acuité particulière en matière de terrorisme dans la mesure où certains Etats déchoient volontiers de leur nationalité certains ressortissants reconnus comme terroristes notoires2(*)86. Les Etats dans lesquels les apatrides ont leur résidence habituelle peuvent fonder leur compétence pour les actes de terrorisme que ces derniers ont commis à l'étranger. Le titre de compétence personnelle passive est celui en vertu duquel un Etat est compétent pour juger les auteurs d'un crime commis à l'étranger à l'égard de ses ressortissants2(*)87. Il s'agirait là du titre de compétence le moins justifiable et le plus controversé, ce qui explique d'ailleurs qu'il figure dans les conventions antiterroristes2(*)88 en tant que titre de compétence facultatif et non obligatoire. Enfin plusieurs traités antiterroristes établissent la compétence des Etats pour connaître des atteintes commises à l'étranger contre leurs intérêts « supérieurs » ou « vitaux ». Ces atteintes portent plus généralement sur la sécurité de ces Etats, leurs institutions. C'est la compétence réelle ou de protection. C'est une compétence « (...) liée aux éléments fondamentaux de leur souveraineté et de leur existence »2(*)89. Il est à ce propos intéressant de relever que l'objet de la Convention de New York de 1973 relève de la compétence réelle, puisque sont ici visées les infractions commises contre les personnes jouissant d'une protection internationale y compris les agents diplomatiques. Les Etats parties sont compétents d'après l'article 3 paragraphe 1 (c)  « lorsque l'infraction est commise contre une personne jouissant d'une protection internationale au sens de l'article premier, qui jouit de statut en vertu même des fonctions qu'elle exerce au nom dudit Etat ».

      Sur cette base, un éventuel attentat terroriste contre un agent d'un Etat jouissant de la qualité officielle serait aussitôt perçu comme une attaque contre l'Etat lui-même2(*)90.

      Du reste, certaines conventions permettent aux Etats de connaître des actes terroristes sur la base d'un titre de compétence exorbitant, extraordinaire et spécial : la compétence dite universelle.

      B- Un titre de compétence spécial: la compétence universelle
      La compétence universelle se justifie par l'adage latin « Ubi te invenero, ibi te judicieuse » qui signifie littéralement, « où je t'aurai trouvé, je te jugerai ». Elle se donne en droit comme l'« aptitude reconnue aux tribunaux de tout Etat à juger des faits commis à l'étranger, quels que soient le lieu de l'infraction et la nationalité de l'auteur ou de la victime »2(*)91. C'est une technique de procédure pénale, qui permet à un Etat de poursuivre et de juger des délits et des crimes qui autrement lui échapperaient en vertu des critères traditionnels de la compétence pénale. Elle est établie pour permettre la répression de certaines infractions particulièrement graves et qui violent certaines valeurs communes de l'humanité. Elle a pour objectif d'assurer une répression sans failles des crimes d'une extrême gravité, lesquels troublent non plus simplement l'ordre public interne d'un Etat, mais celui de la communauté internationale dans son ensemble. Concrètement, au titre du principe de l'universalité, l'Etat sur le territoire duquel se trouve l'auteur présumé d'une infraction internationale a compétence juridictionnelle sur l'infraction qui n'a pas été commise sur son territoire, alors que ni l'auteur ni les victimes n'ont la nationalité de l'Etat, et que ni ses intérêts ni sa sécurité n'ont été - du moins directement - mis en danger. C'est donc la seule présence de l'auteur présumé sur le territoire de l'Etat qui suffit à lui conférer compétence pour le juger. Il s'agit en cela d'une compétence « exceptionnelle » au regard de la problématique de l'intérêt à agir. Ainsi, la volonté de lutter contre l'impunité des crimes heurtant les valeurs communes à l'ensemble des Etats a conduit à une extension pragmatique de la compétence juridictionnelle de ces derniers. Assez généralement, la compétence universelle peut être simplement facultative2(*)92 ou obligatoire. Elle est conférée dans les traités dans le cadre de l'adage Aut dedere, aut judicare2(*)93, selon lequel l'Etat sur le territoire duquel se trouve un individu, s'il ne l'extrade pas doit le poursuivre. Il convient de noter que la compétence universelle se présente dans les conventions antiterroristes comme une obligation subsidiaire2(*)94 conditionnée par l'absence d'extradition. En matière de terrorisme, un pas est franchi dans l'exercice de la compétence universelle2(*)95, en ce que ce titre de compétence extraordinaire, n'est plus une simple faculté laissée à l'appréciation de l'Etat de refuge sur lequel pèse désormais l'obligation alternative de poursuite ou d'extradition des présumés terroristes . La Convention de la Haye de 1970 pour la répression de la capture illicite d'aéronefs serait ainsi la première convention à obliger les Etats à établir leur compétence universelle et poursuivre les terroristes sur ce fondement, conformément à la maxime « Aut dedere, aut judicare ». Le principe « Aut dedere, aut judicare » constitue désormais le principe fondamental des instruments de lutte contre le terrorisme, ce qui explique par ailleurs le fait qu'il ait été réaffirmé par le Conseil de sécurité dans sa Résolution 1373 (2001)2(*)96. L'établissement de la compétence universelle, est donc une étape décisive dans la lutte contre le terrorisme, d'autant plus que le criminel ne saurait ainsi- théoriquement- trouver refuge auprès d'un Etat. Gardons toutefois à l'esprit le fait qu'en matière de terrorisme, la compétence universelle reste un titre de compétence conventionnel, or tous les Etats ne sont pas liés par les conventions pertinentes en vertu de la règle res inter alios acta. Au demeurant, Les conventions antiterroristes, en obligeant les Etats de refuge à exercer leur compétence universelle, constituent une entorse à la souveraineté des Etats, d'où la difficulté de la mettre en oeuvre en pratique2(*)97.
      Suivant le principe de la subsidiarité2(*)98, corollaire naturel du principe de la souveraineté, l'impossibilité pour l'ordre interne de régenter une situation juridique déterminée appelle le secours de l'ordre international. Il importe donc de traiter dans les développements qui vont suivre la répression du terrorisme par les juridictions internationales pénales.

      Paragraphe 2 : La répression pénale du terrorisme par les

      juridictions internationales

      L'étude de la répression pénale du terrorisme donne à constater que le phénomène est difficilement justiciable des juridictions internationales. En effet, la nécessité de réprimer ce crime contraste bien avec l'absence de juridiction pénale internationale disposant d'une compétence générale en matière de terrorisme (A). Le seul point de soulagement reste la modeste contribution des tribunaux pénaux internationaux à la répression de certains actes terroristes (B).

      A- L'absence de juridiction pénale internationale disposant

      d'une compétence générale en matière de terrorisme

      L'institution d'une juridiction pénale internationale disposant d'une compétence générale en matière de terrorisme s'est imposée et continue de s'imposer à la communauté internationale comme une étape plus que décisive, un défi permanent dans la lutte contre le terrorisme. Cependant, les ambitions avant-gardistes d'instituer une juridiction spéciale contre le terrorisme, à la veille de la Seconde Guerre mondiale, avaient buté sur un cinglant désaveu. Cet échec était du reste prévisible, puisque l'effectivité de cette juridiction était en réalité subordonnée à l'entrée en vigueur de la Convention qui la portait. Or justement, les deux conventions jumelles2(*)99 sur le terrorisme simultanément adoptées, sous les auspices de la SDN le 16 novembre 1937, sont restées lettre morte. La première déjà évoquée dans les développements antérieurs3(*)00, et qui portait la mention « Convention pour la prévention et la répression du terrorisme » avait une portée générale en termes de lutte organisée. La seconde, qui portait le titre « Convention pour la création d'une Cour pénale internationale » avait un objet beaucoup plus spécifique. Son champ de compétence restait exclusivement limité au jugement des individus accusés d'infractions terroristes à caractère international prévues par sa convention jumelle3(*)01. Ceci apparaissait dès lors comme une innovation parfois qualifiée de « hardie »3(*)02 par certains observateurs de la vie internationale. Il semble que le contexte historique- à la vielle de la Seconde Guerre mondiale- dans lequel se sont inscrits ces projets n'était sans doute guère propice à l'avènement de cette juridiction. L'on sait en effet que, suite à la Seconde Guerre mondiale, la répression pénale internationale s'est portée prioritairement sur les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité perpétrés durant le conflit mondial. Mais il s'avère en outre que le projet était nettement trop ambitieux pour l'époque, les Etats n'étant certainement pas prêts à accepter une telle évolution. L'intention de la Conférence des Etats était à l'époque d'instituer une cour compétente à l'origine uniquement pour connaître des infractions terroristes internationales, mais pouvant acquérir à termes d'autres compétences qui devait être exclusivement compétente pour juger les individus3(*)03. Cette juridiction, qui devait siéger à la Haye, aurait été une juridiction permanente. Elle n'aurait toutefois eu à se réunir qu'à l'occasion de sa saisine pour une poursuite relevant de sa compétence3(*)04 soit un acte de terrorisme « incriminé » dans la première convention de 1937. Ainsi, on relève des différences notables entre la juridiction mort-née et l'actuelle Cour pénale internationale dont le Statut a été adopté à Rome en 1998. On peut déjà souligner qu'à la différence de la juridiction mort-née dont le champ de compétence était limité aux actes terroristes, l'actuelle Cour pénale internationale méconnaît l'infraction terroriste, y était indifférente. Elle n'est compétente que pour les crimes de guerre, les crimes contre l'humanité, les crimes de génocides et le crime d'agression, encore que cette dernière infraction y est logée sans définition.

      Ainsi, comme on peut s'en apercevoir, à ce jour, il n'existe de juridiction internationale pénale de portée générale en matière de terrorisme. Le mérite revient en revanche aux tribunaux pénaux internationaux ad-hoc pour leur apport à la répression du terrorisme.

      B- La contribution des tribunaux pénaux internationaux ad -hoc à la

      répression du terrorisme

      La mission des tribunaux ad-hoc consiste à juger de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité commis dans le cadre d'un conflit armé précis. Le terrorisme peut quant à lui être perpétré dans un contexte de paix relative comme dans un contexte de guerre. L'apport de la jurisprudence des tribunaux ad hoc ne peut dès lors concerner qu'une facette du terrorisme, celles des actes terroristes commis dans le cadre d'un conflit armé. Les statuts des tribunaux ad-hoc ne prévoient pas l'infraction de terrorisme comme infraction distincte et ne prévoient la compétence des tribunaux ad-hoc que pour juger de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité. Dès lors, l'analyse de leur jurisprudence ne sera intéressante pour notre étude que dans la mesure où cette jurisprudence peut être interprétée comme condamnant certains actes de terrorisme. Le Statut du TPIR envisage expressément la compétence3(*)05 de ce tribunal pour connaître des actes de terrorisme. L'article 4 du Statut du TPIR3(*)06, consacré aux violations de l'article 3 commun aux Conventions de Genève et du Deuxième Protocole additionnel3(*)07 cite les « actes de terrorisme » parmi les infractions vis-à-vis desquels ce tribunal a juridiction. Le Statut du TPIR reprend ici les termes de l'article 4 du Protocole additionnel II, intitulé « garanties fondamentales » , et qui cite « les actes de terrorisme » parmi les actes « prohibés en tout temps et en tout lieu » à l'égard des personnes qui ne participent pas directement aux hostilités. On peut noter que l'article en question incrimine la « prise d'otages » avant de faire cas de la prohibition des « actes de terrorisme ». Ces deux mentions mise l'une à côté de l'autre autorisent à penser que le Statut du TPIR exclut la prise d'otages de la catégorie des actes terroristes, ce qui contrarie la Convention internationale de New York du 17 décembre 1979 qui considère dans son préambule les actes de prise d'otages comme des « manifestations du terrorisme international »3(*)08. Sur le fondement de l'article 23 de son Statut, une personne coupable d'un acte quelconque de terrorisme3(*)09 peut être passible d'une peine d'emprisonnement, la peine de mort étant exclue des sanctions applicables aux infractions qui ressortent de son champ d'application.

      Cependant, on peut le noter avec Madame Cécile TOURNAYE3(*)10, qu'aucune condamnation n'a été prononcée sur cette base. Le Statut du TPIY3(*)11 n'a pas de disposition semblable. C'est donc ailleurs qu'il faudra rechercher les éléments caractéristiques de son apport à la répression pénale du terrorisme. On sait par exemple que ce tribunal a pris en compte la terreur infligée aux populations civiles dans le cadre d'inculpation pour crime contre l'humanité3(*)12. Comme on peut bien s'en apercevoir, les tribunaux pénaux internationaux ad-hoc connaissent de la question du terrorisme non pas comme une infraction autonome, mais plutôt comme un crime connexe du crime contre l'humanité et/ou du crime de guerre.

      Mais, c'est semble-t-il du point de vue de l'engagement de la responsabilité pénale individuelle que l'apport des tribunaux ad hoc sera plus remarquable. De ce point de vue, leur utilisation de la théorie du « but commun », aussi dénommée « entreprise criminelle conjointe », comme mode d'engagement de la responsabilité individuelle dans l'ordre international, est peut-être leur contribution majeure pour une répression efficace du terrorisme dans l'ordre international. L'imputation d'un acte illicite est toujours difficile lorsqu'il s'agit d'une criminalité de groupe. C'est pourquoi la théorie du but commun, qui permet d'imputer le crime à un plus grand nombre que les théories classiques de mise en jeu de responsabilité, a été considérée à plusieurs reprises dans la lutte contre la criminalité de groupe. Elle rend chacun des « participants » à l'entreprise criminelle également responsable de tous les crimes commis dans le cadre de cette entreprise3(*)13. Il importe peu que l'un des membres ait, plus ou moins, contribué que d'autres à l'élaboration, à la planification puis à la commission du crime. Tous les membres de l'entreprise encourent une responsabilité pour la commission du crime résultant de l'entreprise criminelle. Sur cette base, on peut envisager l'inculpation de tous les membres d'une organisation terroriste telle que Al-Qaida, dans la chaîne d'organisation des actes criminels qui ont été perpétrés sur le territoire américain le 11 septembre 2001, depuis leur préparation, leur financement, jusqu'à leur réalisation3(*)14.

      Les règles relatives à la lutte contre le terrorisme ayant été exposées, tout l'intérêt de notre sujet réside dans la nécessité de confronter la théorie à la réalité.

      DEUXIEME PARTIE

      LA LUTTE CONTRE LE TERRORISME A L'EPREUVE DES FAITS

      La deuxième partie de notre travail nous permettra d'avoir une lisibilité plus nette du sujet, la seule analyse des règles étant insatisfaisante pour tirer des enseignements utiles et propres à l'élaboration de conclusions objectives. On s'intéressera plus particulièrement à l'approche utilisée pour réagir contre le phénomène criminel. De ces approches, l'on retiendra deux aspects importants : Dans un premier temps, il est à observer que, globalement, le recours à la force armée a fait l'objet d'une approche dangereuse (Chapitre I). Dans un second temps, l'approche utilisée relativement aux mesures de contrainte non armées et le traitement judiciaire du terrorisme paraissent manquer de pertinence (Chapitre II). On le comprend, ce phénomène provoque- il faut l'avouer- une perte de visibilité des schémas classiques dessinés par le droit international.

      Chapitre I : Une approche dangereuse dans le

      traitement du terrorisme

      Les réflexions sur le recours à la force dans la lutte contre le terrorisme permettent de mettre en évidence le caractère dangereux de l'approche utilisée. Ainsi qu'on le verra, on est graduellement passé d'un changement de posture

      (Section 1) à une violation pure et simple des normes internationales dans la lutte contre le terrorisme (Section 2), ce qui dénote d'une certaine évolution pernicieuse.

      Section 1 : Le changement de posture dans le

      traitement du terrorisme

      La présente section a ceci d'intéressant, qu'elle s'inscrit dans une perspective historique, laquelle ne rime pas forcément avec une démarche exclusivement chronologique3(*)15. La date mémoire du 11 septembre 2001 permet de bien comprendre les subtilités de l'évolution de l'approche dans le traitement du terrorisme. Bien d'auteurs se sont efforcés à mettre en évidence ce changement de cap en indiquant que l'analyse des aspects juridiques de la lutte contre le terrorisme s'enrichissait d'un « avant 11 septembre » et d'un après « 11 septembre ». On note ainsi que bien avant le 11 septembre 2001, le recours à la force armée a fait l'objet d'une approche restrictive, confiné à des possibilités limitées (Paragraphe 1), alors que les attentats du 11 septembre ont ouvert le champ ou la voie à des perspectives nouvelles dans le traitement du terrorisme (Paragraphe 2).

      Paragraphe 1 : Le recours à la force armée avant le 11 septembre

      2001 : Un traitement restrictif et mesuré

      Le recours à la force armée avant le 11 septembre a fait l'objet d'un traitement restrictif, un traitement mesuré que reflète la pratique antérieure des Etats (A). Cette pratique s'est d'ailleurs confirmée par la jurisprudence (B).

      A- Un traitement restrictif et mesuré reflétant la pratique

      Depuis la fin des années 1970, un petit nombre d'Etats a tenté de justifier des recours à la force opérés contre d'autres Etats par le fait qu'il s'agissait d'actions menées en légitime défense, en réponse à des actes de terrorisme dont ces Etats ou leurs ressortissants avaient été victimes. Ce fut, en particulier, le cas de l'Afrique du Sud, d'Israël et des Etats-Unis d'Amérique. Il est frappant de constater que ces différentes actions ont fait l'objet de condamnations quasiment systématiques, et que l'argument de la légitime défense en réponse à des actes de terrorisme n'a pas été accueilli. Ainsi les actions militaires menées contre le Liban en 1972 et contre la Tunisie en 1985, qu'Israël a tenté de justifier sur cette base, ont été clairement condamnées par le Conseil de sécurité3(*)16. Il en est allé de même des actions entreprises par l'Afrique du Sud à l'encontre de certains Etats voisins3(*)17. Le bombardement de la capitale libyenne, Tripoli, par l'aviation américaine, en 1986, a lui aussi été justifié par l'exercice du droit de légitime défense des Etats-Unis d'Amérique, à la suite d'un attentat attribué à la Libye - survenu quelque temps plutôt à Berlin, où un soldat américain avait trouvé la mort. L'argument de la légitime défense fut cependant écarté, et le bombardement de Tripoli condamné, par l'Assemblée générale cette fois-ci3(*)18. En réalité, dans ces différentes situations, les autres Etats ont analysé les actions militaires justifiées par la nécessité de répondre à des actes de terrorisme non comme des actions de légitime défense, mais plutôt comme des actes de représailles armées3(*)19, clairement interdits par le droit international contemporain3(*)20. Il est vrai que la pratique a connu une certaine inflexion à cet égard après la fin de la guerre froide. A un certain nombre de reprises, au cours des années 1990, les Etats-Unis d'Amérique ont mené des actions militaires qu'ils ont justifiées au titre de la légitime défense, en réponse à des attentats ou à des tentatives d'attentats dont ils ont été victimes. Ainsi, on se souvient que les Etats-Unis avaient bombardé Bagdad en 1993, en riposte à une tentative d'assassinat visant l'ancien président George BUSH3(*)21. De la même façon, en 1998, les Etats-Unis d'Amérique ont frappé des cibles en Afghanistan ( des camps d'entraînement de groupes terroristes) et au Soudan (une usine pharmaceutique suspectée de contribuer à la production d'armes chimiques), en riposte aux attentats qui avaient détruits les ambassades américaines à Nairobi et Dar es Salam. Les deux pays visés par ces frappes étaient en l'occurrence accusés d'avoir toléré la présence sur leur territoire de groupes ou de personnes impliqués dans ces attentats. A l'opposé des situations évoquées plus haut, ces dernières actions militaires n'ont fait l'objet d'aucune condamnation formelle de la part d'organes de l'ONU. Le bombardement, en 1998, d'objectifs situés en territoire soudanais a cependant été condamné par d'autres organisations dont la Ligue des Etats arabes3(*)22. Pour autant, la manière dont les autres Etats y ont réagi est loin de manifester une approbation claire de tels actes, et moins encore des justifications juridiques qui avaient été avancées à leur appui. Un nombre appréciable d'Etats ont, au contraire, exprimé leur désapprobation de ces actes. Nombre d'autres Etats se sont limités à affirmer qu'ils « comprenaient » les actions militaires menées par les Etats-Unis d'Amérique, sans pour autant endosser l'argumentaire juridique qui avait été développé pour les justifier3(*)23. Il paraît donc difficile de voir, dans ces derniers précédents des signes convaincants d'une évolution des normes internationales sur ce point. En conclusion, on note avec le Professeur Pierre KLEIN que rien dans cette pratique ne paraît de nature à remettre en cause la définition de l'agression , telle qu'elle avait été élaborée au sein de l'Assemblée générale des Nations Unies et confirmée par la Cour internationale de justice.

      B- Un traitement restrictif et mesuré confirmé par la jurisprudence

      L'Affaire des Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci éclaire davantage la lanterne des juristes sur la possibilité de recourir à la force armée au titre de la légitime défense. S'il ne porte pas spécifiquement sur une situation où le recours à la force effectué au titre de la légitime défense visait à répondre à des actes de terrorisme, ce précédent confirme néanmoins très clairement les conditions dans lesquelles cet argument pouvait être valablement invoqué. Pour mieux comprendre les tenants et les aboutissants de ce précédent, autoriserons-nous à en faire un bref rappel des faits. De 1956 à 1979 le Nicaragua vit sous la domination du clan Somoza que les Etats-Unis soutiennent. En 1978 l'opposition rassemblée dans le Front sandiniste, déclenche l'insurrection. Le dernier Somoza de la famille abandonne alors le pouvoir en 1979. Les Sandinistes prennent alors peu à peu le pouvoir en s'appuyant sur Cuba et l'URSS. Un mouvement contre révolutionnaire y fait alors face, le mouvement « Contra ». En 1983 les Etats-Unis d'Amérique voyant d'un mauvais oeil la constitution du pôle révolutionnaire des Sandinistes décide de soutenir financièrement et militairement les contre-révolutionnaires («Contras»). Le Nicaragua soulève alors la violation par les Etats-Unis d'Amérique de principes fondamentaux du droit international tels que l'interdiction de l'emploi de la force dans les relations internationales et de toute ingérence dans les affaires d'un autre pays. En avril 1984, cet Etat assigne les Etats-Unis d'Amérique devant la CIJ, en raison de l'aide apportée par ceux-ci aux mouvements d'opposants au régime sandiniste, se livrant à des attaques armées, dans ce pays et contre ce pays. Le gouvernement du Nicaragua protestait, notamment contre la pose des mines limitant l'entrée et la sortie des ports nicaraguayens, le survol de son territoire, des opérations lancées contre des installations pétrolières et une base navale3(*)24. Cependant, afin d'être en mesure de statuer sur ce conflit, la Cour devait pouvoir identifier les règles du droit international coutumier3(*)25 relatives au non-recours à la force et à la non-intervention. C'est ainsi que dans l'arrêt qu'elle a rendu en 1985 la Cour, après avoir affirmé que la Résolution 3314 (XXIX) pouvait être considérée « comme l'expression du droit international coutumier »3(*)26, a indiqué que « si la notion d'agression armée englobe l'envoi de bandes armées par un Etat sur le territoire d'un autre Etat, la fourniture d'armes et le soutien apporté à ces bandes ne sauraient être assimilées à l'agression armée. Néanmoins, de tels activités peuvent fort bien constituer un manquement au principe du non-emploi de la force ainsi qu'une intervention dans les affaires intérieures d'un Etat, c'est-à-dire d'un comportement certes illicites, mais d'une gravité insuffisante que l'agression armée ». Sur le fond, un certain nombre de questions ont été tranchées par la Cour. Dans un premier temps, si la Cour a, à une large majorité, admis le bien-fondé de la réclamation du Nicaragua, en considérant que les Etats-Unis d'Amérique, par leur aide aux forces « Contras » avaient violé le traité d'amitié américano-nicaraguayen et le droit international coutumier, elle se refusa cependant, à assimiler la fourniture d'armes et le soutien apporté à ces forces contre-révolutionnaires à une agression armée, motif pris de ce que de telles activités- certes illicites- ne seraient néanmoins pas suffisamment graves pour caractériser l'illicéité en question. Elle a en revanche, tout aussi écarté l'argument de la légitime défense, invoqué par les Etats-Unis pour justifier leurs actions militaires contre le Nicaragua. Cet Etat fondait- faut-il le souligner- son prétendu droit à la légitime défense en considération du soutien apporté par l'URSS au Nicaragua dans le contexte tendu de guerre froide. On peut l'affirmer, dans cette affaire, la Cour s'est abstenue de donner une possible extension à la notion d'agression et par ricochet à celle de légitime défense.

      Ainsi qu'on vient de le voir, avant le 11 septembre 2002, le recours à la force armée est restée confinée à des possibilités limitées. Il en va différemment, on le verra maintenant, après le 11 septembre.

      Paragraphe 2 : Le recours à la force après le 11 septembre 2001 :

      Un traitement largement renouvelé

      L'analyse des données relatives au traitement du terrorisme après le 11 septembre 2001 révèle une évolution notable dans l'approche de la question. Cette évolution réside tant dans l'interprétation des règles gouvernant le recours à la force (A) que dans les moyens d'action du Conseil de sécurité, lesquels ont subi de profondes mutations, des aménagements significatifs (B).

      A- Des règles en mutation ?

      Il a parfois été soutenu que le 11 septembre 2001 marquait le point de départ d'une évolution des règles gouvernant le recours à la force. A la réalité, il s'agit moins d'une mutation de ces règles que d'une interprétation sujette à caution, à questionnement. On note de ce fait que cette date a d'abord ouvert la voie à une acceptation massive de la légitime défense (1), puis à une acceptation extensive et laxiste de la légitime défense (2).

      (1)- Une acceptation massive de la légitime défense

      Contrairement à l' « avant 11 septembre », l' « après 11 septembre » a donné lieu une acceptation massive de la légitime défense. En effet, au lendemain des attentats contre les Twin Towers du World Trade Center de Manathan, le Conseil de sécurité à l'unanimité de ses membres, ainsi que par la communauté internationale des Etats ont condamné de manière énergique les attaques dont étaient victimes les Etats-Unis d'Amérique. Cette condamnation unanime s'est par ailleurs soldée par la reconnaissance du droit naturel de légitime à la victime de ces attaques. Dans les Résolutions 1368 (2001) et 1373 (2001) adoptées respectivement les 12 et 28 septembre 2001, le Conseil de sécurité a inscrit une référence au droit « naturel » de légitime défense3(*)27. Ainsi, le Président du Comité contre le terrorisme institué par la Résolution 1373 (2001) a précisé que le Conseil de sécurité « (...) authorised, under self-defense provisions of Article 51 of the UN Charter, the use of force in pursing those responsible for attacks »3(*)28. Au-delà de ces résolutions, force est de constater que la communauté internationale a apporté un soutien très large à la riposte anglo-américaine aux attaques du 11 septembre 2001 et à l'argument de légitime défense avancé pour la justifier. Ainsi le Conseil européen a exprimé son soutien sans réserve dans une déclaration du 08 octobre 2001, accompagnée en cela d'un grand nombre d'Etats « associés »3(*)29. De même, les Etats membres de l'OTAN ont déclaré le 6 décembre 2001 qu'ils considèrent « (...) les évènements du 11 septembre comme une attaque armée dirigée non pas contre un seul Allié, mais contre chacun d'entre eux, et c'est pourquoi ils ont invoqué l'article 5 du Traité de Washington3(*)30. En conséquence, ils ont décidé de soutenir, individuellement et collectivement, les opérations militaires actuellement menées, sous la direction des Etats-Unis, contre les terroristes qui ont commis les atrocités du 11 septembre et contre ceux qui leur fournissent un sanctuaire »3(*)31. D'ailleurs les alliés de l'OTAN ont facilité les opérations militaires en autorisant notamment l'accès de leur espace aérien, de même que plusieurs autres Etats3(*)32. L'OEA a aussi rapidement reconnu la situation de légitime défense3(*)33 et le principe d'une offensive militaire en Afghanistan a été accepté par plusieurs organisations régionales dont la Ligue des Etats arabes, le Mouvement des non-alignés, l'OCI et l'OUA. La massivité du soutien est enfin mise en évidence par le débat de novembre 2001 à l'AGNU3(*)34. Au-delà de cet aspect, il apparaît évident que le concept de légitime défense- ainsi qu'on le verra- a fait l'objet d'une extension inédite, laissant entrevoir un nouveau modèle d'action contre le terrorisme.

      (2)- Une acceptation extensive et laxiste de la

      légitime défense

      La référence explicite au droit « naturel » de légitime défense3(*)35 en réponse aux « épouvantables » attaques du World Trade Center ne manque pas de soulever des difficultés majeures en droit international. On note en effet une interprétation extensive des règles gouvernant le recours à la force par invocation de la légitime défense. Cette extension est perceptible à plusieurs points de vue. La première difficulté apparaît dès lors qu'il s'est agi de qualifier ces attaques d'agression armée. Par rapport aux canons admis par le droit international, Classiquement, ainsi que l'on l'a précédemment évoqué3(*)36, l'agression armée est entendue au sens d'attaque militaire de la part de forces armées d'un Etat ou de force effectivement dirigées par un Etat. Si la notion plus vague d'attaque « armée »3(*)37 n'est pas impossible à caractériser dans le contexte du 11 septembre 2001, c'est bien plus principalement sur le terrain de leur imputabilité que se cristallisent les difficultés d'interprétation liées à leur qualification. Faut-il le rappeler- c'est désormais un secret de polichinelle- les attaques du 11 septembre 2001 ont été revendiquées par l'internationale terroriste Al Qaida, c'est-à-dire dire une organisation privée3(*)38. L'imputation suppose alors que l'on considère les Taliban auxquels semble appartenir cette organisation comme un gouvernement de l'Etat afghan, pour être en présence d'attaques constitutives d'une agression armée. Or, là dessus, nous savons à quel point la situation de l'Afghanistan à l'époque des faits était complexe et ambiguë. L'Afghanistan était dans un état de délitement avancé, le gouvernement légal étant en exil bien que représentant toujours le pays dans les instances internationales. Le pouvoir effectif était alors entre les mains de la faction islamiste Taliban à l'exception d'une petite portion du territoire sous le contrôle des opposants de l'Alliance du Nord. Le gouvernement effectif des Taliban n'était alors reconnu que par une poignée d'Etats3(*)39. Les autres Etats, à commencer par les Etats-Unis d'Amérique, refusaient de reconnaître le gouvernement des Taliban en Afghanistan et le Conseil de sécurité a pris le soin de viser dans ses résolutions « la faction afghane dénommée Taliban »3(*)40. L'existence même d'une agression armée attribuable à un Etat apparaît dès lors, ici, plus que douteuse. Cet état de fait a d'ailleurs suscité de nombreuses critiques au sein de la doctrine, donnant lieu à une dénonciation extensive du concept de légitime défense3(*)41. De ce pas, il nous est malaisé et difficile de suivre les explications fournies par le Professeur Pierre Michel EISEMANN qui assimile le soutien des Taliban à Al Qaida à un « cas classique » de légitime défense3(*)42.

      A supposer même que ce soutien soit réel, on ne serait pas pour autant en présence de faits constitutifs d'une agression armée au sens de l'article 51 de la Charte que la Résolution 3314 a entendu compléter en donnant à cette notion une définition des plus satisfaisantes. A l'inscrire dans une perspective jurisprudentielle, l'agression armée doit concerner l'envoi de bandes armées par un Etat sur le territoire d'un autre Etat, et non simplement la fourniture d'armes ou le soutien apporté à ces bandes armées. Or en l'espèce, les certitudes qu'on avait jusque-là sur le fait que Al-Qaida est un démantèlement du pouvoir de fait- et non légal3(*)43- des Taliban, reposent encore sur de simples présomptions3(*)44. A quoi s'ajoute le fait que la réaction aux attentats du 11 septembre s'est largement éloignée de la logique opérationnelle de la légitime défense. A l'analyse, elle n'apparaissait plus nécessaire puisque le Conseil de sécurité semblait avoir pris les mesures nécessaires3(*)45 . De plus, les Etats-Unis d'Amérique ne se sont nullement soumis à l'obligation minimale d'informer le Conseil de sécurité avant d'entreprendre toute opération militaire. Le Professeur Pierre Marie DUPUY3(*)46 y a d'ailleurs vu la volonté de ce pays de faire échapper l'opération « justice immuable » au contrôle international des Nations Unies en restant dans le cadre d'une référence très générale à un droit « naturel » de légitime défense. On peut tout aussi s'interroger sur les caractères de cette réaction. A-t-elle été immédiate ? Il faut en douter, puisque cette réaction- qui s'est révélée par la suite être une traque assidue de l'organisation terroriste Al Qaida et des Taliban- a été longuement et minutieusement préparée. En effet, les opérations militaires se fondant sur cette « légitime défense » ont effectivement débuté le 7 octobre 2001, soit environ un mois après les attaques. La réaction a-t-elle été proportionnée, bien adaptée ? Les développements ultérieurs3(*)47 nous autorisent à penser le contraire, même si certains auteurs ne veulent pas courir le risque de répondre à pareille interrogation3(*)48. En conclusion, il apparaît évident que si l'on veut affronter le terrorisme contemporain, il faut accepter de prendre en considération le fait qu'il a dépassé le stade, parfois atteint, du terrorisme d'Etat, pour devenir un phénomène de réseaux et que vouloir chercher à tout prix un Etat directeur derrière lui, revient à se condamner à ne pas agir3(*)49. Pour ce faire, la notion même d'agression mérite d'être redéfinie pour lui permettre de mieux répondre au phénomène tel qu'il est vécu aujourd'hui. Pour l'heure, on a assisté jusque-là à une interprétation extensive des règles gouvernant le recours à la force dans le cadre de la lutte conte le terrorisme, ce qui augurait assurément d'une transformation ou du moins d'un aménagement des moyens d'action de l'organe qui en a la charge.

      B- Des moyens d'action en transformation ou sous aménagement

      La nécessité de lutter efficacement contre le terrorisme a servi de prétexte au renforcement des pouvoirs du Conseil de sécurité, à l'extension de ceux-ci. Cet organe s'est alors attribué certaines compétences qui ne sont pas originellement les siennes. Dès lors, on a vu ce dernier sortir sans gênes et sans sourciller de son champ de prédilection traditionnel pour s'adjuger et s'arroger d'autres rôles. Cette situation créée- en amont- par une surenchère de qualifications (1) a abouti -en aval- à une concentration de tous les pouvoirs entre les mains du Conseil de sécurité (2), apparaissant ainsi tantôt comme un dictateur ou du moins comme une autorité excédant ses pouvoirs3(*)50, tantôt comme un hors-la loi pour qui les règles internationales devenaient de plus en plus « encombrantes » (?) comme un boulet à ses pieds, devant l'absolue nécessité et l'extrême urgence d'éradiquer (est-ce possible sous ce seul angle ?)3(*)51 l'hyper terrorisme.

      (1)- De la surenchère des qualifications par le Conseil de sécurité : le terrorisme « comme l'une des plus graves contre la paix et la sécurité internationales »3(*)52 ...

      Du moment où le terrorisme constitue « le premier phénomène de déstabilisation et de structuration des Etats contemporains »3(*)53, on peut convenir qu'il puisse, d'une certaine manière- et non pas dans l'absolu- se rattacher au maintien de la paix et de la sécurité internationales3(*)54. L'importance de l'opération de qualification comme étape préliminaire à la mise en oeuvre par le Conseil de sécurité des pouvoirs que lui confère le Chapitre VII de la Charte est bien connue. Aux brèches ouvertes à l'insécurité internationale, la communauté internationale et son organe sécuritaire, le Conseil de sécurité, ne peut opposer que les sésames à sa disposition pour les refermer. Ces sésames- faut-il le rappeler- sont la menace contre la paix et la sécurité internationales, la rupture de la paix, l'agression. L'on ne saurait toutefois contester la très large marge d'appréciation dont cet organe bénéficie à cet égard, tant en ce qui concerne la décision de qualifier- ou non- telle ou telle situation de menace qu'en ce qui a trait au type de mesure qu'il choisit d'adopter pour y faire face . Le concept de menace contre la paix s'est ainsi avéré évolutif, le Conseil de sécurité qualifiant de la sorte des types de situation très différentes au fil du temps3(*)55. C'est bien plus la manière dont le Conseil de sécurité a exercé son pouvoir de qualification dans ce domaine, que l'inclusion du terrorisme dans cette notion qui est problématique3(*)56. L'Affaire Lockerbie est fréquemment présentée comme le principal point de départ de l'implication du Conseil de sécurité dans la lutte contre le terrorisme. Il n'est pourtant pas sans intérêt de rappeler qu'à cette occasion, ce n'est pas le terrorisme en lui-même, ou des actes de terrorisme spécifiques, que le Conseil de sécurité qualifiait de menace à la paix et à la sécurité, mais bien le refus de la Libye de répondre aux demandes qu'il avait formulées antérieurement, dont celle d'extrader les individus suspectés d'être impliqués dans les attentats en cause3(*)57. Il en est allé de même à l'occasion des mesures prises à l'encontre du Soudan en 19963(*)58 et des Talibans en 19993(*). Durant cette période, le Conseil de sécurité a régulièrement exprimé sa conviction plus générale que « la répression du terrorisme international est essentielle pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales », sans pour autant qualifier des actes terroristes spécifiques de menace pour la paix et la sécurité.

      La Résolution 1368 (2001) adoptée au lendemain des attaques du 11 septembre 2001, marque l'amorce d'une évolution significative sur ce point. Le Conseil de sécurité y « considère de tels actes,  comme tout acte de terrorisme international, comme une menace à la paix et à la sécurité internationales »3(*)59. C'est donc dire que, désormais, tout acte présenté comme relevant du terrorisme international, est une menace à la paix et à la sécurité internationales. Cette extension des qualifications s'est encore accentuée par la suite. Ainsi, à partir de 2003, cet organe a assorti sa condamnation de chacun des actes en cause de la mention du fait « qu'il considère qu'un tel acte, comme tout acte de terrorisme, constitue une menace à la paix et à la sécurité »3(*)60. Dès ce moment, il n'est donc plus nécessaire, aux yeux du Conseil de sécurité, qu'un fait de terrorisme présente un caractère international3(*)61 pour justifier une réaction de sa part, au titre des compétences que lui reconnaît la Charte ou à tout le moins de l'interprétation qu'il en fait. Enfin, une étape supplémentaire a encore été franchie par la suite, puisque le Conseil de sécurité en est venu à affirmer en 2004 que « le terrorisme sous toutes ses formes et dans toutes ses manifestations constitue l'une des menaces les plus graves contre la paix et la sécurité »3(*)62. Cette façon bien singulière et incommode de traiter la question du terrorisme est qualifiée tantôt de « surenchère de condamnation »3(*)63, tantôt de « surenchère de qualifications »3(*)64. Le Professeur Pierre KLEIN3(*)65 fait remarquer à ce sujet que l'extension de la qualification de menace contre la paix et la sécurité à des actes de terrorisme qui ne présentent aucun caractère international place cette évolution en porte-à-faux par rapport aux règles conventionnelles existantes dans ce domaine. En effet, dans l'ensemble des conventions « sectorielles » adoptées en vue de prévenir et de réprimer les diverses activités terroristes, un élément d'extranéité est systématiquement exigé pour que les faits en cause tombent sous le coup du régime conventionnel applicable. Ainsi, on assiste, du fait des qualifications extrêmement larges opérées par le Conseil de sécurité, à la création d'une disparité de régime entre réponse- conventionnelle et institutionnelle- au terrorisme. En deuxième lieu, le caractère systématique de cette qualification n'est pas non plus sans poser quelque interrogation. Des doutes très sérieux paraissent pouvoir être exprimés quant au fait que tout acte de terrorisme (international a fortiori non international) puisse- ou doive- être considéré comme une menace à la paix et à la sécurité internationales3(*)66. Cette surenchère des qualifications n'annonçait-elle pas déjà une extension sans précédent du domaine d'action du Conseil de sécurité ? Il faut le croire, surtout que- on le verra maintenant- le Conseil de sécurité par un tour de passe et de jeu bien subtil, en est arrivé progressivement à s'arroger tous les pouvoirs.

      (2)-... A la confusion des pouvoirs : le Conseil de sécurité en tant que détenteur des pouvoirs exécutif, judiciaire et législatif

      Dans le système de la Charte des Nations Unies, le Conseil de sécurité a été conçu comme un organe doté de compétences de nature essentiellement « exécutive ». Il lui revient principalement d'oeuvrer en faveur du règlement des différends internationaux, dans le cadre du Chapitre VII de la Charte, ou d'agir pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales, y compris par le biais de l'imposition de mesures coercitives, en vertu du Chapitre VII. Dans ce dernier contexte, les pouvoirs qui lui sont reconnus ont vocation à être mis en oeuvre pour une période limitée à l'égard de situations particulières où la paix et la sécurité internationales se trouvent en danger, en vue d'empêcher leur aggravation et de permettre le règlement de la crise, soit par les parties elles-mêmes, soit à l'intervention d'un organe tiers, en particulier la CIJ. Il s'agit donc d'interventions ponctuelles, par rapport à des situations de crise précisément identifiées. Cette conception traditionnelle des pouvoirs du Conseil de sécurité s'est profondément remise en question à partir des années 1990, dans le contexte de la lutte contre le terrorisme, qui a fourni l'occasion à celui-ci de mettre en oeuvre- à côté de sa compétence naturelle et classique d'exécution- des compétences de nature judiciaire, puis législative. L'Affaire Lockerbie constitue le point de départ de ce mouvement d'extension. En réaction à l'implication présumée d'agents des services secrets libyens dans deux attentats visant des avions de ligne français et américain, le Conseil de sécurité a relayé, par sa Résolution 732 (1992), la demande de la France, du Royaume-Uni et des Etats-Unis d'Amérique visant à ce que la Libye leur fournisse un certain nombre d'informations susceptibles de les assister dans leurs enquêtes sur ces attentats. En l'absence de réponse de la part des autorités libyennes, le Conseil de sécurité a adopté peu de temps après une deuxième résolution beaucoup plus contraignante3(*)67. Il y exige de la Libye qu'elle satisfasse aux demandes d'extradition présentées par les trois Etats occidentaux et impose à l'Etat libyen des mesures coercitives non armées en vue de le contraindre à accepter cette solution. La Libye, estimant que les exigences occidentales portaient atteinte aux droits qu'elle détenait en vertu de la Convention de Montréal de 1971 sur les actes illicites dirigés contre la sécurité de l'aviation civile internationale, dont elle affirmait qu'elle lui donnait le droit de juger elle-même les suspects en cause, avait entre-temps saisi la CIJ d'une demande en indication de mesures conservatoires en vue de faire protéger ses droits. Comme l'a affirmé un auteur, alors que la Libye demandait l'application de la règle classique Aut dedere aut judicare contenue dans la Convention de 1971, le Conseil de sécurité exigeait pour sa part le respect d'un « principe » à l'autorité nettement moins établie : « extradite or extradite ». En l'occurrence, la CIJ n'a pu que conclure à l'impossibilité d'indiquer les mesures conservatoires demandées en raison de la primauté, en vertu de l'article 103 de la Charte3(*)68, des exigences formulées dans la Résolution 748 (1992) sur les dispositions de Montréal. Le Conseil de sécurité a donc agi en l'espèce comme un juge3(*)69 en tranchant le différend juridique opposant les Etats, privant ainsi la Libye de la possibilité d'invoquer les droits qu'elle tirait d'une convention internationale applicable à la situation. Le Conseil s'est ainsi substitué indirectement à la Cour internationale de justice ou a, à tout le moins, significativement interféré dans l'exercice des compétences de cette dernière. Qui plus est, il a cumulé en l'espèce ce pouvoir de nature judiciaire avec son rôle « exécutif » traditionnel, puisqu'il a assorti sa décision de mesures de contrainte visant à en assurer la mise en oeuvre forcée.

      L'adoption de la Résolution 1373 (2002) précédemment évoquée3(*)70 marque le franchissement d'un autre seuil par le Conseil de sécurité à cet égard. Elle impose aux Etats membres des Nations Unies un ensemble d'obligations en vue de lutter efficacement contre le terrorisme. Elle transforme en normes de portée générale des obligations conventionnelles3(*)71. En adoptant de la sorte des énoncés obligatoires, généraux, permanents et abstraits - puisque que leur application n'est en rien limitée, ni dans le temps, ni à une situation particulière3(*)72- le Conseil de sécurité se pose, pour la première fois de son histoire, en créateur de normes générales, exerçant sur la scène internationale un pouvoir en tous points semblables à celui du législateur3(*)73 dans l'ordre juridique interne des Etats, bien qu'une partie de la

      doctrine rechigne à le reconnaître3(*)74. Dès lors, on s'éloigne une nouvelle fois considérablement de la figure « classique » du Conseil en tant qu'organe « de police », chargé de faire face à des situations particulières de menace pour la paix et la sécurité internationales en adoptant des mesures ponctuelles pour juguler les crises. Pour autant, ici encore, le Conseil de sécurité ne se départit pas de sa fonction « exécutive ». A l'instar de ce qu'il avait fait dans le cadre de l'Affaire Lockerbie, il cumule plutôt cette fonction traditionnelle avec les pouvoirs nouveaux qu'il s'est arrogés, comme le montre la mise en place par la Résolution 1373 (2001) d'un mécanisme de contrôle - le Comité de lutte contre le terrorisme (CCT)3(*)75- chargé de la surveillance de l'exécution par les Etats membres des obligations que cette résolution met à leur charge. Rarement le Conseil de sécurité s'est-il autant préoccupé du suivi de ses décisions qu'en ce qui concerne la Résolution 1373. Cette incursion du Conseil de sécurité dans le champ législatif s'est répétée en 2004, avec l'adoption de la Résolution 1540 (2004), dans laquelle cet organe énonce de nouvelles obligations de portée générale pour l'ensemble des Etats en vue de prévenir l'utilisation par des groupes terroristes d'armes de destruction massive. Ici encore, ce sont les impératifs de la lutte contre le terrorisme qui paraissent justifier l'exercice de pareils pouvoirs exceptionnels. Ces différents précédents mettent donc pleinement en évidence la tendance du Conseil de sécurité à cumuler les fonctions « exécutives » ou de « police » qui sont les siennes selon la Charte des Nations Unies- mais aussi « judiciaires » et « législatives » qu'il n'a jamais été question de lui reconnaître dans le système de la Charte. Ils posent de très sérieuses questions quant à l'équilibre des pouvoirs au sein des Nations Unies ou, plus globalement, quant à la notion d'un Etat de droit sur la scène internationale. Cette concentration des pouvoirs entre les mains du Conseil de sécurité s'avère d'autant plus préoccupante qu'elle intervient en l'absence de tout mécanisme de contrôle de leur exercice, que ce soit au plan politique ou judiciaire3(*)76. En particulier, l'idée d'un contrôle de légalité des actes du Conseil de sécurité par la CIJ, évoquée de manière répétée au moment de l'Affaire Lockerbie, paraît actuellement bien loin de recevoir une quelconque concrétisation. Ce faisant, le Conseil de sécurité s'est mis, à plusieurs reprises, en marge du droit de la Charte, plus encore du droit international. En effet, alors que jusque-là, cet organe avait assorti un nombre significatif de ces résolutions de l'exigence du respect du droit international et du droit de la Charte3(*)77, l'immédiat post-11 septembre 2001, a donné lieu à une « éclipse » 3(*)78 de la prise en considération des règles internationales dans la lutte contre le terrorisme. Ce piétinement du droit international s'empirant- cette fois-ci- dans le cadre unilatéral de lutte contre le terrorisme.

      Section 2 : La violation des normes internationales

      dans la campagne antiterroriste

      La réaction aux évènements du 11 septembre 2001 a été l'occasion d'une violation importante de certaines des normes pertinentes du droit international. Cette violation était du reste prévisible et inéluctable, parce que la campagne contre le terrorisme s'est forgée autour de concepts nouveaux dont la teneur semble n'avoir aucune assise dans le droit international positif contemporain (A). Ces concepts ont pourtant été le ferment à la consolidation de pratiques attentatoires aux droits et libertés (B).

      Paragraphe1 : Des choix sémantiques aux conséquences

      juridiques incertaines

      La réaction unilatérale des Etats en bute au terrorisme s'est consolidée après le 11 septembre, sur le ciment de paradigmes nouveaux. Le problème, c'est que ces paradigmes qui ne sont pas le fruit du hasard ont été délibérément construits en marge du droit international, bien que leurs thuriféraires aient soutenu le contraire. Ainsi, a-t-on prétendu que la thèse de la légitime défense préventive était juridiquement valide et que la doctrine de la préemption était licite (A). On a même souvent argué qu'à l' « hyper terrorisme » devait correspondre une « hyper réaction » 3(*)79 qui s'inscrirait dans la durée. Cette idée marginale a manifestement donné naissance au concept de « guerre contre le terrorisme » qui n'est pourtant pas neutre et sans conséquences en droit international (B).

      A- Du droit d'agir de manière préventive en légitime défense à

      la « préemption » contre le terrorisme

      La légitime défense renvoie à l'autoprotection, à la réaction décentralisée à une attaque par celui-là même qui en est la victime. Et, la problématique de la légitime défense préventive est loin d'être nouvelle. Dans un ouvrage de 1758 resté célèbre, VATTEL écrivait: « Le plus sûr est de prévenir le mal qu'on veut lui faire, d'opposer la force, et tout moyen honnête, à celle qui agit actuellement contre elle, et même aller au devant des machinations, en observant toutefois de ne point attaquer sur des soupçons vagues et incertains, pour ne pas s'exposer à devenir elle-même un injuste agresseur »3(*)80. Faisant écho à cet énoncé, une interprétation controversée du droit de légitime défense consiste à affirmer que le recours à la force est autorisé de manière préventive en cas de menace imminente d'agression armée (1). Dépassant les limites traditionnellement retenues par les tenants de cette thèse, l'Administration américaine a récemment développé une doctrine tendant à justifier le recours à la force à titre préventif face à une menace naissante ou n'apparaissant pas comme imminente. Il convient donc d'élargir notre réflexion relativement à la licéité des actions menées en examinant aussi les perspectives de cette doctrine dite de la « préemption » (2).

      (1)- De la validité de la thèse de légitime défense préventive

      Il peut paraître à première vue oiseux et saugrenu de poser le problème de la validité de la légitime défense préventive tant la réponse en droit international contemporain semble couler de soi. Mais en réalité, ce débat se trouve restauré par les controverses doctrinales alimentées par certains juristes autour de cette question. Nous l'avons vu, l'article 51 de la Charte des Nations Unies limite littéralement le droit de légitime défense à une agression réalisée, ce qui paraît en toute hypothèse conforme à la jurisprudence classique3(*)81 et récente3(*)82 de la CIJ. Cela n'empêche toutefois pas certains auteurs de défendre l'existence d'une légitime défense préventive en se fondant sur plusieurs arguments. Pour MM. Jean COMBACAU et Serge SUR, « (...) la légitime défense préventive paraît juridiquement possible, et n'est pas condamnée par la Résolution 3314 (XXIX) portant définition de l'agression »3(*)83. Pour ces derniers donc, il se produit des situations où face à une agression imminente, l'efficacité de la défense nécessite l'anticipation de l'attaque. Dans de telle circonstance, l'Etat menacé peut recourir en premier à la force armée, en se fondant sur une légitime défense préventive384. Le défaut de condamnation dans cette importante résolution tendrait ainsi a contrario à faire admettre le caractère préventif de la légitime défense. D'autres avancent, pour étayer cette position, que la légitime défense peut être mise en oeuvre non seulement en cas d'agression armée, mais aussi pour les autres violations de l'article 2 paragraphe 4 de la Charte qui interdit non seulement l'emploi de la force mais aussi la menace de l'emploi de la force385. Cette lecture est à notre sens très éloignée de la lettre de l'article 51de la Charte dans la mesure où il est difficile de considérer que l'absence de la mention menace à l'article 51 puisse être considérée comme un simple oubli alors qu'elle apparaît clairement à l'article 2 paragraphe 4 de la Charte. Certains autres auteurs estiment pour leur part que l'article 51 de la Charte n'aurait pas supplanté le droit coutumier antérieur qui autorise la légitime défense préventive3(*)86.

      Il est certes vrai que la CIJ a affirmé la dualité du régime juridique de la légitime défense (conventionnel et coutumier)3(*)87, mais il est aussi bon de rappeler sa jurisprudence relative aux rapports des sources en droit international public : « (...) d'une manière générale, les règles conventionnelles ayant le caractère de lex specialis, il ne conviendrait pas qu'un Etat présente une demande fondée sur une règle de droit international coutumier si, par traité, il a déjà prévu des moyens de régler une telle demande »3(*)88. Or la lex specialis de la Charte qui emporte dérogation de la lex generalis de la pratique coutumière des Etats, est on ne peut plus clair sur les conditions d'activation de la légitime défense. Certains auteurs, dans un ultime effort de légitimation d'une hypothétique approche préventive de la légitime défense, n'hésitent pas à emprunter les chemins glissants et scabreux de l'interprétation évolutive de l'article 51 de la Charte, alléguant une obsolescence de cette disposition. Cette interprétation pour séduisante qu'elle puisse paraître ne peut cependant prospérer de lege lata, car la légitime défense telle qu'elle découle de la lettre et de l'esprit de l'article 51 de la Charte est limitée- faut-il le rappeler- à une agression armée (« armed attack » dans la version anglaise), c'est-à-dire qu'elle justifie une réaction militaire à une agression in actu, une agression actuelle. Cette conception était d'ailleurs satisfaisante à l'époque de la rédaction de la Charte de San Francisco, quand l'agression armée supposait la mobilisation visible de forces armées d'un Etat donné à la frontière d'un autre Etat. On ne peut ignorer le fait que depuis, le contexte géostratégique a grandement changé, avec les évolutions technologiques en matière d'armement, une attaque très dévastatrice pouvant être conduite avec une extrême célérité et sans signes avant-coureurs3(*)89. Il faut bien convenir en bon sens et selon des considérations de légitimité, en marge du droit international positif, que la gravité d'une telle attaque et ses caractères imprévisibles et irrésistibles rendent difficilement acceptable l'unique solution de la réaction. Un Etat devrait-il être condamné à attendre de subir une attaque pour être autorisé à réagir ? Il est tentant de répondre par la négative, et l'on peut se demander si l'article 51 n'est pas susceptible de recevoir une nouvelle lecture, en application du principe de l'effet utile3(*)90. La CIJ a toutefois considéré dans son avis consultatif du 18 juillet 1950 relatif à l'interprétation des traités de paix conclu entre la Bulgarie, la Hongrie et la Roumanie que le principe de l'effet utile ne permet pas d'interpréter dans un sens qui contredit la lettre et l'esprit d'une disposition3(*)91, qui permettrait une interprétation évolutive de cette disposition. A la vérité, le problème tient moins à une relecture de l'article 51 de la charte- qui jouit déjà d'une très grande clarté- qu'à un réaménagement en profondeur de la disposition, pour lui permettre de répondre efficacement aux défis nouveaux de sécurité internationale et d'être adapté aux évolutions très rapides de notre monde en cette matière. Monsieur Antonio CASSESE estime que l'on pourrait par exemple modifier l'article 51 de la Charte pour autoriser la légitime défense préventive face à un danger imminent (... )3(*)92. Mais avant d'y arriver- il convient, bien entendu, de se garder de mettre la charrue avant les boeufs- on insistera sur le fait que le jus gentium positivium n'autorise pas en l'état actuel de la Charte le jus praeventionis qui est un droit difficile à encadrer. Comme on peut le présupposer, les conditions de nécessité et de proportionnalité peuvent s'avérer problématiques s'agissant d'une action par anticipation, le caractère imminent d'une attaque pouvant tout aussi être particulièrement difficile à vérifier3(*)93. Et, en pareille circonstance on peut craindre que la légitime défense préventive fasse l'objet d'invocations par trop extensives, abusives ou par erreur. Ce faisant, M. Robert KOLB3(*)94 voit dans la légitime défense préventive rien moins que le « démantèlement du système des Nations Unies », dans la mesure où « le jus contra bellum se transforme en jus pro bello largement discrétionnaire ». Plus contestable encore sera la notion de « préemption » qui renvoie à une catégorie particulière de légitime défense préventive.

      (2)- De la licéité de la « préemption »

      Employée dans la doctrine politique et militaire de l'Administration BUSH, la notion de « préemption »3(*)95 est utilisée pour qualifier une opération préventive alors que la menace naissante est incertaine. Elle est de ce fait une action face à un risque d'attaque, une attaque hypothétique et sans certitude3(*)96. Elle se rapproche dès lors du principe de précaution en droit international de l'environnement. De façon singulière, elle vise dans la doctrine américaine, la collusion entre « Etats voyous » et terroristes et principalement, l'acquisition d'armes de destruction massive. Dans l'actuel contexte géopolitique en perpétuelle mouvance, la légitime défense classique serait ainsi inadaptée face aux nouvelles forme de menace liées à l'utilisation d'armes de destruction massive par des groupes terroristes, c'est-à-dire des acteurs non étatiques qui représentent des intérêts qui ne sont pas géographiquement circonscrits. La préemption défendue par les Etats-Unis d'Amérique revient ainsi à l'action unilatérale par anticipation de telles menaces, avant qu'elles ne soient véritablement cristallisées, et même dans l'incertitude quant aux lieux et moments de l'attaque. Une telle option stratégique fait craindre des errements encore plus graves que la thèse de la légitime défense préventive, parce que contrariant de façon flagrante le droit international positif. Il est particulièrement inquiétant de constater qu'aucun critère n'est avancé pour définir les cas dans lesquels la préemption par la force sera mise en oeuvre. L'Administration américaine se réserve donc manifestement un pouvoir d'appréciation discrétionnaire qui débouche inéluctablement sur l'arbitraire. L'expédition punitive de la coalition anglo-saxonne en Irak en 2003 avait été dénoncée par la communauté internationale dans son ensemble et suscité une vague de désapprobations et de protestations tous azimuts dans le monde. On se souvient que des Membres du Conseil de sécurité aussi influents que la Chine, la Russie et la France avaient marqué des réserves et même des réticences face à une telle opération militaire dont ils doutaient du bien-fondé, préférant une logique multilatérale (par le truchement des Nations Unies) plus regardante des normes internationales. Cette désapprobation générale fut relayée au plus niveau de l'instance onusienne, par la voix de son Secrétaire général d'alors, Monsieur Koffi ANNAN qui affirmait : « Cette logique constitue un défi fondamental aux principes sur lesquels, même si cela ne l'était que d'une manière imparfaite, la paix et la stabilité mondiales ont été fondées depuis 58 ans. Ce qui m'inquiète c'est que , si cette logique était adoptée, elle pourrait créer des précédents conduisant à la multiplication de l'usage unilatéral de la force, avec ou sans justification crédible »3(*)97. Ces inquiétudes sont d'autant plus justifiées que « preemptive self defense would provide legal justification for Pakistan to attack India. For Iran to attack Iraq, for Russia to attack Georgia, for Azerbaijan to attack Armenia, for North Korea to attack South Korea, and so one »398. Cette doctrine qui relève plus de la rhétorique stratégique ou de la spéculation que du droit3(*)99 est, dans l'unilatéralisme antiterroriste, la boîte de pandores ouvertes à tous les abus, à tous les excès4(*)00. C'est sans nul doute pourquoi elle n'a pu avoir la caution de ceux même des juristes qui sont pourtant favorables à la thèse de la légitime défense préventive4(*)01. Envers et contre la philosophie de l'hégémonisme4(*)02, nous pensons honnêtement que la campagne unilatérale des Etats-Unis d'Amérique contre le terrorisme contribue à la délégitimation du mécanisme de sécurité collective mis en place depuis des décennies, ce qui a pour conséquence fâcheuse de provoquer une certaine complexification des relations internationales. Un autre concept- la « guerre » contre le terrorisme- est mis en avant dans la lutte contre le phénomène criminel.

      B- De l'invocation du concept de « guerre » contre le terrorisme

      Le recours à la force en réponse à tel ou tel type d'acte relève toujours d'un choix. Le choix opéré par un Etat est immanquablement influencé par un certain nombre de facteurs politiques ou stratégiques, mais aussi culturels, qui déterminent le paradigme dans le lequel cet Etat s'inscrit in fine pour répondre aux actes et aux menaces qui le visent. Ce paradigme est clairement militaire pour les uns, essentiellement juridique pour les autres. Selon une certaine approche anglo-saxonne, le terrorisme doit être conçu comme une guerre de basse intensité (a law intensity conflict). C'est bien évidemment au nom de cette conception que la réaction aux attentats du 11 septembre 2001 a été montée par les Etats-Unis d'Amérique4(*)03. Le choix de cette terminologie, la guerre contre le terrorisme n'est pas le fruit du hasard. On peut lui trouver une justification : la tendance des décideurs à se situer dans un état d'exception et de dérogation au droit commun. Le langage de la guerre offre d'indéniables avantages à celui qui le manie. Il lui permet en effet de légitimer sa propre violence à venir4(*)04, de se placer dans la situation d'exception que le contexte de guerre constitue traditionnellement et de revendiquer les pouvoirs qui accompagnent l'invocation de pareille situation d'exception, généralement moins encadrée par la règle de droit. Bien évidemment, la marge de manoeuvre des autorités qui s'inscrivent dans cette logique peut ainsi s'en trouver sensiblement accrue, et les contraintes que leur impose en temps normal l'ordre juridique (national ou international) se voient réduites. Ces possibilités de dérogation se manifestent avant tout, dans le domaine des droits fondamentaux, qui font très fréquemment l'objet d'empiètement importants au nom de la prétendue guerre contre le terrorisme. Ces risques sont d'autant plus importants lorsque la guerre se présente comme une guerre « juste », une qualification parfois revendiquée de manière explicite dans le cas d'espèce4(*)05. On a ainsi exprimé la crainte que ce retour de la « guerre juste » 4(*)06 se traduise par la remise en cause de certains principes bien établis du jus in Bello, tels que celui de l'égalité des belligérants devant le droit de guerre. Le vocable de la guerre juste sert alors ni plus ni moins à justifier tous les abus qui pourraient être commis dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Il permet également d'échapper aux contraintes temporelles inhérentes à la notion même de légitime défense. Alors que celle-ci ne peut être valablement invoquée que dans un délai relativement bref, après l'acte d'agression auquel elle répond, la notion de guerre projette généralement celle de durée, ouvrant ainsi, dans les esprits au moins, le droit de recourir à la force pour se défendre sans limite de temps4(*)07. Ici encore, l'idée de la dérogation à la règle, justifiée par une situation d'exception, est bien présente. La caractérisation de la lutte contre le terrorisme comme une « guerre » se voit cependant remise en cause par le manque de cohérence de ceux qui tiennent ce discours. En effet, plusieurs commentateurs4(*)08 ont souligné que les Etats qui inscrivaient la lutte contre le terrorisme dans un paradigme guerrier n'étaient pas prêts à en assumer toutes les conséquences, particulièrement en ce qui concerne l'application des règles du droit des conflits armés à leurs opposants. Cette question s'est posée avec une acuité particulière au sujet de la création, par les autorités américaines, de la catégorie d'«ennemi combattant », non reconnue par le droit humanitaire qui devait trouver à s'appliquer aux personnes capturées en Afghanistan. On a également observé que l'utilisation du vocable de la guerre aurait pour effet de transformer en cibles légitimes les installations et les forces militaires des Etats engagés dans cette « guerre »4(*)09. Or, il est loin d'être évident que ceux-ci soient prêts à accepter une telle conséquence du recours au vocable de la guerre. Au regard de ces différents éléments, il n'est pas surprenant que, dans la doctrine juridique tout au moins, la très grande majorité des auteurs se soit refusée à avaliser la conception selon laquelle les attentats du 11 septembre 2001 auraient donné naissance à une situation de guerre et marqué le point de départ d'une « guerre contre le terrorisme » à long terme4(*)10. Ces choix sémantiques qui sont entachés d'un vice congénitalement rédhibitoire vis-à-vis du droit international- ainsi qu'on vient de le voir, débouchent - on le verra maintenant - sur des dérives, ouvrant ainsi le champ libre à des pratiques attentatoires aux droits et libertés.

      Paragraphe 2 : Des pratiques attentatoires aux droits et

      libertés

      La question de l'impact du terrorisme sur les droits de la personne a suscité un débat aussi classique que complexe. Dans un premier temps, l'accent a fréquemment été mis sur le fait qu'en raison de leur caractère violent et généralement indiscriminé, les actes de terrorisme portaient une atteinte grave aux droits humains4(*)11. Cette première dimension des rapports entre terrorisme et protection des droits de la personne est évidemment fondamentale. Mais la question des relations entre terrorisme et jouissance des droits et libertés se pose également sous un autre angle. De fait, au fur et à mesure de l'adoption, par les Etats, de mesures législatives ou d'actions de terrain visant à lutter contre des actes qualifiés de terroristes, les risques que faisaient naître pareilles mesures et actions pour la protection des droits de la personne eux-mêmes sont apparus de plus en plus significatifs. Nombreux sont en effet les pays où, selon les époques et les menaces- réelles ou ressenties-, des mesures visant à restreindre la jouissance de certains droits fondamentaux ou à y déroger à plus ou moins long terme ont été adoptées. Les attentats du 11 septembre, en particulier, ont occasionné l'instauration d'un « Etat d'exception » aux Etats-Unis d'Amérique (A) et l'établissement d'une « zone de non droit » (B) à l'extérieur de ce territoire.

      A- L'instauration d'un « Etat d'exception »

      Les attentats du 11 septembre 2001 ont souvent servi de prétexte à la violation massive et grave des droits et libertés. Cette violation a été particulièrement ressentie à travers les transformations accélérées subies par les codes de procédures pénales de certains pays4(*)12. Les mois et parfois les jours qui suivent cette date historique, les gouvernements ont pris des mesures qui restreignent les libertés publiques ainsi que l'autonomie de la vie privée. Les Etats-Unis d'Amérique ont été les premiers à prendre de nouvelles mesures antiterroristes. L'USA Patriot Act entré en vigueur le 26 octobre 2006 corse les pouvoirs de la police et des services de renseignements. Les autorités peuvent ainsi arrêter et retenir, pour une période non déterminée, des étrangers soupçonnés d'être en relation avec des groupes terroristes. Ce qui met naturellement en mal, la présomption d'innocence4(*)13. Dans la foulée, le Président George W. BUSH prit un décret- l'Exécutive Order- à la date du 13 novembre 2001, qui met en place des tribunaux militaires d'exception chargés de juger les étrangers accusés de terroristes. Le procès peut être secret et il n' y a pas de procédure d'appel devant une juridiction civile4(*)14. Destinés à supprimer tout mécanisme de protection aux étrangers arrêtés, ces mesures procèdent à une suspension du droit des Etats-Unis d'Amérique pour les individus qui ne possèdent pas la nationalité américaine. Parallèlement, ce mécanisme discriminatoire se double d'une suspension des normes pertinentes du droit international. Les atteintes souvent très sérieuses, aux droits fondamentaux que ces pratiques impliquent ont été fréquemment dénoncées par diverses instances internationales et organisations de défense des droits de l'homme4(*)15. Ces pratiques ont toutes un point commun, celui d'être justifiées par les Etats qui y recourent au nom d'une situation d'urgence ou d'exception, qui trouve sa source dans les graves menaces que le terrorisme fait peser sur la vie même des nations concernées et sur leurs populations. C'est ce discours fondé sur l'urgence et l'exception, qui est mis en avant par les Etats qui adoptent de telles mesures, pour justifier les écarts qu'elles impliquent par rapport aux normes internationales existantes dans le domaine des droits fondamentaux, voire pour mettre à l'écart purement et simplement la règle de droit. Ces discours et pratiques laissent dans une large mesure entendre que, face à pareilles situations d'exception, le droit existant est atone, inopérant, ou que son application est incompatible avec la situation à laquelle il faut faire face. Cet argument se révèle pourtant problématique. En effet, les instruments internationaux pertinents envisagent précisément les situations d'exception et organisent, en pareil cas, la possibilité pour les Etats de mettre à l'écart une partie significative des règles que ces textes énoncent, mais enserrent cette faculté de restriction et de dérogation dans certaines limites. Il n'est donc pas contesté que des situations dans lesquelles les Etats sont confrontés à la perpétration d'actes graves de terrorisme, à une échelle importante, puissent être qualifiées de « danger public exceptionnel menaçant l'existence de la nation ». D'une manière générale, l'article 4 du Pacte international de 1966 relatif aux droits civils et politique dispose que « dans le cas où un danger public exceptionnel menace l'existence de la nation et est proclamé par un acte officiel, les Etats parties au présent Pacte peuvent prendre, dans la stricte mesure où la situation l'exige, des mesures dérogeant aux obligations prévues dans le présent Pacte, sous réserve que ces mesures ne soient pas incompatibles avec les autres obligations que leur impose le droit international et qu'elles n'entraînent pas une discrimination fondée uniquement sur la race, la couleur, le sexe, la religion ou l'origine sociale »4(*)16. C'est donc en violation de cette disposition pertinente que les Etats-Unis d'Amérique ont instauré un mécanisme discriminatoire visant à enlever à tous les étrangers soupçonnés d'avoir des liens avec des groupes terroristes toutes garanties judiciaires et de traitement. De façon particulière, le fait pour un Etat d'être confronté à des activités terroristes d'envergure a été reconnu à diverses reprises comme une circonstance où l'existence de la nation pouvait être considérée comme étant en péril et où, partant, des mesures de dérogation aux droits et libertés pouvaient être adoptées. La Cour européenne des droits de l'homme fut d'ailleurs confrontée à cette problématique dans plusieurs espèce 4(*)17. Les précédents mettent en évidence le fait que l'affirmation même d'une situation d'urgence ou de péril grave par l'Etat qui est confronté à des activités terroristes fait l'objet d'un contrôle- même limité- par la Cour. Il ne suffit donc pas à un Etat partie de proclamer l'existence de semblable péril ou urgence pour que la décision de déroger aux droits et libertés protégés par les droits et libertés soit ipso facto validée. En tout état de cause, les Etats-Unis d'Amérique auraient très vraisemblablement été en mesure d'invoquer avec peu ou prou de succès « l'existence d'une situation de danger public exceptionnel menaçant l'existence de la nation », à la suite des attentats du 11 septembre 2001, pour justifier le recours sur cette base des dérogations aux droits et libertés protégés par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques4(*)18. Ce ne fut toutefois pas le cas. Les Etats-Unis d'Amérique se sont abstenus d'adopter- et a fortiori de notifier aux autres Etats parties - quelque mesure de dérogation au Pacte que ce soit, et ne paraissent jamais eu l'intention de le faire4(*)19. En résumé, les attentats du 11 septembre, loin d'avoir occasionné un état d'exception dans la lutte contre le terrorisme- ce qui aurait eu sans doute l'avantage de couvrir certaines dérogations aux droits et libertés d'une couche de légitimité- a plutôt contribuer à asseoir aux Etats-Unis d'Amérique, un Etat d'Exception4(*)20 peu soucieux des normes pertinentes des droits de l'homme. Cette suspension du droit caractéristique de cet Etat d'exception est également perceptible à l'extérieur des frontières de ce pays.

      B- L'établissement d'une « zone de non-droit »

      A la suite des attentats du 11 septembre 2001, et plus encore du déclenchement des opérations militaires contre l'Afghanistan dans les semaines qui ont suivi, plusieurs centaines de personnes ont été arrêtées et placées en détention par les forces armées des Etats-Unis d'Amérique. La plupart de ces personnes ne possédaient pas la nationalité américaine et ont graduellement été transférées et regroupées sur la base militaire de Guantanamo Bay, située en territoire cubain mais qui continue d'être contrôlée et utilisée par les Etats-Unis d'Amérique en vertu d'un accord de cession à bail conclu entre cet Etat et Cuba en 1903. La quasi-totalité d'entre elles se sont trouvées détenues sur ce territoire durant plusieurs années, sans être jugées, ni même présentées à un juge. Un grand nombre de ces détenus ont également été soumis à des mauvais traitements4(*)21 au cours de cette période. Dès 2001, les autorités américaines ont soutenu de manière constante que les détenus de Guantanamo ne disposaient d'aucun recours judiciaire pour mettre en cause la légalité de leurs conditions de détention, dès lors que le territoire de Guantanamo ne relevait pas de la souveraineté des Etats-Unis et qu'il ne pouvait de ce fait être question d'y appliquer les garanties juridiques traditionnelles4(*)22. Des responsables politiques américains ont ainsi laissé entendre à diverses reprises que les personnes incarcérées à Guantanamo pourraient y être maintenues en détention jusqu'à ce que la guerre contre le terrorisme soit gagnée4(*)23. L'argument selon lequel le caractère « extraterritorial » de la base de Guantanamo excluait toute possibilité, pour les personnes qui y étaient détenues, d'exercer un recours juridictionnel contre leurs conditions de détention ou pour demander qu'il soit statué sur le bien-fondé de celle-ci a été reçu par plusieurs tribunaux américains4(*)24. Cette absence de toute possibilité, pour les détenus de Guantanamo, de saisir un tribunal afin qu'il se prononce sur la légalité de leur détention a néanmoins fait l'objet de critiques de plus en plus significatives, sur la scène internationale d'abord, puis aux Etats-Unis d'Amérique. Plusieurs instances internationales ainsi que divers commentateurs ont ainsi mis en cause l'existence à Guantanamo d'une « zone de non droit »425. Et les appels se sont par la suite multipliés pour demander la fermeture complète de ce lieu de détention4(*)26. A cet égard, il a été rappelé à de nombreuses reprises que c'était le critère du contrôle effectif exercé sur un territoire, et non celui de l'existence de droits souverains, qu'il convenait de prendre en compte pour déterminer l'applicabilité, aux situations se présentant sur ce territoire, des normes internationales de protections des droits de la personne4(*)27. Le principe est, en effet, solidement établi. Ainsi, dans son observation n° 31 rendue en 2004 sur « la nature de l'obligation juridique imposée aux Etats parties au Pacte relatif aux droits civils et politiques », le Comité des droits de l'homme des Nations Unies expose que : « aux termes du paragraphe premier de l'article 2, les Etats parties sont tenues de respecter et garantir à tous les individus se trouvant sur leur territoire et à tous ceux relevant de leur compétence les droits énoncés dans le Pacte. Cela signifie qu'un Etat partie doit respecter et garantir à quiconque se trouve sous son pouvoir ou son contrôle effectif les droits reconnus dans le Pacte même s'il ne se trouve pas sur son territoire »4(*)28. Le Comité insiste à cette occasion sur le fait que les garanties du Pacte doivent s'appliquer à toute personne qui se trouve sous le contrôle effectif d'un Etat partie, y compris par le biais des forces armées de cet Etat agissant en dehors de son territoire, indépendamment de toute question de nationalité4(*)29. En s'appuyant sur de nombreux éléments de la pratique, la Cour internationale de Justice est arrivée aux mêmes conclusions en ce qui concerne l'application du Pacte international relatif aux droits civils et politiques dans son avis consultatif de 2004 sur les Conséquences juridiques de l'édification d'un mur dans le territoire palestinien occupé4(*)30. Il ne fait donc aucun doute que les garanties, y compris procédurales, des droits fondamentaux découlant du Pacte de 1966 s'appliquaient, dès le départ, en faveur des personnes détenues à Guantanamo Bay et qu'elles possédaient, de ce fait, le droit de se faire entendre devant un tribunal. Il n'existait, à cet égard, aucun « vide juridique » justifié par le caractère extraterritorial de cette base militaire. C'est, en fin de compte, aux mêmes conclusions qu'est parvenue la Cour suprême des Etats-Unis d'Amérique à partir de l'année 2004 et tout récemment en juin 2008. La haute juridiction a en effet décidé, dans les affaires Rasul vs. Bush (2004) et Boumediene vs. Bush (2008) que la loi fédérale (Statute) relative à l'habeas corpus conférait compétence aux tribunaux américains pour statuer sur des demandes formulées par des détenus de Guantanamo Bay 4(*)31. Ces décisions battent ainsi en brèche l'argument selon lequel l'absence de souveraineté sur le territoire en cause aurait pour effet de priver les personnes qui y sont détenues de toute possibilité de recours judiciaire contre le principe et les conditions de leur détention. En définitive, ce « trou noir judiciaire »4(*)32 laissé artificiellement béant ne serait qu'une « lacune de convenance »4(*)33, rien de plus. Il n'y a plus qu'à espérer que le nouveau président américain Barak OBAMA qui a récemment révélé ses intentions de fermer ce lieu de détention, joigne l'acte à la parole.

      Si l'usage de la force- ainsi que l'on l'a vu- a fait l'objet d'une approche dangereuse dans le traitement du terrorisme, les développements qui vont suivre concluent à la non pertinence de l'approche dans le recours aux mesures de contrainte non armée et aux juridictions.

      Chapitre II: UNE approche non pertinente dans le

      traitement du terrorisme

      Le traitement de la question du terrorisme a révélé les limites et les insuffisances de l'approche usitée pour y faire face. D'abord, on constate que les mesures de coercition non militaires en réponse au phénomène terroriste sont caractérisées par leur relative efficacité (Section 1). Ensuite, il semble que la justice contemporaine constitue une réponse inadaptée à cette forme de criminalité (Section 2).

      Section 1 : La relative efficacité des mesures de contrainte non armée décidées dans le cadre de la lutte antiterroriste

      Le Conseil de sécurité des Nations Unies a réagi au soutien au terrorisme en édictant des mesures de coercition non armée à plusieurs occasions. La mise en oeuvre de ces « sanctions », ainsi que le constat de résistance des cibles nous amèneront à nous interroger sur leur efficacité. Ce faisant, l'étude de l'efficacité des mesures coercitives non armée décrétées dans le cadre du traitement du terrorisme invite d'abord à en présenter le régime juridique ( Paragraphe 1), puis en apprécier la portée ( Paragraphe 2).

      Paragraphe 1 : Le régime des mesures de contrainte non

      armée décidées

       

      Avant même d'exposer le régime des mesures de contrainte non armée sous lequel a été traitée la question du terrorisme, quelques précisions importantes méritent d'être faites : Premièrement, les mesures de coercition non armée dont il s'agit ici se définissent par certaines caractéristiques. Ce sont d'abord des mesures verticales, ce qui les distingue des contre-mesures, qui s'inscrivent dans un schéma horizontal. Ainsi, le rapport n'est vertical que lorsque l'Etat cible des mesures est membre de l'organisation internationale. Au contraire, quand une organisation internationale adopte des mesures contre un Etat non membre, le rapport est horizontal et relève des contre-mesures4(*)34. Deuxièmement, l'étude de la pratique des « sanctions » internationales révèle que le cadre universel des Nations Unies est le seul dans lequel des « sanctions » ont été adoptées contre un Etat. Ces précisions faites, nous envisageons aborder la question du régime des mesures coercitives non armée décidées dans le cadre de la lutte contre le terrorisme sous deux angles : de façon synthétique, on planchera dans un premier temps sur le choix des moyens (A), puis dans un second temps sur le choix des cibles (B).

      A- Le choix des moyens

      De nombreuses situations conflictuelles ont amené le Conseil de sécurité à prendre des « sanctions » en réponse au soutien de certains Etats au terrorisme. Pourtant, seulement deux espèces que nous considérons comme des cas classiques seront analysées pour les besoins de l'étude. Il s'agit notamment des « sanctions » édictées contre la Libye en 1992 (1) et celles qui ont été prises à l'encontre l'Afghanistan des Taliban en 1999.

      (1)- Le cas de la Libye 

      On se souvient qu'en 1988, un attentat est commis contre le vol 103 de la Pan Am, assurant la liaison Francfort- New York. L'avion américain explose en plein vol au-dessus du village écossais de Lockerbie, tuant ainsi les 259 personnes à bord de l'appareil ainsi que 11 personnes au sol. Puis l'année suivante, survient un deuxième attentat contre le vol 772 de l'Union des Transports Aériens (UTA). L'avion français, en provenance de Brazzaville (Congo), s'écrase dans le désert du Ténéré, une région du Sahara situé au Niger, provoquant la mort de 170 personnes. Suites aux enquêtes menées par les gouvernements concernés, les Etats-Unis d'Amérique et le Royaume-Uni demandent l'extradition de deux ressortissants libyens inculpés dans l'attentat contre le vol 103 de la Pan Am. Quant à la France, elle lance un mandat d'arrêt international contre quatre ressortissants libyens, sans pour autant déposer de demande d'extradition auprès du gouvernement libyen4(*)35. Ces deux affaires occasionnent par ailleurs l'activation de l'article 39 de la Charte des Nations Unies4(*)36 dont l'organe sécuritaire se saisira de la question. Une série de résolutions est alors adoptée pour répondre aux actes illicites. La première Résolution (732/ 1992) dans laquelle le Conseil de sécurité déplore le fait que la Libye n'ait pas favorablement répondu aux demandes des pays victimes relativement aux procédures judiciaires, exige de ce pays qu'il livre d'une part ses deux ressortissants accusés d'avoir perpétrés l'attentat contre le vol 103 de la Pan Am. D'autre part, la résolution entendait arracher à la Libye son engagement ferme à « cesser de manière définitive toute forme d'action terroriste et toute assistance aux groupe terroriste (...) », tout en montrant par des actes concrets, et cela le plutôt possible, sa renonciation au terrorisme. Dans la Résolution 1192 (1998), le Conseil de sécurité réitère formellement les exigences de la précédente résolution. Toutefois, il raffine ses injonctions en décidant que les « sanctions » contre Tripoli ne seront suspendues qu'une fois les deux accusés libyens livrés aux Pays-Bas en vue de leur jugement par une cour écossaise. Les « sanctions » contre la Libye ont été imposées en deux temps. Les mesures de la Résolution 748 (1992) ont été effectives le 15 avril 1992. Il s'agissait de « sanctions » diplomatiques et économiques, concernant :

      - différents aspects des liaisons aériennes : tous les Etats devaient refuser le décollage, l'atterrissage ou le survol à tout aéronef s'il prévoyait d'atterrir sur le sol libyen ou s'il en avait décollé (sauf exception humanitaire). Les Etats devaient interdire à leurs nationaux de fournir des avions ou composants d'avions ou autres services d'ingénierie ou maintenance etc.4(*)37, et empêcher le fonctionnement des bureaux de la compagnie Libyan Arab Airlines4(*)38.

      - la fourniture d'armes et de matériel militaire : tous les Etats devaient aussi interdire à leurs nationaux de fournir à la Libye des armements et des matériels militaires (munitions, véhicules, pièces détachées, etc.), accords de brevets pour leur fabrication et entretien, et conseils techniques ou assistance. Les Etats devaient ainsi retirer leurs agents diplomatiques en Libye conseillant les autorités libyennes dans le domaine militaire4(*)39.

      - Les effectifs et les activités des représentations diplomatiques et consulaires libyennes : tous les Etats devaient encore réduire « de façon significative » le nombre et le niveau du personnel diplomatique et consulaire, et restreindre ou contrôler leurs déplacements.

      - Le traitement des nationaux libyens reconnus auteurs ou soupçonnés d'activités terroristes : tous les Etats devaient enfin prendre toutes les mesures pour refuser l'entrée de terroristes libyens avérés ou soupçonnés ou procéder à leur expulsion4(*)40. Face à la résistance de Tripoli, le Conseil de sécurité a décidé de renforcer le régime des mesures de coercition par de nouvelles mesures entrées en vigueur le 1er décembre 1993. Ce renforcement des « sanctions » n'a pas emmené la Libye, qui les considéraient « illégales », à satisfaire les exigences du Conseil de sécurité. Ce dernier n'a pourtant pas adopté de nouvelles « sanctions » mais simplement déclaré son intention de le faire dans la résolution 11924(*)41 si les deux inculpés n'étaient pas livrés aux Pays-Bas en vue de leur jugement par un tribunal écossais ou jugés aux Etats-Unis ou au Royaume-Uni. Le renforcement des mesures n'a pas été nécessaire puisque la Libye a finalement accepté de livrer ses ressortissants.

      (2)- Le cas de l'Afghanistan des Taliban :

      Pour l'histoire, on retiendra que les Taliban4(*)42 au pouvoir depuis 1996 revendiquent la mise en place d'un Emirat4(*)43 islamique d'Afghanistan. En face, se trouvent différentes factions qui se sont alliées afin de former un Front uni (aussi appelé l'Alliance du Nord) et qui défendent l'Etat islamique d'Afghanistan. Le conflit afghan dure depuis de nombreuses années, et malgré les diverses tentatives de médiation des nations Unies qui désirent mettre en place un gouvernement provisoire représentatif des diverses factions en attendant l'organisation d'élections, aucun cessez-le-feu n'est envisagé par les deux parties en présence. Ce conflit menaçait la stabilité régionale au point où d'importants flux de réfugiés cherchant à fuir le conflit ont été enregistrés, le trafic de drogue et son corollaire de criminalité étant par ailleurs devenus un problème sérieux pour cette partie du monde dans la mesure où ce fléau connaissait une nette croissance4(*)44. C'est dans un tel contexte de délitement de l'Etat afghan4(*)45 que les ambassades américaines de Nairobi (Kenya) et de Dar es Salam (Tanzanie) sont la cible d'attentats terroristes. Quelques 260 personnes y trouvent la mort et 4.500 autres blessés. L'enquête judiciaire menée par les Etats-Unis d'Amérique sur ces deux attentats met en cause l'internationale nébuleuse terroriste Al Qaida dont la simple évocation rappelle le « tristement célèbre » milliardaire oussama BEN LADEN. Cet attentat serait la manifestation d'une réaction contre le rapprochement entre le leader spirituel du Soudan, Hassan El-Tourabi, et les Etats-Unis d'Amérique, rapprochement qui signifierait la fin du Front islamique international4(*)46. Les attentats ont donc servi d'avertissement à la puissance mondiale afin de mettre fin à ce rapprochement, et s'inscrivent du reste dans la lignée de la fatwa décrétée par BEN LADEN4(*)47. Les sanctions imposées par la Résolution 1267 (1999) à la « faction afghane dénommée Taliban », et non formellement à l'Etat afghan concernent son soutien au terrorisme. Elle exige que les « Taliban remettent sans plus tarder BEN LADEN aux autorités compétentes (...) » et insiste que la faction afghane « se conforme sans attendre aux résolutions antérieurs du Conseil et cesse, en particulier, d'offrir refuge et entraînement aux terroristes internationaux et à leurs organisations (...) ». Le régime des « sanctions » ciblées contre les Taliban imposé par la Résolution 1267 consistait à la fois en un embargo de restriction des voies aériennes sur les fonds et biens financiers des Taliban. Le paragraphe 4 de la résolution imposait en effet à tous les Etats de :

      - refuser aux aéronefs appartenant aux Taliban ou affrétés ou exploités par les Taliban ou pour le compte des Taliban l'autorisation de décoller de leur territoire ou d'y atterrir sauf exception humanitaires (y compris religieuses telles que le pèlerinage à La Mecque).

      - geler les fonds et autres ressources financières, notamment de biens appartenant aux Taliban ou contrôlés directement ou indirectement par eux, ou appartenant à toute entreprise appartenant aux Taliban ou contrôlés par eux.. A l'instar des du cas précédemment présenté, le Conseil a renforcé le régime des « sanctions ». Il a principalement imposé dans la Résolution 1333 (2000) un embargo sur les armements et matériels militaires (et véhicules, pièces de recharge...) et obligé les Etats à empêcher la vente de conseils techniques, d'assistance ou entraînement aux activités militaires des Taliban par leurs nationaux, ainsi qu'à retirer les agents et individus présents en Afghanistan pour conseiller les Taliban sur le plan militaire et sécuritaire. Cette mesure était ainsi prometteuse puisqu'elle visait à affecter les Taliban sur le champ de bataille contre l'Alliance du Nord. Des « sanctions » diplomatiques ont en outre été décidées. Enfin, s'agissant des liaisons aériennes, les Etats devaient fermer immédiatement tous les bureaux de la compagnie aérienne Ariana Afghan Airlines sur leur territoire, d'y atterrir ou de le survoler si cet aéronef a décollé d'un endroit situé sur le territoire de l'Afghanistan désigné par le Comité comme étant par les Taliban.

      Au total, Il s'agissait pour l'essentiel pour le Conseil de sécurité de faire infléchir ces Etats accusés de soutenir le terrorisme, afin d'obtenir d'eux leur engagement ferme d'y renoncer. L'objectif étant cependant d'amener ces Etats à composition en minimisant les répercussions néfastes des « sanctions » pour les populations, celles-ci (« les sanctions ») devait être ciblées.

      B- Le choix des cibles

      Le ciblage des « sanctions » va nous amener à déterminer, dans deux cas qui intéressent notre étude, les destinataires de ces mesures (1), lesquelles mesures s'accompagnent de dérogations dites humanitaires (2).

      (1)- Les destinataires des « sanctions » décidées

      Le choix des cibles dans les deux cas d'étude appelle certaines remarques. S'agissant d'abord du régime des mesures coercitives prises à l'encontre de la Jamahiriya arabe libyenne, ces dernières visent l'Etat en tant que tel, ne sont pas ciblées contre l'appareil gouvernemental mais affectent globalement l'Etat et sa population. Par contre, des mesures particulières visent en outre certains individus libyens, ceux qui sont des auteurs reconnus ou soupçonnés d'actes de terrorisme4(*)48. Le Conseil de sécurité oblige les Etats à prendre toutes les dispositions pour empêcher leur entrée sur le territoire. Il s'agit de mesures très ciblées mais dont la compatibilité avec le droit international est mise à rude épreuve. En effet, on comprend mal pourquoi les « sanctions » consistent à se débarrasser de ces individus, quand bien même ce sont- par définition- des auteurs reconnus ou soupçonnés d'actes terroristes. Cela semble contraire aux principes du système de répression internationale élaboré sur le plan universel qui, comme nous l'avons vu, repose sur la coopération entre Etats et l'ubiquité de la répression. Il aurait suffit en pareille circonstance de rappeler la nécessité de la mise en oeuvre du principe Aut dedere aut judicare.

      S'agissant, enfin, du choix de prendre pour cible la « faction afghane dénommée Taliban », il répond au croisement de plusieurs considérations. Primo, ces mesures ont pour objectif la lutte contre le terrorisme, contre O. BEN LADEN, activement recherché depuis les attentats du 7 août 1998 contre les ambassades américaines de Nairobi et de Dar es Salam, et son organisation. Comme l'a noté l'Equipe d'appui analytique et de surveillance des sanctions contre les Taliban et Al-Qaida : « Habitué à traiter avec les Etats, le Conseil a décidé de s'opposer à l'organisation Al-Qaida4(*)49 en l'empêchant de tirer parti de l'appui infrastructurel que lui fournissaient ses hôtes les Taliban »4(*)50. Secundo, le Conseil de sécurité, en ciblant la faction afghane dénommée Taliban, entendait la distinguer de l'Etat afghan, ce qui traduisait par ailleurs son refus de la reconnaître comme gouvernement de l'Afghanistan quelque que pu être l'effectivité de son pouvoir dans le pays.

      (2)- Les dérogations humanitaires en faveur des

      populations

      La prise en compte des effets néfastes et non souhaitables des « sanctions » sur la population des pays sanctionnés a amené le Conseil de sécurité à accompagner dans de nombreux cas ses « sanctions » d « exceptions humanitaires ». Il s'agit d'aménager certaines exceptions au régime de « sanctions » décidé au regard des circonstances factuelles particulières ; ceci pour éviter les abus et préserver l'efficacité de la contrainte. Le Conseil de sécurité institue à cette fin des comités de sanctions qui jouent un rôle crucial pour équilibrer l'efficacité des sanctions et les considérations humanitaires. Des dérogations humanitaires ont ainsi été appliquées en faveur de la population libyenne et de la population afghane.

      Dans la situation libyenne, le Conseil de sécurité a inséré dans la Résolution 748 (1992) une exception au blocus aérien pour certains vols autorisés par le Comité des sanctions « pour d'importants motifs d'ordre humanitaire »4(*)51. Conformément à ses missions, le Comité doit « examiner toute demande formulée par un Etat aux fins de l'autorisation de vols pour d'importants motifs d'ordre humanitaire conformément au paragraphe 4 et à prendre à ce sujet des décisions rapides »4(*)52. Il ressort qu'au titre des exceptions au blocus aérien figurent deux types de vols : ceux assurant l'évacuation sanitaire4(*)53 d'urgence et ceux permettant les transports de pèlerins à La Mecque pour faire le Hadj4(*)54.

      Ces dérogations sont apparues pourtant insuffisantes aux yeux de l'OUA qui a estimé dans une déclaration en date du 10 juin 1998 que les « sanctions » « (...) empêchent l'observance des obligations religieuses, la fourniture des secours humanitaires d'urgence (...) et ont causé «  (...) de graves pertes humaines et économiques (...) au peuple libyen et à bon nombre de peuples africains »4(*)53. En ce qui concerne la situation afghane, la Résolution 1267 (1999) prévoit des exceptions aux mesures du paragraphe 44(*)54. Ainsi, les Etats devaient mener l'embargo aérien « à moins que le Comité des sanctions n'ait préalablement approuvé le vol considéré pour des motifs d'ordre humanitaire, y compris les obligations religieuses telles que le pèlerinage à La Mecque »4(*)55, geler les fonds des Taliban « à moins que le Comité n'ait donné une autorisation contraire, au cas par cas, pour des motifs humanitaires ». Enfin, on peut relever que lors des consultations officieuses tenues le 4 janvier 2002 par le Conseil de sécurité, M. Lakdhar BRAHIMA, Représentant spécial du Secrétaire général pour l'Afghanistan, a recommandé que les « sanctions » prises à l'encontre de la compagnie aérienne Ariana Afghan Airlines, qui n'était plus sous le contrôle des Taliban, soient levées dans les plus brefs délais afin de faciliter le voyage à La Mecque des pèlerins afghans.

      Les régimes des mesures de coercition non armées ayant fait l'objet de larges développements, tout l'intérêt du débat réside en ceci qu'on doit mesurer l'efficacité de celles-ci à l'aune de leur portée.

      Paragraphe 2 : La portée des mesures de contrainte non

      armée décidées 

      L'étude de l'efficacité des « sanctions » décidées dans le cadre de la lutte contre le terrorisme tient compte de multiples paramètres. Primo, il faut avoir à l'esprit le fait que la raison principale de ces « sanctions » a son siège dans le renoncement effectif des Etats visés à soutenir le terrorisme. Secundo, l'on se doit de mesurer l'impact (matériel ou psychologique) de ces « sanctions » sur les populations civiles, ce qui ne paraît pas a priori aisé pour le juriste. Pour le Professeur Jean CHARPENTIER, les sanctions sont appropriées si elles répondent à deux séries de facteurs : l'adaptation au degré de vulnérabilité de l'Etat sanctionné (possibilité pour lui de se passer des produits dont on veut le priver...) et la réception de ces dernières par les opinions publiques internes et externes4(*)56. Le premier constat à dresser est que dans les deux cas d'étude, les Etats visés ont fait preuve d'une grande résistance (A), toute chose qui a d'ailleurs nécessité- ainsi qu'on l'a vu- un corsage du régime initialement décrété. Le deuxième constat à tirer est lié aux effets contre-productifs de ces mesures (B).

      A- La résistance à l'égard de certaines mesures de contrainte non armée

      L'analyse du régime de « sanctions » montre le relatif succès des injonctions du Conseil de sécurité. Si les Nations Unies ont pu obtenir de la Libye leur engagement ferme à renoncer à soutenir officiellement le terrorisme, la résistance dont ont fait preuve ces Etats trahissent dans les faits ces engagements.

      S'agissant de la Libye, le régime de M. KADHAFI a résisté pendant dix années pour finalement accepter un compromis. Le Conseil de sécurité menaçait d'ailleurs la Libye dans sa Résolution 1192 (1998)- adoptée à l'unanimité- de recourir à des mesures supplémentaires « si les deux accusés ne sont pas arrivés ou n'ont pas comparu aux fins du procès » aux Pays-Bas. Cette résistance s'est également manifestée par la violation répétée de certaines mesures dont l'imposition des embargos. De multiples violations de l'embargo aérien ont donc été constatées régulièrement par le Conseil de Sécurité et son comité des sanctions. Elles ont tout naturellement donné lieu à de fermes condamnations. Les violations constatées ont conduit à des avertissements, parfois répétés à plusieurs Etats4(*)57. On note aussi que les violations de l'embargo décrété contre la Libye présentent un aspect organisé et une grande originalité en ce qu'elles ont été encouragées par une position de principe adoptée par l'Organisation de l'unité africaine. En effet, la Conférence des chefs d'Etat et de gouvernement de l'OUA avait, sous l'impulsion du Burkina Faso, appelé à la session de Ouagadougou, le 10 juin 1998, les Etats membres à « ne plus se conformer » dès le 1er septembre suivant aux sanctions considérées comme violant la Charte des Nations Unies et entraînant de graves pertes en vies humaines (...) »4(*)58. Cette décision « (...) a représenté une brèche dans la solidarité internationale, dans la mesure où elle a ouvert la voie à une série de violations de l'embargo par plusieurs chefs d'Etats africains »4(*)59.

      On peut l'affirmer, cette désobéissance collective jouit d'un poids symbolique très fort ; elle est au demeurant riche d'enseignement quant aux considérations de légitimité du Conseil de sécurité, la question de sa composition restreinte et inégale suscitant des débats à l'actualité brûlante4(*)60.

      Dans le cas des Taliban, l'inefficacité des « sanctions » est patente, les exigences du Conseil de sécurité n'ayant jamais été satisfaites. On pouvait douter du succès de l'embargo aérien imposé à l'Afghanistan par la Résolution 1267 (1999) alors qu'une seule compagnie aérienne était concernée et qu'elle n'assurait qu'une ligne internationale. Il s'est posé à l'évidence un problème d'adéquation de cette mesure au contexte afghan. Quant aux autres mesures, elles n'ont pas su contraindre le régime Taliban à livrer BEN LADEN et renoncer à soutenir son organisation terroriste. On sait bien évidemment que c'est l'offensive armée dirigée par les Américains qui a mis fin à ce soutien, par l'effondrement du régime Taliban4(*)61 et que BEN LADEN n'a pas été appréhendé pour autant.

      Au-delà de la résistance à l'égard des « sanctions », il faut aussi envisager les effets contre-productifs à court, moyen et long terme de ces dernières.

      B- Les effets contre-productifs des mesures de contrainte non
      armées
      Malgré les dérogations humanitaires, les mesures de coercition non armée, par leur aspect afflictif (leurs conséquences matérielles et psychologiques pour la population), peuvent avoir des effets contre-productifs qui ne sauraient être minorés : une pauvreté accrue, le repli aggravé de la population derrière son gouvernement, un profond sentiment d'injustice, etc. Ainsi que l'explique un auteur, « (...) les sanctions peuvent si elles sont appliquées sans discernement se solder par une déstructuration de la société, ajoutant ainsi aux problèmes de santé ceux liés à un profond sentiment de désespérance »4(*)62. Les Taliban ont ainsi essayé d'en tirer parti en conduisant une campagne de désinformation dans les zones sous leur contrôle, une propagande contre les mesures de coercition onusiennes, ce qui a conduit le Secrétaire général à envisager à l'avenir une campagne de diffusion auprès de la population touchée d'informations objectives sur la nature exacte de telles mesures4(*)63. Les mesures prises à l'encontre de la Libye ont aussi provoqué un repli des Libyens derrière leur chef4(*)64. Au-delà de ces quelques aspects réels, il faut toutefois avouer- ainsi qu'on l'annonçait déjà- qu'il est concrètement difficile d'apprécier avec justesse l'impact des mesures coercitives pour la population. Ainsi, si on a pu constater une nette détérioration des conditions de vie des Libyens4(*)65, les mesures ciblées contre la Jamahiriya n'en sont, de l'avis de certains4(*)66, la cause directe. L'appréciation de l'impact des mesures de coercition sur la population afghane est aussi très incertaine devant la précarité de la situation au début de ces mesures4(*)67 et la multiplication des facteurs déstabilisants : sécheresse depuis plusieurs années, violations massives des droits des l'homme, épidémies, invasions de parasites. Les rapports de l'ONU sur les répercussions humanitaires des mesures de contrainte contre les Taliban qualifient l'impact de ces dernières de « tangible mais limité »4(*)68. Le secrétaire général Koffi ANNAN a ainsi constaté que les mesures en question « n'ont eu que des répercussions limitées sur la situation humanitaire »4(*)69.
      Au total, l'analyse de l'efficacité des « sanctions » décidées dans les deux cas d'étude permet d'établir un bilan peu reluisant. De ce fait, l'application des mesures de contraintes non armées prévues par le droit international sont vite apparues insuffisantes et la justice contemporaine démontre davantage tout le malaise éprouvé par le droit international face au terrorisme.

      Section 2 : La justice contemporaine, une réponse

      inadaptée à l'infraction de terrorisme

      Le règlement pacifique des différends interétatiques en tant qu'obligation majeure internationale4(*)70 peut emprunter divers canaux. Ces canaux sont de nature tantôt politique (ou non juridictionnelle) tantôt juridictionnelle (ou judiciaire)471. Selon les termes de l'article 33 de la Charte des Nations Unies, « les Partis à tout différend dont la prolongation est susceptible de menacer le maintien de la paix et de la sécurité internationales doivent en rechercher la solution avant tout, par voie de négociation, d'enquête, de médiation, de conciliation, d'arbitrage, de règlement judiciaire (...) ». Au constat, les affaires liées au terrorisme ont donné lieu à des querelles quasi interminables. De plus, l'histoire nous montre bien que la justice a été très peu sollicitée dans les affaires relatives au terrorisme, ce qui traduit par ailleurs une sorte de malaise. En effet, l'on note que les juridictions actuelles (qu'elles soient internationales ou nationales) sont à court d'argument face à cette infraction, laissant ainsi transparaître des signes visibles d'essoufflement. Les symptômes de ce malaise sont perceptibles et on peut les rechercher et les retrouver tant dans la mise en oeuvre de la responsabilité des Etats pour leur soutien au terrorisme (Paragraphe 1) que dans la mise en oeuvre de la responsabilité des individus en tant qu'auteurs des attentats (Paragraphe 2).

      Paragraphe 1 : La marginalisation de la justice internationale dans la mise en oeuvre de la responsabilité des Etats pour soutien au terrorisme

      Tout ordre juridique suppose que les sujets de droit engagent leur responsabilité lorsque leurs comportements portent atteinte aux droits et intérêts des autres sujets de droit. Ceci est d'autant plus vrai pour la société internationale où, en vertu de sa souveraineté, l'Etat détermine librement ses décisions et se heurte à une liberté égale des autres Etats. La responsabilité internationale4(*)72 des Etats apparaît dès lors comme le mécanisme régulateur nécessaire de leurs rapports mutuels4(*)73. Le terrorisme ou plus précisément le soutien étatique aux activités terroristes a été l'occasion de la mise en ouvre de cette responsabilité. Mais on s'en apercevra, dans la pratique, cette responsabilité est restée limitée et exclusive dans la mesure où, la Juridiction internationale c'est-à-dire la CIJ n'a pas eu à connaître de ces affaires. Il s'agirait donc là d'une responsabilité tantôt para judiciaire tantôt extrajudiciaire. L'Affaire Rainbow Warrior (A) et Lockerbie (B) permettent d'illustrer cet état de fait.

      A- LA responsabilité para judiciaire de la France dans l'Affaire Rainbow

      Warrior

      Nous nous autoriserons à exhumer ici, pour les besoins de l'étude, l'Affaire Rainbow Warrior dont l'historique remonte aux années 1980. Rappelons que le 10 juillet 1985, le Rainbow Warrior, navire battant pavillon britannique et appartenant au mouvement écologiste international Greenpeace, se préparait à manifester contre les expériences nucléaires françaises à Mururoa4(*)74 ; alors qu'il mouillait dans le port néo-zélandais d'Auckland, il fut coulé par des agents relevant des services secrets français (DGSE). Un photographe, de nationalité néo-zélandaise, mais d'origine portugaise, étant remonté à bord, entre deux explosions, trouva la mort en se noyant. Cet incident fut à l'origine de la démission du ministre français de la Défense nationale. Il s'agissait là bien évidemment d'un acte de sabotage terroriste4(*)75. La responsabilité de la France était incontestablement engagée, et elle l'a été à plusieurs niveaux. Dans un premier temps, le gouvernement français, après avoir reconnu sa responsabilité, a accepté d'indemniser à l'amiable la famille de la victime à hauteur de 2,3 millions de francs français. Quant au contentieux international entre la France et la Nouvelle-Zélande, les deux gouvernements sollicitèrent M. Javier Perez De CUELLAR, alors Secrétaire Général des Nations Unies dans le cadre de sa médiation4(*)76 pour régler les problèmes nés de ce différend. Bien que les deux parties eussent accepté à l'avance de se « conformer au règlement retenu », on était pourtant bien loin d'un règlement arbitral classique4(*)77. Aux termes du règlement qui fit l'objet d'un accord international, sous forme d'échange de lettres, en date du 9 juillet, la France a adressé une lettre d'excuses et accordé 7 millions de dollars d'indemnité (soit 50 millions de francs français), tandis que la Nouvelle-Zélande a accepté que les deux officiers français inculpés soient, après une année de détention affectés pour trois ans, sur une base française dans le pacifique. Il y a donc eu à la fois satisfaction, en réparation du dommage moral, et indemnisation4(*)78.

      En ce qui concerne le litige entre la France et l'organisation Greenpeace, la réparation des dommages subis par l'association écologiste a été soumise à un arbitrage transnational (non publié) qui a abouti, en 1987, à l'octroi d'une indemnité de 8 millions de dollars (soit 50 millions de francs français de l'époque)4(*)79. On ne voit donc pas apparaître dans ce différend une quelconque référence à la Cour internationale de justice qui aurait pu à bon droit statuer en l'espèce- tout au moins en ce qui concerne le différend interétatique franco-néozélandais- bien que sa saisine soit optionnelle. L'idée de privilégier un arrangement - soit-il mauvais- au détriment d'un procès- même bon- était bien présente.

      B- La responsabilité extrajudiciaire de la Libye dans l'Affaire Lockerbie

      L'attentat commis en 1988 contre le vol 103 de la Pan Am, assurant la liaison Francfort- New York, qui avait explosé au-dessus du village de Lockerbie, a donné lieu à d'interminables tractations et intrigues politico-diplomatiques. Des négociations directes entre les trois Etats (Libye, Etats-Unis, Angleterre ) ont porté sur l'indemnisation par la Libye des victimes de l'explosion et ont abouti à la conclusion d'un accord tripartite, le 11 mars 2003, par lequel la Libye a accepté sa responsabilité. Ainsi, la Libye s'est engagée au versement d'indemnités aux victimes, à hauteur de dix millions de dollars pour chacune des 270 victimes et en contrepartie de la levée définitive des sanctions4(*)80. Le Ministre libyen des Affaires étrangères déclarait à ce sujet le 29 avril 2003 : « Mon pays a accepté de prendre sa responsabilité civile pour les actions de ses fonctionnaires dans l'Affaire Lockerbie, conformément au droit civil international4(*)81 et à l'accord survenu en mars à Londres entre les responsables libyens, américains et britanniques »4(*)82. Ceci n'a pas pour autant empêché, l'entérinement de l'accord le 15 août 20034(*)83. Comme on peut s'en apercevoir, la responsabilité internationale de cet Etat n'a pas été mise en cause devant un juge ou un arbitre international par les Etats victimes d'actes terroristes prétendument ou réellement imputables à l'Etat africain. La CIJ, saisie par la Libye dans l'Affaire dite Lockerbie, n'a pas eu à connaître de la responsabilité de cet Etat. Seul le Conseil de sécurité- ainsi qu'il l'a été précédemment évoqué4(*)84- organe politique dont les décisions échappent aux exigences d'un traitement judiciaire, a été saisi de la question de l'imputabilité et, partant, de la responsabilité.

      En ce qui concerne l'Affaire du vol 772 UTA, l'indemnisation des familles des victimes de l'explosion du DC-10 d'UTA en 1989 au dessus du désert du Ténéré a été acceptée du côté libyen par la Fondation Kadhafi4(*)85. On note cependant qu'à la différence de l'affaire Lockerbie où la Libye a reconnu officiellement sa responsabilité dans les attentats, l'Affaire du DC-10 UTA a donné lieu à une indemnisation ex gratia4(*)86, alors même que ce pays semblait n'avoir jamais reconnu sa responsabilité dans ces attentats. L'objet de ces indemnisations était en réalité de réparer les préjudices subis par des individus, personnes privées, pour écarter formellement une relation interétatique. C'est sans nul doute pourquoi les accords internationaux d'indemnisation ont été passés entre une organisation privée- La Fondation Kadhafi- qui ne saurait être apparentée à un organe de l'Etat libyen, et les familles des victimes regroupées en collectif4(*)87. Il n'empêche que l'accord de principe qui a été obtenu le 11 septembre 2003 entre la France et la Libye sur l'indemnisation des victimes en contrepartie de la levée des « sanctions » qui frappaient la Libye, s'est matérialisé par la mise sur pied, depuis 2004, d'un Fonds d'indemnisation. Il faut souligner que les protagonistes libyens avaient toutefois inscrit leurs démarches dans une perspective volontaire à vocation caritative ou humanitaire, ce qui dénote entre autre du refus de cet Etat de voir sa responsabilité être engagée.

      Si la mise en oeuvre de la responsabilité des Etats devant les instances judiciaires relève- ainsi qu'on vient de le voir- d'un procédé marginal, celle des individus a abouti- on le verra maintenant- à une dilution des mécanismes judiciaires.

      Paragraphe 2 : La dilution des mécanismes judiciaires dans la mise en oeuvre de la responsabilité des individus pour commission d'actes terroristes

      La revendication politique de la plupart des attentats terroristes constitue une difficulté quasi insurmontable dans le jugement équitable des mis en cause4(*)88. Naturellement, cette situation a pour corollaire, l'interférence ou l'intrusion de la politique dans les procédures judiciaires, provoquant ainsi une dilution des solutions judiciaires. Pour s'en convaincre nous étudierons deux affaires : nous reviendrons dans un premier temps sur l'Affaire Lockerbie précédemment évoquée (A) et dans un second temps nous évoquerons une nouvelle affaire, celle-là toujours pendante, l'Affaire Hariri (B).

      A- L'hybridité de la solution dans la mise en oeuvre de la

      responsabilité des mis en cause dans l'affaire Lockerbie

      Le Conseil de sécurité a dans l'Affaire Lockerbie, imposé à la Libye la livraison des suspects libyens, le comportement de l'Etat arabe étant considéré comme menaçant la paix et la sécurité internationales4(*)89 . Cette injonction- faut-il le rappeler- correspondait du reste aux demandes des pays victimes des attentats terroristes en l'occurrence les États-Unis d'Amérique et l'Angleterre qui ont manifesté leur volonté de voir les inculpés être traînés devant leurs juridictions nationales. La Libye s'était par ailleurs opposée à cette solution qu'elle considérait comme une violation manifeste de sa souveraineté et des principes du droit international. Après un bras de fer de plus d'une décennie, l'Affaire Lockerbie a trouvé son dénouement dans un modus vivendi original : le jugement des deux accusés par une cour écossaise dépaysée4(*)90 dans un Etat tiers neutre, les Pays-Bas. Cette solution a été trouvée grâce à la médiation de plusieurs intervenants, tels que l'ambassadeur d'Arabie saoudite à Washington et le Président sud-africain Nelson MANDELA. On a voulu dans cette solution couper la poire en deux en contentant les parties concernées. Le jugement des deux accusés s'imposait avec acuité d'autant plus qu'il devait constituer un élément catalyseur dans la décrispation, le dégel des relations entre la Libye et les pays occidentaux. Dans cette dynamique de pacification et de normalisation des relations qui existent entre ces Etats, la Libye fit part de livrer les deux suspects au 6 avril 1998, dans une lettre du 19 mars adressée au Secrétairegénéral4(*)91. Le régime KHADHAFI qui a obtenu notamment l'assurance de la levée définitive des « sanctions » au lieu de leur simple suspension, se prétend alors satisfaites dans ses exigences4(*)92. L'accord de principe a été consacré par le Conseil de sécurité dans sa Résolution 1192 (25 août 1998) adoptée sur le fondement du Chapitre VII. Le Conseil y décide que la Libye doit remettre les deux accusés aux Pays-Bas4(*)93, mais n'exige pas exclusivement le jugement par la Cour écossaise aux Pays-Bas puisqu'il envisage la suspension des « sanctions » soit si la Libye livre ses ressortissants aux Pays-Bas, soit s'ils font l'objet d'un jugement aux Etats-Unis d'Amérique ou au Royaume-Uni4(*)94. Cette procédure suscite quelque remarque qui mérite d'être mise en évidence. Comme on peut s'en apercevoir, la décision de juger les présumés terroristes dans l'Affaire Lockerbie relève d'une concertation entérinée par un organe politique. C'est à l'évidence le Conseil de sécurité qui, en l'espèce, a déterminé les responsabilités dans la procédure de transfert des inculpés. Une telle solution était-elle valide et viable ? juridiquement entachée d'irrégularité4(*)95, la solution semble s'inscrire dans une perspective de Realpolitik, l'enjeux des débats étant aussi d'ordre politique. En ce qui concerne le jugement des deux accusés proprement dit, Abdelbaset Ali Mohamed Al Megrahi et Al Amin Khalifa Fhimah ont été remis au Secrétaire général adjoint de l'ONU à Tripoli le 5 avril 1999 puis transférés aux Pays-Bas. Extradés à leur arrivée aux Pays-Bas vers le Royaume-Uni4(*)96, ils seront jugés par la Haute Cour écossaise le 3 mai 2000 pour les chefs d'inculpation suivants : complot, meurtre et violation de la législation aérienne sans curieusement retenir l'inculpation de terrorisme. La Cour finit par rendre son verdict le 31 janvier 2001; l'un des inculpés Abdelbaset Ali Mohamed Al Megrahi est condamné à la prison à vie, en application du droit écossais, tandis que l'autre Al Amin Khalifa Fhimah est purement et simplement acquitté faute de preuves suffisantes. Ce verdit ainsi que le déroulement du procès va susciter de vives critiques, certains observateurs y dénonçant l'interférence des intérêts politiques4(*)97.

      B- La complexité de l'Affaire Hariri du fait des intérêts géopolitiques

      L'attentat contre l'ex-premier ministre libanais Rafic HARIRI intervient le 14 février 2005 dans un contexte de tension politique aiguë. Le Liban traversait une période d'instabilité liée à l'influence syrienne dans le pays et Monsieur Rafic HARIRI était farouchement opposée à cette présence étrangère qui occupait le sud du pays4(*)98. L'attentat qui a causé la mort de vingt personnes et blessé deux cent vingt autres personnes fera l'objet d'une vive condamnation par le Conseil de sécurité de l'ONU, lequel a prié le Secrétaire général de lui faire rapport d'urgence sur les circonstances, les causes et les conséquences de cet attentat4(*)99. Suite à une recommandation, le Conseil de sécurité décide à l'unanimité le 7 avril 2005 dans sa Résolution 1595 (2005) d'instituer une commission d'enquête internationale indépendante, basée au Liban, « (...) afin d'aider les autorités libanaises à enquêter sur tous les aspects de cet acte de terrorisme et notamment à en identifier les auteurs, commanditaires, organisateurs et complices ». La première mission d'établissement des faits dépêchée par le Secrétaire général avait précisé dans son rapport de mars de 2005 que la tâche de la commission d'enquête dont elle recommandait la création serait difficile « ( ...) tant que les responsables actuels des services de sécurité libanais resteront en place »5(*)00. Cette mission a conclu au manque de volonté des autorités libanaises et a ainsi considéré qu'il fallait une réorganisation, une réforme et une rééducation des services de sécurité libanais5(*)01. Il faut préciser que de lourds soupçons pesaient déjà sur le Président libanais, M. Emile LAHOUD accusé d'avoir orchestré cet attentat de concert avec les autorités de Damas5(*)02. Malgré tout, le Conseil de sécurité va demander au Liban de traduire en justice les auteurs, organisateurs et commanditaires de l'attentat et l'exhortera à prendre en compte les conclusions de la commission d'enquête. Il est décide par ailleurs que la Syrie5(*)03 et le Liban devront coopérer avec la commission d'enquête aux fins d'établissement de la vérité. Contre toute attente, la Syrie va montrer une certaine réticence à l'égard de cette commission5(*)04, toute chose qui compliquera davantage l'issue de cette affaire. Or, la commission d'enquête n'était pas habilitée à arrêter les suspects, son rôle étant d'enquêter sur tous aspects de l'acte de terrorisme et « (...) notamment en identifier les auteurs, les commanditaires, organisateurs et complices ». Pour autant, les autorités syriennes se sont vues inquiétées et menacées par cette enquête. Au demeurant, bien qu'il ressorte clairement du paragraphe 2 de la Résolution 1595 (2005) que les individus mis en cause par les conclusions de l'enquête indépendante auraient à l'origine dus être traduits en justice et poursuivis par les juridictions nationales libanaises, sous les regards de la communauté internationale, le Conseil de sécurité a décidé, en accord avec le gouvernement libanais, d'instituer un tribunal international ad hoc pour juger les personnes mises en cause dans l'attentat du 14 février 2005.

      L'espèce HARIRI est le cas topique des affaires relatives au terrorisme dont la complexité est entretenue par des intérêts de positionnement géopolitiques.

      Au total, au regard de ce qui précède, il apparaît évident que la justice contemporaine éprouve des difficultés certaines à réprimer le terrorisme. Cela est d'autant plus vrai que ce phénomène est alimenté de charges affectives, religieuses et politiques. Tout ceci semble donner raison au Professeur Hervé ASCENSIO qui pense que les juridictions actuelles constituent une réponse peu adaptée à l'infraction de terrorisme5(*)05.

      Conclusion

      Les événements du 11 septembre 2001 ont montré l'extrême nécessité de lutter contre le terrorisme. L'impact de ces évènements et des développements qu'ils ont entraînés dans le domaine de la lutte contre le terrorisme sur l'évolution de l'ordre juridique international se révèle pour le moins contrasté. D'un côté en effet, le droit international est apparu aux Etats comme un instrument de choix pour organiser la prévention et la répression des actes de terrorisme. D'un autre côté, en revanche, l'ordre juridique international a subi, depuis le début du nouveau millénaire, une mise à l'épreuve sans précédent, la pertinence de certaines de ses normes les plus fondamentales se voyant très sérieusement mises en cause par divers Etats au regard des exigence affirmées de la lutte antiterroriste. Pour ce qui est du premier aspect de ce constat, l'on ne saurait nier l'intérêt que les Etats engagés dans la lutte contre le terrorisme ont montré pour les normes et les mécanismes juridiques. Paradoxalement le discours légaliste que ces derniers mettent en avant dans la campagne antiterroriste est trahi par des pratiques qui contrarient l'ordre juridique international. Madame Barbara DELCOURT observe à ce sujet que : « Le droit international classique est officiellement considéré comme un élément fondamental de la lutte contre le terrorisme, mais la légitimité des actions entreprises par les Etats en son nom repose souvent (...) des pratiques qui en sapent les fondements »5(*)07. En ce qui concerne le second aspect, le droit international- nous l'avis dit- a été sérieusement mis à l'épreuve à la suite du 11 septembre 2001. C'est le fondement même du dispositif de sécurité internationale qui s'en est trouvé affecté, par l'affirmation d'une conception élargie et laxiste de la légitime défense. Ce débordement s'est s'accompagnée d'un renforcement considérable de certains pouvoirs du Conseil de sécurité, qui, en fin de compte, outrepassant ses compétences traditionnelles, s'est adjugé d'autres pouvoirs. Un tel développement- que l'on a vite fait de justifier par le caractère exceptionnel de la situation- est loin d'obtenir un soutien au sein de la communauté des juristes, quand on peut présumer des conséquences fâcheuses qu'il peut répercuter sur l'ordre international. La concentration de tous les pouvoirs entre les mains d'un organe restreint tel que le Conseil de sécurité peut s'avérer dangereuse pour l'équilibre des relations internationales quand on imagine que ces Etats pourraient utiliser les pouvoirs en question pour la défense des intérêts qui leurs sont propres , tout en mobilisant à cet effet une rhétorique « communautariste » et des instruments d'action collective5(*)08. Les politiques de lutte contre le terrorisme menées par un certain nombre d'Etat se sont par ailleurs traduites par la multiplication des dérogations et des restrictions aux règles du droit internationale des droits de la personne, de même par une application aléatoires des normes du droit international humanitaire, si ce n'est qu'elles (ces normes) sont purement et simplement écartées ou ignorées dans certains cas. Au surplus, la lutte contre le terrorisme sert aujourd'hui d'arme politique à certains Etats qui y voient une occasion rêvée de régler des comptes à des ennemis5(*)09. Enfin, il faut avouer que la lutte contre le terrorisme pour son efficacité ne saurait se satisfaire des seuls normes et mécanismes juridiques. Elle ne peut être perçue exclusivement sous le prisme réducteur du droit qui, de toute évidence, connaît des limites. Il faut intégrer à l'approche juridique l'approche sociale du phénomène, laquelle cherche à comprendre les fondements du terrorisme en recherchant les causes sous-jacentes5(*)10 de ce fléau pernicieux qui tend à désagréger le corps international dont l'unité souffre déjà d'une précarité chronique.

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      III- Articles

      § ACKA (Sohuily Félix), « Guerre pour la paix en Afrique : de quel droit ? »,

      Actualité juridique, n° 55, AIDD, Abidjan, 2007, pp.133-150

      § BEDJAOUI (Mohamed ) « Du contrôle de légalité des actes du Conseil de

      sécurité », International Law at a time of perplexity, Essays in Honour of

      Shabtai ROSENNE, Editor, Professor Yoram DISTEIN, Associate Editor, Dr

      Mala TABORY, published by Martinus Nijohff publishers, P.0 BOX 163, 3300

      AD Dordrecht, The Netherlands, pp. 89-90.

      § CHARVIN (Robert), « La guerre anglo-américaine contre l'Irak et le droit

      international : Apocalypse law  », Actualité et droit international, avril 2003, sur http:// www.ridi.org./adi

      § CONDORELLI ( Luigi), « Les attentats du 11 septembre et leurs suites : où va

      le droit international ? », RGDIP, 2001, pp. 829-848

      § CORTEN (Olivier) et DUBUISSON (François), « Opération liberté

      immuable : une extension abusive du concept de la légitime défense », RGDIP, 2002, pp. 51-78

      § DJAZIRI (Moncef), « La crise de Lockerbie et le processus de réintégration de

      la Libye dans le système international » Annuaire de l'Afrique du Nord, 1998.

      § GARCIA (Thierry), « Recours à la force et droit international », Perspectives

      internationales et européennes, mis en ligne le 21 juillet 2005, sur http://revel.unice.fr/pie/document.html

      § KLEIN (Pierre), « Le Conseil de sécurité et la lutte contre le terrorisme : Dans

      l'exercice de pouvoirs toujours plus grands », Revue québécoise de droit international, (hors série), 2007.

      § KOBILA (Mouangue James), «  La gestion de la lutte contre le terrorisme par

      Conseil de sécurité », Annuaire français de Relations internationales, 2007.

      § KOBILA (Mouangue James), « Le processus d'intervention du Conseil de

      sécurité dans la lutte contre le terrorisme international », Recueil des travaux du centre d'études de l'Académie du droit international de la Haye », 2007.

      § NIBLOCK (Tim), « Irak, Libye, Soudan, efficacité des sanctions » ? Politique

      étrangère, 2000.

      § O'CONNELL (Mary Ellen), « The myth of premeptive Sel-Defense », août

      2002, The American Society of International Law Task Force on Terrorism, www.asil.org/taskforce/oconnell

      § PAYE (Jean-Claude), « Lutte antiterroriste : la fin de l'Etat de Droit ? », Revue

      trimestrielle des droits de l'homme, n° 57, Nemessis, Bruylant, Bruxelles, janvier 2004 pp.61-75.

      § SANTO (Sandrine), « L'ONU face au terrorisme », GRIP, 2007, sur

      www.grip.fr

      § SOREL (Jean-Marc), « L'épilogue des affaires dites de Lockerbie devant la

      CIJ : le temps du soulagement et le temps des regrets » RGDIP, 2003, pp.933-946

      § SZUREK (Sandra), « La lutte internationale contre le terrorisme sous l'empire

      du chapitre VII : un laboratoire normatif », RGDIP, 2005, pp.5-48

      § TERCINET (Josiane), « Le pouvoir normatif du Conseil de sécurité : le Conseil

      de sécurité peut-il légiférer ? », RBDI, 2004, pp. 528-546

      § WECKEL (Philippe), « Le statut incertain des détenus sur la base américaine

      de Guantanamo », RGDIP, pp. 357-369

      TRAITES et RESOLUTIONS

      I- Traités internationaux

      A- Traités universels

      - Convention relative aux infractions et à certains autres actes survenus à bord des aéronefs, signée à Tokyo le 14 septembre 1963 (entrée en vigueur le 14 décembre 1969)

      - Convention pour la répression de la capture illicite d'aéronefs, signée à la Haye

      le 16 décembre 1970 (entrée en vigueur le 14 octobre 1971)

      - Convention pour la répression d'actes illicites dirigés contre la sécurité de

      l'aviation civile, signée à Montréal le 23 septembre 1971 (entrée en vigueur le 26 janvier 1973)

      - Convention sur la prévention et la répression des infractions contre les

      personnes jouissant d'une protection internationale, y compris les agents diplomatiques, adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies le 14 décembre 1973 (entrée en vigueur le 20 février 1977)

      - Convention internationale contre la prise d'otages, adoptée par l'Assemblée

      générale des Nations Unies le 17 décembre 1979 (entrée en vigueur le 3 juin 1983)

      - Convention sur la protection physique des matières nucléaires, signée à Vienne

      le 3 mars 1980 (entrée en vigueur le 8 février 1987)

      - Convention pour la répression d'actes illicites dirigés contre la sécurité de la

      navigation maritime, signée à Rome le 10 mars 1988 (entrée en vigueur le 1er mars 1992)

      - Convention internationale pour la répression des attentats terroristes à l'explosif,

      adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies le 15 décembre 1997 (entrée en vigueur le 23 mai 2001)

      - Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme

      adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies le 9 décembre 1999 (entrée en vigueur le 10 avril 2002).

      B- Traités régionaux

      - Convention du Conseil de l'Europe pour la prévention du terrorisme, Varsovie 16 mai 2005.

      - Convention arabe de lutte contre le terrorisme, Le Caire, 22 avril 1998 (entrée en vigueur le 7 mai 1999).

      - Convention de l'Organisation de la Conférence islamique sur la lutte contre le

      terrorisme, Ouagadougou, 1er juillet 1999

      - Conférence de l'OUA sur la prévention et la lutte contre le terrorisme, Alger, 14

      juillet 1999, (entrée en vigueur le 6 décembre 2002)

      III- Résolutions des Nations Unies

      A- Résolutions de l'Assemblée générale

      - Résolution 1514, (14 décembre 1960)

      - Résolution 3314, (14 décembre 1974)

      B- Résolutions du Conseil de sécurité

      - Résolution 1373, (28 septembre 2001)

      DECISIONS DE JUSTICE

      A- Arrêts

      Ø Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci, Rec., 1984,

      p. 169

      B- Avis

      Ø Licité de la menace ou de l'emploi de l'arme nucléaire, 8 juillet 1996, Rec., 1996, p. 66

      WEBOGRAPHIE

      ü http://documents.un.org/simple.asp

      ü www.interpol.int/

      ü www.icj-cij.org

      ü http://www.ejil.org/forum_WTC

      ü http://www.unodc. org/odccp/terrorism.htlm.

      ü http://www.ulb.ac.be/droit/cdi

      ü http://www. ulb.ac.be/droit/

      ü http://usinfo.state.gov/regional/af/security/french

      ü http:// www.uspolicy.be/issues /terrorism/letint.021402htm.

      ü http://www. rsf. org / www. libertés-immuables.net

      ü http://www.i-p-o.org/lockerbie_observer _mission.htm

      ü http://www.scotcourts.gov.uk/download/lockerbiejudgement

      ü http:// www.webdo.ch

      ü http://www.grip.org

      ü http:// www.gwu.edu./-nsarchiv.

      ü www.asil .org/taskforce/oconnell.

      ü http://www.un.org/french/docs/committees/1373.

      TABLE DES MATIÈRES

      Remerciements........................................................................1

      Sommaire...............................................................................2

      Liste des sigles et abréviation.........................................................3

      Introduction..............................................................................4

      Chapitre préliminaire : Considérations générales sur la notion de terrorisme en

      droit international..........................................12

      Section 1 : L'émergence de difficultés dans la recherche

      d'une définition du terrorisme.............................................13

      §1 : Le terrorisme, une notion insaisissable.............................................13

      A- Le constat d'échec d'une définition générale et tangible du

      terrorisme en droit International..................................................15

      B- Les obstacles : les pierres d'achoppement et la question des exclusions...17

      1- La vive controverse sur l'exclusion des actes des mouvements de libération des actes de terrorisme.............................................18

      2- La lancinante question du terrorisme d'Etat et de son exclusion des actes de terrorisme.............................................................22

      §2 : Quelques confusions dans la qualifications de certains actes criminels.........23

      A- Terrorisme et crime contre l'humanité...........................................24

      B- Terrorisme et crime de guerre....................................................29

      Section 2 : La spécification de l'infraction de terrorisme..............................32

      §1: L'élément matériel des infractions terroristes.......................................32

      A- L'approche sectorielle ou fragmentaire.................................33

      (1) - Les actes terroristes au regard des moyens et du mode opératoire...34

      a- Les prises d'otages............................................................34 

      b- Les attentats terroristes à l'explosif.......................................34

      c- Le terrorisme nucléaire........................................................35

      d- Le financement du terrorisme...............................................37

      (2)- Les actes terroristes au regard des cibles...................................38

      a- Le terrorisme aérien...........................................................38

      b- Le terrorisme maritime.......................................................39

      c- Le terrorisme contre les personnes jouissant d'une protection

      internationale..................................................................41

      B- L'approche générale...........................................................42

      §2 : L'élément moral des infractions terroristes...............................45

      A- Les définitions de l'infraction spécifiquement terroriste..................45

       

      (1)- Provoquer la terreur ou intimider..........................................45

      (2)- Contraindre une autorité à certaines décisions...........................46

      B- Les manifestations de l'intention spécifiquement terroriste...............47

      (1)- Les actes terroristes par leur nature.........................................48

      (2)-Les actes terroristes par leur contexte........................................49

      PREMIERE PARTIE : L'ENCADREMENT NORMATIF DE LA

      LUTTE CONTRE LE TERRORISME....................................52

      Chapitre 1 : Le dispositif préventif de lutte antiterroriste...........................53

      Section 1 : Les obligations des Etats dans la prise de

      mesures internes............................................................53

      §1: Les obligations préventives universelles.............................................53

      A- Les obligations conventionnelles de prendre des mesures

      Internes.............................................................................53

      (1) Les obligations préventives d'action (obligations de faire)................54

      (2) Les obligations préventives d'abstention (obligations de ne pas faire)....56

      B- Les obligations préventives de la résolution 1373 des

      Nations Unies..................................................................58

      (1)- Le refus d'accorder l'asile et le statut de réfugiés aux terroristes.........59

      (2)-Les contrôles aux frontières pour empêcher l'infiltration des terroristes...............................................................................61

      §2 : Les mesures complémentaires des conventions régionales.......................62

      A- Les mesures préventives de la convention africaine...........................62

      B- Les mesures préventives de la convention européenne........................64

      Section 2 : Les obligations de coopération des Etats aux

      fins de prévention............................................................66

      §1 : La coopération préventive inter étatique selon le modèle

      relationnel..............................................................................66

      A- L'obligation d'échanger des renseignements......................................66

      B- Les autres mesures de coopération................................................68

      §2 : La coopération préventive institutionnalisée........................................70

      A- La coopération préventive des organisations internationales..................70

      B- Le renforcement des capacités des Etats aux fins de prévention...............74

      Chapitre 2 : Le dispositif répressif de lutte antiterroriste..............................77

      Section 1 : Les mesures de coercition applicables au terrorisme......................77

      §1: Les mesures de contrainte militaire en réaction au terrorisme..................78

      A- L'usage de la force armée au titre de la légitime défense
      (article 51 de la Charte des Nations)............................................ 80

      B- Les mesures de contrainte militaire de l'article 42 de la

      Charte des Nations Unies.......................................................84

      §2 : Les mesures de contrainte non militaire contre le soutien

      étatique au terrorisme...............................................................89

      A- La consistance des mesures de rétorsion contre le soutien

      étatique au terrorisme...............................................................90

      B- La licéité des contre-mesures contre le soutien étatique au

      terrorisme en question..............................................................93

      Section 2 : La répression pénale du terrorisme............................................96

      §1 : La répression pénale du terrorisme par les juridictions

      nationales.................................................................................97

      A- Les titres de compétence traditionnels..........................................98

      B- Un titre de compétence spécial: la compétence universelle...............102

      §2: La répression pénale du terrorisme par les juridictions internationales...............................................................................104

      A- L'absence de juridiction pénale internationale disposant

      d'une compétence générale en matière de terrorisme.......................105

      B- La contribution des tribunaux pénaux internationaux ad -hoc à

      la répression du terrorisme........................................................107

      DEUXIEME PARTIE : LA LUTTE CONTRE LE TERRORISME A L'EPREUVE

      DES FAITS...............................................................111

      Chapitre 1: Une approche dangereuse dans la lutte contre le terrorisme.........112

      Section 1 : Le changement de posture dans le traitement du terrorisme............113

      §1 : Le recours à la force armée avant le 11 septembre 2001 :

      Un traitement restrictif et mesuré...................................................113

      A- Un traitement restrictif et mesuré reflétant la pratique.....................113

      B- Un traitement restrictif et mesuré confirmé par la jurisprudence.........115

      §2 : Le recours à la force après le 11 septembre 2001 :

      Un traitement largement renouvelé.................................117

      A- Des règles en mutation ? ...................................................118

      (1)- Une acceptation massive de la légitime défense.................................118

      (2)- Une acceptation extensive et laxiste de la légitime défense......................120

      B- Des moyens d'action en transformation.......................................123

      (1)- De la surenchère des qualifications par le Conseil de sécurité : « Le terrorisme comme l'une des plus grandes menaces à la paix et à la sécurité internationales »...........................................................................124

      (2)... A la confusion des pouvoirs : le Conseil de sécurité en tant que détenteur des pouvoirs exécutif, judiciaire, et législatif................................................128

      Section 2 : La violation des normes internationales dans la campagne antiterroriste .................................................................................................133

      §1 : Des choix sémantiques aux conséquences juridiques incertaines...................................................................................133

      A- Du droit d'agir de manière préventive en légitime défense à la « préemption » contre le terrorisme.............................................134

      (1)- De la validité de la thèse de la légitime défense préventive....................................................................................135

      (2)- De la licéité de la doctrine de la préemption.................................138

      B- De l'invocation du concept de « guerre » contre le terrorisme................................................................................141

      §2 : Des pratiques attentatoires aux droits et libertés.................................144

      A- L'instauration d'un « Etat d'exception ».......................................145

      B- L'établissement d'une  « zone de non-droit »..............................149

      Chapitre 2 : Une approche non pertinente dans le traitement du terrorisme......153

      Section 1 : La relative efficacité des mesures de contrainte non armée

      décidées......................................................................................153

      §1 : Le régime des mesures de contrainte non armée décidées.....................153

      A- Le choix des moyens............................................................154

      (1)- Le cas de la Libye...............................................................154

      (2)- Le cas de l'Afghanistan des Taliban.............................................157

      B- Le choix des cibles...............................................................159

      (1)- Les destinataires des mesures de coercition non armée décidées.................................................................................159

      (2)- Les dérogations en faveur des populations.................................161

      §2 : La portée des mesures de contrainte non armée décidées......................................................................................163

      A- La résistance à l'égard de certaines mesures de contrainte non armée...................................................................................163

      B- Les effets contre-productifs des mesures de contrainte non armée.............166

      Section 2 : La justice contemporaine, une réponse inadaptée

      à l'infraction de terrorisme.............................................168

      §1 : La marginalisation de la justice internationale dans la mise en

      oeuvre de la responsabilité des Etats pour soutien au terrorisme..............169

      A- La responsabilité parajudiciare de la France dans l'Affaire Rainbow

      Warrior.............................................................................170

      B- La responsabilité extrajudiciaire de la Libye dans l'affaire Lockerbie.....171

      §2 : La dilution des mécanismes judiciaires dans la mise en oeuvre de la

      responsabilité des individus pour commission d'attentats terroristes....................................................................................174

      A- L'hybridité de la solution dans la mise en oeuvre de la responsabilité des accusés des attentats de Lockerbie.....................................................174

      B- La complexité de l'Affaire Hariri du fait des enjeux géopolitiques......177

      Conclusion..............................................................................180

      Bibliographie...........................................................................182

      Table des matières.....................................................................188

      * 1 L'année 2007 a été particulièrement meurtrière. Elle fut ensanglantée par une vague d'attentats terroristes un peu partout dans le monde. La chaîne de télévision française France 24 dressait un sombre bilan à ce sujet, quand elle annonçait que plus de 780 personnes ont trouvé la mort dans des attentats terroristes. Sur France 24, édition télévisée du 28 /12/2007

      * 2 Les spécialistes du terrorisme font généralement remonter la genèse de ce phénomène au 1re siècle de notre ère, à l'époque des Sicaires (du nom de Sica, genre d'arme blanche), extrémistes juifs du 1er siècle qui rejetaient le monde grec au profit d'une tradition juive.

      * 3 Si le terrorisme en tant que donnée factuelle est apparu au 1er siècle de notre ère, il faut croire que la notion de « terrorisme » elle-même est née sous la révolution française. Robespierre était qualifié de terroriste à la suite de la chute du régime ayant utilisé la terreur comme mode de gouvernement à partir du 30 août 1793. Voir Marie-Hélène GOZI, Le terrorisme, Ellipses, Paris, 2003, page 8.

      * 4 Voir Bruce HOFFMAN, La mécanique terroriste, Calman Lévy, Paris, 1999, p. 26

      * 5 Etait-ce là la « fin de l'histoire » comme le laisse entendre M. Francis FUKUYAMA ?. Voir Francis FUKUYAMA, La fin de l'histoire et le dernier homme, édition Flammarion, 1992. L'auteur y affirme que la fin guerre froide marque la victoire définitive de la démocratie et du libéralisme sur les autres régimes politiques, et par là, l'avènement de la paix perpétuelle. Il présente le modèle américain comme « fin de l'histoire » et la démocratie libérale comme le modèle parfait de tout système politique.

      6 Voir Didier BIGO, « Grands débats dans un petit monde », Culture et conflits disponible sur http://www.conflits.org

      7 Voir Samuel HUNTINGTON, Le choc des civilisations, Odile Jacob, 1997

      * 8 Ce néologisme d'hyperterrorisme est de plus en plus usité pour désigner le terrorisme de destruction de masse auquel correspond sans nul doute les attentats hautement meurtriers du 11 septembre 2001. Voir René PASSET et Jean LIBERMAN, Mondialisation financière et terrorisme : la donne a-t-elle changé depuis le 11 septembre, Enjeux planète, Paris, 3ème trimestre 2002, p.85

      * 9 F. RACHLINE, « Le terrorisme est un totalitarisme », dans P. BONIFACE (dir. pub.), Le 11 septembre, un an après, PUF. Coll. Enjeux stratégiques, IRIS, 2002, p. 39

      * 10 Ce sentiment est largement partagé au sein de la doctrine. Voir entre autres auteurs, Paul TAVERNIER, « Terrorisme et compétence universelle », SFDI, Les nouvelles menaces contre la paix et la sécurité internationales, journée franco-allemande, Pedone, Paris, 2004, pp. 237 et s. Voir égalemnt Brigitte STERN « Rapport introductif : Le contexte juridique de l'après 11 septembre 2001, Karine BANNELIER ; Théodore CHRISTAKIS; Olivier CORTEN ; Barbara DELCOURT ( dir.pub. ), Le droit international face au terrorisme. Après le 11 septembre 2001, Pedone, Paris, 2002, pp. 3 et s.

      11 Cette « inadaptation » du droit international avait déjà été dénoncée par certains auteurs antérieurement aux évènements du 11 septembre 2001. ( Voir par exemple M. REISMAN, « International Legal Responses to Terrorism », Houston JIL, 1999, p. 60) et a continué à l'être par la suite (Voir par exemple Abraham D. SOFAER, « On the Necessity of Preemption », EJIL, 2003, pp. 210 et 221)

      12 Voir Luigi CONDORELLI, « Les attentats du 11 septembre et leurs suites : où va le droit international ? », RGDIP, 2001, p. 829.

      * 13 Voir C. TREAN, Le Monde, 18 et 19 novembre 2001, citée par Brigitte STERN, « Le contexte juridique de

      l' « après » 11 septembre 2001, dans Karine BANNELIER, Théodore CHRISTAKIS, Olivier CORTEN et Barbara DELCOURT, (dir. Pub.), Le droit international face au terrorisme. Après le 11 septembre 2001, op.cit, pp. 3-4

      * 14 Voir Pierre KLEIN, « Le droit international à l'épreuve du terrorisme », Cours de l'Académie de droit international de la Haye, 2007.

      15 Voir Marie HELENE GOZI, Le terrorisme, op.cit, page 5 « Introduction »

      * 16 Voir Albert CAMUS, Réflexions sur le terrorisme, éd. Nicolas Philippe, Paris 2002.

      * 17 Voir Jean Marc SOREL, « Existe-t-il une définition universelle du terrorisme ? », BANNELIER (Karine) ; CHRISTAKIS (Théodore) ; CORTEN (Olivier) ; DELCOURT (Barbara) (dir.pub. ), Le droit international face au terrorisme. Après le 11 septembre 2001, op.cit., pp. 35 et s.

      18 Voir Marie-Hélène GOZI, op.cit., p. 6

      * 19 Voir Jean Christophe MARTIN, Les règles internationales relatives à la lutte contre le terrorisme, Bruylant, Bruxelles, 2006, p. 20.

      20 La controverse est nourrie par le relativisme du concept. En fait, la décision d'appeler une personne ou de qualifier une organisation de « terroriste » devient presque inévitablement subjective, et dépend largement des rapports de sympathie ou d'opposition que l'on entretient avec la personne, le groupe ou la cause concernée. Si l'on s'identifie aux victimes de la violence, ces actions sont alors du terrorisme. Si au contraire, on s'identifie à l'auteur de ces actions violentes, on les considère avec plus de sympathie, et sinon de manière positive ; il ne s'agit plus de terrorisme. D'où l'adage populaire « terroristes pour les uns, combattants de la liberté pour les autres ». Voir Bruce OFFMAN, op.cit., p. 39.

      21 La définition proposée par Mme Isabelle SOMMIER rend bien compte de la difficulté d'aboutir à une définition précise du terrorisme qui se présente pour elle comme un ensemble de «  modes d'actions hétéroclites pouvant s'inscrire dans des stratégies classiques autant que d'autres formes de violence ». Voir Isabelle SOMMIER, Le terrorisme, Flammarion, Dominos, Paris, 2000, p. 11.

      * 22 « Si nous avons obscurément conscience de ce qu'est le terrorisme, il est toutefois difficile de traduire explicitement ce savoir immédiat ? », P. REGIMBALD, « Qu'est-ce que le terrorisme », Encyclopédie Syllabus (en ligne), 2005, site Internet : www.cvm.qc.ca/encephi/Syllabus/Histoire/Articles/Terrorisme.htm

      * 23 Monsieur Bruce HOFFMAN évoque à ce propos des glissements de sens du mot dans une perspective historique. « A la différence de son usage contemporain, (...) le terme bénéficia d' une connotation résolument positive pendant la Révolution française où il fut vulgarisé  ». Op.cit, p.18

      24 Sans toutefois le définir, la science politique va appréhender le terrorisme selon les finalités et les modes opératoires. Ainsi, à l'aide de sigles, le terrorisme à vocation révolutionnaire (TVR) est distingué du terrorisme à vocation nationaliste ou indépendantiste (TVNI), le terrorisme national (TN) du terrorisme transnational (TT)...Ces sigles sont empruntés à l'étude de D. HERMANT et D. BIGO, « Un terrorisme ou des terrorismes », in Esprit, n° 94-95, 1986, pp. 23-27.

      25 L'approche sociologique et philosophique du terrorisme privilégie par exemple l'étude des causes sous-jacentes du phénomène. Le droit semble méconnaître une telle démarche, s'y refuse. Ceci est perceptible dans l'ensemble des instruments de lutte contre le terrorisme qui ignorent le problème des causes sous-jacentes du terrorisme. Celles-ci y ont été expurgées. En fait, depuis les années 70, alors que certaines délégations, notamment celles des pays du Sud, voulaient favoriser la recherche de l'origine du terrorisme, d'autres, les délégations des pays occidentaux privilégiaient plutôt les mesures de répression du phénomène. La position occidentale a finalement prévalu dans les conventions.

      * 26 Voir Jean-Marc SOREL, op.cit., pp.35 et s.

      27 Il s'agit notamment des faits dirigés contre la vie de chefs d'Etat, de la destruction de biens publics, de la fabrication ou de la détention d'armes ou d'explosifs.

      28 Voir Marie-Hélène GOZI, Le terrorisme, op.cit., p. 73

      *

      *

      * 29 Voir en infra, sur la « spécification de l'infraction terroriste ».

      * 30 La preuve nous est largement fournie par de nombreuses résolutions édictées dans le cadre des Nations Unies, lesquelles condamnent fermement le terrorisme. On citera à titre d'illustration, la Résolution 1368 du 12 sept. 2001 condamnant les attaques perpétrées la veille.

      31 Op.cit., p. 71

      32 Pour le Professeur Pierre KLEIN, en réalité, l'affirmation selon laquelle aucun instrument juridique à vocation universelle ne comporte de définition générale du terrorisme, s'avère un peu radicale. ( C.f Cours de l' Académie de la Haye, op.cit.). En effet, de plus en plus, on trouve des esquisses de définition générale du terrorisme dans certaines conventions régionales, mais également dans la Convention de 1999 sur le financement du terrorisme, laquelle a une prétention à l' universel. Nous y reviendrons.

      *

      * 33 A ce sujet, il est à préciser que les actes de terrorisme ne peuvent pas se concevoir de la même manière en temps de paix et en temps de guerre. Dans ce dernier cas, ils relèvent du jus in bello et consistent plus généralement en des pratiques inutilement cruelles ou odieuses contre des populations civiles ou des prisonniers de guerre. Les actes incriminées constituent dans de telles périodes des violations du DIH. L'article 33 de la 4ème Convention de Genève prohibe ainsi « les peines collectives, de même que toute mesure d'intimidation ou de terrorisme » (italique ajouté).

      * 34 Voir en infra, « L'approche sectorielle ».

      * 35 En 1948, le Comte BERNADOTTE, alors médiateur des Nations Unies en Palestine, est assassiné. Cette affaire devient le prétexte pour l'Organisation qui décide de se saisir de la question du terrorisme. L'AGNU demande alors un avis consultatif à la CIJ sur certains points de droit. L'avis rendu le 11 avril 1949 est célèbre parmi les juristes pour son apport à la théorie des Organisations internationales mais n'aborde pas le problème du terrorisme.

      36 Pour une analyse approfondie du Projet de Convention générale sur le terrorisme international, voir Pierre D'ARGENT, « Examen du projet de Convention générale sur le terrorisme international » in Karine BANNELIER et al. (dir. pub.), op.cit., pp. 122-157

      * 37 Voir Bruce HOFFMAN, op.cit p. 39 et s.

      * 38 C.f art. 1 § 2 et 25

      * 39 C. f. art. 1 commun

      40 CIJ, Arrêt du 30 juin relatif au Timor Oriental, Rec. CIJ, 1995, § 29

      41 Voir Patrick DAILLIER et Alain PELLET, Droit international public, LGDJ, Paris, 7ème éd., 2002, p. 520.

      42 CIJ, Affaire du Timor Oriental, Rec. CIJ, 1995, p. 102, § 29 CIJ, Affaire du Timor Oriental, Rec. CIJ, 1995, p. 102, § 29

      43 Ce ne serait qu' interpréter le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes selon la règle de l'effet utile (appliquée par la CIJ dans la jurisprudence Détroit du Corfou, 9 avril 1949, Rec. CIJ, 1949, p. 24) que de consacrer le droit pour les

      peuples de recourir à la force armée, et il s'agit là d'une lecture raisonnable de l'article 2 paragraphe 7 de la Charte des Nations Unies.

      * 44 Le Protocole additionnel I du 8 juin 1977 aux Conventions de Genève de 1949 qualifie de conflits armés internationaux les conflits « dans lesquels les peuples luttent contre la domination coloniale et l'occupation étrangère et contre les régimes racistes dans l'exercice du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes » (art. 1)

      * 45 Résolution 3070 (XXVIII) du 30 octobre 1973

      * 46 Résolution 2621 (XXV) : « droit inhérent des peuples coloniaux de lutter par tous les moyens nécessaires contre les puissances coloniales qui répriment leur aspiration à la liberté et à l'indépendance ».

      * 47 Des pays aussi différents qu'Israël, le Kenya, Chypre, l'Algérie doivent au moins en partie leur indépendance à des mouvements politiques nationalistes qui employèrent la violence armée contre les puissances coloniales. C'est aussi pendant cette période que la terminologie de « combattants de la liberté » se répandit, comme la marque de légitimité politique des combats pour la libération nationale et de l'autodétermination accordée par la communauté internationale, dont le soutien était activement recherché par la plupart de ces mouvements.

      * 48 Si la licéité des mouvements de libération nationale est désormais un acquis en droit international, le droit des Gens (jus gentium) contemporain se refuse cependant à reconnaître la licéité des minorités de faire sécession. Pour aller plus loin, voir Madjid BENCHIKH, « Le terrorisme, les mouvements de libération nationale et de sécession et le droit international », in Karine BANNELIER et al.(dir.), op.cit, pp. 69 et s.

      * 49 Voir Rapport du Comité spécial du terrorisme international, A/9028, 1973, p. 8, § 22. (Italique ajouté)

      50 Nous notons également l'existence d' un conflit entre les Résolutions précitées (Résolution 3070 (XXVIII) la Résolution 3070 (XXVIII) ) et les dispositions pertinentes du DIH. En effet, alors que ces Résolutions autorisent

      l' usage de « tout moyen » « nécessaires », le DIH ( dans sa version droit de la Haye ) restreint le droit des parties quant aux moyens à employer dans les conflits armés, pour éviter les maux ou souffrances inutiles ou superflu(e)s.

      Cf. Francisco MELEDJE DJEDJRO, Cours de DIH, DESS droits de l'homme, CERAP/IDDH, Abidjan, 2005-2006.

      * 51 Voir la position de Jean-Christophe MARTIN, op.cit p. 75

      52 Voir Pierre D'ARGENT, « Examen du projet de Convention générale sur le terrorisme international » op.cit., pp. 134 et s.

      * 53 La question s'est déjà posée en droit international, et soumise à la sagacité de la CIJ sur la licéité de la menace ou de l'emploi l'arme nucléaire. La CIJ s'est prononcée sur la question dans un avis consultatif, en date du 8 juillet 1996 (Voir en infra)

      * 54 Voir également l'avant-dernier considérant du préambule de la Convention, qui énonce déjà que « les activités des forces armées des Etats sont régies par des règles de droit international qui se situent hors du cadre de la présente convention ».

      55 Voir sur ce point le rapport du coordonnateur sur les résultats des consultations bilatérales officieuses, dans Rapport du Comité spécial créé par la résolution 51/210 de l'AG en date du 17 décembre 1996, 7ème session (2003), Documents officiels de l'AG, doc. A/58/37, 2 avril 2003, annexe II, point B, paragraphes 3-7

      * 56 Cette position doit, néanmoins, être relativisée au regard de la définition du terrorisme d'Etat donnée par Mme Kalliopi KOUFA, dans son rapport final de 2004 sur « Le terrorisme et les droits de l'homme ». Elle en donne deux sens plausibles : dans une première acception, le terrorisme d'Etat renvoie à l'application d'une politique de terreur sur le plan interne, érigée en quelque sorte en système de gouvernement. Dans un deuxième sens, le terrorisme s'entend du recours à des actes et méthodes terroristes « parrainés par l'Etat », « lorsque le gouvernement planifie, soutient, oriente et contrôle des opérations terroristes dans un pays tiers ».

      * 57 Dont les épouvantables attaques du 11 septembre 2001.

      * 58 Par exemple, la connexité avec le crime de guerre n'est plus une exigence constitutive du crime contre l'humanité et la planification du crime n'est plus exclusive d'un gouvernement, mais peut être celui d'un groupe quelconque. Pour d'autres détails, voir William A. SCHABAS et Clémentine OLIVIER, « Terrorisme : crime contre l'humanité ? » in SOS, ATTENTATS, Terrorisme, victimes et responsabilité pénale internationale,Calman-Lévy, Paris, 2003, p. 379 et s. Voir également Marco SASSOLI et Antoine A. Bouvier, Un Droit dans la guerre ? Volume 1, CICR, Genève 2003, pp. 307 et 308. Et René DEGNI SEGUI, Le tribunal pénal international, Cours de DEA, droit public, Université de Cocody, 2006-2007.

      * 59 Cf. Rapport de la CDI sur les travaux de sa 48ème session, A/51/10, 1996, pp. 114-117

      60 Voir Jean Christophe MARTIN, op.cit. p. 225

      61 Pour aller plus loin, voir Bruce HOFFMAN, La mécanique terroriste, op.cit

      62 Il en était ainsi de la jurisprudence du Tribunal de Nuremberg de 1945. William A. SCHABAS et Clémentine OLIVIER expliquent à ce sujet que, dans le cadre du jugement des criminels sous le IIIème Reich, la conception traditionnelle était que, en fait, « non seulement une politique devait exister mais qu'elle devait être celle d' un Etat, comme dans le cas de l'Allemane Nazie ». Mais, bien que cela ait pu être le cas durant la Seconde Guerre mondiale, (...) ce n'est plus le cas aujourd'hui. Voir op.cit, p. 383

      * 63 On constate que, ni le statut des TPIY et TPIR ni celui de la CPI ne posent comme condition que le crime contre l'humanité soit perpétré ou encouragé par les autorités étatiques. L'article 5 du Statut du TPIY et l'article 3 du TPIR gardent le silence sur cette question. Au surplus, la CDI précise que « c'est l'instigation ou la direction soit d'un gouvernement ou d'une organisation, ou d'un groupe quelconque, qui donne à l'acte sa dimension et en fait un crime contre l'humanité... » (Voir rapport précité).

      64 On citera comme exemples d'organisations terroristes contemporaines l'ETA en Espagne (Euzkadi Ta Azkatasma qui se traduit par « le pays Basque et sa liberté »), le HAMAS en Palestine, le HEZBOLLAH au Liban, et la nébuleuse internationale terroriste Al Qaida de Oussama BEN LADEN.

      65 Il faut préciser que cet auteur ne conclut pas à une généralisation des actes terroristes comme crimes contre l'humanité. Bien au contraire, pour lui, « la qualification de crime contre l'humanité pourrait s'avérer pertinente s'agissant des seuls actes commis sur le territoire américain ». Poursuit-il, cette qualification repose cependant sur des considérations de faits établis sans beaucoup de recul et constitue, par ailleurs, une solution dont la validité reste

      confinée au seul cas d'espèce, la question de la qualification générale du terrorisme n'étant en rien résolue. Voir

      Yann JUROVICS, « Les controverses sur la question de qualification du terrorisme », in Karine BANNELIER et al. Le droit international face au terrorisme. Après le 11 septembre, op.cit., p.101.

      66 William A. SCHABAS et clémentine OLIVIER reconnaissent pour leur part que les attentats du 11 septembre 2001 ont été « généralisés » et « systématiques » et que les victimes étaient « civiles », sans toutefois se plier à la qualification de crimes contre l'humanité proposée par certains auteurs. Op. cit. pp. 379 et s.

      67 Ibid. p. 387

      * 68 L'Acte final de la Conférence de Rome, adopté en même temps que le Statut, regrette qu'il n'ait pu être possible de s'accorder sur une définition du terrorisme, mais prévoit que la situation pourrait changer lors de la révision du Statut sept ans après son entrée en vigueur. (Voir UN. Doc. A/CONF. 183/10)

      69 Voir préface de l'ouvrage de Yann JUROVICS, Réflexions sur la spécificité du crime contre l'humanité,

      LGDJ, Paris, 2002, p.7

      * 70 Yann JUROVICS, « Les controverses sur la question de qualification du terrorisme », loc. cit., p. 101

      71 Le critère de discrimination en tant que dol spécial du crime contre l'humanité ne fait pas l'unanimité au sein de la doctrine, mais est porté par un fort courant de pensée. Voir Mario BETTATI, « Le crime contre l'humanité » in H. ASCENSIO et al. Dir., Droit international pénal, p. 303. Toutefois, le Statut de Nuremberg par exemple ne contient pas de critère de discrimination.

      72 C. GRYNFOGEL, « crimes contre l'humanité », Juris-Classeur, Droit pénal, Fasc. 20, 1998, p. 19 cité par Jean-Christophe MARTIN, op.cit., p. 258

      * 73 Jean-Christophe MARTIN, ibid. p. 258

      * 74 La terminologie usitée par le droit international est celle de conflit armé. Les Conventions de Genève de 1949 et les textes subséquents préfèrent le terme de conflit armé à celui de guerre .

      * 75 Le jus in Bello ou le DIH se donne en substance comme l'ensemble des règles juridiques applicables aux conflits armés (internes et internationaux) et aux situations d'occupation militaire, indépendamment et indifféremment de la légalité des conflits.

      * 76 Si le DIH n'interdit pas l'usage de la force dans les combats, certaines de ces règles restreignent par ailleurs le droit des combattants quant au choix des armes à utiliser. Il s'agit bien notamment des armes qui peuvent causer des souffrances inutiles et superflues aux victimes. Cf. MELEDJE DJEDJRO, op.cit.

      * 77 Le Président américain Georges W. BUSH a lui-même qualifié les attentats du 11 septembre d'« actes de guerre » devant le Congrès le 20 septembre 2001 dans un discours. Voir DAI, 1er nov. 2001, n° 21, p. 833

      78 D'ailleurs, nous constatons avec soulagement que les juristes qualifient rarement ces attentats de crimes de guerre. Le Professeur Alain PELLET est de ceux- là qui dénient à ces attentats, la qualification de crime de guerre. ( voir Alain PELLET, « No, this is not war ! », 3 octobre 2001, Discussion-forum de l'EJIL, site Internet : http://www.ejil.org/forum_WTC). MM. François DUBUISSON et Olivier CORTEN opinent que l'usage de la force armée par des bandes armées contre la souveraineté d'un Etat ne crée pas juridiquement une situation de guerre. (Voir François DUBUISSON et Olivier CORTEN, « Lutte contre le terrorisme et droit à la paix : une conciliation délicate », in Emmanuelle BRIBOSIA et Anne WEYEMBERGH (dir.), op.cit., p.41) En revanche, la position de Yann JUROVICS est très nuancée sur la question ; pour lui, si ces actes ne peuvent raisonnablement être qualifiés de crime de guerre, la situation mérite cependant peut être une réponse plus prospective. Si la condition de contexte de conflit armé n'est pas présente en l'espèce, la situation y ressemblerait tout de même beaucoup et la qualification du contexte reposerait plus sur un arsenal juridique qui semblerait de plus en plus inadapté à l'évolution récente des conflits que sur une analyse réaliste de la situation. En sus, le fait que les terroristes aient visé un objectif militaire, en l'occurrence le Pentagone, ajoute une dimension stratégique aux attaques, non sans souligner que le droit des conflits armés est en retard d'une génération de conflit. Voir op.cit., pp.102 et s.

      79 Le Statut de Rome reprend la même solution, et en termes identiques, à son article 8 (d) et (f) s'agissant des conflits armés ne présentant pas un caractère international.

      80 Cf. Affaire Tadic n° IT-94-1-AR72, paragraphe 70 : « (...) un conflit armé existe chaque fois qu'il y a recours à la force armée entre Etats ou un conflit armé prolongé entre les autorités gouvernementales et des groupes armés organisés ou entre de tels groupes au sein d' un Etat ».

      * 81 Le problème de seuils se pose avec une extrême acuité : on peut se demander en effet, à partir de quel seuil d'intensité une situation de tensions, de troubles ou plus généralement de violence peut être qualifiée de conflit armé, à partir de quel degré d'organisation un groupe armé peut être considéré comme une partie belligérante, un acteur

      d'un conflit armé ?

      82 Voir Déclaration du CICR, A/ C.6/53/WG.1/INF/1 du 09 octobre 1998

      * 83 De facto, le terrorisme est considéré d' un point de vue sociologique comme un conflit de basse intensité « a low intensity conflict » ou une « guerre asymétrique » selon les terminologies anglo-saxonnes. Voir J. BAUD, La guerre asymétrique ou la défaite du vainqueur, Ed. du Rocher, Paris, 2003, 212 p.

      84 Pour une étude plus exhaustive des actes terroristes susceptibles d'être qualifiés de crime de guerre, se référer à l'étude de Michel VEUTHEY, « Le droit international humanitaire face à la guerre contre le terrorisme », in SOS, ATTENTATS, Terrorisme, victimes et responsabilité pénale internationale, Calman-Lévy, Paris, 2003, pp. 516 et s. On passera en revue quelques uns de ces actes :

      - L'article 27 de la IVème Convention de Genève de 1949 exige que les personnes civiles soient « traitées, en tout temps, avec humanité et protégées notamment contre tout acte de violence ou d'intimidation, contre les insultes et la curiosité publique » ;

      - L'article 33 de cette même Convention interdit « les peines collectives, de même que toute mesure d'intimidation ou de terrorisme » à son alinéa 1, tandis que l'alinéa 3 du même article interdit « les mesures de représailles à l'égard des personnes protégées et de leurs biens » ;

      - L'article 34 de la même Convention interdit la prise d'otages ;

      - L'article 51, alinéa 2, du Protocole additionnel I interdit « les actes ou menaces de violence dont le but principal est de répandre la terreur parmi la population civile ». Son alinéa 5 définit les attaques indiscriminées ; son alinéa 6 réaffirme l'interdiction des représailles contre la population civile ou des personnes civiles ;

      - L'article 3 commun aux quatre Conventions de Genève, sans utiliser le terme de terrorisme, interdit à l'égard des personnes qui ne participent pas (ou plus) directement aux hostilités : les atteintes portées à la vie et à l'intégrité corporelle, notamment le meurtre sous toutes ses forme, les mutilations, les traitements cruels, tortures et supplices ; les prises d'otages ; les atteintes à la dignité des personnes, notamment les traitements humiliants et Ces interdictions sont d'autant plus importantes qu'elles s'adressent tant aux gouvernements qu'aux parties non étatiques aux conflits et que la CIJ, dans l'Arrêt Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua fond (27 juin 1986), les a déclarées applicables en toutes situations de conflits comme « considérations élémentaires d'humanité ».

      * 85 Parmi les diverses conventions sectorielles, seules cinq évoquent le terrorisme : Convention de 1979 sur la prise d'otages, préambule : « (...) prévenir, réprimer, et punir tous les actes de prise d'otages en tant que manifestations du terrorisme international » ; Convention l'OMI de 1988, préambule; Convention de 1998 sur les attentats terroristes à l'explosif, préambule ; Convention de 1999 sur le financement du terrorisme ; Convention de 2005 pour la répression des actes de terrorisme nucléaire.

      * 86-87 Certains traités internationaux incorporent par renvoi les définitions fragmentaires des traités antiterroristes universelles. Ces traités ne définissent pas à proprement parler les infractions terroristes qu'ils incorporent, mais délimitent leur champ d'application « terroriste ». L'exemple le plus topique est certainement la Convention contre le financement du terrorisme de 1999. On peut déduire de son article 2§1 que sont terroristes les actes constituant une infractions au regard et selon la définition des traités énumérés en annexe, soit tous les traités antiterroristes antérieurs, à l'exception de la Convention de Tokyo de 1963 qui ne définit pas d'infraction et de la Convention sur le marquage à l'explosif aux fins de détection qui n'a pas de dimension pénale.

      * 88 Pour « définition par renvoi », voir Jean SALMON (sous la direction de), Dictionnaire de droit international public, Bruylant, Bruxelles, 2001, p. 971. Le renvoi y est défini comme la « technique de formulation de textes juridiques consistant à se référer expressément à d'autres textes juridiques, sans les reproduire ».

      * 89 Cf. rapports annuels du Secrétaire général des Nations Unies sur les « Mesures visant à éliminer le terrorisme international » et le « Guide législatif sur les Conventions et Protocoles mondiaux contre le terrorisme », préparé en 2003 par l'Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), disponible sur le site Internet : http://www.unodc. org/odccp/terrorism.htlm

      * 90 Cf. article 3 commun aux quatre conventions de Genève

      * 91 Cette demande est formulée dans la Résolution 31/103/ du 15 décembre 1979

      * 92 Cf. article 1 de ladite convention

      * 93 Pour aller plus loin sur la question, voir Marie-Hélène GOZI, op.cit., p.87

      * 94 Les exemples foisonnent en cette matière, mais on se souviendra plus particulièrement de l'attentat de février 1993 contre le World Trade Center de New York, des attentats de 1998 contre les ambassades américaines de Nairobi et Dar-Es-Salaam.

      * 95 Cf. art.1er, § 3 (b).

      * 96 Cf. art. 7 de ladite convention

      97 Par exemple, la Convention de 1972 sur les armes bactériologiques (biologiques) ou à toxines oblige en son article IV les Etats parties à adopter les mesures nécessaires pour interdire et empêcher le stockage et la conservation des agents, toxines, armes et équipements entrant dans l'objet du traité. Un autre traité de 1993 concerne aussi la détention d'armes chimiques et impose en son article VII aux Etats parties d'interdire dans leur législation pénale le stockage et la détention par des personnes physiques ou morales de certaines matières ou armes.

      * 98 Nous soulevons à dessein un problème de droit international dont la consistance et l'actualité nous paraissent ne souffrir d'aucune ambiguïté. Il s'agit notamment de l'illicéité de l'emploi des armes nucléaires. Diverses affirmations militantes contestent la détention d'armes nucléaires, comme constitutive d'une menace objective d'emploi incompatible avec la Charte des Nations Unies. Cette position est évidemment contredite par le traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (T.N.T) qui reconnaît l'existence des cinq puissances officiellement nucléaires. Le débat s'est par la suite polarisé sur la licéité de la menace ou de l'emploi de ces armes. La CIJ s'est prononcée sur la question dans un avis consultatif, en date du 8 juillet 1996, en des termes assez complexes ; il en ressort les éléments suivants :

      * - L'arme nucléaire est singulière en raison de ses capacités de destruction. Mais son emploi est soumis au droit international général, dont les principes « intransgressibles » du droit humanitaire ;

      - Dans cette mesure, menace ou emploi de l'arme nucléaire sont généralement illicites ;

      - Toutefois, dans une circonstance extrême de légitime défense où la survie même de l'Etat est en cause, la Cour ne peut conclure que la menace ou l'emploi de cette arme serait licite ou illicite ;

      - Il existe enfin une obligation de poursuivre et de mener à terme des négociations conduisant au désarmement nucléaire. (Voir Jean COMBACAU et Serge SUR, Droit international public, Montchrestien, 6ème édition, Paris, 2004, p. 682). Ces conclusions laissent transparaître un conflit de normes entre droit humanitaire et légitime défense. On en déduit tout naturellement que la menace ou l'emploi de l'arme nucléaire n'est pas exclue aussi longtemps qu'elle s'inscrit dans une perspective de légitime défense et qu'elle ne viole pas les normes pertinentes du droit humanitaire, telle par exemple la préservation de la vie des populations civiles dans les tueries. En pareille circonstance, il n'est pas oiseux de se demander si l'utilisation d'une arme nucléaire, fut-elle sous l'angle licite de la légitime défense, peut épargner la vie des populations civiles naturellement protégées par le droit humanitaire. Nous avons encore en mémoire le largage sur Hiroshima (6 août 1945) et Nagasaki (9août 1945) de deux bombes atomiques, ayant causé la mort de milliers de personnes, sans discrimination.

      99 Cela est d'autant plus vrai que, le financement du terrorisme concerne moins la commission d'attentats terroristes que la participation ou le soutien aux activités terroristes.

      * 100 Il s'agit notamment des Résolutions 1333 (19 décembre 200) et 1373 (28 septembre 2001). On notera qu'il existe également au plan régional des conventions qui incriminent le financement du terrorisme. On citera de façon discrétionnaire, la Convention de l'OUA sur le financement du terrorisme, la Convention européenne relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie, au gel, et à la confiscation des produits du crime et au financement du terroriste, en date du 16 mai 2005 signée à Varsovie, pour ne citer que ces dernières.

      *

      * 101 Il faut faire observer que les différentes conventions traitant de la question de la piraterie aérienne et des actes illicites contre la navigation aérienne n'emploient pas le terme de terrorisme aérien. Il n'empêche cependant que la doctrine, dans la perspective de la convention de 1999 sur le financement du terrorisme, les considère comme tels. Voir par exemple Marie-Hélène GOZI, Le terrorisme, op.cit., pp 82-85.

      102 Le terrorisme contre l'aviation civile est toujours d'une grande actualité. On souvient, pour les évènements les plus récents, des destructions en vol du Boeing de la PanAm en 1988 et du DC 10 d'UTA l'année suivante. Plus récemment, le détournement simultanément de quatre aéronefs commerciaux le 11 septembre 2001 ayant occasionné la mort de trois mille personnes environ aux USA, avait créé l'émoi dans le monde.

      103La Convention de la Haye de 1970 fait certainement suite au détournement, le 22 juillet 1968, d'un avion de la compagnie israélienne EL AL, assurant la liaison entre Rome et Tel-Aviv par un commando du FPLP (Font Populaire de Libération de la Palestine, un des groupes de l'OLP).

      * 104 C'est sûrement le caractère par trop général et extensif de cette convention qui a favorisé son exclusion de la liste des différentes conventions antiterroristes annexées à la Convention de 1999 sur le financement du terrorisme

      105 « Commet une infraction pénale toute personne qui illicitement et intentionnellement :

      a) accompli un acte de violence à l'encontre d'une personne se trouvant à bord d'un aéronef en vol, si cet acte est de nature à compromettre la sécurité de cet aéronef ; b) détruit un aéronef en service ou cause à un tel aéronef des dommages qui le rendent inapte au vol ou qui sont de nature à compromettre sa sécurité en vol ; c) place ou fait placer sur un aéronef en service, par quelque moyen que ce soit, un dispositif ou des substances propres à détruire ledit aéronef ou à lui causer des dommages qui le rendent inapte au vol ou qui sont de nature à compromettre sa sécurité en vol ; d) détruit ou endommage des installations ou services de navigation aérienne ou en perturbe le fonctionnement, si l'un des actes est de nature à compromettre la sécurité d'aéronefs en vol ; e) communique une information qu'elle sait être fausse et, de ce fait, compromet la sécurité d'aéronefs en vol ».

      106 Selon cette règle coutumière, le pirate peut être poursuivi dans tout Etat. Voir, V. HIGGINS et COLOMBOS, Le droit international de la mer, Pedone, 1952, p. 294 cité par Marie-Hélène GOZI, op.cit., p. 80.

      * 107 Voir en ce sens Marie-Hélène GOZI, ibid., p.81

      * 108 Entre 1993 et 2003, le nombre d'actes de piraterie maritime dans le monde aurait plus que triplé. Selon un rapport du Bureau maritime international, plus de 263 actes de piraterie ont été recensés dans le monde, soit une augmentation de 10% par rapport à l'année précédente. Sur www. Radio-Canada.ca/nouvelles/international

      * 109 On dénombre 36 cas de détournements de navires par les pirates somaliens depuis le début de l'année. On se souvient qu'au mois d'avril dernier le navire français le Ponant était la cible de ces terroristes, dans le port d'Eyl à environ 500 km de la capitale Mogadiscio. Sur http://www.rfi.fr/french/actufr/articles.

      110 La capture du pétrolier géant saoudien le Sirius Star, le 17 novembre 2008, une cible d'une dimension inédite, circulant de surcroît très au sud de l'aire d'action habituelle du golfe d'Aden des pirates somaliennes, à 800 Km au large du Kenya et de la Tanzanie, et d'autres navires (un chalutier thaïlandais, un cargo immatriculé à Hong Kong et un vraquier grec), marque une escalade dangereuse de la piraterie maritime. Par Monique MAS propos recueillis sur le site http://www.rfi.fr/french/actufr/articles.

      * 111 L'adoption de la résolution 1816 (juin 2008) traduit un regain d'intérêt de la communauté internationale à l'égard de cette criminalité. Elle élargit l'approche de la communauté internationale aux autres volets de la piraterie en instituant, pour palier les carences du droit international, un droit encadré de poursuivre les pirates dans les eaux territoriales somaliennes lorsqu'ils s'y replient, et évoque la possibilité d'y intervenir militairement.

      * 112 La Convention de Vienne de 1961 sur les relations diplomatiques, la Convention de Vienne de 1963 sur les relations consulaires et la Convention de New York de 1969 sur les missions spéciales ont codifié la coutume en la matière.113 Cf. Résolution 2780 de 1971

      114 Cf. le texte de la Convention des Nations Unies sur la protection des agents diplomatiques 1973, doc. ONU, 3166, A/9407

      * 115 Cf. article 2 de ladite convention

      * 116 Voir Mireille DELMAS-MARTY, Le relatif et l'universel, p. 396, cité par Jean-Christophe MARTIN, op.cit.,

      p. 45

      * 117 Ce procédé a pour avantage de sauvegarder l'intégrité du procès pénal, le raisonnement par analogie étant proscrit.

      118 L'article 1er de la Convention vise notamment « (...) a. les atteintes à la vie d'une personne, pouvant entraîner la mort ; b. les atteintes graves à l'intégrité physique d'une personne ; c. l'enlèvement ou la prise d'otages ; d. le fait de causer des destructions massives à une installation gouvernementale ou publique, à un système de transport, à une infrastructure, y compris un système informatique, à une plate-forme fixe située sur le plateau continental, à un lieu public ou une propriété privée, susceptible de mettre en danger des vies humaines ou de produire des pertes économiques considérables ; e. la capture d'aéronefs, de navires ou d'autres moyens de transport collectif ou de marchandises ; f. la fabrication, la possession, l'acquisition, le transport, la fourniture ou l'utilisation d'armes à feu, d'explosifs, d'armes nucléaires, biologiques ou chimiques ainsi que, pour les armes biologiques ou chimiques, la recherche et le développement ; g. la libération de substances dangereuses, ou la provocation d'incendies, d' inondations ou d'explosions, ayant pour effet de mettre en danger des vies humaines ; h. la perturbation ou l'interruption de l'approvisionnement en eau, en électricité, ou toute autre ressource naturelle fondamentale ayant pour effet de mettre en danger des vies humaines ; i.. la menace de réaliser un comportement énumérés de a à ; j. la direction d'un groupe terroriste ; k. la participation aux activités d'un groupe terroriste, y compris en lui fournissant des informations ou des moyens matériels, ou toute forme de financement de ses activités, en ayant connaissance que cette participation contribuera aux activités criminelles du groupe ».

      * 119 Voir Ghislaine FRAYSSE-DRUESNE, « La Convention européenne pour la répression du terrorisme », RGDIP, 1978, p. 990

      120 La CDI a, en effet, bien rendu compte de la difficulté technique de parvenir à une définition générale du terrorisme. Cf. Rapport CDI, 47ème session, 1195, A/50/10, Annuaire CDI, vol II, 2ème partie, pp.28-29 § 105.

      * 121 Pour une analyse critique des conventions précitées, voir Jean-Christophe MARTIN, op.cit, pp.48-49. L'auteur pense que la formule utilisée par les rédacteurs de la Convention africaine est « assez convaincante par la diversité des situations qui y sont couvertes, non sans pertinence ». En revanche, il n'en va pas de même de la définition de l'élément matériel du terrorisme commune aux Conventions de la Ligue arabe et de l'Organisation de la Conférence islamique. En effet, ces conventions semblent manifestement pécher par leur simplicité : « n'est-il pas trop large de dire que le terrorisme peut consister en tout acte ? ». Dans sa diversité, le terrorisme se caractérise par certains critères qu'il aurait été judicieux de préciser.

      122 C'est nous qui mettons en italique.

      * 123 On peut distinguer les diverses formes de terrorisme à partir de plusieurs critères dont celui de l'auteur de la commission de l'acte criminel : en ce sens, on distingue, selon les terminologies usitées, le terrorisme institutionnel du terrorisme individuel / Le terrorisme d'Etat ou étatique du terrorisme non étatique / Le terrorisme d'en haut du terrorisme d'en bas.

      124 Cf. TPIY, Affaire Galic ( « Sarajevo), n° IT-98-29, décision du 03 octobre 2002, § 32 et jugement du 05 décembre 2003, § 136.

      * 125 C'est nous qui soulignons

      126 On trouve les formules suivantes : « répandre la terreur parmi les gens, ou à les terroriser en leur portant préjudice » (Convention arabe et Convention de l'OCI), « intimider, provoquer une situation de terreur » (Convention de l'OUA), « intimider une population » (Convention sur le financement du terrorisme).

      127 Cf. Le petit Robert

      128 Cf. Affaire Galic, (Sarajevo), n° IT-98-29, décision du 03 octobre 2002, § 32 et jugement du 5 décembre 2003, § 136. Dans cette affaire le TPIY a condamné le général Stanislav GALIC pour « crime de terrorisation de la population civile ».

      * 129 C.f. commentaire de la CDI sur l'article 2 du projet du Code des crimes contre la paix et la sécurité de l'humanité : « le mot terreur a été jugé préférable à d'autres expressions parce qu'il était compris par tout le monde (...) ». in Rapport de la CDI sur les travaux de la 47ème session, 1995, A/50/10, p.29 § 111.

      *

      * 130 Il s'agit de tout « acte destiné à tuer ou blesser grièvement un civil, ou toute autre personne qui ne participe pas directement aux hostilités dans une situation de conflit armé (...) ».

      131 Pour mieux comprendre la mystique du terrorisme, voir Bruce OFFMAN, La mécanique terroriste, op.cit.

      * 132 Par exemple, la Convention de l'OUA retient comme dol spécial du terrorisme l'intention de « perturber le fonctionnement normal de services publics, la prestation des services essentiels aux populations ou créer une situation de crise au sein des populations ».

      * 133 Les Conventions de l'OUA et de l'OCI étendent encore le dol spécial du terrorisme à l'intention « de créer une insurrection générale dans un Etat partie » (OUA). Ou « menacer la stabilité, l'intégrité territoriale, l'unité politique, ou la souveraineté d'Etats indépendants » (OCI).

      134 Les Conventions arabe et islamique retiennent comme dol spécial du terrorisme le but d'endommager l'environnement. La Convention arabe couvre les actes « visant (...) à endommager l'environnement ». Celle de l'OCI couvre les actes « exposing the environment (...) to hazards ». Cela n'est pas sans rappeler le droit des conflits armés et, plus précisément, le Premier Protocole de 1977 aux Conventions de Genève de 1949 qui prévoit clairement une protection de l'environnement et l'interdiction de certaines méthodes du fait de leur (art. 35 par. 3 et 55). Voir à ce sujet, K. BANNELIER, La protection de l'environnement en temps de conflit armé, Pedone, Paris, 2001.

      *

      *

      * 135 La distinction est opérée dans la définition de la Convention de 1999 sur le financement du terrorisme qui prévoit qu'un comportement est terroriste lorsque « par sa nature ou  son contexte, il a pour but d'intimider une population ou de contraindre un gouvernement ou une organisation internationale à faire ou à ne pas faire quelque chose ».

      Cette question prend tout son sens dans le cadre de la crise ivoirienne. En effet, le 29 juin 2007, le Premier Ministre Guillaume K. SORO est la cible d'un attentat à la roquette, alors que ce dernier se trouvait à bord d' un aéronef. S'agissait-il d'un simple assassinat politique ou d'un acte terroriste pur et simple ? Les deux thèses sont plausibles si l'on considère la finalité ultime des criminels. D' une part, il pourrait s'agir d' une simple tentative d'assassinat politique : l'enjeu de la crise ivoirienne étant la prise du pouvoir, la mort du Premier Ministre aurait créé une situation de confusion politique, mettant à mal le processus de normalisation de la vie de la nation et de l'Etat, amorcé par l'Accord de Ouagadougou ( 04 mars 2007 ), ce qui aurait profité d' une certaine manière aux criminels. D'autre part, il pourrait s'agir d'un acte terroriste appréhendé sous divers angles : au regard du mode opératoire et de la cible (constitution de l'élément matériel) et au regard de la finalité recherchée par les criminels (constitution de l'élément moral). Au regard du mode opératoire et de la cible, il est question dans le cas d'espèce d'un attentat à la roquette, donc d'un attentat terroriste à l'explosif ( Convention internationale pour la répression des attentats terroristes à l'explosif du 15 décembre 1997), dirigé contre un Premier Ministre, personnalité jouissant d' une protection diplomatique (Convention sur la prévention et la répression des infractions contre les personnes jouissant d'une protection internationale, y compris les agents diplomatiques de 1973), à bord d'un aéronef, donc un acte de terrorisme aérien (Conventions de Tokyo (1963) et de la Haye (1970)). Pour la détermination de l'élément moral, point n'est besoin de rechercher l'intention spécifiquement terroriste des auteurs, c'est-à-dire provoquer la terreur ou

      intimider ou contraindre une autorité à certaines décisions, puisque la nature même de ces actes en révèle déjà la finalité terroriste.

      * 136 Voir en supra

      * 137 En ce qui concerne la crise ivoirienne du 19 septembre 2002, il faut apprécier les évènements au regard de leur contexture, et au regard de l'évolution même de la crise, de sa progression dans le temps. Pour rappel, des insurgés ont tenté un coup d'Etat qui a avorté. Ces derniers dans leur retranchement ont constitué un kyste dans les zones Centre Nord et Ouest du pays, défiant le pouvoir politique légal d'Abidjan. Ce fut le début des hostilités ouvertes entre la rébellion armée et le pouvoir politique d'Abidjan. Nous restituerons certains faits importants de la crise dans leur contexte aux fins d'analyse.

      Premièrement, aux premières heures de la crise, les insurgés ont assassiné l'ex-ministre de l'intérieur feu maître Emile BOGA DOUDOU. Il s'agit à notre sens d'un assassinat politique, puisque ces derniers ont avancé des motifs politiques au soutien de leurs actes. D'ailleurs le contexte de coup d'Etat renforce d'avantage nos convictions. De plus, du fait que les criminels aient expressément visé une personnalité politique non des moindres en rajoute à la dimension politique du crime. Les autres actes commis dans cette période qui revêtent les critères du crime terroriste pourraient être considérés comme tels. On a encore en souvenir la prise d'otage d'un ministre de la République Monsieur François AMICHIA. On mentionnera à toutes fins utiles que le code pénal ivoirien dans sa mouture actuelle incrimine certains actes graves susceptibles de faire peser un péril sur la nation : on y retrouve ainsi incriminés l'insurrection armée, les atteintes à la sûreté de l'Etat...Plus encore, la Convention de l'OUA sur le terrorisme incrimine les actes délictueux pouvant « perturber le fonctionnement normal des services publics, la prestation de services essentiels aux populations ou de créer une situation au sein des populations » ou pouvant « créer une insurrection générale dans un Etat partie ». Sous les effets conjugués des principes « pacta sunt servanda » et « res inter alios acta », les dispositions de cette convention s'appliquent de jure à la Côte d'Ivoire. Mais, on le sait l'amnistie prévue dans le cadre des différents accords de pacification du pays efface ces faits. Cependant on peut se poser la question de savoir si les effets de cette amnistie s'étendent également à la convention africaine.

      Deuxièmement, la tuerie de la cinquantaine de gendarmes à Bouaké avait créé l'émoi dans le monde, les chaînes étrangères ayant abondamment relayé les évènements. Ces actes, à notre sens mériteraient la qualification de crime de guerre dans la mesure où ils ont été accomplis dans un contexte d'hostilité. Certes, il n'est pas du tout aisé de déterminer avec précision le contexte de conflit armé surtout que les combats n'avaient pas atteint une certaine intensité. Toutefois, on peut a priori l'admettre puisque les parties belligérantes étaient constituées, d'un côté les forces loyalistes et de l'autre côté les forces rebelles, même si on peut regretter que ces dernières n'appliquaient pas les disposions pertinentes du DIH qui exigent le port ouvert d' uniforme et des armes. Ici encore, la qualité des victimes en rajoute au qualificatif crimes de guerre ; il s'agit de gendarmes. La nature du conflit suscite des questionnements : la participation reconnue active d'étrangers et le soutien avéré d'Etats voisins aux belligérants n'ajoutent t-ils pas une dimension internationale au conflit ?

      Troisièmement, les massacres perpétrés dans l'Ouest de la Côte d'Ivoire (Guitrozon et Petit Duekoué) avaient donné lieu à des supputations de toute nature au point où certains ont parlé de génocide. Il s'agit à notre sens ni plus ni moins de crimes contre l'humanité compte tenu de la gravité des crimes, du nombre importante des victimes civiles, et de la répétition de ces actes qui ont été perpétrés plus d'une fois. Dans ce cas on peut supposer que ces attaques poursuivaient bien une politique préalablement planifiée. Il est vrai que la situation de conflit armé aidant, il n'est pas impossible de qualifier ces actes de crimes de guerre. Le raisonnement que nous tenons est cependant le suivant : ces actes s'inscrivent dans une perspective d'attaques sporadiques et isolés surtout que la zone d' interposition constatant le cessez le feu avait créé une situation de relative accalmie dans le pays.

      Enfin, les évènements de novembre 2004 sont encore plus difficiles à qualifier : s'agissait-il simplement d'actes de forces armées ou de terrorisme d'Etat? Il serait à notre sens plus sage de se garder de toute conclusion hâtive, précoce et prématurée, pour ne retenir pour l'instant que la qualification plus générale de crime de droit commun commis par les forces armées d' une puissance étrangère dans l'exercice de ses fonctions sur la population d' un pays hôte. Nous excluons à dessein la qualification de crime de guerre puisque la France n'était apparemment pas partie au conflit. Il reste que la qualification crime contre l'humanité ne paraît pas aller de soi.

      138 Voir Albert CAMUS, L'homme révolté, éd. Gallimard, collection Folio

      139 Voir Jean-Marc SOREL, op.cit., p. 52. L'auteur estime également que les définitions du terrorisme, si elles apparaissent dans les conventions récentes restent énumératives, descriptives et, pour tout dire, quelque peu « fourre- tout ». « Ne faudrait-il pas invoquer plutôt des approches du terrorisme (...) » au lieu de définition du terrorisme ?

      140 Ibid., pp. 39-40.

      * 141 C'est nous qui mettons en italique

      * 142 Cet article de la Convention relative à l'aviation civile internationale se lit ainsi : « a) Les Etats contractants reconnaissent que chaque Etat doit s'abstenir de recourir à l'emploi d'armes contre les aéronefs.

      * 143 Voir Georges KYRIAKOPOULOS, La sécurité de l'aviation civile en droit international public, Sakkoulas/Bruylant, Athènes, 1999 cité par Jean-Christophe MARTIN, op.cit , p. 239

      144 L'emploi de l'adverbe « notamment » autorise à penser que l'énumération n'est pas limitative.

      145 Dans la résolution du 7 décembre 2001 sur « La contribution de l'Organisation pour l'interdiction de l'arme chimique (OIACI) à la lutte mondiale contre le terrorisme » (EC-27/DEC.5), le Conseil exécutif affirme que l'application intégrale et efficace des dispositions de la Convention de 1993 « constitue en soi une contribution à la lutte mondiale contre le terrorisme ».

      * 146 Sont des armes chimiques au sens de la Convention les produits chimiques toxiques et leurs précurseurs à l'exception de ceux qui sont destinés à des fins non interdites par la Convention ; les munitions et dispositifs spécifiquement conçus pour provoquer la mort ou d'autres dommages par l'action toxique des produits chimiques toxiques qui seraient libérés du fait de l'emploi de ces munitions et dispositifs ; les armes chimiques abandonnées et anciennes.

      * 147Seules les conventions de la Ligue des Etats arabes (art. 3) de l'OCI (art. 3, 1) et de l'OUA (art. 4 paragraphe 1) mentionnent l'interdiction de soutenir le terrorisme.

      148 Voir I. FICHET-BOYLE et M. MOSSE, « L'obligation de prendre des mesures internes nécessaires à la prévention et à la répression des infractions », in H. ASCENSION, E. DECAUX et A. PELLET (dir.pub), Droit international pénal, Pedone, Paris, 2000, pp. 115-128 et 817-886

      * 149Voir par exemple Affaire de la Fonderie du Trail, sentence arbitrale du 11 mars 1941.

      * 150  Voir le deuxième rapport de P. S RAO à la CDI, A/CN.4/501, 5 mai 1999, p. 6 para. 20

      * 151 L'obligation de vigilance porte aussi sur la prévention des actes de terrorisme commis sur le territoire de l'Etat contre des intérêts d'un autre Etat, par exemple la protection d'une ambassade. L'Association de droit international a ainsi affirmé que l'Etat a une obligation générale de prévention : « a State is legally obliged to exercise due diligence to prevent the commission of acts of international terrorism within its jurisdiction » : Rapport de la 61ème Conférence de l'International Law Association

      * 152 Rapport A/8710/Rev. 1, Ann. CDI, 1972, vol II, p. 345.

      * 153 Est incriminé par l'article 2 non seulement le fait de fournir des fonds, mais aussi de réunir des fonds à des fins terroristes. Peu importe que les fonds soient issus d'activités légales ou illégales et l'article1 retient une définition très large du terme « fond » : « Fonds s'entend des biens de toute nature, corporels ou incorporels, mobiliers ou immobiliers, acquis par quelques moyens que ce soit, et des documents ou instruments juridiques sous quelque forme que ce soit, y compris sous forme électronique ou numérique, qui attestent un droit de propriété ou un intérêt sur ces biens, et notamment les crédits bancaires les chèques de voyage... »

      154 Voir préambule alinéa ( c ), Le Conseil de sécurité, « Réaffirmant également sa condamnation sans équivoque des attaques terroristes commises le 11 septembre 2001 à New York, à Washington et en Pennsylvanie, et exprimant sa détermination à prévenir tous actes de ce type » (C'est nous qui soulignons).

      155 Voir § 2 (a) de la Résolution 1373

      * 156 Cf. § 1 (d) de la Résolution 1373

      * 157 Cf. § 2 (d) de la Résolution 1373

      * 158 Cf. Résolution : « L'asile en droit international public », Session de Bath (1950), Ann. IDI, 1950, vol., p. 375

      * 159 Rec. CIJ, 1950, p. 284

      * 160 Voir en ce sens Résolution de l'AGNU 217 A (III) du 10 décembre 1948 et article 4 de la « Déclaration sur l'asile territorial », Résolution 2312.

      * 161 Nous y reviendrons

      * 162 L'alinéa a) concerne l'interdiction d'organiser, financer et tolérer les activités terroristes et de laisser son territoire être utilisé pour l'entraînement des terroristes.

      * 163 Voir François DUBUISSON, « Vers un renforcement des obligations de diligence en matière de lutte contre le terrorisme ? », in K. BANNELIER et al. (dir.), Le droit international face au terrorisme, op.cit., pp. 151-152

      164 Au niveau conventionnel, la Convention de l'OUA contient l'obligation de « s'assurer, en accordant l'asile, que le demandeur d'asile n'est pas impliqué dans un acte terroriste » (art. 4, 2, g).

      * 165« Aucune disposition de la présente Charte n'autorise les Nations Unies à intervenir dans les affaires qui relèvent essentiellement de la compétence nationale d'un Etat (...) » ;

      * 166« (...) toutefois, ce principe ne porte en rien atteinte à l'application des mesures de coercition prévues au Chapitre VII ».

      * 167 Patrick DAILLIER ; Alain PELLET, Droit international public, LGDJ, Paris, 7ème éd., 2002, p. 443

      168 Ces difficultés ont pour nom entre autres, guerres fracticides, famine, épidémies, pauvreté, mauvaise gouvernance...

      * 169 Pour remonter dans le temps sur les concertations qui ont présidé à l'élaboration de cette convention, voir Roch Gnahoui DAVID, « Le terrorisme : cadre juridique au plan de l'Union africaine », SOS, ATTENTATS, Terrorisme, victimes et responsabilité pénale internationale, op.cit. pp. 102 et s. On note avec cet auteur que les réflexions sur le terrorisme ont véritablement commencé à partir de 1992.

      170 « Réaffirmant le droit légitime des peuples à l'autodétermination et à l'indépendance, conformément aux principes du droit international et aux dispositions des Chartes de l'Organisation de l'Unité Africaine et des Nations unies, ainsi que de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples ».

      171 La Convention arabe de lutte contre le terrorisme a été adoptée le 22 avril 1999 au Caire et est entrée en vigueur le 7 mai 1999

      172 La Convention de l'Organisation de la Conférence islamique (OCI) sur la lutte contre le terrorisme international a été adoptée à Ouagadougou le 1er juillet 1999.

      173 Cf. article 4 pour la convention africaine et article 3 pour les conventions arabe et islamique.

      * 174 Selon le Dictionnaire de droit international public de Jean SALMON (dir. pub.), l'obligation de vigilance est l' « observation requérant d'un sujet de droit international de protéger les Etats étrangers, leurs représentants et leurs ressortissants ou des espaces, contre tout acte illicite perpétré par des particuliers, que ces actes se réalisent sur son

      territoire ou sous sa juridiction ou sous son contrôle », op.cit, p. 770

      * 175 Cf. Convention de l'OUA : article e) ; Convention de la Ligue arabe : article 3, I paragraphe 8 ; Convention de l'OCI : article 3, A) paragraphe 8

      * 176 Cf. article 3, paragraphe 2, 5 des Conventions arabe et islamique, et également article 4 paragraphe 2, i de la Convention africaine.

      177 Cf. § 1 de la Convention européenne.

      * 178 L'article 3 § 1 cite « la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales, (...) le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, et d'autres obligations relatives au droit international, lorsqu'ils sont applicables ».

      * 179 Cf. article 3 § 2 de la Convention

      180 Cf. article 3 § 3 de la Convention

      * 181 Cf. article 3 § 4 de la Convention

      * 182 Voir Sandrine SANTO, « L'ONU face au terrorisme », GRIP, 2007, wesite www.grip.fr

      * 183 Nous citons : « 6. Pour combattre efficacement la multiplication des actes de terrorisme, leur caractère et leurs effets internationaux croissants, les Etats doivent renforcer leur coopération dans ce domaine, en particulier en rendant systématique l'échange d'information sur la prévention du terrorisme et les moyens de le combattre ».

      * 184 Voir Résolution 44/ 219 (1989), paragraphe 4 (d) et 46/51 (1991), paragraphe 4.

      * 185 Voir article 13 de la Convention

      * 186 Les articles 15 ( b ) du traité de 1997 sur les attentats terroristes à l'explosif et l'article 7 paragraphe1 (b) de la Convention de 2005 sur le terrorisme nucléaire précisent en effet que les Etats contribuent à la prévention de ces actes terroristes « en échangeant des renseignements exacts et vérifiés en conformité avec les dispositions de leur législation internes. ». L'ajout pourrait emporter comme conséquence immédiate le filtrage des informations à fournir, puisqu'il s'agit bien évidemment d'informations vérifiées et exactes.

      187 § 2 (b).

      * 188 Cf. Rapport de la CDI sur les travaux de sa 24ème session, A/8070/REV.1, Ann CDI, 1972, vol II, p. 345

      * 189 Cf. article 3, I, 2

      * 190 Cf. article 18 de la Convention

      * 191 Voir Sandra SZUREK, « La lutte internationale contre le terrorisme sous l'empire du Chapitre VII : un laboratoire normatif », RGDIP, 2005, pp. 31-33

      * 192 Cf. document du CCT S/AC. 40/2003/SM. ¼ du 6 mars 2003, p. 1

      * 193 Cf. article 2 de son Statut.

      * 194 Voir A. HUET et R. KOERING-JOULIN, Droit pénal international, Thémis, PUF, Paris, 2ème éd., 2001,

      p. 304

      195 Nous notons à ce propos la nature assez singulière de L'OIPC. En effet, cet organe procède non d'un traité classique mais plutôt de la seule volonté de l'AGNU qui a adopté, en 1956 à Vienne, le Statut de la défunte Commission internationale de police criminelle, l'ancêtre d' Interpol. Elle a été négociée non par les Etats mais directement par les autorités de police. L'OIPC n'est donc pas une organisation intergouvernementale au sens propre du terme.

      196 La reconnaissance a été implicite en 1971 (Résolution 1579) puis explicite en 1975 (Décision 109, LIX). Auparavant, l'OIPC avait le statut d'ONG aux Nations Unies. Voir Jean MONTREUIL, « Organisation internationale de police criminelle (Interpol) », Juris-Classeur Droit international, Fascicule 405-30, p. 7.

      198 Voir l'article 3 de son Statut, également la Résolution de l'Assemblée générale d'Interpol n° 7 de sa 53ème session (Luxembourg), AGN/53/RES/7, 1984, « Application de l'article 3 du Statut ».

      199 Voir la Résolution n° 6 de sa 53ème session (Luxembourg), AGN/53/RES/6, 1984, « Criminalité violente communément appelée terrorisme », dans laquelle l'Assemblée générale de l'OIPC reconnaît que le caractère politique d'une infraction est déterminé par le droit interne mais que le terrorisme doit être combattu. 200 Dans la Résolution n° 6 AGN/53/RES/6, 1984 précitée, l'OIPC considérait qu'il était essentiel de combattre le terrorisme. Il ressort en outre de la Résolution AGN/53/RES/7, 1984, précitée que le terrorisme ne relève pas de l'interdiction de l'interdiction de l'article 3 du Statut de l'OIPC.

      200 La Convention a été établie par acte du Conseil de sécurité le 26 juillet 1995, JOCE C 316 du 27 novembre 1995. L'Office est créée par l'article 1 paragraphe 1 de la Convention.

      * 201 Cf. article 2 § 2 de la Convention Europol

      202 Cf. article 3 § 1 de la Convention Europol

      203 Cf. articles 6 à 9 de la Convention Europol

      204 Les attentats du 11 septembre ont engagé l'OTAN dans la lutte contre le terrorisme en vertu de l'article 5 du traité.

      205 L'article 4 du Protocole de 2004 à la Convention de l'OUA sur la lutte contre le terrorisme prévoit que le Conseil de paix et de sécurité de l'OUA récemment rebaptisée UA, doit entre autre, mettre en place un système opérationnel de collecte, traitement et diffusion de l'information relative au terrorisme.

      * 206 Le Groupe de réflexion sur les implications du terrorisme pour les politiques de l'ONU a recommandé dans son rapport de « prendre en compte les problèmes liés au terrorisme dans les mandats des opérations de maintien de la paix, par exemple en s'assurant que les forces de la police civiles des Nations Unies suivent une formation appropriée aux mesures permettant d'identifier et de combattre les groupes terroristes » : Rapport A/52/273, p. 15

      (Recommandation 23).

      207 Voir Résolution 1345 (2001) du Conseil de sécurité, § 1 et 10.

      * 208 Cf. Rapport de la MINUK sur l'application de la Résolution 1244 (1999) du Conseil de sécurité, S/2001/600, p. 7, paragraphe 27, p. 8, paragraphe 32.

      209 Cf. Rapport du Secrétaire général des Nations Unies sur les « Mesures visant à éliminer le terrorisme international », A/58/116, 2003, pp.13-14.

      * 210 Cf. § 5 de ladite déclaration

      * 211 Consulter le Document sur le programme de l'ONUDC en matière d'assistance technique sur le site Internet :

      www.unodc.org/pdf/crime/terrorism

      212 Cf. article 7 § 2 (a) du Protocole

      * 213 Le mot sanction ne doit pas faire illusion et doit être compris au sens strict du terme. Ainsi, stricto sensu Le vocable « sanctions » renvoie à un processus judiciaire ou disciplinaire, et s'écarte de ce pas de la logique des mesures coercitives du Conseil de sécurité, lesquelles relèvent avant tout de la police internationale. (voir Jean COMBACAU et Serge SUR, op.cit, p. 646)

      * 214 La notion de « contrainte » croule sous le poids d'une vive polémique : appréhendée stricto sensu, elle serait toute forme de pression autre que le recours à la force, d'une gravité suffisante pour pouvoir infléchir la décision d'une personne (physique ou morale). Cette définition très restrictive est quelque peu étriquée. Aussi, semble-t-il loisible de recourir au sens généralement admis du mot. Appréhendée lato sensu, la contrainte doit être entendue au sens habituel de « pression de quelque forme que ce soit qui porte atteinte au libre arbitre d'un sujet de droit ». Dans ce sens très large, la contrainte inclut le recours à la force armée, y compris la force non armée.

      Alain PELLET, Patrick DAILLIER, op.cit, p. 929

      * 215 Des penseurs aussi variés que Aristote ( dans Politique, Jean Aubonnet, Paris, Les belles lettres, 1971), Blaise PASCAL (dans Pensées, 1671, posthume, Brunschwicg, Paris, Hachette, 1897), SAINT-AUGUSTIN, (dans La cité de Dieu, in OEuvres de saint Augustin, 12 vol, G. Bardy, Paris, Desclée de Brouwer, Bibliothèque augustinienne, 1975-1989, Emmanuel KANT ( dans Projet de paix perpétuelle, esquisse philosophique, Jean Gibelin, Paris, 1999), ont réfléchi sur la question. Les juristes non plus ne sont pas restés insensibles à cette préoccupation. Pour le Doyen CARBONNIER, « le droit est la politesse de la force » (dans Flexible droit, Paris, LGDJ, 8ème éd. 1995). Mais ce sont surtout les juristes du droit international qui se sont interrogés sur les rapports entre le droit et la force, de GROTIUS dans son célèbre opuscule De jure belli ac pacis ( Le droit de la guerre et de la paix, P. Pradier-Fodéré, présent. et éd. Simone Goyard-Fabre, Paris, PUF, 1999), à G. SCELLE qui a réfléchi sur la juridicité du recours à la force (dans Précis du droit des gens, éd. du CNRS, 1984, p. 64 et s.) jusqu'à R-J DUPUY pour qui la paix par le droit est un mythe (Résumé annuels des cours au collège de France, Recueil de textes, « Dialectiques du droit international », Institut du droit de la Paix et du développement, Nice-Paris, éd. Pedone 1999, pp. 335-339).

      * 216 Voir Patrick DAILLIER ; Alain PELLET, Droit international public, LGDJ, Paris, 7ème éd., 2002, p. 935.

      « Jusqu'en 1919, on ne veut voir dans la guerre qu'une manifestation normale de la souveraineté des Etats ».

      217 Pour aller plus loin sur cette question, voir Thierry GARCIA, « Recours à la force et droit international », Perspectives internationales et européennes, mis en ligne le 21 juillet 2005, sur http://revel.unice.fr/pie/document.html

      218 Voir Michel VIRALLY, « Commentaire de l'article 2 paragraphe 4 », in La Charte de l'Organisations Des Nations Unies. Article par article cité par Félix Sohuily ACKA, « La guerre pour la paix en Afrique : de quel droit ?  » , in Actualité juridiques, n° 55, AIDD, Abidjan, 2007, p. 142.

      * 219 Cf. article 2 § 4 : « Les membres de l'Organisation s'abstiennent, dans leurs relations internationales, de recourir à la menace ou à l'emploi de la force, soit contre l'intégrité territoriale ou l'indépendance politique de tout Etat, soit de toute autre manière incompatibles avec les buts des Nation Unies ». Il faut toutefois reconnaître avec le Professeur Félix Sohuily ACKA que le principe de l'interdiction du recours à la force est moins explicite dans la Charte qu'en doctrine ou en droit positif. En doctrine par exemple le principe est qualifié de « norme impérative » par Patrick DAILLIER et Alain PELLET, (op.cit, p. 967), et revêt de ce fait valeur de règles de jus cogens, catégorie de règles dont la violation entache de nullité toute convention qui la méconnaîtrait (Joe VERHOVEN, Droit international public, Bruxelles, Larcier 2000, p. 671). Cette érection du principe en norme de jus cogens est d'ailleurs reconnue par le droit positif, la Commission du droit international ayant retenu cette solution (Annuaire CDI, 1996, p. 270, paragraphe 1). La CIJ quant à elle tient l'interdiction pour « un principe fondamental ou essentiel » (Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci, CIJ, Rec. 1986, p. 90, paragraphe 190). Pour aller plus loin sur la valeur du principe, voir Félix Sohuily ACKA, op. cit., pp. 142 et s.

      * 220 L'une des exceptions au principe de l'interdiction du recours à la force armée se trouve logée dans l'inusité article 107, relatif à la possibilité d'action militaire contre les anciens Etats ennemis au cours de la Seconde Guerre mondiale: « Aucune disposition de la présente Charte n'affecte ou n'interdit, vis-à-vis d'un Etat qui, au cours de la Seconde Guerre mondiale, a été l'ennemi de l'un quelconque des signataires de la présente Charte, une action entreprise ou autorisée, comme suite de cette guerre, par les gouvernements qui ont la responsabilité de cette action ».

      * 221 Voir Antonio CASSESE , « Commentaire de l'article 51 » in Jean-Pierre COT ; Alain PELLET; Mathias FORTEAU (dir.), La Charte des Nations Unies : Commentaire article par article, 3ème édition, Économica, Paris 2005, p.1328

      * 222 Nous citons in extenso « Aucune disposition de la présente Charte ne porte atteinte au droit naturel de légitime défense, individuelle ou collective, dans le cas où un Membre des Nations Unies est l'objet d'une agression armée, jusqu'à ce que le Conseil de sécurité ait pris les mesures nécessaires pour maintenir la paix et la sécurité internationales. Les mesures prises par des membres dans l'exercice de ce droit de légitime défense sont immédiatement portées à la connaissance du Conseil de sécurité et n'affectent en rien le pouvoir et le devoir qu'a le Conseil, en vertu de la présente Charte, d'agir à tout moment de la manière qu'il juge nécessaire pour maintenir ou rétablir la paix et la sécurité internationales ».

      * 223 Voir Antonio CASSESE, « Commentaire de l'article 51 de la Charte des Nations Unies », in Jean-Pierre COT et al. (dir.pub.), La Charte des Nations Unies, Commentaire article par article, 2ème édition, Economica, Paris, pp. 789-790.

      224 C'est nous qui mettons en italique

      * 225 Il ne s'agirait là que d'une « interprétation authentique de la Charte des Nations Unies », voir J. ZOUREK, « Enfin une définition authentique de l'agression, AFDI, 1974, p. 28. On peut considérer que la Résolution en question a une valeur coutumière : voir CIJ, Aff. Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci, 27 juin 1986, Rec. CIJ, 1986, p.103 § 195.

      226 Cf. Jean SALMON, Dictionnaire de droit international public (dir.), op.cit, p. 52

      227 Cf. Avis du 9 juillet 2004 relatif aux Conséquences juridiques de l'édification d'un mur dans le territoire palestinien occupé, Rec. CIJ, 2004, p.194 § 139.

      * 228L'article 51 précise d'ailleurs que les mesures prises par l'Etat « n'affectent en rien le pouvoir et le devoir qu'a le Conseil, en vertu de la présente Charte, d'agir à tout moment de la manière qu'il juge nécessaire pour maintenir et rétablir la paix et la sécurité internationales ».

      229 Et pourtant, plusieurs Etats ont prétendu recourir à la force armée au titre de la légitime défense préventive. C'est principalement le cas d'Israël qui s'en est prévalu à plusieurs reprises, en 1967 contre l'Egypte, en 1975 contre le

      * Liban, en 1981 contre l'Irak (réacteur nucléaire) ; c'est aussi le cas des USA, qui ont invoqué le concept au soutien à leurs offensives contre le Soudan et l'Afghanistan, en 1998, et tout récemment contre l'Irak en 2003 s'est forgé le doctrine de la préemption ou preemptive self defense (sous le prétexte fallacieux de la détention d'armes de destruction massive par l'Irak). Nous y reviendrons dans les développements ultérieurs.

      * 230 La Résolution 1373 est à notre sens un catalogue inédit de règles en matière de lutte contre le terrorisme. Voir ladite résolution en Annexe.

      * 231 Résolution 1373, préambule, § 5

      232 Voir Luigi CONDORELLI, « Les attentats du 11 septembre et leurs suites : où va le droit international? RGDIP, 2001, p. 841.

      * 233 Voir Patrick DAILLIER, « Les Nations Unies et la légitime défense », in Rostane MEHDI, Les Nations Unies et l'Afghanistan, 11èmes Rencontres internationales d'Aix-en-Provence, Pedone, Paris, 2003, p. 117 et en particulier note 42, cité par Jean-Christophe MARTIN op.cit, p. 292. L'auteur estime que l'autorisation d'exercer la légitime défense s'éteint juridiquement avec la Résolution 1390 et souligne l'ambiguïté des relations entre les forces armées américaines et la Force internationale d'assistance et de sécurité.

      * 234 Voir Antonio CASSESE, op.cit, pp 1328 et s. La CIJ a noté dans plusieurs affaires (notamment dans son arrêt du 27 janvier 1986 relatif aux Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci : CIJ. Rec., 1986,

      * p.103, §194, son avis consultatif de 1996 relatif à La licéité de la menace ou de l'emploi de l'arme nucléaire : CIJ. Rec. 1996 (I), p. 245, § 41, et son arrêt du 6 novembre 2003 relatif à l'Affaire des plates-formes pétrolières : CIJ. Rec. 2003, pp. 35-37, § 73-77) que l'exercice de la légitime défense est soumis, en vertu du droit international coutumier, aux doubles critères de nécessité et de proportionnalité.

      * 235Ibid.

      * 236 En 1975, le délégué israélien avait soutenu la thèse contraire, lors d'une intervention au Conseil de sécurité, en affirmant, après avoir cité l'article 51de la Charte qu': « Aucun principe ou disposition de la Charte n'interdit des changements de frontières, en particulier après le recours à la force en vertu du droit de légitime défense et tout particulièrement lorsqu'il n' y a pas de frontières internationales sûres entre la victime de l'agression et les Etats qui n'ont cessé depuis 25 ans, de se livrer à la guerre contre elle, en violation de la Charte ». (s/ 1733ème Séance, 20 juillet 1973, § 75). Antonio CASSESE y répond, estimant que cette thèse est sans fondement, ce qui explique qu'elle ait été rejetée par la quasi totalité des Etats (ibid. pp. 1333-1334).

      * 237 Voir Pierre D'ARGENT et al., « Article 39 » » in Jean-Pierre COT ; Alain PELLLET ; Mathias FORTEAU (dir.pub.) , La Charte des Nations Unies, commentaire par commentaire, Economica, Bruylant, Bruxelles, 3ème éd., 2005, p. 1133

      * 238 Ibid., p. 1154

      * 239 Cf. S/ 23500

      240 Cf. A/47/277

      * 241 Cf. rapport du Groupe de personnalités de haut niveau sur les menaces, les défis et les changements, 2 décembre 2004, A/625, p. 2

      *

      * 242 Il s'agit de menaces d'ordre économiques (pauvreté), de conflits interétatiques, de conflits internes d'armes nucléaires, de la criminalité organisée. A noter cependant que le Professeur Patrick DAILLIER se refuse à aller au-delà des situations classiques, ne retenant pas ainsi les hypothèses de crises alimentaires, les effets transfrontières des violations massives des droits de l'homme ou les perspectives terroristes. Voir « Article 42 », in Jean Pierre COT et al. (dir. pub.), La Charte des Nations Unies, Commentaire article par article, op.cit., p.1249.

      243 Voir notamment la Résolution 1373 (2001), préambule, paragraphe 4 « Réaffirmant (...) que (...) tout acte de terrorisme international, constitue (nt) une menace à la paix et à la sécurité internationales ».

      244 Voir Patrick DAILLIER, « Article 42 » ibid., p. 1241

      245 R. ZACKLIN, « Le Chapitre VII de la Charte des Nations Unies », Colloque SFDI de Rennes, 1994, Pedone, Paris, 1995, p. 194

      246 Voir Patrick DAILLIER, op. cit., p. 1249

      *

      *

      *

      *

      247 Cf. Rapport du groupe des personnalités éminentes, 2004, point 54, p. 94/ Voir aussi Avis consultatif de la CIJ relatif à Certaines dépenses des Nations Unies, CIJ, Rec. 1962, p. 165 : « L'action qui est uniquement de la compétence du Conseil de sécurité est celle dont il est fait mention dans le titre du Chapitre VII ».

      248 Voir R.B RUSSEL et J.E MUTHER, « A history of United Nations Charter, Brookings Institution, Washington, 1958, p. 676) cité par Patrick DAILLIER, « Article 42 » in Jean-Pierre COT ; Alain PELLLET ; Mathias FORTEAU (dir.), La Charte des Nations Unies, commentaire par commentaire, Economica, Bruylant, Bruxelles, 3ème éd., 2005, p.1252).

      * 249 Cf. Avis de 1949, CIJ Rec. 1949, p. 182 : « Selon le droit international, l'Organisation doit être considérée comme possédant ces pouvoirs (implicites) qui, s'ils ne sont pas expressément énoncés dans la Charte, sont, par une conséquence nécessaire, conférés à l'Organisation en tant qu'essentiels à l'exercice des fonctions de celle-ci... »

      *

      * 250 Nous avouons que le terme même de « démonstrations » résiste à notre compréhension ; s'agit-il de contrôles militaires de la navigation maritime ou aérienne comme le laisse penser le Professeur Alain PELLET ?

      251Telle semble être la leçon des critiques pour le manque d'encadrement ou de contrôle a priori ou a posteriori des bombardements de l'OTAN en Serbie lors de l'Affaire du Kosovo en 1999.

      *

      *

      * 252Il convient de souligner que certaines actions qui, à première vue, pourraient être considérées comme relevant de l'article 42, n'ont aucun rapport avec ce texte. Ainsi les Opérations de maintien de la paix (OMP), notion inventée par la pratique des Nations Unies, non prévue par la Charte se distinguent des opérations de rétablissement autoritaire de la paix face à une agression ou plus généralement face à une menace ou une situation de rupture de la paix. Suivant l'avis consultatif de la CIJ, du 20 juillet 1962, les OMP n'impliquent pas en principe de mesures coercitives contre un Etat coupable d'un acte d'agression ou d'une atteinte à la paix et la sécurité internationales et qu'elles ne peuvent être entreprises qu'avec le consentement de l'Etat intéressé (CIJ, Rec. 1962, pp. 170-171, p. 177)

      253 Mme Brigitte STERN fait également observer que l'article 42 qui aurait pu être utilisé à bon droit dans le contexte de l' « après 11 septembre » comme ce fut le cas dans la crise du Golfe le 17 janvier 1991, a paradoxalement été jeté aux oubliettes, relégué aux calendes grecques. Voir Brigitte STERN, « Le contexte juridique

      de l'après 11 septembre 2001 », in Karine BANNELIER et al. (dir. pub.), op.cit., pp. 15 et s.

      254 Ainsi selon la règle coutumière énoncée dans le premier principe de la Résolution 2625 (XXV), l'interdiction couvre le soutien d'un Etat au terrorisme : « Chaque Etat a le devoir de s'abstenir d'organiser et d'encourager des actes de guerre civile ou des actes de terrorisme sur le territoire d'un autre Etat, d'y aider ou d'y participer, ou de

      * tolérer sur son territoire des activités organisées en vue de perpétrer de tels actes, lorsque les actes mentionnés dans le présent paragraphe impliquent une menace ou l'emploi de la force ».

      *

      * 255 Il faut rester très lucide, dans l'abord de cette question puisque la CIJ a considéré que « le simple envoi de fonds aux Contras (...) ne représente pas en lui-même un emploi de la force » (Rec. CIJ, 1986, arrêt de 1986 relatif aux Activités militaires et paramilitaires p. 119, § 228 ainsi que p. 127, paragraphe 247).

      * 256 La CIJ a estimé dans le même arrêt que «  (...) l'appui fourni par les USA, jusqu'à la fin septembre 1984 aux activités militaires et paramilitaires des Contras au Nicaragua, sous forme de soutien financier, d'entraînement, de fournitures d'armes, de renseignements et de soutien logistique constitue une violation indubitable du principe de non-intervention (Rec. CIJ, 1986, p. 124, paragraphe 242).

      * 257 Il faut toutefois souligner avec Alain PELLET et Patrick DAILLIER que le principal problème juridique posé par les mesures de rétorsion, par hypothèse licites, tient précisément à la définition de ce que l'on peut appeler « seuil de licéité ». S'il n'est pas douteux en effet, qu'un Etat peut entretenir ou ne pas entretenir de relations diplomatiques, commerciales ou autres avec un autre Etat, en l'absence de tout engagement conventionnel contraire, il reste que cette liberté n'est sans doute pas absolue : limité d'une part par l'obligation faite aux Etats de respecter les normes impératives du droit international (jus cogens), elle l'est également par l'interdiction de l'abus de droit (op.cit, p. 957).

      * 258 Publiée in RGDIP, 1986, pp. 811-812

      * 259 La CIJ a reconnu en la matière « le pouvoir discrétionnaire qu'a tout Etat accréditaire de rompre les relations diplomatiques avec un Etat accréditant et de demander la fermeture immédiate de la mission coupable » (Rec. CIJ, 1980, p. 41 paragraphe 85), de sorte à faire admettre l'idée selon laquelle, « aucun Etat n'a l'obligation d'entretenir des relations diplomatiques ou consulaires avec un autre » ( Affaire Personnel diplomatique et consulaire des Etats-Unis à Téhéran ; Ordonnance en indication de mesures conservatoires du 15 décembre 1979, Rec. CIJ, 1979, p. 20, paragraphe 41 ).

      * 260 « Bien entendu, un Etat n'est pas tenu de poursuivre des relations commerciales particulières plus longtemps qu'il ne juge utile, si un traité ou une autre obligation juridique spécifique ne s' y oppose pas ». ( Rec. CIJ, 1986, p. 138, paragraphe 276). Ces mesures peuvent cependant être illicites au regard d'obligations conventionnelles spéciales, notamment en matière commerciale où certains disposions peuvent s'en trouver affectées ( par exemple Accord de Marrakech d'avril de 1994 : liberté de transit, article V ; élimination des restrictions quantitatives, article XI...)

      * 261 C'est nous qui mettons en italique

      * 262 Voir paragraphe 1 (c) de la Résolution.

      * 263 L'idée selon laquelle le terrorisme constitue une menace à la paix et la sécurité internationale a été diversement reçue, accueillie, appréciée au sein de la doctrine. Nous y reviendrons dans les développements ultérieurs.

      * 264 Le G7 et l'Union européenne utilisent cette méthode ( voir par exemple Déclaration des ministres des Affaires étrangères des Douze, Bruxelles, 27 janvier 1986, qui prévoit de ne pas exporter d'armes « vers des pays qui sont clairement impliqués dans le soutien au terrorisme ».

      * 265 Voir Alain PELLET ; Patrick DAILLIER, op.cit, p. 948 et s.

      * 266 Cf. définition de « contre-mesures » donnée par la CDI et rapportée par PELLET et Patrick DAILLIER, ibid., p. 956

      * 267 L'article 22 du texte sur la responsabilité élaborée par la CDI et adoptée par l'AGNU codifie donc le droit international en retenant les contre-mesures

      * 268 Cf. articles 49 et 53 du texte de la CDI précité

      * 269 Cf. Sentence arbitrale du 9 décembre 1978 dans l'Affaire concernant l'Accord relatif aux services aériens du 27 mars 1946 entre les USA d'Amérique et la France, RSA, vol. XVIII, p. 483, paragraphe 81.

      270 Cf. Tribunal arbitral germano-portugais, sentence arbitrale du 31 juillet 1928, RSA, vol. II, p. 1026

      271 Ce ne serait là qu'une application conforme au droit international qui ne reconnaît pas de manière générale l'actio popularis. (CIJ, Aff. Sud-Ouest africain, arrêt du 18 juillet 1996, Rec. CIJ, 1996, pp. 6 et 47)

      *

      *

      * 272 Voir Denis AllAND, Justice privée et ordre juridique international, cité par Jean-Christophe MARTIN, op.cit,

      p. 488

      * 273 Voir Jean COMBACAU et Serge SUR, p. 218

      * 274 Arrêt Gabcikovo-Nagymaros, 25 septembre 1997, § 83. Voir également § 249 de l'arrêt de 1986 relatif à l'Affaire des Activités militaires et paramilitaires, Rec. CIJ, 1986, p. 127, article 49, § 1 et 2.

      * 275 Cf. Article 49 al. 3 de l'Arrêt précité « Les contre-mesures doivent, autant que possible, être prises d'une manière qui permette la reprise de l'exécution des obligations en question ».

      * 276 Il est symptomatique de remarquer que la plupart des ouvrages qui abordent le sujet ignorent la distinction entre contre-mesures et mesures de rétorsion. Les auteurs utilisent alternativement le termes rétorsions et contre-mesures mais rarement les deux à la fois. Seul l'ouvrage précité de MM. Alain PELLET et Patrick DAILLIER nous a permis d'opérer la distinction.

      * 277 CPIJ, Affaire du Lotus, 1927, Rec. CPIJ, série A, n° 10.

      * 278 Comme la CPIJ l'a constaté, « (...) le principe de la territorialité du droit pénal est à la base de toutes les législations » : Lotus, 7 septembre 1927, Rec. CPIJ, Série A, arrêt n° 10, p.20

      * 279 A l'exception de la Convention de Tokyo de 1963 dont l'article 3 n'oblige que l'Etat d'immatriculation de l'aéronef à établir sa compétence, et de la Convention de la Haye de 1970 pour la répression de la capture illicite d'aéronefs (article 4) « pour laquelle la question ne se posait guère » : l'objet de cette convention est en effet limité aux aéronefs en vol. Cette convention assimile ainsi, selon une fiction juridique acceptée, l'aéronef en vol au territoire de l'Etat d'immatriculation voire de l'Etat d'exploitation.

      280Cf. article 7 § 2, a.

      *

      * 281 Notons que la décision-cadre du Conseil de l'Union européenne relative à la lutte contre le terrorisme (13 juin 2002) précise en son article que le principe de territorialité couvre l'infraction commise ou préparée ou en partie dans un Etat membre, sans toutefois retenir le critère des effets.

      * 282 La CPIJ avait par ailleurs constaté qu' « (...) il est constant que les tribunaux de beaucoup de pays, même de pays qui donnent à leur législation pénale un caractère strictement territorial, interprètent la loi pénale dans ce sens que les délits dont les auteurs au moment de l'acte délictueux se trouvent dur le territoire d'un autre Etat, doivent néanmoins être considérés comme ayant été commis sur le territoire national si c'est là que s'est produit un des éléments constitutifs du délit et surtout ses effets » : CPIJ, Aff. Lotus, Rec.CPJI, Série A, n° 10, p. 23

      * 283 Le problème de la double incrimination des faits est plus perceptible en matière de procédure d'extradition. Elle en est la règle de base. En effet, « l'exigence d'une qualification pénale par la loi de l'Etat requérant apparaît s'imposer au nom du bon sens » , voir FOURNIER repris par André HUET et Renée KOERING-JOULIN, Droit international pénal, Thémis, PUF, Paris, 2ème éd, 2001, p. 347. Et on imagine mal que l'Etat requis extrade un individu pour un comportement que son système juridique ne pénalise pas.

      * 284 Supra, note de bas de page 29.

      * 285 Il faut souligner que l'actuel code pénal ivoirien n'incrimine pas de façon expresse le terrorisme. Cependant on peut noter que l'incrimination de certains actes graves correspond bien à la qualification d'actes terroristes de la convention antiterroriste de l'OUA. Il s'agit notamment des atteintes à la sûreté de l'Etat, des insurrections armées.

      * 286 C'est notamment le cas d'Oussama BEN LADEN, déchu de sa nationalité saoudienne en 1994 et qui en situation d'apatridie.

      * 287 La Convention de Tokyo de 1963 est encore plus extensive en ce qu'elle prévoit en son article 4 (b) qu'un Etat peut avoir compétence pour connaître d'une infraction commise par ou contre « une personne ayant sa résidence permanente » dans cet Etat.

      * 288 Voir Jean Christophe MARTIN op.cit, p. 138

      289 Voir Brigitte STERN, « A propos de la compétence universelle... », Liber amicorum Mohamed Bedjaoui,

      Kluver Law International, La Haye-Londres-Boston, 1999, p.775, cité par Jean Christophe MARTIN ibidem.

      290 Cinq autres conventions proposent aux Etats d'établir leur compétence réelle : la Convention de Tokyo de 1963 (art. 4, c) si l'infraction « compromet la sécurité dudit Etat » ; les Conventions de New York de 1997 (art. 6 par.2, b) et 2005 (art.9 paragraphe 2, b) quand « l'infraction est commise contre une installation publique dudit Etat située en

      dehors de son territoire, y compris une ambassade ou des locaux diplomatiques ou consulaires dudit Etat » ; la Convention de New York de 1999 (art. 7 par. 2, b), quand « l'infraction avait pour but, ou a eu pour résultat, la commission d'une infraction (... ) contre une installation publique dudit Etat située en dehors de son territoire, y compris ses locaux diplomatiques ou consulaires » ; et la Convention de l'OUA (art. 6 paragraphe e) si « l'acte est commis contre la sécurité de cet Etat partie ».

      *

      *

      * 291 Voir Jean SALMON (dir.pub.), Dictionnaire de droit international public, Bruylant, Bruxelles, 2001, pp. 212-213

      * 292 Comme c'est le cas en matière de piraterie. La piraterie est un crime pour lequel le droit international reconnaît une compétence universelle, autorisant la capture des pirates en haute mer de tous les Etats. Cette règle a été codifiée par la Convention de Genève sur la haute mer de 1958 (articles 14 à 22), ainsi qu'à l'article 105 de la Convention de Monte go Bay sur le droit de la mer (1982), qui autorise les Etats à appréhender et juger les pirates en haute mer ou

      « en tout autre lieu ne relevant de la juridiction d'aucun Etat » (article 105). Il ne s'agissait jusque- là que d'une simple faculté et non d'une obligation comme ce l'est maintenant avec les conventions antiterroristes.

      293 Nonobstant sa consécration récente dans le droit international positif (à partir de 1970), il est bien connu que l'adage a été préconisé par Hugo de Groot dit GROTIUS dans son ouvrage monumental de 1625, De jure belli ac Pacis (Le droit de la guerre et de la paix), Livre II, Chapitre XXI, IV, 1, réed. PUF, Paris, 1999, p.513

      294 Sur le caractère subsidiaire de la compétence universelle en matière de terrorisme, se référer aux explications fournies par le Professeur Paul TAVERNIER, « Compétence universelle et terrorisme » in SFDI, Les nouvelles

      menaces contre la paix et la sécurité internationales, journée franco-allemande, Pedone, Paris, 2004, pp. 237 et s., précisément p. 244. L'auteur note que l'analyse de toutes les conventions qui établissent la compétence universelle montre que celle-ci est subsidiaire à un double point de vue. Tout d'abord la compétence universelle n'entre en jeu que s'il n'y a pas d'extradition, (soit qu'elle n'ait été pas demandée, soit qu'elle ait été refusée). Mais, par ailleurs, elle est subsidiaire par rapport aux titres de compétence traditionnels que l'Etat peut invoquer pour poursuivre les auteurs d'actes de terrorisme

      * 295 Voir l'opinion individuelle du Président Gilbert GUILLAUME dans l'Affaire du Mandat d'arrêt du 11 avril 2000, Rec. CIJ, 2002, p. 38 paragraphe 7. « Un nouveau pas sera franchi (...) à partir de 1970 en vue de lutter contre le terrorisme international. A cette fin, les Etats mirent en effet sur pied un dispositif sur pied inconnu jusqu'alors : celui de la compétence universelle, encore que subsidiaire »

      *

      *

      * 296 Cette obligation y apparaît implicitement à travers l'interdiction faite aux Etats de « tolérer » sur leurs territoires respectifs le terrorisme dans ses différentes manifestations (voir préambule, avant dernier paragraphe).

      297 Nous y reviendrons dans les développements ultérieurs.

      298 La règle de subsidiarité limite le champ d'application des compétences internationales à tout ce qui ne peut trouver de solutions dans l'ordre interne.

      *

      *

      * 299 Ces deux conventions étaient intimement liées dans la mesure où aux termes de son article 53 paragraphe 2, l'entrée en vigueur de la « Convention portant création de la Cour pénale » restait tributaire de la « Convention pour la prévention et la répression du terrorisme ». Cette dernière n'ayant jamais reçu de ratifications et n'étant de ce fait jamais entrée en vigueur, il est évident que la «Convention portant création de la Cour pénale internationale » n'a jamais pu être mise en oeuvre.

      * 300 Voir les développements en supra sur « Le constat d'échec d'une définition générale et tangible du terrorisme ».

      301 Cf. Article Premier

      302 Jean Christophe MARTIN, op.cit, p. 227

      * 303 Comme l'analyse à propos Mario BETTATI, « le texte de la ( Convention portant création ce la Cour pénale internationale) suscita des réserves encore plus vives. De nombreux gouvernements estimèrent que l'institution d'une cour pénale internationale était inutile et irréaliste » ; voir « Les échecs de la SDN », in « La lutte internationale contre le terrorisme », Problèmes politiques et sociaux, n° 259, 30 mai 1975, La documentation française, p.24

      * 304 Cf. Article 3

      *

      *

      * 305 La compétence ratione materiae du TPIR s'étend au génocide (article 2 du Statut), aux crimes contre l'humanité (article 3 du statut), et à la violation de l'article 3 commun aux conventions de Genève (article 4 du Statut).

      * 306 L'article 4 du Statut du TPIR mentionne expressis verbis : « Le tribunal international pour le Rwanda est habilité à poursuivre les personnes qui commettent ou donnent l'ordre de commettre des violations graves de l'article 3 commun aux Conventions de Genève du 12 août 1949 pour la protection des victimes en temps de guerres, et du Protocole additionnel II aux dites Conventions du 8 juin 1977. Ces violations comprennent sans s'y limiter : a) les atteintes à la vie, à la santé, et au bien être physique ou mental des personnes, en particulier le meurtre, de même que les traitements cruels tels que la torture, les mutilations ou toutes formes de peines corporelles ; b) les punitions collectives ; c) la prise d'otages (italique ajouté) ; d) les actes de terrorisme (italique ajouté) ; e) les atteintes à la dignité de la personne notamment les traitements humiliants et dégradants (...) ».

      * 307 L'article 3 commun aux Conventions de Genève mentionne expressis verbis : « En cas de conflit armé ne présentant pas un caractère international et surgissant sur le territoire de l'une des Hautes Parties contractantes, chacune des Paries au conflit sera tenue d'appliquer au moins les dispositions suivantes : 1- les personnes qui ne participent pas directement aux hostilités, y compris les membres des forces armées qui ont déposé les armes et les personnes qui ont été mises hors de combat par maladie, blessure, détention, ou pour toute autre cause, seront en toutes circonstances traitées avec humanité, sans aucune distinction de caractère défavorable basée sur la race la couleur, la religion ou la croyance, le sexe, la naissance ou la fortune, ou tout autre critère analogue. A cet effet, sont et demeurent prohibés en tout temps et en tout lieu, à l'égard des personnes mentionnées ci-dessus :

      -a) les atteintes à la vie et à l'intégrité corporelle, notamment le meurtre sous toutes ses formes, les mutilations, les traitements cruels, les tortures ou supplices ; b) les pises d'otages (italique ajouté) ; c) les atteintes à la dignité des personnes, notamment les traitements humiliants et dégradants (...) ».

      308 Voir en supra

      309 On pourrait se demander ce que le Statut du TPIR entend par « actes de terrorisme » ou du moins quels sont les actes qu'il qualifie comme tels puisqu' a priori, ainsi qu'on l'a démontré, la prise d'otages est exclue de la catégorie de ces actes.

      * 310 Voir Cécile TOURNAYE, « L'apport des tribunaux ad-hoc  à la répression du terrorisme », in SOS, ATTENTATS, Terrorisme, victimes et responsabilité pénale internationale, Calman-Lévy, Paris, 2003, p. 417

      311 La compétence ratione materiae du TPIY s'étend aux infractions graves de Genève de 1949 (article 2 du statut), à la violation des lois et coutumes de la guerre (article 3), au génocide (article 4), aux crimes contre l'humanité (article 5).

      312 L'auteur précité rapporte dans plusieurs affaires la prise en compte de la terreur en tant qu'élément déterminant dans la définition du crime contre l'humanité. Ainsi dans l'Affaire Krstic notamment, la terreur infligée à la population civile a permis d'établir le caractère forcé du transfert de cette population hors Srebrenica. La terreur a aussi été prise en compte dans l'appréciation des traitements cruels et inhumains reprochés à l'accusé dans le cadre du chef d'accusation de persécutions. Enfin le jugement de première instance dans l'Affaire Blaskic a tenu compte de la terreur au stade de la peine, en tant que circonstance aggravante. Le jugement cite ainsi, parmi les circonstances aggravantes, « le recours à des moyens et méthodes de combat aléatoires, disproportionnées et terrorisantes, tels l'usage des bébés bombes, des lance-flammes, grenades ou d'un camion bourré d'explosifs, mais également les souffrances physiques et psychologiques évidentes endurées par les survivants de ces évènements brutaux. ». Ibid. pp. 417 et s.

      * 313 Le délit d'appartenance à une organisation criminelle était prévu dans le Statut du Tribunal militaire international de Nuremberg, en 1945, mais il n'avait alors été utilisé qu'avec parcimonie. On lit expressis verbis à l'article 9 du Statut : « Lors d'un procès intenté contre tout membre d'un groupement ou d'une organisation quelconques, le Tribunal pourra déclarer (à l'occasion de tout acte dont cet individu pourrait être reconnu coupable) que le groupement, ou l'organisation criminelle à laquelle il appartenait était une organisation criminelle ».

      314 Les attentas du 11 septembre feront l'objet de développements plus approfondis dans la deuxième partie de notre travail.

      * 315 Pour James Mouangue KOBILA, l'approche historique paraît d'autant plus intéressante qu'elle a rarement été privilégiée dans certains travaux antérieurs. L'auteur tout en les enjambant, révèle avec finesse, dextérité et perspicacité les deux lignes de césure doctrinales auxquelles l'on recourt traditionnellement pour aborder la question du traitement du terrorisme : il s'agit notamment de l'avant /après 1992 (date de l'attentat de Lockerbie) ou de l'avant/ après 11 septembre 2001 ( date des attentats contre les Twin Towers du World Trade Center ). Son analyse qui n'est pas moins intéressante, se situe cependant de « part et d'autre » de ces deux lignes de césure, ou plus exactement « au-dedans et au dehors » de ces lignes comme dirait DIDEROT, admirablement cité par l'historienne et romancière Assia DJEBAR, dans son « Discours de réception » à l'Académie française le 22 juin 2006. Voir James Mouangue KOBILA, « Le processus d'intervention du Conseil de sécurité dans la lutte conte le terrorisme international », in Recueil des travaux du Centre d'études de l'Académie de droit international de la Haye, 2007, p. 3.

      En ce qui concerne la présente étude, sans s'y perdre, elle fera une incursion dans le labyrinthe de la deuxième ligne de césure- l'avant/ après 11 septembre 2001-

      * 316 Voir respectivement les Résolutions 313 (1972) du 28 février 1972 ; 508 (1982) et 509 (1982) des 5 et 6 juin

      1982 ; 573(1985) du 4 octobre 1985.

      317 Voir entre autres les Résolutions 527 (1982) du 15 décembre 1982 et 546(1984) du 6 janvier 1984.

      *

      * 318 Voir Résolution 41/38 du 20 novembre 1986.

      * 319 Voir les positions des Etats clairement reprises sur le site Internet du Centre de droit international de

      l'Université libre de Bruxelles (http://www.ulb.ac.be/droit/cdi)

      * 320 Sur ce point, voir entre autres Pierre KLEIN, « Vers la reconnaissance progressive d'un droit à des représailles

      armées ? », in Karine BANNELIER et al.(dir. pub), op.cit., pp 249-257.

      * 321 Voir notamment sur ce précédent, Olivier CORTEN et François DUBUISSON, « Opération liberté immuable : une extension abusive du concept de légitime défense », RGDIP, 2002, p. 57.

      * 322 Lettre du 21 août 1998 adressée au président du Conseil de sécurité, S/1998/789, reproduite à l'adresse

      suivante : http://www. ulb.ac.be/droit/

      * 323 Voir notamment, à propos de l'action menée contre l'Irak en 1993, les positions de la France (S/PV. 3245, p.

      13) ; du Japon (ibid., p. 16) ; du Brésil (ibid., p. 18), de l'Espagne (ibid., p. 24)

      * 324 Pour le sommaire de cette affaire, voir David RUZIE, Droit international public, Dalloz, Mémento, 18ème éd.,

      Paris, 2006, pp. 216-217

      * 325 L'article 38 du statut de la CIJ évoquant les différentes sources du droit international dont la coutume, définit

      celle-ci comme « preuve d'une pratique générale, acceptée comme étant de droit ». Reflétant ainsi la pratique

      de l'ensemble des Etats de la société internationale, elle fait partie du droit international général en tant que

      l'une de ses sources principales à côté du traité.

      * 326 Cf. l'énoncé de l'article 3 alinéa g, de ladite résolution.

      * 327 La Résolution 1368 (2001) utilise l'expression « droit inhérent », traduction de la langue anglaise de l'article 51

      de la Charte. La Résolution 1373 emploie plutôt l'expression plus compréhensible en français de « droit  naturel ».

      * 328 Voir J. GREENSTOCK, combating international terrorism : The contribution of the United Nations,

      contribution au symposium tenu à Venise les 3-4 juin 2002, site internat des Nations Unies :

      http://www.un.org/french/docs/committees/1373.

      * 329 Déclaration sur les actions contre les Taliban. Voir aussi la déclaration de Gand du 19 octobre 2001 sur La lutte

      contre le terrorisme, DAI, n° 23, 1er déc. 2001, p.920.

      * 330 Bien entendu, cet article est relatif à une clause de solidarité qui veut que les autres Etats du traité de l'OTAN

      interviennent même militairement pour venir à bout d'une attaque dont l'un des Membres de cette

      organisation serait la victime.

      * 331 Voir Déclaration : la réponse de l'OTAN au terrorisme, DAI, n° 3, 1er février 2002, pp. 118-119. Cette

      déclaration fait par ailleurs état du soutien de nombreux autres Etats.

      * 332 Citons la Georgie , Oman, le Pakistan, les Philippines, le Qatar, l'Arabie Saoudite, le Tadjikistan , la Turquie et

      l'Ouzbékistan.

      * 333 Resolution Strengthening Hemispheric Cooperation to Prevent, Combat, and eliminate Terrorism et Terrorist

      Threat to the America, 21 septembre 2001, ILM, 2001, vol. XL, pp. 1270 et 1273

      * 334 Voir Procès verbaux des réunions de l'AGNU, A/56/ PV.44 et s. Les seuls Etats ayant condamné ou critiqué

      l'action militaire en Afghanistan sont : l'Irak, l'Iran, la Corée du Nord, Cuba, et la Malaisie. Voir Luigi

      CONDORELLI, « Les attentats du 11 septembre et leurs suites : où va le droit international ? », op.cit, p. 840,

      note 7.

      * 335 Voir les résolutions 1368 (2001) et 1373 (2001) précitées.

      336 Voir supra, pp. 52 et s.

      337 Certains auteurs soutiennent qu'il ne serait pas réaliste de rechercher dans les attaques du 11 septembre une

      arme par nature, mais il faudrait plutôt considérer les avions qui ont explosé comme une arme létale par destination. Voir Pierre-Marie DUPUY, « La communauté internationale et le terrorisme », in SFDI, Les nouvelles menaces contre la paix et la sécurité internationales, Paris, Pedone, 2004, p. 65

      338 Il faut souligner au passage que dans son récent avis (en date du 9 juillet 2004) relatif aux Conséquences juridiques de l'édification d'un mur dans le territoire palestinien occupé, la CIJ a récusé le recours à la notion de légitime défense et donc aussi à la notion d'agression contre les actes d'un groupe non étatique : « L'article 51 de la Charte reconnaît ainsi l'existence d'un droit naturel de légitime défense en cas d'agression armée par un Etat contre un autre Etat. Toutefois, Israël ne prétend pas que les violences dont il est victime soient imputables à un Etat étranger ». (paragraphe 139).

      * 339 Il s'agit notamment de l'Arabie Saoudite, des Emirats arabes unis et du Pakistan.

      * 340 Voir par exemple la Résolution 1267 (1999).

      * 341 Voir entre autres auteurs, Josiane TERCINET « Le Conseil de sécurité et le terrorisme », in Stanislav KIRSCHBAUM (dir. pub.), Terrorisme et sécurité internationale, Association Franco-canadienne d'études stratégiques, Bruylant, Bruxelles, 2004 pp. 49 et s. Voir également Pierre- Marie DUPUY, « La communauté

      internationale et le terrorisme », in SFDI, Les nouvelles menaces contre la paix et la sécurité internationales, Paris, Pedone, 2004, pp. 37 et s. ; et Brigitte STERN, « Le contexte juridique de l'après 11 septembre 2001 »,

      in Karine BANNELIER et al.(dir. pub.), op.cit., pp. 17 et s. ; Voir enfin James Mouangue KOBILA, « Le processus d'intervention du Conseil de sécurité dans la lutte contre le terrorisme international », in Recueil des

      travaux du centre d'études de l'Académie du droit international de la Haye », 2007.

      * 342 Voir Pierre Michel EISEMANN, « Attaques du 11 septembre et exercice d'un droit naturel de légitime défense », in Karine BANNELIER, Théodore CHRISTAKIS, Olivier CORTEN, Barbara DELCOURT (dir.pub.), Le droit international face au terrorisme. Après le 11 septembre, Pedone, Paris, 2001, pp. 239 et s, précisément, p. 242. Le Professeur Pierre Michel EISEMANN admet une adaptation mutatis mutandis de la légitime défense dans le contexte des évènements du 11 septembre. Par là, l'on peut bien voir que son analyse s'accommode mal d'une certaine ambiguïté. En effet, on ne peut évoquer- en ce qui concerne les attentats du 11 septembre - un « cas classique » de légitime défense, et tenter de faire comprendre dans le même temps le fait que ces attaques aient ouvert la voie à une adaptation mutatis mutandis de la légitime défense. Des deux choses l'une et non les deux à la fois. On comprend d'ailleurs difficilement que cette conviction qui souffre d'un manque de cohérence, soit partagée par un autre auteur. Pour une opinion convergente, voir Jean-Marc THOUVENIN, « Conclusions générales » in SFDI, Les nouvelles menaces contre la paix et la sécurité internationales, op.cit. pp. 11 et 12. Cet auteur, citant, l'avis de la CIJ sur la licéité de la menace et l'emploi de l'arme nucléaire du 8 juillet 1996, (« la Cour ne saurait au demeurant perdre de vue le droit fondamental qu'à tout Etat à la survie, et donc le droit qu'il a de recourir à la légitime défense, conformément à l'article 51 de la Charte, lorsque cette survie est en cause », CIJ, Avis cons. du 8 juillet, 1996, §. 96), avoue peiner à croire qu'un Etat agressé par une organisation privée, ne puisse pas intervenir, alors que son droit « naturel » à la légitime défense que lui commande sa survie, l'y prédispose. Pour lui donc, il n'est pas interdit de penser qu'une entreprise terroriste puisse porter atteinte à la survie d'un Etat par une agression armée, en particulier si elle mettait en oeuvre des moyens de destruction massive. A suivre mécaniquement sa logique, ne courrait-on pas le risque de s'écarter du droit en versant dans du sentimentalisme ?

      343 Le rapport du pouvoir de facto au pouvoir de jure renvoie au rapport de l'effectivité à la légalité et par ricochet de la légitimité à la légalité. Il s'agit d'une question qui semble à première vue inextricable en droit. Dans la présente espèce, c'est bien le pouvoir légal- quoiqu'en exil- qui semble avoir été reconnu par la

      communauté internationale, ( nouveau sujet de droit international ?).

      * 344 On savait seulement jusque-là que Ben LADEN et son organisation Al-Qaida étaient simplement les hôtes des Taliban. Bien plus, la composition hétéroclite de l'organisation Al-Qaida au sein de laquelle collaborent des personnes

      de diverses nationalités en dit long sur le caractère international de la nébuleuse terroriste, dont les

      revendications excèdent celles d'une simple organisation terroriste de type séparatiste comme l'ETA basque ou de type nationaliste comme le FNL algérien. Al Qaida projette de vaincre par tous les moyens les Etats-Unis d'Amérique qu'elle considère comme le « grand Satan » pour faire éclore un « nouvel ordre mondial » plus

      juste.

      345 Sur ce point précis de la question, se référer aux analyses de MM. François DUBUISSON et de Olivier CORTEN, « Lutte contre le terrorisme et droit de la paix : une conciliation délicate », in Emmanuelle BRIBOSIA et Anne WEYEMBERGH (dir. Pub.), Lutte contre le terrorisme et droits fondamentaux, éd. Bruylant, Bruxelles, 2002, pp 59 et s. Ces auteurs notent que la Résolution 1368 adoptée au lendemain des évènements, soit le 12 septembre 2001 traduit en tout cas la volonté des Nations Unies à se saisir du dossier, à traiter elles-mêmes le problème. Cette conviction est davantage renforcée par l'adoption ultérieure de d'autres résolutions (1373 (28 septembre 2001) ; 1377 (12 novembre 2001); 1386 (6 décembre 2001).

      * 346 Voir Pierre Marie DUPUY « La communauté internationale et le terrorisme », in SFDI, Les nouvelles menaces contre la paix et la sécurité internationales, Paris, Pedone, 2004, pp. 37 et s.

      * 347 Voir infra, Section 2 : « La violation des normes internationales ».

      348 Voir, Pierre- Marie DUPUY, ibid. p. 61 : « Qui répondra sans hésiter à cette interrogation ? » « Qui sait comment réagir à bon escient contre un acte terroriste ? »

      349 Ibid., p. 60.

      * 350 Madame Evelyne LAGRANGE et Monsieur Pierre Michel EISEMANN relèvent en ce sens « la propension du Conseil de sécurité à l'excès de pouvoir ». Voir Evelyne LAGRANGE et Pierre Michel EISEMANN, « Article 41 », in Jean Pierre COT et al., La Charte des Nations Unies : commentaire article par article, 3ème éd., Tome 1, Économisa, 2005, p. 1225.

      351 Nous y reviendrons dans la conclusion de notre exposé.

      352 Voir Rés. CS 1535, Doc. Off. CS. NU, 2004, 49 36ème séance, Doc. NU S/RES/ 1535 au 2ème considérant du préambule.

      353 Voir Yves JEANCLOS, « Terrorisme et sécurité internationale », in Stanislav J. KIRSCBAUM (dir. pub.), Terrorisme et sécurité internationale, Bruxelles, Bruylant, 2004, pp. 13-45.

      354 Voir James MOUANGUE KOBILA, op.cit. p. 3

      * 355 Voir à ce sujet Jean-Pierre QUENEUDEC, « Conclusion », in SFDI, Les nouvelles menaces contre la paix et la sécurité internationales, op.cit., p. 288. Pour cet auteur, dire qu'il existe une menace contre la paix et la sécurité internationales a longtemps signifié avant tout qu'il y avait un risque de déclenchement d'un conflit armé entre deux ou plusieurs Etats, - pour autant, bien entendu, que la paix puisse se définir comme étant essentiellement l'absence d'état de guerre entre Etats. Evoquer une menace contre la sécurité internationale, c'est faire référence, semble -t-il, à une situation présentant un risque d'atteinte soit à l'inviolabilité ou à l'intégrité territoriale, soit à l'indépendance politique d'un ou plusieurs Etats... ce qui peut aussi apparaître comme une menace pour la paix. La sécurité internationale peut être définie comme un état de tranquillité, du moins comme une situation de stabilité existant au

      sein d'un groupe d'Etats et résultant de l'absence de véritables menaces contre la paix. L'auteur note donc que la conception de la menace contre la paix et la sécurité internationales a subi un élargissement depuis 1945

      356 Voir Pierre KLEIN, « Le Conseil de sécurité et la lutte contre le terrorisme : dans l'exercice de pouvoirs toujours plus grands ? », in Revue québécoise de droit international, Hors série , Québec 2007

      Voir sur ce point, Jean-Marc SOREL, « L'élargissement de la notion de menace contre la paix », in SFDI, Le Chapitre VII de la Charte des Nations, Paris, Pedone 1995, p. 52 cité par Pierre Klein

      * 357 Voir Rés. CS 1054, 10ème considérant du préambule

      * 358 Voir Rés. CS 1267, 8ème considérant du préambule

      * 359 Cf. Rés. CS 1368, Doc.off.CS NU, 2001, 4370ème séance, Doc NU S/RES/ 1368, art. 1er. ( Italiques ajoutés).

      360 Cf. Rés. CS 1465, Doc. Off. CS. NU, 2003, 4706ème séance, Doc. NU S/RES/1465, art . 1er (Italiques

      * 361 Mais, on peut se demander à bon droit, à partir de quel stade le terrorisme s'internationalise, les résolutions, toutes les résolutions gardant un mutisme froid sur cet autre aspect du problème. Par les victimes ? Par les auteurs ? Par ses répercussions inadmissibles au plan humain ou humanitaire ?

      * 362 Cf. Rés. CS. 1535, 2ème considérant du préambule ; voir aussi Rés. CS 1566, Doc. Off. CS. NU, 2004, 5053ème séance, Doc. NU S/RES/1566 au 7ème considérant du préambule.

      * 363 Voir James MOUANGUE KOBILA, op.cit. p. 7

      364 Voir Pierre KLEIN, ibid. p. 141

      365 Voir Pierre KLEIN, loc.cit. p. 141

      * 366 Sur ce point précis, MM. Alain PELLET et Vladimir TZANKOV sont d'avis que « même lorsqu'il s'agit de terrorisme international, on pouvait fortement douter qu'il constituât toujours (...) » une menace à la paix et à la sécurité internationales. Voir Alain PELLET et Vladimir TZANKOV, « L'Etat victime d'un acte terroriste peut-il recourir à la force armée ? », in SFDI, Les nouvelles menaces contre la paix et la sécurité internationales Paris, Pedone, 2004, pp.95-107. Dès lors, on peut tout aussi raisonnablement s'imaginer combien de fois des actes de terrorisme de dimension interne, isolés et localisés peuvent s'éloigner de pareille qualification. Pour illustration, l'attentat qui a conduit à la mort récente de l'ex-premier ministre pakistanaise Benhazir BUTHO peut-il être considéré comme une menace à la paix et à la sécurité internationales ?

      * 367 Il s'agit en l'occurrence de la Résolution CS 748, Doc. Off. CS. NU, 1992, 3063ème séance, Doc. NU S/RES/748

      368 L'article 103 mentionne expressis verbis : « en cas de conflit entre les obligations des Membres des Nations Unies en vertu de la présente Charte et leurs obligations en vertu de tout autre accord international, les premières prévaudront. »

      369 Situation contre laquelle Mme Josiane TERCINET a vite fait de s'insurger : « Le Conseil de sécurité n'est pas un juge. Son rôle n'est pas de dire le droit ; il est de maintenir la paix et la sécurité internationales (...) », Josiane TERCINET « Le Conseil de sécurité et le terrorisme », in Stanislav KIRSCHBAUM (dir. pub.), Terrorisme et sécurité internationale, Association Franco-canadienne d'études stratégiques, Bruylant, Bruxelles, 2004, p. 50

      * 370 Voir en supra, pp.36 et s.

      * 371 C'est précisément le cas de la Convention de 1999 sur la répression du financement du terrorisme qui n'avait jusque-là pu produire d'effet juridique, puisque cette dernière n'est pas encore entrée en vigueur en raison d'un nombre particulièrement réduit de ratifications.

      372 Voir sur ce point Josiane TERCINET, loc.cit.p.50 : Pour cet auteur, la Résolution 1373 du 28 septembre 2001 apparaît comme une assertion de pouvoir normatif ou législatif sans précédent du Conseil de sécurité. Elle poserait en effet des règles générales de lutte contre le terrorisme international, qui s'imposent en vertu de l'article 25 : (« Les Membres de l'Organisation conviennent d'accepter et d'appliquer les décisions du Conseil de sécurité conformément à la présente Charte ») à tous les Etats membres de l'ONU, et qui l'emportent en vertu de l'article 103 susmentionné sur toutes obligations bilatérales ou multilatérales relatives au terrorisme qui pourraient être en contradiction avec elles.

      373 Madame Brigitte STERN croit pouvoir trouver les causes de la naissance de ce pouvoir législatif dans le fait que l'ONU qui a vu ces dernières années ses pouvoirs de coercition militaire se réduire comme peau de chagrin, du fait de la volonté unilatérale hégémonique des Etats-Unis de faire « cavalier seul » dans la campagne antiterroriste- pour parler comme René PASSET et Jean LIBERMANN-, et du fait du recours intempestif au veto, a voulu compenser cette faiblesse en s'assignant d'autres rôles. Voir Brigitte STERN, « Le contexte juridique de l' après 11 septembre 2001 », in Karine BANNELIER et al. (dir. pub. ) , op.cit., p. 29.

      * 374 Pour un son de cloche discordant ou dissonnant, voir Olivier CORTEN, « La participation du Conseil de sécurité à l'élaboration, à la cristallisation ou à la consolidation de règles coutumières », in RBDI, 2004, notes 44, p. 562. L'auteur y opine que « les résolutions à vocation généraliste édictées par le Conseil dans le cadre de la lutte contre le terrorisme (les résolutions 1373(2001) et 1540(2004) se présentent comme des décisions de type réglementaire, et non comme l'expression de règles générales », dans la mesure où « ces résolutions s'appuient sur un droit international général (...) incidemment rappelé dans les considérants ». Pour James MOUANGUE KOBILA, le Conseil serait plutôt matériellement resté dans les frontières du « pouvoir législatif limité » aux circonstances de crise que lui reconnaît Hans KELSEN, en le redimensionnant toutefois au caractère également permanent de la crise. Voir James MOUANGUE KOBILA, op.cit., p.21.

      375 Pour aller plus loin sur le Comité de lutte contre le terrorisme, voir James MOUANGUE KOBILA, « La gestion de la lutte contre le terrorisme par le Conseil de sécurité », in Annuaire français de Relations internationales, 2007.

      * 376 Le juge Mohamed BEDJAOUI qualifie ce contrôle de la CIJ de « zéphyrien », à l'image de ce vent doux et léger qu'est le zéphyr, comme pour traduire l'idée d'un contrôle à la fois modeste et modéré exercé à l'occasion par exemple de l'Affaire Certaines dépenses des Nations Unies, 20 juillet 1962. Voir Mohamed BEDJAOUI, « Du contrôle de légalité des actes du Conseil de sécurité », in International Law at a time of perplexity, Essays in Honour of Shabtai ROSENNE, Editor, Professor Yoram DISTEIN, Associate Editor, Dr Mala TABORY, published by Martinus Nijohff publishers, P.0 BOX 163, 3300 AD Dordrecht, The Netherlands, pp. 89-90.

      G. CAHIN va jusqu'à qualifier ce contrôle de « contrôle d'une intensité proche de zéro ». Voir, G. CAHIN, « La notion de pouvoir discrétionnaire appliquée aux organisations internationales », RGDIP, 2003, p. 597, cité par Pierre D'Argent et al., « Article 39 », in Jean Pierre COT et al., op.cit., pp. 1131-1170 (note) et 1143-1144

      377 Alors que par exemple dans sa Résolution 579 ( 1985), le Conseil demande instamment aux Etats « la mise au point et (...) l'adoption de mesures efficaces, conformes aux règles du droit international, destinées à faciliter la prévention et la répression des actes de prise d'otages et des enlèvements de toutes sortes » ( Italiques ajoutés)., la Résolution 1269 ( 1999) relatives à diverses mesures générales de lutte contre le terrorisme inclut quant à elle la compatibilité des actes du Conseil, cette fois-ci, non plus avec le droit international, mais avec le droit de la Charte. On voit dès lors - pour paraphraser un auteur- poindre la zone grise de chevauchement du droit international et du droit de la Charte. Voir James MOUANGUE KOBILA, op.cit., p. 23. Tout ceci est d'ailleurs stigmatisé par Evelyne LAGRANGE et Pierre Michel EISEMANN, qui parlent de « l'application parfois brouillonne » de la Charte par le Conseil, dans nombre de ces résolutions. Voir Evelyne LAGRANGE et Pierre Michel EISEMANN, ibid., note 50, p. 1205.

      * 378 Pour aller plus loin, voir James MOUANGUE KOBILA, op., pp. 22 et s, précisément p. 22. Cet auteur évoque à ce sujet une  inconstance de la prise en compte du droit international par le Conseil de sécurité dans la lutte contre le terrorisme.

      * 379 Voir à ce propos René PASSET et Jean LIBERMAN, Mondialisation financière et terrorisme : la donne a-t-elle changé depuis le 11 septembre, op.cit., pp.85 et s.

      380 E. De VATTEL, Le droit des gens ou principes de la loi naturelle appliquée à la conduite et aux affaires des nations et des souverains, 1758, Londres, Livre II, Chapitre IV, p. 50

      * 381 Cf. Arrêt, Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua précité.

      * 382 Cf. Arrêt du 6 novembre 2003 relatif à l'Affaire des Plates-formes pétrolières opposant les Etats-Unis à l'Iran, Rec.CIJ, 2003, p. 189, paragraphe 57, p. 191, paragraphe 64, p. 195, paragraphe 72 ; également Avis consultatif du 9 juillet 2004 sur Les Conséquences juridiques de l'édification d'un mur dans le territoire palestinien occupé, Rec. CIJ, 2004, p. 194, p. 194, paragraphe 139. La lecture que fait la Cour de l'article 51, ici, est étroite.

      383 Voir Jean COMBACAU et Serge SUR, Droit international public, op. cit, 6ème édition, p. 626.

      384 Ibid. p. 628

      * 385 Voir Antonio CASSESE, « Article 51 », in Jean-Pierre COT, Alain PELLET et Mathias FORTEAU (dir. pub) , La Charte des Nations Unies : Commentaire article par article, 3ème édition, Economica, Paris, 2005, p. 1335.

      386 Ibid. p. 1336. Monsieur Antonio CASSESE y recense les auteurs favorables et opposés à cet argument. L. CASEY et D. RIVKIN estiment pour leur part que la pratique des Etats depuis 1946 confirme la survivance de la légitime défense préventive à la Charte de San Francisco. (Voir notamment dans Anticipatory Self Defense against terrorism is legal , Washington legal Foundation, 14 décembre 2001)

      * 387 Rec. CIJ, 1950, p. 229

      * 388 Ibid. p. 137, § 274.

      * 389 Cf. discours de l'ex-Secrétaire général des Nations Unies Koffi ANNAN devant l'AGNU, le 23 septembre 2003, communiqué de presse SG/SM/8891.

      * 390 Le principe de l'effet utile (exprimé par la maxime Ut res magis valeat quam pereat), relatif à l'interprétation des traités, stipule que l'interprète doit toujours choisir le sens qui permet une application effective de la règle en question. 391 La Commission de codification considère que cette règle est inhérente au principe de bonne foi.

      Voir affaire Détroit du Corfou, (aff. Royaume-Uni c/ Albanie, CIJ, Rec. 1949, ) : « Il serait en effet contraire aux règles d'interprétation généralement reconnues de considérer q'une disposition (...) insérée dans un compromis soit une disposition sans portée et sans effet » (p. 24).

      *

      * 392 Pour M. Antonio CASSESE l'éventualité d'une adaptation de l'article 51 de la Charte pour autoriser la légitime défense face à un danger imminent, pourrait être subordonnée à de strictes conditions dont l'existence de preuves crédibles de la menace d'une attaque imminente, inévitable et massive : « Article 51 », La Charte des Nations Unies: Commentaire article par article, 3ème édition op.cit., pp.1342 et s.

      393 Voir C.GREENWOOD, « International Law and the preemptive use of force: Afghanistan, Al-Qaida and Irak » in San Diego International Law Journal, 2003, pp. 8-36

      394 Voir Robert KOLB, «Quelques réflexions sur le droit relatif au maintien de la paix au début du XXIème siècle », in AADI, vol. 11-2003, pp. 193-215, cité par James MOUANGUE KOBILA, op.cit., p. 18.

      * 395 La notion de préemption n'est pas inconnue du langage juridique. Dans son sens le plus courant, la notion renvoie à l'action d'acheter avant un autre, ou la priorité d'un acheteur sur les autres en raison d'une qualité qui lui est propre. Selon le Lexique des termes juridiques (Dalloz, 12ème éd., 1999, p. 406), le droit de préemption est le droit reconnu

      dans certains cas à l'Administration, et à certains organismes de droit privé accomplissant une mission de service public, d'acquérir la propriété d'un bien lors de son aliénation par préférence à tout autre acheteur. Le mot vient du

      latin praeemption (praeemptio) et son étymologie repose sur la combinaison de prae (avant) et emptio (achat). Par là,

      on constate une dénaturation, un dévoiement , une instrumentalisation du mot à des fins politico-militaro stratégiques.

      * 396 Voir M.E O'CONNELL, « The myth of preemptive self-defense », août 2002, The Americana society of international law task on terrorism, pp. 12-13 sur www.asil .org/taskforce/oconnell.pdf.

      * 397 Cf. Propos tenus à la tribune de l'AGNU le 23 septembre 2003, A/58/PV.7 et Communiqué de presse SG/SM/8891

      398 Cf. M.E O'CONNEL, « The myth of preemptive self-defense », op.cit. C'est le lieu de rappeler que l'opération menée en Irak en 2003 l'a été, non seulement au mépris du système de la Charte, mais pire encore l'expédition a été ordonnée sous le couvert de l'argutie spécieux de la détention par ce pays d'armes de destruction massive. Or, on s'en est vite rendu compte, les enquêtes qui avaient été diligentées par les experts des Nations Unies avaient révélé à la face du monde, le chantage éhonté dont l'Iraq était victime de la part des Etats-Unis ; cette situation avait d'ailleurs conduit le Secrétaire d'Etat américain d'alors, M. Collin POWELL à la démission.

      * 399 Le Professeur Djiena WEMBOU opine à ce propos que les prétendues justifications à cette belle construction théorique relèvent purement et simplement de la spéculation. Elle est de ce fait inapplicable car ses auteurs sont incapables d'indiquer les méthodes par lesquelles l'on pourrait évaluer avec précision et objectivité  la menace d'une agression imminente. Voir dans Le droit international dans un monde en mutation : Essais écrits au fil des ans, L'Harmattan, Collection Logiques juridiques, Paris, 2003, p. 131.

      400 Voir, entre auteurs, René PASSETet Jean LIBERMANN, Mondialisation financière et terrorisme : la donne a-t-elle changé depuis le 11 septembre ? Op.cit. ; voir précisément le Chapitre IV « De l'unilatéralisme à l'ivresse impériale », pp. 93 à 102.

      401 MM. Jean COMBACAU et Serge SUR réfutent la doctrine américaine de la préemption alors qu'ils approuvent dans le même temps la thèse de la légitime défense préventive. Voir loc.cit., p. 628

      402 Nous apprenons par Monsieur Stéphane PAQUIN, qu'une conception politiste assez marginale- l'hégémonisme- tend à faire admettre l'importance de l'émergence d'une puissance dominatrice comme facteur de régulation des relations internationales à un moment donné de la vie internationale. Voir dans Economie politique internationale, éd. Montchrestien, Paris, 2005.

      * 403 Jacot MARTINE, « Le jour où le monde libre est entré dans une nouvelle guerre », in Le Monde, 12 septembre 2001, repris par Marco SASSOLI et Antoine A. BOUVIER, Un droit dans la guerre ? Volume II, op.cit. p-1969.

      * 404 F. MEGRET, « War ? Legal semantics and the move to violence », EJIL, 2002, p. 365, cité par Pierre KLEIN, op. cit. p. 376

      405 Voir spécialement en ce sens la lettre ouverte de soixante personnalités du monde académique américain, « Sixty prominent US Academics say war on terrorism is just », disponible sur http: // www.uspolicy.be/issues /Terrorism/letint.021402htm.

      406 Voir entre autres théoriciens de la « guerre juste » M. WALZER, Just and unjust wars. A moral argument with historical illustrations, New York, 3ème éd. 1980, p. 134 ; voir particulièrement l'approche de H. GROTIUS (In De jure belli ac pacis) : la guerre juste serait celle qui est motivée par des causes justes telles par exemple la défense du territoire, l'immunité des ambassades... La guerre injuste au contraire serait motivée par des causes injustes telles que l'oppression des peuples ou la volonté d'affaiblir la puissance d'une communauté politique voisine ; cités par Félix Sohuily ACKA, op.cit, p. 143.

      * 407 Voir spécialement sur ce point F. MEGRET, cité par Pierre KLIEN, loc cit, p. 376.

      * 408 Voir Notamment Philippe WECKEL, « Terrorisme et droit de la guerre : le droit de la guerre contre le terrorisme », in SFDI, Les nouvelles menaces contre la paix et la sécurité internationales, Paris, Pedone, 2004, p. 177. Pour cet auteur doctrine américaine étend certes la définition de la guerre à la situation qui a prévalu suite aux attaques du 11 septembre 2001, mais cette ouverture ne s'accompagne d'aucune extension du champ d'application du droit international humanitaire. Ainsi, les terroristes sont qualifiés de combattants sans bénéficier pour autant d'un régime de protection accordé par le jus in bello . En invoquant le droit de la guerre, les USA n'entendaient en réalité appliquer aucun des régimes de protection que ce droit comporte, et s'y réfèrent dans un but complètement étranger aux finalités poursuivies par les règles du DIH. Il s'agit bien évidemment d'un « droit de la guerre » fondé sur un contresens, d'abord invoqué pour entreprendre des poursuites sur la base d'un crime, la belligérance irrégulière méconnu du droit international, ensuite pour, paradoxalement écarter les différentes protections apportées aux personnes par le droit international (...). La guerre contre le terrorisme sert en réalité une militarisation de la lutte contre le terrorisme

      * 409 Voir L.N SADAT, « Terrorism and the rule of law », Washington University global studies law review, 2004, p. 151, cité par Pierre KLEIN, ibidem.

      * 410 Voir à ce propos P-M DUPUY « The law after the destruction of the towers », Forum EJIL, op. cit p. 1

      disponible sur ( http:// www.ejil.org/forum_WTC / ) . Voir également Philippe WECKEL, « Terrorisme et droit de la guerre : le droit de la guerre contre le terrorisme », in SFDI, Les nouvelles menaces contre la paix et la sécurité internationales, Paris, Pedone, 2004, pp. 176 et s. Cet auteur conclut à la non pertinence du droit de la « guerre contre le terrorisme » en droit international.

      411 Cette préoccupation a été exprimée de manière explicite par la Résolution 48/122 du 20 décembre 1993, intitulée « Droits de l'homme et terrorisme ». Cette dernière condamne ainsi « catégoriquement tous les actes, méthodes et pratiques terroristes, sous quelque forme que ce soit et dans toutes leurs manifestations, où qu'ils se produisent et quels qu'en soient les auteurs, en tant qu'activités qui visent l'anéantissement des droits de l'homme, des libertés fondamentales et de la démocratie, tout en menaçant l'intégrité territoriale et la sécurité des Etats, déstabilisant des gouvernements légitimement constitués, sapant les sociétés civiles pluralistes et ayant des conséquences préjudiciables pour le développement économique et social des Etats » et « invite les Etats, conformément aux normes internationales relatives aux droits de l'homme, à prendre toutes les mesures voulues pour empêcher, combattre et éliminer effectivement le terrorisme ».

      * 412 Pour avoir une idée plus nette sur l'ensemble des codes de ces pays et les commentaires qui sont en faits, voir, SOS, Attentats, Terrorisme, victimes et responsabilité pénale internationale, op.cit., le Chapitre II.

      * 413 Pour aller plus loin sur cette législation liberticide, voir Jean-Claude PAYE, « Lutte antiterroriste, la fin de l'Etat de droit », in Revue trimestrielle des droits de l'homme, n° 57, 15ème année, 1er janvier 2004, Collection Droit et justice, éd. Nemessis, Bruylant, Bruxelles, 2003, pp. 61-75. On note aussi que cette loi ne définit pas clairement les actes terroristes, ce qui débouche forcément sur l'arbitraire, biaisant par là même le procès pénal.

      414 Voir Jean-Claude PAYE, ibid., p. 64

      415 Voir sur Internet le site www. rsf. org / www. Libertés-immuables.net

      * 416 C'est nous qui mettons en italiques

      * 417 Voir par exemple Affaire Lawless c. Irlande (fond), 1er juillet 1961, série A, n° 1, p. 56, § 28. Dans cette affaire, la Cour européenne des droits de l'homme de Strasbourg a jugé que les activités terroristes menées sur le territoire irlandais et en dehors de celui-ci en 1957, avaient créé une situation qui correspondaient bien à une « une situation de crise ou de danger exceptionnel et imminent qui affecte l'ensemble de la population et constitue une menace pour la vie organisée de la communauté composant l'Etat ». Selon la Cour, la situation était telle en Irlande que l'application des lois ordinaires apparaissaient manifestement insuffisante pour assurer le maintien de l'ordre, ce qui justifiait la proclamation, par les autorités irlandaises, d'un état d'exception, assorti de dérogations aux obligations de la Convention. Voir également Affaire Aksoy c.Turquie, 18 décembre 1996, Rec. 1996-VI, n° 26, p. 2281, paragraphe 70. Dans cette autre affaire, les juges de Strasbourg ont considéré que « l'ampleur et les effets particuliers de l'activité terroriste du PKK dans le Sud-est de la Turquie ont indubitablement créé, dans la région concernée, un danger public menaçant la vie de la nation »

      * 418 Les Etats-Unis d'Amérique sont parties au Pacte depuis le 8 juin 1992.

      419 Voir S. Von SCHORLEMER, « Human Rights: substantive and institutional implication of the war against terrorism », EJIL, 2003, p. 280, cité par Pierre KLEIN, op.cit.

      * 420 Cette notion- « Etat d'exception »- est parfaitement opérationnelle pour rendre compte d'évènements historiques tels que la suspension par le pouvoir nazi, de tous les articles garantissant les libertés individuelles, contenus dans la Constitution de Weimar. Elle reste productive pour cerner la situation actuelle. Considérée comme un fait purement politique, la notion d'Etat d'exception n'est pas facile à cerner juridiquement puisqu'elle fait normalement référence à une situation inhabituelle, non couverte par le droit. Elle se trouve cependant, tel que l'exprime Carl SCHMITT dans « une frange ambiguë et incertaine, à l'intersection du juridique et du politique ». La spécificité de l'approche de cet auteur, véritable théoricien engagé de l'Etat Nazi, consiste dans la réintégration, comme ordonnancement du réel, du non droit, de « la violence pure », dans le domaine juridique. Dans le contexte de la lutte contre le terrorisme, cette forme de gouvernement s'inscrit dans la durée, celle d'une guerre de longue haleine contre un ennemi constamment remodelé. Carl SCMITT présente l'Etat d'exception comme une doctrine de souveraineté. Voir Carl SCHMITT, Théologie politique, Gallimard, 1988.

      * 421 Pour aller plus loin, voir Philippe WECKEL, « Le statut incertain des détenus sur la base américaine de Guantanamo, RGDIP, 2002, pp. 357-369.

      * 422 Voir à ce sujet le mémorandum adressé par le Département de la Justice au conseiller juridique du Département de la Défense des USA en date du 28 décembre 2001 disponible sur le site http:// www.gwu.edu./-nsarchiv/NSAEBB/NSAEBB12701.

      * 423 Voir par exemple P.A Thomas, cité par Pierre KLEIN, op.cit

      * 424 Ainsi dans l'Affaire Coalition of Clergy v. BUSH, la cour de district du neuvième circuit a rejeté la demande d'habeas corpus introduite, au bénéfice des détenus de Guantanamo Bay, par une coalition de défense des droits civiques, au motif, entre autres, que cette base militaire était située en dehors du territoire souverain des Etats-Unis. (Décision du 20 janvier 2002, 189 F. 2d (CD Cal. 2002), p. 1049. Pour les juges, il en résultait qu'aucune juridiction américaine n'avait compétence pour se prononcer sur une telle demande.

      425 On note cependant que cette qualification de zone de « non-droit » est contestée par certains auteurs : voir spécialement en ce sens Fleur JOHNS, « Guantanamo Bay and the annihilation of the exception, in EJIL, 2005 pp.614 et s, cité par Pierre KLEIN, op.cit.

      426 Voir entre autres les observations finales présentées par le Comité des Nations Unies contre la torture, en date du 19 mai 2006 disponible sur le http:// www.unog.ch/. Cf. Résolution 1433 (2005) de la 14ème assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, Résolution B660112/06 du Parlement européen 2006

      * 427 Voir entre autres les observations de J. PAUST, « Antiterrorism Military Commissions : Postscript concerning the ad hoc DOD rules of procedure », Michigan Journal of IL, 2002, vol 23, pp.5 et 6, cité par Pierre KLEIN, op.cit.

      428 Cf. Doc. CCPR/C/21Rev.1/Add., 13-26 mai 2004, § 10

      429 Cf. ibid.

      * 430 Cf. Avis consultatif du 9 juillet 2004, Rec. CIJ, 2004, § 109-109

      * 431 Cf. Décision du 28 juin 2004, 542 US (2004), pp 15-16. Pour la seconde décision, consulter le site http://www.supremecourts.opinion /17pdf.

      * 432 Pour aller plus loin, voir William BOURDON, « Les détenus français à Guantanamo : un trou noir judiciaire », in SOS, ATTENTATS, Terrorisme, victimes et responsabilité pénale internationale, Calman-Lévy, Paris, 2003, pp. 186 et s.

      433 Voir Pierre KLEIN, op.cit

      * 434 Voir Jean Christophe MARTIN, op.cit., p. 500

      * 435 Pour un rappel des faits plus exhaustif, voir Sandrine SANTO, « L'ONU face au terrorisme », Groupe de recherche et d'information sur la paix et la sécurité (GRIP), Website : www.grip.org

      * 436 Il s'agit là d'une possibilité inédite, puisque c'est la première fois dans la pratique du Conseil de sécurité que celui-ci qualifie de menace à la paix et à la sécurité internationales le soutien d'un Etat au terrorisme.

      * 437 § 4

      438 § 6, b

      * 439 § 5

      * 44 0 § 6, c.

      *

      * 441 § 9

      442 Les Taliban sont des étudiants en religion

      443 Un Emirat est par définition un Etat gouverné par un Emir, c'est-à-dire un gouverneur ou un prince dans le monde musulman.

      444 Rappelons que l'Afghanistan est le premier producteur et exportateur mondial d'opium avec 75% de la production mondiale.

      445 Au rang des contestations, des luttes et des querelles politiques, il convient de souligner le fait que les Taliban qui contrôlait la majeure partie du territoire afghan (soit environ 90%) - aussi paradoxal que cela puisse paraître- ne jouissaient de la reconnaissance que d'une poignée de pays à l'instar des Emirats arabes unis, du Pakistan, de l'Arabie Saoudite). La communauté internationale, reconnaissant l'ancien gouvernement et le roi Zahler CHAH en exil refusait dans son ensemble de reconnaître comme gouvernement cette faction extrémiste, régnant par la terreur et commettant des exactions au nom de leur lecture extrémiste de la Charia.

      *

      *

      *

      *

      * 446 Créée en 1998 par BEN LADEN, le Front islamique international regroupe différents groupes radicaux islamistes.

      447 Voir le site Internet de L'Hebdo, www.webdo.ch

      *

      * 448  Voir § 6 (c) la Résolution 748 (1992) précitée

      * 449 Voir Premier Rapport, S/2004/679, p. 5, § 8

      450 Ce changement de ton a d'ailleurs été mis en évidence par Madame Josiane TERCINET qui a pu parler de « désétatisation » et de « déterritorialisation » des destinataires des résolutions des Nations Unies dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Voir Josiane TERCINET, « Le Conseil de sécurité et le terrorisme », in Stanislav KIRSCBAUM, (dir. Pub.), Terrorisme et sécurité internationale, op.cit. , pp. 59-63

      * 451 Cf. §4, a de la dite résolution

      452 Voir § 9, e de la résolution (Italiques ajoutés)

      * 453 S'agissant des vols d'évacuation sanitaire, le Comité en a approuvé 21 en 1994 et 42 en 1995, 63 vols en 1996 et 70 en 1997, 91 vols en 1998 et 25 en 1999. Cf. Rapport S/1996/2, p. 6, § 23

      * 454 S'agissant des vols aller et retour sur la Mecque, l'Egypte a demandé par note verbale le 18 avril 1995 l'autorisation pour Egypt Air d'assurer 45 vols aller et retour pour transporter 6000 pèlerins libyens. Cf. Rapport précité.

      * 453 Voir Jean Christophe MARTIN, op.cit., 517.

      454 Rappelons que le § 4 de la Résolution 1267 imposait aux Etats de : - refuser aux aéronefs appartenant aux Taliban ou affrétés ou exploités par les Taliban ou pour le compte des Taliban l'autorisation de décoller de leur territoire ou d'y atterrir sauf exception humanitaires (y compris religieuses telles que le pèlerinage à La Mecque. - geler les fonds et autres ressources financières, très notamment de biens appartenant aux Taliban ou contrôlés directement ou indirectement par eux, ou appartenant à ou contrôlés par toute entreprise appartenant aux Taliban ou contrôlés par eux.

      * 455 Plusieurs vols humanitaires (11 précisément) ont ainsi été autorisés, de même qu'un grand nombre de voyages aller-retour sur La Mecque (90 vols précisément). Voir respectivement les Rapports S/2000/1254, ( pp. 5-6) du 29 décembre 2000 et S/2002/101, ( p.5) du 5 février 2002.

      * 456 Cité par Jean-Christophe MARTIN, op.cit., p. 519, note de bas de page n° 286.

      * 457 Voir Rapport des activités du Comité S/1996/2, p. 7 ; S/1996/ 1079 ; pp. 3-4, §§ 10-14 ; S/1997/1030, §§ 8-10 ; S/1998/1038. Les Etats mis en cause sont : la Libye, l'Arabie Saoudite, le Burkina Faso, l'Erythrée, la Gambie, le Ghana, le Mali, le Niger, le Nigeria, l'Ouganda, la RDC, le Soudan, la Tunisie, le Tchad.

      458 Cette déclaration est reproduite dans le document de l'ONU A/53/179

      459 Voir entre autre Moncef DJAZIRI, « La crise de Lockerbie et le processus de réintégration de la Libye dans le système international », in Annuaire de l'Afrique du Nord, 1998, p. 190.

      * 460 Des auteurs présagent, conjecturent l'échec des actions du Conseil de sécurité au regard de sa composition retreinte et inégale. En effet, étant donné que l'organe sécuritaire de par sa mission de maintien de la paix et de la sécurité internationales est investi d'un mandat de représentation de tous les membres de l'Organisation, sa composition restreinte pose problème. Nous savons que cet organe est composé de quinze membres dont cinq permanents qui jouissent du droit de veto et les dix autres élus par l'AG pour un mandat de deux ans. L'inégalité se retrouve en outre dans la procédure de décision puisque les décisions doivent être adoptées par neuf voix comprenant le vote favorable des cinq membres permanents. Alors que la décision d'agir est toujours collective, l'inaction peut être le fruit- outre du fait majoritaire- de la décision unilatérale d'un des cinq membres dotés du droit de veto. Il y aurait dans cette capacité de blocage un déficit démocratique manifeste et anachronique, les cinq membres permanents n'étant véritablement pas représentatifs de la communauté internationale. Ce déficit démocratique est stigmatisé par Bardo FASSBENDER qui parle d'une hiérarchie entre membres. (Voir UN Security Reform and the Right of Veto. A Constitutional Perspective, Kluver Law International, Boston/Londres/La Haye, 1998, p. 8). La possibilité même d'un abus du droit de veto fait peser de lourds soupçons de partialité sur l'organe sécuritaire. Pour le Professeur Pierre- Marie DUPUY, il manque à la communauté internationale « (...) un organe suffisamment objectif et impartial pour défendre l'ordre public international sans discrimination et avec la vigilance suffisante » ( Voir « L'unité de l'ordre juridictionnel », Cours de l'Académie de droit international de la Haye, 2002, p p. 338-339). Bref, la question de la réforme de la composition et de la procédure de décision du Conseil de sécurité étudiée aux Nations Unies depuis 1993 (Cf. Rés. 48/26 du 3 déc. 1993) est à l'ordre du jour dans les instances internationales. Voir en ce sens par O. FLEURENCE, La réforme du Conseil de sécurité. L'état du débat depuis la fin de la guerre froide, Bruylant, Bruxelles, 2000, p. 371 et pp. 90 et s.

      * 461 La chute du régime Taliban a par ailleurs permis l'organisation d'élections en Afghanistan en 2004. Ces élections ont porté au pouvoir l'actuel président Harmid KARZAI.

      * 462 Cf. Rostane MEHDI, cité par Jean Christophe MARTIN, op.cit., p. 524

      463 Voir Rapport du secrétaire général sur les répercussions humanitaires des sanctions contre les Taliban, S/2001/1215, p.2, § 8.

      464 Voir L. MARTINEZ, « Libye : transformations socio-économiques et mutations politiques sous l'embargo », in Annuaire de l'Afrique du Nord, 1998, p. 211

      * 465 Résolution n° 15/29-P, adoptée à la session des 25-27 juin 2002 par la Conférence des ministres des Affaires étrangères de l'OCI.

      * 466 Il ne faut pas perdre de vue le fait que l'Afghanistan était déchirée par plusieurs décennies de guerre. En effet ce pays qui a acquis son indépendance en 1921 vivait jusque-là dans une instabilité chronique, la guerre contre les forces étrangères et les guerres intestines internes rendant impossible la réalisation d'une paix durable.

      * 467 Rapport S/2001/241, p. 3, § 16. Voir les §§ 36-39.

      468 Voir Rapport sur les répercussions humanitaires des sanctions contre les Taliban, S/2001/1215, p. 2 § 5

      469 Voir Tim NIBLOCK, « Irak, Libye, Soudan : efficacité des sanctions? » in politique étrangère, 2000, p. 106

      * 470 Cette obligation-on le sait déjà- découle de la lettre et de l'esprit de l'article 2 § 3 de la Charte des Nations Unies :

      « Les Membres de l'Organisation règlent leurs différends internationaux par des moyens pacifiques (...) »

      471 Voir entre autre, Jean CHARPENTIER, Institutions internationales, Mémentos, Dalloz, 15ème édition, Paris 2002,

      pp. 50 et s.

      * 472 Rappelons simplement que la responsabilité se limite classiquement à une obligation de réparer un dommage. Elle doit être établie autour d'un ensemble d'éléments qui la conditionnent : il s'agit d'abord du dommage, c'est-à-dire l'atteinte à un droit subjectif, ensuite le fait générateur ou l'origine de la responsabilité : Le fait générateur doit présenter deux caractères : il doit être imputable à un Etat, c'est-à-dire être son fait, c'est l'imputabilité et être illicite au regard du droit international, c'est l'illicéité internationale . Voir Jean COMBACAU et Serge SUR, Droit international public, op.cit., p. 515 et s.

      * 473 Voir Alain PELLET et Patrick DAILLIER, Droit international public, op.cit., p. 762

      474 Base d'expérimentation française de charges nucléaires (depuis 1966) en Polynésie à 1200 km de Tahiti.

      * 475 La qualification « terroriste » de ces actes n'était plus à démontrer d'autant plus que les éléments constitutifs de l'infraction étaient bien présents : l'élément matériel réside dans l'acte de sabotage du navire (terrorisme maritime) avec effet d'explosion (attentat à l'explosif). L'élément moral ou psychologique peut être recherché dans la volonté de la France d'intimider les Membres de Greenpeace afin de faire avorter la manifestation contre les essais nucléaires.

      *

      * 476 Voir Communiqué commun de la Nouvelle-Zélande et de la France du 19 juin 1986.

      * 477 S'il est vrai que la médiation de M. Perez De CUELLAR présente à certains points de vue les caractères d'un arbitrage (notamment le consentement des Etats en vertu d'un accord spécial, le compromis d'arbitrage), elle s'en éloigne cependant par le seul fait que l'arbitrage est désormais l'apanage d'un organe collégial et non plus l'apanage d'une seule personnalité comme ce fut le cas autrefois où l'arbitre unique était le Souverain. Voir David RUZIE, Droit international public, Mémentos, Dalloz, 18ème éd. Paris, 2006, pp. 174-175.

      * 478 Rappelons que le droit international envisage la réparation sous diverses modalités : La restitutio in integrum, la réparation par équivalence ou indemnisation, la satisfaction pour les préjudices moraux qui prend la forme d'excuses.

      * 479 Pour aller plus loin sur cette affaire, voir David RUZIE, op.cit., p. 257

      * 480 Cette réparation- faut-il le souligner- dépendait du respect des conditions posées par la Libye : Tripoli s'engage à verser une somme de quatre millions de dollars une fois que les sanctions des Nations Unies à son encontre seront levées. Quatre autres millions de dollars seront versés si les USA lèvent à leur tour leurs propres sanctions. Deux millions enfin seront versés si Washington retire son « Iran-Libya Sanctions Act ». Si les USA ne lèvent pas leurs sanctions dans les huit mois, la Libye ne versera qu'un million de dollars...

      * 481 Cette formule relative à un « droit civil international » semble déplaire à une partie de la doctrine, voir par exemple, Jean-Marc SOREL, « L'épilogue des affaires dites de Lockerbie devant la CIJ » : le temps du soulagement et le temps des regrets, RGDIP, 2003, pp. 933-946. L'auteur y stigmatise ce vocable, et parle à son propos de « flou artistique » et de terme « inadapté ».

      * 482 Italiques ajoutés

      * 483 La Libye a, pour ce faire, envoyé une lettre au Conseil de sécurité ce même jour du 15 août 2003, dans laquelle elle écrit qu'« en tant qu'Etat souverain (...) elle a facilité la traduction en justice des deux suspects accusés de l'explosion de l'appareil PanAm 103 et accepte d'assumer la responsabilité des actes de ses agents ».

      * 484 Voir en infra, pp.85 et s.

      * 485 Cette fondation caritative est dirigée par Seif al-Islam KADHAFI l'un des fils du colonel KADHAFI.

      * 486 Cette réparation- faut-il le souligner- dépendait du respect des conditions posées par la Libye : Tripoli s'engage à verser une somme de quatre millions de dollars une fois que les sanctions des Nations Unies à son encontre seront levées. Quatre autres millions de dollars seront versés si les USA lèvent à leur tour leurs propres sanctions. Deux millions enfin seront versés si Washington retire son « Iran-Libya Sanctions Act ». Si les USA ne lèvent pas leurs sanctions dans les huit mois, la Libye ne versera qu'un million de dollars

      * 487 Le Ministre français des affaires étrangères Dominique De VILLEPIN en a donné la pleine confirmation en précisant dans une déclaration faite le jour même de la signature de l'accord que cet arrangement s'inscrit « directement dans un cadre privé entre la Fondation Kadhafi et les familles françaises » : Voir M. NAIM, « La Libye accepte d'indemniser les victimes du DC-10 UTA », in Le Monde, 10 janvier 2004. La déclaration conjointe de la France et de la Libye du 9 janvier 2004 parle à cet égard d'« accord qui vient d'être conclu à un niveau non gouvernemental ».

      * 488 Plusieurs voix se sont fait entendre et ont plaidé en faveur de la dépolitisation de l'infraction terroriste. Voir entre auteurs Marie Hélène GOZI ( Le terrorisme, op.cit.) et Pierre KLEIN (Le droit international à l'épreuve du terrorisme, op.cit)

      * 489 Voir Résolution 731 (adopté à l'unanimité le 21 janvier 1992) précitée.

      * 490 Le tribunal en question, c'est-à-dire la Cour de Camp Zeist n'est pas une juridiction internationale, mais une juridiction dépaysée parce que siégeant en dehors du territoire dont elle est l'organe. Il s'agit par ailleurs d'un tribunal dont la compétence est limitée à la seule espèce. Elle applique au fond le droit écossais et suit la procédure pénale écossaise.

      * 491 Reproduite in DAI, n° 9, 1er mai 1999, p. 352

      492 Cf. Communiqués de presse SG/SM 6933 et SG/SM 6935

      493 Cf. § 4

      494 Cf. § 8

      * 495 Bien que relatif à l'inculpation de simples individus, le différend aurait dû être porté devant la CIJ, puisqu'il s'agit d'abord et avant tout d'un différend interétatique. Cette solution avait d'ailleurs été privilégiée par la Libye parallèlement à la saisine du Conseil de sécurité par les Etats occidentaux. Dans une requête introductive d'instance, enregistrée par le Greffe de la Cour le 3 mars 1992, la Libye avait formulé une demande en indication de mesures conservatoires, dans laquelle elle fit prévaloir le droit qui lui conférait la Convention de Montréal de 1971 de juger les accusés en accord avec le principe Aut dedere aut judicare. Les débats sur les mesures conservatoires ouverts depuis le 26 mars ont été « court circuités » par la Résolution 748 (1992) du Conseil de sécurité qui imposait la livraison le 31 mars 1992 des inculpés. Devant cette situation, la CIJ décida par onze voix contre cinq que les circonstances de l'espèce n'étaient pas de nature à exiger l'indication de mesures conservatoires. L'interférence entre le traitement judiciaire par la Cour et le traitement par le Conseil de sécurité au titre de ses fonctions de sécurité collective confine manifestement au « conflit de compétence ». (Voir Ordonnance du 14 avril 1992 (Libye c. Etats-Unis), Rec. CIJ, 1992, p. 127, § 44 et Opinion dissidente du Juge M. BEDJAOUI jointe aux ordonnances, ibid. p.35, §7. ). L'espèce soulève en filigrane la question de la primauté, de la prépondérance des organes des Nations Unies dans leurs rapports. De ce qui précède, il apparaît clairement que l'organe politique (le Conseil de sécurité) jouit d'une certaine préséance sur l'organe judiciaire (la CIJ), ce qui est non sans poser des interrogations aiguës sur l'effectivité de la séparation des pouvoirs au sein de cet Etat universel qu'est la communauté internationale.

      * 496 L'extradition a été possible grâce à un accord bilatéral qui existe entre les deux pays.

      * 497 Voir la page Internet de l'International Progress Orga-nization consacrée à la mission d'observation du procès de Lockerbie : http://i-p-o.org/lockerbie_observer _mission.htm. L'arrêt est disponible sur www.scotcourts.gov.uk/download.

      498 Sous la pression de la communauté internationale, les troupes syriennes ont finalement accepté de se retirer du sud du Liban le 26 avril 2005.

      499 Cf. Déclaration du Président S/PRSDT/2005/4( 15 février 2005)

      * 500 Cf. Rapport S/2005/203, p. 21,§ 62.

      501 Ibid., p. 21, § 63

      502 Le Président Emile LAHOUD voyait dans le rapprochement avec les autorités syriennes une occasion de contrebalancer l'influence occidentale portée par Monsieur HARIRI.

      * 503 Au § 11 de la Résolution 1636 (2005), le Conseil « décide » notamment que la « Syrie doit collaborer sans réserve et sans condition avec la Commission ».

      * 504 Cette réticence de la Syrie à l'égard de la Commission a été relevée par le Conseil de sécurité aux §§ 5 de la Résolution 1636 (2005) et § 3 de la Résolution 1644 (2005).

      * 505 Voir Hervé ASCENSIO, « Terrorisme et juridictions internationales », SFDI, Les nouvelles menaces contre la paix

      et la sécurité internationales, op.cit, pp. 279.

      * 507 Voir Barbara DELCOURT, « De quelques paradoxes liés à l'invocation de l'Etat et du droit », in Karine BANNELIER et al. (dir.pub.), Le droit international face au terrorisme, op.cit., p. 204.

      * 508 Voir Pierre KLEIN, « Le droit international à l'épreuve du terrorisme », op.cit.

      509 Voir Robert CHARVIN, « La guerre anglo-américaine contre l'Irak et le droit international : Apocalypse Law, in Actualité et droit international, avril 2003, sur http://www.ridi.org/adi

      510 MM. René PASSET et Jean LIBERMAN considèrent que le terrorisme pousse sur le « terreau » de la « misère », de « l'humiliation » et du « délitement des valeurs » et est entretenu par « l'engrais » de « l'argent sale », dans

      Mondialisation financière et terrorisme : la donne a-t-elle changé depuis le 11 septembre ? op.cit, voir Chapitres I et II.






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