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Les auditeurs de Skyrock face à l'intolérance - Fonctionnement, valeurs et portée du discours de l'émission "Radio libre" dans le traitement des problèmes d'intolérance vécus par ses auditeurs

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par Mathieu Sicard
Université Paris III Sorbonne Nouvelle - DEA - Master 2 recherche 2006
  

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Les auditeurs de Skyrock face à l'intolérance

Fonctionnement, valeurs et portée du discours de l'émission Radio libre dans le traitement des problèmes d'intolérance vécus par ses auditeurs

Mathieu Sicard sous la direction de Monsieur le Professeur Jacques Gonnet
Mémoire de Master 2 recherche en sciences de l'information et communication
Université de Paris III - Sorbonne Nouvelle - UFR Information communication
Soutenu le 4 juillet 2006

Remerciements

Des recherches sont toujours le fruit de la collaboration de plusieurs intervenants, plusieurs savoir-faire, plusieurs subjectivités. Reconnaissons le partage de la paternité de ce qui va suivre.

En premier lieu, à Jacques Gonnet, mon papa de l'université, directeur de ce mémoire et personnalité influente de ce qui suivra.

A Laure Dasinieres, camarade bienveillante, méthodique, à l'aide précieuse, et qui a le don de me rendre loquace.

A Anne-Caroline Fiévet qui m'a ouvert les portes du groupe Radio où j'ai notamment pu rencontrer Laurent Gago et Nicolas Béqueret.

A David Roizen, responsable de la communication et des relations institutionnelles de Skyrock pour le respect d'un pacte confortable de la recherche universitaire en entreprise.

A Anaïs, à Sarah, pour leur relecture.

A mes parents pour leur confiance et leur soutien.

A toutes celles et tous ceux, auditeurs, qui sont la matière même de ce mémoire.

Sommaire

Introduction - Entrée en matière 5

Première partie - Préliminaires . 9

Un chemin de longue date 11

Itinéraire d'une recherche universitaire en entreprise 12

Des radios libres à Radio libre 18

De Cité Future à Skyrock, d'une radio libre à une radio commerciale 1 9

La libre antenne 21

Un slogan comme promesse : « Total respect, zéro limite » 21

Parcours théorique et méthodologique 28

Classification des interventions dans Radio libre 29

Une définition de l'intolérance comme sujet 30

Analyses quantitatives du premier corpus 34

Premiers traitements : contextualisation de notre sujet 36

L'analyse du discours 41

Seconde partie - Ecouter et écrire le discours radiophonique 44

Analyser des séquences radiophoniques 45

L'analyse conversationnelle 45

Ecrire l'oral 47

Le processus de skysolidarité 48

Retranscriptions des trois grandes séquences du corpus 51

Le racisme 51

L'homophobie ou l'intolérance à l'égard de l'identité sexuelle 69

L'intolérance du fait de la religion, de la tradition 88

Troisième partie - Un regard sur Radio libre et les séquences retranscrites 106

Architecture de la skysolidarité 107

Résonances et valeurs d'un discours 110

Développements de la skysolidarité 110

Caractères linguistiques 118

Respect et diversité 121

L'espace radiophonique comme acteur social 127

Je, ils -* nous 128

Le « grand frère », repère légitime 130

Radio libre comme figure du « grand frère » 132

Construction d'un nouvel idéal du lien social 133

Conclusion - Bilan du parcours et de l'expérience de la recherche 137
Bibliographie / Webographie - Eléments de repères de références et d'ouvertures . .. 1 42

Introduction

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Entrée en matière

Les radios libres épanouies au cours de années 1980 sont souvent aujourd'hui érigées en légende d'un souffle de liberté sur des ondes jusque-là réduites à quelques grandes stations généralistes. Un vent de cultures musicales et de libres antennes imposa une nouvelle donne pour un nouveau paysage radiophonique dont la jeunesse est incontestablement une grande bénéficiaire. Les petites antennes éparses sont parfois devenues de grandes stations nationales. Dès la fin des années 1980, trois d'entre elles, principalement, se partagent le public jeune, très courtisé des annonceurs. NRJ, Skyrock et Fun Radio se mènent une guerre depuis lors autour de la cible des 15-25 ans en développant leurs identités par leurs programmations musicales et un foisonnement d'émissions originales -encore peu étudiées- auxquelles un public de plus en plus fidèle s'identifie.

Le concept de libre antenne a toujours été présent dans ces années où de nombreuses émissions lui ont fait prendre différentes formes. Celle qui remporte la mise, tant en terme d'audience que d'image, est aujourd'hui Radio libre diffusée chaque soir depuis huit ans sur Skyrock de 21 heures à minuit et dans laquelle l'animateur Difool et ses acolytes s'occupent des problèmes quotidiens des auditeurs qui viennent y partager leurs expériences, leurs joies, leurs peurs, leurs tracas. Souvent amoureux, parfois sexuels, familiaux ou scolaires... ils ne sont pas toujours dans la futilité de l'image réductrice que l'on se fait souvent des libres antennes. Après tout, il ne s'agit là que d'un ref let des préoccupations de jeunes adultes, en émancipation, parfois tourmentés par les angoisses d'un âge, d'une époque, de mutations personnelles et sociétales, au milieu de confrontations de différentes cultures, dans une société où l'itinéraire de l'épanouissement est souvent semé d'obstacles.

Chez Difool à la radio, on s'y confesse, on espère y être aidé. On y joue, on y blague aussi, mais l'essence même de la libre antenne, l'ouverture de l'antenne aux appels à l'aide, ne se prête pas toujours à la gaudriole. Et la solidarité gouvernant le contrat de communication est parfois mise à rude épreuve.

C'est ce à quoi nous allons nous intéresser : comment fonctionne, dans Radio libre, la solidarité entre auditeurs (et avec l'équipe) pour des sujets aussi graves que le racisme, l'homophobie ou les intolérances que connaissent parfois ces jeunes adultes. Souvent de la part de leur propre famille, qui plus est, et a l'égard de celui ou celle qu'ils aiment, de leur propre identité ou de leurs choix de vie en inadéquation avec des esprits très traditionnels.

Nous essaierons de comprendre comment se construit le discours de l'émission sur ces sujets lourds, quelles sont les valeurs qui semblent le gouverner.

Les auditeurs de Skyrock, comme plus largement la génération actuelle d'adolescents et de jeunes adultes, s'inscrivent dans différentes cultures, origines sociales ou ethniques, religions... Ils ou elles sont lycéen(ne)s, étudiant(e)s, actif(ve)s. A l'image de notre société, ils ont un point commun, l'insatiable besoin de se sentir libre, le refus de se laisser dicter leurs comportements. A l'image de notre société, et même souvent en première ligne, ils sont parfois dans l'étau que serrent les tensions issues de ce multiculturalisme et des communautarismes. La plupart du temps vivant sous le toit de leurs parents, ils sont confrontés à leur regard et leur jugement alors qu'ils quittent l'adolescence pour devenir des ad u ltes.

Au croisement du brassage des cultures et de la phase d'émancipation et d'affirmation de l'identité du jeune adulte, ils se confrontent à de nombreuses préoccupations quotidiennes, et sont touchés par le racisme, l'homophobie, par l'intolérance au sens large. Victimes parfois de celle de leurs propres parents.

Quand le dialogue est difficile alors que le besoin de parler est grand, quand le lien social est corrompu alors que l'obsession de la liberté individuelle ne saurait s'affranchir du besoin des autres, Radio libre est un refuge de dialogue où se construit un discours par des animateurs enclins à la confidence et des auditeurs qui y trouvent un espace social alternatif pour y déverser leurs états d'âme et faire appel à l'aide des autres. Parfois à propos de problèmes difficiles comme cela sera le cas de ceux traités dans cette étude.

Nous allons ainsi porter notre regard sur la façon dont se construit le discours de l'émission Radio libre pour les sujets graves ayant trait à l'intolérance.

Dans un premier temps, nous contextualiserons notre propos en nous attardant notamment sur la situation et le fonctionnement de l'émission, sur l'opportunité du sujet pour le jeune chercheur. Nous exposerons les outils et les notions que nous aborderons pour notre étude tout en délimitant, peu à peu, notre corpus, plus précisément vers les questions liées à l'intolérance en justifiant une pertinence dans un itinéraire qui légitimera les choix d'analyse.

Puis, nous procéderons au traitement méthodique des données des retranscriptions écrites du corpus pour en dégager enfin les résultats du regard que nous y aurons porté.

Notre étude pour appréhender le discours développé dans l'émission Radio libre empruntera à différentes approches : linguistique, lexicologique, sémiotique, ethnométhodologie, l'analyse du discours, l'analyse de contenu... pour s'ouvrir ensuite à des considérations sociologiques.

Il va s'agir de s'appuyer sur l'écoute et les retranscriptions des séquences sélectionnées pour élaborer un matériel de travail rigoureux qui permettra d'interroger le corpus, tout d'abord pour développer le processus de solidarité qui s'établit à l'antenne selon les termes du contrat de communication, pour ensuite impliquer notre étude dans le champ social. Et découvrir au-delà du fonctionnement d'un discours radiophonique quelles sont les valeurs qu'il déploie et quelle peut alors être sa portée.

Première Partie

---
Préliminaires

Comment aborder un domaine de recherche, justifier la pertinence de ses choix, de son propos... La route qui guide des recherches est sinueuse, subit parfois des déviations, se divise, se rejoint. Le parcours emprunté par le chercheur précise son objet, questionne son approche, le choix de ses outils scientifiques, la méthodologie qu'il préfèrera adopter.

Nous débuterons ici par cela.

Cette première partie veut rendre compte non seulement des choix et précisions théoriques de la méthodologie adoptée, de mes préoccupations pour les présentes recherches, de la pertinence du propos qui suivra, mais aussi, dans sa forme, de l'itinéraire vers le travail qui est aujourd'hui ce mémoire, du chemin luimême qui a été emprunté. Des éléments déclencheurs aux doutes.

Il en résulte pour le lecteur une immersion dans ce qu'il pourra percevoir à certains égards comme une sorte de carnet de bord du chercheur, le partage d'une certaine proximité avec cette expérience particulière de recherches sur la radio et plus particulièrement la libre antenne, une entrée en matière qui suit l'aventure de l'auteur de ces lignes et ce « fil de laine » que l'on tire, sans fin, cher à l'appréhension de Jacques Gonnet.

Un chemin de longue date

Avant d'aborder cette première partie et de découvrir les outils scientifiques, méthodologiques et l'angle d'attaque des interrogations auxquels soumettre le corpus, il me paraît important d'expliquer les liens qui m'unissent à l'émission Radio libre depuis trois ans. Le récit de l'aventure qui suit permet, je le pense, de comprendre le processus de justification du choix de mon sujet.

En 2003, intégrant après quelques errances en économie un cursus en communication, l'université d'Avignon et des Pays de Vaucluse me demandait d'effectuer un stage dans le cadre d'un Deug. Loin des préoccupations de mes camarades pour la communication d'entreprise, je souhaitais connaître une expérience dans un média, avec une préférence pour la radio. Pour y faire quoi ? peu importait alors. Une première approche, quelques contacts à se faire... un si peu de choses pouvait alors éveiller mon enthousiasme.

Merci aux amis, et amis d'amis, l'étudiant du Sud monta à Paris, accueilli par la station Skyrock avec pour mission d'effectuer des « piges précises » de l'émission Radio libre, première en audience chaque soir de 21 h à minuit. Précise n'était pas la consigne et libre fut donc mon appréciation de rendre compte de l'activité de la solidarité de l'équipe et entre auditeurs -que nous définirons comme « skysolidarité » - qui est censée se mettre en branle dans l'émission.

J'établis alors un format de prise de notes qui a trouvé sa cohérence en un tableau1. Jour après jour, chaque sujet sollicitant la skysolidarité est consigné, sobrement intitulé, avec ses références précisément datées et complété d'un court résumé des interventions de l'équipe et/ou des auditeurs.

Cette prise de note est personnelle et appelle d'autres travaux. Qui peuvent être divers. En elle-même, sa portée est limitée.

1 Voir annexe

Depuis deux ans Skyrock m'emploie pour continuer cette mission, je crois savoir que la station l'utilise comme historique pour renseignement du contenu de l'émission notamment dans ses sempiternelles argumentations avec le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA).

Dans une optique totalement différente, ces notes sont très précieuses pour l'appréhension d'un sujet de recherche, sa justification dans un tout, et comme répertoire référentiel pour sélectionner des occurrences pertinentes à développer ensuite par l'écoute et l'analyse des extraits.

La posture de la recherche universitaire combinée au travail en entreprise ne s'avère ainsi aucunement gênante, bien au contraire, comme je tentais de l'expliquer, du point de vue de l'expérience personnelle, à Laurent Gago1 qui m'avait demandé ce regard afin de renseigner un de ses articles.

Je lui écrivis ce qui suit.

Itinéraire d'une recherche universitaire en entreprise

A la rentrée 2002/03, venant de valider mon Deug d'Administration économique et sociale (AES), j'intègre la deuxième année de Deug Médiation culturelle et communication (MCC) de l'Université d'Avignon et des Pays de Vaucluse (UAPV). Ce cursus prévoit la validation d'un stage.

1 Laurent Gago est ATER à l'Université de Marne la Vallée, UFR Arts et Technologies, enseignant à l'Université Paris 3 - Sorbonne Nouvelle à l'UFR Communication, chercheur au CREDAM, Centre de Recherches sur l'Education aux Médias.

Plus attiré par les médias que la communication d'entreprise, et particulièrement par la radio, j'entame des démarches pour faire quelques recherches au sein d'une station nationale, sans préférence particulière pour l'une d'elle. Si le statut de stagiaire en Deug 2 se prête peu pour la plupart des dirigeants de stations à proposer à un étudiant de travailler sur son antenne, mon réseau de connaissance m'a amené, de façon inattendue, à rencontrer David Roizen, responsable de la communication et des relations institutionnelles de Skyrock.

Les problématiques qui concernent son service s'inscrivent en grande partie dans une stratégie de défense de l'antenne, notamment dans la lutte qui l'oppose au Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA), particulièrement attentif au contenu de l'émission Radio libre, présentée chaque soir de la semaine de 21 heures à minuit par Difool (David Massart, par ailleurs directeur de l'antenne).

La mission que me propose David Roizen est de procéder à une veille de cette émission, en élaborant des piges précises de son contenu s'agissant des interventions des auditeurs au sujet de problèmes qu'ils connaissent, des réactions de l'équipes et des autres auditeurs.

Mon travail a donc été au mois de mai 2003 d'écouter les émissions des mois de janvier et février précédents et d'élaborer un document de travail précisant quelles étaient chacune de ces interventions et de quels effets (réponses) étaient-elles suivies (cf annexe).

Le tableau Excel ainsi obtenu au prix de longues heures d'écoutes attentives est une synthèse de tous les thèmes de la « skysolidarité » pendant cette période. Je le considère alors plus comme une prise de note, assez personnelle au sens où elle appelle beaucoup de souvenirs plus précis dans ma mémoire. Mon intérêt était alors de tenter, grâce à cet outil de référence et de traitement statistique, de présenter les aspects positifs contenus dans l'émission autour de cette thématique de skysolidarité.

Ce travail ne se destinait qu'à être l'aboutissement de mes écoutes dans une perspective de première approche de la recherche af in de compléter de façon aboutie mon rapport de stage. Si mon appréciation de la dimension de solidarité dans l'émission, objet de mes écoutes, m'est apparue comme un aspect positif de l'émission -je ne me suis par ailleurs alors exprimé sur rien d'autre- les outils que j'ai utilisé étaient très personnels et ne relevaient évidemment pas d'une méthodologie universitaire pour un mémoire en sciences de l'information et de la communication (je rappelle en outre que je n'étais alors qu'en seconde année de Deug MCC... sans avoir fait la première année !)

David Roizen ne m'avait pas demandé ce travail, mais il l'a apprécié et l'a largement diffusé comme un outil supplémentaire de promotion de l'émission phare, à une époque où le CSA était déjà vigilant à son égard et où le rapport de Blandine Kriegel allait affecter son appréciation et justifier un peu plus ses mises en garde sur le caractère cru de certains propos tenus dans l'émission.

La station avait tous les droits de disposer de ce travail comme une étude réalisée en interne par un étudiant stagiaire et, à ma connaissance, il a trouvé un certain écho dans le milieu de la radio et une partie du monde politique de la culture comme au cabinet de Jack Lang. Michel Meyer l'a repris dans Paroles d'auditeurs1, reproduisant les dix-huit pages de mon tableau de notes et citant de façon référencée deux pages de mon rapport. Je pense que cette citation est pour beaucoup dans l'admission de ma candidature à l'Université de Paris 3 - Sorbonne Nouvelle à la rentrée 2003. J'ai appris au Salon Radio 2006, en rencontrant Nicolas Becqueret, que le docteur en science de l'information et communication avait aussi fait référence à ce rapport dans sa thèse.

Si la citation de Meyer est flatteuse en recevant mes observations comme seul contre argumentaire cité dans son ouvrage largement à charge contre la tonalité du moment des émissions de libre antenne, Nicolas Becqueret a été largement plus critique sur mon travail. S'il valorise certains aspects de l'antenne, il n'est

1 Parole d'auditeur, Michel Meyer, Paris, Syrtes, 2003, 345 pages.

pas une étude rigoureuse de tous les aspects de la communauté d'auditeurs créée par l'émission. Nicolas Becqueret précise notamment le caractère excluant de cette communauté à l'égard de ceux qui n'en sont pas.

La concision et la visée de mon rapport, nous l'aurons compris, laissait seulement la place à la valorisation de l'émission selon mon appréciation de la solidarité qui figure dans le contrat qui la lie à ses auditeurs. En aucun cas, il ne s'agissait là du résultat de recherches au sens universitaire, ne serait-ce que dans la construction de la réflexion et dans le format de la chose.

La question de l'ambiguïté de la recherche universitaire en entreprise se pose logiquement à moi aujourd'hui, alors que je travaille sur le discours développé dans la skysolidarité pour mon mémoire de Master 2 recherche et que je suis, par ailleurs... salarié par Skyrock !

La station m'emploie en effet depuis un an et demi, à la place des stagiaires successifs qu'elle recrutait jusque-là (dont j'ai donc fait partie en mai 2003), à « piger » les interventions de Radio libre autour de la thématique de la skysolidarité. C'est-à-dire à continuer la prise de note que nous avons précédemment définie selon l'écoute de toutes les émissions depuis la rentrée 2004.

Dans la mesure où cette prise de note n'est que la retranscription du contenu de l'émission et que l'usage qui peut en être fait par la station m'est étranger (ou plutôt que j'y suis étranger), je ne fais pas un cas moral troublant de partager ce travail dans le cadre de mes recherches. Bien au contraire ! Aurais-je pu bénéficier d'un tel corpus dans la seule année de recherche de mon Master 2 ? Certainement pas. C'est parce ce traitement de l'émission est aussi mon activité professionnelle, qui paie mon loyer et me nourrit, que j'ai pu y consacrer le temps que nul n'aurait pu consacrer dans une année universitaire dans le cadre de ses recherches. Cela au bénéfice d'un corpus de référence plus étendu, permettant de dégager des statistiques préalables pour contextualiser l'objet particulier de mes recherches, permettant d'éviter les erreurs d'appréciation liées à la

représentativité des éléments qui seront traités, permettant de dégager des perspectives en respectant leur cadre dans la skysolidarité et sans jamais perdre de vue la part des recherches de mon mémoire dans le tout que forme l'émission.

Et la station met à ma disposition un disque dur qui peut se connecter à mon ordinateur personnel et qui regroupe toutes les émissions de la saison, économisant au chercheur le travail fastidieux d'enregistrement ou de consultation à l'Inathèque de France, et permettant une consultation à courtoisie, à domicile, sans contrainte d'horaires ou de coûts techniques, avec la meilleure flexibilité dans l'organisation des recherches.

David Roizen n'est pour moi pas tout à fait un patron ni tout à fait un ami. Nous entretenons de bonnes relations mais nous nous voyons très peu et s'il voit je crois d'un bon oeil mes recherches sur la matière qui nous lie par contrat de travail, il ne s'intéresse pas à l'avancée de mes travaux ni même à l'intitulé de mes recherches, à leur angle, à ma problématique. Il découvrira mes résultats une fois mon mémoire soutenu et j'accueillerais volontiers ses observations.

Je sais que s'il m'était utile pour ce mémoire d'effectuer par exemple des entretiens, il me faciliterait largement la tâche ; alors que si je lui étais étranger, il me serait ardu, je n'en doute pas, de le rencontrer lui, Difool ou le directeur de la station Pierre Bellanger, ou d'obtenir certaines informations que seule détient la station.

Pour ces raisons, je trouve pertinent et même utile la recherche universitaire en entreprise. J'imagine qu'il doit y avoir des cas de conscience éthiques ou loyaux pour certains chercheurs dans cette situation. J'ai la chance d'en être à l'abri.

Ce sont ces quelques mots avec les interpellations de Jacques Gonnet et d'autres chercheurs qui ont déclenché la maturation du projet de l'écriture de ce mémoire.

Des radios libres à Radio libre

Revenir sur la libéralisation des ondes du début du septennat de François Mitterrand... l'histoire aura retenu que sans doute avant que le politique ne soit dépassé par l'évidence de l'émergence d'une nébuleuse de médias radiophoniques dussent-ils être « pirates », il fallait bien se résoudre à jouer la carte de la garantie de la liberté et du pluralisme... quitte à canaliser ces jaillissements en les introduisant dans une légalité qui permettent de les contrôler. L'appareil législatif créa ainsi un cadre dans lequel faire évoluer le projet (qui faisait partie des `'110 propositions pour la France''). La loi Fillioud du 29 juillet 1982 prévoit ainsi, dans son article premier, que « les citoyens ont droit à une communication audiovisuelle libre et pluraliste ». Mais si le monopole public est aboli -dans une France où les rapports entre politique et médias s'entrelacent- l'usage des fréquences de diffusion est soumis à autorisation, et une haute autorité de régulation est créée. Elle prendra d'ailleurs différents noms et s'attribuera ses compétences légitimes au fur et à mesure des évolutions techniques et des gouvernements successifs.

Fini donc le temps d'un paysage radiophonique comptant trois radios publiques (France inter, France culture et France musique) et quatre périphérique (Europe N°1, Radio Luxembourg, Radio Monte-Carlo et Radio Andorre) émettant de l'étranger1. Les radios qui s'étaient développées clandestinement post-1968 peuvent prétendre à pignon sur rue et arrêter les parties de cache-cache de leurs émetteurs. Leur développement serait néanmoins freiné par leur obligation d'un statut local et de type associatif. « Serait », car les réseaux se développent et dans cette mouvance -où la France traîne plutôt en Europe2- il ne saurait tarder de voir s'affirmer de véritables industries radiophoniques.

L'interdiction de la publicité, dans un premier temps soutenue par les socialistes contre la proposition du ministre de la communication Georges Fillioud -ancien

1 Jean-Noël Jeanneney, Une histoire des médias, Paris, Points-Seuil, 2001, p256.

2 Jean-Noël Jeanneney, idem, p255.

journaliste d'Europe N°1- qui en serait garante est vécue par certains protagonistes et aujourd'hui au regard de nombreux historiens comme une parfaite hypocrisie1. Comment subsister sans un budget de fonctionnement auquel l'Etat ne peut subvenir ? Le président Mitterrand changera brusquement d'avis, sous la pression de l'école privée qui aboutit à une manifestation à Paris le 24 juin 19842. La France digère la libéralisation de ses ondes.

Parmi cette multitude de radios devenues commerciales, NRJ se distingue. Son patron Max Guazzini désavoue la Haute autorité, qui avait suspendu la station pour son niveau sonore de diffusion largement abusif, en orchestrant six mois plus tard une grande manifestation d'auditeurs et d'artistes pour sauver « leur » radio. La réaction politique sera de laisser défiler et NRJ re-émettra.

De Cité Future à Skyrock, d'une radio libre à une radio commerciale

Le parcours de la radio qui nous intéresse ici, durant ces « folles années », sera principalement incarné par un homme. Passionné de radio et reconnu par ses pairs comme instinctif et visionnaire, Pierre Bellanger « biberonnait » déjà en 1979 aux micros de l'université de Paris VIII-Vincennes où il étudiait la biologie. En 1981, il fonde, en association avec le journal Le Monde, Cité Future, qui prendra le nom de Radio Lézard, loi Fillioud en vigueur, deux ans plus tard. Pierre Bellanger développe ses réseaux et a pour objectif de faire devenir sa radio une grande radio nationale. En 1986, Skyrock s'assume comme radio commerciale.

Autre dimension, autres rapports au public et surtout autres moyens financiers, mais pas de regrets pour le bourlingueur de la bande FM : « La Voix du Lézard n'aurait pas pu devenir un réseau. Elle était trop " fermée ", c'était la radio de 400.000 personnes, confie Pierre Bellanger. À la différence de beaucoup d'autres

1 Annick Cojean et Franck Eskenazi, FM, la folle histoire des radios libres, Paris, Grasset, 1986, 333 pages.

2 Jean-Noël Jeanneney, op cit, p259.

radios libres, au lieu de disparaître ou de s'enfermer dans une sorte de cocon tribal malheureux et plein de ressentiment à l'égard de l'extérieur, on a évolué. Aujourd'hui, on touche 2 millions de personnes »1. Bellanger justifie sa cohérence dans un paysage radiophonique dont l'évolution lui donnera raison.

Quid de l'identité de la station ? L'esprit rock fondateur du réseau est conservé durant les années 1980. Mais le discours change. Bellanger veut rester en phase avec une cible 15-24 ans qui évolue constamment. Les années 90 verront Skyrock véhiculer des valeurs anti-racistes pour une génération multiculturelle et « multicolore »2. Si la libre antenne conserve une place de choix, la station est clairement musicale et diffuse « Aïcha » du chanteur Khaled. Puis, un oeil sur les Etats-Unis, Skyrock captera l'émergence rap qui deviendra le genre musical préféré de sa cible dans la deuxième moitié des années 90. Pour d'anciens auditeurs, souvent nostalgiques, Skyrock a perdu l'âme de ses débuts, libre antenne et rock. Il apparaît évident que la station commerciale ne s'est pas encombré de l'opinion de ses premiers fidèles et a voulu évoluer avec son coeur de cible.

Une génération c'est deux ans pour Bellanger, et Skyrock veut conserver sa cible -au fort pouvoir d'achat- et non ses auditeurs. La nuance est primordiale dans la stratégie commerciale et l'identité de la station commerciale. Skyrock mise sur la stratégie de l'identification à sa cible, jeune génération sur un « strapontin social »3, isolée, aux codes propres4, qu'elle veut partager. Quitte à jouer la victimisation lorsque l'attribution de nouvelles fréquences tourne plus l'avantage aux groupes NRJ, Lagardère et Bertelsmann, en lançant des pétitions bientôt signées par de nombreux élus et en faisant circuler un camion à ses couleurs dans les villes « privées » de Skyrock pour créer le buzz médiatique autour de jeunes gagnés à sa cause.

1 Article paru sur le site http://www.bric-a-brac.org/radio/fiches/skyrock.php

2 Plaquette de presse de Skyrock, Sky rock expliquée à mes parents, 2003.

3 Plaquette de presse de Skyrock, idem.

4 Cf le travail d'Anne-Caroline Fiévet sur l'argot et le parler nouveau des banlieues sur l'antenne des radios Skyrock, NRJ et Fun Radio.

La libre antenne

Le format de la libre antenne est vieux comme les radios libres. Le principe est simple, ouvrir l'antenne aux auditeurs qui, par téléphone, prennent la parole pour une simple dédicace ou pour former des émissions entièrement construites sur leurs récits. De la vie quotidienne aux jeux et canulars. On se rappelle de Lovin' fun sur Fun radio, qui parlait de sexe sans complexes en mélangeant blagues et discours psychologiques (sous la caution du « Doc » Christian Spitz, pédopsychiatre) et responsabilisants à propos de prévention.

Un slogan comme promesse : « Total respect, zéro limite »

La symbiose que Skyrock revendique avec la nouvelle génération, ou du moins une partie de la nouvelle génération suffisante pour la placer première radio de France de sa cible1, s'exprime par l'affirmation d'une identité forte. Musicalement, il ne s'agit pas du rap. Hier, Sky était rock, puis le rap et le raï sont apparus, aujourd'hui la programmation est aussi empreinte de Rn'B... La couleur est celle du moment, celle qui correspondra à la culture lycéenne. Ou du moins une certaine culture lycéenne. NRJ séduit une grande partie du public jeune par sa programmation pop, mais il s'agit pour Skyrock de viser une cible plus précise, plus restreinte, et qui en s'y reconnaissant sera d'autant plus attachée. Couplée au travail qui est fait dans la libre antenne du soir dont il va être question ici et à son succès d'audience, la fidélité à la station est acquise. On peut ainsi plus facilement parler d'une « communauté » dans l'auditorat de Skyrock que pour une autre radio musicale. Cette proximité est ancrée dans la continuité de la grille. On se lève avec Difool, qui accompagne jusqu'au lycée, la journée est musicale et ouverte aux « dédicaces », on retrouve Difool et sa petite équipe pour s'endormir. Les voix des animateurs, les jingles sont travaillés pour donner une tonalité cohérente, une couleur d'antenne en continu, s'adressant toujours à un

1 Source : Médiamétrie Enquête 75 000+ novembre-décembre 2001, cible 15-24 ans, du lundi au vendredi, de 5h à 24h, audience cumulée et part d'audience.

public type que l'on pourrait dans un premier temps rapidement définir comme lycéen et « rebelle », par opposition à la cible de NRJ, plus large et plus « sage ». La libre antenne est propice à l'expression des jeunes auditeurs sur leurs problèmes quotidiens, voire en lien avec certains sujets de société.

La station se plait d'ailleurs à revendiquer la liberté du discours sur son antenne, en direct (nous savons néanmoins qu'un premier filtre est opéré au standard pour éviter à la fois les interventions qui ne passionneraient pas l'auditoire comme d'éventuels débordements). L'illustration la plus flagrante est évidemment l'émission Radio Libre, animée chaque soir par Difool, Marie et Romano de 21 h à minuit. La plaquette de presse1 de Skyrock prétend que la parole des auditeurs s'y exerce « sans censures, avec leurs mots, leurs points de vue, leur discours, leurs excès, leur sincérité ».

Serait-ce la formule gagnante de l'émission première en audience chaque soir ? Un message crypté, où pour parler de morale on pourrait user de mots obscènes, pour recommander la modération user l'outrance verbale. Un mélange de rire, de grave, de cocasse, d'utile, d'insulte, d'émotion2 qui aurait créé ses propres codes, son propre fonctionnement, son propre langage.

Le « moment radiophonique adolescent » décrit par Hervé Glévarec3 était né sur Europe 1 avec Salut les copains, il s'ancre dans la libre antenne depuis les années 1990, dans une culture de la chambre, comme espace privé du jeune en tant qu'individu, à la fois isolé et relié aux acteurs sociaux, de la connivence au conf lit.

Le succès de l'émission phare sur laquelle portera notre propos est lié en partie à la popularité et le savoir-faire de l'animateur. Difool était l'enfant terrible qui apportait le « fun » à l'émission co-animée avec le Doc (Christian Spitz) sur l'antenne de Fun Radio dans le milieu des années 90. Lovin' Fun, devenue culte

1 Plaquette de presse de Skyrock, op cit.

2

Plaquette de presse de Skyrock, idem, page 12.

3 Hervé Glévarec, Libre antenne, Paris, Ina-Armand Colin, coll. Médiacultures, 2005, p.1 11 et suivantes

pour toute une génération, s'est imposée naturellement au moment où la jeunesse a eu besoin de parler et d'entendre parler de sexe, notamment du fait de la problématique nouvelle du sida et de la vague de prise de conscience de la nécessité de développer un discours responsable.

Mais le succès d'audience de Radio Libre, confirmé depuis plusieurs années par les chiffres de Médiamétrie la situant première radio de France sur la plage horaire 21 heures/minuit, est avant tout le résultat d'une adéquation que nous avons commencé à décrire et la pérennisation d'un pacte de confiance avec les auditeurs sur un contrat.

Radio libre est présente sur la grille de Skyrock du lundi au vendredi, de 21 heures à minuit, de la rentrée d'août/septembre aux vacances d'été de fin juin/début juillet. L'émission dure donc trois heures chaque soir, durant lesquelles l'antenne est ouverte aux appels des auditeurs, comme nous l'avons vu, pour évoquer un problème et faire appel à la solidarité des auditeurs et des animateurs ou pour apporter un soutien, une réponse. Si ceci constitue le fondement du concept de l'émission et qu'il s'agira ici de le questionner, ne nous privons pas en quelques mots de retranscrire les autres composantes de Radio libre, notamment à l'attention de celles et ceux qui n'auraient jamais écouté l'émission, afin de l'envisager comme un ensemble.

Différentes séquences régulières viennent ponctuer le programme. La publicité et la musique, évidemment, deux fois par heure, couplées, durant cinq minutes à chaque heure 20 et chaque heure 50 environ. La programmation musicale est alors fidèle à l'ensemble de la programmation de la station, rap et Rn'B ; et les publicités s'adressent, sans surprise à un public jeune (téléphonie, produits culturels... mais aussi lignes téléphoniques de service, de prévention du sida comme des chats de rencontres, hétérosexuels comme gays). Des chroniques ponctuent l'émission : canulars téléphoniques, « questions express - réponses express » où il s'agit de répondre très rapidement à des questions très diverses des auditeurs reçues par internet ou messages textos, le jeu du « lotofoot », la « skyroulette » qui fait gagner des cadeaux en fin d'émission, ou encore -il mérite

qu'on s'y arrête- le très écouté « problème du mois » dont sont friands les auditeurs comme les oreilles attentives du Gonseil supérieur de l'audiovisuel (GSA) qui y attend chaque jeudi les propos estimés les plus choquants par l'autorité, notamment s'agissant de la descriptions de pratiques sexuelles comme la fellation, la sodomie, le sado-masochisme... le principe est de tourner en dérision les problèmes que rencontrent certains lecteurs de magazines ou sites internet adultes qui écrivent à ces médias pour leur demander conseil. Propos rapportés dans l'émission dont les auditeurs sont souvent plus jeunes que les cibles légales de ces médias, parfois mineurs. Nous retiendrons toutefois à la décharge de Radio libre que lorsqu'il s'agit des propos les plus crus, ils sont énoncés après 22h30, heure raisonnable reculée récemment par le GSA suite aux conclusions du rapport Kriegel. La station semble en effet tout de même se conformer avec les exigences de l'autorité qui a aussi pouvoir de sanction.

Galquée sur le temps scolaire de ses jeunes auditeurs, l'émission ne prend toutefois que deux semaines de vacances, généralement pour Noël et au printemps. Nous noterons la continuité qu'assurent les personnalités qui animent l'antenne avec leurs auditeurs, à la fois parce qu'ils sont là chaque matin et chaque soir (avant et après les activités sociales en semaine des jeunes ordinaires, école, famille...) mais aussi parce que, même lors des vacances d'hiver et de printemps de l'équipe, on rediffuse le temps d'une semaine les meilleurs moments de l'émission, au même créneau horaire, et introduits par quelques mots (qui paraissent en direct) pour expliquer la rediffusion (« tous les soirs en direct et même pendant cette semaine de vacances » ; « toute la semaine, on a prévu plein de choses que vous nous avez demandées, qui ont déchiré »), ponctué d'indicateurs temporels, souvent au présent pour une annonce de rediffusions (« à l'instant le live de la fouine » ; « bon anniversaire [...] quel âge aujourd'hui ? » ; « Merci d'avoir été là ce soir » ; « tu reviens demain » ; « à la fin de l'émission » ; « tout de suite, pour démarrer »)1. Nonobstant, il ne s'agit pas d'une dissimulation. On ne cherche pas à donner l'illusion du direct, les propos introductifs annoncent et valorisent une rediffusion

1 Ces expressions ont été tirées de l'émission du lundi 26 décembre 2005, propos introductifs d'une semaine de « best of », entendus de 21h01 à 21h07.

des meilleurs moments mais l'équipe présente à l'antenne pour le préciser garde un lien quotidien avec les auditeurs (même si l'on peut volontiers supposer que ces séquences ont été elles-mêmes enregistrées en une seule fois pour laisser une semaine de répit à une équipe qui, reconnaissons-le, l'a bien mérité après avoir tenu l'antenne durant quatre mois).

Le « moment » phare de la station, se présente donc comme régulier et continu, assurant la continuité du pacte qu'elle a établi avec ses auditeurs, ou un contrat1 qu'elle ne saurait être coupable de rompre, tant la régularité est primordiale à la fidélité. Mais si la notion de quotidienneté semble nécessaire à la réalisation des meilleures conditions d'un « suivi2 » crédible et confiant des membres d'une communauté d'auditeurs.

Le contrat, justement, quel serait-il ? Nous allons réutiliser cette notion à de nombreuses reprises, arrêtons-nous y un instant.

Comme la notion de dispositif, celle de contrat a été avancée dans un premier temps intuitivement et par commodité. Par Benveniste, puis notamment en sémiotique par Greimas et Courtés3, se remplissant peu à peu de sens par des éclairages divers. Nous considérerons dans un premier temps que le contrat de communication est la condition nécessaire à un minimum de compréhension mutuelle des partenaires d'une co-construction d'un discours par des actes de langage. Dans le cas qui nous intéresse, ces partenaires sont pléthore. Animateurs, auditeurs au téléphone, mais aussi tous les autres auditeurs, potentiellement in the record, ou a tout le moins réactifs dans leur chambre, même dans la situation de passivité à écouter des représentants comme Grands Auditeurs. Si dans la co-construction, un élément est en rupture dans ce que l'on est habitué à écouter a de fondamental, sans que la justification apparaisse comme légitime par chacun, le contrat est rompu. Appliqué à notre cas,

1 Guy Lochard et Henri Boyer, La communication médiatique, Paris, Seuil, coll. Mémo, 1998, p11.

2 Entendons évidemment au sens stratégique, marketing plus que psychanalytique. Même si le lien affectif et psychologique est, nous le verrons, primordial dans la relation des auditeurs aux membres de l'équipe. 3 Algirdas-Julien Greimas et Joseph Courtés, Dictionnaire raisonné de la théorie du langage, Paris, Hachette, 1979, 454 pages.

l'émission risque de perdre des auditeurs. S'il s'agit d'un repositionnement stratégique, elle peut le faire sciemment en espérant en gagner d'autres. Mais la stratégie affichée de Skyrock, selon le principe de son patron Pierre Bellanger selon lequel une génération se définit comme une classe d'âge d'amplitude 2 ans, est de viser une cible d'âge (plutôt celui du lycée) et non un public avec lequel vieillir. En résulte une évolution en mouvement perpétuel, en phase avec les préoccupations, les codes sociaux et verbaux du moment.

En psychologie sociale du langage, Rodolphe Ghiglione précise que « pour que le contrat de communication soit effectif et donne lieu à un dialogue régulier, il faut que [les interlocuteurs valident mutuellement leurs énonciations] »1. La logique de mouvement évolutif perpétuel que nous venons d'énoncer est en ce sens nécessaire pour être en cohérence avec l'idée d'un coeur de cible fixé selon une tranche d'âge. La pérennité du succès de l'émission réside ainsi pour une part conséquente dans les capacités d'adaptation des animateurs aux codes mouvants de leur cible.

Dans un domaine qui sera plus encore celui de nos recherches, Patrick Charaudeau2 définit pour l'analyse du discours le contrat comme l'ensemble des conditions dans lesquelles se réalise tout acte de communication. Le contrat de communication est pour lui ce qui permet aux partenaires d'un échange langagier de se reconnaître avec les traits identitaires qui les définissent en tant que sujet de cet acte de langage. La connivence que l'on peut relever parfois entre auditeurs et/ou animateurs et l'évocation fréquente de certains traits de caractère des animateurs révèlent en ce sens l'importance de la question des identités, où chacun trouve son (ses) rôle(s) à jouer : Difool la figure du « Grand frère » raisonnable et responsabilisant, Marie le regard féminin, Romano l'amuseur tout en (auto) dérision, Momo et Samy, plus jeunes, supporters du Paris Saint-Germain et de l'Olympique de Marseille. Si l'on pouvait s'attarder plus longuement sur les profils de l'équipe, nous retiendrions déjà qu'ils sont divers,

1 Rodolphe Ghiglione, Situations potentiellement communicatives et contrats de communication effectifs, Verbum, Presses universitaires de Nancy, 1984, p187.

2 Patrick Charaudeau, Langage et discours, éléments de sémiolinguistique, Paris, Hachette, 1983, p50 et 93.

chacun à son rôle particulier, participant en cohabitation à la construction d'un discours dont les autres participants, auditeurs, ne semble pas moins différents les uns des autres. Nous verrons ce qui les réunit ici.

En outre, Difool l'animateur est aussi David Massard directeur de l'antenne, Romano Romain Galand le réalisateur de l'émission, Marie Tartois, Cédric, Momo sont aussi les standardistes.

Une équipe plus élargie tient à jour un dispositif de ressources particulièrement en matière de santé et de soutien scolaire, qui nourrit Radio libre et se matérialise aussi par les sites www.tasanté.com et www.yazata.com.

Parcours théorique et méthodologique

L'analyse que nous allons suivre se veut un « regard » posé sur le fonctionnement d'une partie d'une émission à considérer comme un tout.

La construction de ce regard empruntera à l'analyse du discours, à la sémiotique, à la psychologie sociale, l'ethnométhodologie, la lexicologie... transdisciplinaire, il sera en quelque sorte construit opportunément avec divers outils des sciences de l'information et de la communication (SIC). Nous ne pourrons évidemment espérer exhaustivité dans l'utilisation des outils que les SIC peuvent mettre à notre disposition ; c'est pour cela qu'il s'agira d'un regard, comme il pourrait y en avoir d'autres. Il s'agira ici d'espérer comprendre le fonctionnement d'une composante du contrat de communication liant Radio libre à ses auditeurs (la solidarité) par l'entrée où elle est a priori le plus rudement mise à l'épreuve (les questions d'intolérance).

Comme signalé plus haut, je suis donc assidu depuis plus de deux ans à Radio libre. L'émission est axée sur les appels des auditeurs évoquant un problème et les interventions de l'équipe et de la communauté d'auditeurs. Notre propos portera sur ces interventions et les réactions qu'elles inspirent. Nous excluons donc de notre analyse les séquences « rubriques » de l'émission (football, jeux...) ainsi que les coupures musicales et publicitaires.

Soit un auditeur exposant un problème à l'antenne. Nous répertorions les réponses apportées par l'équipe et les auditeurs, ce que nous appelons la skysolidarité (cf annexe).

Le tableau de prise de note que je tiens quotidiennement à jour depuis le mois de septembre 2004 (cf annexe) rend compte de chacune de ces interventions, répertorie sa thématique, un court intitulé du problème de l'auditeur, ainsi que les

principales réactions de l'équipe de l'émission et des auditeurs qui passent à l'antenne.

Ce tableau n'est qu'une prise de note, très personnelle, qui a pour principal mérite de recenser et de résumer.

Il n'exprime en aucun cas une synthèse de la skysolidarité, il doit seulement être considéré comme référent à des séquences à re-écouter, selon ce que le curieux voudra chercher, peut-être guidé, interpellé, orienté par le recensement de ces séquences.

J'ai rendu quelques rares notes et rapports à Skyrock, à propos de thématiques particulières, pour répondre à des alertes ponctuelles... Il n'a donc jamais été que très rarement question que je travaille cette prise de note et je crois que ces tableaux que je rends chaque mois à la station n'ont d'autre valeur que ce que serait un conducteur complété en cours d'émission. Néanmoins, en disposant à ma guise pour d'éventuelles recherches, j'ai constaté sa préciosité lorsque j'ai envisagé de rendre utile pour des recherches des mois (des années même) de travail à écouter Radio libre. Peu à peu, il s'avère possible de regrouper des thèmes, en trouver une classification, créer un agencement significatif des logiques d'interactions.

Classification des interventions dans Radio libre

Il serait souhaitable, pour une première appréhension scientifique du contenu de l'émission Radio libre, d'effectuer une classification.

La subjectivité du chercheur peut lui faire envisager de nombreuses façons d ifférentes cette catégorisation.

L'analyse de contenu doit toutefois obéir à des règles. Comme le définit Laurence Bardin, l'analyse de contenu répond à un désir de rigueur et un besoin de

découvrir1. L'analyse quantitative/catégorielle contre intuition nous permettra, dans un premier temps, de traiter le tableau de prise de note de chaque séquence de l'émission concernant un sujet (cf. annexe). Nous ferons ainsi apparaître, par un enregistrement systématique des séquences, un catalogue qui nous permettra de trouver une logique de classement catégoriel et pourrons définir un corpus plus restreint selon des termes de pertinence, de légitimité et de représentativité de notre sujet.

Nous nous référerons donc dans un premier temps à l'enregistrement de toutes les séquences concernant les problèmes des auditeurs dans Radio libre. Puis, après en avoir dégagé des statistiques, nous concentrerons notre corpus sur notre sujet, qu'il nous faut bien commencer par définir.

Une définition de l'intolérance comme sujet

Tout d'abord, pourquoi s'intéresser à l'intolérance comme thématique d'entrée pour questionner la solidarité qui s'organiserait dans l'émission Radio libre ?

S'il s'avère, à la première écoute de l'ensemble des émissions d'une saison que la promesse de solidarité avec les auditeurs semble respectée (parfois très concrètement, en proposant, par exemple, un abri à un auditeur qui s'est retrouvé, pour une raison ou une autre, à la rue), comment en découvrir le fonctionnement, les valeurs, en évaluer le sérieux, en révéler la fiabilité du discours...

Certains problèmes d'auditeurs s'avèrent objectivement plus grave que d'autres, lorsque par exemple il s'agit de certains cas de maternité non souhaitée, de problèmes de justice, de violence, de santé... mais comment leur trouver un trait commun, une cohérence à étudier ? Le degré de gravité d'un même thème (la contraception par exemple) peut être plus ou moins lourd ; la variété des thèmes

1 Laurence Bardin, L'analyse de contenu, Paris, Puf, 2003, p31.

est très large (du problème de couple, de première fois, à la santé, l'école... toute la vie sociale d'un jeune public en définitive).

En réfléchissant à la façon d'interroger l'énorme corpus dont je disposais, j'ai pensé tout d'abord nécessaire de dresser une classification des sujets pour ensuite en dégager les questionnements qui permettraient de trouver une entrée pertinente pour le travail de ce mémoire.

Le regroupement des sujets par thème ne s'avère pas globalement pertinent. Les contraintes de l'analyse de contenu visent notamment à rassembler les données en de grands groupes homogènes sans laisser d'orphelins. A classer par thèmes (par exemple « santé », « justice », « sexe », « examens », « amour », « couple », « maternité », « dispute », « adultère »...), il y aurait soit trop de thèmes orphelins, soit trop d'approximation dans les regroupements (les amours et le couple, le sexe et l'amour ou le sexe et la contraception...) Et quid des sujets multiples ?

S'il apparaît globalement que les sujets environnent souvent l'amour et ses interrogations, la jungle des thématiques que ces questionnements arrosent est, à la lecture des intitulés des sujets (colonne 5 de l'annexe), bien trop vaste et riche pour pouvoir définir des catégories pertinentes par thèmes.

Le schéma d'une autre réflexion est nécessaire pour envisager des questionnements plus clairement, plus sereinement, avec fiabilité et pertinence.

Comme nous pouvons le constater des intitulés des problèmes, l'auditeur est toujours placé en tant qu'individu au centre d'une galaxie d'interlocuteurs. La vision que nous pouvons adopter, en hypothèse, pour appréhender ces recherches découle de ce simple constat. En voici le schéma qui veut présenter l'individu auditeur appelant au centre, tout en présentant une globalité simple des sujets abordés dans l'émission.

(Voir schéma 1 page suivante)

SCHEMA 1 / l'auditeur-individu au centre d'une galaxie d'acteurs sociaux

Administrations

Famille

(Ecole, police, entreprise...)

Amitiés

Individu

Amours

Les quatre groupes d'agents sociaux ici distingués entrent tour à tour, ou parfois ensemble en relation avec l'individu (l'auditeur). On peut ainsi se figurer chacun des sujets pour lesquels ce dernier en appelle à la solidarité à l'antenne comme une rupture dans le contrat social adopté implicitement par l'individu.

Quelle solidarité ? Une communauté d'auditeurs et des animateurs plus expérimentés possèdent des réponses à ces ruptures vécues comme des crises par l'auditeur appelant. On téléphone au standard de Skyrock pour y faire appel. Moins isolé, on en attend des réponses qui pourraient aider à faire en sorte de rétablir les liens sociaux.

Le choix de cette conception permet donc non seulement la figuration d'un système global clair, mais propose aussi une vision en relation avec la « vie réelle », au delà du temps de la radio, pour se préoccuper de l'auditeur en tant qu'individu et créer des ponts entre l'analyse du discours et les préoccupations d'une jeunesse dans une société.

Les questions d'identités donneront saveur à cette vision, en développant des figures et en s'interrogant sur leur légitimité et celle de leurs conseils, avis, recommandations, basées pour l'essentiel, nous le verrons, sur les expériences individuelles qui sont partagées dans cette entreprise collective. Une tentative d'entraide que nous avons appelé skysolidarité, empruntant ce terme de l'usage qui en est largement fait dans Radio libre.

Alors pourquoi s'intéresser à l'intolérance comme cela était notre interrogation en début de ce chapitre ?

Parce que l'intolérance en tant qu'angle d'interrogation dans le schéma que nous avons défini peut s'avérer être la mise à l'épreuve la plus périlleuse -et donc révélatrice- pour l'analyse du fonctionnement d'une certaine solidarité.

Quelle(s) intolérance(s) dans l'intervention d'un auditeur qui semble la vivre ? Victime ou -pourquoi pas- bourreau, il ou elle en souffrirait assez pour avoir la démarche de faire appel à l'aide proposée par le dispositif de l'émission Radio libre. Il ne s'agira donc pas de considérer les querelles de couple ou autres sujets dans lesquels un manque de compréhension, de respect ou de tolérance pourrait prendre place, mais bel et bien de considérer les seuls sujets où l'intolérance est la raison de la crise que connaît l'auditeur appelant.

« Les institutions permettaient en principe la discussion et la négociation [... ] Une société globale de plus en plus diversifiée et en même temps de plus en plus condamnée à la solidarité par l'expansion industrielle opte pour une idéologie de la tolérance. Idéologie de la douceur ou idéologie doucereuse ? » questionne Bernard Guillemain dans l'Encyclopedia universalis (édition 2005).

Si l'individu apparaît souvent isolé, la solidarité semble être une valeur dont il a, à tout le moins, parfois besoin.

Les sujets qui nous concerneront et qui feront donc l'objet d'un second corpus sont quelquefois individuels (au sens où ils ne prennent pas une dimension plus

large que celle exposée par l'auditeur. Exemple : « une fille s'incruste dans notre groupe et nous saoule »), et la plupart du temps plus lourds, prenant très souvent une dimension politique. Il s'agit des sujets concernant l'intolérance religieuse, ethnique, le racisme purement et simplement, ou encore l'homophobie.

Quelles seront les réponses des acteurs de la skysolidarité à chacune de ces questions ? Quel discours est construit et comment ? C'est ce que nous verrons.

Quant à pourquoi ne pas se focaliser sur un seul de ces sujets (comme l'homophobie ou le racisme seulement), j'argumenterais qu'outre le peu d'intérêt que je porterai à une étude de genre ou communautaire, le traitement de plusieurs sujets différents permet ici de se focaliser non sur l'un d'entre eux mais sur le fonctionnement de la skysolidarité qui les transcende. Et c'est précisément ici notre propos.

Le corpus peut se réduire autrement.

Analyses quantitatives du premier corpus

Par souci de représentativité, et pour maximiser l'utilité des notes (cf. annexe) à des fins de recherches, nous procèderons tout d'abord à une première étape où nous considérerons l'ensemble des émissions d'une saison entière afin de dégager les statistiques nécessaires à la bonne signification et la pertinence de notre propos.

Nous considérerons donc dans un premier temps la saison 2004/05 pour dégager des statistiques qui situeront notre sujet -l'intolérance face à la skysolidarité dans la globalité de l'émission.

Ce travail permettra notamment de dessiner un squelette des grands axes de l'expression à l'antenne des interventions des auditeurs et d'imaginer une représentation graphique qui figurera le positionnement de l'auditeur-individu

dans la galaxie des rapports sociaux qu'on le voit entretenir selon les thèmes récurrents à l'antenne.

Nous justifierons la pertinence de notre sujet dans -ou plutôt selon- ce schéma, en situant ses champs d'action.

L'annexe recense les thèmes abordés par les auditeurs dans l'émission Radio libre, soit les soucis auxquels ils sont confrontés, et résume les réponses apportées par l'équipe et les auditeurs eux-mêmes.

Elle se lit comme suit :

- La première colonne date le jour de diffusion ;

- la seconde et la troisième les heures de début et de fin de la séquence (le traitement du problème de l'auditeur) ;

- la quatrième jette une idée large de la thématique (sans ambition catégorielle dans sa rédaction a priori) ;

- la cinquième libelle un intitulé du problème de l'auditeur ;

- la sixième énumère les principales interventions de l'équipe de l'émission pour résoudre le problème de l'auditeur primo appelant ;

- la septième résume les principales interventions des auditeurs à propos du problème de l'auditeur primo appelant.

Un second corpus sera restreint à une période plus courte et à une sélection de séquences concernant notre sujet. Cette sélection se fera sur des critères de représentativité selon nos statistiques ainsi que, qualitativement, selon des critères d'appréciation de l'importance du traitement du problème de l'auditeur. C'est de ce corpus restreint que nous allons analyser le contenu et sur lequel il va s'agir de théoriser sur le fonctionnement de l'émission.

Premiers traitements : contextualisation de notre sujet

D'après les notes prises sur le conducteur des thématiques de la skysolidarité, sur l'année 2004/2005, nous pouvons relever le traitement de 798 cas. 29 cas ont pour sujet l'intolérance (tableau 1).

Si nous réduisons notre corpus à la période septembre/décembre 2004, nous dénombrons 326 cas traités et 12 thématiques ayant pour sujet l'intolérance.

La proportion est respectée (environ 4% de l'ensemble des cas traités dans l'année sur la période septembre/décembre 2004) et le tableau ci-après nous apprend que la variété des cas recensés s'agissant des sujets qui nous intéressent reste représentative si l'on se limite à travailler sur le corpus restreint de septembre à décembre 2004.

Le tableau qui suit, mieux que de longues explications, donne une vision générale du sujet « intolérance » dans l'émission sur la saison 2004/05 et répertorie leurs intitulés.

(Voir tableau 1 page suivante)

TABLEAU 1 / Occurrences mensuelles et intitulés des sujets " intolérance »1

Exemple de lecture : " Au mois de septembre 2004, 2 sujets sur 70 portaient sur l'intolérance : `'mon père n'aime pas mon copain parce qu'il est noir'' et `'mes parents ref usent mon homosexualité et veulent que je devienne hétérosexuel'' ».

Mois

 
 
 
 

Intitulés des sujets " intolérance »

(d'après les libellés de la prise de note en annexe)

Septembre 2004

 

70

 

2

" Mon père n'aime pas mon copain car il est noir »

" Mes parents refusent mon homosexualité et veulent que je devienne hétérosexuel »

Octobre 2004

 

79

 

4

" Je suis handicapé, je ne comprends pas que l'on puisse m'aimer »

" Je suis moqué pour mon look banlieue et ma petite taille » " La famille de mon copain ne m'accepte pas car je le vois chez moi » (motif religieux, Islam)

" Je suis homosexuel, mes parents sont homophobes »

Novembre 2004

 

1 02

 

4

" Les parents n'acceptent pas le petit ami maghrébin » " Vexé que ce soit un transsexuel, j'ai été violent »

" Je suis tombé amoureux de ma cousine, problème pour la famille »

" Une fille s'incruste dans notre groupe et nous saoule »

Dé cembre 2004

 

75

 

2

" Ma famille (musulmane) n'accepte pas que je sois enceinte, je me retrouve à la rue »

" Ma mère ne supporte pas que je sorte avec un Kabyle »

Janvier 2005

 

99

 

3

" Ma famille est gênée que je sorte avec ma cousine éloignée »

" Bisexuelle, j'ai tenté des caresses sur ma meilleure amie, qui n'a pas supporté »

" Mon lycée (catholique) m'a réprimé pour avoir un CD de Marilyn Manson »

Fé vrier 2005

 

81

 

3

" Ma copine est retenue par sa famille musulmane qui me rejette et qui a trouvé une lettre de moi »

" Mon prof de philosophie me saque après que je suis sorti avec sa fille »

" Mes parents ne me laissent pas sortir »

Mars 2005

 

87

 

3

" J'ai 18 ans, lui 43, comment annoncer à ma mère que nous allons vivre ensemble ? »

" J'ai fait mon coming-out, j'aimerais que mon mec le fasse aussi »

" Le mec de mon meilleur ami serait écarté de la gendarmerie à cause de son homosexualité »

Avril 2005

 

64

 

2

" Je n'aime pas que mon pote s'effémine et se mette à me draguer »

" La mère de ma copine ne veut plus que je la vois depuis que sa petite soeur s'est jetée sur moi »

Mai 2005

 

79

 

5

" Mes parents musulmans n'accepteront jamais mon amour pour un chrétien »

" J'ai dormi avec mon pote homo qui m'a dit que, saouls, nous avions fait l'amour »

" Mon père n'accepte pas mon homosexualité »

" Jalouse de moi, la mère de mon ex m'insulte, elle l'a pris en otage en Algérie en prenant ses papiers »

" Le père de ma copine ne m'accepte pas »

Juin 2005

 

62

 

1

" Ma famille n'aime pas ma copine »

Saison 2004/05

=

798

=

29

 

1 Les lignes bleutées délimitent ce qui sera notre corpus restreint

Nous retenons donc, à cette étape de l'étude, les intitulés suivants, entendus sur la période septembre/décembre 2004, qui apparaissent en surbrillance dans le tableau 1 :

« Mon père n'aime pas mon copain car il est noir »

« Mes parents refusent mon homosexualité et veulent que je devienne hétérosexuel »

« Je suis handicapé, je ne comprends pas que l'on puisse m'aimer » « Je suis moqué pour mon look banlieue et ma petite taille »

« La famille de mon copain ne m'accepte pas car je le vois chez moi » (motif religieux, Islam)

« Je suis homosexuel, mes parents sont homophobes »

« Les parents n'acceptent pas le petit ami maghrébin »

« Vexé que ce soit un transsexuel, j'ai été violent »

« Je suis tombé amoureux de ma cousine, problème pour la famille » « Une fille s'incruste dans notre groupe et nous saoule »

« Ma famille (musulmane) n'accepte pas que je sois enceinte, je me retrouve à la rue »

« Ma mère ne supporte pas que je sorte avec un Kabyle »

Appliquée à notre schéma 1, cette sélection peut révéler la place de chaque acteur social en tant que vecteur d'intolérance. En répertoriant pour chacun d'entre eux une occurrence à chaque implication, on obtient les résultats suivants :

(Voir schéma 2 page suivante)

SCHEMA 2 / dispersion, par acteur social, de l'origine des intolérance ressenties par les auditeurs, dans notre corpus restreint (septembre/décembre 2004)

Exemple de lecture : « Dans notre corpus restreint, la famille est l'origine la plus fréquente de l'intolérance ressentie par les auditeurs (9 occurrences) ».

Administrations

(Ecole, police, entreprise...)

0

Amitiés
2

Individu
2

Amours
0

Famille
8

Ce schéma a pour principal mérite de situer les acteurs au départ du sentiment d'intolérance de l'auditeur. Ainsi, on voit que, dans notre corpus, la famille est le lieu où l'auditeur est le plus victime d'intolérance.

D'autres catégorisations de cette sélection sont possibles. Ainsi, on peut, par exemple, opérer un enregistrement par thèmes selon un classement par « familles », ou types d'intolérance. Dans ce cas, nous relèverons l'apparition évidente de catégories importantes :

1/ racisme

? « Mon père n'aime pas mon copain car il est noir »

? « Les parents n'acceptent pas le petit ami maghrébin »

? « Ma mère ne supporte pas que je sorte avec un Kabyle »

2/ homophobie

> « Mes parents refusent mon homosexualité et veulent que je devienne hétérosexuel »

> « Je suis homosexuel, mes parents sont homophobes »

> et par proximité « vexé que ce soit un transsexuel, j'ai été violent »

3/ intolérance du fait de la religion, de la tradition

> « La famille de mon copain ne m'accepte pas car je le vois chez moi » (motif religieux, Islam)

> « Ma famille (musulmane) n'accepte pas que je sois enceinte, je me retrouve à la rue »

Selon les principes d'exhaustivité exposés par Laurence Bardin1, nous nous trouvons, dans ce cas avec une case « divers », où figurent les sujets isolés tels que « Je suis moqué pour mon look et ma petite taille » ; « Une fille s'incruste dans notre groupe et nous saoule » ...

Nous ajouterons toutefois qu'il s'agit là des sujets les moins lourds (voire de sujets accessoires) de notre corpus. La redondance des trois grands types d'intolérance que nous venons de définir signifie donc certainement quelque chose et nous concentrer sur celles-ci rendra notre propos plus pertinent en évitant la dispersion et la généralisation de matières trop différentes. Les graves intolérances que nous retenons ont pour point commun de déclancher des malaises véritablement profonds, portant atteinte à l'identité de l'individu (le plus souvent, nous le verrons, en opposition aux acceptions des parents). En portant notre étude sur ces huit sujets regroupés en trois grandes catégories (racisme, homophobie, intolérance du fait de la religion/tradition) notre analyse trouvera une cohérence.

1 Laurence Bardin, op cit.

Il peut ainsi être intéressant de travailler selon une entrée par « identités ». On notera alors des figures vectrices et/ou destinataires d'intolérance (identités ethnique, religieuse, sexuelle) : la famille semble être la première source de malaise pour certains auditeurs quand à leur identité ou leurs choix amoureux.

Nous analyserons ainsi le discours qui se crée sur l'antenne de Skyrock, chaque soir dans Radio libre, selon les significations des propos traitant le malaise d'auditeurs dont les parents n'acceptent la situation (identité ethnique de l'amoureux(se), identité sexuelle du fils ou de la fille, situation contraire à des principes ou des idées très traditionalistes).

Une séquence atypique, celle où l'auditeur s'expose non en tant que victime mais en agresseur (« vexé que ce soit un transsexuel, j'ai été violent », homophobie, sujet 3) nous permettra d'éprouver notre analyse dans une situation différente - l'auditeur appelant est cette fois-ci l'« intolérant ». Si cette séquence est une intolérance du fait de l'identité sexuelle (même si elle s'éloigne quelque peu de l'intitulé « homophobie »), elle reste à la marge de la cohérence apportée par le reste du corpus, et en restera à la marge. Le processus de construction du discours se différencie de la cohérence formée par les autres. Ce sujet sera complémentaire pour confronter, dans une sorte de situation inverse, les valeurs qui gouvernent le discours.

L'analyse du discours

L'analyse du discours ne résulte pas d'un acte fondateur mais d'une convergence de courants récents et du renouvellement de pratique d'étude de textes -parfois très anciens1. Selon Charaudeau et Maingueneau, c'est dans les années 60 que l'analyse du discours établira son champ, façonnée par des disciplines comme l'ethnographie de la communication, l'ethnométhodologie, l'analyse

1 Patrick Charaudeau et Dominique Maingueneau (dir.), Dictionnaire de l'analyse du discours, Paris, Seuil, 2002, p.41.

conversationnelle et des courants pragmatiques, théories de l'énonciation et linguistique textuelle.

L'analyse du discours opérera des relations entre texte et contexte, en étudiant le langage, l'interaction conversationnelle dans un cadre social particulier. Dominique Maingueneau définit ainsi l'analyse du discours comme discipline proposant de « penser le dispositif d'énonciation qui lie une organisation textuelle et un lieu social déterminés »1. Notre étude visera ainsi à réfléchir sur le discours établi dans Radio libre en conscience du média (une radio jeune « multicolore » très écoutée dans les banlieues), du lieu et du moment d'écoute de ses auditeurs (le soir, isolé, « sur l'oreiller » selon le terme de Glévarec)2 et des sphères sociales dans lesquelles évoluent ces derniers, en relation avec leurs préoccupations.

Nous allons ainsi porter notre analyse sur le traitement, par la solidarité promise dans Radio libre, de l'intolérance telle que nous l'avons définie précédemment. Il s'agira de regarder comment s'exerce la solidarité à l'antenne, selon des données précises. La retranscription à l'écrit de nombreux passages des 12 sujets que nous avons retenus en sera une base solide. Qu'est-ce qui est dit ? Quel est le ton ? Comment apprécier la réception ? Peut-on trouver des valeurs qui lieraient les auditeurs à l'émission ou plutôt ses animateurs ?

Notre analyse, largement inspirée par les notions théoriques et apportées par le travail d'amont que nous venons d'exposer, proposera dans un premier temps de décortiquer le discours dans les séquences sélectionnées, selon les entrées que nous venons de proposer. Puis, nous regarderons globalement les résultats que nous en aurons ressortis, nous les croiserons, en nous arrêtant notamment sur les rôles de chaque interlocuteur et la pertinence du discours.

1 Dominique Maingueneau, L'analyse du discours, Paris, Hachette, 1997, p.13.

2 Hervé Glévarec, Libre antenne, Paris, Ina-Armand Colin, coll. Médiacultures, 2005, 301 pages.

Nous ne manquerons pas de faire appel aux différents outils des sciences de l'information et de la communication que nous avons rappelés, ainsi que d'autres concepts ou figures que nous jugerons opportuns.

En outre, nous nous attacherons à mettre en perspective nos observations dans les problématiques sociétales dont il sera question.

Seconde Partie

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Ecouter et écrire le discours radiophonique

Analyser des séquences radiophoniques

Il ne faut pas perdre de vue le caractère fondamental de notre corpus : l'oralité. Nous nous intéressons ici à des conversations radiophoniques entre les animateurs d'une émission et certains de ses auditeurs, qui endossent pour l'occasion la responsabilité de co-constructeurs directs du discours élaboré à l'antenne.

L'analyse conversationnelle à laquelle nous allons procéder demande que nous en proposions ici quelques fondements que nous compléterons de caractéristiques de notre approche pratique.

L'analyse conversationnelle

Les informations échangées dans la conversation sont, pour Christian Baylon1, de trois natures :

- cognitive (contenu des signes linguistiques échangés) ;

- indicielle (qui portent sur le locuteur dans le but de définir et de contrôler le rôle qu'il joue durant la conversation) ;

- injonctive (échangée par les participants pour faire progresser la conversation, varier les locuteurs, aboutir à un résultat).

Les moyens de communication de la conversation orale (ou comportements) sont à considérer dans leur ensemble. Appliqué à notre cas, nous distinguerons ainsi :

- les moyens linguistiques à proprement parler (manifestation vocale : expressions singulières...) ;

1 Christian Baylon, Sociolinguistique, société, langue et discours, Paris, Nathan Université, 1996, p. 201 et suivantes.

- les moyens paralinguistiques (non-verbal : ton de la voix, intonation, rythme... plus ou moins conscients, compris par les membres d'une même culture1, et, il est vrai, peu perceptibles dans une retranscription écrite) ;

- les moyens extralinguistiques (qui échappent au contrôle du locuteur dans la conversation (ici nécessairement vocal : la qualité de la voix, apporte des renseignements biologiques, psychologiques ou sociaux sur le locuteur).

Nous devrons garder à l'esprit le contexte de la conversation, soit ce que nous avons défini comme une libre antenne sur une radio jeune de culture multicolore, largement écoutée dans les grandes villes et leurs périphéries. Un contexte qui est aussi du côté de l'auditeur lui-même (potentiellement participant) celui qu'a peint Hervé Glévarec2, une radio écoutée essentiellement seul, sur l'oreiller, par un auditorat en demande de partage des expériences adolescentes.

La conversation est également à mettre en relation avec un projet d'interaction sociale. Outre l'évidente et nécessaire coordination de la langue, George Herbert Mead3 pointe du doigt que l'identité est construite par et à travers l'interaction sociale. Plus que l'influence du langage, il s'agit donc aussi de celle des codes et des comportements. Un concept d'interaction que nous retrouverons chez Goffman, il n'est pas de « moi » mais des sois différents selon nos interactions avec nos amis, y compris ceux qui sont de passage, à la radio. L'image que l'on (se) donne, le comportement que l'on adopte, les codes que nous utilisons (syntaxiques, lexicaux, intonatifs...) dépendent des interactions que nous formons avec l'ensemble des interlocuteurs avec qui l'on co-construit non seulement un discours, mais aussi sa propre opinion, son imaginaire, son personnage, sa personnalité, son identité.

1 Christian Baylon, op. cit., p. 203

2 Hervé Glévarec, op cit, 2005.

3 George Herbert, Mead, Mind, self and society, University of Chicago press, 1962.

Ecrire l'oral

Partant de ces observations et de nos premières analyses, comment envisager une analyse conversationnelle ?

A proprement parler, les retranscriptions que nous allons présenter, n'ont qu'une représentativité limitée de la conversation radiophonique. Elle est dépouillée des signes non verbaux, même si nous tacherons d'en laisser apparaître certains. Ainsi, des didascalies peuvent donner un indice du ton de la... réplique. Ailleurs, des points de suspension, lorsqu'ils ne sont pas entre crochets, ne signifient pas une coupure dans la retranscription mais marquent les hésitations présentes dans l'oralité originelle. En outre, les « euh », « t'as vu », « tu sais », « tu vois » ou autres coupures de parole matérialisées par les points de suspension d'une phrase non finie sont des marqueurs d'un langage oral exprimant ses codes, ses significations sociales, les propriétés de l'espace radiophonique dans lequel il évolue. Ils ont une fonction phatique, ils servent à entretenir le contact interlocutif, selon Jakobson.

Le passage de l'oral à l'écrit, s'il est commode, demeure toujours approximatif et suppose parfois des subjectivités infidèles tant le projet de retranscrire les signes non verbaux en ponctuation est ardu, et lui-même empreint de la subjectivité et de la capacité du dactylographe. Nous n'abuserons donc pas avec certitude de la perception des tonalités dans la conversation et le lecteur pourra confronter à ce propos le regard de l'auteur avec le sien à l'écoute des bandes (disons plutôt des mp3) des séquences qui nous intéressent ici.

Enfin, combinée aux différentes sciences de l'information et de la communication que nous avons appréhendées en première partie, l'ethnométhodologie sera un dernier allié à superposer sur notre approche. Notre projet est d'accorder un intérêt à la construction locale du discours, sur l'antenne que nous avons définie, dans un cadre d'échange singulier, pour comprendre pas à pas, les détails constitutifs de la conversation, intentions des locuteurs et normes sociales, pour

comprendre la distribution de la parole, les statuts des co-constructeurs, la pertinence du discours ainsi élaboré.

Notre propos portant sur l'analyse de la skysolidarité en tant que tel, nous nous emploierons à distinguer des phases dans la conversation, afin d'en tirer quelques conclusions. Nous porterons ensuite notre regard sur les échanges conversationnels pour en décortiquer le discours notamment afin de déterminer les valeurs qui gouvernent cette skysolidarité.

Le processus de skysolidarité

Vouloir comprendre le fonctionnement d'un processus discursif nécessite pour notre tâche une retranscription écrite des séquences sur lesquelles nous voulons travailler.

Ce travail, s'il est fastidieux, permettra néanmoins, à l'inverse des séquences audio, un témoignage de l'interrogation que nous voulons faire du corpus. Il sera un outil plus maniable pour le travail d'étude, de prise de note, et manié pour laisser apparaître les traces d'une première analyse (où nous noterons au fur et à mesure nos observations de découpage des grandes phases du processus, par exemple : « exposé et évaluation du problème de l'auditeur », « témoignage d'un auditeur »...) ; et qui, dans un second temps, servira de corpus référentiel complémentaire, plus commode pour l'occurrence, que les bandes son.

Il va s'agir de retranscrire à l'écrit les conversations des séquences de notre corpus. Nous procèderons en nommant tout d'abord chacune des séquences et en référençant son jour et son heure de diffusion. Puis, nous retranscrirons le dialogue à proprement parler en précédant chaque intervention du nom de son auteur. Certains passages, hors sujets, seront coupés, matérialisés par des points de suspension ou une brève exposition de ce qui vient couper la séquence, toujours entre crochets. L'usage des points de suspension, sans crochets, dans la retranscription de la conversation ne signifie ainsi pas une

interruption mais veut matérialiser une intonation de la voix (hésitation...) ou le fait que la parole a été coupée par l'interlocuteur suivant. D'autres signes de l'oralité seront matérialisés, notamment par des didascalies, entre parenthèses après le nom de l'interlocuteur, par exemple pour exprimer son ton ou son attitude. Le souhait de ces procédés est de conserver une proximité des plus fidèles avec la conversation et son caractère oral dont tous les paramètres ne peuvent pas apparaître à l'écrit. Nous devrons ainsi parfois avoir un second recours à l'écoute des bandes son pour préciser un propos. Par ailleurs, lorsque besoin sera, nous pourrons aussi contextualiser les séquences en quelques lignes.

Afin de rendre possible la citation et la référence, nous aurons ainsi pris soin de numéroter chaque intervention de chaque séquence, afin de pouvoir y faire référence selon le découpage à suivre (par exemple : « à l'intervention 108 du cas 1 des sujets concernant le racisme, nous pouvons noter... »). La référence citationnelle oblige à cet exercice af in de rendre compte de façon rigoureuse et vérifiable de l'exactitude du propos qui suivra dans l'étude. La numérotation s'appliquera pour chaque intervention et non chaque ligne pour rendre plus pertinents et commodes l'usage et la lecture de la citation.

Ainsi, voici ces retranscriptions, pour les trois catégories des huit sujets de notre corpus, séquences après séquences, annotées de titres (en majuscule et en gras) pour mettre en évidence les grandes phases communes à chacune d'elles. Leurs libellés sont ceux-ci :

- exposé et évaluation du problème de l'auditeur (ou de l'auditrice) appelant ;

- témoignage d'un, d'une ou de plusieurs membres de l'équipe ;

- témoignage fictionnel1 d'un, d'une ou de plusieurs membres de l'équipe ;

- témoignages d'auditeurs ou d'auditrices par messages (SMS et internet) et points de vue de l'équipe ;

1 Par << fictionnel >>, on entendra << qui s'imagine en situation sans l'avoir connue >>.

- témoignages d'auditeurs ou d'auditrices à l'antenne1 et points de vue de l'équipe ;

- conclusions (et éventuellement perspectives)

Chaque intervention a été numérotée (en marge gauche) de 1 à XXX pour chacune des séquences. En repartant de zéro à chaque séquence pour rendre compte du volume de chacune d'elle, respecter leurs caractères propres et permettre leur utilisation individuelle.

Nous commencerons par les séquences ayant trait au racisme, puis à l'homophobie et enfin, les intolérances du fait de la religion/tradition. Cette disposition permet de respecter l'ordre de la dominance de ces catégories, en commençant par la plus importante (3 sujets).

1 C'est à dire par téléphone, en direct.

Retranscriptions des séquences des trois grandes catégories du corpus

Le racisme

Trois sujets de notre corpus de huit concernent directement la forme la plus flagrante d'intolérance : le racisme. Comme nous le ferons pour l'homophobie et l'intolérance du fait de la religion/tradition, nous allons analyser le dialogue diffusé à l'antenne d'après la retranscription des séquences.

Racisme / cas N°1 / 03 septembre 2004 « Mon père n'aime pas mon copain car il est noir » / séquence diffusée entre 22h26 et 23h26 :

EXPOSE ET EVALUATION DU PROBLEME DE L'AUDITRICE APPELLANT

1. Difool : Alors, qu'est-ce qui t'arrive, Séréna, toi ?

2. Séréna : Ben, en fait, j'ai un gros souci avec mon père...

3. Difool : Hum.

4. Séréna : ...entre mon père et mon copain, en fait.

5. Difool : Ah, ils s'aiment pas ?

6. Séréna : Ben, c'est que mon copain, il est renoi, tu vois...

7. Difool (imitant le père) : << Oui, j'aime pas, oui, alors là... >>

8. Marie (imitant le père) : << Ah, bah il est bronzé, hein... ah, bah oui, il est trop cramé, hein... >>

9. Difool : C'est ça, non ? Il est raciste, un peu, ton père ?

10. Séréna : C'est un peu ça, ouais.

11. Difool (dégoût) : Oh...

12. Séréna : Je suis désolé, je parle doucement, là, parce que il y a ma belle-mère à côté, là, et si elle m' entend...

13. Difool : Et elle, elle en pense quoi, la belle-mère ?

14. Séréna : Ben, c'est un peu le même genre, en fait.

15. Difool : Mais pourquoi ils réagissent comme ça ? Parce qu'on est en 2004, ça va, tu vois...

16. Séréna : J'en ai absolument aucune idée, quoi, je sais pas, j'ai appris ça depuis que je sortais avec lui, tu vois...

17. Difool : Mais t'avais jamais remarqué avant qu'ils étaient un peu ?

18. Séréna : Mais non, j'avais jamais remarqué avant, c'est ça le pire.

19. Difool : Ah oui, ils avaient pas des discours un peu, genre tu vois ils regardent la télé...

20. Séréna : Mais non, pas du tout, c'est ça le pire, jamais.

21. Marie : Mais comment t'es sûre que c'est sa couleur et que c'est pas par exemple ce qu'il fait, genre il fous rien, il aime pas son attitude, ou tu vois...

22. Difool : Oui ?

23. Séréna : Non, je pense pas tu vois parce que...

24. Marie : Non mais tu sais pas, il te l'as pas dit directement, donc tu sais pas, t'es pas sûre que ce soit ça. 25. Séréna : Non, il me l'a pas dit directement, t'as vu, mais franchement, tu vois, j'te dis, bon, mon mec il est venu manger à la maison. Et euh... et mon père il s'est cassé au milieu du repas, tu vois.

26. Marie : Ah, sympa... (rires)

27. Séréna : Non, mais tu vois...

28. Romano (ironie) : Ton copain, il a dû être bien à l'aise...

29. Difool (ironie) : Ah, oui, génial... tu vas manger chez ta meuf, t'as le père qui se barre sans rien dire (rires de Marie).

30. Marie : C'est horrible !

31. Séréna : J'étais trop mal à l'aise et puis après, mon mec, il savait pas trop où se mettre, quoi.

32. Romano : Bah, tu m'étonnes, moi je serai parti, je pense.

33. Marie : Ohhh...

34. Difool : Non, et puis là, Séréna elle fait une déprime, quoi... le père qui se barre, le copain qui part en courant, tu reste toute seule à table... (imitant l'auditrice) << Bah oui, bah je vais manger le gigot >>.

35. Romano : Voilà, le bon repas.

36. Séréna : Non mais c'était un grand moment de solitude, là, quand-même.

37. Difool : Mais elle a peut être raison, la Marie, tu vois, s'il a jamais eu de propos...

38. Séréna : Ben, en fait, il m'a... en fait il est parti, et il est revenu le lendemain matin et j 'ai piqué ma crise, quoi.

39. Difool : Tu leur as dit ?

40. Séréna : Je leur ai dit, franchement, c'était trop important pour moi, qu'est-ce que t'as foutu, tout ça... Il m' a fait << franchement, j 'ai vu sa tête et j 'avais pas envie de le connaître et tout >>. Je lui fais << ça veut dire quoi ça ? >>, et voilà...

41. Marie : Il se sape comment ton mec, déjà ?

42. Séréna : Ben, c'est genre, je sais pas, il était habillé classe, là, en plus, il avait un jean...

43. Difool (imitant le père) : << Oui, mais je veux qu'il vienne en costume >> (rires Marie). << Oui, quand il vient à ma table, en costume >>.

44. Romano (imitant le père) : << Il n'avait pas la cravate ! >>

45. Marie : Parce que tu vois, ça peut être aussi la dégaine, quoi, s'il se tenait mal ou machin... ça peut être ça aussi, quoi.

46. Séréna : Non, non, pas du tout, au contraire, il était hyper clean, tu vois, franchement il a bien assuré.

47. Romano : Ouais, et puis franchement, la première fois que tu vas dîner chez les parents de ta meuf, t'essaies de pas roter à table, des trucs comme ça.

TEMOIGNAGE D'UN MEMBRE DE L'EQUIPE

48. Difool (à Romano) : Même toi ?

49. Romano : Bah j'essaie de me retenir...

50. Difool : Est-ce que tu as déjà été mal à l'aise quand tu étais en repas avec...

51. Marie : Tes beaux-parents ?

52. Difool : Ouais, enfin ceux-ci ou d'autres avant, hein ?

53. Romano : Mal à l'aise ? Non, bah, non, hein... Moi ça se passait...

54. Difool : Même avec tes ex ?

55. Romano : Bah si, moi ça se passait, bon (rires Marie)

56. Difool : Romano a une vie sentimentale un petit peu agitée, il a connu des personnes diverses et variées, je vous parlais régulièrement de cette Marseillaise qu'il a rencontrée...

57. Romano : Ouais, mais c'est pas... Les parents, je les ai pas connus.

58. Marie : T'as pas eu le temps ?

59. Romano : J'ai pas eu le temps. Non mais par contre, je suis tombé avec une meuf, et bon, la mère, elle avait des problèmes psychologiques aggravés (rires Marie) et par contre par moments j'assistais aux scènes de ménage des parents, c'est horrible, tu vois, moi je me barrais de table...

60. Difool : Ah, ouis, une scène de ménage des beaux parents...

61. Séréna : Ah, c'est chaud...

62. Romano : [Il raconte l'anecdote, sa gêne]

63. Séréna : Moi je m'imaginais à la place de mon mec, il a dû se sentir trop mal. On n'en a pas trop parlé après, en fait...

64. Romano : Non, mais il a dû être mal aussi pour toi, il a dû se dire << ouais, vas-y... >>

65. Séréna : J'avais trop honte, franchement j `avais trop honte, je me suis sentie trop mal, c'était horrible, c'était vraiment horrible. En plus c'était vachement important pour moi...

66. Difool : Bah oui ! C'est la première fois que tu présentais ton mec que t'aimes à tes parents que t'aimes aussi, donc...

67. Séréna : Mais ouais ! voilà.

68. Romano : Et le daron, il se barre (imitant le père) << oui, finalement, j'ai plus faim >> (rires)

69. Séréna : Surtout qu'il s'est cassé comme ça, quoi, sans... le dire, quoi.

TEMOIGNAGES D'AUDITEURS PAR MESSAGES (SMS ET INTERNET) ET POINTS DE VUE DE L'EQUIPE

70. Difool : Alors, il y a des messages, pour toi : Titus qui dit << mon père est pareil, rappelez-moi >> on va te rappeler, Titus. Euh... sinon, on a Yann qui nous dit << dis à ton père que c'est un bâtard >> (rires) on peut pas dire ça à son père il va mal le prendre.

71. Romano : Oui, et puis ça va pas arranger la situation.

72. Séréna : Ca va pas m'aider.

73. Difool : Je pense que ça peut même empirer, là, un petit peu.

74. Séréna : Oui, il y a des chances, là, j'avoue...

75. Difool : Sinon, OCB59, là 19 ans, dans le Nord, qui dit << il faut en parler avec tes parents, tranquillement, et il te comprendront >>. Non, t'es moins convaincue, Séréna...

76. Séréna : Non, là, franchement pas du tout !

77. Romano : Mais t'es persuadée que c'est parce qu'il est black, parce que tu vois...

78. Séréna : Ouais, je vois vraiment pas ce que ça pourrait être d'autre, en fait.

79. Romano : A la limite, demandes-lui...

80. Difool : << T'es raciste >>...

81. Séréna : Oh, là...

82. Difool : Tu vas voir sa réaction au moins, voilà. Si tu penses que c'est ça, ça veut dire qu'il y a une pointe de racisme quand même, quand tu réagis comme ça.

83. Séréna : Ouais, ouais...

84. Difool : Pose-lui la question, tu verras : << Le Pen, c'est ton pote ? >> (rires)

85. Séréna : Non, non, mais mon père il le connaissait pas mon copain, c'était un bon pote à moi avant mais...

86. Romano : Tu leur en avais parlé avant que tu sortais avec lui, tout ça...

87. Séréna : Ouais, ouais, je leur en avais parlé, tu vois, mais...

88. Romano : Et à ce moment là, ils avaient rien dit ?

89. Séréna : Non, ils avaient rien dit parce qu'ils savaient pas qu'il était black.

90. Difool : Ah ouais, donc toi tu penses vraiment que c'est quand ils l'ont vu que ça a posé un problème. Eh bien c'est bien triste, ça. << Alors moi c'était pareil, en plus le père était gendarme... >>, c'est quelqu'un qui a vécu la situation de ton mec, là, c'est Puccini qui vient de nous laisser un message. Bon si ça vous est déjà arrivé, pour des raisons...

91. Séréna : Franchement, aidez-moi ! C'est tendu en ce moment.

92. Difool : ...pour n'importe quelle raison [...] si votre copine vous a présenté à ses parents et que ça s'est passé moyen

93. Romano : Voire mal.

94. Difool : Voire très mal.

95. Séréna : Je fais appel à tous les auditeurs parce qu'il faut vraiment que je trouve une solution...

96. Difool : Et ton gars, comment il a réagi, parce que pour lui, ça devait être abominable ?

97. Séréna : Ouais... franchement ouais, mais on en a pas trop parlé...

98. Romano : Mais il veut plus remettre les pieds chez toi, non ?

99. Séréna : Ben non, là c'est...

100. Difool : Il a raison.

101. Romano : Oui, c'est normal aussi.

102. Séréna : Il a plus trop envie, quoi.

103. Difool : Oui, on va éviter. Et du côté de ses parents à lui, il n'y a pas de soucis ?

104. Séréna : Ben, en fait, je les ai pas encore rencontrés, eux.

105. Difool : Ah !

106. Séréna : Mais apparemment, il n'y a pas de problème. Il leur a dit que j'étais pas black, et apparemment, il n'y a pas de soucis.

107. Difool : Tiens, regarde, il y a Ganéa, 16 ans du côté de Rennes, qui nous dit << mon père est raciste, j'ai été obligé de quitter ma copine sinon il me foutait à la porte >>

108. Séréna : Oh, c'est horrible...

109. Difool : Dans ces cas-là, tu as qu'à sortir avec la meuf et tu lui dis rien.

1 10. Séréna : Ouais, mais franchement, t'as la pression derrière.

111. Difool : Oui, mais bon, tu vis ta vie.

1 12. Séréna : Ah ouais ouais ouais, mais quand tu es encore chez tes parents, je peux te dire, c'est chaud, quoi, moi je vois franchement, avec mes parents, c'est tendu, quoi, c'est chaud, et choisir entre son mec et ses parents, c'est...

1 13. Difool : Non mais pour des raisons comme ça, tu vois, tu as aussi le droit de faire la gueule à ton père, parce que c'est vraiment... si c'est la réaction que tu imagines...

114. Romano : C'est débile...

1 15. Difool : Même si c'est ton père, c'est mieux pour lui d'être un petit peu plus tolérant parce qu'autrement, il va être malheureux, le gars, là.

116. Séréna : Bah ouais ouais...

1 17. Difool : Et puis il passe à côté de plein de trucs, il se rend pas compte.

118. Séréna : Ouais (rires).

1 19. Difool : Mais c'est vrai, il se prive de plein de trucs, il se prive de potes, de cultures différentes, d'ouverture sur le monde, de...

120. Séréna : Ouais, mais franchement, j'te dis, j'ai toujours pas compris pourquoi il a réagi comme ça, ça m'a... ah, je suis restée sur le cul, là...

121. Difool : << J'ai eu le même problème avec ma copine... >>, ben tu vois, il y en a plein là qui nous ont laissé des messages...

122. Séréna : Je me sens moins seule.

123. Difool : C'est un peu dommage, ce serait mieux que ça arrive un peu moins souvent, mais enfin bon, on va te filer un coup de main. Merci à vous toutes et à vous tous, là, hein, laissez vos numéros, appeleznous, et puis on vous retrouve en direct sur Skyrock. Je vous donne le numéro, hein, si vous découvrez, c'est le 01.53.40.30.20, voilà, et ça marche tous les soirs. << Putain, il se la pète trop son père, de quel droit il fait ça ? >> Chidi, là, qui nous laisse un message de Paris.

[Passage sur l'anecdote sur Romano et son ex marseillaise]

124. Difool : On attend vos témoignages pour filer un coup de main à Séréna...

125. Séréna : Ah, oui, aidez-moi, parce que là... j'ai parlé à trop de gens, j'ai été parler à l'assistante sociale...

126. Difool : Qu'est-ce qu'elle t'as dit, l'assistante sociale ?

127. Séréna : Elle m'a rien dit, franchement, elle m'a pas aidée, elle a servi à rien, elle m'a dit << oui, il faut favoriser le dialogue avec les parents... >> (rires)

128. Romano (ironique) : Ouais, c'est super comme conseil, ça.

129. Difool : C'est ta vie privée, ta vie privée tu la vies, t'es pas obligée de la partager avec tes parents, hein...

130. Séréna : Ouais, c'est sûr, mais c'est mieux, quoi...

131. Difool : Je sais pas si c'est mieux...

132. Séréna : Moi je pense que si...

133. Romano : De toute façon, maintenant, tu l'as présenté...

134. Séréna : Oui, de toute façon, c'est fait. Quoique mon père il le connaît pas très très...

135. Romano : Bah oui, en se barrant au milieu du repas... Mais il se sont même pas parlé, en fait, quoi ?

136. Séréna : Ah, non, ils se sont serrés la main, bonjour, et puis...

137. Romano : Pendant tout le repas, c'était silence, genre t'entends les mouches voler...

138. Séréna : Ouais, en fait je parlais toute seule...

139. Difool (dégoût) : Oh, quelle attitude de con...

140. Romano : Ouais, ouais, débile...

141. Difool : Il faut se mettre à sa place, quand il avait 18 ans et qu'il allait draguer ta mère (rires). Bouges pas. Allez, vous tous en direct, on se passe la pub en speed...

[Coupure publicitaire et musicale]

[Retour antenne, annonce jeu]

142. Difool : Plein de réactions par rapport à toi, Séréna, donc on y revient tout de suite, après les nouvelles footballistiques, bah, écoute, il y a Moïse qui va arriver dans un instant, il y a des messages sur le net de partout, hein, et c'est arrivé à plein de monde ces histoires là, hein ! << Il faut que tu poses des questions piège à ton père pour savoir s'il est raciste >> mais quelles questions, c'est Lasmana qui nous propose cette solution. << Demande à ta mère >>, << Essaie de lui faire connaître ton pote >>, ça va pas être facile s'il se barre à chaque fois, hein... En résumé si vous venez d'arriver, tu as présenté ton copain à tes parents, enfin à ta belle-mère et à ton père, et ton père a eu une réaction bizarre dans le repas, il s'est levé et a disparu.

143. Romano : Voilà et est revenu le lendemain matin.

144. Difool : En faisant la gueule.

145. Romano : Mais vous en avez reparlé depuis de cette affaire, là ?

146. Séréna : Ben non, justement, c'est un peu le sujet tabou en ce moment à la maison.

147. Difool : Et en fait, toi tu penses que c'est parce que ton copain et renoi et que ton père aime pas trop ça, c'est ça ?

148. Séréna : Ouais, mais franchement, j'espère que c'est pas ça, quoi, parce que...

149. Difool : Ca doit être horrible de découvrir ses parents comme ça, hein ?

150. Séréna : Horrible, horrible !

151. Difool : Oui, surtout que toi, tu as pas eu de trucs qui prévenaient...

152. Séréna : Ah, non, pas du tout...

153. Romano : Ouais, jamais de réflexions à la con et tout ça... du genre à la télé (imitant un téléspectateur raciste avec Difool) : << Regardes, ah, mais regarde, on est envahi, hein ! >>.

154. Difool : Il a pas des tracts du Front national à la maison, il a pas...

155. Séréna : Non, non non non non, ça, non. C'est pour ça que ça m'a...

TEMOIGNAGE D'UN MEMBRE DE L'EQUIPE

156. Difool : C'est vrai, c'est bizarre. Bon alors, reste là, Moïse arrive, Momo, tu as quelque chose à dire à ce propos avant de passer aux nouvelles journalistiques ?

157. Momo : Je la soutiens à mort !

158. Séréna : Merci Momo.

159. Difool : Ca t'es déjà arrivé, Momo ?

160. Momo : Moi c'est pire, genre comme t'as dit il y a deux minutes.

161. Difool : Ils disent ça, les parents de ta meuf ?

162. Momo : Ils croient que je m'appelle Maurice, parce que Momo égal Maurice pour lui, quoi.

163. Romano : Oh, Maurice !

164. Difool : Ah ouais...

165. Séréna : Oh, mais quelle horreur !

166. Romano : Ouais, en fait t'es obligé de te cacher, quoi.

167. Difool : Il y a un truc qui est génial dans l'histoire, c'est que la fille est avec toi, c'est plutôt sympa, quoi.

168. Momo : Ca va, je m'entends bien avec elle, quoi, mais en gros, il lui a dit carrément une fois << si tu me ramènes un Arabe, je me suicide >>, en gros.

169. Difool (sur le ton de la blague) : Vas te montrer, Momo : << Ouh-ouh, je suis le copain, c'est moi ! Je m'appelle Mohamed ! >>

170. Momo : Là c'est fini...

171. Difool : Et comme ça, plus de problèmes.

172. Momo : Non sérieux, c'est vraiment casse-couilles de chez casse-couilles.

173. Romano : Et ta copine, en fait elle t'appelle Maurice ?

174. Momo : Ouais, voilà (éclats de rire)

175. Difool : Ah ouais, ça doit être horrible, c'est... ça doit être difficile à vivre. A la limite, quelque part, ça te montre qu'elle t'aime très fort, tout ça...

176. Momo : Ouais, voilà.

[Rubrique football]

TEMOIGNAGES D'AUDITEURS A L'ANTENNE ET POINTS DE VUE DE L'EQUIPE

177. Difool : Bon, allez, on va s'occuper de Séréna, là tout de suite, il y a Moïse qui est avec nous, il est de La Roche-sur-Yon, Salut Moïse.

178. Moïse : Salut Difool, salut toute l'équipe...

179. Difool : Ca va Moïse, bien ?

180. Moïse : Ouais, ça va, tranquille.

181. Difool : Ben écoutes, tranquille aussi, hein. Alors, Moïse, t'appelais pour Séréna.

182. Moïse : Ouais j'appelle pour Séréna, parce qu'il m'est arrivé la même chose...

183. Difool : Bon alors, bouge pas, il y a Sophie aussi, on va la prendre en même temps, comme ça... Sophie, 18 ans t'habites à Chantilly, t'es là Sophie ?

184. Sophie : Oui, je suis là. Salut à tous !

185. Marie, Momo, Romano : Salut !

186. Difool : T'appelles pour Séréna.

187. Sophie : Ouais, j'appelle pour elle parce qu'il m'est arrivé la même chose...

188. Difool : Ben écoutez, c'est triste, mais merci d'appeler pour Séréna. Merci pour tous les messages, regarde, il y a Titou du 94 qui nous fait << mon père est pareil -donc un peu... raciste, on va dire- laisse couler et vis ta vie >>. C'est vrai, t'es pas obligée de partager ça avec tout le monde. << Ton père est raciste, ça craint vraiment, ça doit être dur à vivre >>, << Ou ton père est jaloux ? >> Jaloux de ton mec, il est taré... Alors qu'est-ce qui t'es arrivé Sophie, puisque toi, tu es une fille et que Séréna... aussi.

189. Sophie : Ben, je suis sortie avec un renoi pendant huit mois, au début ça se passait bien, tout ça... et ma mère elle l'a su, bon elle m'a rien dit quoi, et enfin, elle avait plutôt peur de la réaction de mon père en fait quand il allait apprendre que je sortais avec un renoi...

190. Difool : Oui, et elle avait raison, malheureusement.

191. Sophie : Donc voilà, elle a flippé, et puis bon, on en a parlé, tout ça, et je lui ai dit, que bon, pour l'instant, je sors avec lui et si vous êtes pas content, c'est pareil, quoi. Et bon, là, elle l'a pas trop bien pris, mais bon.

192. Difool : Ouais, je trouve que c'est une bonne...

193. Romano : Ouais, c'est pas mal comme réaction.

194. Difool : Ouais, c'est pas mal, ouais.

195. Sophie : Ben voilà, quoi, et après ma relation avec lui, elle a continué, tout ça, et puis mon père, il l'a su peut être deux mois avant que ça se termine avec lui, et puis en clair il m'a dit << écoute, tant mieux, c'est bien pour toi, mais je veux pas en entendre parler, quoi >>...

196. Difool : Rhô !

197. Sophie : Donc voilà, quoi, quand je lui disais << je vais voir mon copain >>, c'était des réflexions du genre << ouais, je t'ai dit de rentrer à 9h, tu rentres à 9h >>...

198. Difool : En fait il faisait tout pour te...

199. Sophie : Ouais, il faisait tout pour me faire chier, donc voilà.

200. Difool : Mais tu lui as dit ouvertement que tu trouvais son attitude un peu... raciste ?

201. Sophie : Ouais, ouais, je lui ai dit.

202. Difool : Et alors, il réagit comment quand tu lui dis ça ?

203. Sophie : Ben, je lui ai dit << je vois pas ce que ça peut te faire, c'est ma vie >> et puis voilà, et si ça allait pas, ça durerait pas depuis huit mois, et il m'a dit << ben ouais, mais bon, c'est comme ça, pas autrement >>. En fait, je crois que c'est plutôt son père, en fait, si... enfin, c'est bien chez les autres, mais chez soi, il vaut mieux pas, quoi.

204. Difool : T'as l'impression que c'est ça, Séréna, toi ?

205. Séréna : Ouais, je pense, parce que moi mon père c'était la même chose quoi, ma cousine elle sortait avec un rebeu, il a rien dit...

206. Romano (imitant le père) : << Ah, oui, ça me dérange pas, tant que c'est pas dans la famille ! >>

207. Difool : Ah, ouais, c'est ça...

208. Séréna : Si c'est sa fille, c'est mort, quoi.

209. Difool : C'est terrible. Et toi, Moïse, ta story, c'est quoi, Moïse ?

210. Moïse : Ben moi, c'est la même, sauf que moi avant, j'avais dit à ma meuf que mes parents étaient trop cools, trop ouverts d'esprit... sincèrement c'est ce que je pensais...

211. Difool : Toi aussi, comme Séréna, tu as été surpris par la réaction de la famille en fait.

212. Moïse : Ah, ouais, mais grave quoi. Mais en fait ça gênait pas ma mère, elle est trop cool, mais c'est mon daron, tu vois, il disait pas un mot...

213. Difool : Eh, ça fait trois fois les darons, quand même, hein...

214. Moïse : non, mais par contre, il est pas sorti de table et tout...

215. Difool : Et ça s'est passé comment, tu sortais avec une nana depuis combien de temps, comment ça s'est passé, raconte-nous un peu ?

216. Moïse : Ben en fait ça faisait pas très longtemps, ça faisait 4 ou 5 mois qu'on était ensemble, je voyais que ça devenait sérieux, donc je me suis dit, voilà, présentation des parents... la totale et tout, et je lui ai dit que mes parents étaient super cools, et mon daron, pas un mot...il faisait la gueule... Et en fait, c'est pas mon daron qui est parti, c'est ma nana qui m'a pris à part et qui m'a dit << voilà, je peux pas rester là... >>

217. Difool : Ah ouais, trop mal à l'aise, mais elle a raison.

218. Moïse : J'avais compris, tu vois... pas de malaise...

219. Difool : Tu devais être super mal à l'aise, toi aussi, non ?

220. Moïse : Bah ouais, surtout qu'en fait après, on s'est embrouillé avec la meuf, parce que elle, elle pensait que j'étais le reflet de mon père, quoi, tu vois...

221. Difool : On n'a pas forcément les mêmes idées que son père, même si on l'aime et tout ça, parfois on n'est pas d'accord.

222. Moïse : Là, franchement, il m'a cassé tout le truc quoi, et ce qui fait que je me suis embrouillé avec la meuf, et je me suis embrouillé avec mon daron, et puis... voilà, je vois plus mon daron et je vois plus ma meuf, quoi.

223. Difool : Ah ouais, donc en fait toi tu t'es... toi ça t'as foutu la vie en l'air. C'est débile ton père, comme réaction, ce qu'il a eu.

224. Moïse : Ben ouais, c'est pour ça, si je peux donner un conseil à Séréna, tu vois, je veux pas trop l'embrouiller, mais si je peux lui donner un conseil, c'est surtout de calmer le jeu, et de pas trop se prendre la tête et de laisser faire le temps, parce que...

225. Difool : Ouais, vis ta vie avec ta meuf, et...

226. Moïse : Ouais, voilà, si elle commence à essayer de convaincre son père, tu vois, ça va être l'embrouille, ça va finir très mal donc...

227. Difool : Moi, je sais pas, j'aurais plutôt envie de le convaincre, parce que je le trouverais con de réagir comme ça.

228. Moïse : Ouais, mais...

229. Difool : T'as pas envie que ton père sois con, tu vois, t'as pas envie qu'il ressemble aux vieux beaufs...

230. Moïse : En fait moi ce que je pense, c'est pas que mon père sois raciste, tu vois, mon père il est pas raciste, mais ce que je pense, c'est que nos parents, ils sont pas encore assez dans le mélange des cultures.

231. Sophie : Ils sont vieille France encore, en fait.

232. Difool : Avec les nouvelles émissions de M6, ça va pas les aider, tiens.

233. Marie : Non, mais tu vois, il y a des limites, t'es vieille France, il faut pas exagérer, tu vois... Mes grands-parents, ils sont vieille France aussi, ils sont ouvert à toutes les cultures, quoi. Donc, je suis pas sûre que ce soit lié à ça.

234. Moïse : Mais non, mais c'est pas les cultures, si tu veux, c'est le mélange des cultures.

235. Marie : Ah ben ouais, mais il y a pas de problèmes. Enfin, tu vois, dans ma famille, il y a aucun souci.

236. Difool (imitant -blague récurrente- Marie) : << Ah oui, la bière... >>

237. Marie : Non mais tu vois, à la base, on est tous métissés...

238. Difool : Ouais, on a tous des...

239. Marie : ...à des degrés différents, on n'est pas 100% Français...

240. Difool : Je tiens à vous dire qu'avant nous, nos ancêtres ont baisé dans tous les sens et...

241. Marie : Exactement ! Et c'était colonisé, enfin, quand tu remontes un peu, c'est débile de dire ça, tu vois. [...]

242. Difool : C'est vrai, on est tout un peu métis, quoi...

243. Marie : Voilà, donc il faut pas s'arrêter là, quoi, il faut... C'est juste qu'ils sont un petit peu bloqués.

244. Difool : Et puis quand tu voyages un peu, en fait, je sais pas, moi, j'ai des potes renoi en Italie, ils se comportent comme des ritals, hein. Ils ont rien à voir avec mes potes renoi français qui... tu vois. Ils écoutent pas la même musique...

245. Marie : Regarde, quand t'es rebeu, que t'es né ici et que tu vis en France, t'es pas... quand tu vas au Bled, t'es pas pareil que tes cousins, quoi, qui vivent au Bled. Il y a une différence, c'est normal.

246. Difool : Et comment t'as géré l'affaire, alors, maintenant tu te retrouves sans meuf, tu te retrouves sans... enfin t'as plus de contact avec ton père.

247. Marie : Oh...

248. Difool : Ca date de quand cette histoire, là ?

249. Moïse : Ben ça fait six ans maintenant.

250. Marie : Oh !

251. Difool : Ah ouais, six ans. T'as l'impression que c'est mort, toi ?

252. Moïse : Pour mon daron ?

253. Difool : Ouais.

254. Moïse : Ah ouais, non mais c'est moi, je veux plus le voir, franchement, je lui pardonnerai jamais une attitude pareille, tu vois, en fait.

255. Difool : Et lui, il a essayé de te revoir ou pas ?

256. Moïse : Non, du tout.

257. Marie : Ah ouais, donc vous avez jamais essayé d'avoir un dialogue posé...

258. Moïse : Non, ben en fait, on a essayé pendant les trois jours qui ont suivi le repas, quoi, mais au bout de trois jours, c'était de pire en pire et puis bon au final, il m'a dit << c'est moi qui décide, tant que tu vivras sous mon toit, tu respecteras mes règles >> donc il m'a dit << si t'es pas content avec mes règles, tu t' arraches >> donc j 'ai pris mon petit balluchon et je suis parti...

259. Difool : Toi, tu t'es barré, oui.

260. Moïse : Sauf que je me suis barré et je pensais récupérer la meuf, tu vois, et en fait, que dalle...

261. Difool : Ouais, c'est un peu triste... et t'as une meuf, là, maintenant ?

262. Marie : Bah, au moins, t'es fixé.

263. Moïse : Ouais, ouais, maintenant je suis papa et tout...

264. Difool : Ah ouais, donc t'es heureux ?

265. Moïse : Ouais, ouais, ça va, tout va bien...

266. Difool : Bon. Et t'as pas envie de présenter ton fils à ton père ?

267. Moïse : Non.

268. Marie : Ah, ouais, c'est bizarre, ça fait une cassure tellement...

269. Romano : Et ton père, il a jamais essayé de reprendre le contact sachant qu'il était grand-père et tout ça ?

270. Moïse : Non, non, non...

271. Cédric : Il le sait au moins ?

272. Moïse : Ouais, il le sait mais il valait mieux pas qu'il vienne...

273. Difool : Ah ouais, toi, tu l'aurais mal accueilli.

274. Moïse : Ouais.

275. Romano : Mais ta mère, tu continues de la voir ?

276. Moïse : Ouais, je la vois. Ben, je vais la voir quand je sais qu'il est pas là...

277. Difool : Et pour elle ça doit pas être facile parce que entre les deux...

278. Moïse : Ouais, elle le vit mal aussi.

279. Marie : Ouais, c'est normal.

280. Romano : Ca doit la faire chier.

281. Difool : Tout ça à cause d'une attitude de ton père à la base.

282. Moïse : Ouais, et puis après il y a eu mes frangins qui ont pris ma défense, et puis après, bon, il s'est embrouillé avec mes frangins et puis mes frangins ne vont plus le voir non plus...

283. Difool : Séréna, j'espère que ça se passera pas comme ça pour toi...

284. Séréna : Ah ben oui, franchement, j'espère pas, parce que lui, là, alors, le pauvre !

285. Moïse : Comme je t'ai dit, il faut que tu te dises que c'est ton daron et que de toute manière, respectele, même si lui t'a manqué de respect ce jour-là, mais...

286. Séréna : Ouais, ouais

287. Moïse : il faut que tu te dises que c'est ton daron, et puis fais pas ce que j'ai fait. Moi j'ai voulu prendre le dessus sur lui et puis au final...

288. Séréna : Oui, mais franchement ça, j'ai pas essayé, tu vois, on en a pas reparlé depuis et...

289. Moïse : Ouais, non, mais je pense que, tu sais, avec le temps, il va s'y faire et puis c'est tout, quoi...

290. Difool : Et si au lieu d'aller bouffer chez tes parents, vous alliez bouffer dehors ?

291. Marie : (rires) Bonne idée, ouais.

292. Difool : Même à la limite un McDo c'est plus sympa, hein ?

293. Séréna : Ouais, ben je sais pas, c'était...

294. Difool : Ouais, ben c'était l'occasion de présenter ton mec à tes parents, quoi.

295. Séréna : Ouais, voilà.

296. Difool : Comment tu vas, après avoir écouté le témoignage de Moïse, celui de Sophie, là, et puis les diverses réactions qu'on t'a lues sur le net et les SMS, je sais pas, comment tu vas gérer l'histoire, toi ?

297. Séréna : Bah, franchement, j'en sais rien non plus, quoi... Je suis pas plus rassurée, quoi, j'ai toujours l'angoisse, quoi. Là, bon, je vais voir mon mec lundi, je crois que je vais en parler avec lui...

298. Difool : Ouais, mais que ça devienne pas un problème pour... tu vois, qu'il ait pas l'impression d'être un problème, c'est pas lui le problème, c'est ton père.

299. Séréna : Ah, ben non...

300. Marie : Ouais, tu vis ta vie avec ton mec et puis voilà, tu fais une section entre les deux et puis c'est tout hein.

301. Difool : Ce qu'il faut que tu dises à ton mec c'est que sur ce plan là, ton père il te prend un peu la tête donc voilà, vous allez vivre tous les deux et puis... enfin, tous les deux votre histoire sans forcément la partager avec tout le monde.

302. Marie : Et puis ça peut peut-être évoluer, hein, il est peut-être pas forcément braqué...

303. Séréna : Ouais, bien sûr !

[Coupure pub et musicale]

CONCLUSION ET PERSPECTIVES

304. Difool : ...Il y a eu plein de messages pour Séréna, qui vont tous on petit peu dans le même sens, c'est << vis ta vie >>, hein Séréna, la majorité des messages. Ou alors << essaie de convaincre ton père et d'avoir une discussion face à face avec lui >>, ça c'est l'autre tendance parmi les messages qu'on nous a laissés.

305. Séréna : Ben ouais, mais ça, je crois que c'est mort.

306. Difool : Ouais, je crois que tu vas vivre ta vie toute seule ?

307. Séréna : Oui, je pense.

308. Romano : Ouais, tu vis ton truc, tu leur en parles pas, voilà, hein...

309. Difool : Hmm, bon c'est vrai que c'est toujours un petit peu balourd de...

310. Romano : Ouais, mais bon.

311. Difool : ...d'être obligé de se cacher parce qu'on aime quelqu'un...

3 12. Romano : Si le daron il veut rien comprendre, aussi, t'as pas trop le choix, quoi.

313. Séréna : Il est un peu buté, mon père...

314. Difool : Oui, on a vu.

315. Séréna : ...il est à fond dans son truc et...

3 16. Difool : Ouais, ouais. Bon, ben écoutes Séréna, ne quittes pas parce qu'on a eu beaucoup de messages et on a peut-être des numéros à te donner, des auditeurs de Sky, des auditrices aussi, qui veulent rentrer en contact avec toi donc... voilà.

317. Séréna : Ben je les remercie tous, hein, ça fait plaisir.

318. Difool : A nous aussi ça fait plaisir ! On t'envoie l'album de la semaine, Séréna, et puis pareil pour tous ceux qui sont passés, il y a eu Moïse, Sophie... Bisous !

319. Séréna : Bisous, bonne soirée.

320. Difool : Et puis on prendra des nouvelles si tu veux bien, Séréna.

321. Séréna : Et puis je voudrais dire à tous ceux qui sont dans cette situation, franchement, il faut... Courage, quoi, parce que c'est lourd à porter.

322. Difool : Ok, on te rappellera, de toute façon, et puis si t'as besoin de nous, tu nous appelle sans problème.

Racisme / cas N°2 / 02 novembre 2004 « Les parents n'acceptent pas le petit ami maghrébin » / séquence diffusée entre 23h26 et 23h45 :

Contexte : suite à l'appel d'un auditeur qui ne comprend pas pourquoi il n'a pas de nouvelle de sa copine (même s'il sait que les parents de celle-là n'aiment pas trop les Maghrébins -et il l'est- une auditrice apporte son témoignage, à savoir que ses parents n'acceptaient pas son copain maghrébin. L'équipe et des auditeurs apporteront des réponses à ce sujet. On traite le sujet à partir de ce moment où il s'agit proprement d'une thématique d'intolérance liée au racisme.

EXPOSE ET EVALUATION DU PROBLEME DE L'AUDITEUR APPELLANT

1. Difool : On est avec Moos, d'Agen, alors Moos, toi ça fait trois semaines que t'as pas de nouvelles de ta meuf, depuis quatre mois tu es avec elle, et tu te poses des questions. On va y revenir, il y a plein de témoignages par rapport à toi, et toi tu te poses la question de savoir si ça vient pas de l'influence des parents, c'est ça, hein ?

2. Moos : Ouais, ok, ouais.

3. Difool : Parce que c'est vrai qu'elle a 17 ans, toi t'en as 20, t'es rebeu et les parents sont plutôt... enfin sont fachos, t'es sûr de ça, ou...

4. Moos : Non, non, c'est certain, ouais.

5. Difool : Tu les as vu, toi ?

6. Moos : On a déjà eu une petite altercation, on va dire.

7. Difool : Mais comment ça s'est manifesté, parce que ça m'a toujours fait halluciner, ça, ils ont quel âge les parents, 40 berges ?

8. Moos : 40/45, ouais, par là, ouais, 40/45

9. Difool : Et ils sont... et comment ils ont réagi par rapport à toi ?

10. Moos : Ben, en fait, ma copine au début elle leur a pas dit parce que... Moi, elle me l'a dit bien après, ma copine. Elle m'a dit, << mes parents, bon, voilà, ils aiment pas trop les rebeu >>.

11. Difool (imitant les parents) : << Oui, tu t'appelleras Moustiquaire, d'accord ? >> (rires)

12. Moos : Et en fait une fois j'ai croisé sa mère parce que c'était elle qui venait la chercher au lycée, et voilà, quoi... Et ça c'est pas trop bien passé parce que quand je l'ai embrassée pour lui dire au revoir et tout, sa mère elle lui a dit << tu peux éviter de faire ça devant moi parce que ça me plait pas >>.

13. Difool : C'était le fait qu'elle embrasse un gars ou alors c'est le fait qu'elle t'embrasse toi, un rebeu ?

14. Moos : Non, je lui ai dit << si ça se trouve, ta mère elle a dit ça par rapport à un gars, par rapport au respect >>, elle m'a fait << Non, non, je sais comment elle est ma mère >>, elle m'a dit << tu sais avec mon père, et tout, des fois je les entends parler, les Arabes, les Arabes, les Arabes... >>

15. Difool : Quels pauvres gens, quand même. C'est quand même triste d'en être là aujourd'hui, quoi.

16. Moos : Ouais, ouais, carrément, ouais.

17. Difool : Eh oui, et ils doivent être malheureux, en plus, hein... Parce que... bah, je sais pas, de réagir comme ça, de se fermer... Bon, c'est surtout chiant pour toi si ta meuf t'a laissé à cause de ça. Donc on va y revenir tout de suite là, juste après qu'on ait pris, ah ben non, tiens, il y a Linda qui nous appelle. T'es en direct de Troyes, c'est ça, Linda ?

TEMOIGNAGES D'AUDITEURS A L'ANTENNE ET POINTS DE VUE DE L'EQUIPE

18. Linda : Voilà, exactement.

19. Difool : Tu nous as laissé un message sur les SMS, le net ou t'as appelé au téléphone, comment t'as fait ?

20. Linda : Non, j'ai appelé directement.

21. Difool : Direct. Bon, alors, Linda, t'appelais pour Moos, toi ?

22. Linda : Voilà, exactement.

23. Difool : Bon, il t'es arrivé la même chose à peu près ?

24. Linda : Ben en fait, pareil, j'étais avec mon copain depuis 3/4 mois et en fait, euh, à chaque fois que je rentrais chez mes parents, pendant une semaine, il m'appelait pas...

25. Difool : Il faisait le mort.

26. Linda : Voilà, il faisait le mort, exactement. Et il m'a appelé il y a 2/3 jours, et il m'a expliqué qu'il faisait cocu sa copine, parce qu'il avait une copine depuis 3 ans...

27. Difool : Et tu savais qu'il avait une copine, toi ?

28. Linda : Non, non, je savais pas.

29. Difool : Ah donc tu as découvert que tu étais la maîtresse de ton mec.

30. Linda : Exactement !

31. Difool : Ca fait plaisir ?

32. Linda : Oui, ça fait hyper plaisir (rires) !

33. Difool : C'est génial, tu crois que t'as un mec, et en fait le mec il te fait « non, non, tu es ma maîtresse!>>

34. Romano : « ... oui, tu es ma deuxième, en fait >>

35. Difool : Bien sûr ! Tu découvres non seulement qu'il y en a une autre, mais qu'en plus t'es pas la première, quoi.

36. Romano : Ca faisait combien de temps que t'étais avec lui ?

37. Linda : Trois mois et demi

38. Difool : Ah ouais, quand même !

39. Linda : Ouais

[... ]

[Nous avons donc une explication possible au manque de nouvelles de la copine l'auditeur. Une autre auditrice va annoncer une autre explication possible, c'est celle-ci qui constitue la pertinence du sujet dans le corpus]

40. Difool : On a Miou, tiens une meuf qui s'appelle Milou, donc toi t'as 17 ans et tu appelles pour Moos.

41. Miou : Ouais, exactement, j 'appelle pour Moos, parce qu' en fait j 'étais dans la même situation que sa copine.

42. Difool : C'est-à-dire ? Toi aussi t'avais des parents qui étaient... très tolérants ?

43. Milou : Oui, exactement, super tolérants, c'est pour ça que j'ai du couper tout contact, en fait.

44. Difool : Et toi, tu es de quelle origine ? J'aime pas demander ces question, parce qu'on est à la radio, on s'en fout...

45. Milou : Italienne.

46. Difool : T'es Italienne, toi ?

47. Milou : Ouais.

48. Difool : Il y a plein d'Italiens à Grenoble.

[...]

49. Difool : Et donc, toi, explique-nous un peu ton histoire par rapport à Moos.

50. Miou : Ben, j'étais dans la même situation que sa copine, c'est-à-dire que j'ai commencé une histoire d'amour avec un mec sui s'appelait Michael. Ça se passait très bien, on a passé un mois d'enfer, en fait...

51. Difool : Oui, mais ma mère n'aimait pas les Michael...

52. Miou : Exactement.

53. Difool : Non, il a eu quoi, le problème ?

54. Miou : Le problème c'est que mes parents s'en sont rendus compte, lors d'un repas de famille, d'ailleurs, où ma soeur m'a balancée.

55. Difool : Sympa, la soeur.

56. Miou : Ouais, super, et du coup, ben ma mère s'en est mêlée, et e, plus c'est un ami, plus ou moins, de la famille, donc j'ai du couper tout contact, enfin, c'était une merde pas possible.

57. Difool : Mais pourquoi ça dérangeait que tu sortes avec un gars qui s'appelle Michael, qui soit un ami de la famille, c'était quoi le problème ?

58. Miou : Il était rebeu !

59. Difool : Ah, il était rebeu, Michael ?

60. Miou : Voilà.

Difool : Et tes parents, ils sont racistes aussi ?

61. Miou : Ouais.

62. Difool : C'est terrible, parce que eux qui sont Italiens, ils devraient se souvenir qu'il y a, je sais pas, 80 ans, les Italiens, ils étaient... enfin, il y avait des réactions qui étaient particulièrement racistes envers eux aussi, qu'ils ont subi aussi, quand ils sont arrivés en France. Nos grands parents, tout ça, et maintenant, ils font la même chose 80 ans après à d'autres gars, ça c'est... ça m'a toujours fait halluciner, ça. Tu devrais leur expliquer à tes parents, parce qu'ils ont du vivre ça.

63. Milou : Ouais, mais le problème, c'est qu'on essaie une fois, deux fois, trois fois et puis après on lâche l'affaire.

64. Difool : Non, mais c'est fou, ça. Ils ont quel âge tes parents ? En plus, ils sont pas vieux, tu vois, ils ont la quarantaine ?

65. Milou : 47 !

66. Difool : 47, bah c'est pas super vieux ! Tu vois, ils sont pas... c'est pas des dinosaures ! Ils doivent comprendre. Et en plus, c'est vrai ce que je te dis, les familles italiennes... moi-même qui suis un pur Siciien puisque j'ai fait partie de la mafia, mes ancêtres, bien sûr... Non mais c'est vrai, tous les Italiens, ils ont vécu ça. T'avais des gens qui, quand les Italiens arrivaient disaient que la bouffe italienne ça sentait mauvais, qu'ils étaient pas comme les autres, que...

67. Romano : Des réactions de merde.

68. Difool : Ouais, des réactions racistes de base. Enfin, ridicules et de base, comme... Donc maintenant, ils réagissent comme ça par rapport à toi.

69. Miou : Ouais, exactement. Mais tu sais, ils me disent c'est plutôt du côté, ouais, ils ont peur, machin... on sait jamais, s'il veut repartir là bas, et tout...

70. Difool (dubitatif) : Ouais. Mais c'était la même chose à l'époque, tu sais, c'est toujours... Tu vas peut-être essayer de discuter avec eux, non, ça marche pas ?

71. Miou : Non, mais j'ai essayé, et puis moi de toute façon, il y a que les Arabes qui m'attirent physiquement, donc...

72. Difool : Ouais, mais justement, je pense que...

73. Samy : C'est à cause de ça, ouais.

74. Difool : C'est parce que tes parents...

75. Miou : Non, pas du tout, ben j 'ai essayé aussi avec des Français, Italiens, et ça marche pas du tout, j'ai plus un tempérament on va dire Musulmane, quoi, on va dire plus soumise.

76. Difool : Ouais, mais là, tu sais, tu fais des généralités comme tes parents mais dans l'autre sens, tu vois.

77. Samy : C'est pas parce que tu vas sortir avec un rebeu que tu vas être soumise aussi...

78. Difool : Bah, oui. C'est un cliché, ça, tu fais les mêmes clichés que tes parents mais dans le sens inverse. En fait, tu réagis par révolte...

79. Milou : Pas du tout, parce que franchement je suis vachement ouverte, j 'ai essayé plein de trucs et tu vois, je m'entends mieux...

80. Difool : Bah tu peux avoir un type de gars aussi, quoi. Tu peux préférer les gars... c'est pas un souci, mais de réagir en disant << je préfère parce qu'ils sont comme ça >>, tu vois, c'est...

81. Romano : Ouais, ils sont pas tous comme ça, quoi.

82. Difool : C'est aussi des clichés à deux balles, que tu nous fais, là. Donc, ça doit être par révolte envers tes parents, je pense. Tu dois avoir envie de les faire chier.

83. Romano : Ouais, pour un peu les emmerder.

84. Difool : Mais bon, ça peut se comprendre aussi, vu comment ils réagissent, mais à mon avis, il doit y avoir un peu un truc comme ça dans cette histoire.

85. Miou : Ouais, sûrement, sûrement...

86. Romano : Et depuis cette histoire, ils ont pas évolué d'un pet tes parents, toi, ils ont...

87. Miou : Ben non, ça fait trois semaines, quoi donc...

88. Romano : Ah, ouais, donc...

89. Difool : Et t'as coupé les ponts, toi, avec le gars ou pas ?

90. Miou : Ouais, complètement.

91. Difool : Mais pourquoi t'as coupé les ponts avec lui ?

92. Miou : Ben parce que je peux pas, et en plus c'est une pression immense, moi ma famille ils sont tous ici, tout le monde le connaît, donc forcément, si je le vois, ça va être...

93. Difool : Mais ce qui est hallucinant, c'est qu'ils acceptent que ce soit un ami de la famille, par contre, dès qu'il sort avec toi, ça pose un problème.

94. Romano (imitant le père) : << Ah oui, mais c'est pas pareil >>.

95. Miou : Non, mais c'est compliqué, en fait, parce que c'est un ami de la famille à ma mère, et en fait, j'ai une demi-soeur, et ma demi-soeur s'entend absolument pas avec mon père. Donc mon père est encore plus révolté.

96. Romano : Ah oui, c'est un gros bordel, quoi.

97. Miou : Oui, c'est un gros bordel.

98. Difool : Oh, je sais pas. Je pense que personne n'est encore perdu, donc essaie de discuter avec tes parents, quoi.

99. Miou : Ouais. Non, mais c'était juste pour Moos, quoi, pour qu'il lâche pas l'affaire, parce que moi je sais que Michael il m'appelle vachement souvent et que je sais très bien que je vais finir par décrocher, quoi.

100. Difool : Bah oui décroche, et puis le laisse pas comme ça, le gars.

101. Miou : Ouais, c'est clair, mais tu sais, ça me fait mal au coeur aussi mais...

102. Difool : Ben justement, la meilleure manière d'être révoltée contre tes parents, c'est pas de... enfin tu vois t'as un mec que t'aime, ben reste avec lui. Enfin je sais pas. Qu'est-ce que t'en penses, toi, Moos ?

103. Moos : Moi, je sais pas, parce que là, ça va faire trois semaines, franchement, je... à un moment donné, voilà, tu sais, j'ai envie d'arrêter d'appeler parce que même si je me suis grave attaché à elle, mais bon, trois semaines, tu es bien d'accord, il y a bien quelque chose...

104. Difool : Non, mais toi en plus elle te raccroche au nez... toi tu essaies de la joindre...

105. Moos : Ouais, elle m'a raccroché au nez, après je sais pas, tu vois, j'ai essayé de l'appeler en appel masqué, et tout, même en appel masqué, elle doit se douter, sûrement que c'est moi.

106. Difool : Bon, ben si elle nous écoute, parce que tu nous as dit qu'elle écoutait souvent Sky, parce que en plus, là, c'est les vacances donc... ça se couche tard actuellement. Donc, je sais pas comment elle s'appelle, c'est quoi son prénom, tu veux le dire ?

107. Moos : Non, mais elle se reconnaîtra.

108. Difool : Bon, ben si elle se reconnaît, on la salue, l'anonyme...

109. Moos : Parce que sinon...

1 10. Difool : Et puis quoi qu'il te sois arrivé, passe au moins un coup de fil...

111. Romano : Dis-lui ce qu'il en est, quoi.

1 12. Difool : Bah oui, il se rend malade, il t'aime... donc, au moins donner des nouvelles, même si c'est pas des bonnes nouvelles, quoi.

1 13. Moos : Ouais, et franchement j'espère pas que c'est par rapport à ses parents, quoi, parce que moi, ça me mettrait encore plus la rage. Parce que déjà qu'on s'était bien accroché la première fois à cause de ça, avec ses parents et avec elle aussi, tu vois, parce que je lui disais... parce que la première fois, elle m'avait lâché, mais bon elle m'avait dit, quoi. Elle m'avait dit que c'était à cause de ses parents parce que elle avait trop de pression par rapport à ses parents et qu'elle pouvait pas continuer.

TEMOIGNAGES D'AUDITEURS PAR MESSAGES (SMS ET INTERNET) ET POINTS DE VUE DE L'EQUIPE

1 14. Difool : Mais c'est vrai qu'il y a plein de messages, ça doit être particulièrement dur à supporter, regarde, il y a Romanette, là, qui est déjà un pseudo dur à vivre, de Paris 13 : << j'avais un mec rebeu, ma mère est raciste, j'ai du le quitter tellement elle m'a mis la pression >>. Quand tu aimes quelqu'un, moi je pense qu'il faut résister, c'est pas... c'est pas manquer de respect à tes parents que de sortir avec un gars que t'aimes, hein. Enfin, je pense.

1 15. Moos : Ouais, carrément. Mais bon, je lui ai dit, tes parents, ils ont fait leur vie et tout... 116. Difool : Bah oui.

1 17. Moos : ... c'est à toi de réfléchir. Et moi, à un moment donné, j'étais tellement énervé que je lui ai posé un ultimatum quoi, je lui ai dit << ou tu assumes de sortir avec moi, ou c'est bon, c'est fini. Mais bon, elle avait dit << non, ça marche bien, je vois pas pourquoi j'arrêterais et tout >>, mais elle avait jamais osé le dire à sa mère, quoi. Et bon, là, j 'ai peur que sa mère ait découvert parce que je lui ai envoyé des petites lettres, vite fait. Et j 'ai peur qu'elle soit tombée sur une des lettres ou sur un mail...

1 18. Difool : Ouais, ça aurait foutu le bordel dans la famille.

1 19. Moos : Ouais. Et bon, vu que dans la famille, ils sont tous comme ça, s'il y a eu un repas de famille dans le truc ou quoi, il suffit juste que le message circule et tout le monde lui tombe dessus et je sais que c'est une fille assez fragile, donc forcément, c'est...

120. Difool : Enfin, qu'elle passe au moins un coup de fil, c'est le message qu'on peut lui faire passer, si elle nous écoute, qu'elle te donnes au moins des nouvelles. Envoyer un SMS, c'est pas compliqué. D'ailleurs je comprend pas pourquoi elle l'a pas fait parce qu'il y a toujours le moyen de prendre le portable d'une copine, regarde, Romano prend régulièrement les portables des membres de l'équipe.

121. Romano : Ben oui, pour envoyer des SMS pas chers.

122. Difool : Exactement ! (rires)

123. Romano : C'est clair que si elle veut te joindre, elle peut. D'une manière ou d'une autre.

124. Difool : Non, mais faut leur expliquer, si elle nous écoute, qu'elle leur explique que t'es un mec bien... t'as pas l'air d'être un mec... t'es un mec bien...

125. Romano : C'est un bon gars, Moos.

126. Difool : Bah oui !

127. Moos : En plus, Romano, moi je suis pas trop une pince, moi, t'as vu.

128. Difool : En plus, il est généreux.

129. Moos : En quatre mois, je lui ai fait je sais pas combien de cadeaux et tout...

[Variations sur la pingrerie de Romano]

130. Difool : Ca marche aussi dans le sens inverse, il y a une nana qui dit << je suis rebeu, moi c'est le même problème, ils veulent pas que je sorte avec des Français >>. Enfin, t'es Français sans doute toi aussi, mais...

131. Romano : Ouais, ça marche dans tous les sens, malheureusement.

132. Moos : C'est clair, ouais.

133. Difool : Bah oui, c'est ma foi bien triste tout ça, parce que quand on s'aime... au contraire, c'est plutôt rigolo de découvrir quelqu'un qui n'a pas la même culture, c'est quand même plue intéressant.

134. Romano : Ouais, c'est bien, ça ouvre.

135. Difool : Moi je trouve ça marrant, t'as le gars qui fait le ramadan, ou la meuf qui fait le ramadan, et l'autre partie du couple qui vit sa vie, enfin c'est plutôt rigolo...

136. Moos : Tu crois que ce serait à cause de ça, que ce serait à cause que c'est le ramadan et tout ?

137. Difool : Non, j'y avais pas pensé, j'en sais rien, tu sais s'ils sont racistes, ils comprennent rien, donc peut-être que c'est...

138. Moos : Parce que ma copine, je lui avais dit que ça allait être le ramadan, que pendant un mois, on allait peut-être moins se voir, et qu'on va s'abstenir à faire quelque chose ou quoi parce que le ramadan...

139. Romano : De là à plus se voir du tout, c'est quand même...

140. Moos : Non, je lui ai pas dit on allait moins se voir et en tout cas au niveau sexe, on n'allait plus rien faire pendant un mois parce que voilà.

141. Difool : Tu peux, la nuit, pourtant, non ?

142. Moos : En fait c'est pas autorisé. [...] Chacun arrange la religion comme ça lui va.

143. Difool : Ouais, en fait, c'est personnel, et vous faites le ramadan un peu comme vous le sentez quoi, l'essentiel c'est...

144. Moos : Ouais, alors que normalement, il faudrait pas.

145. Romano : Normalement, c'est abstinence totale.

[Rappel << question express >> sur le ramadan]

CONCLUSION ET PERSPECTIVES

146. Difool : En tout cas, si elle nous écoute, j'espère qu'elle aura entendu le message et qu'elle te passera un coup de fil, elle t'aura reconnu de toute façon, là.

147. Moos : Franchement, je pense qu'elle m'a reconnu, tu sais.

148. Difool : Reste là, Moos, parce qu'on va peut-être en reparler si on a d'autres réactions là dessus, on te fait signe. Et puis surtout merci à toi Linda pour le coup de fil, on te fait un gros bisous Linda.

149. Moos : ouais, merci à Linda.

150. Difool : Et puis Merci à Milou aussi. On va t'envoyer l'album de K-Maro et puis j'espère que tu auras des nouvelles de ton Michael. Et puis essaie de parler avec tes parents, de les débloquer.

Racisme / cas N°3 / 21 décembre 2004 « Ma mère ne supporte pas que je sorte avec un Kabyle » / séquence diffusée entre 21 h1 6 et 21 h38 :

Contexte : une auditrice se bat avec sa mère à coup de pieds, de poing, car la mère ne la supporte plus, notamment affectée par le fait que sa fille sorte avec un Kabyle.

EXPOSE ET EVALUATION DU PROBLEME DE L'AUDITRICE APPELLANT

1. Difool : Oui, Shirley ?

2. Shirley : Oui, en fait, je vous appelle pour avoir des conseils.

3. Difool : Oui.

4. Shirley : Avec ma mère, ça va pas du tout, mais quand je dis pas du tout, c'est qu'on se tape dessus.

5. Difool : Ah ? Mais physiquement ?

6. Shirley : Ouais. Insultes et tout, quoi

7. Difool : [...] Mais vous faites quoi ?

8. Shirley : On se tape dessus, à coups de poing, à coups de pieds, on se tire les cheveux,

9. Difool : Et c'est quoi la raison pour laquelle vous vous tapez dessus, il y a forcément un démarrage...

10. Shirley : Ben, en fait, elle me supporte plus, et le problème, c'est que ça fait un an que je suis avec quelqu'un et ma mère elle est raciste, elle l'accepte pas du tout, quoi.

11. Difool : Ah, elle aime pas ton mec ?

12. Shirley : Ah, non pas du tout quoi, et ça fait un an que je suis avec...

13. Difool : Pourquoi toi t'es de quelle origine, et lui de quelle origine ?

14. Shirley : Lui, c'est un Kabyle, et moi je suis Française, mais bon...

15. Difool : Shirley, tu n'es pas Américaine ? (rires)

16. Marie : C'est bizarre.

17. Shirley : C'est bizarre, c'est compliqué...

18. Difool : Et les embrouilles avec ta mère, ça a vraiment démarré à ce moment là ?

19. Shirley : Ah, non, ça va faire depuis que j'ai 16 ans que ça a commencé avec ma mère.

20. Difool : Ouais, bon, qu'il y ait des embrouilles avec la famille, qu'on soit pas d'accord sur tout, bon, ça c'est normal.

21. Shirley : Ouais, c'est normal, mais là, elle cherche vraiment à me faire péter les plombs, et moi, avant de péter les plombs je veux partir et je sais pas du tout comment faire, quoi.

22. Difool : Et par exemple quand vous vous tapez dessus, ça se passe comment ? C'est quoi au départ qui... qui créé l'embrouille ?

23. Shirley : Ben c'est un mot qui commence, style...

24. Difool : << Enculé >>. Oui, alors ça...

25. Romano : << Connasse >> (rires)

26. Shirley : Ouais, voilà, elle me traite de connasse, << vas voir ton bougnoule >>, des trucs comme ça... Stupeur générale de l'équipe .Blanc.

27. Marie : Ah, ouais, quand même !

28. Difool (grave) : Ouais

29. Marie : C'est horrible.

30. Shirley : J'apprécie plus du tout...

31. Romano : Elle braque un petit peu.

32. Difool : Et t'as tout essayé pour...

33. Shirley : Ah, oui, oui, oui. J'ai tout essayé pour calmer le jeu, hein, euh... Franchement, il est jamais venu chez moi parce qu'il habite pas à Saint-Étienne, il habite...

34. Difool : Tu sais, je pense que ça fait partie des... enfin ta mère elle est tout le temps enfermée chez elle, elle...

35. Shirley : Ouais, ouais.

36. Difool : Elle connaît personne, donc elle regarde la télé...

37. Shirley : Si, elle connaît plein de monde...

38. Marie : Oui, mais ils sont blancs.

39. Romano (imitant la mère) : << Oui, c'est pas pareil ! >>

40. Difool : Oui, c'est ça, ça vient souvent d'une méconnaissance, elle est pas...

41. Shirley : Mais bon, ma soeur, elle est avec un Portugais, elle l'accepte pas non plus, et ça fait 17 ans qu'ils sont ensemble.

42. Difool : Elle est avec un Portugais, elle accepte pas le Portugais ?

43. Shirley : Ah, non, quand c'est les fêtes ou des trucs comme ça, lui il vient pas, il rentre pas à la maison.

44. Difool : Ah ouais, donc elle est raciste, quoi.

45. Marie : Oh, là là là là...

46. Difool : C'est triste pour elle, hein. C'est une pauvre... enfin c'est une pauvre femme, quoi.

47. Shirley : Et je peux plus vivre ça, quoi.

48. Marie : Ben c'est sûr.

49. Difool : Je comprends que tu peux plus vivre ça, c'est normal. Parce qu'en fait, c'est de la bêtise parce que... Marie : Ouais, de la bêtise

50. Difool : Ouais, elle est bête, quoi.

51. Shirley : Ouais, parce que moi, je suis carrément heureuse avec lui. L'amour que j'ai pas par ma mère, c'est lui qui me le donne.

52. Difool : Ouais, enfin, il pourra jamais t'offrir ce que t'offre ta mère, mais...

53. Shirley : Enfin, il compense un peu, quoi.

TEMOIGNAGES D'AUDITEURS PAR MESSAGES (SMS ET INTERNET) ET POINTS DE VUE DE L'EQUIPE

54. Difool : À partir d'un certain moment, tu peux couper les ponts, hein ? C'est ce qu'on nous dit, là, sur les SMS, il y a PEM, là, du 37 qui nous dit << il faut couper les ponts, y a pas moyen >>. Elle respecte pas la personne que tu aimes le plus au monde, donc... à part elle.

55. Shirley : C'est pour ça, je voudrais trouver quelque chose pour partir au plus vite...

56. Marie : Pour partir, ouais, t'as 18 ans...

57. Difool : Mais tu fais quoi, t'es au bahut, encore ?

58. Shirley : Eh ben moi, en fait, ouais, je suis encore à l'école, quoi. Mais je me suis renseignée, tu sais, à droite à gauche, à l'école et tout. J'essaie de travailler entre deux pour avoir un peu d'argent. Je sais que j'ai droit à la bourse, aux aides étudiants et tout ça mais euh...

59. Difool : Aaah !

60. Romano : Ouais. T'as le droit à des aides, ouais, t'as droit aux APL et tout ça, là. [Anecdote sur la pingrerie de Romano] Ouais, mais c'est vrai, quand tu es étudiant, par exemple t'a plein d'aides quand t'es jeune et que t'as pas trop de sous, quoi.

61. Difool : Et ton gars, il en pense quoi ?

62. Shirley : Ah, ben lui, il veut que je parte au plus vite, hein.

63. Difool : Et lui, il veut être avec toi, il veut faire quoi ?

64. Shirley : Ah ouais ouais, il veut être avec moi, il m'a présenté à toute sa famille, ça va faire un an, là, qu'on est ensemble. Et il veut vraiment qu'on reste ensemble. Il m'a dit << c'est pas parce que ta mère est là, elle va pas foutre la merde entre nous, quoi >>.

65. Difool : Ah oui. Y a Chelou qui nous laisse un message, là, il nous dit << pas cool, la daronne, facho. Je suis noir il m'est arrivé pire, appelez-moi >>, on va te passer un coup de fil, c'est Chelou qui laisse le message. Ben nous dit << c'est que t mère ne t'aime pas sincèrement >>. Ah, ouais, c'est ce que je te disais tout à l'heure, si elle déteste la personne que tu aimes le plus, alors ou c'est de la jalousie, ou c'est euh... enfin de la jalousie, elle est tarée si elle est jalouse de ton mec, parce que...

66. Romano : Oui, rien à voir.

67. Marie : Oui, oui, ça n'a rien à voir.

68. Romano : c'est qu'elle a deux trois soucis.

69. Difool : Ca peut arriver, hein, parfois, je pense, hein ?

70. Marie : Oui, elle peut être jalouse de l'amour que tu lui portes alors que vous vous entendez pas bien, mais en même temps, c'est elle qui allume la mèche.

71. Shirley : Pourtant j 'ai essayé de faire des efforts, hein.

72. Difool : Bah ouais. Bon, alors dites-nous ce que vous en pensez, tu voulais savoir quoi, toi, tu voulais déjà avoir des réactions là-dessus ?

73. Shirley : Ouais, déjà des réactions, savoir ce que les gens ont fait soit pour que ça aille mieux avec leurs parents, ou ce qu'il faut que je fasse pour avoir des papiers, pour avoir des aides et tout ça.

74. Difool : Bon, ben reste là Shirley, on va revenir avec toi, avec vous toutes et vous tous, allez-y, hein...

[... ]

75. Difool : Shirley, on va revenir à toi tout de suite, Shirley. Shirley, en direct avec nous, de Saint Etienne du Rouvray dans le 76. Tu t'entends pas très bien avec ta mère, surtout depuis que tu sors avec un gars qui est Kabyle et donc ta mère est raciste.

76. Shirley : Ouais, à fond, ouais.

77. Difool : Voilà, pour résumer un petit peu le truc. Non, on essayer d'imaginer mais... il faudrait la filmer et lui montrer comme elle est bête.

78. Romano : Ouais, c'est ridicule.

79. Difool : Non, mais c'est vrai, quand elle te dit ce qu'elle t'as dit tout à l'heure.

80. Marie : Ouais, c'est débile

81. Difool (imitant la mère) : « Oui, vas voir ton... » J'imagine la tête qu'elle doit avoir quand elle dit ça...

82. Romano : Ah, ouais, elle doit être au taquet, elle doit être sur les nerfs...

83. Marie : Tu m'étonnes que tu aies envie de lui en foutre une.

84. Shirley : Ah, non, mais y a pas que ça, parce qu'en fait, il sort de prison, et là-dessus, je m'en prends plein.

85. Difool : Oui, bah, on a le droit de faire une connerie et après de se rendre compte que...

86. Romano : Mais c'est bon, il a payé, hein...

87. Shirley : Ah, mais oui, il a compris, hein.

88. Difool : Bon, et sinon, entre vous deux, comment ça se passe ? Bien, pas bien ?

89. Shirley : Ah, c'est top nickel.

90. Difool : Et quand ta mère fout un peu le bordel, comment ça se passe ? Vous êtes d'accord tous les deux, vous lui chiez dessus tous les deux, donc...

91. Shirley : Voilà.

92. Difool : Mais il faudrait pas que ce soit ta mère qui soit le principal point d'accord entre vous. J'espère qu'il y a d'autres trucs, quoi.

93. Shirley : Ouais, mais là-dessus, ça se passe super bien, quoi, c'est que moi quand je vais chez ma soeur, des fois on en parle parce que des fois j'ai les nerfs par rapport à ça.

94. Difool : Ah, oui, ta soeur qui sort avec un Portugais que ta mère n'a pas accepté.

95. Romano : Et ça fait 17 ans qu'ils sont ensemble.

96. Shirley : Ouais.

97. Difool : Elle est vieille, ta soeur, t'as 18 ans, toi ?

98. Shirley : Ouais, en fait on est 7 frères et soeurs.

99. Difool : Ah d'accord.

100. Marie : Oh, la vache !

101. Shirley : Et ouais, et moi, je suis l'avant-dernière.

102. Romano : Et il y a que vous deux, là, qui posent des problèmes à cause du couple dans la famille ?

103. Difool : Eh, ce qui serait cool, ça serait qu'il y en ait un qui ramène une asiatique ou un asiatique, il manque un kebla dans la famille, qu'est-ce qui manque encore ?

104. Shirley : Mon grand frère sort avec une Guadeloupéenne et elle l'accepte, c'est ça que je comprend pas.

105. Difool : Bah, je sais pas, c'est bizarre, hein, c'est tellement bête que c'est impossible à expliquer, c'est bête, donc...

106. Shirley : Ah, ouais, non, mais il y a deux jours, on s'est tapé dessus, moi j'étais en larme, j'ai appelé une copine, Caroline, qui doit sûrement écouter, je lui fais un gros bisou...

107. Difool : Mais il ne faut pas en arriver à ces extrémité, tu vois, c'est...

108. Shirley : Ah, ouais, mais depuis l'âge de 9 ans, elle me tape dessus. Pour tout, moi je sais que quand j'étais gamine, elle m'empêchait de voir mon père, elle veut qu'on soit qu'à elle, quoi, mais il y a un âge...

TEMOIGNAGES D'AUDITEURS A L'ANTENNE ET POINTS DE VUE DE L'EQUIPE

109. Difool : Ouais, mais enfin, maintenant tu es majeure, a priori t'as le choix, hein. Attends, bouge pas, il y a Dado, là... Dado ?

110. Marie : Dado.

[Séquence football]

11 1. Difool : Sois la bienvenue Dado !

1 12. Dado : Ben, moi, en fait, j'appelle pour Shirley, parce qu'il m'est arrivé exactement la même chose.

1 13. Difool : Alors comment t'as géré l'affaire, toi, t'avais tes parents qui étaient racistes aussi ? 1 14. Dado : Ouais, voilà. Moi je suis Kabyle.

1 15. Difool : Ah, ça marche dans tous les sens, le racisme, c'est tellement international.

1 16. Marie : Ah, ben oui, ça, on sait, hein, que ça marche dans tous les sens, Malheureusement. 1 17. Difool : Et alors ?

1 18. Dado : Donc moi je suis Kabyle, et en fait mon copain c'est un Antilais, c'est un Guadeloupéen, ça fait deux ans, là, que je suis avec...

1 19. Difool : Ca va faire un beau bébé, enfin, si vous en faites un un jour.

120. Dado : Ouais, ben d'ailleurs, je suis enceinte.

121. Difool : Ah, ben vous vous êtes déjà entraînés, alors.

122. Dado : Et donc, ce qui s'est passé, c'est que au début, notre relation, mes parents l'ont su, quoi. Bon je suis pas trop discrète à ce niveau là et pourtant les parents, ils sont assez fermés d'esprit.

123. Difool : << Oui, ma chambre est à côté de la leur >>

124. Romano : << Ca va, la nuit, ils entendaient, là ? >>

125. Dado : Non, non, du tout, il est jamais venu chez moi, et ce qu'il s'est passé, c'est que... bon au début, ils ont trop rien dit, et ils se sont aperçu que ça continuait et que bon, ben, je sortais souvent, je partais souvent en week-end, bon, ils savaient que c'était avec lui mais ils disaient trop rien, quoi.

126. Difool : Ouais. Genre ils faisaient semblant de pas savoir, quoi.

127. Dado : Voilà. Et ce qui s'est passé, en fait, bon déjà, c'est que l'année dernière c'était de pire en pire, exactement les mêmes insultes. On se tapait pas dessus, mais bon, c'était limite, quand même. Et donc il arrêtait pas de l'insulter du matin jusqu'au soir, c'était intenable, quoi. Et donc, je suis partie l'année dernière de chez moi.

128. Difool : Alors t'es partie comment, t'es partie à l'aventure ?

129. Dado : Ah ouais, non, je suis partie du jour au lendemain. J'étais au taff et mon père m'a appelé.

130. Romano : Ouais t'es pas rentrée.

131. Dado : Ah non, même pas, mon père m'a appelé, et puis j'ai commencé à parler avec lui et puis une première fois, il me dit << écoute, tu fais un choix >>

132. Difool : Donc toi, le choix, ça a été de te barrer. T'es partie où ?

133. Dado : Ben, je suis partie chez lui.

134. Romano : Pas cher l'appartement, bien pratique.

135. Dado : Mais bon, c'était pas super, quoi, c'est vrai qu'il n'y avait pas grande intimité, et puis c'est vrai que les premier temps j'étais chez lui mais bon après ça me saoulait. Donc on avait l'intention de prendre un appartement, mais bon, c'était pas super facile, donc j'ai vécu à l'hôtel.

136. Romano : Ah, plus cher l'hôtel.

137. Difool : Ah, Romano !

13 8. Dado : Ouais, c' est vrai. Mais bon, j 'étais tranquille et j 'avais personne qui me prenait la tête, quoi, et puis bon, j'étais assez motivée pour trouver un appartement, donc je suis partie pendant trois mois. Et après bon... il y a eu quelques problèmes dans la famille. Donc, j'ai du y retourner. J'avais un peu de bon sens quand même parce que ma mère était malade. Et bon je suis revenue, les parents ils m'ont toujours pas acceptée. Bon, ben là, il y a trois mois, c'était vraiment l'apocalypse, quoi, c'était vraiment le summum, et donc je suis partie de chez moi, ça fait trois mois.

139. Difool : Et donc, là aujourd'hui, comment ça se passe ?

140. Dado : Ben écoutes aujourd'hui, ça y est, là, je viens d'avoir mon appartement, là, il y a quelques jours.

CONCLUSION ET PERSPECTIVES

141. Difool : 22 ans, c'est aussi un âge où on peut bouger, quoi.

142. Marie : Ouais, on peut devenir indépendant.

143. Difool : Mais si tu décides de bouger, Shirley, tu bouges, mais tu bouges en prévoyant un petit peu avant, c'est toujours... C'est peut être ce qu'il faudra faire et puis, après, derrière, peut être que ça se remettra un peu mieux avec ta mère.

144. Romano : Elle peut peut-être s'habituer, oui.

145. Shirley : Je crois pas. De toute façon, si je mets une croix dessus, je mets une croix dessus, quoi, c'est pas la peine.

146. Difool : Ouais, enfin, tu dis ça aujourd'hui... tu verras. Bon, Ne quitte pas Shirley, s'il y a d'autres réactions dessus. Merci Dado pour ton coup de fil. On peut même vous mettre en contact toutes les deux, les filles si vous voulez.

147. Shirley : Ouais, il y a pas de souci, ouais.

L'homophobie ou l'intolérance à l'égard de l'identité sexuelle

Trois sujets de notre corpus de huit concernent les questions d'intolérance à l'égard de la sexualité. Deux sujets sur l'homophobie des parents subie par des auditeurs homosexuels et un sujet plaçant l'auditeur en bourreau, ou en victime de sa propre intolérance à l'égard d'un transsexuel qu'il avait pris pour une « vraie » fille. Comme nous l'avons fait pour le racisme, analysons l'intolérance à l'égard de la sexualité, sous des éclairages différents, d'après notre rapport des dialogues diffusés à l'antenne dans les séquences sélectionnées dans notre corpus.

Homophobie / cas N°1 / 07 et 08 septembre 2004 « Mes parents refusent mon homosexualité et veulent que je devienne hétérosexuel » / séquence diffusée entre 23h42 et minuit le 07 septembre et entre 21 h41 et 22h05 le 08 septembre 2004 :

EXPOSE ET EVALUATION DU PROBLEME DE L'AUDITEUR APPELLANT

1. Difool : T'appelais pour quoi, toi, d'abord ?

2. André : En fait, mes parents, ils ont appris que j'étais homo...

3. Difool : Tes parents ils ont appris que t'étais homo ?

4. André : Ouais, voilà, depuis ce temps, ils font des histoires et ils veulent que je devienne hétéro.

5. Difool : Ah, oui, mais ça, à mon avis, on choisit pas, hein.

6. André : Voilà, c'est ça.

7. Marie : Si, si, ils pensent que ça se commande, peut-être.

8. Romano (imitant le père) : << D'abord, tu vas devenir hétéro, hein, ça suffit, tout de suite >>.

9. Marie (imitant le père) : << T'arrêtes de jouer, hein ! >>

10. Difool : Et toi, les files, pas du tout, hein ?

11. André : Non, pas du tout, non.

12. Difool : T'as déjà essayé ?

13. André : Ouais, mais ça me dit pas trop, non.

14. Marie : Ouais, il faut pas se forcer.

15. Difool : Mais t'es déjà sorti avec une nana, tu t'es retrouvé au lit et t'as pas aimé ça ?

16. André : Ouais.

17. Difool : D'accord, et puis avec les gars ?

18. André : J'ai déjà essayé et ça m'a plu, quoi.

19. Difool : Et là, actuellement, t'as un copain ?

20. André : Euh... j'en avais un mais j'ai été obligé de casser, quoi.

21. Difool : A cause de tes parents ? mais ils l'ont appris comment tes parents ?

22. André : Ben en fait, ils m'ont dit que c'est une personne qui leur a appris, je sais pas du tout qui c'est, donc voilà, quoi.

23. Difool : D'accord, il y a beaucoup de gens qui sont au courant, non ?

24. André : Ben...

25. Difool : A part tes mecs, j'imagine parce que bon...

26. André : Ben j'ai mes cousins qui sont en Suisse et une amie qui est au Portugal, donc...

27. Difool : Ca vient de quelqu'un. Les deux l'ont mal pris, le père, la mère ?

28. André : Voilà, ils l'ont mal pris, ouais.

29. Difool : Bon, ben écoute, ne quittes pas. Appelez-nous pour André et puis on va revenir avec toi André, là, tout de suite.

30. André : Ok.

31. Difool : Tu te prépares.

32. André : Ok, merci.

33. Difool : Bon, allez, on va mettre les pubs, tiens, au fait, comme ça on va être tranquilles. On fait les << questions express >>, André pour la suite et puis à minuit, on vous offre la << Skyroulette >> [Coupure publicitaire et musicale]

34. Difool : T'es là André ?

35. André : Ouais, je suis là, ouais.

36. Difool : Bon, donc toi, André, tu préfères les garçons, tes parents l'ont appris, ils ne sont pas contents.

37. André : Voilà.

38. Difool : Qu'est-ce qu'ils t'ont dit ?

39. Romano (imitant les parents) : << Deviens hétéro ! >>

40. Difool : Ouais, mais qu'est-ce qu'ils t'ont dit ?

41. André : Donc, en fait, déjà, ma mère a été très malade.

42. Difool : Oui. A cause de ça ?

43. André : Oui.

44. Difool : Elle s'est rendue malade parce que tu préfères les garçons ?

45. André : Voilà.

46. Difool : Oh, c'est dingue, ça.

47. André : Et mon père, sur la colère, qui m'a dit que j'étais plus son fils, que je l'appelais plus papa.

48. Difool : Ah.

49. André : Et le pire, c'est que mes grands parents ont été au courant.

50. Difool : Et, euh, ils réagissent pareil ?

51. André : Euh, donc, oui, mon grand-père a été à l'hôpital parce qu'il a fait une crise de nerfs.

52. Difool : Il a fait une crise de nerfs ? Ah, ouais, donc ils ont vraiment un problème par rapport à ça, eux.

53. Marie : T'es fils unique ?

54. André : Euh, non, j'ai deux petits frères.

55. Marie : Ah, ben dis donc...

56. Difool : Bon, il va falloir leur dire qu'ils se rattrapent sur les autres, et puis bon, que c'est pas une tare.

57. Marie : Il y a rien de grave.

58. Romano : Ah, il y a tout le monde qui s'est mis dans un état... ta mère qui va à l'hôpital, ton grand-père qui fait la crise de nerfs...

59. Difool : Non, c'est l'inverse : le grand-père fait une crise de nerfs et va à l'hôpital et ta mère, elle fait une dépression, c'est ça ?

60. André : Ouais, c'est ça.

61. Difool : Rhô !

62. Romano : Ben, faut pas se mettre dans ces états, c'est pas grave, hein.

63. Marie : Et ça fait combien de temps qu'ils l'ont appris ?

64. André : Ben, il y a peut-être une semaine de ça...

65. Marie : Ah, ouais, donc c'est vraiment tout neuf, quoi.

66. Romano : Mais tu sais pas du tout qui aurait pu dire, parce que, bon, l'autre il est pas malin non plus...

67. Difool : Oui, il aurait pu fermer sa gueule.

68. Samy : De toute façon, maintenant voilà...

69. André : Je sais pas qui c'est

70. Difool : C'est fou, ça.

71. Marie : Non, mais ils s'en sont peut-être rendu compte tout seuls, hein.

72. Difool : Ouais, peut-être qu'ils t'ont dit ça parce qu'ils s'en doutaient, non ?

73. André : Non, ils s'en doutaient pas, non, parce que bon...

74. Difool : Ouais, ça se voit pas.

75. André : Ouais.

76. Marie : Ah, la vache !

77. Difool : Hmm. Et toi, tu veux faire quoi dans cette histoire, là ? Parce que être rejeté par toute la famille, tout ça...

78. André : Mes parents, ils veulent... pas tout à fait m'obliger à être hétérosexuel, mais moi je veux pas trop, quoi.

79. Difool : Mais être obligé à être hétérosexuel, si t'es homo, t'es homo, il y a pas de... tu vas pas te forcer à faire un truc que t'aimes pas.

80. Romano : Il y a pas à choisir de toute façon.

81. André : Ouais, voilà, donc j'ai été obligé de leur dire, que bon, voilà, c'était fini... TEMOIGNAGE FICTIONNEL D'UN MEMBRE DE L'EQUIPE

82. Difool : T'imagines, Cédric, on te dis : << deviens homosexuel >> ?

83. Cédric : Oh, là, pas possible.

84. Difool : Voilà, ben c'est la même chose.

85. Marie : Ouais, ça se commande pas, ça.

86. Difool : Bah oui, t'as choisi ton truc, enfin t'as choisi, je sais même pas si t'as choisi...

87. Marie : Non, c'est naturel.

88. Cédric : Tu vas pas te forcer à kiffer une meuf, quoi, tu vois.

89. Difool : Non, et puis ça doit suffisamment être difficile à vivre pour toi parce que bon, c'est pas forcément, t'es pas comme la majorité, on va dire...

90. Marie : Le truc, c'est que tu dois te planquer de tes parents...

91. Difool : ...si en plus il y a tes parents qui réagissent comme ça, pff...

92. Romano : Mais depuis que tu leur as dit, là, tu re-communiques avec eux ? Tu parles un peu ou plus du tout, là ?

93. André : Euh, ouais, on recommence un peu, parce que j'ai été obligé de leur dire que bon, j'avais arrêté mes conneries, bon, voilà, quoi.

94. Romano : T'es obligé de leur mentir, quoi. T'es obligé de mener une double vie, quoi. TEMOIGNAGES D'AUDITEURS PAR MESSAGES (SMS ET INTERNET) ET POINTS DE VUE DE L'EQUIPE

95. Difool : C'est ce qu'on nous disait sur les SMS, il y avait un SMS... c'était qui qui disait ça, je sais même plus, << t'as qu'à faire croire que tu sors avec une meuf et tu te tapes son frère >>, c'était ça, en gros, le... Enfin bon, t'as qu'à faire croire que tu sors avec une meuf et puis... enfin, t'as qu'à faire croire rien du tout à la limite. Enfin, tu vois, c'est pas une honte, hein, le truc. Et toi, t'as honte d'être homo ?

96. André : Non, pas du tout, je suis fier d'ailleurs, donc...

97. Difool : Oui, il y a pas en être fier non plus, mais bon.

98. Cédric : Enfin, tu te caches pas, quoi, t'es pas... t'as pas honte de toi, quoi.

99. André : Non.

100. Cédric : Faut pas te forcer pour tes parents, moi, je pense, hein.

101. Marie : Et t'es avec un mec, là ?

102. Difool : Enfin t'as 20 ans en plus...

103. André : Euh, ouais, avant j'étais avec un mec, mais dès que mes parents ils l'ont su, quoi, euh, ils m'ont dit << casse avec lui, sinon je l'appelle et je le traite de tous les noms >>, donc, euh...

104. Marie (stupéfaite) : Oh !

105. Cédric : Ils sont bloqués là-dessus.

106. Marie : Quelle horreur !

107. Difool : Ben déjà, tu peux appeler ton mec et lui expliquer un peu cette histoire, parce que tu vois...

108. André : Ben ouais, entre temps je l'ai rappelé...

109. Difool : Il a compris ou pas ?

110. André : Ben oui, il a compris.

11 1. Marie : Ben c'est sûr, il est passé, j'imagine, par une phase similaire.

112. Difool : Ouais.

1 13. Marie : Donc je comprend.

114. Romano : En même temps, c'est assez extrême...

1 15. Marie : C'est horrible, là.

1 16. Romano : ...tout le monde pète les plombs dans la famille.

1 17. Difool : Oui, tu vois, il faut pas qu'ils se mettent dans cet état...

118. Romano : Ouais, ça va...

1 19. Difool : Je veux bien que, bon, à la limite, s'ils s'en doutaient pas, ça leur a fait un petit peut bizarre, mais, il y a pas...

120. Romano : Ouais, au final, c'est pas grave, tu vois, t'es pas malade, t'as rien, quoi...

121. Difool : Bah oui, et puis l'essentiel pour eux c'est que tu sois heureux, si t'es heureux avec un gars, bon...

122. Marie : Bien sûr !

123. Difool : Autant que tu sois heureux avec un gars que malheureux avec une fille.

124. André : Oui.

125. Difool : Ben oui.

126. Romano : À la limite, tu leur dis plus rien, quoi, tu vois, ils te demandent, tu restes vague...

127. André : Oui.

128. Difool : Bah oui.

129. Romano : Ouais, mais voilà, quoi, parce que si tu leur en parles et que ça les traumatise, ça sert à rien non plus, s'ils sont vraiment bloqués, bon... Enfin, je sais pas, moi je vois pas d'autres... Non, mais c'est vrai, moi je pense que je ferais ça, si mes parents étaient vraiment bloqués, tu vois, ils me poseraient des questions, je resterais vague...

130. Difool : Non, André ?

131. André : Ouais, mais voilà, quoi.

132. Romano : Si à chaque fois, ils te la remettent dans la gueule, si tu leur dis que t'as un mec, que c'est la crise de nerfs et compagnie, ça sert à rien non plus, quoi.

133. Difool : Il y a El Brigant qui dit << essaie de regarder les photos de la Marie, mates-la bien, et après, tu redeviendras hétéro >>.

134. Marie : C'est mignon... Non, mais tu devrais peut-être, si t'arrives pas à discuter avec eux, écrire une lettre avec tout ce que tu ressens, vis-à-vis d'eux, vis-à-vis de toi...

135. Difool : Par rapport à leur réaction, ça va être difficile, mais au moins tu auras rien à te reprocher.

136. Marie : Bien sûr, mais au moins une lettre, tu expliques bien ce que tu penses, ce que tu ressens, tout ça, même sur le moment s'ils le prennent pas bien, la lettre ils la gardent, et avec un petit peu de recul, tu vois, peut-être ils peuvent comprendre. Même si c'est dans un an, j'en sais rien, mais ça peut peut-être apporter quelque chose, quoi. De l'eau au moulin, en tout cas.

137. Romano : Ben, il faut espérer que ça évolue un peu, parce que de toute façon, ça peut difficilement être pire, quoi.

138. Difool : Bon, quitte pas, André. Si vous avez deux trois témoignages pour André, appelez-nous vite, là, allez-y sur le 41SKY, skyrock.com si c'est occupé sur le standard, sinon, 01.53.40.30.20. Tu restes là, André ?

139. André : Ok, pas de problème.

140. Difool : Et tu vas le revoir, ton gars ?

141. André : Ouais, si tu veux, je le revois de temps en temps, mais...

142. Difool : Bon, ben ça va, t'as pas rompu ton histoire d'amour à cause de cette histoire, tu vois, c'est pas tes parents qui vont décider avec qui tu vas vivre, hein ?

143. André : Bah, ouais.

144. Difool : Et puis c'est pas eux qui vont vivre avec surtout, tu vois, il vaut mieux que ce soit toi qui choisisse. Bon, reste là, André, bouges pas. Allez-y hein, là, tout le monde pour André... Euh, << Questions express >>

[Session << Question express >>, fin de l'émission]

[Reprise le lendemain, à 21h41]

145. Difool : Alors, André, ses parents ont découvert qu'il était homosexuel, et...

146. Romano (imitant les parents) : << Oui, et tu vas devenir hétéro, c'est moi qui te le dis ! >>

147. Difool : Et puis ça c'est mal passé, parce que le père, la mère, les grands parents, enfin tout le monde dans la famille...

148. Romano : Ah oui, ça a été crises de nerfs et compagnie, quoi.

149. Difool : Alors en gros, pour résumer, le grand-père a fait une crise de nerfs et s'est retrouvé à l'hôpital, la mère est sous cachetons...

150. Romano : Ouais, plus ou moins dépressive.

151. Difool : Plutôt plus que moins d'ailleurs. Et André, au milieu de tout ça, ils lui ont demandé << deviens hétéro >>.

152. Romano : Oui, alors que bon, on choisit pas trop, quoi.

153. Difool : J'imagine qu'on ne choisit pas trop, oui.

154. Marie : Ca, non, ça ne se commande pas.

155. Romano : Oui, et puis André, il aime pas du tout les filles, quoi, il nous a dit hier... c'est pas son truc, quoi.

156. Marie : Il va pas se forcer.

TEMOIGNAGES FICTIONNELS DES MEMBRES DE L'EQUIPE

157. Difool : Il a essayé, ça l'a pas trop fait kiffer. Donc, si vous avez des réactions, là, par rapport à André, déjà, votre réaction à vous, et puis, je serais curieux de savoir, si vous aviez un enfant et qu'il vous annonçait qu'il était homo, comment vous le prendriez ? Donc, projetez-vous quelques années plus tard, pour nous dire, hein, et Romano ?

158. Romano : Déjà, il faut que je me mette en tête d'avoir un enfant. (rires de Marie)

159. Difool : D'accord. Commence par ça. Et la Marie ?

160. Marie : Oui, ben moi je peux me projeter, hein, puisque j'en ai déjà un.

161. Difool : Alors, ça te ferait quoi, la Marie ?

162. Marie : Je sais pas. Non, je crois que j'aurais pas trop de problème vis-à-vis de ça. Non, vraiment, quoi, si mon fils est heureux, il n'y a pas de problème.

163. Difool : Bon, ben écoutez, on va reparler avec André. Comment il doit se comporter avec ses parents, en gros qui ont l'air bien, bien bloqués.

164. Marie : Ouais, grave.

165. Difool : On vous retrouve tout à l'heure.

[Coupure publicitaire et musicale, et un autre cas est traité]

RAPPEL ET POINT SUR LE PROBLEME DE L'AUDITEUR

166. Difool : Bonjour, André, d'abord.

167. André : Ca va, tout le monde ?

168. Difool : Ouais, écoute, ça va pas mal, André. Je racontais un peu ton histoire André, donc toi t'es homo, t'es parents l'ont découvert, ils ont, comment dire, mal pris la chose, et donc ils t'ont explique en gros que ou te devenais hétéro -je reprends leurs termes, hein- ou tu partais de la maison, c'est ça ?

169. André : Ouais, c'est ça, ouais.

170. Difool : Voilà, et toi, t'as pas envie de casser avec tes parents, tout ça, et tu voudrais savoir comment réagir, et on précise que c'est l'ensemble de la famille qui est contaminé puisque le grand-père a fait une crise de nerfs, il s'est retrouvé à l'hosto, ta mère est sous cachetons parce qu'elle est en dépression...

171. Romano : Et ton père ?

172. Difool : ...et ton père, ça va parce que bon, comme tu lui as dit que t'allais devenir hétéro, bon... il croit que c'est possible.

173. André : Euh... Oui, enfin, bon....

174. Difool : Oui, en fait, en gros, c'est un peu le bordel dans la famille, c'est ça ?

175. André : Ouais.

176. Difool : Et toi, tu voulais des témoignages de gens qui ont un peu vécu la même chose.

177. André : Ouais.

TEMOIGNAGE D'UNE AUDITRICE A L'ANTENNE ET POINTS DE VUE DE L'EQUIPE

178. Difool : Bon alors, Emilie ?

179. Emilie : Ben, en fait j 'ai l'impression de voir ma famille.

180. Difool : Ah, c'est sympa. Toi t'es hétéro, t'es homo, t'es bi, t'es quoi ?

181. Emilie : Moi, je suis hétéro.

182. Difool : D'accord.

183. Emilie : Et en fait, à la base, on est trois frères, donc on est des triplés.

184. Difool : Des triplés ? C'est dément, ça ! [...] Deux garçons et une fille, c'est ça ?

185. Emilie : C'est ça, et en fait c'est mon grand frère qui est homosexuel.

186. Difool : Donc, c'est marrant, il y a deux garçons, une fille, deux frères un qui est hétéro et l'autre homo ?

187. Emilie : Ouais, c'est ça.

188. Difool : Et pourtant ils ont été éduqués par les même parents, ils ont les mêmes gènes... donc c'est vraiment un truc...

189. Emilie : Voilà, et en fait, on est vraiment trois personnes complètement différentes et euh... on se comporte comme trois personnes différentes, comment dire, on n'a pas du tout le même caractère. Et donc, euh... moi et mon autre frère, on se doutait qu'il allait devenir homosexuel parce que bon...

190. Difool : Il était un petit peu bizarre, dans sa chambre, il y avait des posters de Steevy, et quand il sortait, il mettait... non, mais comment il était, il était maniéré, il était...

191. Emilie : Il était maniéré et assez efféminé.

192. Difool : Ouais, donc, ça se voyait plus.

193. Emilie : Ouais voilà, donc mon père pensait qu'il était attiré plus par la mode... et donc un jour, on devait à notre anniversaire inviter des copains. Et donc on a tous invité nos petit(e)s ami(e)s et lui il a invité son copain.

194. Difool : Ah ouais, donc lui il y a été cash, il a jamais rien dit à tes parents, il les a juste mis devant le fait accompli avec son mec.

195. Emilie : À la base, ils devaient pas être là-bas. Mais de fil en aiguille, c'est arrivé aux oreilles de mes parents qu'il était homosexuel. Donc il y a eu une petite discussion devant tout le monde, ils l'ont pris, il lui ont dit << oui, si tu reste à la maison, tu suis nos consignes, si tu veux rester avec ton mec, on te met à la porte >>.

196. Difool : C'est fou, ça, hein ?

197. Emilie : Ouais, et donc à 18 ans, il a choisi de prendre la porte parce que bon, il a dit qu'il l'aimait...

198. Difool : Ouais, et puis c'est aussi une question de respect, tu vois...

199. Emilie : Voilà, et moi et mon frère, on s'est un petit peu manifesté contre ça parce qu'on trouvait ça complètement stupide et entre guillemets un petit peu raciste de pas connaître la personne, de juste rester à l'aspect physique de la personne.

200. Difool : Ouais, ou alors juste d'accepter son truc, ils sont pas obligés de connaître la personne, au moins d'accepter la vie de ton frère, de ton jumeau. De ton triplé.

201. Emilie : Et donc nous on s'est un petit peu manifestés, on s'est dit que de toute façon, s'ils réfléchissent bien, ils ont une chance sur deux que ça marche. Que dans deux trois ans, peut-être une semaine, peut-être que ça marchera plus, peut-être qu'il sera attiré par les femmes et que...

202. Difool : Ouais, enfin tel que tu m'as décrit ton frère, s'il a décidé de partir à 18 ans, il a a priori choisi sa voie.

203. Emilie : Ouais, mais on voulait un peu rattraper...

204. Difool : Sa voie anale, Romano...

205. Romano : Ouais, c'est ça, oui... (rires)

TEMOIGNAGES D'AUDITEURS PAR MESSAGES (SMS ET INTERNET) ET POINTS DE VUE DE L'EQUIPE

206. Difool : Evidemment, ouais. Non, mais il y a pas mal de messages, hein, depuis tout à l'heure, làdessus, regarde, il y a Raph, du Puy-de-Dôme, qui dit << moi si je dis à ma mère que je suis homo, je suis mort, elle me jette de chez moi >>. Ca j'arrive pas à comprendre parce que ça reste ton fils, quoi. << Si mon enfant était homo, je l'accepterais, car après tout, c'est notre enfant, tant qu'il est heureux >>. Ouais, ça c'est une réaction assez sage, c'est Marie qui nous dit ça. Il y avait Abdel qui nous disait ça aussi, un message du même style << mon fils c'est mon fils, il fait ce qu'il veut >>. Et il y en a d'autres qui sont beaucoup plus québlo, quand même, hein. Ya Blakos, là, qui aurait du mal à accepter, y a Le Boss, du 18 qui dit << c'est sa vie, il faut le laisser faire >>, y a Strange 974 qui nous dit << Chacun ses envies, je pense que c'est un choix, je respecterai son choix tant qu'il le veut >> [message à propos d'un autre sujet] Bon, ben écoute, il y a plein de messages... William qui a la même chose que toi, regarde << appelez-moi car mon frère est homo, mes parents l'ont mis à la porte parce qu'il était homo >>.

207. Emilie : C'est mon frère.

208. Difool : Ah, c'est toi, William, alors ?

209. Emilie : Non, c'est mon autre frère.

210. Difool : Ah, pardon, je suis un peu en retard sur les messages, moi.

211. Emilie : C'est pas grave. Ah, oui, tu l'as envoyé à 21h43 [il est 22h01].

212. Difool : Ah, oui, donc il y a plein de messages. Vos messages vont arriver.

213. Romano : Ne vous inquiétez pas, ils vont passer, hein.

TEMOIGNAGE D'UNE AUDITRICE A L'ANTENNE ET POINTS DE VUE DE L'EQUIPE

214. Difool : Ne vous inquiétez pas, il y a beaucoup de monde. Et tu conseillerais quoi, toi, à André, dans cette histoire ?

215. Emilie : En fait, ça fait cinq ans qu'il est parti...

216. Difool : Qu'il y a eu le drame, oui.

217. Emilie : ... mes parents ont eu le temps de méditer dessus, ils ont vu qu'ils sont toujours ensemble, et là, c'est eux qui refont une approche vers nous.

218. Difool : Ah ouais, ils reviennent vers vous, ils reviennent vers ton frère pour essayer de re-tisser les liens.

219. Romano : Ben c'est pas mal.

220. Difool : Oui.

221. Emilie : Voilà. Donc ils commencent à apprendre, mais c'est lui maintenant qui repousse un petit peu, mais là, cinq ans après, il reviennent un petit peu essayer de lier, quoi.

222. Difool : Avec tout le respect qu'on doit aux parents, tout ça, moi je pense qu'il faut vivre sa vie en fonction de ses envies, tu vois, toi tu... Il va pas se forcer...

223. Romano : ...d'être avec une meuf s'il aime pas ça.

224. Difool : Ouais, d'être avec une meuf, ou vice-versa, si...

225. Romano : Qu'il la laisse plutôt aux autre, hein.

226. Difool : Exactement, Romano, c'est pas con, ça tiens. Non, mais c'est vrai, tu vois, c'est pas la peine de... Et bon, si tes parents font une approche, c'est plutôt pas mal, c'est qu'ils ont un peu compris, non ?

227. Romano : Ouais, ça progresse, quoi.

228. Emilie : Ouais, moi je pense qu'au début, ils réagissent... parce que dans leur tête, c'est toujours fille avec garçon, garçon avec fille, donc c'est pas compatible fille-fille et garçon-garçon. Donc c'est clair et net, après un moment, avoir médité à la question, et surtout après que la vague guerre, honte famille, tout ça est passé, ils réfléchissent qu'en fait du coup c'est encore beaucoup plus pire que s'ils n'acceptaient pas de toujours faire la guerre à leur enfant.

229. Difool : Ok.

230. Emilie : C'est pour ça qu'après, ils méditent.

231 . Difool : Ben écoute, j 'espère que ça va se passer comme ça pour André.

232. Emilie : Je lui souhaite.

233. Difool : Bah, écoute, je lui souhaite aussi. Merci en tout cas de ton coup de fil. T'as un copain, toi Emilie, actuellement, comment ça se passe ?

234. Emilie : Oui, et c'est encore le désastre pour mes parents, enfin bon.

235. Difool : Pourquoi, parce qu'ils voudraient que tu sortes avec une fille, maintenant ?

236. Emilie : Non, non...

237. Difool (imitant les parents) : « Oui, tu es hétérosexuelle, ma fille, on a vu avec notre fils ça se passe très bien...

238. Romano : ... oui, alors tu vas devenir gouine ». (rires)

[Autre sujet]

239. Difool : Si vous avez des témoignages, vous nous passez un coup de fil. Il y a plein de mecs qui laissent des messages, qui ont peur de passer... enfin qui ont peur de passer à l'antenne, à la limite, on prend un pseudo, vous inquiétez pas, hein. Si vous voulez débarquer ici, laissez bien votre numéro de téléphone sur le 41SKY, le skyrock.com.

[Nouvelles footballistiques]

Homophobie / cas N°2 / 27 octobre 2004 « Je suis homosexuel, mes parents sont homophobes » / séquence diffusée entre 23h00 et 23h54 :

EXPOSE ET EVALUATION DU PROBLEME DE L'AUDITEUR APPELLANT

1. Difool : Alors, qu'est-ce qui t'arrive ?

2. Brian : Ben, en fait, tu vois, le problème c'est que je suis gay.

3. Difool : T'es gay ?

4. Marie : Enfin, c'est pas un problème.

5. Difool : Tu n'es pas joyeux, tu es homo (rires). C'est à la page 45 des blagues du Belge.

6. Marie : Evidemment.

7. Brian : Et donc, je te disais, j'en ai parlé à tous mes potes, et tout, tu vois, ça se passe super bien, tu vois. Mais en fait...

8. Difool : Donc, tu le vis pas trop comme un problème, en fait ?

9. Brian : Le seul problème c'est que j'en ai parlé avec mes parents, et ils sont grave homophobes, tu vois, un truc de malade.

10. Difool : C'est quoi, c'est dès qu'il y a un film à la télé (imitant le père) << regarde-moi ces pédés >>...

11. Romano (imitant le père) : << Et ils se roulent des pelles ! >>

12. Marie (imitant le père) : << C'est pas normal, hein ! >>

13. Brian : Mais grave. Et genre, tu vois, la pub pour Pink TV ou un truc comme ça,

14. Difool : Oui, et c'est hallucinant, Pink TV, t'as 10.000 abonnés, un quart d'heure dans les JT, quand même.

15. Marie : Ouais, un truc de fou.

16. Difool : Des cars podiums qui étaient envoyés dans le truc, des reportages en direct, LCI s'est déplacée, c'est quand même hallucinant. 5000 personnes invitées à la fête, le tout-Paris, le show business...

17. Romano : Le show business réuni autour de Pink TV

18. Difool : Ouais, donc j'ai vu, et quand ils voyaient ça, ils réagissaient comment ?

19. Brian : Ben, ils ont dit << ouais, c'est quoi ce bordel ? >> et tout, << c'est ouf, les gens >>...

20. Difool : Mais ça les dérange pas, ils ont qu'à pas regarder s'ils aiment pas.

21. Brian : Ah, non, mais c'est des malades, ils font << ouais, de toute façon, les pédés c'est comme les pédophiles, c'est pas normal >> et tout...

22. Difool : Ah ouais, ils sont vraiment...

23. Romano : Ils sont bien québlo.

24. Difool : Ah ouais, ils sont bien québlo.

25. Brian : Un truc de malade.

26. Difool : Tes parents ils réagissent comme ça et tes potes ils ont réagi... tu l'as dit à tous tes potes ou tu l'as dit à certains potes ?

27. Brian : Je l'ai dit à tous mes potes, en fait.

28. Difool : Et ils ont réagi comment quand ils l'ont appris ? Ils savaient déjà ? Ils s'en doutaient ?

29. Brian : Non, parce que je fais pas du tout, tu vois.

30. Difool : Ouais, ok, ouais. Et donc ils ont été étonnés, comment ils ont réagi ?

31. Brian : Grave ! Le truc, je leur racontais, ils me disaient << attends, tu te fous de ma gueule et tout >>

32. Difool : Et comment tu l'as dit, t'es allé vers eux, tu... ?

33. Marie : Tu t'es lancé vis-à-vis de tout le monde, ou c'est...

34. Difool : Tu les as pris un par un, t'as fait comment ?

35. Brian : Tu vois, c'était, je voyais le film entre guillemets, tu vois. Je voyais ceux avec qui ça marcherait mieux, tu vois, j'en ai parlé petit à petit, tu vois.

36. Difool : Tu les as mis

37. Brian : Je tâtais le terrain, tu vois, je disais << tu penses quoi... >>, ouais, ils font << ouais, franchement, je m'en bas les couilles et tout... du moment que tu es heureux... >>

38. Difool : bah oui, c'est vrai, hein. Heureusement que c'est de plus en plus comme ça, tu vois, l'attitude de tes parents, elle est de moins en moins répandue.

39. Brian : Mais à cause de mes parents, ça me créé un blocage, tu vois, j'arrive pas à aller vers les gars.

40. Difool : Ah ouais, parce que tu as peur que tes parents un jour l'apprennent.

41. Brian : Voilà, c'est exactement ça.

42. Difool : t'as des frères, des soeurs, t'es tout seul ?

43. Brian : Non, je suis fils unique.

44. Difool : T'es fils unique, en plus.

45. Marie : Oh, en plus.

46. Difool : Ouais, donc tu peux pas en parler à un grand frère...

47. Brian : Ouais, donc tu vois c'est super chaud, donc c'est pour ça que je te dis, c'est un truc de malade.

48. Cédric : Mais tes parents ils t'ont déjà vu avec des meufs ?

49. Brian : Ouais.

50. Difool : Donc ils imaginent que t'as une vie classique et tout ça, c'est ça ?

51. Brian : Mais en plus, tu vois, comme je te disais, tu vois, ça se voit trop pas, tu vois.

52. Difool : Mais ça après tu vis... tu vois, il y en a plein ça se voit pas...

53. Marie : Oh, bah oui.

54. Difool : Chacun vit comme il veut.

55. Marie : Et il y en a un paquet, hein.

56. Difool : Et, euh... Alors, qu'est-ce qu'on nous dit, là, sur... Si vous avez deux trois trucs à dire à Brian...

57. Romano : Tu t'es jamais... tapé de mecs encore ?

58. Brian : Non, parce que ça me québlo grave, quoi.

59. Romano : À cause de tes parents.

60. Difool : À cause de ça, en fait ?

61. Brian : Non, parce que tu vois, je me dis, ouais, je me prends la tête, quoi.

62. Difool : Ouais, ben tu peux très bien avoir un gars sans forcément... sans forcément le dire à tes parents, hein.

63. Brian : Ouais, ouais...

64. Marie : C'est peut-être pas facile aussi.

65. Romano : Mais t'as peur de te faire griller, t'as peur de quoi, en fait ?

66. Brian : Ouais, c'est ça, en fait... et en fait, tu vois, on va dire que j'ai pas trop eu l'occasion, tu vois.

67. Difool : C'est marrant tu l'as dit avant d'avoir fait un truc avec un garçon, tu l'as déjà dit à tes potes que t'étais homo alors que t'as jamais rien fait...

68. Brian : Ouais, non mais, tu vois, j'sais pas.

TEMOIGNAGES D'AUDITEURS PAR MESSAGES (SMS ET INTERNET) ET POINTS DE VUE DE L'EQUIPE

69. Difool : C'est marrant. Et tiens regarde, on nous dit << c'est pas une tare >>, ouais, mais tes parents... Enfin pour toi c'est pas une tare, c'est clair, mais tes parents ils ont...

70. Romano : Ah ouais, ils sont bien bloqués, hein.

71. Difool : Ouais, ils sont bien bloqués par rapport à ça. Il y a Aphrodisiac du 79 qui nous dit, c'est drôle, << t'as qu'à leur dire que ça vient d'eux si t'es homo >>.

72. Marie : Oh non, arrêtes...

73. Difool : << Ca vient de tes parents, ils ont été contre, donc tu le deviens, c'est la rébellion. >>

74. Brian : Ils ont été punis (rires).

75. Difool : C'est Aphrodisiac qui nous dit ça. Oui, tu leur dis ça, oui c'est de votre faute. Non, en plus ça vient de... bah t'es comme ça t'es comme ça, c'est la vie, hein.

76. Romano : On choisit pas.

77. Difool : Bah, oui, hein.

78. Marie : Non, mais justement, t'as pas besoin de leur dire à tes parents, tu vois, si t'as une relation avec un mec, euh... et que t'arrives avec un pote à la maison, pour eux c'est naturel.

79. Brian : Hmm.

80. Marie : Tu vois, s'ils savent pas. Je pense que tu as des copines, tu viens avec à la maison, ils les connaissent et tout ça, non ?

81. Brian : Ouais, c'est trop chaud. C'est chaud, quand même.

82. Difool : Ouais, t'amène pas grand monde à la maison...

83. Marie : Ah ouais, t'as peur.

84. Brian : Non, mais tu vois j 'emmène vite fait deux trois potes tu vois, et j 'emmène des copines tu vois...

85. Difool : Ouais, mais de toute façon t'as jamais eu de mecs, donc t'as jamais pu ramener de mecs à la maison, hein. Bon, << Moi mon pote est gay, ses parents l'ont jeté de chez lui, il habite maintenant chez son mec >>, c'est qui, Boys, dans le 93. Euh... << Vas-y Brian, on est tous avec toi... même si t'es gay >> (rires) c'est gentil, hein ? Oziel, du 93 aussi, 19 ans. Bon, et qu'est-ce qu'on a... Ben je sais pas ce qu'on peut faire pour toi, hein, Brian ?

86. Brian : Ben, moi en fait, j'aurais aimé avoir des témoignages et si je pouvais avoir des numéros de gars aussi, si c'est possible.

87. Difool : Hmm. Donc tu veux des gars qui seraient un peu passés par le même... Mais pourquoi t'as vraiment envie d'en parler à tes parents, c'est ça que je comprends pas. Parce que tu vois, s'ils sont vraiment bloqués... tu vas pas pouvoir...

88. Brian : Ben en fait parce que ça me, on va dire ça me gène, tu vois, d'un côté, tu vois.

89. Difool : Hmm.

90. Brian : Je me dis c'est chaud, tu vois, avant avec mes parents, avec mes reups, je parlais de tout, tu vois. Et, tu vois, ça me, j'sais pas, ça fait chelou.

91. Cédric : C'est le fait de leur cacher quelque chose, quoi, qui te... met mal à l'aise.

92. Brian : Ouais, d'un côté, ouais, c'est vrai que...

93. Marie : Mais t'as conscience que ça va mettre une barrière énorme entre tes parents et toi, même s'il y en a déjà une, t'es conscient que ça va...

94. Cédric : Bah écoute, ça dépend comment c'est amené aussi...

95. Marie : Bah écoute, vu la mentalité de ses parents...

96. Romano : Oui, ça va être compliqué.

97. Marie : Ca va être difficile.

98. Brian : Moi aussi, je me disais d'attendre que je sois posé avec un gars et tout, et après...

99. Romano : C'est ce que j'allais dire, pourquoi tu commences pas, déjà, tu essaies une relation avec un mec quoi...

100. Marie : Bah bien sûr !

101. Romano : Et après, à ce moment-là, t'aviseras, quoi.

102. Difool : Bah, oui.

Marie : Quand tu seras amoureux et que tu auras envie d'assumer ton mec et tout ça, quoi...

103. Romano : Tu te casses trop la tête, hein.

104. Difool : Toi, c'est déjà bien, t'en as déjà parlé à tes potes alors que c'est vrai, t'as jamais rien fait pour l'instant. Pour l'instant, t'es ni homo ni pas homo, t'es... t'es vierge. Donc...

105. Romano : Tes parents, tu leur dis rien, vis ton truc, voilà, commence déjà par trouver un mec, et à ce moment-là, tu verras comment ça ce passe.

106. Difool : Regardes, on nous dit << Si t'es parents t'aiment vraiment, ils l'accepteront >>...

107. Brian : Mois je suis sûr, ils me mettent dehors un truc de ouf, hein.

108. Difool : Ils te mettent dehors, toi, tu penses ?

109. Brian : Ah ouais...

1 10. Difool : Il y en a plein qui disent << moi aussi, je pense que mes parents m'accepteraient si j'étais comme ça >>

11 1. Marie : Vu les idées, en plus t'es fils unique, ta mère, je pense qu'elle va faire une attaque cardiaque, là. Quand je dis fils unique c'est parce que les mères, elles sont toujours là, ouais, je veux être grand-mère, et si t'es fils unique, elle va mal le prendre, hein.

1 12. Difool : Et quand ils voient des films comme << La cage aux folles >> par exemple... 113. Brian : Alors là, ils pètent un câble.

1 14. Romano (imitant le père) : << Regardes-moi ça, les pédés ! >> (rires)

1 15. Marie : Est-ce qu'ils regardent les << Queers >> le samedi ?

1 16. Difool : Ouais, ou quand ils voient les << Queers >> le samedi, ouais ?

1 17. Brian : Non, parce que mes parents ils disent que c'est des émissions qui servent à rien en fait.
Parce que mes parents, on va le dire vulgairement, ils sont un petit peu cons, tu vois, ils font

<< ouais, ils veulent nous envahir, et tout, nah nah nah... >>. Ils racontent... mais des fois ils disent... mais...

1 18. Difool : << Ils vont nous envahir >>, ils disent ? Non mais ils sont, ils sont... il faut qu'ils se calment, hein.

1 19. Marie : Ils sont partis, hein.

120. Cédric : Ah, ouais, ouais, ouais...

121. Romano : Ah, oui, il faut qu'ils se détendent, un peu...

122. Difool : Qu'il regardent la vie du bon côté.

123. Cédric : Dans leur entourage, ils ont pas...

124. Romano (imitant le père) : << Oui, c'est les envahisseurs (rires). Ils arrivent (rires). Ils ont leur chaîne de télé. >> (fou rire)

125. Difool : Faut pas être parano, et puis c'est pas grave, hein.

126. Romano : Ah ouais, ouais, ouais.

127. Marie : Ah, non, loin de là, hein, c'est de l'amour à la base, donc...

128. Difool : Bah ouais, tu vois.

129. Romano : Faut pas qu'ils s'inquiètent tes parents, il va rien leur arriver, hein.

130. Difool : Regarde, ça arrive aussi aux filles, il y a Billy qui nous dit...

131. Brian : En fait tu vois, je pète un câble.

132. Difool : Il y a Billy qui nous dit << Je suis bi, et j'ose même pas en parler à mes copines >>. Ben t'es pas obligée, c'est ta vie à toi, aussi, hein.

133. Marie : Mais bien sûr !

134. Difool : Donc que tu aies quelqu'un à qui en parler, quelqu'un qui soit au courant, parce que c'est vrai que c'est quand même bien de pouvoir se...

135. Cédric : Se confier.

136. Romano : C'est bien que tes potes soient au courant, tes parents, machin, de toute façon, hein...

137. Difool : T'as au moins tes potes pour te confier, mais bon. Et tes parents, tes potes étant au courant, tes parents, ils vont peut-être le savoir un jour ou l'autre, j'en sais rien.

138. Marie : Ouais, ça c'est possible.

139. Brian : Ah, mais c'est chaud, hein.

140. Difool : Bah oui.

141. Romano : Vas pas les voir aujourd'hui en leur disant, tu vois...

142. Marie : Ah, non, non, non, ça servirait à rien, hein.

143. Romano : Pour le moment, c'est pas la peine, quoi.

144. Marie : Attends déjà de plus vivre chez eux, d'avoir une relation posée, et...

145. Cédric : Non, mais peut-être qu'un jour, peut-être quand ils vont apprendre que t'es homo, ils vont changer d'idée, tu vois.

146. Romano : Ouais, pas sûr, hein.

147. Brian : Ouais, peut-être, ouais.

148. Cédric : Imagines, t'a un bon ami...

149. Difool : Oui, personne n'est bloqué, j'espère, définitivement. Allez-y laissez nous des messages 41SKY, skyrock.com et puis 01.53.40.30.20. Reste-là Brian, on va revenir.

150. Brian : Bon, ben je vous remercie, à tout à l'heure.

[Autre sujet]

151. Difool : Et puis on a des réactions déjà pour Brian, on nous dit << faut assumer, afin d'être bien dans sa peau >>, c'est Féminine. Ouais, mais assumer quand tu as des parents homophobes et que toi t'es homo, c'est chaud quand même, hein. Si tes parents tu les aime, tout ça, t'as plutôt envie qu'ils t'aiment, et si... si t'entends un discours homophobe. T'entends un discours homophobe depuis que t'es tout petit, toi, en fait, à la maison, Brian ?

152. Brian : Ouais, ils ont toujours été comme ça, ouais.

153. Difool : Ben ça se passe pas toujours pareil, et heureusement, regarde, on nous dit << j'ai deux super potes homo, et les parents s'en foutent, chacun sa sexualité, les barrières, c'est n'importe quoi, au contraire >>, tout ça... Donc tu vois, c'est ouvert dans certains coins, c'est pas trop ouvert dans d'autres. Et puis toi tu es tombé, bon tes parents, ils sont...

154. Romano : Ouais, ils sont bien bien bloqués.

155. Difool : Ouais, ils sont un peu extrémistes, là dessus

156. Brian : C'est des malades

157. Romano : Non, en plus, ils font des comparaisons immondes, quoi, tu sais...

158. Difool : Il y a Farid aussi qui disait qu'il était à peu près dans la même situation que toi. Laisse ton numéro, Farid, même si tu veux pas passer à l'antenne, même si tu flippes un peu, euh... laisse ton numéro au moins, qu'on vous mette en contact, là. Bon, reste là, Brian, on va y revenir.

159. Brian : Ok, ça marche, à toute à l'heure.

[Autre sujet]

TEMOIGNAGE D'UN AUDITEUR A L'ANTENNE ET POINTS DE VUE DE L'EQUIPE

160. Difool : Allez, on va prendre Yannick, là, au téléphone, avec nous. Yannick à Grenoble, Salut Grenoblois.

161. Yannick : Salut Difool !

162. Difool : Comment ça va?

163. Yannick : Alors, Yannick, ouais, t'appelles pour Brian. T'es là, Brian, aussi ?

164. Brian : Ouais, je suis là.

165. Difool : Alors toi, Brian, t'es gay, comme tu nous as dit tout à l'heure. Tu, euh, bon, tu l'assumes plutôt bien puisque t'en as parlé à tes potes. Enfin, t'es gay, pour l'instant tu préfères les garçons, mais t'as jamais eu de relations avec qui que ce soit. Ni fille, ni garçon ? T'as jamais embrassé quelqu'un sur la bouche ?

166. Brian : Si, ah, quand même, si !

167. Difool : Des filles ou des garçons ?

168. Brian : Ah, bah, des filles.

169. Difool : Jamais des garçons ?

170. Brian : Non.

171. Difool : Et, euh... donc il y a eu pas mal de messages pour toi, il y avait aussi pas mal de coups de fil. Donc toi tu voudrais en parler à tes parents et tes parents sont particulièrement homophobes.

172. Brian : Ouais, c'est ça.

173. Difool : Et t'en as parlé à tes potes et c'est passé et tes parents, t'es sûr que ça passera pas, quoi.

174. Brian : Ah, ben c'est pas la peine d'en parler, c'est clair, ça passera pas.

175. Difool : Ca passera pas. Aïe... bah, si ça passera pas, nous on disait pourquoi tu veux leur en parler ? Parce que t'as peur qu'ils le découvrent comme ça ?

176. Brian : Ouais, c'est ça, ouais.

177. Difool : Bon. Alors ce qu'on va faire, on va prendre Yannick. T'es là, Yannick ?

178. Yannick : Je suis là.

179. Difool : Tu es là. Bordelais, 20 ans. Non, Grenoblois, 20 ans, excuse-moi, oui.

180. Yannick : Attention, ne pas confondre.

181. Difool : Excuse-moi, Yannick. (rires) Alors, Yannick, dis-nous.

182. Yannick : J'appelais parce que j'étais un peu dans le même cas que Brian. Moi, j'ai commencé à dire à mes amis tout ça que j'étais gay quand j'avais... quand j'allais en première. Donc ça remonte. Et en fait je l'ai dit à mes parents parce qu'on se sent beaucoup mieux quand on le dit à ses parents. Enfin, je sais pas, c'est...

183. Difool : Mouais. Ils sont comment, tes parents, toi ?

184. Yannick : Franchement contre.

185. Difool : Mais contre... enfin << contre >>...

186. Marie : Oui, << contre >>, ça veut rien dire.

187. Difool : Contre au point des parents de Brian, ou... quand même pas ?

188. Yannick : Non, quand même pas parce que... Quand je l'ai dit à ma mère, bon, c'est sûr que quand je lui ai dit, elle s'est mise à chialer, pour elle c'était une maladie...

189. Difool (imitant la mère) : << Ah, mon fils, tu es malade... >>

190. Yannick : Ah, carrément.

191. Difool : Ah, ouais, à ce point, ouais.

192. Yannick : c'était << t'inquiètes pas, ça va passer, t'es encore jeune >>

[Quelques secondes de problèmes de communication]

TEMOIGNAGES D'AUDITEURS PAR MESSAGES (SMS ET INTERNET) ET POINTS DE VUE DE L'EQUIPE

193. Difool : Et toi, donc, ouais, toi, ça s'est bien passé. Mais c'est pas pour tout le monde pareil, regarde, il y a des messages, là... << moi j'en ai parlé à mes parents, je regrette, j'ai plus de contact avec eux. >> Donc t'as un peu peur qu'il t'arrive ça, Brian, toi ?

194. Brian : Ouais, c'est ça, exactement, ouais.

195. Difool : Hmm. << Je suis pas homo, mais il serait temps que les préjugés sur les homos disparaissent. >> Oui. Ben, les préjugés, ils sont pas près de disparaître parce que quand tu vois des homos à la télé, je sais pas si... en général, ils sont toujours très caricaturaux, quoi.

196. Romano : Ouais, c'est des caricatures, c'est clair.

197. Difool : C'est la représentation à la télé qui pose un problème à tes parents, c'est ça ?

198. Brian : C'est exactement ça.

199. Romano : Ouais, en fait, tes parents, ils connaissent pas d'autres homos que ceux qu'ils voient à la télé, quoi.

200. Brian : Ouais, franchement, parce que quand tu vois ceux qui sont à la télé...

201. Difool : Bah, à la télé ils montrent que les caricatures, enfin, les caricatures, les gens ils font ce qu'ils veulent, mais...

202. Romano : Ouais, mais tous les homos ne sont pas comme ça.

203. Brian : Exactement, ouais.

204. Difool : Il n'y a qu'un type d'homo, ouais, qu'on voit à la télé.

205. Brian : Parce que franchement, à la télé, quand tu vois, un homo, tu fais, ouais, c'est une folle, ou quelque chose comme ça, tu vois. Et franchement tout le monde est pas comme ça.

206. Difool : Oh, ils ont le droit de faire comme ça, hein...

207. Brian : Ouais, ouais, ils ont le droit de faire ça, je veux dire, j'ai rien contre eux, tu vois...

208. Difool : Toi, t'aimerais bien être représenté aussi quoi, c'est-à-dire qu'on voie un homo qui est pas forcément caricatural.

209. Brian : Mes parents, ils ont l'image des homos comme...

210. Difool : La cage aux folles.

21 1. Brian : Exactement.

212. Romano : Comme des Queers.

213. Marie : Non, mais il y a forcément des mecs connus, ils savent pas que c'est des... qu'ils sont homos, hein.

214. Difool : Ils ont sans doute des amis, ou des gars dans la famille qui...

215. Romano : Ouais, qui sont homos...

216. Marie : Sans le savoir.

217. Difool : Bah, oui. Donc, c'est vrai. << Mets-toi une moustache >>

218. Marie (ironique) : Bien sûr !

219. Difool : Merci du message, Bradpitt << ça fait viril >>.

220. Marie : Oui...

221. Difool : Je suis pas sûr que ça arrange les choses, ça peut aussi faire village people, et ça c'est pas dément.

222. Romano : Ouais.

223. Marie : Ah, c'est horrible.

224. Romano : Après tu mets le costume de policier, là. (rires)

225. Difool : Et là, c'est vrai, c'est horrible. << Tu devrais pas leur en parler, à tes parents >>, regarde, il y a des messages, alors c'est pas moi qui dit ça, c'est les messages. . << Tu devrais pas leur en parler, à tes parents. Ils le découvriront suffisamment tôt >> et il y a des messages inverses : << plus tôt ils le découvriront, mieux ce sera pour toi >>, ça c'est Strasbourgeois qui nous laisse le SMS, là.

226. Brian : D'un côté, mes potes ils me disent ça, ils me disent << ouais, attends d'être posé avec un gars et après tu leur parleras >>.

227. Difool : Bah oui. Et puis t'as des gens, déjà, à qui te confier, tu vois, il y a des messages tout à l'heure : << moi je peux en parler à personne, ni à mes potes, ni à mes parents >>. Donc, tu vois, toi tu as au moins tes...

228. Romano : T'as au moins tes potes, ouais.

229. Difool : Bah, oui, tu peux en parler avec eux, hein.

230. Brian : Ouais, c'est clair.

231. Difool : Hmm. Et les filles, vraiment, ça t'intéresse pas du tout ?

232. Brian : Ah, non, pas du tout.

233. Difool : Pas du tout.

234. Brian : J'ai eu, entre guillemets, l'expérience, mais ça m'intéresse pas du tout.

235. Difool : Ouais, c'est pas ton kif, quoi.

236. Brian : Ah, non, pas du tout.

237. Romano : Mais quand tu penses à une fille, tu bandes pas, quoi ?

238. Brian : Non.

239. Difool : << Comment tu t'es rendu compte que t'étais gay ? >> nous demande Minette, là.

240. Brian : Parce que en fait, euh, je suis déjà sorti avec des meufs et j'ai déjà fais des trucs, tu vois, et j'ai vu que ça me plaisait pas autant que ça, tu vois. Et, tu sais, dès que je voyais un gars, tu vois, je me disais...

241. Difool : Ouais, un gars, en fait ça t'excite alors qu'une meuf ça t'excite pas.

242. Brian : Exactement.

243. Difool : << J'ai des amis qui étaient homos, et ses parents l'ont bien vécu, pourtant au début c'était pas gagné >>. Bon.

244. Romano : Il faut espérer que tes parents ils évoluent un peu, quoi. Même pour eux, parce que c'est chaud.

245. Difool : Il faut qu'ils se détendent un peu, oui.

246. Romano : Mais sinon, tu sais, comme genre de vedette de la télé ou de je sais pas quoi, c'est qui qui te plairait comme mec ?

247. Brian : Mon style de gars ?

248. Difool : Ouais, c'est quoi ton style de gars, ouais ?

249. Brian : Bonne question, euh... franchement, moi...

250. Difool : Tu peux également prendre des exemples dans l'équipe, hein. Tu as Romano, Cédric...

251. Brian : (rires) Romano, Romano !

252. Difool : Parce qu'il est très anal, c'est ça ? (rires)

253. Brian : Non, mais c'est plutôt, tu vois, bien foutu, blond aux yeux clairs, tu vois.

254. Difool : D'accord, le style Norvégien.

255. Brian : Ouais, on va dire ça comme ça.

256. Difool : Un peu comme... comment, l'autre, de Nice People, le Suédois...

257. Romano : Nale.

258. Difool : Voilà, Nale.

259. Romano : Ah, il faut s'en souvenir de lui, hein, il faut aller chercher loin.

260. Difool : Bah oui, mais rappelez-vous.

261. Brian : Je vois trop pas c'est qui. Je vois pas trop...

262. Romano : Non, mais c'était un grand blond qui était dans une émission de TF1 << Nice people >>, là.

263. Difool : Je te rassure, c'est pas très grave (rires). Bon, reste avec nous Brian. C'est le même problème aussi pour les nans, hein. Je lisais le message de Méli tout à l'heure, là, j'ai le message de Sonia qui a le même souci, qui dit << si j'en parle à mes soeurs, c'est l'horreur, alors ne même pas penser aux parents >>. Ah, ouais. << N'en parle pas à tes parents >> pour Ben, du Loiret, là. << Vis ta vie, trouves-toi un mec, et après t'en parleras peut-être à tes parents si tu en sens le besoin >>, c'est le message du Polac, salut à toi le Polac. Bon, ben reste dans le coin, Brian. Ne bouges pas. On va prendre Audrey, là, au téléphone, et puis vous tous, hein, allez-y : 01.53.40.30.20. Audrey, t'es Marseillaise ?

TEMOIGNAGES D'AUDITEURS A L'ANTENNE ET POINTS DE VUE DE L'EQUIPE

264. Audrey : Oui.

265. Difool : Bonjour Audrey. Tu ferais quoi, toi, si t'étais à la place de Brian ? [Audrey appelle pour un autre sujet]

266. Audrey : Euh...

267. Difool : T'en parlerais à tes parents, tu le dirais ? Tu ferais quoi ?

268. Audrey : Euh, non, j'en parlerais pas à mes parents, j'attendrais d'avoir une relation sérieuse avant d'en parler.

269. Difool : Ouais, je pense que c'est pas plus mal, hein. Comme dirait Romano, mettre la charrue avant les boeufs.

270. Romano : Oui, c'est pas bon de vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué.

271. Difool : Aussi, oui.

[Autre sujet]

272. Difool : Merci à Yannick qui nous a appelé pour Brian tout à l'heure. Même si on entendait mal, merci du conseil. Brian en fait, il est gay, il sait pas comment le dire à ses parents, ses parents sont super méga bloqués.

273. Romano (imitant les parents) : << Regarde-moi ça, ça se roule des pelles ! >>

274. Difool : Voilà, c'est un peu ça. Voilà. Donc, Brian, la majeure parie des messages, je reprends juste là pour... La majeure partie des messages dit qu'il faut euh... ouais t'attends, hein. T'attends d'avoir une relation avec un gars et puis...

275. Romano : Moi, je serais dans ton cas, c'est ce que je ferais en tout cas, moi, hein.

276. Difool : Bah oui. C'est vrai, hein.

277. Romano : T'attends, pour le moment, de toute façon, il se passe rien au final, quoi. TEMOIGNAGES D'AUDITEURS PAR MESSAGES (SMS ET INTERNET) ET POINTS DE VUE DE L'EQUIPE

278. Difool : Tu excites des femmes, Brian, depuis tout à l'heure. Regarde, il y a Senty, une nana du 59, qui dit << la voix de Brian me fait grave kiffer, je suis toute chose. Il est sûr qu'il aime que les hommes ? >> (rires)

279. Romano : Il y a Jarod aussi, mais là c'est un mec, << La voix de Brian me fait kiffer, mettez-moi en contact avec lui >>.

280. Difool : Ah, ben voilà, tiens, tu vois ? (Rire timide de Brian, << Ah, ah ? >> de l'équipe)

281. Romano : Ah, là, tout de suite, on sent.

282. Difool : Regarde << moi j'étais gay, mes parents quand ils l'ont su, ils m'ont viré de la maison >>, c'est Popol du 94 qui nous dit ça, il a 19 ans. Ça c'est chaud quand même.

283. Brian : Putain !

284. Difool : Ouais, mais c'est euh... Ah, voilà, c'était pour faire un petit point avec toi, donc je sais pas trop quoi te... quoi te dire Brian, là-dessus.

CONCLUSION ET PERSPECTIVES

285. Brian : Ben en tout cas, je vous remercie, déjà, c'est super sympa, tu vois. Et franchement, vous déchirez...

286. Difool : On a bien retenu le message sur les caricatures, tout ça...

287. Brian : ... parce que dès qu'il y a un problème, c'est bien, tu vois, il y a quelqu'un pour parler, franchement, vous déchirez.

288. Difool : Non, et puis sois heureux, et si le être heureux ça passe par le fait d'être avec un gars, ben vas-y, éclates-toi, hein.

289. Romano : Ouais, et t'empêches pas de sortir avec un mec même si tes parents le savent pas, quoi.

290. Difool : Bah oui.

291. Romano : Vis ta vie quoi.

292. Brian : Je vais pas me prendre la tête

293. Difool : Ouais, et puis parles-en à tes potes, t'as des potes qui sont plutôt ouvert, c'est plutôt pas mal, quoi.

294. Brian : Ouais, c'est clair.

295. Difool : Et il leur arrive de faire des blagues sur les homos, non, j'imagine, tes potes ?

296. Brian : Ah, ben ouais...

297. Difool : Bon, tu le prends bien ?

298. Brian : Ouais, ouais !

299. Difool : Bah oui, puisque tu sais qu'ils le font pas méchamment puisque c'est tes potes, quoi.

300. Brian : Ouais, c'est clair, ouais.

301. Difool : Ok, ben ça roule, Brian. Ben de toute façon, si t'as besoin de quoi que ce soit, on est dans le coin et puis on te passera un coup de fil.

302. Brian : Ok.

303. Difool : Et puis il y en a, il y a aussi des messages qui nous disent le contraire, tu vois, je te faisais un petit résumé tout à l'heure, tu vois, il y a Anarchie qui dit << eh, il faut assumer ! oh, ça fait rien d'être homo >>, je lis le message tel qu'il est écrit, là, avec le << eh >> et le << oh >>. Donc tu vois il y a aussi ça. Mais c'est vrai que pour toi, avec les parents, c'est pas évident.

304. Brian : Hmm.

305. Difool : Bon, bah, écoute, bon courage, hein.

306. Brian : Ben, je vous remercie.

307. Difool : Tchao ! Et puis il y a Abdel qui nous dit << pour Brian, j'ai 18 ans, je suis rebeu, c'est hyper difficile, j 'ai décidé de ne pas le dire et je suis très épanoui, je le vis bien comme ça, c'est un milieu dur, Brian doit pas le dire, moi je le vis bien >>. Ok, ben c'est noté pour le message, Abdel. Ben merci à vous en tout cas, pour les messages.

Homophobie / cas N°3 / 10 novembre 2004 « Vexé que ce soit un transsexuel, j'ai été violent » / séquence diffusée entre 22h05 et 22h1 3 :

Ce qui fait joindre cet extrait dans ce thème est la plus grande catégorie de l'intolérance du fait de la sexualité, de l'orientation sexuelle.

EXPOSE ET EVALUATION DU PROBLEME DE L'AUDITEUR APPELLANT

1. Difool : Sois le bienvenu, t'as 22 ans, c'est ça ? [...]

2. Jérôme : En fait, il m'est arrivé trop un truc de fou, tu vois ?

3. Difool : Oui... enfin, non, je sais pas.

4. Jérôme : En fait, t'as vu, je suis allé dans un cabaret.

5. Difool : Un cabaret. Le Moulin rouge...

6. Romano : Le Lido... le Paradis latin...

7. Jérôme : Pas des cabarets en France, tu vois. En fait, t'arrives là bas, tu choisis ta meuf...

8. Romano : Ah, oui, c'est pas un cabaret, en fait, c'est un bordel ?

9. Jérôme : Voilà, enfin, genre...

10. Difool : Ah... parce que, oui, au Lido, la nana qui danse avec des fanfreluches et de plumes de partout...

11. Romano : Avec des plumes dans les fesses.

12. Difool : ... elle est juste là pour danser.

13. Romano : Oui, c'est ça.

14. Marie : Tu peux pas la toucher, hein.

15. Romano : Oui, d'ailleurs, je pense que si t'essaies de la toucher, tu te fais corriger assez rapidement.

16. Marie : C'est clair !

17. Difool : Et très très rapidement, quelqu'un arrive vers toi et te dis « bonjour monsieur » [bruit de torgnole]

18. Romano : Désolé, on ne touche pas.

19. Jérôme : Ben justement, le quelqu'un qui est arrivé, là, la personne que j'ai vue, laisse tomber.

20. Difool : Et c'était quoi alors, c'...

21. Jérôme : Ca ressemblait trop à une meuf.

22. Difool : Ah, donc c'était pas une meuf. Mais ça c'est passé comment, c'est un cabaret où t'as... comment ça se passe ?

23. Jérôme : Ben tu vois t'arrives, tu prends un verre, après t'as des aguicheuses, là, tu sais, qui viennent vers toi, tu leur paies un verre et après si le courant passe avec toi, tu montes avec elle, tu paies la bouteille de champagne, tu montes avec elle et tu fais ce que t'as à faire avec elle, tu comprends ?

24. Romano : Oui, c'est un bar à prostituées, quoi.

25. Jérôme : Ouais, c'est un bar à putes.

26. Difool : Ah ouais, donc c'est pas un cabaret.

27. Romano : C'est pas du tout un cabaret, en fait (rires). En fait, rien à voir.

28. Marie : C'est le nom officiel, quoi.

29. Jérôme : Voilà, c'est le nom officiel.

30. Difool : Et c'est où, ça ?

31. Jérôme : Au Luxembourg.

32. Difool : Ah, alors non seulement il y a des banques partout au Luxembourg...

33. Romano : Oui, de l'argent sale...

34. Difool : Mais en plus il y a des cabarets. Ben écoutes... il faut bien dépenser l'argent des banques, hein. Et il y avait beaucoup de monde dans ce truc quand tu es arrivé ?

35. Jérôme : Franchement, tu sais quoi, il y a que des mecs avec des grosses Mercos, tu sais, que des mecs qui doivent tromper leur femme et tout ça...

36. Difool : Et toi, c'est la première fois que tu vas là bas ?

37. Jérôme : Franchement, c'est la deuxième fois que j'y vais. La première fois, j'ai rien fait, tu vois.

38. Difool : Donc tu as vu une personne très très belle, qui...

39. Jérôme : Eh, franchement, tu sais quoi, crois-moi, du 95, 95B minimum, une belle tête, charmante et tout. Charmante ou charmant, je te dirais ça après. Et franchement, elle m'aguiche, tu vois, elle me dit « monte avec moi », tu paies mais tu montes. Et j 'ai dit ok.

40. Romano : Mais tu paies combien ?

41. Jérôme : 250 euros.

42. Romano : Oh... oh, non de dieu.

43. Difool : Cher...

44. Marie : Ah, ça fait mal au cul, quand même, hein...

45. Romano : Bah ouais.

46. Difool : Ah bon... A Jérôme... ça t'a fait mal au cul ? (rires)

47. Romano : Non mais 250 euros, c'est quoi, c'est une bouteille de champagne, que tu paies ?

48. Jérôme : Ouais, tu paies la bouteille de champagne et la gadjie avec qui tu es.

49. Difool : Et après, tu montes où, dans une chambre ?

50. Jérôme : Ouais, tu sais, c'est une petite chambre et tout, et tu montes avec elle, et, tu sais, c'est à huis clos y a que toi et elle, et personne qui regarde, t'es tranquille, tu vois, tu fais ce que tu veux. Et moi, tu sais, je commence un petit peu à, tu vois, à avoir des rapports avec elle et tout.

51. Difool : Hmm. Vous avez fait quoi, t'as commencé à la caresser, tout ça ?

52. Jérôme : Ouais, je commence à la caresser. Elle avait une bonne paire de tétés alors j'en ai profité, tu vois. Et par contre, quand j 'ai commencé à la pénétrer, et je voyais que mon sexe, il rentrait même pas de moitié, tu vois.

53. Difool : Oh, étroite, hein.

54. Romano : Oh, mais qu'est ce qui se passe la dedans ?

55. Marie : Elle était pas profonde en fait ?

56. Jérôme : Non, elle était...

57. Difool : Mais, t'étais où, exactement...

58. Romano : Dans son trou du cul. (rires)

59. Jérôme : Non non non non non, j'étais bien dans le trou, pas le trou du cul, dans l'autre trou.

60. Difool : Au début, tu nous as dit, on sait pas si c'est un homme ou une femme, en fait.

61. Jérôme : Attends, mais laisse-moi terminer.

62. Difool : Si c'est un homme, il a forcément une bite.

63. Romano : Oui, au dessus du trou, il y avait une paire de couilles.

64. Jérôme : Non, il avait pas de bite, je te promet, il avait pas de bite.

65. Difool : Bah, c'est une femme.

66. Romano : Non, c'est un trans.

67. Jérôme : Ouais, il avait été transformé...

68. Difool : Ah, d'accord, un transsexuel.

69. Romano : Oui, il s'était fait opérer.

70. Jérôme : Voilà, ouais. Et tu sais quoi, moi j'étais pas au courant, alors du coup, je l'ai pénétré, et au moment où j'ai vu que c'était un trans, ça m'a...

71. Marie : Attends, mais tu t'en es rendu compte parce que tu rentrais pas entièrement ?

72. Jérôme : Tu sais, le gars, il mouillait pas, la meuf, je préfère dire la meuf...

73. Marie : Ah, ouais, c'est vrai, il y a pas de mouille quand tu te fais opérer.

74. Jérôme : Et non, y avait rien...

75. Romano : Normalement, ils mettent du gel.

76. Marie : C'est logique.

77. Jérôme : Et tu sais, je trouvais ça trop bizarre...

78. Difool : Achète du gel, la prochaine fois, Jérôme (rires de Marie).

79. Jérôme : Non, non, non, il n'y aura pas de prochaine fois.

80. Difool : Toi aussi, ça t'a calmé, c'est comme les plans à trois pour Karim, là.

81. Marie : Terminé.

82. Difool : Eh bien pareil pour les cabarets, Jérôme.

83. Jérôme : Laisse tomber.

84. Difool : Et t'as discuté avec la personne ?

85. Jérôme : Eh, tu sais, elle parlait Tchèque ou je sais pas quoi, alors...

86. Difool : Ah ouais, donc vous avez pas pu...

87. Jérôme : On communique pas, non.

88. Marie : T'entends le son de sa voix, quand même ?

89. Difool (d'une grosse voix grave) : << oui, bonjour >>

90. Jérôme : Il était vachement efféminé, même toi, Difool, tu la vois dans la rue, tu t'arrêtes sur elle, tu sais.

91. Romano : Non, mais pour le coup, il s'est fait opérer des cordes vocales et tout ça, c'est possible.

92. Marie : Ah ouais, c'est possible

93. Jérôme : Attends, mais j'hallucinais, je te promets, c'est une femme. Je te promet, pour moi, c'était une femme.

TEMOIGNAGES D'AUDITEURS PAR MESSAGES (SMS ET INTERNET) ET POINTS DE VUE DE L'EQUIPE

94. Difool : << Ah, quel con, il s'est bien fait niquer >>, je lis les messages, là, sur SMS depuis tout à l'heure. << Le pauvre >>, regarde, << il a fait un truc de ouf >>, << ça lui apprendra >>, c'est qui qui nous dis ça, c'est Chidra de l'Essonne, qui a 16 ans qui nous laisse le message sur les SMS, là.

95. Jérôme : Eh, oui, bien sûr, ça m'apprendra, qu'est-ce que tu crois.

96. Romano : Et même au niveau des jambes et tout ça...

97. Jérôme, des jambes nickel, je te jure...

98. Difool : Est-ce que t'es sûr que c'était un homme au départ ?

99. Jérôme : Non. Attends, je suis sûr à la fin que c'était un homme, là j'en suis sûr.

100. Difool : Et t'as fini, t'as fait quoi ?

101. Jérôme : Eh, non, qu'est-ce que tu crois ?

102. Difool : T'es parti ?

103. Jérôme : Eh, oui, je suis parti, je l'ai giflée.

104. Difool : Oh, non, c'est pas bien ça ! C'est pas bien, ça, Jérôme, c'est toi qui est...

105. Jérôme : Attends, mais attends, moi je savais pas...

106. Difool : Bah oui, mais tu gifles pas, tu gifles pas quelqu'un, t'es un con. Tu vas pas gifler...

107. Marie : Bah non, c'est débile de gifler.

108. Difool : C'est toi qui y est allé, tu sais.

109. Jérôme : Non, mais qu'est ce que tu veux que je fasse, je suis vénère...

1 10. Difool (le coupe) : C'est pas lui ou elle qui...

111. Jérôme : Comment tu veux que je sache, moi que c'est un trans ?

112. Marie : Non, mais c'est...

1 13. Difool : C'est pas lui ou elle qui t'a forcé, hein ?

1 14. Romano : Bah, t'imagines, il va pas arriver toi et dire << je suis transsexuel >>

115. Marie : Ouais.

1 16. Jérôme : Attends, t'imagines, je paie 250 euros pour niquer une meuf et je tombe sur un type. 1 17. Difool : Bah ouais, mais c'est les risques du métier, mon gars...

1 18. Marie : Une gifle, ça arrangera rien et au contraire, c'est plutôt violent, quoi.

1 19. Jérôme : Ca a rien arrangé, parce que j'ai ni récupéré mon fric ni rien du tout, tu vois, et en plus de ça, je suis traumatisé, tu sais.

120. Marie : Ca t'apprendra.

121. Difool : Ah, ça c'est la réponse de la Marie, là.

122. Marie : Oui, en me touchant les seins, je te dis ça (rires). je remettais juste mon soutien-gorge en place, c'est pour ça. Mais, non, mais tu vois, il faut pas la gifler, tu vois, c'est débile.

123. Jérôme : C'est débile, mais c'est sur les nerfs, tu vois, je t'ai pas dit que je regrettais pas de l'avoir giflée, tu vois, parce que voilà, je suis pas du genre à taper les femmes, mais les mecs plutôt. Et là, c'était moitié femme, moitié mec....

124. Difool : Mais les mecs non plus, Jérôme.

125. Romano : Oui, ça sert à rien.

126. Jérôme : Non, mais laisse tomber...

127. Difool : << Bien cher pour niquer un homme >>, en effet Timal, tu as raison, Timal du Pas-de-Calais, là, qui nous laisse un message, 20 ans, là, Timal.

128. Jérôme : Ah, putain, très cher pour...

129. Romano : Ouais, mais voilà, aujourd'hui c'est une femme, quoi.

130. Difool : Hm.

131. Marie : Bah oui.

132. Jérôme : Ouais, bah vas-y, vas la niquer...

133. Romano : Non, mais je te dis pas que j'aurais envie de la niquer, mais...

134. Difool : Trop cher pour Romano, 250 euros...

135. Marie : Non, mais tu vois, pour arriver à faire une opération comme ça et devenir une femme, c'est que profondément, il se sent femme dans son corps, quoi, parce que pour changer totalement de corps...

136. Jérôme : Ouais, je suis d'accord.

137. Marie : Non mais tu vois, il comprend pas forcément ta réaction.

138. Difool : Hm.

139. Jérôme : Ouais, je suis d'accord.

140. Marie : Tu peux te mettre à sa place aussi, quoi.

141. Jérôme : Il y a peut-être des gens qui ont fait pire que moi...

142. Romano : T'as joué au con, parce qu'en plus, dans les trucs comme ça, je pense que ça doit être surveillé, tu vois, t'aurais pu te faire défoncer la gueule par un...

143. Jérôme : Le videur, je me suis un peu engueuler avec lui mais sans plus, quoi.

144. Romano : Ah, ouais, mais normal.

145. Jérôme : Je me suis fait virer du cabaret, c'est normal.

CONCLUSION

146. Difool : De toute façon, tu n'y retourneras plus, j'imagine.

147. Jérôme : Ouh, là là... (rires)

148. Romano : Ah ouais, ça t'a passé l'envie, quoi.

149. Jérôme : Non, mais y a pas que ça, en plus, que ça m'a passé. Moi j'étais trop plans baise, toujours à l'affût de... Je suis trop un chaud gars, tu vois.

150. Difool : Et t'as souvent payé pour baiser, toi ?

151. Jérôme : Non, non, je te jure, c'est la deuxième ou la troisième fois grand maximum.

152. Difool : Et peut-être même la dernière.

153. Jérôme : C'est pas peut-être, c'est sûr.

154. Romano : Ah, oui, c'est bon, c'est fini maintenant.

155. Difool : Bon, ben ne quittes pas Jérôme, on va faire un tour sur le stade, là, c'est reparti pour le Marseille/PSG...

[Séquence foot]

L'intolérance du fait de la religion/tradition

Un troisième groupe de deux sujets se dégage de notre corpus : l'intolérance du fait de la religion/tradition.

Religion/tradition / cas N°1 / 18 octobre 2004 « La famille de mon copain ne m'accepte pas car je le vois chez moi » / séquence diffusée entre 21 h41 et 22h44 :

EXPOSE ET EVALUATION DU PROBLEME DE L'AUDITRICE APPELLANT

1. Bon, alors, Isis, qu'est-ce qui t'arrive ?

2. Ben en fait, moi je vous appelle parce que ça fait deux ans que je suis avec mon copain.

3. Difool : Hm.

4. Isis : Et en fait on est tous les deux d'origine Algérienne et en fait ses parents s'obstine à pas vouloir comprendre et...

5. Difool : (imitant le père) : << Oui, je veux que tu sortes avec un Suédois, je t'ai dis >>.

6. Romano (imitant le père) : << Oui, tu as compris ce que je t'ai dis >>.

7. Difool : (imitant le père) : << Oui, avec un tennisman >>. Pourquoi, c'est quoi le problème, ils l'aiment pas ?

8. Isis : Non, sa mère elle me connaissait pas jusqu'à très très peu de temps. Pourtant ça fait deux ans qu'on est ensemble et en fait elle s'est toujours obstinée à dire non, elle a jamais voulu me connaître et en fait elle pense qu'il passe son temps chez nous et que chez nous, ça se fait pas de faire rentrer un garçon chez soi.

9. Difool : En fait, tu lui aurais présenté n'importe quel gars, elle aurait réagi pareil, non ? Tu penses pas ?

10. Isis : Non, c'est ses parents à lui qui sont pas d'accord...

11. Difool : Ah, d'accord, j'avais pas compris. Tes parents à toi, il y a pas de souci ?

12. Romano : Ouais, ils ont l'ai cool.

13. Isis : Non, mes parents à moi il y a pas de souci, c'est ses parents à lui.

14. Difool : Ah, ouais, j'avais pas comp... j'avais pas pigé. Et ses parents à lui, ils te trouvent...

15. Isis : En fait, ils acceptent pas que je fasse monter un garçon chez moi en tant qu'Algérienne, ça se fait pas, enfin que des trucs...

16. Difool : Ouais, que des trucs à deux balles

17. Isis : Voilà, ouais, hyper arriérés et tout.

18. Difool : Ouais, c'est ça.

19. Isis : Et donc en fait, ça fait un moment que ça durait...

20. Difool : Et donc en fait, ils te reprochent d'être trop facile, quoi.

21. Isis : Ouais, voilà, et puis en fait ils me reprochent pratiquement de sortir avec leur fils et en fait ça les gêne...

22. Difool : En gros, il serait sorti avec n'importe quelle meuf, ça aurait été pareil.

23. Isis : Ouais, je pense que le problème, c'est pareil, ils sortiraient tout et n'importe quoi comme argument pour qu'on arrête de sortir ensemble et...

24. Difool : Mais c'est bizarre parce qu'en général c'est plutôt, tu vois, moi au début, je croyais que c'est toi qui avait un problème avec tes parents, c'est plutôt les parents de la nana quand il y a des problèmes moyenâgeux comme ça, c'est plutôt les parents de la nana qui...

25. Marie : Ouais, grave.

26. Isis : Ouais, non, moi j 'avais jamais présenté de garçon avant et tout, et puis là je vois que c'est sérieux et puis je veux qu'elle me laisse sortir comme je veux et puis elle préfère le voir et savoir plutôt que faire semblant, elle sait très bien que...

27. Difool : C'est bien !

28. Marie : Ouais, bien sûr, c'est mieux.

29. Difool : Bah, elle à raison, comme ça elle sait au moins parce que si elle était toute rigide, tu lui dirais rien.

30. Isis : Alors que sa mère à lui, il passe son temps dehors et elle sait pas avec qui il est en réalité derrière ses airs de... enfin en fait ça faisait un moment que ça durait et ça empirait et nous on continuait de se voir et tout, parce qu'elle me connaissait pas et donc... Et on s'est dit que si ma mère l'appelait ça allait peut être arranger les choses. Que ma mère lui parle, qu'elle lui dise ce qu'il se passe réellement parce que peut être qu'elle se fait du souci pour son fils et tout enfin ce qui est normal vu qu'il a raté une année de fac pendant qu'on était ensemble. Elle a du se dire...

31. Difool (imitant la mère) : << Oui, mauvaise fréquentation, c'est elle >>.

32. Romano (imitant la mère) : << c'est de sa faute, elle l'empêche de travailler >>.

33. Marie (imitant la mère) : << Méchante >>

34. Difool (imitant la mère) : << Je lui avais dit de sortir avec une Suédoise >>.

35. Isis : Et donc ma mère l'a appelé, et au téléphone elle a été très courtoise, enfin elle lui a dit << oui, je veux pas que mon fils sorte avec des filles >>

36. Difool (imitant la mère) : << Oui, je veux uniquement qu'il sorte avec des hommes ou des animaux >>.

37. Isis : Non, mais si elle pouvait le faire castrer, je pense qu'elle le ferait.

38. Difool (imitant la mère) : << Oui, d'ailleurs, je vais lui, oui, on va l'amener chez le vétérinaire >> (rires).

39. Romano (imitant la mère) : << Oui, c'est ça, nous allons lui enlever les testicules >>.

40. Isis : Et donc ma mère l'a appelé, et tout, j'en avais parlé avec lui, on pensait que ça allait arranger les chose, etc... et en réalité, quand elle a raccroché, elle a dit << je vais bien me faire comprendre, ça marchera jamais, je l'accepterais jamais >>...

41. Difool : Voilà, ben maintenant c'est entre les mains de... Moi je sais pas, quand les parents réagissent comme ça, il a quel âge ton copain, 18 ans ?

42. Isis : 20

43. Marie : Il a 20 ans !

44. Difool : Il est amoureux de toi depuis deux ans, c'est une histoire sérieuse, tu oublies la mère et puis un jour elle se calmera...

45. Isis : Il a essayé de partir, elle est venue chez moi...

46. Difool : Non, mais c'est pas essayer de partir, c'est juste que vous vivez votre histoire, ça fait deux ans que vous la vivez en plus...

47. Isis : Mais maintenant, elle le laisse plus sortir, elle le laisse plus aller à la fac...

48. Marie : Il a 20 ans...

49. Difool : Il faut...

50. Isis : Elle lui a enlevé son portable, mais c'est de la folie. Il a 20 ans mais... et en plus, ils sont hyper nombreux dans la famille et ses frères et soeurs c'est tous des balances, ils vont lui répéter, enfin c'est de la folie.

51. Marie : Mais c'est une prison ?

52. Difool : Non, mais dans ces cas-là, il faut... quand on respecte pas ta liberté, il faut la prendre ta liberté. Donc il faut qu'il trouve un pote chez lequel il peut aller squatter...

53. Marie : Exactement. Il faut trouver le moyen de...

54. Isis : Ben, le problème, c'est qu'elle a dit << si jamais il part, et tout, tu vas voir, c'est ta famille qui va avoir des problèmes >>... enfin c'est devenu une histoire, enfin quand je regarde en bas de chez moi, je vois ses frères qui surveillent chez moi ce qui se passe pour voir s'il y est pas en regardant par le fenêtre...

55. Romano : Sympa, des vigiles.

56. Difool : Pas chère, la boite de gardiennage.

57. Romano : Oui, pas chère, la sécurité.

58. Difool : T'es protégée au moins chez toi.

59. Isis : Ah ouais, enfin c'est... maintenant je me retourne sans arrêt dans la rue, j'ai l'impression d'être... c'est un truc de fou, quoi.

60. Romano : Ouais, tu deviens parano.

61. Difool : Bah oui. Alors...

62. Isis : Elle est persuadée, elle m'a dit << ouais, de toute façon, s'il lâche pas l'affaire, c'est parce que tu couches avec >> alors que c'est pas vrai, enfin des trucs...

TEMOIGNAGES D'AUDITEURS PAR MESSAGES (SMS ET INTERNET) ET POINTS DE VUE DE L'EQUIPE

63. Difool : Y a Jimky, la qui nous dit, non, ouais, là c'est Jmiky qui nous fait, 23 ans, là, 23 ans, Valde-Marne dans le 94 qui nous dit << faut pas te plaindre, moi ma mère c'est elle qui veut choisir ma femme, elle va la ramener du bled, j'ai pas le droit de choisir ma femme >>.

64. Isis : Ouais, mais elle, elle fera pareil, hein.

65. Difool : Non mais ça, ça existe beaucoup ?

66. Momo : Mais ça existe beaucoup, t'inquiètes.

67. Isis : Ouais, ça existe, enfin elle c'est comme ça qu'elle pense, enfin ses enfants.

68. Difool : Non, ça existe pas beaucoup.

69. Momo : Ouais, mais ça existe.

70. Difool : Ca doit être super rare.

71. Momo : Ouais, ouais, ouais.

72. Marie : T'accepte ça simplement pour faire plaisir à tes parents...

73. Momo : Ouais, c'est juste pour faire plaisir aux parents.

74. Marie : Ah ouais, t'imagines ?

75. Difool : Tu ramènes une bombe, c'est tes parents qui draguent à ta place...

76. Momo : Ouais, en général, moi j'explique vite fait.

77. Difool (imitant Momo) : << Oui, alors, maman, tu me la prends, alors >> (rires).

78. Momo : Non, non, non, non...

79. Romano : (imitant Momo) : << J'aimerais bien qu'elle soit super bonne >>.

80. Difool (imitant Momo) : << Et qu'elle aime le cul, hein >>

81. Momo : Non, mais en général, il ramène des femmes du bled, ils nous disent de choisir, voilà, ils parlent si ça s'entend bien, voilà, ça se marie.

82. Marie : C'est particulier, hein.

83. Difool : Bah, oui, c'est un petit peu. Tu voulais qu'on fasse...

84. Isis : Non, elle lui a dit << je vais t'envoyer en Algérie et tu reviendras plus, comme ça on sera débarrassé, tu la verras plus... >>

85. Difool : Sympa !

86. Momo : C'est sympa.

87. Difool : Enfin, c'est n'importe quoi, quand même.

88. Romano : C'est un peu des réactions à la con.

89. Difool : Bon, tu voudrais qu'on fasse quoi pour toi, tu voudrais des témoignages là-dessus ?

90. Isis : Ben, des témoignages de filles qui auraient connu la même chose...

91. Difool : Ben, de gars aussi, qui auraient connu la même chose.

92. Isis : Ouais, ouais, mais c'est que j'ai plus l'habitude chez nous en tout cas, on emmerde plus les filles pour des trucs comme ça que les garçons.

93. Difool : Ouais, c'est ce que je te disais tout à l'heure.

94. Marie : T'es d'où, toi ?

95. Difool : Algérienne.

96. Marie : Ah, t'es algérienne aussi, en plus.

97. Difool : Enfin t'es d'origine algérienne.

98. Isis : Ouais, ouais, enfin je suis pas de la même ville alors ça va pas.

99. Difool (imitant la mère) : << Ah, bah, oui, hein, faut te marier avec un type qui habite dans ta rue, hein. Non, de ta maison, nous allons prendre quelqu'un de ta famille >>.

100. Marie : Ban, oui, ton cousin, souvent, c'est ça.

101. Momo : Tu viens de quelle ville ?

102. Isis : [inaudible]

103. Momo : Et ton copain, il est d'où ?

104. Isis : Constantine. En plus, on est du même côté, quoi.

105. Momo : Eh, ouais, en général...

106. Difool : C'est comme Paris-Marseille. Allez Constantine !

107. Marie : Ah, mais c'est l'hallu !

108. Difool : Bon, ne quittes pas, Isis. T'hallucines, là, Marie ?

109. Marie : Ah non, mais j'hallucine totalement. Non, mais je sais qu'il se passe se genre de choses, mais là en plus...

1 10. Isis : Elle est arrivée dessus avec un couteau, enfin...

11 1. Difool : Oh, là, avec un couteau en plus... Bon, ben ne quitte pas Isis. Dites-nous, hein, 41SKY, Skyrock.com... << Faut pas qu'elle se décourage >>, << Bon courage à elle >>, Dernier round qui nous

dit... Y a plein de messages, tiens. Bon, on va regarder tout ça et puis on va vous rappeler. Si vous voulez qu'on vous rappelle, vous laissez des messages. Là, on va balancer la pub et puis on revient avec vous tous en direct. 01.53.40.30.20, le 41SKY, le Skyrock.com, la pub en speed, y aura même Cyril qui va arriver avec nous dans un instant.

[Coupure pub et musicale]

112. Difool : Isis, toi, t'es avec un gars, il a 20 ans, toi tu as 18 ans. Tu nous as appelés en fait parce que les parents de ton gars veulent choisir la copine...

1 13. Romano : Ouais, t'es pas assez bien pour lui, quoi.

1 14. Difool : Ouais, en gros, c'est ça. Et c'est pas un problème de racisme tout ça, parce que... 1 15. Romano : Ouais, ce serait n'importe qui, ce serait pareil.

TEMOIGNAGES D'AUDITEURS PAR MESSAGES (SMS ET INTERNET) ET POINTS DE VUE DE L'EQUIPE

1 16. Difool : Vous êtes tous les deux Algériens et donc voilà. Donc, voilà le souci, donc. J'ai plein de messages, là : << Franchement, c'est n'importe quoi, dans tous les cas, il devra se marier et trouver sa femme lui-même donc autant se barrer tout de suite >> message du Pharaon, message de Hakim aussi, qui vient d'arriver ici. << C'est des parents fous, moi je supporterais pas >>, c'est Clark, en gros qui nous dit ça, Clark de Meurthe-et-Moselle. Euh... << Vive la tolérance, c'est n'importe quoi de ne pas être tolérant comme ça avec son enfant >>. Bon, ça fait partie de certaines traditions, mais bon, il y a des trucs qu'il faut oublier, quand même. Non, qu'est-ce que t'en... comment il réagit, lui, par rapport à ses parents, Isis ?

1 17. Isis : Euh... lui il a envie de partir et enfin, on a pensé à tout, quoi, enfin on s'est même mariés

religieusement. Enfin ça c'était pour lui dire et pour qu'elle claque l'affaire. Lui, il a essayé de

partir, mais bon toujours pareil, et après quand il part, c'est à moi qu'elle fait des menaces et... 118. Difool : Mais elle a pas le droit de faire ça.

1 19. Marie : Mais attends, comment vous avez pu vous marier religieusement sans les parents ?

120. Isis : En fait, les mariages religieux, il faut un témoin, quelqu'un qui représente la fille...

121. Difool : Ah ouais, vous avez fait un petit truc juste pour...

122. Isis : Voilà, quoi, le minimum...

123. Marie : Ah ouais, donc il y a pas eu de fiançailles...

124. Isis : En basquets, on a pas fait de fêtes ni rien du tout quoi, c'était juste vraiment histoire de le faire.

125. Difool : Bon, alors il y en a plein qui nous disent, là, regarde : << mais il a 20 ans, il est majeur, moi je me casse dans une autre ville, je me cache chez des amis... >>

126. Marie : c'est peut-être pour ça qu'elle bloque, parce qu'elle a su que vous vous étiez mariés religieusement sans son accord.

127. Isis : Non, non, ça elle le sait pas, c'est vraiment récent, en plus ça fait deux semaines ou trois semaines quelque chose comme ça...

128. Marie : Ah ouais, donc ça vient pas de là.

129. Isis : Et en plus, enfin moi, pendant un moment j'espérais, enfin quand je la connaissais pas je me disais c'est pas possible d'avoir un coeur comme ça. Je sais pas, elle a eu notre âge, elle peut très bien comprendre, enfin qu'on s'aime et que... c'est pas comme ça que ça se finira. Et puis je sais pas, je serais mère, je me dirais c'est des gamins, ils vont finir par se disputer, enfin c'est une histoire qui finira d'elle-même, mais... Alors que plus elle s'interpose et plus nous, ça...

130. Marie : Ca vous renforce.

131. Isis : Ouais, voilà, c'est...

132. Marie : C'est logique.

133. Isis : Et c'est...

134. Isis : Ouais, voilà, et en fait y a rien à faire, et voilà et maintenant je l'ai vue et...

135. Difool : C'est marrant parce que tu parles que de la mère. Tu parles pas du père. T'as parlé des frères, des soeurs et...

136. Isis : Bah oui, en fait parce que les frères et soeurs ils sont tous pareils, j'ai vu sa soeur, elle est venue chez moi quand il était parti et elle m'a tenu les même propos que sa mère.

137. Difool : Oui, mais elle, ça va se passer comment, quand elle va choisir son mec...

138. Isis : Elle m'a dit << oui, nous on fréquente pas chez nous >>, elle m'a dit << nous on est pas des filles qui fréquentons >>, enfin, je suis désolée, la grande soeur elle va se marier, il est pas tombé du ciel le gars avec qui elle va se marier.

139. Difool : Bah oui. Et puis même chacun vit comme il veut, si eux ils ont envie de vivre comme ça et de laisser le choix de la personne avec qui tu vas vivre toute ta vie aux parents, pourquoi pas, mais

si toi t'as pas envie de le vivre comme ça, je veux dire, t'as 20 ans, t'es majeur, tu vois. On est dans un pays... chacun peut vivre sa sexualité...

140. Marie : Ouais, on est dans un pays libre, quand même, surtout à ce niveau-là.

141. Difool : Oui, donc toi, je sais pas... Les messages qu'on nous laisse depuis tout à l'heure, c'est... << Pourquoi il se barre pas ? >> Regarde, Helena des Bouches-du-Rhône dans le 13 << Il faut qu'il se barre de chez lui, les parents ils craignent trop, il a 20 ans, il est majeur, il fait ce qu'il veut >>, c'est le message de Helena de Marseille.

142. Isis : Avant, il me disait << je vais partir >> et moi je lui disais << tu peux pas partir comme ça >>, enfin je veux dire c'est pas des bonnes conditions pour partir.

143. Difool : Ah non, c'est clair, mais bon...

144. Isis : Mais là, il y a plus de solutions. Je crois plus à rien... enfin, en même temps, j'ai pas envie de laisser tomber, ça fait deux ans et entre nous, ça se passe super bien.

145. Marie : Bah oui, c'est ton amoureux.

146. Isis : Et je me vois pas sans lui et je vois personne à sa place, enfin c'est horrible quoi...

147. Difool : De toute façon, il faut jamais casser à cause des parents, hein. Jamais.

148. Marie : Ben non, certainement pas.

149. Isis : Voilà, et puis les regrets qu'on a quand ça s'est pas fini comme on voulait et...

150. Difool : Ah ouais, il va être malheureux, tu vas être malheureuse, enfon c'est débile. Vous êtes amoureux, autant rester...

151. Isis : Mais je me dis, en ce moment je suis pas heureuse non plus, est-ce que ce sera pire ? C'est peut-être un mauvais moment à passer, enfin, je sais plus quoi penser, quoi, j'ai pas envie de tout laisser tomber et j 'ai pas envie de continuer.

152. Marie : Non mais en plus c'est l'hallu, parce que souvent l'excuse des parents, c'est << bah, oui, elle est pas rebeu, elle est pas musulmane >> et là...

153. Isis : Ouais, et là y en a pas, et là ils prétendent que je suis pas musulmane...

154. Difool : Ouais, enfin c'est malgré tout une excuse à deux balles aussi.

155. Marie : Oui, on est d'accord, mais enfin, c'est souvent les excuses qui reviennent...

156. Isis : Ouais, au départ, déjà, c'est pas valable, mais alors, là, il y en a aucune quoi, là...

157. Marie : Mais là, il y en a pas.

158. Difool : Tiens, il y a Roya qui nous dit ça, salut Roya, qui nous fait << Les parents sont ancrés dans leur culture, mais il suffit de discuter, de négocier, ce sera peut-être long, tu pourras peut-être les changer >>.

159. Isis : Mais là, c'est pas quelqu'un avec qui on peut discuter, déjà quand je lui parle, elle se met à hurler, il y a qu'elle qui parle et elle sait tout, quoi, quoi qu'on lui dise, elle me dit << non mais je sais qu'il passe souvent chez toi... >>

160. Difool : Non, mais c'est possible aussi qu'il y ait des gens qui ont parfois de problèmes psychologiques. C'est arrivé à d'autres, hein. Romano, par exemple, tu as connu de nombreuses personnes qui avaient des problèmes psychologiques dans leur famille.

[Anecdote d'une ex belle mère de Romano]

161. Momo : Non, mais voilà, c'est chaud, en plus t'es Algérienne...

TEMOIGNAGE FICTIONNEL D'UN MEMBRE DE L'EQUIPE

162. Difool : Non, mais toi qui es d'origine Algérienne aussi Momo, comment tu réagirais si ta mère te disait << je choisis ta femme, et d'ailleurs, tu vas prendre Romano >>

163. Romano : Oh, oui, nous allons nous marier, Momo.

164. Difool : Non mais moi il y a des meufs qui me dégoûtent autant que des mecs, voire même plus parfois. Donc t'imagines si on te choisit une meuf qui est pas du tout à ton goût...

165. Momo : Non mais en plus j'en ai parlé tout à l'heure à ma mère, je lui ai dit << y a même pas moyen, tu me fais jamais ça, hein >>.

166. Difool : Ah, tu lui en as parlé tout à l'heure en plus ? Ta mère, elle a jamais eu l'idée de te faire ça ?

167. Momo : Euh... on va dire non, j'ai essayé d'expliquer les choses...

168. Difool : Même toi, pourtant...

169. Momo : Ah non non non, moi je veux pas. C'est moi qui la choisis.

[On se moque de Marie qui a un problème de micro]

170. Marie : Non, j'allais dire, Momo, il a quand même la chance d'avoir une mère qui est super ouverte, quoi.

171. Difool : Oui, c'est vrai, bon, c'est euh...

172. Marie : A la limite...

173. Momo : Non mais voilà, moi je lui ai dit clairement, c'est moi qui choisirais ma femme...

174. Romano : Momo, tu me présentes, alors ? (rires)

175. Momo : Non, non, mais elle t'a écouté une fois, elle a peur de toi, Romano.

176. Difool : Alors, il y a Gorac, là, qui nous dit << les traditions, ça tue l'amour, mais il reste les parents >>. Oui, il faut quand même essayer de garder un contact, essayer de faire ça de manière pas trop trop brutale, quoi, tu vois.

177. Marie : Bah oui.

178. Romano : Oui, non mais bon, au bout d'un moment, s'ils veulent rien comprendre non plus...

179. Difool : Ouais, c'est vrai que c'est pas super simple. Bon...

180. Marie : Ben t'es obligé d'être radical au bout d'un moment.

181. Romano : Oui, parce que la mère, elle a l'ai bien bloquée, quand même, hein.

182. Marie : Ah, mais grave.

TEMOIGNAGES D'AUDITEURS PAR MESSAGES (SMS ET INTERNET) ET POINTS DE VUE DE L'EQUIPE

183. Difool : ce qu'on va faire, Isis, alors si vous avez des réactions là-dessus -il y en a plein- donc pour compléter ce qu'on nous dit, vous nous passez un coup de fil, vous nous laissez des messages sur le 41SKY. << L'amour est plus fort que tout >>, ça c'est beau, ça c'est Alex, là, du 10, qui nous dit ça. Euh... << Faut pas délirer avec ses parents >>... Ecoutez, on va vous rappeler, on en reparle dans un instant, tu bouges pas, Isis, tu reste avec nous ?

184. Isis : Ok, pas de problème.

185. Difool : A tout de suite, la Lyonnaise.

[Coupure pub et musicale]

[Autres sujets]

186. Difool : On va y revenir dans un instant. Sinon, il y a pas mal de coups de fil pour Isis. Isis, on va te retrouver dans un instant, on va prendre un petit peu tout le monde. Il y a Jo, là, qui nous attend, il y a Abdel. Toi t'appelles parce que les parents de ton copain, ils t'acceptent pas. Et en fait, ils voudraient choisir pour ton copain, qui a 20 ans, quand même, hein. Lui choisir sa femme.

187. Isis : Oui. Et ils voudraient m'éliminer aussi.

188. Difool : Ils voudraient t'éliminer.

189. Romano (imitant les parents) : << Oui, nous voudrions la faire disparaître >>.

190. Difool (imitant les parents) : << Oui, physiquement, oui >>. Non, mais ils t'ont quand même fait des menaces de... enfin des menaces, quand même.

191. Isis : Ouais. Enfin, je sais pas si je peux considérer...

192. Romano : Ouais, ils surveillent en bas de chez toi...

193. Difool : C'est quand le même chose, t'as des gars...

194. Isis : Ouais, je fais gaffe quand même.

195. Romano : Ouais, c'est abusé, quoi. T'es pas tranquille.

196. Isis : Ils ont dit aussi que leur fils allait finir dans une tombe s'il continuait.

197. Difool : De toute façon, on finit tous dans une tombe, hein...

198. Romano : C'est sympa, le...

199. Difool : Non, mais ils sont pas... je pense que dans ces cas-là, quand on en est à ce point-là, il vaut mieux couper les liens, parce que ça sert à rien de continuer.

200. Isis : Oui, c'est clair.

201. Romano : Non, parce qu'ils ont des soucis.

202. Isis : Non, mais il faut qu'il y en ai un dans les deux camps qui cède, quoi, mais...

203. Difool : C'est même pas céder, c'est qua chacun respecte l'autre, donc les parents, ils doivent respecter l'amour que leur fils te porte, c'est pas à eux de choisir. C'est déjà tellement rare de trouver quelqu'un qui t'aime, quelqu'un qui va avec ta personnalité, que si en plus tu dois trouver quelqu'un qui plaise à ta mère, qui plaise à ton père, aux frères, au soeurs...

204. Isis : Oui, c'est clair que ça se finit pas parce que nous on a voulu que ça se finisse, que par la force des choses, se séparer c'est quand même horrible, quoi, quand on est avec quelqu'un qu'on aime et...

TEMOIGNAGES D'AUDITEURS A L'ANTENNE ET POINTS DE VUE DE L'EQUIPE

205. Difool : Surtout à cause de ça. Bon il y a Jo qui va arriver avec nous, là, dans quelques instants, t'es là, déjà, Jo ?

206. Jo : Ouais, je suis là, ouais.

207. Difool : Bienvenu à toi, Jo, Juvisy, 91.

208. Jo : Ouais.

209. Difool : Eh bien reste avec nous, il y a Abdel aussi, qui va arriver pour toi Isis. Allo Abdel ? 210. Abdel : Ouais.

211. Difool : T'appelles pour Isis, c'est ça ?

212. Abdel : Ouais, c'est ça, ouais.

213. Difool : Eh ben, quittes pas, Abdel, on va revenir avec vous tous. Et il t'es déjà arrivé ce genre de truc, Abdel, toi ?

214. Abdel : Ben moi, il m'est arrivé la même chose.

215. Difool : Ah, chaud, hein !

216. Abdel : Sauf que c'est moi qui étais la victime.

217. Difool : D'accord, ben, ne bouges pas, Abdel, reste avec nous. Et puis si vous voulez témoigner làdessus et sur tout le reste, allez-y.

[Coupure pub et musicale]

218. Difool : Bon, allez, on va s'occuper d'Isis, maintenant, il y a pas mal de messages, pour Isis. Alors c'est vrai que quand on se met à la place de ton mec, c'est pas forcément facile à gérer, t'as les parents qui disent que ta meuf, elle est pas faite pour toi, et qu'il faut plus la voir, et que même si t'es amoureux, ils s'en foutent, c'est à eux de choisir ta nana. C'est ça en gros, hein ?

219. Isis : Ouais, c'est clair.

220. Difool : Alors, plein de réactions et notamment, celle d'Abdel, qui était là, avec nous, en direct de Metz, t'es là, Abdel : Ouais, je suis là.

221. Difool : T'es là.

222. Abdel : Bonjour à tout le monde, bonjour Sky.

223. Difool : Salut à toi, Abdel. Et puis il y a Jo, aussi, dans le coin, de Juvisy, t'es là, Jo ?

224. Jo : Ouais.

225. Difool : Bien ?

226. Jo : Ouais.

227. Difool : Eh ben écoute, bien aussi, hein. Bon il vous est arrivé la même chose aussi, les gars ?

228. Jo : Ouais.

229. Difool : Et toi, Abdel ?

230. Abdel : Ouais.

231. Difool : La même chose, ouais. Alors, c'est deux cas différents, toi c'est... Ben explique-nous Abdel, dis-nous.

232. Abdel : Ben moi ce qui s'est passé, c'est que voilà, j'ai 25 ans, je suis Marocain. Je suis resté avec une fille ça faisait trois ans, une Marocaine aussi.

233. Difool : Donc vous étiez amoureux tous les deux.

234. Abdel : Ouais, franchement, c'était nickel.

235. Difool : Donc un peu comme Isis, quoi.

236. Abdel : Et ce qui s'est passé, c'est que pendant que mes parents ils étaient au bled, cette année, ce que je faisais, c'est que je ramenais ma copine chez moi et tout, bon ça faisait quand même trois ans, je commençais à...

237. Difool : Et tes parents, ils étaient pas du tout au courant du fait que tu sortais avec une nana ?

238. Abdel : Bah, sûrement ils étaient au courant, mais spécialement elle, non, quoi.

239. Difool : Mais pourquoi ça posait un problème elle, spécialement ? Parce que...

240. Abdel : Ben, ce qu'il s'est passé, c'est que je l'ai présentée, j'ai commencé à la présenter à ma mère et tout, elle voyait que déjà, elle l'aimait pas trop...

241. Difool (imitant la mère) : << Oui, je ne l'aime pas, elle >>.

242. Abdel : Ce qui s'est passé tout bêtement c'est qu'elle me sortait des vieux trucs tout bidon, et le truc qu'elle m'a trouvé à me dire, c'est qu'elle était pas bien pour moi parce qu'elle était boulangère, quoi.

243. Difool : Ah ouais. Et il fallait qu'elle fasse quoi comme métier ?

244. Abdel : Ben, j'en ai aucune idée.

245. Difool (imitant la mère) : << Bah pâtissière, et oui, évidemment >> (rires).

246. Abdel : Je sais pas, ce qu'elle voulait, c'est la personne elle soit mieux placée

247. Difool : Oui, ça, ça arrive dans certaines familles, alors c'est pas une question de tradition, tout ça, mais t'as certaines familles, il faut pas que tu sortes avec un mec parce qu'il est... je sais pas, parce qu'il bosse...

248. Marie : Au niveau social, tu veux dire ?

249. Difool : Ouais, alors ça c'est...

250. Jo : Ouais, ben c'est ce qui m'est arrivé avec les a priori que j'ai eu, quoi.

251. Difool : Qu'est-ce que t'a eu, toi, Jo ?

252. Jo : Moi, je suis dans le cas contraire de la meuf.

253. Difool : Toi t'as 20 ans et t'es à Juvisy, c'est ça ?

254. Jo : Ouais.

255. Difool : Alors le cas contraire, c'est les parents de ta copine qui t'acceptent pas toi.

256. Jo : Voilà

257. Difool : D'accord.

258. Jo : Je suis resté un an et demi avec ma copine, elle s'appelait Charlotte et tout.

[Dans le cas de Jo, les parents de sa copine le refusaient parce qu'il est noir. La réponse n'est pas au motif de la religion/tradition]

259. Difool : Et toi, Abdel, je t'ai pas demandé, là, tout à l'heure, vous êtes toujours ensemble ou pas ?

260. Abdel : Bah, officiellement, non, mais officieusement, oui.

261. Difool : Oui, donc vous êtes toujours ensemble.

262. Abdel : Ouais.

263. Difool : Oui, voilà, mais vous continuez de vivre...

264. Marie : Vous avez continué une histoire.

265. Abdel : Mais à 25 ans, c'est un peu désolant de...

266. Difool : Ah ouais, toi t'as 25 ans !

267. Romano : Ouais, c'est clair, vous devez vous cacher et toit, ça doit être casse-couilles.

268. Difool : Mais tu penses pas que tes parents, ils vont un jour...

269. Romano : ...se débloquer un peu ?

270. Abdel : Moi, personnellement, voilà, quoi, ce que je cherche en ce moment, c'est un appartement et j'ai qu'un envie, c'est de partir. Quitte à me marier d'accord avec ma mère, je le ferais, quoi.

271. Difool : Ouais, parce que au bout d'un moment, tu vis pour toi, tu vis pas pour ta famille, quoi.

272. Abdel : Surtout que maintenant, je l'ai connu, ça fait trois ans qu'on est ensemble, voilà, quoi. Moi je sais que c'est une fille bien. Elle l'a vue quoi, peut-être une demi-heure, trois quart d'heures, comment elle a pu se donner une image de la personne...

273. Difool : Ouais, t'aurais amené n'importe qui, elle aurait réagi comme ça, quoi. Mais elle veut quoi, elle veut te la choisir, ta meuf ? Elle veut qu'il se passe quoi ?

274. Abdel : Ben franchement, ce qui me trotte dans la tête, c'est que depuis tout jeune, tout le temps, elle me parlait d'une fille au bled...

275. Difool : Ouais, donc elle a déjà prévu avec qui tu vas te marier, tout ça, quoi.

276. Abdel : Bah, a priori, ça serait son idéal, quoi. Ça serait que je me marie avec elle ou que voilà, quoi.

277. Romano : Et finalement, il va y avoir un petit changement de programme...

278. Difool : Ouais, elle avait pas prévu, mais bon. Et tu conseillerais quoi, toi, à Isis ? Qui vit un peu la même chose que toi, enfin son mec vit exactement ce que toi tu vis.

279. Abdel : Ben, déjà qu'elle coupe pas les ponts avec le gars, si elle est déjà depuis deux ans avec lui, qu'elle reste tout le temps avec lui, quoi. Et... elle a quel âge, déjà ?

280. Difool : Elle a 18 ans, je crois que t'as 18 ans, Isis, c'est ça ?

281. Isis : J'ai 18 ans.

282. Difool : Ouais.

283. Abdel : Et il a quel âge, le gars ?

284. Difool : 20 ans. Le gars, il a ton âge, tu vois, il vit la même chose que toi, t'imagines. Sauf que toi, c'est pas un problème de religion, c'est un problème de...

285. Abdel : Bah, moi, je suis dans le même cas de figure qu'elle, sauf que elle c'est Algérien et Algérienne, quoi, alors que moi, c'est Marocain et Marocaine, quoi, donc, il y a pas de souci de religion, ou de...

286. Marie : Ouais, c'est la même chose, quoi.

287. Abdel : Ouais, c'est exactement la même chose. Mais moi au moins, c'est clair et net, depuis que j'ai 18 ans, tout le temps, elle me parlait de cette fille au Maroc. Moi franchement, ça fait deux ans que j'ai pas été au Maroc à cause de ça, quoi.

288. Difool : Ouais, parce que t'as peur d'être coincé là-bas, qu'on te marie d'office...

289. Abdel : Ouais, exactement. Exactement. Ce qui s'est passé, c'est que il y a deux ans, ben la dernière fois que ai été au bled, il y a eu un mariage d'un cousin et elle me disait, « ouais, tu seras le prochain, avec elle, tu verras, elle est gentille... »

290. Difool : Elle est gentille !

291. Marie : Sympa, super !

292. Romano : Putain, horrible.

293. Marie : Et tu es rentré vite vite en France, non ?

TEMOIGNAGES D'AUDITEURS PAR MESSAGES (SMS ET INTERNET) ET POINTS DE VUE DE L'EQUIPE

294. Difool : Eh, il y en a plein qui nous disent, je vais lire ce message parce que bon, c'est plutôt optimiste et ça fait un peu de bien, elle dit << je suis marocaine et je te comprend, les parents sont durs mais ils accepteront au fil du temps, ta copine, ne la lâches pas, l'amour est plus fort que tout >>. Bon, il y en a plein qui nous laisse des messages l'amour est plus fort que tout, mais il y en a aussi, les parents, au bout d'un moment, bon, ils vont comprendre, ils vont accepter, ils vont voir que t'es heureux et puis voilà, quoi.

295. Marie : Ils vont pas avoir le choix.

296. Abdel : Ouais. Ça c'est sûr...

297. Difool : << L'important c'est que tu sois heureux >>, bah oui, ça c'est...

298. Abdel : ce que je dis, c'est de pas couper les ponts avec, franchement, ça serait bête, parce que franchement, de rompre les contacts avec...

299. Marie : Enfin, c'est quand même dommage d'être en guerre avec tes parents et de te planquer pour avoir une histoire d'amour, quoi.

300. Abdel : J'évite les conflits avec les parents, je leur cache, quoi.

301. Marie : bah oui, bien sûr.

302. Abdel : Il y aura bien un moment donné où, voilà, quoi...

303. Difool : << Moi non plus, je veux pas me marier avec une fille du bled >>, ouais toi tu veux la choisir aussi, ta meuf, pareil.

TEMOIGNAGES D'AUDITEURS A L'ANTENNE ET POINTS DE VUE DE L'EQUIPE

304. Abdel : Bah, c'est normal, c'est moi qui vais vivre avec elle.

305. Difool : Ouais, et toi, Jo, tu conseillerais quoi à Isis ? Pareil ?

306. Jo : Non, mais moi, déjà, je suis dans la merde, parce que je suis plus avec elle.

307. Difool : Ah oui.

308. Jo : Donc je suis plus avec elle, on a stoppé, et...

309. Romano : A cause de ça ?

310. Jo : Ouais, j'ai appelé, quoi, j'ai appelé la semaine dernière, j'ai essayé de la recontacter et à chaque fois que j'essaie de la recontacter, elle me passe ses parents, c'est-à-dire qu'elle aussi...

311. Difool : Ah ouais, ça c'est sympa, oui. Ouais, donc en fait elle a fait le choix... elle a fait son choix, elle.

312. Jo : Voilà, elle a fait son choix. Et en plus... ça m'énerve, quoi...

313. Difool : Bah oui, je comprends.

314. Jo : Donc voilà, je...

315. Difool : Ecoutez, merci, merci du témoignage quand même, hein, Jo. Jo ?

316. Jo : Ouais ?

317. Difool : Ah, non, je croyais que t'étais parti. Non, je te disais merci du témoignage pour Isis, parce que ça va peut-être l'aider à avance, Isis.

[...]

318. Difool : Isis ? Après tout ça, je sais pas, ça t'a fait avancer un petit peu, tu vas en parler à ton mec, tu vas faire quoi ?

319. Isis : Euh... ben en fait, moi

320. Difool : T'as plein de soutien, hein, de tout le monde.

321. Isis : Je voudrais le voir, au moins pour savoir ce qu'il se passe chez lui et tout, mais le problème, c'est que sa mère lui a enlevé son portable, elle le laisse plus aller à la fac...

322. Difool : Non, mais elle le laisse plus aller à la fac, il a 20 ans...

323. Isis : Ouais, je sais,...

324. Difool : ...il prépare son futur, il faut qu'il aille à la fac s'il a envie d'aller à la fac.

325. Isis : Et le pire, c'est qu'elle dit que c'est moi qui lui gâche son avenir. Entre nous deux, c'est pas moi qui l'empêche de faire ses études.

326. Difool : Ah, ouais, il faut qu'il bouge, hein.

327. Isis : Ouais, c'est clair. Mais ses parents à Abdel, ils l'ont pas empêché... enfin sa mère elle lui a juste dit qu'elle l'aimait pas, mais elle l'a pas empêché de sortir ou de...

328. Difool : Ouais, c'était pas à ce point, Abdel, toi ?

329. Abdel : Bah, moi, ce qu'il s'est passé, c'est qu'elle faisait la même chose que lui et la même chose qu'elle, d'éviter de la voir et << de toute façon, je veux pas la voir >> et ainsi de suite. De toute façon, ce que j'ai fait, c'est que je suis rentré dans le délire de ma mère, je lui ai dit << ouais, ok, pas de souci >>, moi ce que j'ai fait, c'est que j'ai évité le dialogue avec ça...

330. Difool : T'as continué à vivre et tu lui as menti.

331. Abdel : Ouais, voilà, je sais très bien que si je lui dis << non, non >>, ben elle va encore plus me saoûler, quoi, alors j'ai préféré faire le mort sur le moment, et lui dire << ouais, comme tu veux, il y a pas de... >>

332. Difool : << Les parents qui font des fixations, il faut les soigner, c'est pas gagné >>.

333. Abdel : Bah, au moins, voilà, quoi, je suis un peu tranquille parce que elle est pas toujours derrière moi et je peux un peu la voir quoi, mais voilà, quoi.

334. Difool : Ouais, enfin t'es pas tranquille non plus quoi.

335. Abdel : Peut-être que c'est ce qu'il aurait du faire, tout bêtement dire ok, et voilà, quoi, elle aurait du plus vivre.

336. Difool : Ben merci, Abdel. Merci pour le conseil, en tout cas, hein.

337. Abdel : Bah de rien.

338. Difool : ne quittes pas Abdel, et puis Isis, si on a d'autres coups de fil, on va te garder avec nous, hein ?

339. Isis : D'accord, ok.

340. Difool : D'accord Isis ? Et puis ton mec s'il nous écoute pas, s'il nous écoute, on le salue, hein, mais s'il nous écoute pas, on lui souhaite bon courage, et puis il y a plein de messages de soutien, je lisais, sur le net, sur les SMS, tout ça.

341. Isis : Ouais, ben c'est super sympa, merci.

342. Difool : Donc, euh, bah ouais, parce qu'on se met tous un petit peu à la place de ton gars, on s'imagine à sa place à lui, c'est vrai que c'est pas évident de choisir entre les parents...

343. Isis : Ouais, c'est ça, parce que moi je me plains parce que je le vois pas, je sais pas ce qu'il fait, c'est horrible, mais bon, d'un autre côté je culpabiise parce que je me dis que pour lui, c'est encore pire.

344. Difool : Mais toi, il faut que tu gardes la pêche, hein.

345. Romano : Il doit bien avoir la pression de toute la famille et tout, là.

346. Isis : Ouais, ouais, c'est clair, je me dis pour lui c'est encore pire, parce que moi personne m'empêche de sortir si je veux, lui je le vois pas, mais j'ai quand même le droit de voir ailleurs que ma chambre mais lui, c'est grave, enfin à son âge...

347. Difool : Mais il est comment, enfin, il a un caractère, enfin, je sais pas, il...

348. Isis : Ouais, le pire, c'est qu'il a un fort caractère et tout, mais quand on voit sa mère, c'est vrai qu'elle fait peur, quoi, enfin moi je l'ai vue...

349. Difool : Oui, c'est Schreck !

350. Romano : Oui, c'est une sorcière.

351. Difool : Quoique Schreck, il est sympa, Skreck.

352. Isis : Non, mais elle est venue chez moi, elle a fouillé chez moi, parce que...

353. Difool : Non, mais elle, je pense qu'elle à des... parce que sans vouloir... en restant correct, hein...

354. Romano : Ouais, elle a des soucis.

355. Difool : Elle a quand même deux trois petits problèmes. Non, mais c'est vrai, t'imagines, la mère qui va fouiller chez toi, non mais moi je...

356. Isis : Ouais, ouais, c'est clair.

TEMOIGNAGE FICTIONNEL D'UN MEMBRE DE L'EQUIPE

357. Difool : Romano, que ferais-tu si la mère de ta copine venait fouiller chez toi ?

358. Romano : Oh, mais je la fous dehors, hein. Sérieux, non mais de quel droit...

359. Difool : Ah, moi aussi, je la dégage, moi.

360. Romano : Non, mais déjà, ouais, ça lui viendrait pas à l'idée, je pense, quoi, mais...

361. Isis : Ouais, ouais, elle me dit que je vais lui voler son fils, en fait.

362. Difool : Voilà.

363. Romano : Oui, mais tu l'as pas caché dans le tiroir, hein. (rires)

CONCLUSION

364. Difool : Bon, ben ne quitte pas Isis, reste avec nous.

365. Isis : Ok, ben c'est gentil.

366. Difool : Et puis merci à vous tous et vous toutes, là, pour les messages.

Religion/tradition / cas N°2 / 8 décembre 2004 « Ma famille (musulmane) n'accepte pas que je sois enceinte, je me retrouve à la rue » / séquence diffusée entre 22h32 et 23h22 :

EXPOSE ET EVALUATION DU PROBLEME DE L'AUDITRICE APPELLANT

1. Difool : Bon, alors, je vous parlais de Karine, là, qui nous a passé un coup de fil, il faudrait un coup de main, tu parlais de skysolidarité, Momo, juste un petit message à vous tous qui habitez Paris, on va la prendre en speed parce qu'on l'entend super mal, Karine, donc ça va être assez compliqué. Je sais pas, on va peut-être essayer, là. T'es là, Karine ?

2. Karine : Oui.

3. Difool : Oui, bah écoute, on t'entend pas si mal que ça, Karine. 22 ans à Paris. Je racontais un petit peu ton histoire et puis je demandais un petit peu qu'on nous rende un petit service, t'es à la rue, là, c'est ça ?

4. Karine : Ouais, c'est ça.

5. Difool : Et t'es partie de chez toi, t'es partie pourquoi ?

6. Karine : Parce que... je suis enceinte.

7. Difool : D'accord, mais c'est pas une raison pour partir de chez soi. C'est parce que tu es chez tes parents et que tes parents acceptent mal ça, non ?

8. Karine : Non, en fait mes parents, ils l'ont su que depuis que je suis partie, je suis d'origine maghrébine, et chez moi c'est très très mal...

9. Difool : Enfin, les maghrébines tombent enceinte comme les autres, donc...

10. Marie : Oui.

11. Difool : Et ça se passe en général pour tout le monde de la même manière, par relation sexuelle, donc frottage d'organes génitaux. (rires)

12. Marie : Oui. Par pénétration, oui.

13. Difool : Non, mais tes parents, ils ont pas accepté que tu sois enceinte avant d'être mariée, c'est ça ?

14. Karine : Voilà.

15. Difool : Et toi, tu t'es sentie obligée de partir ?

16. Karine : J'étais obligée parce que sinon, ça allait se passer très mal pour moi. On va dire que non seulement mes parents n'auraient pas accepté mais dans tous les cas dehors. Donc j'ai préféré partir avant d'être dehors et euh...

17. Difool : T'as des frères, des soeurs, non ? De la famille, j'imagine.

18. Karine : J'ai trois grands frères et deux soeurs.

19. Difool : Et alors, ils sont au courant aussi ?

20. Karine : Non. Enfin, j'ai que mes petites soeurs, mais bon, elles sont petites, sinon, mes trois grands frères, mais eux, ça serait pire que mes parents.

21. Difool : Ouais, bah ils feraient mieux de se mêler de ce qui les regarde, d'abord, et puis de filer un coup de main à leur soeur s'ils l'aiment.

22. Marie : Bah oui.

23. Difool : Donc, t'es enceinte, si ça te pose un problème, il vaut mieux être bien dans sa tête pour faire ton bébé. Ça fait combien de temps que t'es enceinte, toi ?

24. Karine : Ca fait six mois maintenant.

25. Difool : Six mois !

26. Marie : Ah oui, donc ça se voit bien, quoi !

27. Difool : Et t'es partie quand ?

28. Karine : Je suis partie, ça fait deux semaines au moins.

29. Difool : Et ils s'étaient rendu compte de rien ?

30. Karine : Qui ?

31. Difool : Ben, je sais pas, dans la famille, parce que si t'es partie il y a deux semaines...

32. Karine : Ben non, parce que mes parents, mes trois grands frères ils habitent pas chez moi, ils sont tous les trois mariés.

33. Romano : Et tes parents, ils ont bien vu que tu avais du ventre.

34. Karine : Oui, mais je vous explique, mes parents, ils étaient à l'étranger. Ils sont revenus depuis, là, ça fait trois semaines et quand ils sont revenus, sitôt je suis partie, en fait.

35. Difool : Ah ouais, tu as été obligée de...

36. Marie : T'as eu peur.

37. Difool : T'as été obligée de... t'a été obligée de bouger, oui. Et t'as personne dans la famille, tu vas pas me dire, il y a bien...

38. Karine : Je vous entends plus, là, en fait. Moi à la base, je suis pas de Paris, je suis de Poitiers.

39. Difool : D'accord.

40. Karine : Et donc euh... je suis pas restée dans la ville de Poitiers parce que je serais retrouvée par mon père ou par mes frères.

41. Difool : Mais t'as personne à qui en parler, quand je dis t'as pas de famille, t'as personne à qui en parler, personne qui peut te filer un coup de main, non ?

42. Karine : Euh... enfin sur Poitiers, j'ai des amis, mais je pouvais pas rester sur la ville de Poitiers donc je suis venue sur Paris, j'ai un ami...

43. Difool : Non, mais pour être clair, en gros, t'as bien des gens dans ton entourage qui sont, qui sont...

44. Karine : oui, mais en parler, oui, mais...

45. Difool : ... qui sont rebeu ou musulmans ou de ta famille à toi et qui ont une ouverture d'esprit et qui peuvent essayer de faire comprendre à tes parents que c'est pas comme ça qu'on se comporte, tu vois, donc euh...

46. Karine : Ah non, mes parents c'est même pas la peine de leur faire comprendre quoi que ce soit, mes parents ils sont incompréhensifs...

47. Difool : À tes parents ou à tes frères ou à quelqu'un de ta famille, tu vois. Tu vas pas me faire croire que tout le monde est bloqué. Non, t'as personne ?

48. Karine : Chez moi, en tout cas, ils sont comme ça. Pour eux, c'est l'erreur qu'il faut pas faire. Tu peux faire n'importe quelle erreur que tu veux, encore déjà la virginité pour eux, c'était déjà impossible, donc en plus de ça, être enceinte, c'est... Vraiment, pour eux...

49. Difool : Non, mais c'est fait. Ce que je veux dire, c'est qu'on peut juger, on peut trouver ça bien, pas bien, après ça dépend des traditions, de ce qu'on a dans la tête, tout ça, bon, c'est respectable si euh... si ça empiète pas sur ta vie à toi, le problème c'est que t'es enceinte depuis six mois, qu'il y a pas grand-chose à faire à part attendre le bébé et puis être heureux d'avoir un bébé, c'est plutôt pas mal, t'as 21 ans, 22 ans, c'est ça ?

50. Karine : Oui, 22 ans.

51. Difool : Ben écoute, c'est déjà... c'est un âge pour faire un bébé aussi, hein ?

52. Marie : Oui.

53. Difool : Donc euh... et puis maintenant il y a plus le choix, donc tes parents, ils sont pas... tu vois, ils ont quand même un coeur, non ?

54. Romano : T'est leur fille, ils peuvent pas...

55. Difool : Bah oui.

56. Marie : Ils peuvent pas te laisser dans la merde, comme ça.

57. Difool : Tu vois, qu'ils te disent << c'est pas comme ça qu'on fait >>, ou << on aurait aimé que tu te comportes différemment >>, ou << on aurait aimé que tu te maries avant >>...

58. Karine : Non, j'ai compris, mais ils veulent rien savoir, c'est << t'es plus ma fille, on se connais plus, on se voit plus >>... et même pas << t'es plus ma fille >>, mais << si je t'attrapes, je te tue >>.

59. Marie : Oh, là là.

60. Karine : Pour eux, c'est comme ça qu'ils réagissent.

61. Difool : Ouais.

62. Marie : Et le père du bébé, il est où ?

63. Karine : Je suis plus avec.

64. Marie : Ah ouais, donc là, t'es vraiment toute seule, face à te grossesse, tes parents, tout ça.

65. Difool : Et toi, tu cherchais en fait...

66. Romano : Et là, depuis que t'es à Paris, tu dors où, là ?

67. Karine : Mais c'est ce que je vous explique, en fait moi je suis pas de Paris, je suis de Poitiers, et je suis partie de Poitiers parce que si ça arrive à ma famille, à mes frères, ça va mal se passer pour moi.

68. Difool : Ah, tu flippes à ce point là, quand même, ouais.

69. Karine : Ah, oui, c'est pour ça que... C'est même pas, même s'ils sont pas compréhensifs je reste dans la ville, tu vois. C'est vraiment extrême, donc je suis partie, et à Paris, j'avais un ami à moi

qui m'avait hébergé et là, il m'a dit que c'est pas possible parce que je voulais pas coucher avec lui, alors, il m'a mise à la rue.

70. Difool : Et là, t'es où, dans un hall d'immeuble ?

71. Karine : Je suis dans un hall d'immeuble, oui.

72. Difool : Ce que tu vas faire, Karine, tu vas pas bouger. Trouver un endroit pour dormir, c'est le plus urgent, si on peut trouver quelque chose pour que tu puisses pioncer, c'est pas mal. Par contre il faudrait trouver un truc à long terme pour toi, il peut y avoir forcément des endroits, des centres...

73. Marie : Et puis là, t'es pas suivie, en plus, il te faut un gynéco.

74. Karine : Non.

75. Difool : Tu vois, il faut pas dormir dehors quand on est enceinte de six mois.

76. Marie : Non mais déjà, je sais pas par quoi il faut commencer, déjà, te trouver un toit, c'est sûr. Mais il faudrait aussi que tu ailles à l'hôpital, que tu te fasses suivre par un gynéco et tout. T'es à six mois, hein.

77. Difool : Bah, oui, hein.

78. Karine : Oui, je sais.

79. Marie : C'est important parce que...

TEMOIGNAGES D'AUDITEURS PAR MESSAGES (SMS ET INTERNET) ET POINTS DE VUE DE L'EQUIPE

80. Difool : Alors, il y a pas mal de message, il y a Jasma qui dit << moi mes parents, ils m'auraient égorgés à la place du mouton >>, Jasma, Paris. C'est ce que tu penses ? On a déjà eu... On a parlé de ce problème, on a déjà eu des témoignages où les parents sont aigris au début, et puis ils comprennent au bout d'un moment...

81. Romano : Ouais, une fois que le bébé...

82. Difool : Vous les pensez peut-être un petit peu plus bloqués qu'ils le sont de temps à autres, quoi. Même si il y a un blocage au début. << Il faut absolument aider Karine >> on nous dit. << Sinon elle est dans la merde >>. << Moi je suis pas de Paris, sinon, je l'aurais aidée >>. Mais on va avoir des messages, là, allez-y, hein, sur le 41759, le 41SKY et puis le Skyrock.com. Tu t'es renseignée, Karine, pas du tout ?

83. Karine : Renseignée sur quoi ?

84. Difool : Ben sur les droits que tu... enfin les droits pour une nana qui est dans ta galère, en fait.

85. Romano : Ouais, parce que t'as rien, tu travailles pas...

86. Difool : T'as pas de thunes, t'as pas de maison, t'attends un bébé de six mois, depuis six mois, donc forcément, on n'est pas dans un pays de dingue, il doit y avoir...

87. Marie : Ouais, il faudrait que tu ailles voir une assistante sociale, en fait.

88. Difool : Bon si vous savez, aiguillez-nous un petit peu, nous on va se renseigner, on va regarder un petit peu dans euh... dans tous les dossiers qu'on a là, on va trouver de toute façon, Karine, on va se démerder, hein. On compte sur vous, allez-y hein, vous tous et vous toutes. Euh... Ben il y a des messages qui arrivent, là. Sur le 41SKY, le Skyrock.com et puis vous appelez au 01.53.40.30.20. Tu penses qu'il y a aucun dialogue possible, toi ? On nous dit << je connais ça, c'est difficile le dialogue >>, tout ça... c'est Sophia du Havre qui nous laisse le message. Avec tes parents, non, c'est pas possible ?

89. Karine : Non, avec mes parents, c'est pas possible. Mes parents, mes frères, pour eux, le fait que je sorte avec un garçon, s'ils apprennent ça, pour eux, c'est dramatique, c'est pas possible.

90. Difool : Ouais.

91. Romano : Ah, ouais, ils sont bien bien bloqués, hein.

92. Karine : C'est vraiment... pour eux...

93. Difool : Bon, ben reste là, ne bouges pas Karine. On va y revenir, là, tout à l'heure. [Séquence football]

94. Difool : << Il existe des associations pour les jeunes, il faut l'aider grave ! >>, pas de problème, Manu.

95. Marie : Ouais, il y a des foyers, ouais.

96. Difool : Ouais, on nous dit << je bosse au 75, il y a des solutions pour les femmes enceinte >>, c'est Marie qui nous laisse le message. << C'est dégueulasse de laisser sa fille comme ça >>. Ouais, il y a pas eu de dialogue non plus et a priori le dialogue a l'air d'être très... ouais, pas facile ton histoire. Bon, << Il existe des organismes qui hébergent les futures mères >>. On nous dit << je peux l'héberger, une ou deux nuits >>, donnes nous ton numéro, laissez bien vos numéros si vous allez sur le net ou les SMS. Euh, qu'est ce qu'on nous dit... << C'est dur le dialogue, ils sont durs, parfois, nos parents >>, c'est qui, c'est le Rennais qui nous laisse le message, 21 ans, en Ille-et-Vilaine. Au final,

ouais, on verra, quoi, je vais pas dire qu'au final, ça va bien se passer. J'espère en tout cas, pour Karine. << Je veux bien l'héberger, mais je suis sur Toulouse >>. T'es loin, Samy, mais c'est gentil quand même. << Il caille dehors, c'est la nuit la plus froide depuis longtemps, il va faire zéro à

Paris >>, c'est Shitman qui nous laisse le message. Mais bon, ça va pas se finir dehors, cette histoire, hein. << J'ai un appartement dispo dans le 78 jusqu'à la fin février >> Audrey, 22 ans, à Rambouillet, c'est gentil, Audrey.

97. Marie : Laisse ton numéro, Audrey.

98. Difool : Laisses-nous juste ton numéro. Tu vois, il y a plein de messages pour toi, Karine. On va revenir avec Karine, dans un instant. Euh... elle est au standard, là, on va la reprendre. [Autre sujet]

[Coupure pub et musicale]

99. Difool : Merci surtout pour les messages que vous nous laissez depuis tout à l'heure, là, sur le 41SKY, le Skyrock.com pour Karine. Des messages qu'on est en train de noter, il y en a plein. Karine nous a appelé il y a quoi, il y a 20 minutes parce qu'elle est dehors, elle s'est barrée de chez elle parce que ses parents vont pas supporter le fait qu'elle soit enceinte depuis six mois. Et donc on cherchait des endroits, des solutions pour qu'elle puisse dormir ce soir et que ça puisse être à plus long terme parce qu'elle est enceinte de six mois, donc euh... il y a trois mois pendant lesquels il va bien falloir qu'elle se repose, quand même.

100. Romano : Ben ouais parce que le bébé arrive.

TEMOIGNAGES D'AUDITEURS PAR MESSAGES (SMS ET INTERNET) ET POINTS DE VUE DE L'EQUIPE

101. Difool : Ouais, alors << il existe plein de foyers pour mères seules >>, il y a plein de messages qui nous disent ça, << pour Karine, il faut se renseigner sur Paris, bon courage à elle, bise à toute l'équipe >>. On a du monde, là, qui propose de l'héberger, on va rappeler tout le monde. Euh, Mick, qui nous fait << pour Karine, il y a des centres pour l'aider, je crois qu'il y a des aides pour les jeunes mères >> tout ça, Karine, il y a plein de messages pour toi, ça fait plaisir en tout cas de voir que vous êtres tout le temps, tout le temps dans le coin pour filer un coup de main. Donc on va trouver quelque chose pour ce soir, Karine, et puis on va surtout t'expliquer ce que tu vas pouvoir faire pendant trois mois. D'accord ?

102. Karine : D'accord.

103. Difool : Mais il y a forcément... Il faut se renseigner, Karine, tu sais, y a des trucs où t'aurais pu aller aujourd'hui, hein.

104. Romano : T'as les mairies, déjà...

105. Difool : Tu peux aller dans une mairie...

106. Romano : Là-bas, ils te renseignent.

107. Difool : Qu'ils te filent un coup de main. On nous dit que si t'étais allée dans une mairie aujourd'hui, t'aurais pu trouver...

108. Romano : Ouais, ils t'auraient orientée vers un truc direct.

109. Difool : T'aurais pu trouver un truc sans problème, et euh... et bon, au pire, on va te trouver quelque chose, t'en fais pas. << Il m'est arrivé la même chose, je suis tombée enceinte à 17 ans, appelez-moi >>, on a même des... des nanas qui veulent... qui veulent te parler, qui veulent parler avec toi, là. << J'ai ma cousine à qui il est arrivé la même histoire, il a fallu que toute la famille supplie mon oncle pour qu'il accepte >>, Ben tu vois, au bout d'un moment, ça s'est bien passé, là, c'est Dams qui nous a laissé un message, là. Il existe des centres d'hébergement, il y a Skip93 qui y est allée, elle avait 19 ans, elle, pareil. << Si elle est dehors, je peux bien la prendre chez moi >>, c'est Sarah de Cichy, qui vient de nous laisser un message, qu'on va rappeler. Tu vois, il y a plein de messages pour toi, donc t'inquiètes pas pour ce soir...

1 10. Karine : Merci beaucoup.

11 1. Difool : ... par contre, pour la suite de ta vie, bas toi, un peu, tu vois.

1 12. Romano : Ouais, il faut te bouger.

1 13. Difool : t'as des droits, tu dois te renseigner, tu dois aller...

1 14. Romano : Ouais, de toute façon, normalement t'as des aides, du genre de l'argent, quoi.

1 15. Difool : Ouais, et puis faut que tu sois fière d'avoir un bébé, quoi. C'est pas parce que tes parents,

ils... C'est pas dans leur délire à eux... dans leur tête à eux d'avoir un bébé comme tu vas l'avoir

toi, tu dois être fière d'avoir un bébé, c'est bien, t'as 22 ans, tu vas avoir un bébé... 1 16. Romano : Ouais, ça doit te rendre heureuse, hein.

1 17. Difool : Voilà, construis-lui une vie démente et commence maintenant, hein. Donc reste dans le coin, Karine.

118. Karine : D'accord.

1 19. Difool : C'était pour te dire que ça va bien se passer, t'inquiètes. Et merci à vous tous et à vous toutes, pour les messages, ça fait plaisir.

[Autres sujets]

120. Difool : Très bonnes nouvelles, là, maintenant. On va reprendre Karine, là, au téléphone, en direct de Paris, hein, Karine.

121. Marie : Ouais, c'est ça, ouais.

PROPOSITION D'AIDE D'AUDITRICES A L'ANTENNE ET POINTS DE VUE DE L'EQUIPE

122. Difool : T'as bougé de Poitiers. Bon, j'ai de bonnes nouvelles pour toi au téléphone, on va te mettre en contact avec Adjira, t'es là, Karine, hein ?

123. Karine : Oui, je suis là.

124. Difool : Oui. Alors, Adjira, qui a 22 ans, qui est à Trappes, si c'est pas bien loin, si tu connais pas bien la région parisienne, c'est dans le 78, c'est à l'est de Paris, Trappes.

125. Marie : Ouais, c'est ça, ouais.

126. Difool : C'est quoi, c'est à 30 bornes de Paris. T'es là, Adjira ?

127. Adjira : Oui, je suis là.

128. Difool : Bonjour, mademoiselle.

129. Adjila : Bonsoir !

130. Difool : 22 ans, Trappiste, Trappeuse...

131. Adjila : Oui, Trappeuse. Depuis peu, mais Trappeuse quand même, hein.

132. Difool : Alors, ben peut-être merci pour le coup de fil. Merci à vous toutes et à vous tous, hein, pour les messages pour Karine depuis tout à l'heure.

133. Marie : Oui, plein de messages.

134. Adjila : Ben, je vous en prie, c'est normal.

135. Difool : Et on n'a même pas rappelé tout le monde parce que pour l'instant, on n'a pas eu le temps, encore, mais on a...

136. Adjila : (Rires) Je suis avec ma colocataire, hein, Louisa.

137. Difool : Bonjour la coloc Louisa.

138. Louisa : Salut !

139. Difool : Ca va, Louisa ?

140. Louisa : Très bien. Salut Karine !

141. Difool : Ben, y a Karine, aussi, qui est là. Dans sa, dans son hall d'immeuble pour l'instant.

142. Adjila : Dans ton hall d'imm... Mais elle est où à Paris ?

143. Difool : T'es où, à Paris ?

144. Karine : Vers Gare du Nord.

145. Difool : Vers la gare du Nord, ok.

146. Adjila (probablement à l'adresse de sa colocataire Louisa) : Comment elle fait de Gare du Nord ?

147. Cédric : Sinon, il y a David, un ambulancier, qui se propose de t'amener où tu veux, Karine.

148. Difool : On va se démerder.

149. Romano : Pas cher !

150. Difool : Je vous avais dit, vous avez été super efficaces et ça fait plaisir, encore. Donc...

151. Adjila : Ben, c'est normal.

152. Marie : Ah, ben c'est bien, elle va être bien avec vous deux, là.

153. Adjila : Bah oui, elle va être bien !

154. Marie : Vous avez l'air joyeuses.

155. Romano : Non, non, on sera pas trois parce que Louisa, je la mets dehors, pour prendre Karine (rires).

156. Adjila : Et, t'as bien raison, Louisa, on la vire, y'en a marre (rires).

157. Louisa : Eh, arrêtez, moi je vous casse la gueule, hein (rires).

158. Difool : Oh, là, Louisa, attention (rires)!

159. Marie : C'est une caillera, hein.

160. Difool (voix d'imitation, CSA) : << Oui, la promotion de la violence sur Skyrock ! >> (rires)

161. Romano (voix d'imitation, CSA) : << Vous entendez, elles se tapent >> (rires)

162. Difool (voix d'imitation, CSA) : << Oui, ce sont des cailleras, les deux trappistes, elles habitent en banlieue. Elles habitent en banlieue ! >>

163. Louisa : Eh, mais c'est gratuit, les coups, pas cher Romano !

164. Romano : Ouais, pas cher !

165. Difool : Pas cher, les coups, ouais (rires). Bon, eh bien c'est gentil, en tout cas, t'as... En tout cas, c'est bien d'arriver chez deux nanas qui ont la pêche, ça...

166. Marie : Ah, oui, c'est clair !

167. Adjira : Elle risque pas de s'ennuyer.

CONCLUSION ET PERSPECTIVES

168. Difool : Bon, ça fait plaisir. C'est gentil, hormis ce côté rigolade, tout ça, ça fait plaisir, Adjila.

169. Adjila : Ben, c'est normal, ça nous a touché ce qui lui arrive.

170. Romano (imitant Adjila) : « Alors, la facture, on fait comment, je l'envoie à Skyrock ou... » (rires)

171. Difool : Par contre, ce qu'il va falloir faire pour toi Karine, c'est vraiment t'occuper de toi, aller voir demain des...

172. Cédric : Des assistantes sociales.

173. Romano : Ouais, à la mairie, tout ça.

174. Difool : Tu vois, la mairie de Trappes, vous l'emmenez à la Mairie de Trappes et puis elle se démerde, t'es grande, hein, Karine.

175. Karine : Oui.

176. Cédric : Parce que même ton accouchement, t'es au courant, il faut aller voir euh...

177. Difool : Il faut aller voir une gynéco, faut, euh...

178. Marie : Non, mais il faut que tu t'inscrives dans un hôpital, bien sûr, et que tu voies un gynéco parce que à six moi, il faut vraiment...

179. Cédric : Les hôpitaux, c'est blindé pour ça, hein.

180. Marie : Mais bien sûr.

181. Difool : D'accord, Karine ?

182. Karine : D'accord

183. Marie : En même temps, si elle arrive aux urgences...

184. Difool : Tu vas gérer tout ça, ça nous fait plaisir, et puis en tout cas, tu seras mieux... en plus, avec vous deux, c'est parfait, les filles, vous êtes...

185. Cédric : C'est un bon départ, là.

186. Adjila : Merci.

187. Romano : Ouais, c'est bien, vous allez lui remonter le moral et tout.

188. Adjila : On va essayer un petit peu de lui changer les idées.

189. Cédric : Ca à l'air bonne ambiance.

190. Difool : Oui, c'est sympa, chez vous, là.

191. Adjila et Louisa : Oui, ça va !

192. Cédric : C'est festif.

193. Difool : Oh, je crois que je suis enceint... (rires)

194. Cédric : Moi aussi, on peut pas venir, les filles ? (rires)

195. Adjila : Oh, ben non, il y a plus de place. (rires)

196. Difool : Ah, merde. (rires) Bon, ben écoutez, merci beaucoup, Adjila, Louisa, on vous rappelle demain pour prendre des nouvelles, voir comment ça s'est passé ?

197. Adjila : Il y a pas de problèmes.

198. Difool : et merci à tous les autres qui ont laissé des messages. Ce qu'on va faire aussi, euh... Karine, on va garder ton numéro et puis on va te rappeler, bon, on va te suivre jusqu'à ce soir, on va te laisser le numéro de l'ambulancier...

199. Cédric : Ouais, David, ouais.

200. Difool : On va vous mettre en contact avec David, merci l'ambulance, là. Et puis on te rappellera pour te laisser les numéros, te donner des numéros d'organismes que tu peux appeler, des gens qui peuvent t'aide, te donner des conseils si t'as besoin pour ton bébé, tout ça. D'accord ?

201. Karine : D'accord.

202. Difool : Bon, ben merci en tout cas, Adjila et Louisa, là, les filles.

203. Adjila : Ouais, on vous en prie, c'est normal.

204. Difool : Eh ben, c'est, oui, mais ça fait toujours plaisir de l'entendre et puis de... Ben merci d'avoir appelé, en tout cas. Bon, salut, les filles !

205. Adjila et Louisa : Salut !

206. Difool : Bon, et puis Karine, merci de nous avoir appelé et puis euh...

207. Karine : Merci à vous.

208. Difool : Ben, euh, non, mais, et puis voilà. Bon, prends soin de toi, fais un beau bébé et tout ça, et puis on prend des nouvelles demain soir.

209. Karine : D'accord.

210. Difool : Et raccroche pas, on va te prendre, là, tout de suite, là.

211. Karine : Ok.

212. Difool : Ok, on va tout t'expliquer. Et euh... si vous arrivez avant minuit, on vous rappelle... Si t'arrives avant minuit, ça m'étonnerait, cela dit, mais bon, si t'arrives avant minuit à trappes, on te fais signe et sinon, demain, on prendra des nouvelles.

213. Karine : D'accord.

214. Difool : Bisous, les filles, toutes les trois, là. Salut !

215. Romano : Salut !

216. Difool : Salut Karine.

Au regard de ces retranscriptions, nous allons pouvoir interroger le fonctionnement du discours de la skysolidarité : comment se structure-t-il, quelles valeurs peut-on définir comme constitutives de sa logique de fonctionnement ?

Il va s'agir en premier lieu de décortiquer son architecture en tant que dispositif médiatique de libre antenne organisé autour d'un projet d'entraide par appel à la solidarité, au partage des expériences. Nous aurons ensuite le champ libre pour l'analyse des valeurs sur lesquelles il fonde son propos, sa parole.

Nous devrons alors procéder à un enregistrement précis des contenus des grandes orientations, des grandes articulations, ainsi que de certaines thématiques redondantes que nous pourrons estimer opportunes. La méthode aura consisté, séquence après séquence, à l'enregistrement des articulations des grandes phases du discours communes à chaque sujet, mais aussi des thèmes réguliers (universalité des intolérances, du racisme ; primordialité de la liberté individuelle ; importance du lien familial...) Nous en illustrerons régulièrement l'analyse afin de la rendre cohérente et de la justifier.

Puis, nous essaierons, appuyés par différents travaux de recherches notamment en sociologie, de comprendre la place de Radio libre dans l'espace social dans lequel évoluent ses auditeurs.

Troisième Partie

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Un regard sur Radio libre et les séquences retranscrites

Architecture de la skysolidarité

D'un peu plus près, techniquement, comment ça marche, la skysolidarité ?

A l'écoute des séquences et au regard de ces retranscriptions, nous pouvons noter d'ores et déjà une première logique fonctionnelle.

Une première phase de chaque cas traités dans l'émission consiste à l'exposé du problème de l'auditeur appelant, selon une injonction simple de l'animateur principal (interventions N°1 dans chaque séquence : pour les sujets ayant trait au racisme « Alors, qu'est-ce qui t'arrive, Séréna, toi ? », « [...] toi tu te poses la question de savoir si ça vient pas de l'influence des parents, c'est ça, hein ? », « Oui, Shirley ? » ; pour ceux concernant l'homophobie « T'appelais pour quoi, toi, d'abord ? », « Alors, qu'est-ce qui t'arrives ? », « Sois le bienvenu, t'as 22 ans, c'est ça ? » ; et s'agissant de l'intolérance du fait de la religion/tradition « Bon, alors, Isis, Qu'est-ce qui t'arrives ? » et « Bon, alors, je vous parlais de Karine, là, qui nous a passé un coup de fil, il faudrait un coup de main[...] »). Il est clairement rappelé, dès le début et ponctuellement par la suite, que les auditeurs sont là, avec l'équipe de l'émission, pour que soit sollicitée leur aide.

Vient ensuite le temps de partager les expériences, en faisant appel aux témoignages des auditeurs qui peuvent appeler un numéro téléphone (01.53.40.30.20) ou laisser des messages sur la partie consacrée à l'émission en bonne place sur la page d'accueil du site de la station ( www.skyrock.com) ou encore envoyer des SMS au 41759 (plus souvent nommé à l'antenne « 41 SKY » du fait de la combinaison des lettres sur un clavier de téléphone portable). La plupart des adolescents ont leur propre portable voire une connexion à internet dans leur chambre et peuvent donc entrer en contact depuis leur espace propre, leur chambre. Certains auditeurs, sélectionnés par les standardistes, sont rappelés pour discuter à l'antenne et une sélection de messages de nombreux autres est distillée par Difool pour développer la conversation. L'appel aux témoignages est très fréquemment relancé par Difool à l'antenne et rythme le

temps de la radio : entre chaque sujet (d'autant plus qu'ils se chevauchent bien souvent), avant et après les séquences publicitaires, footballistiques ou les jeux...

Avec les points de vue de l'équipe de l'émission Radio libre (Difool, Marie, Romano le réalisateur, Cédric, Momo et Samy les standardistes) auxquels Difool fait appel opportunément, les témoignages des auditeurs, à l'antenne ou par messages, s'imbriquent pour construire une conversation entre des émetteurs variés.

Il en ressortira une construction qui, si elle est médiée (on peut penser notamment que certains messages ne sont pas lus car ils ne rentreraient pas dans la couleur de l'antenne ou s'opposeraient violemment aux valeurs fondamentales du discours que nous interrogerons plus loin, notamment précisément s'agissant de la tolérance), n'en est pas moins le résultat de la participation des membres d'une équipe et des auditeurs.

Difool fait la plupart du temps, en conclusion, une synthèse des expériences et des conseils, et n'oublie jamais de remercier les auditeurs pour leurs messages. Nous noterons que pour beaucoup des cas que nous étudions, souvent graves, Difool promet de « prendre des nouvelles » (« Et puis on prendra des nouvelles si tu veux bien, Séréna », « Ok, on te rappellera, de toute façon, et puis si t'as besoin de nous, tu nous appelle sans problème », racisme, sujet 1, interventions 320 et 322). Promesse d'un suivi, dont on a parfois « in » quelques jours plus tard, des traces de sa réalité « off ». Il s'agit aussi de donner (hors antenne aussi) le relais aux acteurs sociaux qui peuvent venir en aide, vers lesquels l'équipe de Radio libre oriente les auditeurs après avoir finalement assuré un rôle de transition entre des auditeurs et des institutions qui existent mais qui leur sont parfois inconnues, du planning familial au centre pour jeune mère sans abri, en passant par des lignes téléphoniques de soutien, des services sociaux administratifs... On retiendra particulièrement le dernier sujet de notre corpus où une jeune femme se trouvait à la rue, enceinte de six mois, après avoir quitté sa famille qui n'aurait pas accepté sa grossesse. La consigne a été donnée aux auditrices qui l'hébergeront dans l'urgence de lui indiquer les services sociaux

auxquels elle pouvait s'adresser. Il arrive aussi que des auditeurs soient mis en relation entre eux (« On peut même vous mettre en contact toutes les deux, les filles, si vous voulez », racisme, sujet 3, intervention 146 »)

Il s'agit donc pour le dispositif de la skysolidarité d'apprécier le soutien que l'auditeur peut trouver dans son entourage de la vie dite réelle ou l'isolement qu'il y connaît, et se positionner ensuite en alternative à la gestion de la crise. Avant qu'il ne s'agisse d'une médiation (on notera que l'équipe s'interdit d'appeler les parents ou les amis de l'auditeur), le principe est de parler, de faire parler l'auditeur, de l'écouter alors qu'il ne trouvait pas nécessairement d'oreilles confidentes, ni à plus forte raison complices (nous allons le voir, le discours de la skysolidarité bannit toute forme de racisme ou d'autres intolérances et accepte sans jugement l'homosexualité). Il va être confronté à d'autres jeunes gens qui lui manifesterons leur simple soutien ou qui partageront leur expérience similaire, de différents points de vue (celui, identique, de la victime, ou celui d'un frère, d'une soeur, d'un ami...) et des différentes attitudes qu'ils ont pu adopter. Partager et confronter les expériences pour proposer des solutions et, à tout le moins, dédramatiser une situation vécue comme tragique pour l'auditeur.

Résonances et valeurs d'un discours

Développement de la skysolidarité

Dès la première phase que nous avons distingué, il ne s'agit pas seulement de laisser l'auditeur expliquer « ce qui [lui] arrive ", mais aussi d'évaluer le problème dont il va être question. Difool et ses acolytes demandent des précisions, de divers ordres : factuels, situationnels... Très vite, bien souvent, il s'agit de questionner l'auditeur appelant sur les soutiens qu'il ou elle pourrait trouver autour de lui ou d'elle. Un(e) parent(e), un(e) ami(e)... Ainsi on peut entendre de Difool demander « Et elle, elle en pense quoi, la belle-mère ? " (racisme, sujet 1, intervention 13), une autre fois un auditeur propose par message lu à l'antenne par Difool « demande à ta mère » du soutien à propos du sujet où le père n'accepte pas le copain noir de l'auditrice (racisme, sujet 2, intervention 142), attitude qu'avait eue avec succès Moïse qui témoigne plus loin dans la même séquence (intervention 212). Ailleurs, on demande à l'auditeur auprès de qui il aurait fait son coming out (sujet homophobie 1, intervention 23 à 26) et qui pourrait le soulager (Difool : « T'as au moins tes potes pour te confier ", homophobie, sujet 2, intervention 137). Dans les sujets de notre corpus concernant l'intolérance du fait de la religion/tradition, il en est de même. Difool s'inquiète dans le premier de savoir pourquoi l'auditrice ne parle pas du père se son copain (intervention 135), et dans le second, où l'auditrice à quitté sa famille du fait de sa grossesse, le premier réflexe est aussi de savoir si quelqu'un dans la famille peut être un allié pour l'auditrice (intervention 17).

La famille apparaît ainsi comme le premier refuge naturel dans le dispositif d'appel à la solidarité de l'émission, même si dans l'immense majorité des cas que nous traitons, le racisme, l'homophobie ou l'intolérance du fait de la religion/tradition, elle en est à l'origine. Les amis se présentent aussi dans ce cadre comme un cercle privilégié, possible alternative à l'épanouissement. Par exemple, si les parents ont du mal à accepter la relation homosexuelle de leur

enfant, celui-ci, d'après les conseils de la skysolidarité, peut substituer à leur approbation le refuge qu'il pourra trouver auprès d'amis qui seraient plus réceptif à l'épanouissement de sa sexualité (Difool : « T'as au moins tes potes pour te confier, mais bon ", homophobie sujet 2, intervention 137), sans nécessairement se priver de se réaffirmer plus tard. Comme ce fut la cas pour le frère jumeau d'Emilie, une auditrice que l'on a entendue à l'antenne dans le premier sujet de notre corpus concernant l'homophobie (« ...mes parents ont eu le temps de méditer dessus, ils ont vu qu'ils sont toujours ensemble [le frère et le copain de l'auditrice], et là, c'est eux qui refont une approche vers nous ", homophobie, sujet 1, intervention 217).

Ainsi, s'il ne s'agit pas pour les intervenants à l'antenne, bien au contraire, de se substituer à l'entourage de l'auditeur concerné par son problème, le dispositif skysolidarité se positionne comme celui du recours alternatif, plus ouvert d'esprit, et prône le dialogue avec les parents, les amis... à la condition qu'une évidente intransigeance ne contrevienne pas à l'épanouissement de l'identité de l'auditeur ou de ses choix amoureux. C'est ce que nous allons voir maintenant.

Quels sont les conseils donnés aux auditeurs, quel discours est construit dans la skysolidarité ?

Le premier réflexe, face au racisme, à l'homophobie ou à l'intolérance du fait de la religion/tradition dont sont victimes les auditeurs de la part de leurs parents ou ceux de leur copain(ines) est de prôner le dialogue avec ceux-ci, que le message vienne :

- de l'équipe de l'émission (Difool : « Moi, je sais pas, j'aurais plutôt envie de le con vaincre, parce que je le trouverais con de réagir comme ça ", racisme, sujet 1, intervention 227 ; Difool : « [...] Tu vas peut-être essayer de discuter avec eux, non, ça marche pas ? ", racisme, sujet 2, intervention 70)

- des auditeurs à l'antenne (le témoignage de Sophie, racisme, sujet 1, interventions 191 et 203 : « Donc voilà, elle a flippé, et puis bon, on en a parlé, tout ça, et je lui ai dit, que bon, pour l'instant, je sors avec lui et si

vous êtes pas content, c'est pareil, quoi. Et bon, là, elle l'a pas trop bien pris, mais bon ", « je lui ai dit `je vois pas ce que ça peut te faire, c'est ma vie'' et puis voilà, et si ça allait pas, ça durerait pas depuis huit mois, et il m'a dit `'ben ouais, mais bon, c'est comme ça, pas autrement' ' ")

- des auditeurs ayant laissé un SMS ou un mail (Difool : « Sinon, OCB59, là 19 ans, dans le Nord, qui dit `'il faut en parler avec tes parents, tranquillement, et il te comprendront'' ", racisme, sujet 1, intervention 75).

Il s'agit aussi, comme nous l'avons vu, de trouver du soutien auprès des amis (Difool : « Ouais, et puis parles-en à tes potes, t'as des potes qui sont plutôt ouvert, c'est plutôt pas mal, quoi ", homophobie, sujet 2, intervention 293). Un soutien que l'on trouve déjà à l'écoute de l'émission, en partageant des expériences dans un cadre de discussion empathique et tolérant. Sans doute un aspect à considérer en tant que tel dans le processus de la skysolidarité. Les auditeur sont à ce propos reconnaissant à l'antenne, comme Brian, par exemple, dont les parents n'acceptent pas l'homosexualité : « Ben en tout cas, je vous remercie, déjà, c'est super sympa, tu vois [...] dès qu'il y a un problème, c'est bien, tu vois, il y a quelqu'un pour parler, franchement, vous déchirez " (homophobie, sujet 2, intervention 285 et 287).

Les soutiens que les auditeurs sont appelés à trouver autour d'eux peuvent non seulement jouer un rôle dans leur épanouissement mais aussi servir de relais pour une argumentation plus solide face à la personne réticente. Une auditrice pensait ainsi faire jouer le rôle d'intermédiaire à sa mère, qui pourrait avoir meilleure autorité pour convaincre la mère de son copain de laisser son fils la fréquenter (intolérance du fait de la religion/tradition 1, intervention 30). Même si la raison de leur appel est souvent l'isolement extrême.

Le dialogue est, dans le discours développé par la skysolidarité, valorisé non seulement pour l'identité sociale de l'individu, mais aussi pour l'identité pour soi, comme on peut le lire, par exemple, dans le second sujet sur l'homophobie, avec le témoignage d'un auditeur sur les bienfaits du coming out : « J'appelais parce que j'étais un peu dans le même cas que Brian. Moi, j'ai commencé à dire à mes

amis tout ça que j'étais gay quand j'avais... quand j'allais en première. Donc ça remonte. Et en fait je l'ai dit à mes parents parce qu'on se sent beaucoup mieux quand on le dit à ses parents. Enfin, je sais pas, c'est... " (intervention 182).

Le dialogue veut présenter également une dimension préventive et pédagogique. Par exemple dans le témoignage de Momo, un membre de l'équipe, au sujet du choix amoureux qui ne concerne que l'individu (en l'occurrence lui, comme exemple à l'adresse de l'auditrice du sujet 1, intolérance du fait de la religion/tradition) et pas ses parents : « Non mais en plus j'en ai parlé tout à l'heure à ma mère, je lui ai dit `'y a même pas moyen, tu me fais jamais ça, hein'' ", « [...] j'ai essayé d'expliquer les choses... ", « Ah non non non, moi je veux pas. C'est moi qui la choisis ". Get exemple est révélateur du positionnement de la skysolidarité.

La fermeté est de rigueur lorsqu'il s'agit de défendre une valeur centrale dans le discours de la skysolidarité : le respect de la liberté de chacun, face à l'intolérance. Les auditeurs qui laissent des messages lus à l'antenne ne négligent pas non plus le lien parental et sont même souvent plus rigoureux que les membres de l'équipe s'agissant de préserver le dialogue coûte que coûte avec les parents : « Les parents sont ancrés dans leur culture, mais il suffit de discuter, de négocier, ce sera peut-être long, tu pourras peut-être les changer " (intolérance du fait de la religion/tradition, sujet 1, intervention 158).

Mais la situation évaluée (première phase d'évaluation), faute de dialogue possible, comme cela est le cas dans la plupart des sujets de notre corpus qui sont parmi les plus lourds dans Radio libre, le dispositif de la skysolidarité développe des propositions d'autonomisation de l'individu. Son épanouissement sentimental prévaut dans le dispositif et s'il est impossible de le partager avec les parents, autant exclure ces derniers.

Ainsi, quand les parents n'acceptent pas le petit ami noir, maghrébin ou kabyle, lorsqu'ils ont du mal à accepter le choix amoureux de leur enfant ou son identité sexuelle, les animateurs de Radio libre, après avoir proposé le dialogue et

constaté celui-ci difficile, proposent, souvent rejoints par des auditeurs, de vivre son amour sans le faire partager aux parents, quitte à le déplorer.

Ainsi, Romano suggère de ne pas imposer ce qui est vécu comme un traumatisme par des parents à cheval sur les orientations sexuelles : « Ouais, mais voilà, quoi, parce que si tu leur en parles et que ça les traumatise, ça sert à rien non plus, s'ils sont vraiment bloqués, bon... Enfin, je sais pas, moi je vois pas d'autres... Non, mais c'est vrai, moi je pense que je ferais ça, si mes parents étaient vraiment bloqués, tu vois, ils me poseraient des questions, je resterais vague... » (homophobie, sujet 1, intervention 129). Et Difool d'enfoncer le clou : « C'est ta vie privée, ta vie privée tu la vies, t'es pas obligée de la partager avec tes parents, hein... », « Ben écoutez, c'est triste, mais merci d'appeler pour Séréna. Merci pour tous les messages, regarde, il y a Titou du 94 qui nous fait `'mon père est pareil -donc un peu... raciste, on va dire- laisse couler et vis ta vie''. C'est vrai, t'es pas obligée de partager ça avec tout le monde » (racisme, sujet 1, interventions 128 et 188). « Il y a Billy qui nous dit `'Je suis bi, et j'ose même pas en parler à mes copines' ' Ben t'es pas obligée, c'est ta vie à toi, aussi, hein » (homophobie, sujet 2, intervention 132). Les parents intolérants sont alors envisagés comme « tout le monde », pas nécessairement concernés par les amours de leurs enfants. « Ta vie à toi » ne concerne que toi. Le choix d'en partager certains éléments avec certaines personnes doit se faire dans un but d'épanouissement, soit avec ceux qui prêteraient une oreille bienveillante dans la tolérance d'une identité « différente ».

Ces conseils en direction d'une démarche d'autonomisation du jeune adulte (majeur dans chacun de nos sujets) sont souvent confirmés par les propositions des auditeurs à l'antenne. Ainsi, pour ce même sujet, Moïse ajoute à son expérience un ultime conseil pour Séréna, dont les parents n'acceptent pas le copain noir : « [...] si je peux donner un conseil à Séréna, tu vois, je veux pas trop l'embrouiller, mais si je peux lui donner un conseil, c'est surtout de calmer le jeu, et de pas trop se prendre la tête et de laisser faire le temps, parce que... » (racisme, sujet 1, intervention 224).

Difool donne très directement son point de vue sur l'attitude d'autonomisation lorsqu'il paraît impossible de faire évoluer le point de vue des parents : en réaction au message d'une auditrice qui avait quitté son copain maghrébin à cause de l'intolérance de ses parents, il précise « Quand tu aimes quelqu'un, moi je pense qu'il faut résister, c'est pas... c'est pas manquer de respect à tes parents que de sortir avec un gars que t'aimes, hein. Enfin, je pense » (racisme, sujet 2, intervention 114). Le respect, une notion fondamentale sur laquelle nous aurons l'occasion de revenir.

La liberté de chacun doit être respectée et il faut faire respecter la sienne. Même dans la configuration difficile de dépendance aux parents. En cloisonnant les relations familiales des relations amoureuses, voire en prenant son indépendance si les conditions peuvent être réunies pour les jeunes adultes en grande détresse, voire menacés comme c'est le cas dans les deux dernières séquences de notre corpus (Difool : « [...] quand on respecte pas ta liberté, il faut la prendre ta liberté. Donc il faut qu'il trouve un pote chez lequel il peut aller squatter... », religion/tradition, sujet 1, intervention 52). La skysolidarité se matérialisera dans ce cas de façon très concrète, par exemple en mobilisant une chaîne d'entraide : un auditeur ambulancier servira de chauffeur dans la nuit pour conduire Karine dans une joyeuse colocation de jeunes femmes qui hébergeront dans l'urgence l'auditrice, enceinte de six mois, rejetée par sa famille et par celui sur qui elle croyait pouvoir compter, et qui se retrouve à la rue. Au-delà des informations qui ont pu être échangées à l'antenne et hors antenne sur les services sociaux qui pourront aider Karine, il s'est agit ici de pallier l'urgence et de ne pas laisser une jeune femme enceinte dehors en hiver. Si la chose est plutôt exceptionnelle dans l'émission, elle confirme majestueusement, par la mise à l'épreuve la plus concrète, la solidarité qui lie les auditeurs dans l'émission.

Ainsi, lorsque le dialogue avec les parents semble sans promesse d'évolution vers l'acceptation de l'identité ou des choix de leur enfant, le discours que l'on voit se construire développe l'idée de l'autonomisation des jeunes adultes. Si des parents sont indéfectiblement racistes, ce n'est pas une raison pour choisir un compagnon ou une compagne qui leur plairait mieux que l'être aimé. Ne pas se

« prendre la tête " dans une situation pénible et qui semble inéluctable, séparer les relations, voilà ce qui résulte des propositions des auditeurs et de l'équipe de Radio libre pour faire cohabiter dans sa vie de jeune adulte un amour et des parents qui ne le cautionnent pas du fait de son appartenance ethnique ou de sa sexualité.

Il est parfois même question, comme nous l'avons vu, de proclamer sa liberté en prenant son autonomie, lorsque cela est matériellement possible. Difool n'est pas seul à aller dans ce sens. Comme cela est le cas la plupart du temps, les auditeurs laissent des messages en phase avec les points de vue de l'équipe : « mais il a 20 ans, il est majeur, moi je me casse dans une autre ville, je me cache chez des amis... ", « Il faut qu'il se barre de chez lui, les parents ils craignent trop, il a 20 ans, il est majeur, il fait ce quil veut " (intolérance du fait de la religion/tradition, sujet 1, interventions 125 et 141)

La question d'une normalité est affirmée au sens de la tolérance. On ne choisit pas son identité ethnique ou sexuelle. Un auditeur dont les parents veulent qu'il devienne hétérosexuel s'entend répondre par Difool et Romano : « Mais être obligé à être hétérosexuel, si t'es homo, t'es homo, il y a pas de... tu vas pas te forcer à faire un truc que t'aimes pas. ", « Il y a pas à choisir de toute façon " (homophobie, sujet 1 interventions 79 et 80)

« Il n'y a pas à choisir ". Dans le discours construit par la skysolidarité, ce qui est anormal n'est pas de préférer les filles ou les garçons, c'est de ne pas le respecter. Ce qui est anormal n'est pas d'avoir une couleur de peau différente, c'est de ne pas le tolérer. Cet échange synthétise d'une traite (sans coupures dans la citation) les phases de l'expression de la skysolidarité en cas de dialogue difficile :

[Expression du malaise de l'auditrice]

Séréna : Bah, franchement, j'en sais rien non plus, quoi... Je suis pas plus rassurée, quoi, j'ai toujours l'angoisse, quoi. Là, bon, je vais voir mon mec lundi, je crois que je vais en parler avec lui...

[Défatalisation et affirmation des valeurs]

Difool : Ouais, mais que ça devienne pas un problème pour... tu vois, qu'il ait pas l'impression d'être un problème, c'est pas lui le problème, c'est ton père. Séréna : Ah, ben non...

[Dédramatisation et recommandation]

Marie : Ouais, tu vis ta vie avec ton mec et puis voilà, tu fais une section entre les deux et puis c'est tout hein.

Difool : Ce qu'il faut que tu dises à ton mec c'est que sur ce plan là, ton père il te prend un peu la tête donc voilà, vous allez vivre tous les deux et puis... enfin, tous les deux votre histoire sans forcément la partager avec tout le monde. [Perspectives d'avenir quand à l'affirmation devant les parents]

Marie : Et puis ça peut peut-être évoluer, hein, il est peut-être pas forcément braqué... » (racisme, sujet 1, interventions 297 à 302).

Le choix de la clandestinité au regard des parents peut s'avérer, somme toute, provisoire dans les espoirs que développe la skysolidarité. Dans le discours que nous voyons se construire, tout peut changer, avec le temps. Et l'amour de ses enfants, le respect, finalement qu'inspirerait le sérieux de leur relation amoureuse peut faire évoluer la mentalité de parents un peu « québlos ». Les choix d'une vie de jeune adulte, ses amours, doivent primer sur l'intolérance, le racisme, l'homophobie de certains parents, et leur montrer exemplairement que l'épanouissement personnel qui en est la conséquence peut être la voie pour plus de confiance de leur part.

Rien n'est rédhibitoire, si le discours de la skysolidarité prône l'apaisement, ce n'est pas dans l'optique d'un repli. Au sens, nous l'avons vu qu'il s'agit de trouver de meilleurs espaces d'épanouissement personnel, mais le rapport de soi aux parents peut resurgir dans des conditions plus sereines, comme le proposent certains messages lus par Difool : « `'Vis ta vie, trouves-toi un mec, et après t'en parleras peut-être à tes parents si tu en sens le besoin'', c'est le message du Polac », (homophobie, sujet 2, intervention 263), messages qui rejoignent le point de vue de l'équipe de Radio libre (« T'attends d'avoir une relation avec un gars et puis... », homophobie, sujet 2, intervention 274).

On entend parfois dans Radio libre des solutions originales. Comme quand Marie propose d'écrire une lettre, dans le premier sujet sur l'homophobie : « Non, mais tu devrais peut-être, si t'arrives pas à discuter avec eux, écrire une lettre avec tout ce que tu ressens, vis-à-vis d'eux, vis-à-vis de toi... », « tu expliques bien ce que tu penses, ce que tu ressens, tout ça, même sur le moment s 'ils le prennent pas bien, la lettre ils la gardent, et avec un petit peu de recul, tu vois, peut-être ils peuvent comprendre. Même si c'est dans un an, j'en sais rien, mais ça peut peutêtre apporter quelque chose, quoi. De l'eau au moulin, en tout cas » (homophobie, sujet 1, interventions 134 et 136)

Primauté de la liberté.

La notion primordiale de respect (terme souvent employé de façon a priori bien galvaudée et hyperbolique dans le parler nouveau des banlieues mais ici érigée en véritable valeur) est, dans le discours développé par la skysolidarité, à considérer tant à attendre de la part des autres (sur la liberté de ses choix, la tolérance des autres à la couleur de peau différente) qu'à s'imposer à soi. Pour soi, se respecter c'est respecter sa liberté en jeune adulte. Et pour les autres : respecter l'autorité parentale, les appréhensions des parents, leurs peurs, même, en essayant de les faire évoluer.

Caractères linguistiques

Si l'on veut porter un regard sur la construction d'un discours comme constitutive d'un projet commun, la coordination de la langue est évidemment le premier élément préalable nécessaire que nous devons interroger. C'est ce que nous avons vu, d'après le travail Georges Mead1, dans la seconde partie de notre exposé.

1 George Herbert, Mead, Mind, self and society, University of Chicago press, 1962.

La communauté de la langue n'est pourtant pas, du simple premier point de vue de l'analyse langagière, un caractère pleinement satisfaisant. Le langage doit partager d'autres codes plus informels : un lexique commun, une grammaire, une ponctuation verbale, des expressions communes. Un « parler commun », en définitive. On ne peut s'empêcher de penser au travail d'Anne-Caroline Fiévet sur les codes langagiers entendus dans les émissions de NRJ, Fun radio et Skyrock1. On n'obéit pas aux mêmes codes sur ces trois grandes radios jeunes dont les cibles (et les publics) sont très différents. Pour Anne-Caroline Fiévet, le parler nouveau des banlieues dominant sur l'antenne de Skyrock est un métissages de différents argots (anciens remis au goût du jour ou simplement empruntés, nouveaux argots) ainsi que de nouveaux lexiques dont fait partie, par exemple, le verlan. Ce vocabulaire n'est donc pas un simple langage commun, nous pourrons voir ici la marque d'une appartenance identitaire forte2.

Mais il ne s'agit pas seulement d'un vocabulaire collectif. Il y a aussi une grammaire, une syntaxe partagée par les auditeurs et les animateurs sur l'antenne. L'expression orale est, en outre, la plus révélatrice de ces codes. On peut ainsi constater des constructions syntaxiques communes. D'une part s'agissant de la ponctuation elle-même au sens strict (comme par exemple le recours à des phrases tronquées que nous décelons dans les retranscriptions par la matérialisation écrite des points de suspensions). Mais aussi, d'autre part, en envisageant l'emploi d'expressions comme « t'as vu ", « tu vois ", « et tout ", « franchement ", « quoi " (et tant d'autres que l'on retrouve tout au long des retranscriptions) comme véritables marqueurs de ponctuation, établissant un code syntaxique singulier tout autant qu'un socle de marqueurs langagiers identifiants : comme le fait observer Anne-Caroline Fiévet, ne dite pas « tu vois " à un animateur de Fun radio, il se moquerait gentiment de vous en vous expliquant que non, à la radio, on ne voit rien (en déplaçant ainsi la valeur de l'expression dans un univers langagier où elle ne signifierait rien d'autre que la

1 Anne-Caroline Fiévet, sujet de thèse, sous la direction de M. Jean-Pierre Goudaillier : Langue des jeunes et stratégies des animateurs dans les émissions de libre-antenne de trois radios nationale. Anne-Caroline Fiévet appartient au groupe Radio (rencontres-ateliers doctoraux interdisciplinaires sur la radio, proche du GRER (groupe de recherche et d'études sur la radio) de Jean-Jacques Cheval, maître de conférences à

l'Université Michel de Montaigne de Bordeaux 3.

2 Françoise Gadet, Le Français populaire, Paris, Puf, Coll. Que sais-je, 1997, 194 pages.

conjugaison de l'activité permise par nos yeux) voire exprimerait franchement son agacement en vous envoyant promener.

Dans ses travaux, Anne-Caroline Fiévet montre ainsi le caractère identitaire des langages propres aux auditeurs et aux animateurs des différentes libres antennes du soir sur Skyrock, NRJ et Fun radio et leur imperméabilité.

Partager le même langage co-élaboré dans une émission par les différents auditeurs et animateurs s'avère ainsi un élément fondamental du contrat de communication radiophonique pour chacune des émissions de libre antenne. Mais si ces langages sont propres à chacune de ses émissions, ils n'en sont pas pour le moins rigides. Au contraire, ils sont très vivants. Ils évoluent selon les vagues d'emprunts de mots ou d'expressions dans la langue des cités (qui concerne tout particulièrement Skyrock) et enrichissent en permanence un vocabulaire coloré. On remarque ainsi à de nombreuses reprises les répétitions de la même phrase par un auditeur ou un animateur qui remplace une expression par un synonyme pour se l'approprier ou la rendre plus accessible selon les fluctuations populaires ou plus excluantes de certaines d'entre elles.

Le parler nouveau des banlieues vit et forge l'identité langagière commune sur l'antenne de Skyrock. Les mêmes langages et les mêmes codes partagés, le contrat de communication en est renforcé par l'adhésion à une identité langagière commune.

Le langage n'est cependant pas la seule condition du contrat de communication pour l'élaboration d'un discours constitutif d'un projet commun. Si nous avons vu plus haut qu'un certain nombre de valeurs sont partagées à l'antenne, notamment s'agissant des attitudes des auditeurs et de l'équipe prononcées à l'antenne à propos des questions d'intolérance, il va s'agir de déceler plus profondément quelles sont les valeurs qui gouvernent ces attitudes et qui forgent le discours de l'émission.

Respect et diversité

Le respect, il en est toujours question. Dans un schéma où l'individu est isolé, particulièrement face aux questions d'intolérance, de discrimination, l'entreprise collective n'est possible qu'en respectant les autres, la diversité.

Face à l'ensemble des sujets d'intolérance, on prône le respect, sur l'antenne de Radio libre, en exaltant la beauté des différences. Au fil des séquences dont les conversations sont retranscrites plus haut, on procède à ce que l'on pourrait appeler une apologie de la diversité. Comprenons qu'en réponse à l'intolérance, au racisme ou à l'homophobie, on célèbre la diversité, le métissage.

Ainsi, on peut entendre cet échange dans le premier sujet de notre corpus (« mon père n'accepte pas mon copain car il est noir ») :

Marie : Non mais tu vois, à la base, on est tous métissés...

Difool : Ouais, on a tous des...

Marie : ... à des degrés différents, on n 'est pas 100% Français...

Difool : Je tiens à vous dire qu'avant nous, nos ancêtres ont baisé dans tous les sens et...

Marie : Exactement ! Et c'était colonisé, enfin, quand tu remontes un peu, c'est débile de dire ça, tu vois. [...]

Difool : C'est vrai, on est tout un peu métis, quoi...

Marie : Voilà, donc il faut pas s'arrêter là, quoi, il faut... C'est juste quils sont un petit peu bloqués.

Difool : Et puis quand tu voyages un peu, en fait, je sais pas, moi, j'ai des potes renoi en Italie, ils se comportent comme des ritals, hein. Ils ont rien à voir avec mes potes renoi français qui... tu vois. Ils écoutent pas la même musique... Marie : Regarde, quand t'es rebeu, que t'es né ici et que tu vis en France, t'es pas... quand tu vas au Bled, t'es pas pareil que tes cousins, quoi, qui vivent au Bled. Il y a une différence, c'est normal.

(Racisme, sujet 1, interventions 237 à 245).

Dans cet extrait, on généralise les métissages, on mélange diversité ethnique, géographique, histoire et cultures pour finalement valoriser une unité française culturelle et sociétale et non ethnique ou nationale.

Le parallèle avec la diversité des auditeurs de Radio libre, génération « blackblanc-beur », est aisé.

Selon Eric Macé, le miroir télévisuel dans lequel se ref lète la société française est déformant (il avance notamment le peu de représentation des « minorités », à commencer par les maghrébins, quasiment absent de son corpus). Radio libre est un miroir plus fidèle de la jeune génération.

Face au racisme, les animateurs se complètent toujours pour faire tinter le diapason de la couleur donnée à l'antenne en la matière en exaltant avec simplicité une beauté du métissage culturel :

Difool : Bah oui, c'est ma foi bien triste tout ça, parce que quand on s'aime... au contraire, c'est plutôt rigolo de découvrir quelqu'un qui n'a pas la même culture, c'est quand même plue intéressant.

Romano : Ouais, c'est bien, ça ouvre.

Difool : Moi je trouve ça marrant, t'as le gars qui fait le ramadan, ou la meuf qui fait le ramadan, et l'autre partie du couple qui vit sa vie, enfin c'est plutôt rigolo... (Racisme, sujet 2, interventions 133 à 135).

« C'est rigolo ", « ça ouvre "... autant d'expression plus ou moins désuètes qui contribuent au processus de normalisation des diversités. La simplicité du discours est ici à considérer comme élément de normalisation, au sens de faire comprendre une chose comme spontanée, évidente. Naturelle, en somme.

En alternative à la tristesse de la réaction des parents kabyles d'une auditrice dont le copain est Antillais Difool apporte une conception positive selon la vision « multicolore » du discours de la skysolidarité telle que nous l'avons appréhendée plus haut : « ça va faire un beau bébé, enfin, si vous en faites un un jour " (racisme, sujet 3, intervention 119)

Ainsi, dans le discours de la skysolidarité, si les parents n'ont pas tiré les mêmes conclusions que celles défendues à l'antenne que nous venons d'exposer, les enfants peuvent s'en affranchir, voire faire réviser les points de vue de leurs parents. Comme l'explique Difool, qui a des origines italiennes, à un auditeur dont les parents n'acceptent pas le copain d'origine maghrébine : « c'est terrible, parce que eux qui sont Italiens, ils devraient se souvenir qu'il y a, je sais pas, 80 ans, les Italiens, ils étaient... enfin, il y avait des réactions qui étaient particulièrement racistes envers eux aussi, qu'ils ont subi aussi, quand ils sont arrivés en France. Nos grands parents, tout ça, et maintenant, ils font la même chose 80 ans après à d'autres gars, ça c'est... ça m'a toujours fait halluciner, ça. Tu devrais leur expliquer à tes parents, parce qu'ils ont du vivre ça » (racisme, sujet 2, intervention 62).

Et la direction des discriminations traitées dans les sujets de notre corpus n'est pas stigmatisée, généralisant ainsi le comportement intolérant en opposition à celui, multiculturel et multicolore défendu par le discours développé à l'antenne, appuyant même parfois cette vision comme l'identité de la France :

- s'agissant du racisme : Difool : « Ah, ça marche dans tous les sens, le racisme, c'est tellement international » (racisme, sujet 3, intervention 115), Difool : « Ca marche aussi dans le sens inverse, il y a une nana qui dit `'je suis rebeu, moi c'est le même problème, ils veulent pas que je sorte avec des Français''. Enfin, t'es Français sans doute toi aussi, mais... » Romano : « Ouais, ça marche dans tous les sens, malheureusement » (racisme, sujet 2, interventions 130 et 131) ;

- s'agissant de l'homophobie : Difool : « C'est le même problème aussi pour les nans, hein. Je lisais le message de Méli tout à l'heure, là, j'ai le message de Sonia qui a le même souci, qui dit `'si j'en parle à mes soeurs, c'est l'horreur, alors ne même pas penser aux parents'' » (homophobie, sujet 2, intervention 263).

- et lorsqu'il s'agit, pour les deux derniers sujets, de ref us de parents de laisser un libre choix d'union à leurs enfants, préférant une personne choisie par leurs soins « au bled », on explique que ce n'est pas une

intolérance pour une religion, puisque les amoureux en question sont de la même confession (c'est, par ailleurs pour ce motif que nous avons appelé cette troisième catégorie intolérance du fait de la religion/tradition, ne s'agissant pas d'intolérance entre religion ou de fondamentalisme, mais plus un ancrage archaïque qui s'inscrit dans une certaine tradition culturelle religieuse).

Contre la généralisation de ce qui est étranger, le discours est d'opposer une France riche de toute ces diversités à ceux qui y sont réfractaires.

L'homosexualité n'est « pas un problème " (homophobie, sujet 2, intervention 4), ni une maladie :

Romano : Ouais, au final, c'est pas grave, tu vois, t'es pas malade, t'as rien, quoi...

Difool : Bah oui, et puis l'essentiel pour eux c'est que tu sois heureux, si t'es heureux avec un gars, bon...

Marie : Bien sûr !

Difool : Autant que tu sois heureux avec un gars que malheureux avec une fille (homophobie, sujet 1, interventions 120 à 123).

On a d'ailleurs pu constater plus haut que l'on pouvait souvent entendre que ce n'était pas une question de choix.

Dans les messages des auditeurs, on retiendra que Difool lit de nombreux messages une nouvelle fois en direction de la liberté individuelle et de l'indifférence comme « j'ai deux super potes homo, et les parents s'en foutent, chacun sa sexualité, les barrières, c'est n'importe quoi, au contraire " (homophobie, sujet 3, intervention 153) , « tant quil est heureux " (homophobie, sujet 1, intervention 206), mais synthétise avec pudeur celui d'un auditeur plus « québlo " en le rapportant indirectement d'une façon que l'on peut imaginer édulcorée : « il aurait du mal à accepter ".

Si les auditeurs victimes de l'homophobie de leurs parents ont une identité où leur homosexualité « ne se voit pas ", lorsque Difool parle des « caricatures " que l'on « voit à la télé ", il n'oublie pas non plus de se reprendre et de préciser

que « les gens font ce qu'ils veulent » (homophobie, sujet 2, intervention 201), et échappe au dérapage en évitant, une nouvelle fois, tout jugement sur un comportement personnel.

Dans le sujet 3 homophobie, où l'auditeur est l'agresseur d'un transsexuel, on condamne très vivement et unanimement son geste -une gifle- mais Romano précise par ailleurs, qu' « aujourd'hui, c'est une femme » (intervention 129).

Enfin, devant l'extrême rigueur des parents d'Isis envers les traditions, si le discours vise à condamner ce type de comportement pour plus d'ouverture d'esprit, il ne s'agit pas non plus, pour Difool en l'occurrence, de juger les parents : Difool : « Bah oui. Et puis même chacun vit comme il veut, si eux ils ont en vie de vivre comme ça et de laisser le choix de la personne avec qui tu vas vivre toute ta vie aux parents, pourquoi pas, mais si toi t'as pas en vie de le vivre comme ça, je veux dire, t'as 20 ans, t'es majeur, tu vois. On est dans un pays... chacun peut vivre sa sexualité... » (religion/tradition, sujet 1, intervention 139)

Si l'on condamne des attitudes extrêmes, racistes ou homophobes, émanant particulièrement des parents dans notre corpus, cela n'empêche pas de respecter toutes les individualités. Chacun est libre de la manière dont il mène sa vie, et cela quelle qu'elle soit. Le principe est de la respecter. Et puis des parents restent des parents, la divergence n'est synonyme ni de condamnation rédhibitoire -comme nous l'avons vu- ni de désamour à leur égard, bien au contraire.

De la part des auditeurs : « Comme je t'ai dit, il faut que tu te dises que c'est ton daron et que de toute manière, respecte-le, même si lui t'a manqué de respect ce jour-là, mais... » (racisme, sujet 1, intervention 284), « il faut que tu te dises que c'est ton daron, et puis fais pas ce que j'ai fait. Moi j'ai voulu prendre le dessus sur lui et puis au final... » (racisme, sujet 1, intervention 286).

De la part des animateurs : « Ouais, enfin, il pourra jamais t'offrir [l'amour] que t'offre ta mère, mais... » (racisme, sujet 3, intervention 52), « il y a Raph, du Puyde-Dôme, qui dit `'moi si je dis à ma mère que je suis homo, je suis mort, elle me jette de chez moi''. Ça j'arrive pas à comprendre parce que ça reste ton fils,

quoi " (homophobie, sujet 1, intervention 206), « Avec tout le respect qu'on doit aux parents, tout ça, moi je pense qu'il faut vivre sa vie en fonction de ses envies, tu vois, toi tu... Il va pas se forcer... " (homophobie, sujet 1, intervention 222), « Donc euh... et puis maintenant il y a plus le choix, donc tes parents, ils sont pas... tu vois, ils ont quand même un coeur, non ? ", « T'est leur fille, ils peuvent pas... ", « Ils peuvent pas te laisser dans la merde, comme ça " (religion/tradition, sujet 2, interventions successives de Difool, Romano et Marie 53, 54 et 56).

L'espace radiophonique comme acteur social

Même dans les cas les plus extrêmes -par exemple celui où à cause de l'intolérance de ses parents une jeune femme enceinte se retrouve à la rue dans le froid- au-delà du caractère non définitif de l'évolution de la relation avec les parents que nous avions défini plus haut, le lien social familial reste primordial dans le discours de la skysolidarité. Nous avions, par ailleurs, observé, en début d'analyse, que la famille était le premier recours proposé par l'équipe de Radio libre pour trouver de l'aide dans la phase d'évaluation du problème et de la situation de l'auditeur. Le père, la mère, un grand frère ou une grande soeur... si le problème vient souvent de l'intolérance de la famille ou d'un de ses membres, d'une part rien n'est définitivement figé, la situation peut évoluer, comme nous l'avons vu, mais d'autre part, un père, une mère, on ne peut pas ne pas les aimer, les respecter. Nous pourrions écrire que les liens filiaux apparaissent être considérés comme quasi-sacrés, si l'expression ne faisait pas référence à la chose religieuse, qui, elle, n'est pas une valeur primordiale dans le discours, loin s'en faut. Même fautive d'intolérance, de racisme ou d'homophobie, la famille, pour l'espace de discussion skysolidarité, c'est l'inverse de la France de Nicolas Sarkozy : en crise ou en désaccord profond, on peut la quitter un temps, mais on ne cesse de l'aimer.

Le lien interindividuel est le recours aux situations de crise et le credo de la skysolidarité, et la famille en est le premier pilier... après l'amour bien sûr qui est considéré comme le lieu d'épanouissement privilégié, choisi par l'individu. Ensuite viennent les amis, comme cercle de refuge, plus ouvert à l'acceptation des choix ou de l'identité.

Les institutions ont un rôle à jouer, bien sûr, et leur accès est médié par une plateforme d'interaction interindividuelle.

Je, ils -+ nous

Sur l'antenne, on partage les expériences. Il y a une communauté d'intérêts, d'esprit, bien sûr, mais plus encore un sentiment d'appartenance à un groupe. Pour rompre l'isolement, mais aussi pour faire profiter une communauté de son expérience. Une communauté choisie, des amis virtuels, sur les ondes, comme cette génération d'auditeurs en a tant d'autres sur des chats, des forums... La logique de ces jeunes gens est essentiellement centrée sur le « je », mais ce « je » entretien des relations sociales qu'il choisit par affinité. Sacre de l'individualisme, il ne s'agit plus de subir un entourage immédiat (comme on subissait naguère un mariage arrangé) mais de choisir ses amis, dans la vie réelle comme dans différentes communautés qu'ont organisées les modes de consommation des nouvelles technologies de la communication, particulièrement internet. Le blog, journal personnel publié sur internet en est une parfaite expression : centré sur soi, on partage ce que l'on choisit avec ceux avec qui on trouve un ou des point(s) commun(s) fédérateur(s). Une passion, une aventure, un bout d'histoire, l'internet a permis la gestion d'un lien social dont chacun est le maître de la pérennité. Les premiers blogs qui ont explosé en France sont ceux dérivés des sites internet de Skyrock. Essentiellement crées par des auditeurs, certains skyblogs sont aussi le résultat de tentatives de pénétration d'une large communauté jeune de la part de politiques notamment. Julien Dray, porte-parole du Parti socialiste et en charge des questions de la jeunesse au conseil régional d'Île-de-France a été le premier à flairer l'occasion d'y tenter le dialogue. Et s'il eût de nombreux messages peu confiants quand à la sincérité de son intrusion dans la sphère des skyblogs (nous reviendrons sur la question de la légitimité), d'autres suivront, bienveillants, lorsque, exposant l'horreur de ce qu'il a vu de la prison de sa circonscription, il interpelle : « Je me demande vraiment comment ça se fait que la prison ne fait plus peur à certains délinquants. Est-ce que vous auriez une explication ? »1. Et des blogueurs continuent chaque semaine à échanger avec le politicien.

1 Skyblog de Julien Dray : http:iiledefrance.skyblog.com/8.html

La radio, anonyme elle aussi, où l'on dévoile ce que l'on souhaite, avec en l'occurrence entre autres promesses de l'émission celle d'y trouver soutien en cas de crise, n'échappe pas, bien au contraire, à la captation par les jeunes de se saisir d'une communauté virtuelle. Le contenu de l'émission y est varié, diverses gaudrioles parsèment la plateforme d'échanges solidaires où l'on peut s'exprimer sans crainte de ses tracas, en préservant son identité, où l'on peut satisfaire ce besoin naturel d'être utile, d'aider (et peut-être aussi parfois de connaître son quart d'heure de gloire). Un lien social se crée entre des auditeurs de différents horizons, cultures et milieux sociaux, qui forment une communauté d'affinités, choisie (sans quoi le contrat de communication se rompt) et qui donne expression à des malaises, des joies, des coups de gueule. S'agissant de notre sujet, nous relèverons particulièrement l'intérêt du lien qui se crée dans l'espace radiophonique et son caractère de vecteur de socialisation : écoute, partage, soutien, aide.

Dans un monde réel rempli de tabous, de tensions, d'incompréhensions... ce n'est finalement pas un si gros paradoxe que viennent s'exprimer dans le moment adolescent de l'espace radiophonique et sous forme de confidences « sur l'oreiller » -pour reprendre les expressions de Glévarec- les malaises d'une génération, et peut-être particulièrement d'une partie sensible en porte-à-faux entre plusieurs cultures, en quête de repères pour se construire une identité.

Le caractère « multicolore » ne confère pas à cette communauté une dimension communautariste. Au contraire, on prône le mélange des cultures, une société multiethnique.

Le discours de la skysolidarité développe un cadre normatif des attitudes sociales dans un paysage multiculturel où coexistent des individualités exacerbées et très divisées. Les expressions de la crise du lien social que nous avons pu observer ne viennent pas moins de la difficulté de faire coexister un héritage avec une société contrastée, métissée à tout points de vue, que du choc des cultures, de la rencontre, parfois frontale, de différentes traditions.

Dans le pacte social proposé, le jeune adulte est présenté comme le citoyen de demain -voire d'aujourd'hui- qui doit participer à créer et à solidifier un lien social d'un nouveau type pour préserver un pacte républicain tiraillé par l'exacerbation de l'individualisme et les communautarismes. Il s'agira de renouer des liens entre des individus qui n'appartiennent plus à l'ancien grand idéal universaliste que fut l'idée de république uniforme, qui sont libres de leurs choix d'affiliation et désaffiliation, et pour qui le « je » prime sur le « nous ». Un équilibre à trouver entre la liberté de chacun et le respect mutuel, en évitant le communautarisme, excluant, opposant, source de tensions. « Un lien qui sache unir, sans trop serrer » pour François de Singly1.

La diversité, le mélange, la liberté et le respect apparaissent ainsi présentés comme des forces et la condition à la réalisation d'un équilibre. Un pacte social nouveau se constitue dans le discours radiophonique d'une communauté d'auditeurs échantillon de la jeune génération.

Mais quelle est alors la position, le statut de Radio libre et de ses animateurs ? L'émission de Difool est une émission commerciale diffusée sur une radio commerciale (par ailleurs avec un certain succès d'audience). Il n'en demeure pas moins que nos observations tendent à lui conférer une dimension supplémentai re.

Le « grand frère », repère légitime

Si Radio libre trouve son succès dans sa forme comme nous l'avons, en partie, décrite, le rôle qu'y jouent les animateurs, à développer le discours tel que nous l'avons observé, est singulier. Nous pouvons l'appréhender par la figure du « grand frère », à la fois au dessus et à l'intérieur du schéma social que nous avions dressé en partie préliminaire. Dans les cités notamment -c'est ici que notre observation trouvera tout son propos et sa pertinence- comme plus

1 François de Singly, Les uns avec les autres, quand l'individualisme crée du lien, Paris, Armand Colin, 2003, 268 pages.

largement dans le vocabulaire jeune (et par ailleurs repris avec un autre regard dans certains cabinets ministériels), le « grand frère » est une figure -et concrètement un individu- qui sert de repère. Il est celui à qui l'on reconnaît une légitimité pour être un guide bienveillant.

Mais si le grand frère peut être influant, c'est seulement au prix d'une légitimité acquise auprès des jeunes, des « petits frères ». Sa démarche peut-être pédagogique et connaître des effets seulement si son autorité est reconnue par ceux qui peuvent la recevoir. Son existence est naturelle (un grand frère biologique, un voisin fort d'une certaine réussite sociale qui montre l'exemple, écoute, comprend et éclaire) ou fabriquée, comme cela a été le cas dans certaines tentatives plus ou moins heureuses émanant du politique. La reconnaissance de sa légitimité est d'autant plus aisée que le grand frère est un pair, qui connaît et a connu les réalités d'un espace social similaire à celles de ses « petits frères ».

Les considérant plus proche de l'autorité administrative (politique, police...) que d'eux, les jeunes ne donnent pas aisément leur pleine confiance aux éducateurs que certains dispositifs ont voulu mettre en place. Le grand frère doit être un pair, exemplaire. Un pair avant tout, pour que lui soit conférée la légitimité de montrer la bonne voie.

Abel El Quandili, ancien champion de boxe, a connu la précarité des bidonvilles de Nanterre, et le relatif confort de la cité, sa vie quotidienne, sa précarité sociale. Champion, il n'a jamais quitté sa barre de béton en banlieue. Retraité sportif, il continue d'y animer un association dont le sport est plus un prétexte à la conception d'un espace de création et d'entretien d'un lien social qu'une fin en soi. Il a publié à une quarantaine d'année son expérience de « grand frère des banlieues » en 2005 chez Fayard1. Il a connu les mêmes « galères » que ses « petits frères » et le succès grâce au sport. Dans le quotidien de la vie associative culturelle, sociale et sportive qu'il fait vivre dans son quartier, il a créé

1 Abel El Quandili avec Hafid Hamdani, Le grand frère des banlieues, Paris, Fayard, 2005, 294 pages.

une communauté d'échanges aux valeurs de la république (liberté, égalité, fraternité) dont l'extrémisme religieux est à son sens le pire ennemi. Il a la légitimité d'être un pair dans son quartier, de connaître le même quotidien, et son exemplarité est magnifiée par son statut de champion du monde.

Avec une jeunesse tiraillée entre différentes cultures, en manque de repères, le lien social s'établit ainsi plus légitimement en dehors des institutions, de la famille, des représentations de l'Etat. Institutions avec lesquelles le lien s'effectue ensuite, par répercussion, autour des valeurs qui y ont été partagées.

L'initiative associative, à l'image de celle dont El Quandili narre l'expérience, s'avère ainsi une alternative pour recréer le lien entre jeunes et pouvoirs publics, entre jeunes et parents, par des rencontres, des débats, des animations sportives et culturelles.

Radio libre comme figure du grand frère

La communauté radiophonique sur laquelle nous avons porté notre regard participe du même processus. Dans une superposition au schéma que nous avions décrit en partie préliminaire, une figure de « grand frère » vient déterminer et affirmer les valeurs d'un espace de dialogue alternatif pour recoller aux valeurs de la république. Les entreprises associative et radiophonique ont pour trait commun leur positionnement et le projet de la construction de leur discours. Radio libre justifie de cette façon sa place dans le schéma social de la jeune génération qui est son public et trouve une légitimité renforcée par le choix dont elle a été l'objet.

On peut ainsi parler d'un caractère supplétif au sujet de la fonction sociale de Radio libre. Mais pas substitutif. Il ne s'agit pas de remplacer les parents, la famille, les amis ou l'assistante sociale mais de créer un espace social supplémentaire pour favoriser le lien social auquel contribuent ces acteurs, alternatif à l'impasse dans laquelle l'auditeur se voit être.

Parfois enfermé dans l'isolement consécutif de l'exacerbation de la liberté individuelle, il est possible pour les jeunes auditeurs -particulièrement en âge d'autonomisation- d'ouvrir une voie de dialogue dans une communauté multiculturelle mais qui affiche une identité commune par l'affirmation de certaines valeurs et à laquelle le positionnement supra-institutionnel et alternatif aux partenaires du modèle en crise confère une légitimité de connivence, d'autant plus propice au dialogue qu'elle préserve l'anonymat (on reste seul dans sa chambre à l'écoute comme à l'antenne) et ainsi respecte, encore une fois, la liberté individuelle.

Construction d'un nouvel idéal du lien social

Si l'on se réfère aux analyses de Georges Mead que nous avons avancées plus haut selon lesquelles la conversation est à mettre en relation avec un projet d'interaction sociale et qu'outre l'évidente et nécessaire coordination de la langue, l'identité est construite par et à travers l'interaction sociale, les valeurs que nous avons pu voir défendues dans le discours de Radio libre (liberté, tolérance, respect, dialogue...) déteignent logiquement sur les auditeurs qui l'écoutent. La question de degré d'influence qui se pose comme variable aléatoire à l'appréciation des effets de cette analyse trouve une réponse dans la notion de légitimité de l'interlocuteur que nous venons d'appliquer à notre étude. La légitimité semble ainsi plus facilement accordée par des jeunes gens en perte de repères à un tuteur choisi, la figure du grand frère, qu'à des institutions sociales en crise... d'autant plus que dans les sujets que nous avons analysés, ce sont souvent celles-ci qui sont à l'origine du mal-être des individus.

Dans Les uns avec les autres1, François de Singly déplore l'inefficacité des discours fatalistes sur la crise du lien social (repères, transmission, identités). Le retour à l'âge d'or de la République lui semble impossible du fait de la montée de

1 François de Singly, Les uns avec les autres, quand l'individualisme crée du lien, Paris, Armand Colin, 2003, 268 pages.

l'individualisme. Il veut, dans son ouvrage, proposer une autre voie que le communautarisme pour un « nouvel idéal du lien social ». Comme dans son analyse, nous avons vu que le discours de Radio libre veut éloigner ses propositions des regroupement par similitude d'identités (ethniques, religieuses, sexuelles...). Le communautarisme comme modèle ne permet pas d'envisager sereinement un nouvel idéal du lien social, notamment du fait de ses caractères excluant, opposant et privatif de la liberté individuelle d'affiliation et désaffiliation. Pour reprendre l'expression de Singly, « Narcisse ne peut pas se réaliser s'il vit comme Robinson ».

Les auditeurs de Radio libre sont empreints de cultures différentes, d'héritages sociaux, religieux, épars. Ils se retrouvent dans une communauté riche de l'accumulation de ces héritages au même titre qu'elle s'enrichit des expériences narrées à l'antenne dans un schéma global des itinéraires de jeunes vies en quête de liberté mais aussi en besoin de repères pour se forger une identité.

La liberté individuelle comme socle de la construction de l'identité ne peut affranchir cette dernière d'un lien social. Nous avons vu la nécessité de considérer la primauté des pleines libertés individuelles pour envisager un nouveau type de lien social, respectueux des choix de chacun. Face à la solitude dans laquelle peuvent se trouver des jeunes adultes tels que nous avons pu le voir lorsque la famille, par exemple, ne respecte pas ces libertés, un espace social de refuge s'avère à tout le moins apaisant s'il ne peut pas toujours être le lieux de l'élaboration d'un remède miracle. Le dialogue qui s'instaure dans l'espace radiophonique skysolidarité chaque soir sur Skyrock rappelle au respect des libertés de choix, d'identité et d'action de chacun. Les siennes mais aussi celles des autres, en prônant un certain idéal du métissage (culturel, ethnique...) Sur les sujets qui nous concernent ici, parmi les plus lourds de l'émission, le discours tend vers l'idée d'autonomisation des jeunes adultes majeurs dans le

cas où les grandes réticences de leurs parents, notamment à propos de leurs choix amoureux ou de leur identité sexuelle, freineraient leur épanouissement dans la construction de leur individualité. Du racisme à l'intolérance du fait de la religion/tradition, en passant par l'homophobie, il s'agit de défendre non seulement le droit de chacun de disposer de sa vie et de l'organiser librement, mais aussi, par extension, de défendre certaines valeurs. C'est-à-dire condamner les intolérances comme atteinte à la liberté individuelle et déplorer qu'elles privent leurs auteurs d'expériences profitables, prôner une société multicolore dans l'idée de la richesse des diversités, mais aussi ce faisant, reconsidérer le lien familial.

Le discours de la skysolidarité invite l'auditeur à modérer ses relations avec ses parents (à ne pas partager ce qui corromprait le lien qui les unit en se définissant un espace d'intimité aux frontières variables) ou à s'en affranchir en cas de crise lourde. Mais l'importance de ce lien est toujours réaffirmée : même en cas de choix de rupture, la famille reste un repère nécessaire à l'individu et le respect et l'amour doivent y demeurer.

Difool, l'animateur principal, est le maître du discours. A défendre les valeurs que nous avons rappelées, le discours se reproduit, les points de vue des grands frères sont prescripteurs. Si la discussion est une co-construction avec les auditeurs, ceux-ci sont sélectionnés, le standard faisant office de filtre. Comme nous l'avons vu, leurs propos sont parfois repris, corrigés, lorsqu'ils s'éloignent du discours général et dominant.

Formellement, le processus du discours développé dans la skysolidarité emprunte un itinéraire type : évaluation du problème, appel à la solidarité, partage des expériences, construction entre l'équipe de l'émission et les auditeurs d'un discours qui défend les valeurs de tolérance et de multiculturalisme et organise généralement un schéma d'épanouissement du jeune adulte sous forme de cercles représentants chacun un espace social en mouvement (famille, amis...) où l'individu cherche l'équilibre pour en être le centre de gravité (schéma 3 page suivante).

L'espace radiophonique y est superposé comme recours en cas de crise pour les auditeurs qui lui font appel. Sa fonction est d'aider ces derniers à rééquilibrer les espaces sociaux autour d'eux pour en rester le centre de gravité dont l'équilibre est la visée de l'épanouissement personnel.

Après l'analyse, nous nous devons de redessiner le schéma nous avions posé en hypothèse (voir schéma 1, page32).

SCHEMA 3 / Epanouissement de l'individu par la maximisation de ses rapports sociaux : l'auditeur-individu centre de gravité des espaces sociaux dans lesquels il évolue

collègues

S

individu

amis

amours

école

famille

L'auditeur-individu travaille l'ampleur et la qualité de ses relations interpersonnelles au sein des différentes sphères sociales dans lesquelles il évolue, au gré de ses attentes, de ses besoins, au fil d'un itinéraire vers son équilibre.

Comme les ondes se confrontent pour équilibrer le chaos produit par la chute de cailloux dans les eaux du lac. A cela près (et c'est déterminant) que ce serait l'origine qui maîtriserait la propagation.

Conclusion

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Bilan du parcours et de l'expérience de la recherche

Notre corpus, en s'affinant peu à peu, nous a conduit à retenir des sujets parmi les plus éprouvants pour ce que nous avons défini, en l'empruntant au vocabulaire de Radio libre, comme skysolidarité. Nous n'avons pas arrêté notre choix au seul traitement des sujets concernant le racisme, l'homophobie, ou la raideur traditionnelle-religieuse : le projet était d'interroger la skysolidarité ellemême, son fonctionnement à rude épreuve, non faire une étude de genre ou sur un thème de société ciblé. Face au racisme, à l'homophobie et aux intolérances qui touchent à l'identité des auditeurs comme jeunes adultes en construction ou à leurs choix de vie, comment s'organise l'entraide à la base du contrat de communication de l'émission, quelles valeurs gouvernent les conseils prodigués à l'antenne ?

Nous avons parcouru l'itinéraire de ces jeunes qui ont recours chaque soir à la solidarité proposée dans un espace radiophonique pour résoudre leurs problèmes. Comme une grande partie de la génération actuelle d'adolescents et de jeunes adultes, ces jeunes s'inscrivent dans différentes cultures, ont des origines sociales ou ethniques diverses, des religions différentes. En quête de liberté, ils subissent parfois les tensions issues de ce multiculturalisme, des communautarismes et celles que connaissent tous les adolescents avec leurs parents. La plupart du temps vivant sous leur toit, ils sont confrontés à leur regard et leur jugement alors qu'ils s'émancipent pour entrer dans l'âge adulte.

Pour y parvenir, ils ont besoin de repères, d'adultes à qui ils reconnaissent une véritable légitimité. Le rôle est devenu malaisé pour leurs parents qui parviennent difficilement à créer ce lien électif avec leur progéniture qui construit son identité propre, autonome, en obéissant à d'autres codes. En outre, dans les sujets que nous avons retenus, ce sont les parents eux même qui sont à l'origine du mal-être des auditeurs. C'est donc ailleurs, vers d'autres, qu'ils vont se tourner pour tenter de créer un lien social nécessaire à leur épanouissement. Naturellement vers de la famille, un frère, une soeur, ou des amis. Mais que se passe-t-il lorsque personne ne sait partager avec eux leurs identités qui peuvent paraître singulières ou leurs choix de vie qui ne correspond pas à l'idéal familial ?

Ils sont trois millions chaque soir à écouter Radio libre, à s'inscrire dans une communauté où l'on vient se confier pour essayer de trouver une solution à ses problèmes, dans un espace où s'est construite, en huit années, une légitimité propre à la confidence. Nous avons défini cette légitimité par la figure du grand frère, incarné par Difool. Un personnage reconnu comme un pair, qui parle le même langage, qui affiche partager des préoccupations communes.

Nous avons dessiné une architecture des grandes phases du processus de skysolidarité. Après l'exposé du problème, l'équipe de l'émission évalue la situation de l'auditeur. Le dialogue est-il encore possible, un proche peut-il l'aider, quelles alternatives peuvent, à ce moment, se proposer à lui ? Vient ensuite le temps du partage des expériences, au centre du dispositif de l'émission. Les animateurs -certains encore au lycée- expriment leurs points de vue sur la situation de l'auditeur et les réactions, les attitudes qu'ils ont eues s'ils l'ont connue. Les auditeurs aussi participent à cette construction : par SMS, par mails dont Difool lit une sélection, ou directement à l'antenne, par téléphone. On tente enf in une synthèse.

Cette grande structuration permet de faire apparaître une logique fonctionnelle mais l'analyse voulait que l'on s'intéresse aussi au contenu du discours, aux valeurs qui gouvernent la conversation qui s'établit dans l'émission. Si sur d'autres sujets, la position de l'équipe, suivie par l'ensemble de la communauté, peut être plus modérée, elle ne transige pas sur les questions d'intolérance. Le racisme et l'homophobie sont combattus, comme tout ce qui freinerait la liberté individuelle en portant atteinte à la construction de l'individu : son identité profonde, le choix de la personne qu'il aime.

S'il est une chose primordiale dans le processus de la skysolidarité, c'est la revendication d'un « total respect », promesse de l'émission érigée en slogan et définitivement installé en première ligne du contrat de communication. Il s'agit alors, pour les sujets que nous avons traités, de ne pas transiger sur le respect des identités de chacun ou de la liberté de ses choix amoureux.

Si la couleur de la peau du petit ami déplait aux parents, c'est à eux de changer, pas à l'auditeur. « En 2004 », l'homosexualité n'est plus depuis longtemps une marginalité ni un comportement déviant, même si cela peut encore « choquer » certains de ceux qui appartiennent à une autre génération, le dialogue est en premier lieu prôné pour résoudre tous les conflits. Le sérieux d'une relation peut donner raison à un argumentaire.

Mais en cas de frilosité aggravée des parents à certains sujets, rien n'oblige à partager avec eux certains points de sa vie privée s'il n'est pas possible d'espérer un équilibre nécessaire à l'épanouissement et la bonne pérennité du lien familial dont l'importance, si elle se place après les choix de l'individu, est sans cesse rappelée. Que ce soit en restant discret ou en prenant le large et en marquant une rupture pour s'émanciper seul ou en couple si la cellule familiale ne sait pas s'adapter au choix d'un enfant devenu jeune adulte, la distanciation est envisagée comme l'alternative à l'affrontement permanent et stérile, pour respecter un équilibre personnel. Il existe des moyens pour permettre de s'assumer en jeune majeur libre, pour lesquels certains auditeurs ont opté. Sans que le lien social familial ne soit jamais rompu de façon rédhibitoire.

On partage alors les expériences de chacun, et lorsque la situation est des plus précaire, comme ce fut le cas de cette jeune auditrice enceinte et à la rue par grand froid (dernier sujet du corpus, retranscriptions de la page 98 à la page 104), on étale des solutions très concrètes auxquelles les auditeurs seront partie prenante : un ambulancier à l'écoute de l'émission la conduira chez deux pétillantes colocataires qui l'hébergeront et l'assisteront dans ses démarches administratives pour lesquelles l'animatrice a élaboré un plan opérationnel.

Au-delà de l'entraide, le discours érige certaines valeurs : le dialogue, la condamnation de toute discrimination, la défense d'un lien social qui respecte la liberté de l'individu.

Le discours développé par la skysolidarité construit une norme dont le respect de chaque individualité est à la base. Nous avons défini comme apologie du

métissage culturel l'obstination à exalter la beauté de la cohabitation et du mélange des différences en opposition aux réactions de peur, voire d'hostilité.

Le moment radiophonique constitué par Radio libre peut se définir ainsi comme un espace social alternatif superposé à ceux de la vie « réelle » pour les suppléer un temps en tentant d'aider à renouer les liens qu'ils entretiennent avec un individu (jeune adulte auditeur) résolument placé au centre du schéma social et qui doit selon le discours de la skysolidarité commencer par s'assumer lui-même en ne laissant pas le racisme ou l'homophobie porter atteinte à sa liberté. L'animateur de l'émission jouit à cet effet de la légitimité de la reconnaissance d'un pair, d'un grand frère.

Skyrock est une radio commerciale qui a trouvé comme positionnement avantageux pour son émission Radio libre d'assumer une mission d'entraide et de solidarité autour des thèmes qui préoccupent la jeunesse ciblée. Ou la construction d'un vivre ensemble dans le respect des individualités pour ses auditeurs, entre eux, et avec le monde.

Comme j'avais pu penser que la recherche universitaire avec un pied en entreprise pouvait se conjuguer en apportant à l'une comme à l'autre, on peut, selon un certain regard, exprimer que Skyrock fait d'une mission de service public une réussite commerciale.

Bibliographie / Webographie

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Eléments et repères de références et d'ouverture

Radio et médias en général

Annick Cojean et Franck Eskenazi, FM, la folle histoire des radios libres, Paris, Grasset, 1986, 333 pages.

Jean-Noël Jeanneney, Une histoire des médias des origines à nos jours, Paris, Points Seuil, 2001, 393 pages.

Méthodologie

Laurence Bardin, L'analyse de contenu, Paris, Puf, 2003, 291 pages.

Patrick Charaudeau (directeur), Aspects du discours radiophonique, Paris, Didier Erudition, 1984, 162 pages.

Patrick Charaudeau, Langage et discours, éléments de sémiolinguistique, Paris, Hachette, 1983, 196 pages.

Patrick Charaudeau et Dominique Maingueneau (directeurs), Dictionnaire d'analyse du discours, Paris, Seuil, 2002, 661 pages.

Rodolphe Ghiglione, Situations potentiellement communicatives et contrats de communication effectifs, Verbum, Presses universitaires de Nancy, 1984. Algirdas-Julien Greimas et Joseph Courtés, Dictionnaire raisonné de la théorie du langage, Paris, Hachette, 1979, 454 pages.

Repères d'analyse

Christian Bachmann, Jacqueline Lindenfeld et Jacky Simonin, Langage et communications sociales, Paris, Hatier/Didier, 1993, 223 pages.

Christian Baylon, Sociolinguistique, société, langage et discours, Paris, Nathan Université, 1996, 304 pages.

Claire Blanche-Benveniste, Approche de la langue parlée en Français, Gap, Ophrys, 1997, 164 pages.

Françoise Gadet, Le Français populaire, Paris, Puf, coll. Que sais-je, 1997, 128 pages.

Guy Lochard et Henry Boyer, La communication médiatique, Paris, Mémo Seuil, 1998, 96 pages.

François de Singly, Les uns avec les autres, quand l'individualisme crée du lien, Paris, Armand Colin, 2003, 268 pages.

Travaux appliqués au sujet

Abel El Quandili et Hafid Hamdani, Le grand frère des banlieues, Paris, Fayard, 2005, 294 pages.

Hervé Glévarec, Libre antenne, la réception de la radio par les adolescents, Paris, Ina/Armand Colin, 2005, 301 pages.

Michel Meyer, Paroles d'auditeurs, Paris, Syrtes, 2003, 345 pages.

Autre référence bibliographique

Plaquette de presse de Skyrock, Skyrock expliquée à mes parents, 2003.

Sur internet

http://www.skyrock.com

http://www.tasante.com

http://www.yazata.com

http://iledefrance.skyblog.com/8.html http://www.bric-a-brac.org/radio/fiches/skyrock.php

Les auditeurs de Skyrock face à l'intolérance

 

es radios libres nées dans la fin des années 1970 naquirent, après la libéralisation du paysage audiovisuel, quelques unes des grandes radios musicales que nous connaissons aujourd'hui.

NRJ, Skyrock et Fun radio sont sans conteste celles qui ont su s'imposer en se construisant chacune une identité spécifique pour se partager la majeure partie du jeune public par des programmations musicales singulières et des émissions dont certaines ont marqué les esprits pour leur originalité ou leur provocation.

Dans ce paysage radiophonique, les émissions de libre antenne ont toujours tenu une place importante dans les grilles des stations. Celle présentée depuis huit années par Difool et diffusée chaque soir de 21 heures à minuit sur Skyrock est aujourd'hui la plus écoutée de France. Elle rassemble des adolescents et jeunes adultes essentiellement âgés de 15 à 25 ans autour d'un concept de partage des expériences pour répondre à l'antenne aux problèmes de certains auditeurs.

Les auditeurs de Skyrock, comme plus largement la génération actuelle d'adolescents et de jeunes adultes, s'inscrivent dans différentes cultures, origines sociales ou ethniques, religions... A l'image de notre société, ils ont un point commun, l'insatiable besoin de se sentir libre. Ils sont parfois dans l'étau que serrent les tensions issues du multiculturalisme et des communautarismes. La plupart du temps vivant sous le toit de leurs parents, ils sont confrontés à leur regard et leur jugement alors qu'ils quittent l'adolescence pour devenir des adultes.

Au croisement du brassage des cultures et de la phase d'émancipation et d'affirmation de l'identité du jeune adulte, ils se confrontent à de nombreuses préoccupations quotidiennes, et sont parfois touchés par le racisme, l'homophobie, par l'intolérance au sens large. L'étude consiste à traiter ces questions que les auditeurs viennent partager sur l'antenne de Radio libre d'après un corpus sélectionné sur la saison 2004/2005 de l'émission de Skyrock.

Mots-clés

Libre antenne Grand frère

Radio libre Banlieue

Skyrock Identité

Difool Solidarité

Radio libre Dialogue

Skysolidarité Lien social

Intolérance Vivre-ensemble

Racisme Amour(s)

Homophobie Famille

Individualisme Discours

Multiculturalisme Conversation

Communautarisme Langage

Quand le dialogue est difficile alors que le besoin de parler est grand, quand le lien social est corrompu alors que l'obsession de la liberté individuelle ne saurait s'affranchir du besoin des autres, Radio libre est un espace de dialogue alternatif où se construit un discours qui fait l'apologie de la tolérance et du métissage culturel en exaltant le lien social amoureux et celui de l'amitié, sans exclure la famille de l'épanouissement de l'individu même si elle s'oppose à ses choix ou à son identité.

Il s'agit ici de poser un regard sur le fonctionnement, les valeurs et la portée du discours développé par la « skysolidarité ».

Mathieu Sicard sous la direction de Jacques Gonnet

Université de Paris III - Sorbonne Nouvelle - UFR communication Mémoire de master 2 recherche, Guy Lochard Président de Jury, Juillet 2006






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"I don't believe we shall ever have a good money again before we take the thing out of the hand of governments. We can't take it violently, out of the hands of governments, all we can do is by some sly roundabout way introduce something that they can't stop ..."   Friedrich Hayek (1899-1992) en 1984