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La République tchèque : analyse de son "retour à l'Europe"

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par Audrey Arnoult
Université Lyon 2 - Master 2 en Sciences de l'Information et de la Communication 2007
  

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c) L'Europe : entité technocratique à laquelle il manque une dimension spirituelle

Pour V. Havel, l'Europe est une entité trop technocratique, « une machine moderne particulièrement sophistiquée »153(*) qui doit réfléchir à son essence et procéder à des réformes institutionnelles154(*). V. Havel entrevoit une Europe dans laquelle tous les pays membres seraient à égalité de façon à ce que les petits pays comme la République tchèque aient « la certitude de ne pas être écrasés par le vote des grands pays »155(*) ; une remarque intéressante qui rejoint la crainte de l'opinion publique tchèque d'être considérée comme des citoyens de seconde classe. Dans plusieurs écrits, il justifie l'entrée de la République tchèque dans l'UE en soulignant que ce pays peut fournir « un apport spirituel pour un meilleur avenir commun »156(*). Cet argument rappelle ce que nous avons dit concernant le complexe de la petite nation : le sentiment de fragilité qu'éprouvent les Tchèques les conduit sans cesse à trouver un sens à leur existence. Celle-ci étant dorénavant liée à l'Europe, ils doivent être en mesure de lui apporter quelque chose.

A plusieurs reprises, V. Havel a insisté sur le manque de « dimension spirituelle, morale ou émotionnelle »157(*) de l'Europe. Il donne la définition suivante de cette Europe spirituelle : elle « repose sur un sort partagé en commun, sur une histoire compliquée et vécue en commun, sur des valeurs communes à tous [...], espace d'une certaine volonté, d'un certain comportement et d'une certaine responsabilité. [...] Le point de départ, sinon le point le plus important de toutes nos médiations au crépuscule du soir devrait consister en un débat à propos de l'Europe en tant que monde de valeurs, de l'âme européenne »158(*). Il a conscience que la construction européenne est une tâche à la fois économique, administrative, technique... mais regrette que le sens spirituel de l'intégration soit occulté au profit des intérêts particuliers qui nous font perdre le sens de l'avenir. V. Havel précise que cette dimension « s'inscrit dans l'expérience d'un système totalitaire » : « Je crois qu'il est plus important - par rapport à la baisse des droits de douane sur l'importation des cerises - de ressentir cette joie de vivre en liberté que ceux qui ont toujours vécu en liberté ne perçoivent plus ». Cette dimension constitue l'originalité de la conception de l'Europe défendue par V. Havel et ne fait que refléter la tonalité de ses écrits dans lesquels il accorde une place importante à l'éthique, à la vérité et à la morale. C'est aussi un moyen de justifier l'intégration de la République tchèque dans l'UE puisque l'Europe centrale est liée par ses valeurs, son histoire et sa culture, à l'Europe. En rejoignant la civilisation européenne, les Tchèques ne choisissent pas d'adopter un système de valeurs qui leur plaît mais de poursuivre un chemin qui était le leur avant la division du monde en deux blocs.

Nous pouvons constater que le thème de l'identité nationale figure dans les discours de ces trois hommes politiques aux idéologies pourtant bien différentes. Certes la question de la préservation des intérêts nationaux est généralement une question qui s'impose à tout pays souhaitant rejoindre une entité supranationale cependant, elle se pose avec plus d'acuité dans les pays d'Europe centrale. V. Havel est plutôt optimiste puisqu'il considère que l'Europe ne menace pas l'identité nationale mais en est au contraire un facteur de préservation. V. pidla souligne la nécessité de préserver cette identité nationale tout en étant favorable à une Europe supranationale. V. Klaus défend des positions plus extrêmes et assimile l'UE à une entité supranationale, dangereuse pour la nation.

Dans cette première partie, nous avons retracé l'histoire de la constitution de la nation tchèque depuis le XIXème afin de comprendre les enjeux que représente l'intégration européenne pour le peuple tchèque. La nation tchèque est une nation culturelle qui s'est construite en opposition aux Allemands puis aux Slovaques, autour de la langue et du territoire. En rejoignant l'UE, les Tchèques vont à nouveau cohabiter avec ces deux communautés, ce qui n'est pas sans susciter des craintes. Il nous faut maintenant se tourner vers les discours de presse pour analyser la représentation que les médias proposent de la République tchèque à l'heure de son entrée dans l'UE. Les thématiques dominantes dans l'espace public tchèque se retrouvent-elles dans les discours de presse ?

DEUXIEME PARTIE : LA REPRESENTATION MEDIATIQUE DE LA REPUBLIQUE TCHEQUE EN 2004

La première partie de notre travail nous a permis de comprendre le processus de constitution de la nation tchèque et comment son identité avait évolué. Nous allons maintenant procéder à l'analyse des articles publiés dans la presse quotidienne française en 2004. Notre analyse se composera de trois parties. Dans un premier temps, nous nous intéresserons à la représentation de l'identité nationale tchèque dans les discours en utilisant la typologie proposée par A-M. Thiesse. Puis, nous étudierons la représentation de l'opinion publique construite par les quotidiens ainsi que celle des partis politiques tchèques. Nous terminerons par une analyse des discours ayant trait à la situation économique et sociale de la République tchèque, une thématique qui s'est révélée être dominante dans les quotidiens. Ces trois volets de notre analyse nous permettront de préciser la représentation de la République tchèque proposée par la presse quotidienne française, à un moment clé de son histoire.

Avant de débuter nos analyses, il importe de dire quelques mots de la couverture médiatique dont a fait l'objet l'entrée de la République tchèque dans l'UE. Si cet événement a bien retenu l'attention de tous les quotidiens, tous ne lui ont pas consacré un nombre d'articles similaire (cf. Annexe n°7 et 8). L'Humanité est celui qui s'intéresse le moins à cet événement puisque seuls deux articles sont publiés. Nous pouvons préciser qu'ils sont tous deux écrits par Paul Falzon, un journaliste qui travaille depuis Paris. Cette précision n'est pas anodine comme le révèlera l'analyse des discours. A l'inverse, Le Monde et La Croix sont les deux quotidiens qui se sont le plus mobilisés, proposant chacun dix articles, liés aussi bien à l'économie tchèque, qu'à l'environnement ou encore à la vie politique. En outre, nous avons remarqué que tous les articles de La Croix sont écrits par des correspondants ou des envoyés spéciaux, ce qui explique la précision des discours. Le Monde fait appel à un journaliste d'origine tchèque, un détail qui nous permettra de comprendre les thèmes choisis par le quotidien pour certains de ses articles. Libération publie neuf articles sur la République tchèque, tous écrits par des envoyés spéciaux ou des correspondants. Enfin, Le Figaro ne consacre que cinq articles à ce pays. Pour ce quotidien, nous ne disposons pas d'information concernant le statut des journalistes.

Ces différents éléments nous indiquent d'ores et déjà, l'intérêt que porte chaque quotidien à l'entrée de la République tchèque dans l'UE. Nos différentes analyses nous permettront de préciser la représentation que chacun propose de ce pays aux lecteurs français.

I. La représentation de l'identité nationale tchèque

L'objectif de cette partie est d'analyser la représentation de l'identité nationale tchèque proposée par les quotidiens, à partir de la typologie d'Anne-Marie Thiesse159(*) (cf. première partie). Cela consiste à repérer les composantes de l'identité nationale privilégiées dans les discours et le cas échéant comprendre celles qui sont occultées. Nous nous intéresserons également à la représentation de la République tchèque en terme de nation, autrement dit la République tchèque est-elle représentée comme une nation civique ou culturelle ? Nous répondrons à cette question à en repérant les champs lexicaux présents dans les discours. Enfin, nous prêterons attention à la place réservée à l'Allemagne par les journaux puisque le peuple allemand a constitué l'un des miroirs contre lequel s'est construite la nation tchèque.

* 153 SCOTTO, Marcel, « Les perspectives d'élargissement de l'UE, Václav Havel souhaite plus de `dimension morale' pour l'Europe » dans Le Monde, 10 mars 1994, p. 5

* 154 PLICHTA, Martin, « L'Union européenne revue et corrigée par Václav Havel », Le Monde, 10 mars 1999

* 155 « Václav Havel et la mission historique de l'UE », Europartenaires, janvier 2003, p. 3

* 156 Idem, p. 2

* 157 SCOTTO, [1994], p. 5

* 158 HAVEL, Václav, Essais politiques, Paris, Editions Calmann-Lévy, 1989, p. 67

* 159 Selon A-M. Thiesse les différentes composantes de l'identité nationale ou « check list identitaire » sont : les ancêtres fondateurs, les héros, l'histoire, la langue, les monuments, les lieux de mémoire, le folklore, la coutume et la gastronomie.

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