0. INTRODUCTION GENERALE
0.1. Choix et intérêt du sujet
Un coup d'oeil sur l'histoire de l'humanité nous montre
que la nature a été omniprésente dans toutes les phases de
l'évolution de l'espèce humaine. Ainsi, c'est le type de nature
ou environnement naturel qui justifie le type d'activité d'une
population de telle ou telle part. Les riverains sont pêcheurs par
exemple, les forestiers sont chasseurs, etc.
Cependant, cet aspect n'est jamais pris en compte par les
historiens comme étant une contrainte fondamentale pouvant
infléchir et parfois bouleverser le cours de l'histoire de
l'humanité. Sans doute, en partie, parce que l'espace était
considéré comme vaste, les terres arables étaient
extensibles, que les forêts pouvant être défrichées
sans s'épuiser, les ressources de la mer, du sol, de la forêt
paraissant inépuisables et la planète, même quand elle fut
reconnue comme finie (limitée dans l'espace), apparaissait encore
infinies à l'échelle de l'homme et ce dernier ne pouvait pas un
seul instant songer à l'entretient de l'environnement. Mais aujourd'hui,
l'on constate que l'idée d'un monde fini, avec des ressources non
renouvelables et épuisables est devenue comme une réalité
incontournable.
La domination de l'homme sur son environnement est devenue de
plus en plus grande. Mais celle-ci conduit, en même temps, l'homme
à l'excès dans son savoir faire. Ainsi nous constatons
aujourd'hui plusieurs défis à relever : l'érosion des
sols, les pollutions atmosphériques et aquatiques, l'extinction
d'espèces, le trou dans la couche d'ozone, l'effet de serre et les
modifications climatiques, l'épuisement de certaines ressources non
renouvelables, la disparition de certaines forêts, etc.
En fait, nous découvrons probablement pour la
première fois que l'activité humaine n'est pas seulement
génératrice de profits et de progrès pour l'espèce
humaine et de tout ce qui l'entoure, mais qu'elle peut avoir aussi une
incidence très
néfaste sur le milieu naturel et conduire en droite
ligne à des catastrophes inévitables. De ce qui
précède, il nous semble important de réfléchir
à nouveau frais sur le rapport qui existe entre l'homme et la nature
afin de voir dans quelle mesure il est possible d'harmoniser ce dernier.
D'où notre choix et notre intérêt pour ce sujet.
0.2. Problématique et
hypothèses
Il est plus que vrai, aujourd'hui, qu'aucune journée ne
passe sans qu'on ne parle de la crise de l'environnement. Les expressions
telles que l'érosion des sols, les pollutions atmosphériques et
aquatiques, l'extinction d'espèce, le trou dans l'ozone, l'effet de
serre et la modification climatique sont devenus des cantiques qui attristent
nos journées. Et elles constituent autant d'indices de l'existence d'une
crise environnementale. Si crise il y a de l'environnement, c'est
assurément au sens d'une perturbation qui défie les
possibilités de reconstitution des stocks naturels et de restauration
des équilibres naturels. Les interventions humaines qui sont de plus en
plus massives et de plus en plus concentrées dans le temps, sont
précisément celles qui menacent d'interrompre des cycles naturels
et de conduire à un seuil d'irréversibilité. Etant
donné que cette crise est due en majeure partie aux conséquences
de l'action de l'homme sur la nature et que ce sont les principes
éthiques qui nous dictent nos rapports avec nos semblables et avec la
nature, il y a lieu de se poser des questions telles que les suivantes:
l'éthique traditionnelle est- elle en mesure de donner une solution
à la crise environnementale ? Est-il nécessaire de repenser le
rapport homme-nature ? Comment comprendre l'action de l'homme sur la nature ?
L'homme est-il la mesure de toute chose comme le prétendent certains
penseurs? Peut-on promouvoir la nature au rang de sujet de considération
morale ?
L'expérience en éthique de l'environnement
montre que l'éthique traditionnelle n'est pas adaptée pour
résoudre la question de la crise environnementale. Ainsi, il est
nécessaire de redéfinir notre rapport à la nature. Bien
plus, étant donné que toute éthique est dans une certaine
mesure anthropocentrique, c'est-à-dire que c'est le bien de l'homme qui
est visé en dernière analyse, il nous semble illusoire de nous
imaginer une éthique exclusivement non
anthropocentrique. Donc, celle qui écarterait
complètement l'idée de l'homme mesure de toute chose.
0.3. Sources et méthode du travail
Pour élaborer ce présent travail, nous nous
sommes servis de l'anthologie de H.-S. AFEISSA qui porte le titre d'Ethique
de l'environnement. Nature, respect, valeur. Nous avons fait
aussi recours à certains ouvrages et articles pour avoir un peu plus de
lumière. Il nous faut aussi noter que l'apport de l'Internet a
été déterminant.
Ainsi, nous avons opté pour la méthode
herméneutique. Cette méthode nous a permis, à travers une
analyse critique des textes rassemblés par Afeissa, de comprendre le
rapport homme-nature qui est la base de la crise environnementale.
0.4. Délimitation du sujet
Étant donné que l'éthique de
l'environnement est un vaste domaine, qui ne peut pas être
épuisé par un travail modeste comme le nôtre, nous nous
limiterons à l'étude du rapport homme-nature, tel qu'il ressort
de l'anthologie de H.-S. AFEISSA.
0.5. Division du travail
Mises à part l'introduction générale et
la conclusion générale, notre travail sera articulé sur
trois chapitres.
Le premier chapitre traitera des
généralités sur la relation entre l'homme et la nature. Le
deuxième chapitre se proposera d'étudier le rapport homme-nature
tel qu'il ressort des attitudes de l'homme face à la crise de
l'environnement. L'appréciation critique sera l'objet du
troisième chapitre qui consistera à relever les mérites et
limites de l'ouvrage de notre auteur.
0.6. Notes biographiques
Hicham-Stéphane AFEISSA est professeur
agrégé de philosophie rattaché à l'académie
de Dijon. La phénoménologie husserlienne et l'éthique
environnementale anglo-américaine constituent ses deux principaux champs
de recherche.
Il est auteur de plusieurs articles sur Husserl, Heidegger,
Kant, Fichte, les néokantiens, Norton, Rolston, et a
réalisé diverses traductions des oeuvres de Husserl, Heidegger,
Francione, etc. Il a récemment publié une anthologie
commentée des textes fondateurs d'éthique environnementale parue
chez Vrin en 2007.
Membre titulaire du groupe de chercheurs en
phénoménologie Alter, il est aussi membre du comité de
rédaction de la revue Environmental ethics depuis 2008.
0.7. Difficultés rencontrées
Les difficultés rencontrées sont notamment
l'impossibilité de trouver d'autres ouvrages qui auraient pu nous
être autrement utiles, la difficulté de saisir l'essentiel de
certains textes, la difficulté de traduire certains textes
rencontrés en anglais sur internet.
CHAPITRE I : LES GENERALITES SUR LA RELATION ENTRE
L'HOMME
ET LA NATURE
1.0. Introduction
La relation de l'homme avec la nature ou avec son milieu
naturel, constitue « un sujet dont le traitement requiert des notions qui
impliquent les mythes, les traditions, les religions, les cultures, les
systèmes philosophiques et économiques »1 du fait
que toutes ces notions expliquent le comportement de l'homme face à son
milieu naturel, son environnement.
Malheureusement, l'histoire ne nous donne pas beaucoup
d'éléments sur cette relation par le simple fait que les
historiens étaient surtout préoccupés par les grands
événements, les personnages célèbres, les conflits,
les institutions sociétales, ou tout simplement la vie quotidienne des
citoyens. Ils avaient tendance à oublier que l'évolution des
sociétés ne se réalisait pas dans un environnement vide,
mais dans un contexte physique qui interférait constamment avec les
conditions économiques, sociales, culturelles, etc. Ils avaient
oublié, de plus, qu'il s'agissait là de contraintes très
fortes qui ont souvent influencé ou conditionné les formes du
peuplement humain, la nature des relations sociales et les styles de vie des
populations, les déplacements des populations. Que l'on se souvienne ici
des peuples nomades, de grands déplacements des populations lors de la
désertification du Sahara.
La philosophie trouve ici une place de choix dans le sens
où il est question de savoir la place de l'homme dans la nature. Dans ce
chapitre, il va être question de présenter des attitudes de
l'homme par rapport à la nature en privilégiant l'aspect
religieux et les conceptions de la nature à l'époque moderne.
Les manières dont les sociétés
conçoivent leur rapport à la nature sont, dans la plupart de cas,
de modèle d'origine religieuse. L'approche religieuse a
été suivie par la connaissance scientifique avec laquelle elle
coexiste. Nous présentons ici des éléments qui peuvent
être des repères dans la compréhension des rapports
1 G.-G. ARSENE , La relation homme-nature.
L'émergence de l'éthique de l'environnement, in.
URL/www.agro
campus-rennes.fr, p. 1.
homme-nature et surtout dans leur état actuel et qui
expliquent en grande partie la crise de l'environnement.
1.1. Selon les morales religieuses
1.1.1. Le bouddhisme
Le bouddhisme fait partie du système non orthodoxe de
l'hindouisme. « Il fut fondé par Bouddha Sâkyamuni il y a
2500 ans »2 . Il reprend certains éléments de
l'hindouisme tel que celui de l'unité Braman-atman, c'est-à-dire
l'unité entre l'homme et la nature, celui du Karma, de la
réincarnation, etc.
Il est parti de l'Inde jusqu'en Chine, au Tibet et au Japon.
Plusieurs traditions se sont développées au sein de cette
religion. Le bouddhisme enseigne que « la cause première du
malheur, de la souffrance, est le désir, surtout celui qui a comme objet
ce que l'on ne peut pas obtenir »3. Par voie de
conséquences, le bonheur vient du renoncement et de la restriction aux
besoins immédiats. Les hommes ne recherchent pas à obtenir la
grâce des dieux, mais ils cherchent par un continuel effort individuel
à accéder au monde des accomplis : au Nirvana, par le noble
octuple chemin et par l'observation du dharma (La loi Universelle).
Les écologistes bouddhistes affirment que la prise de
conscience de l'universalité de la souffrance produit l'empathie, la
compassion, pour toutes les formes de vie, en particulier pour toutes les
espèces sensibles. Ils interprètent le
Dhammapada4, injonction éthique de ne pas
faire le mal, mais de faire le bien, comme un principe moral prônant
l'allégement de la souffrance et promouvant la non-violence. Sur un
sujet de préoccupation pour l'ensemble de l'environnement, « les
écologistes bouddhistes étendent l'amour et la compassion
au-delà des personnes et des animaux en incluant les plantes et la terre
elle-même »5.
2 Ibid., p.7.
3 P. KOBA, Notes de cours des philosophies
orientales, Scolasticat Jean XXIII, inéd., 1998-1999, p.24.
4 D. SWEARER, Buddhism and ecology challenge and
promise (le bouddhisme et l'écologie: un défi et la
promesse), in « Earth ethics », n°1, 1998 at http :
//www.unites,
uqam.ca/Religiologiques.
5 Ibid.
La non agression cultivée par les bouddhistes, dans les
bouddhismes, surtout dans le bouddhisme Zen, fait de cette religion l'une des
plus compatibles avec le maintien de la nature. Tuer un animal ou couper un
arbre, par exemple, est un péché pour un bouddhiste. Car, «
les notions de karma et de la réincarnation intègrent le sens
existentiel d'une condition commune de toutes les formes de vie sensible
à la dimension morale de la cosmologie bouddhique. Toute forme de vie
sensible participe à un continuum karmique »6.
Bien que cette continuité constitue une
hiérarchie morale, les différences entre les formes de vie et les
individus sont relatives, et non pas absolu. Ainsi, le bouddhisme traditionnel
privilégie les humains au détriment des animaux, le sexe masculin
au détriment du sexe féminin, les moines au détriment des
laïcs. Même si la doctrine bouddhiste du karma et de la
réincarnation relie toutes les formes d'existence des êtres dans
un continuum moral, l'éthique bouddhiste se concentre sur l'homme et les
conséquences de ses activités. Le bouddhisme ne fait pas de
l'homme maître de la nature.
1.1.2. L'Hindouisme
« Pratiqué en Inde, en Indonésie et sur le
Bali, l'hindouisme a comme dogme le fait que tout ce qui nous environne est une
manifestation du Vishnu, et a donc une nature divine »7. Il est
aussi, comme le bouddhisme, l'une des grandes religions de l'Orient et englobe
tous les systèmes orthodoxes, c'est-à-dire les systèmes
qui restent fidèles à la tradition védique et
upanishadique.
L'évolution des âmes à travers les
réincarnations successives est gouvernée par la loi des causes et
des effets : le Karma. Ainsi, la nature doit être respectée parce
qu'elle incarne dans ses composantes les manifestations de la divinité
et des esprits à différents stades d'évolution
spirituelle.
6 Ibid.
7 G.-G. ARSENE, Op.Cit., p. 6.
Il faut noter que les hindous ont toujours été
proches de la nature, vénérant rivières, montagnes et
forêts et considérant la terre comme une déesse
mère. D'après la philosophie hindoue, l'univers et tout ce qu'il
contient est conscient. En brillant, le soleil, la lune et les étoiles
nous transmettent leur conscience et des êtres invisibles remplissent
l'espace entre eux et nous. Tous ces êtres existent sous la forme de l'
« Homme Cosmique ». La cosmologie védique divise «
l'espace dans l'univers en quatorze couches constituées par des
systèmes planétaires : depuis les planètes Patala
qui constituent la plante des pieds jusqu'aux planètes paradisiaques qui
s'appellent Satyaloka et qui constituent les têtes au nombre de
mille »8 . Un ancien hymne védique, le
Pourousha-soukta, décrit la forme de cet « Homme Cosmique
» et nous raconte que tout ce qui existe dans le monde fait partie de
cette forme universelle. On dit aussi que les océans constituent la
taille de Vishnou, alors que les collines et montagnes sont ses os ; les nuages
sont ses cheveux, l'air sa respiration, les rivières ses veines et les
arbres les poils de son corps. Le soleil et la lune sont ses yeux et le passage
du jour à la nuit se fait quand il bat ses paupières.
L'Iça Oupanishad maintient que Dieu
réside en tout ce qui existe ; c'est ainsi que la création
entière est sacrée. Ce sens du sacré est la base de la
relation que l'hindouisme a avec la Nature. Planter des arbres, creuser des
puits et construire des réservoirs d'eau, particulièrement sur
les lieux de pèlerinages, sont traditionnellement
considérés comme des actes méritoires.
Dans l'ancienne tradition hindoue, la beauté de la
Nature toute entière est appelée vana vaïbhav
9, mot Sanskrit qui veut dire, littéralement,
«splendeur des forêts ». Cette valorisation traditionnelle des
arbres implique une relation écologique subtile et étroite entre
les communautés humaines d'autrefois et l'ensemble de la faune et de la
flore. A la base de cette relation se trouve la croyance que plantes et animaux
ont le droit de vivre et que la société humaine qui dépend
d'eux pour sa survie et sa prospérité doit donc les
protéger. En outre, la forêt est un lieu où règnent
la paix et l'harmonie nécessaires aux aspirations
8 E. TAYLOR, L 'indouisme, in http//
wikipédia.org
9 Ibid.
spirituelles de l'homme. C'est presque à une relation de
partenariat que l'hindouisme invite l'homme.
1.1.3. Le mazdéisme
Cette grande religion s'était développée
sur le territoire d'Iran. Cette religion est née de la réforme
proposée par Zoroastre. « Le Mazdéisme est un dualisme qui
distingue d'une part Ahura-Mazda, un dieu qui est responsable de tout ce qui
est bon dans l'univers et d'autres part un dieu mauvais qui est responsable du
mal dans l'univers : Angra Mainyu »10. Le Zend avesta,
commentaires de l'avesta qui est le livre sacré, proclame l'amour pour
la bonne nature créée par le dieu Ahura- mazda. Le
mazdéisme enseigne qu'« il existe une nature mauvaise, nuisible,
représentée principalement par les animaux prédateurs.
Ainsi, combattre cette dernière et multiplier les troupeaux,
détruire les forêts est alors justifié »11.
Cette attitude explique la diabolisation de la nature sauvage par certains
peuples en considérant la nature sauvage comme siège du mal.
1.1.4. Le sinisme, le taoïsme, le confucianisme
En Chine, il s'y était développé trois
grandes religions et philosophies qui sont le sinisme, le taoïsme et le
confucianisme.
Le sinisme est la religion que la Chine avait dans la haute
antiquité. Elle fut la base même de toutes les autres formes de
pensée et de religion qui se sont développées
ultérieurement en Chine. Elle était une religion naturelle,
c'est-à-dire que la nature y jouait un très grand rôle,
celui d'intermédiaire entre les dieux et les hommes. Cette religion
prêchait l'existence d'un ordre naturel et d' « une harmonie dans la
nature qu'il ne faut pas déranger au risque du pire » 12 . Tous les
adeptes de cette religion croyaient qu'au fond du désordre qui
apparaît dans la nature, existe des liens entre les
éléments dans la nature au point que la
10 P. KOBA, Op.cit., p.63.
11 G.-G. ARSENE, Op.cit., p.9.
12 P. KOBA, Op.Cit., p.54.
perturbation d'un élément peut provoquer le
déséquilibre de tout le système. Bref, c'est la
complexité des liens entre les éléments de la nature qui
laissent transparaître du désordre dans la nature.
Le taoïsme, religion dominante en Chine à
côté du confucianisme, a été fondée par
Lao-Tseu. Elle prône l'existence du Tao tout puissant, universel, au-
delà du pouvoir de compréhension de l'homme.
Dans le taoïsme, l'homme ne doit pas manifester la
prétention à la domination de la nature, mais au contraire doit
s'insérer dans l'ordre universel et chercher l'équilibre dans la
nature.
Le confucianisme considère, de son côté,
l'homme comme produit de la nature. La philosophie confucéenne est
« une collection de conseils pragmatiques à caractère
conservatoire, élaborés en tenant compte de la triade
ciel-nature-hommes »13. Confucius avait le souci d'organiser le
monde des hommes de façon qu'il s'harmonise avec le cosmos.
Dominée tantôt par le taoïsme, tantôt par le
confucianisme, la civilisation traditionnelle chinoise a réalisé
un certain succès dans le maintien d'un cadre naturel moins
dégradé. Bref, l'éthique confucéenne dans sa forme
la plus complète s'appuie sur un contexte cosmologique de l'ensemble de
la triade ciel, terre et homme. En fait, la morale véhiculée par
ces trois religions traduit un rapport qui permet le respect de la nature.
1.1.5. L'animisme
Dans son ouvrage majeur La civilisation primitive,
Taylor définit l'animisme comme « la croyance en des entités
spirituelles supérieures, autonomes, immortelles et dotées d'une
grande puissance. Celles-ci sont rattachées à chaque enveloppe
corporelle et ont le pouvoir de mener une vie propre »14. Pour
Taylor, les raisons qui mènent les hommes à cette croyance sont
tirées de diverses expériences, comme le rêve et la transe.
Les peuples dits primitifs, à travers le
13 G.-G. ARSENE, Op.cit, p.8.
14 E. TAYLOR, L'animisme, in http\\
wikipedia /animisme.
rêve et la transe, sont confrontés à des
images ou visions qui leur prouvent que, à la faveur de certains
événements, leurs âmes peuvent quitter leurs corps et
voyager selon leur gré. De même, « au moment de la mort,
l'âme quitterait définitivement le corps mais continuerait
à vivre ailleurs. La preuve de ce phénomène se trouve dans
le fait que les personnes mortes peuvent continuer d'apparaître en
rêve aux vivants »15 . Selon les descriptions de TAYLOR,
l'âme est assimilée, par les peuplades qu'il avait
observées, à une sorte de fantôme, prenant l'apparence de
vapeur ou d'ombres. On lui attribue la possibilité de migrer d'une
personne à une autre, mais aussi d'un être mort vers un vivant.
Par extension, il est entendu que le principe de l'âme n'est pas
seulement propre à l'humain, mais se retrouve dans toutes les
composantes de la nature, les végétaux, les animaux et même
les objets inanimés. Une âme peut, par conséquent, migrer
et se transmettre indifféremment vers chacune de ces entités quel
que soit son type. Dans l'animisme « il n'y a pas de différence
entre l'âme et l'esprit »16 . Les
propriétés et le comportement de l'homme sont attribués
aux composantes non humaines de l'environnement. Comme toute chose a un esprit,
le monde est aussi habité par les esprits des ancêtres et la vie
des hommes ne doit pas être en antagonisme avec les choses de la nature.
L'idée de l'harmonie avec l'environnement s'en dégage. La
transgression des lois naturelles, le non respect des esprits attire le
malheur. Disons avec Edward TAYLOR qu'« écologiquement et sur le
plan environnemental, cette attitude est correcte, à la nuance
près que ses fondements ne sont pas scientifiques »17 .
L'animisme a été longuement répandu en protohistoire et
préhistoire.
1.1.6. Le judaïsme.
Cette religion avait commencée avec la vocation
d'Abraham comme nous le relate le livre de Genèse. Historiquement, c'est
le premier de trois grands monothéismes que sont le Judaïsme, le
Christianisme et l'Islam. Le Dieu unique conclut une alliance avec le peuple
d'Israël dans laquelle Dieu leur promet une
15 Ibid.
16 G.-G. ARSENE, Op.cit, p. 6.
17 Ibid., p. 6.
terre, une grande progéniture en échange de
l'obéissance à sa loi. Dieu fait connaître au peuple ses
dix commandements à travers Moïse.
Le récit de la création dans la Bible (Gn 1)
présente l'homme au-dessus des animaux. Il est le couronnement de la
création, mais il a le devoir de ne pas en abuser. La conception de la
domination de l'homme sur la nature est commune à toutes les
civilisations judéo-chrétiennes. Les textes sacrés et
l'enseignement de la Torah laissent un interstice par où les valeurs de
la vie traditionnelles ont laissé la place aux valeurs de la
modernité, avec leur cortège de modifications négatives.
« La critique du judéo-christianisme est l'un des premiers sursauts
ayant conduit à l'apparition de l'éthique de l'environnement
»18, nous dit G.-G. Arsene.
1.1.7. Le Christianisme.
C'est une religion qui est née de l'enseignement du
Christ. A la différence du judaïsme qui prône la croyance en
un Dieu unique, le christianisme prône la croyance en un Dieu Un et
Trine. Le rapport du chrétien avec la nature est défini par ce
passage du livre de la Genèse, le premier chapitre au 29
ème verset : « (...) soyez prolifiques, multipliez-vous,
remplissez la terre et soumettez-la ; soyez les maîtres des poissons des
mers, des oiseaux du ciel et de toute créature sur la surface de la
terre ». On voit bien que la position de l'homme pour le chrétien y
ressort sans ambiguïté ; l'homme est le maître de toute la
création.
La position du maître entraîne des
responsabilités. L'homme doit donc jouir du fruit de la terre mais en se
comportant en sage gestionnaire de celle-ci. Selon G.- G. Arsene, « les
techniques modernes de manipulation du vivant seraient, par ses implications,
une preuve d'arrogance de l'homme qui veut prendre la place de son
Créateur »19.
1.1.8. L'Islam
L'Islam est une religion qui a été fondée
par Mohamed. Elle vient en troisième position après le
judaïsme et le Christianisme. C'est une religion à cheval entre le
judaïsme, et le Christianisme, c'est-à-dire qu'elle contient un peu
du christianisme et un peu du judaïsme.
Dans cette religion la position de l'homme est clairement
soulignée : « l'homme est même au dessus des anges, il est le
représentant d'Allah sur terre »20 . Dans le Coran, il
est toutefois évident que Dieu est le détenteur ultime de la
domination sur la création (par exemple, la sourate 2:107, 5:120), et
tout retourne à Lui (sourate 24:42). Il y a dans le Coran, les
enseignements et l'exemple du prophète Mahomet conservés dans une
forme littéraire connue sous le nom de Hadith, beaucoup
d'éléments avec lesquels on peut construire une éthique de
l'environnement qui laisse une large possibilité aux solutions
créatives et innovatrices dans le contexte contemporain. L'Islam
enjoigne chaque fidèle et adepte à se diriger vers plus de
science ainsi qu'à profiter pleinement des ressources de la terre qui
sont placées au service de l'homme. Dans ce contexte, le progrès
et les révolutions technologiques sont encouragés et admis si
cela se fait dans le cadre d'une utilisation fonctionnelle, responsable et
consciente des conséquences sur l'environnement selon les doctrines
enseignées. Ainsi, ne pas jeter les détritus par terre même
lorsque nous les considérons comme minimes (mégots, capuchons de
bouteille, bout de papier, chewing gum...), éviter autant que possible
le gaspillage, voire même surtout lors des ablutions et ne pas faire
souffrir les animaux et faire preuve de bonté envers eux ainsi que
planter autant que faire ce peut des arbres sont des comportements
valorisés. Le coran recommande à ce propos que « si la fin
du monde venait à survenir alors que l'un d'entre vous tenait dans sa
main une plante, alors s'il peut la planter avant la fin du monde, qu'il le
fasse ! »21.
20 Ibid., p12.
21 D. SWEARER, Op. Cit.
Mahomet disait : « Chaque musulman qui plante un arbre,
alors tout ce qui en sera mangé sera compté pour ce musulman
comme acte de charité. Tout ce qui en sera volé sera
compté pour lui comme acte de charité. Tout ce qu'un animal en
mangera sera compté comme acte de charité. »22
Dans la conception islamique, l'environnement représente une
entité vivante où la terre ne se réduit pas à une
simple planète que les êtres foulent et dont ils disposent
à leur guise. Les montagnes ne sont guère des blocs
inanimés mais dotées de vie et de sensibilité. Dieu dit
à ce propos : « Les sept cieux, la terre et tout ce qui s'y trouve
célèbrent ses louanges ; il n'y a rien qui ne
célèbre ses louanges, mais vous ne comprenez pas leurs louanges
»23.
1.2. Selon la conception moderne
Les temps modernes en philosophie étaient
marqués par une controverse entre les empiristes et les rationalistes.
Les premiers disaient qu'on ne peut connaître que grâce à
l'expérience sensible et les seconds soutiennaient la thèse selon
laquelle seule la raison peut nous aider à accéder à la
connaissance de quelque chose.
La découverte d'Isaac Newton concernant les lois de la
mécanique rationnelle qu'il expose dans sa célèbre
Philosophiae Naturalis Principia Mathematica,
l'invitation que Descartes adressait à toute l'humanité
d'être « maître et possesseur »24 de la
nature, la publication du Novum organum par Bacon sont là les
quelques idées et découvertes qui ont donné à la
modernité son impulsion. Cependant l'on peut se poser la question de
savoir quelle est l'importance de ces découvertes dans
l'évolution des rapports homme-nature dans le monde occidental.
Nous pouvons répondre à cette question en deux
volets :
22 Ibid.
23 M. YOUNES, Les repères islamiques pour
la protection de l'environnement, in « l'Islam aujourd'hui »
N°20 Revue périodique de l'Organisation Islamique pour
l'Éducation, les Sciences et la Culture (ISESCO), p.5.
24 R. DESCARTES, Discours de la
méthode, commentaires et notes par J.-M. BEYSSADE, coll. «
Livre de poche », Ed. de Brodard et Taupin, Paris, p. 163.
En premier lieu, les progrès de l'astronomie,
progrès dû au développement des appareils d'observation,
les découvertes qui vont de Copernic à Galilée, de Kepler
à Newton et Laplace, « sont synonymes d'un changement majeur en ce
qui concerne la position de l'homme dans le monde (le cosmos)
»25 . La terre qui était jadis considérée
comme le centre de l'univers ne l'est plus grâce à la
découverte de Nicolas Copernic qui formule la conception
héliocentrique de l'univers. Ainsi, « le paradigme
ptolémaïque qui était pris pour un dogme tombe finalement en
désuétude »26 . Il laisse ainsi entrevoir qu'il
pourrait en être pareil pour d'autres vérités tenues
jusqu'alors pour inattaquables.
En second lieu, les rationalistes tels que Descartes et
d'autres instaurèrent le primat de la raison. Descartes va plus loin
jusqu'à réduire l'homme à la res cogitans,
c'est-à-dire la chose pensante. L'homme se définit
désormais par sa capacité de penser et le reste n'est pas
important. Ainsi il invite l'homme à devenir maître et possesseur
de la nature. Bacon, de son côté, est « la première
figure de la philosophie postmédiévale en Grande-Bretagne. Il est
apparu comme le fondateur de la science moderne, sa modernité
résidant dans l'importance qu'il accorde à l'observation et
à l'expérience, dans la conception inductive nouvelle, dans
l'union étroite qu'il établit entre science et technique dans le
but d'assurer le règne de l'homme sur la nature »27.
Grâce à l'expérience, les empiristes se
rendent compte que le monde et tout ce qu'il contient ne sont plus qu'objet
d'étude dont les secrets n'attendent que d'être
dévoilés. Il en découle aussi que « l'univers, le
corps humain, le corps de l'animal et le reste de la nature sont des
mécanismes »28 dont il faut étudier le
fonctionnement, grâce à la méthode inductive, afin de les
maîtriser.
« Purser et al. montrent que ce changement dans la
perception du monde non humain a commencé pendant la renaissance, au
XVème siècle, lorsque les peintres italiens prennent
l'habitude de représentations géométrisées, et
placent
25G.-G. ARSENE, Op.cit, p.13.
26 Ibid., p.13.
27 J. RUSS (dir), Dictionnaire des philosophes,
2ème édition, Ed. Armand Colin, Paris, 2002, p.
46.
28 G.-G. ARSENE, Op.cit, p.13.
dans leurs peintures les éléments naturels en
conformité avec des règles d'une harmonie
géométrique »29.
Sur le plan économique, beaucoup d'économistes
pensent que les animaux, la terre, les mers, les fleuves, les plantes
cultivées sont des ressources de matières premières,
uniquement, et rien de plus.
Il nous faut aussi noter que le remplacement de
l'énergie musculaire par l'énergie mécanique :
résultat de la thermodynamique, le développement des techniques
d'expérimentation, le développement des laboratoires, ont accru
le pouvoir de manipulation des éléments de la nature à un
niveau jusque là jamais vu. L'utilisation des machines et des
énergies provenant de la combustion du charbon et du pétrole a
permis à l'homme de braver ce qui était considéré,
jadis, comme sacré dans la nature.
1.3. Conclusion
En conclusion, disons qu'il a été question dans
ce chapitre de présenter les éléments qui nous aiderons
comme repère dans la compréhension des rapports homme-nature dans
leur évolution et leur état actuel. Ces éléments
nous aiderons à comprendre aussi la crise environnementale qui frappe
notre planète aujourd'hui.
La plupart de religions primitives ont eu leur origine dans le
contact de l'homme archaïque avec la nature, dans la disproportion entre
son pouvoir et celui des éléments de la nature ; ce qui explique
l'adoration de grands arbres, de grandes montagnes, de grands cours d'eau, etc.
Cet homme primitif ayant découvert une réalité qui lui est
transcendante, il va naître en lui un sentiment de dépendance ; ce
qui explique aussi son attitude face à la nature. Les religions, les
croyances archaïques qui partent de la nature sont ainsi classées
sous le nom de naturisme. Ce sont des religions telles que l'animisme, le
totémisme, le chamanisme, etc.
Il est aussi important de savoir que les différences
entre les religions, que ce soit le monothéiste, le polythéiste
ou le panthéiste, se traduisent par leur représentation de la
nature. G.-G. Arsène distingue deux grands groupes de religions :
- d'une part les religions dites révélées
qui sont le judaïsme, le christianisme et l'islam qui prêchent la
domination de l'homme sur la nature et laissent la nature à la merci de
celui-ci.
- d'autre part les religions de l'Orient qui sont le
Bouddhisme, l'Hindouisme, le Taoïsme, etc. qui prêchent l'harmonie
dans la relation entre l'homme et la nature.
L'avènement de la modernité en Occident vient
marquer un autre tournant dans l'histoire des rapports homme-nature ; la raison
seule justifie les attitudes et les actions de l'homme. Ce qui conduira
à la crise de la religion.
La pensée analytique et méthodique
instaurée par Descartes, la mécanique de Newton, la vision
mécaniste de l'univers sont désormais les outils qui servent
à l'explication de l'univers. L'explosion de l'industrie donne naissance
à une vision de la nature conçue comme simple réserve des
matières premières.
CHAPITRE II : L'HOMME FACE A LA CRISE DE
L'ENVIRONNEMENT
2.0. Introduction
Après avoir parcouru le panorama des rapports entre
l'homme et la nature tels que décrits par les morales des grandes
religions du monde et, les changements qu'ont subi ces rapports avec
l'avènement de la modernité, passons, à présent, en
revue les différentes attitudes de l'homme face à la crise de
l'environnement. Il est à noter que certains penseurs font remonter les
causes de la crise environnementale actuelle à la révolution
industrielle du 17ème siècle et
18ème siècle. Cependant, d'autres la situent à
l'apparition de l'homo faber. Dans ce chapitre, nous analyserons trois
attitudes essentielles telles que développées à travers
les courants suivants de l'éthique de l'environnement :
l'anthropocentrisme, le biocentrisme et l'écocentrisme ainsi que le
pragmatisme environnemental.
2.1. L'anthropocentrisme
L'homme a un rôle central à l'intérieur de
la nature parce qu'il est fondamentalement différent du reste des
réalités naturelles. Il est non seulement une partie de la
nature, mais aussi l'unique être capable de saisir
l'intelligibilité de l'univers. C'est le principe même de
l'anthropocentrisme. L'homme joue un rôle central et déterminant
par rapport au reste de la nature. Ainsi, le Petit Robert,
définit l'anthropocentrisme comme étant une attitude qui fait de
l'homme la cause finale de toute chose.
Cette attitude était déjà présente
dans l'antiquité grecque chez les sophistes. Ils revendiquaient la
liberté de penser à leur guise. C'est dans cet ordre
d'idée que Protagoras, l'un de grands sophistes qui, cherchant à
défendre leur cause ( la recherche d'un subjectivisme et d'un
relativisme radical ) dira : « L'homme est la mesure de toute chose
». Il voulait simplement dire que la vérité dépend
désormais de celui qui la conçoit. Cela implique aussi un
relativisme moral. Ainsi, l'homme devient le centre de tout. L'homme est donc
la référence de toute chose.
32 H.-S. AFEISSA, Op. Cit., p.95.
Aristote poursuivra l'idée de Protagoras. A ce propos,
en parlant de la philosophie de l'homme selon Aristote, Afeissa écrit :
« L'homme nous est clairement présenté comme étant la
fin de la nature au sein d'un univers hiérarchisé où
chaque échelon ou chaque degré apparaît comme moyen d'un
degré supérieur, l'ensemble étant ordonné de
manière finale à l'homme, et à l'homme seul
»30 . Cette idée sera développée plus tard
par saint Thomas.
Au Moyen âge, cette pensée qui situe l'homme au
centre de la nature sera perpétuée par le christianisme. En
effet, le récit de la création dans le livre de la Genèse
(Gn1, 26-29) est clair sur ce point. Le monde créé en sept jours
le fut pour être au service de l'homme. Le récit de la
création établit l'homme maître de tout ce qui existe. Dans
ce récit, Dieu ordonne à l'homme de dominer sur les poissons de
la mer, les oiseaux du ciel, sur les bestiaux, sur toutes les bêtes
sauvages et toutes les bestioles qui rampent sur la terre et de parfaire
l'oeuvre de la création.
Dans le deuxième tome de sa Somme
théologique, saint Thomas soutient la même position
anthropocentrique à travers cette analogie : « Quand l'homme agit
de lui-même pour une fin, il connaît cette fin : mais quand il est
mis en action ou dirigé par autrui, comme lorsqu'il agit par ordre ou
sous une impulsion étrangère, il n'est pas nécessaire
qu'il connaisse la fin. C'est le cas des créatures sans raison
»31 . De ce qui précède, il y a lieu de
déduire qu'il n'y a pas de fin propre dans la nature. La fin de la
nature est définie par rapport à la fin de l'homme.
Lynn WHITE n'est-il pas convaincu que « le christianisme
est la religion la plus anthropocentrique que le monde ait connue
»32 . Historien de la pensée médiévale,
Lynn WHITE avait présenté en 1967 les pièces du dossier.
Quelles étaient alors ses principales observations et ses conclusions
?
White montrait que la victoire du christianisme sur le
paganisme a été la plus grande révolution psychique de
notre histoire culturelle. Nos façons quotidiennes d'agir envers
l'environnement ont leurs racines dans la théologie
judéo-chrétienne, et uniquement en elle.
Selon White, les traits distinctifs du
judéo-christianisme sont éloquents, si l'on pense à la
vision grecque d'un Aristote : « la Bible pense le monde en terme de
commencement ; l'homme y est à l'image de Dieu ; il reçoit de
Dieu le pouvoir de nommer les animaux et les plantes ; l'homme est
appelé à vivre dans la suivance (à la suite) du
Christ, ce second Adam, qui transcende lui aussi la nature par sa
résurrection »33. Bref, il n'y a pas de religion plus
anthropocentrique que le christianisme, notamment dans sa forme occidentale.
Deux traits corrélatifs en ressortent : un dualisme entre l'homme et la
nature, et une volonté, de la part de Dieu, que l'homme exerce sa
domination sur cette nature et l'exploite à ses propres fins.
D'où un rapport de domination.
L'anthropocentrisme sera finalement formalisé par Kant
aux temps modernes. Kant appelle personne morale « l'être humain en
tant qu'il est porteur de la loi morale et, par conséquent, digne de
respect. Comme telle, la personne a une valeur infinie et ne peut être
traitée comme moyen ou une chose, mais uniquement comme une fin en soi
»34. D'où la maxime suivante : « Agit toujours en
sorte que tu traites l'humanité aussi bien dans ta personne que dans la
personne de tout autre, toujours en même temps comme une fin et jamais
comme un moyen ». L'anthropocentrisme dans cette maxime est devenu la base
de la moralité d'un agir.
Toute action sera désormais jugée bonne ou
mauvaise selon qu'elle procure un bien ou un mal à l'homme. L'homme
étant le seul possesseur des valeurs morales, son action sur la nature
est moralement neutre parce que la nature n'est pas porteuse de la loi morale.
De ce fait, les composants non humains de la nature ne pourront se voir
reconnaître de valeur que par rapport aux intérêts des
êtres humains et aux buts que les humains s'assignent. Autrement dit,
l'homme et l'homme seul, définit un lieu de valeur intrinsèque au
sens où il vaut par lui-même, en vertu de ce qu'il est au titre de
fin en soi, tandis que tout le reste de la nature ne vaut que pour autant qu'il
sert comme moyen à telle ou telle fin de l'homme. C'est donc ici une
valeur instrumentale. Dans sa conclusion de la Critique de la
raison
33 D. MÜLLER, Le rapport des humains aux animaux dans la
perspective de l'éthique : Mise en situation sociale, in «
Théologiques », vol. 10, n° 1, 2002, pp. 90-9 1.
34 N. BARAQUIN et J. LAFFITTE, Dictionnaire des
philosophes, deuxième édition, Armand Colin, Paris, 2002, p.
170.
pratique, Kant affirme que « seul deux choses
remplissent son âme d'admiration et de vénération toujours
renouvelées et croissantes : le ciel étoilé au-dessus de
lui et la loi morale en lui. La première symbolise à ses yeux le
problème de la connaissance de l'univers physique et de la place que
nous y occupons. Elle diminue l'importance de l'homme en le considérant
comme une partie de l'univers physique. La seconde se réfère au
moi invisible, à la personnalité humaine et rehausse de
façon incommensurable sa valeur en tant qu'être intelligent et
responsable »35. De plus, Kant fonde son éthique sur la
volonté et la liberté. Les animaux qui en sont dépourvus,
selon lui, ne sont donc que des choses et non des personnes. Ainsi les hommes
peuvent les utiliser comme moyens.
Certes, la pensée anthropocentrique nous permet de nous
concevoir comme entité séparée des autres entités
de la nature, mais le concept n'est pas la réalité. Le corollaire
de la conception duale du monde, c'est-à-dire de sa chosification, est
donc le sentiment qu'il nous appartient. Puisque le monde est nôtre, il
revient à l'homme de tracer les limites de son action.
L'étrangeté de ce processus est son auto
inférence, puisque la chosification et le sentiment de possession vont
jusqu'à s'appliquer à l'homme lui-même. L'être humain
en arrive ainsi à se considérer comme une ressource. L'expression
« ressources humaines » est tout à fait explicite et
symptomatique. Or, une ressource est utilitaire, comptable et inutile
après usage... Le processus anthropocentrique dénie donc l'humain
en voulant magnifier l'homme.
Signalons aussi qu'aujourd'hui est née, dans le cadre
de l'anthropocentrisme, la théorie de la restauration de la nature.
Selon cette théorie, l'homme en tant que maître de la nature, a
l'obligation de réparer les dommages faits à la nature. C'est
dans ce cadre qu'est née la théorie de reboisement, par exemple,
pour lutter contre l'effet de serre, etc.
Après ce parcours, disons que cet oubli de la nature a
vicié la réflexion morale dans le passé. Il importe
désormais de la réfuter en élaborant une éthique de
la
35 Kant cité par E. BOURGOIS, La
bioéthique pour tous, coll. « un autre regard sur l'homme
», Edition du Sarment, France, 2001, p.97.
valeur intrinsèque des entités du monde naturel.
D'où l'importance des théories telles que le biocentrisme et
l'écocentrisme que nous analyserons dans le point qui suit.
2.2. Le biocentrisme et l'écocentrisme
2.2.1. Le biocentrisme
Le biocentrisme peut se définir comme étant
l'effort d'étendre la valeur morale à toute forme de vie. C'est
ainsi que E. Bourgois peut dire qu' « il existe un lien étroit de
dépendance qui relie l'homme à l'environnement qui l'entoure et,
par conséquent, nous ne pouvons nier que ses intérêts
soient étroitement liés à ceux du monde physique » 36
. Ainsi l'homme peut être réduit à un simple composant du
monde naturel, à une autre forme de vie sans plus d`importance moral que
les autres.
Pour comprendre cette attitude, deux notions méritent
d'être passées en revue. Celle du bien d'un d'être vivant et
celle de la valeur intrinsèque.
2.2.1.1. Le bien d'un être vivant.
Qu'est-ce que le bien d'un être vivant ? « Chaque
organe, chaque population d'individu, d'une même espèce, chaque
communauté de vie a un bien qui lui est propre et que les actions des
agents moraux peuvent intentionnellement favoriser ou compromettre
»37, nous dit Paul TAYLOR. On dit d'une entité qu'elle a
un bien qui lui est propre quand en l'absence d'une référence
à toute autre entité, elle peut profiter d'une situation ou subir
un préjudice. Ce qui est bon pour une entité est ce qui lui fait
du bien au sens où cela améliore ou préserve son existence
et son bien être. Ce qui est mauvais pour une entité est ce qui
est nuisible à son bien, à sa vie. Ainsi nous pouvons dire que
« le bien d'un organisme individuel non humain consiste dans le plein
développement de ses pouvoirs biologiques »38 . Il
consiste aussi dans le maintien de soi de générations en
générations. L'idée d'un être possédant un
36 Ibid., p.96.
37 H.-S. AFEISSA, Op. Cit., p. 114.
38 Ibid., p. 115.
bien qui lui est propre, telle que la conçoit Paul
TAYLOR, n'implique pas le fait que cet être ait des
intérêts, ou qu'il prenne intérêt à ce qui
affecte sa vie pour le meilleur ou pour le pire. Nous pouvons agir pour le bien
d'un être ou de façon contraire à ses intérêts
sans que ce dernier soit intéressé parce que nous le faisons pour
lui.
Ainsi, par exemple, les arbres sont dénués de
connaissance, de désir ou de sentiment. Et pourtant, il est
incontestable que les arbres peuvent tirer un bénéfice ou subir
un préjudice du fait de nos actions. De ce fait, nous pouvons les aider
ou les entraver dans la réalisation de leur bien.
Par conséquent, le concept du bien propre d'un
être n'est pas coextensif à la sensibilité ou la
capacité à éprouver de la douleur comme le
défendait William FRANKENA, pour qui la sensibilité d'une
créature constitue un fondement de la considérabilité
morale.
2.2.1.2. La valeur intrinsèque
Traditionnellement, il y avait la distinction entre les
personnes et les choses. D'un coté, les sujets humains qui sont des fins
en soi et doivent être traités comme tels, et de l'autre
coté, la catégorie des choses, de tout ce qui peut être
instrumentalisé. Cette catégorie s'étend, pour Kant,
à tous les êtres naturels, c'està-dire les êtres dont
l'existence dépend, à vrai dire, non pas de notre volonté
mais de la nature. Etant donné qu'ils sont des êtres
dépourvus de raison, ils n'ont qu'une valeur relative, celle de moyens,
et voilà pourquoi on les nomme des choses39. Ceci
fait de la morale le domaine des fins et la circonscrit à
l'humanité. C'est dans ce même ordre d'idées que Richard
ROUTLEY construit, dans son article « is there a need for a new
environnemental éthic ? », un cas fictif, celui du dernier
homme à survivre sur la terre après une catastrophe mondiale. Cet
homme s'emploie, avant de disparaître à détruire tout ce
qui l'entoure : plantes, animaux... Comment évaluer moralement ce qu'il
fait si l'on s'en tient à l'éthique dominante dans le monde
occidental où il n'y a des droits et des devoirs qu'entre les hommes ?
Nous pouvons
dire donc qu'il ne fait rien de mal puisqu' il ne lèse
personne. Cependant, si l'on considère qu'il y a des valeurs dans la
nature, alors nous devons reconnaître que l'homme a des devoirs
vis-à-vis de la nature. Ainsi son acte doit être qualifié
de moralement condamnable.
La morale kantienne présente l'élaboration la
plus explicite et, peut-être la plus achevée, d'une idée
à peu près incontestée selon laquelle le concept de
moralité et celui d'humanité sont coextensifs, si bien que seuls
les humains, et seulement les êtres humains, sont dignes de
considération morale. Raison pour laquelle l'éthique de
l'environnement a été élaborée autour de
l'idée de la valeur intrinsèque, celle des entités
naturelles. L'expression valeur intrinsèque se trouvait
déjà chez Kant, pour qui a une valeur intrinsèque tout ce
qui peut être traité comme une fin en soi, c'est-à-dire un
être raisonnable, donc l'homme.
De par son ambition philosophique, l'éthique
environnementale pourrait être interprétée comme un
défi et une menace lancée contre la philosophie morale
traditionnelle. Cependant, tel n'est pas son but. La dignité morale de
l'être humain n'est pas mise en cause par l'extension du domaine moral
parce qu'en effet, reconnaître une valeur intrinsèque aux
entités naturelles ne signifie pas que celle-ci soit retirées aux
hommes. L'éthique environnementale s'attaque, plutôt, à
l'appropriation technique qui veut que la nature soit considérée
comme un dépotoir et un ensemble des ressources à la disposition
de l'homme.
Si l'anthropocentrisme consiste à affirmer
l'instrumentalisation du monde, l'expression qui l'exprime mieux est celle des
ressources naturelles. Si encore l'anthropocentrisme proclame l'homme comme
étant la mesure de toute chose, l'économie est l'appareil qui lui
permet de mesurer quantitativement la nature comme ressource. Ainsi, nous
pouvons comprendre le refus de certaines puissances économiques de
ratifier le traité sur la protection de l'environnement.
L'idée de l'éthique environnementale est que
là où il y a des moyens, il y a nécessairement des fins.
Or tous les organismes vivants du plus simple ou plus complexe, qu'il s'agisse
d'animaux, de végétaux, d'organisme monocellulaire,... tous
déploient pour se conserver dans l'existence et se reproduire des
stratégies
adaptatives complexes qui sont autant de moyens aux services
des fins. Les mutations du plasmodium constituent un exemple frappant. Il y a
donc des fins dans la nature.
Les organismes, affirme Rolston III, valorisent leurs
ressources de façon instrumentale, parce qu'ils accordent à
eux-mêmes, à la forme de vie qu'ils sont, une valeur
intrinsèque. Il faudra alors substituer à l'opposition «
personne humaine- chose », celle d'une multiplicité
d'individualités téléonomiques, qui peuvent
prétendre au même titre, avoir des fins en soi, et donc avoir une
valeur intrinsèque. Tout individu vivant est, à
égalité avec les autres, digne de considération morale.
C'est ce qu'on appelle le biocentrisme. L'éthique biocentrique
reconnaît un vouloir-vivre dans la nature et accorde à toutes
formes de vie une dignité morale. Ce qui n'était pas le cas chez
Kant. Pour Paul Taylor, l'éthique biocentrique implique une
éthique du respect de la nature. Il justifie sa position de la
manière suivante : si tous les vivants ont un statut égal, et
qu'on ne peut pas traiter une valeur intrinsèque comme un moyen, alors
chaque entité individuelle a droit à la protection parce qu'il
s'agit là d'une affaire de principe. L'éthique du respect de la
nature est donc une éthique déontologique qui évalue les
actions selon qu'elles respectent ou non les principes moraux.
2.2.2. L'écocentrisme
Par opposition à l'éthique biocentrique de
l'environnement, l'écocentrisme est un élargissement du domaine
morale jusqu'aux éléments non vivants de la nature,
c'est-à-dire un égalitarisme biosphérique (biospheric
egalitarianism) selon lequel les espèces, les communautés,
les écosystèmes ont une valeur intrinsèque, parce qu'ils
sont une matrice des organismes. De ce fait, les communautés, les
écosystèmes doivent être protégés dans leur
intégrité. L'homme fait partie de la communauté biotique,
les plantes et les animaux sont ses compagnons. D'où la
nécessité d'un partenariat (stewardship) avec la nature.
C'est ici que l'on peut comprendre pourquoi les riverains adoraient la
rivière, le fleuve ou la mer ; les habitants de la forêt
vénéraient la forêt, etc.
L'écocentrisme est une éthique
conséquentialiste où le critère d'appréciation d'un
acte est la conséquence de cet acte sur l'écosystème, la
communauté, l'espèce. Le principe fondamentale de
l'éthique écocentrique, tel que l'énonçait Aldo
LEOPOLD est qu' « une chose est juste lorsqu'elle tend à
préserver l'intégrité, la stabilité et la
beauté de la communauté bioéthique et qu'elle est injuste
lorsqu'elle tend à autre chose »40 .
L'écocentrisme évoque l'idée de la valeur
systémique étant donné que les éléments de
la nature sont liés les uns aux autres dans un système.
Dans son article intitulé la valeur de la
nature, Rolston III démontre en long et en large l'existence de la
valeur systémique dans la nature. Selon ce dernier, la valeur
systémique est fondamentale. Ainsi dit-il, « les valeurs sont
intrinsèques, instrumentales et systémiques, et les trois sont
entrelacées, aucune ne pouvant se voir reconnaître une importance
prioritaire par rapport aux deux autres, bien que la valeur systémique
soit fondamentale »41.
De ces deux éthiques ressort un rapport de partenariat
entre l'homme et les autres composantes de la nature étant donné
que l'homme n'est qu'une composante de la nature au même titre que les
autres.
2.3. Le pragmatisme environnemental
Bryan NORTON s'est imposé depuis le début des
années quatre-vingt comme un acteur incontournable de l'éthique
environnementale, en donnant le coup d'envoi à ce qui est devenu depuis
l'une des tendances dominantes : le pragmatisme environnemental.
L'originalité du pragmatisme en éthique environnementale se
laisse le plus aisément caractériser par son refus de prendre
position au sujet de la querelle qui oppose les partisans d'une éthique
anthropocentriste (pour laquelle l'homme est, en dernière instance, la
mesure de toute chose et vaut comme unique fin en soi) à ceux de
l'éthique non anthropocentriste (pour laquelle, il existe dans la
nature, indépendamment de toute évaluation humaine, des fins
intrinsèques).
40 Aldo LEOPOLD cité par H.-S. AFEISSA,
Op.cit., p.102.
41 H.-S. AFEISSA, Op.cit., p. 177.
Norton42 témoigne, à travers ses
écrits, de sa volonté de contester la pertinence pratique de
l'ensemble de cette problématique spéculative (l'existence ou non
de valeur intrinsèque dans la nature) au nom de deux types d'arguments
intimement liés l'un à l'autre, faisant valoir, d'une part, les
effets désastreux des querelles intestines entre éthiciens de
l'environnement qui rend leur discours politiquement inaudible et paralyse leur
action concertée et, d'autre part, le caractère
particulièrement stérile de ces débats dans la mesure
où le concept majeur d'intérêt humain est laissé
dans un état d'extrême indétermination. On en vient ainsi
à ne plus savoir distinguer entre une utilité qui se satisfait
dans la consommation immédiate des biens de la nature tels que les
matières premières, les produits agricoles, etc. , et une
utilité qui suppose la conservation de l'objet utile en tant que la
conservation est une condition de la satisfaction des intérêts
humains : il en va ainsi de l'ensemble des services écologiques fournis
par la nature en l'absence desquels nous n'aurions très rapidement plus
aucun accès au bien de consommation.
La conviction de Norton sur ce point est que des programmes de
protection de la nature sont parfaitement justifiables du point de vue d'une
conception suffisamment large de la valeur instrumentale anthropocentrique.
Mieux encore, il importe de reconnaître à cette approche des
problèmes environnementaux une indéniable
supériorité pratique pour au moins deux raisons. D'une part,
l'invocation de la valeur instrumentale anthropocentrique correspond, de fait,
au mode de justification le plus répandu chez les environnementalistes
et constitue à ce titre un espace d'interlocution immédiatement
commun au sein duquel le débat pourra s'engager. D'autre part, en
réussissant à neutraliser la controverse axiologique entre valeur
intrinsèque et utilité humaine, le recours à la valeur
anthropocentrique au sens large permet, par là même de laisser
à la subjectivité de chacun le choix en faveur de telle ou telle
option philosophique, et donc de déplacer le débat sur de terrain
des modalités rationnelles d'action environnementale.
C'est en référence à ces options
pragmatistes que Norton s'est efforcé d'élaborer sa propre
théorie de la gestion durable des écosystèmes. Il estime,
en outre, que les différences qui se manifestent entre les
modèles de durabilité
actuellement disponibles proviennent essentiellement de la
façon dont on pose le problème de la détermination des
obligations qui nous incombent à l'endroit de générations
futures, et de la façon dont on le résout. Il distingue ainsi
deux modèles de durabilité.
Selon le premier modèle, dit de durabilité
faible, c'est-à-dire ce qui doit se transmettre de
génération en génération, c'est un même
niveau de possibilités, un même éventail équitable
d'opportunités. Etant donné, d'une part, qu'il est sans doute
impossible de restreindre ou de contrôler les types d'utilisation de
l'environnement et la répartition consécutive des fruits de la
coopération, qui correspond à la conception que se font les
personnes actuelles de ce qui est bien pour elles-mêmes, et étant
donné, d'autre part, qu'une diminution du stock de ressources ou
altération de la qualité de l'environnement peut résulter
d'un usage tout à fait rationnel de la part des
générations précédentes, il faut que chaque
génération ait le devoir de s'assurer que les opportunités
de vie offertes à ses descendants ne sont pas moins satisfaisantes que
les siennes. Or pareille exigence implique que chaque génération
reconnaisse qu'elle est moralement tenue de compenser les ressources
épuisées ou l'environnement dégradé par le
développement d'un potentiel de production équivalente.
Selon le second modèle dit durabilité forte, il
convient de procéder, non pas par comparaison de formes de
bien-être individuel, mais par établissement d'une liste des
matériaux qui devraient être épargnés au profit des
générations futures .Par matériaux, il faut entendre tout
aspect du monde naturel qui est physiquement descriptible en y incluant
d'importants sites, des groupes de classifications biologiques, des
réserves fixes de ressources et d'importants processus
écologiques. C'est dans cet ordre d'idée qu'on parle des
espèces animales en voie de disparition. Selon cette approche,
l'hypothèse d'une fongibilité absolue des ressources est
inaccessible, et il convient au contraire de spécifier, parmi les
caractéristiques et les processus qui constituent l'environnement
naturel, lesquels sont essentiels au bien-être futur, de telle sorte que
toute détermination du lot de ce qui doit être
légué, qui ne s'engagerait pas à les protéger
ferait que, inévitablement, les générations futures auront
été lésées.
2.4. Conclusion
En somme, dans le monde, l'homme joue un rôle
prééminent, rôle fondé sur la diversité
ontologique profonde par rapport au reste de la création. Sa
spiritualité est indissociable de la matière et elle le place au
plus haut niveau. Cependant, cette suprématie l'oblige à
respecter la nature. Il est donc nécessaire de créer une
éthique de responsabilité, comme l'a déjà fait Hans
JONAS dans son ouvrage intitulé Le principe
responsabilité, en la concevant non seulement comme une
responsabilité individuelle, mais comme une responsabilité envers
les générations futures. C'est dans cet ordre que se range la
théorie de la durabilité qui est le principe même du
pragmatisme environnemental.
La véritable cause de tout problème
écologique provient d'une mauvaise perception de la relation
homme-nature, à cause du désir de l'homme d'être tout
puissant au point de se substituer à Dieu Créateur, en perdant le
sens de la limite. Ceci justifie alors l'importance d'une éthique
biocentriste et écocentriste de l'environnement pour rappeler à
l'homme ses limites. Cependant, l'homme doit demeurer et être
considéré comme un administrateur de la nature.
CHAPITRE III : LES CONSIDERATIONS CRITIQUES
3.0. Introduction
Dans les pages précédentes nous avons parcouru
les différentes attitudes de l'homme face à la crise
environnementale, lesquelles attitudes nous ont révélé
différents rapports que l'homme entretient avec la nature.
Au fait, l'anthologie de H.-S. AFEISSA permet de sortir des
traditionnelles accusations d'écoterrorisme ou d'écofascisme et
rassemble des outils conceptuels importants pour formuler les questions
écologiques dans leurs implications éthiques. Cependant, au
sortir du parcours proposé par cette anthologie, on peut se demander si
les débats d'éthique environnementale présentés ici
ne souffrent pas de leur trop grande abstraction, et sont donc
séparé de la réalité pratique. On peut aussi
reprocher à cette anthologie de souffrir d'une certaine
contradiction.
Nous allons ainsi dans ce chapitre indiquer d'une part les
mérites de la pensée de l'auteur et, d'autre part ses limites.
3.1. Les mérites
La lecture de l'ouvrage de notre auteur, du début
à la fin, semble nous mettre en face d'un procès contre
l'anthropocentrisme. Ainsi, l'un des mérites de cet ouvrage est d'avoir
établi le principe même de l'anthropocentrisme - l'homme est la
fin de la nature - comme cause, si pas la seule, mais la principale cause de la
crise de l'environnement qui se vit dans le monde actuel. Il a aussi le
mérite d'avoir tenté de donner une solution ou de remédier
à cette situation en mettant sur pied de nouveaux principes
éthiques tels que :
- l'égalitarisme biotique selon lequel tout organisme a
une valeur inhérente,
il est un centre de vie téléologique et un objet
moral comme le signifie Paul TAYLOR dans son article « le respect de la
nature ». Les organismes vivants, de monocellulaires à l'homme,
possèdent de manière égale des fins propres.
- L'égalitarisme biosphérique pour lequel les
espèces, les communautés, les
écosystèmes, ont une valeur intrinsèque
parce qu'ils sont les matrices des organismes. Ainsi, ayant hissé la
nature non humaine au niveau de l'homme, l'homme pourra changer sa vision sur
la nature et sa manière d'intervenir dans la nature.
- Le pragmatisme environnemental, finalement, étant une
position
intermédiaire entre les partisans de l'éthique
anthropocentriste et ceux de l'éthique non anthropocentriste, vient
donner solution un peu plus pratique que les précédentes
théories en faisant intervenir les intérêts de
générations futures dans la gestion actuelle de la nature.
Il faut noter, en outre, le fait que cet ouvrage marque un
nouveau tournant dans l'histoire de la philosophie. Depuis des siècles,
les philosophes s'évertuaient à chercher ce qui
différencie l'homme du reste de la création et les
caractéristiques de l'homme qui font de lui un être
supérieur au reste de la nature : l'homme agit par la raison, tandis que
l'animal agit par instinct ; l'homme a une valeur intrinsèque, le reste
de la nature ne sont que des choses, etc. Aujourd'hui c'est le mouvement
inverse. Les philosophes cherchent ce qui peut mettre l'homme et l'animal sur
un même pied d'égalité sur le plan morale en vue
d'harmoniser le rapport homme- animal. Les études acharnées de la
recherche d'une valeur intrinsèque dans la nature effectuées par
les éthiciens anglo-américains tels que Paul TAYLOR et Rolston
III en sont une preuve.
3.2. Les limites
Cet ouvrage d'Afeissa propose une défense de
l'environnement à travers la critique d'une morale anthropocentriste. Il
s'agit de défendre la nature non pas parce qu'elle est belle ou utile,
mais parce que l'homme doit changer son rapport à la nature. On lui
propose ainsi le biocentrisme éthique.
Cependant, le biocentrisme présente plusieurs
difficultés parce que, au fait, en remettant en cause la
délimitation de la morale à la seule humanité, le
biocentrisme peut être considéré comme une critique des
morales humanistes, plus particulièrement de la morale kantienne. Mais
il constitue en même temps une
extension de la morale kantienne, en ce que, comme pour
celle-ci, les « fins en soi » ne sont pas des
propriétés objectives, mais l'universalisation d'un principe qui
est, chez Kant, celui du sujet conscient, et devient, dans le biocentrisme,
celui d'une quasi- intentionnalité, d'un quasi-sujet. Avec la valeur
intrinsèque, « c'est bien un principe déontologique qui est
découvert »43. Comme éthique
déontologique, le biocentrisme s'expose aux difficultés
classiques de ces éthiques. Certains éthiciens ont pu faire
remarquer que si les éthiques déontologiques sont normatives, ou
prescriptives et imposent contraintes et obligations. Elles le sont assez
pauvrement, c'est-à-dire qu'elles ne peuvent définir qu'un petit
nombre de contraintes. Rolston III remarque que les écosystèmes
sont « amoraux », les règles darwiniennes de la survie ne sont
pas des règles de justice. Ainsi « de notre observation de la
nature, nous ne pouvons donc tirer aucune règle morale, mais seulement
appeler à son respect. Les règles du respect ne peuvent
être que limitées : il s'agit essentiellement de s'abstenir
d'actions intentionnellement nocives »44.
C'est d'autant plus insuffisant que l'extension du nombre de porteurs des
valeurs a pour conséquence de multiplier les conflits ou les
dilemmes.
Comment arbitrer entre une multitude de valeurs
intrinsèques qui méritent toutes, d'une manière
égale, la considération morale ? D'où la tentative de
hiérarchiser les valeurs intrinsèques. Renonçant à
l'égalitarisme strict de Paul TAYLOR, Louis LOMBARDI propose de classer
les individus biologiques suivant leurs « capacités » plus ou
moins grandes. Cela consiste à ordonner les êtres vivants
selon leur plus grande proximité à l'homme qui réunit le
plus grand nombre de « capacités »45. C'est
l'idée développée par William FRANKENA lorsqu'il prend la
sensibilité pour critère de la considérabilité
morale. Ce qui nous permet d'échapper à l'anthropocentrisme, mais
pas à l'anthropomorphisme. Nous sommes portés à
protéger les êtres vivants qui nous paraissent les plus
remarquables, parce qu'ils sont plus proches de nous, ou parce que nous
projetons en eux nos fantasmes ou nos désirs.
Mais, nous ne voyons pas très bien pourquoi le fait
d'être plus proche de l'homme donnerait priorité dans les
opérations de conservation. La recherche de la
43 C. LARRERE, L'éthique environnementale :
axiologie ou pragmatisme ? , Université de Paris1-
PanthéonSorbonne-France, inédit., sans date, p. 6.
44 Ibid., p. 7.
45 N. AGAR, Biocentrism and the concept of
life (le biocentrisme et le concept de la vie), in « Ethics »,
n°108 (october 1997), p. 147.
valeur intrinsèque part du refus de ne voir dans la
nature que l'ombre portée de l'homme. Le biocentrisme affirme la
volonté de protéger la nature pour elle-même. Y introduire
une hiérarchie dont le principe est la proximité de l'homme est
une façon de nier le biocentrisme de l'intérieur.
Le biocentrisme semble donc déboucher sur une impasse
pratique. Outre sa difficulté à formuler des règles pour
trancher les conflits de valeur, Norton a pu faire remarquer que cette
éthique individualiste46 convenait mal à la
protection de la nature dont l'éthique environnementale est
censée fournir les règles. La protection de la nature, en effet,
ne prend pas seulement en charge des organismes vivants, mais aussi des
éléments abiotiques ou des systèmes non organiques. Sur
tout cela, la valeur intrinsèque n'a rien à dire.
A ces critiques pratiques, on peut en ajouter une qui porte
plus sur le fond. La recherche de la valeur intrinsèque s'enracine dans
une critique de la raison instrumentale. L'anthropocentrisme est accusé
de ne voir dans la nature qu'un ensemble de ressources, de ne valoriser la
nature qu'en l'instrumentalisant. Or, à l'issue de la quête de la
valeur intrinsèque, nous découvrons que la vie, de part en part,
n'est qu'instrumentalisation : ne dit-on pas que vivre c'est détruire
d'autre vies et que la vie ne se perpétue que si tout être vivant
est, tour à tour, consommateur et consommé, et que c'est leur
capacité à instrumentaliser leur monde, ou leur environnement,
qui qualifie les entités vivantes comme des valeurs intrinsèques
comme nous l'avons vue dans les lignes qui précèdent. Alors
comment pouvons- nous voir dans l'instrumentalisation
précédemment décriée, la source de la valeur de
tout être vivante ? Comment pouvons-nous appeler à respecter chez
n'importe quel être vivant ce que nous avons d'abord condamné chez
l'homme ? Il y a là un paradoxe qui affecte profondément le
biocentrisme.
De plus, le biocentrisme, en affirmant l'égalité
de tous les êtres vivants, dénie aux hommes toute dignité
particulière. Cependant, il fait de l'homme le destinataire d'une
injonction morale : le respect de la nature.
46 H.-S. AFEISSA, Op. Cit., pp.263-268.
Pour Gilbert HOTTOIS, « l'anti-anthropocentrisme,
fréquent dans les éthiques du vivant, est une position
formellement contradictoire: ce sont toujours des hommes qui affirment
une valeur, une norme, un point de vue, prétendument non humains. Le
problème procède en partie du préjugé propre
à de nombreuses éthiques environnementales suivant lequel
l'anthropocentrisme est toujours et inévitablement
anti-écologique, instrumentaliste, exploiteur. Or, il n'y a là
nulle nécessité: les hommes, individus et collectivités,
ne cessent de valoriser spontanément ou
délibérément des choses, des êtres, des situations
comme des fins à favoriser, à protéger, à
préserver. En ce qui concerne la nature et les êtres vivants,
l'anthropocentrisme pris au sérieux souligne toute la
responsabilité humaine: ce sont des hommes qui décident, sur
base de raisons et de sentiments, de respecter, protéger, utiliser les
vivants non humains »47.
3.3. Conclusion
Somme toute, nous dirons qu'à l'issue de cette
appréciation nous nous sommes rendu compte que l'éthique de
l'environnement est d'un grand apport dans l'effort d'amélioration du
rapport entre l'homme et la nature. Cependant, il y a encore un long chemin
à parcourir pour cette dernière. L'éthique
environnementale doit redéfinir ses concepts afin d'éviter une
ambiguïté dans le rapport entre l'homme et la nature qu'elle
cherche à définir.
47 G. HOTTOIS, Panorama critique des
éthiques du monde vivant, in « Revista colombiana de
bioética », Vol. 1, n°1, Enero-junio de 2006, p. 5.
35
C0NCLUSION GENERALE
Grosso modo, il a été question, tout au long de
notre travail, d'étudier le rapport entre l'homme et la nature tel qu'il
ressort de l'analyse de l'ouvrage d'Afeissa intitulé Ethique de
l'environnement.
Pour y arriver nous avons structuré notre travail en trois
chapitres.
Il a été question dans le premier chapitre de
présenter les éléments qui devrait nous servir de
repère dans la compréhension des rapports homme-nature dans leur
évolution et leur état actuel. Ces éléments nous
ont aidés à comprendre aussi la crise environnementale qui frappe
notre planète aujourd'hui. Il a été donc question dans ce
chapitre de passer en revue certaines conceptions religieuses de la relation
homme-nature et le changement de ces conceptions aux temps modernes.
En effet, la plupart de religions primitives ont eu leur
origine dans le contact de l'homme archaïque avec la nature, de la
disproportion entre son pouvoir et celui des éléments de la
nature ; ce qui explique l'adoration de grands arbres, de grandes montagnes, de
grands cours d'eau, etc. En découvrant une réalité qui lui
est transcendante, il va naître en cet homme primitif un sentiment de
dépendance. Ce qui explique aussi son attitude face à la nature.
Les religions, les croyances archaïques qui partent de la nature sont
ainsi classées sous le nom de naturisme. C'est des religions telles que
l'animisme, le totémisme, le chamanisme, etc.
Il est aussi important de savoir que les différences
entre les religions, qu'elle monothéiste, polythéiste ou
panthéiste, se traduisent par leur représentation de la nature.
G.- G. Arsène distingue deux grands groupes de religions :
- d'une part les religions dites révélées
qui sont le judaïsme, le christianisme et l'islam, qui prêchent la
domination de l'homme sur la nature et laissent la nature à la merci de
celui-ci.
- d'autre part, les religions de l'Orient qui sont le
Bouddhisme, l'Hindouisme, le Taoïsme, mazdéisme, etc. qui
prêchent l'harmonie dans la relation entre l'homme et la nature.
L'avènement de la modernité en Occident viendra
marquer un autre tournant dans l'histoire des rapports homme-nature : la raison
devient la seule instance à justifier les attitudes et les actions de
l'homme. Ce qui conduira à la crise de la religion. La pensée
analytique et méthodique instaurée par Descartes, la
mécanique de Newton, la vision mécaniste de l'univers sont
désormais les outils de l'explication de l'univers. L'explosion de
l'industrie donnera naissance à une vision de la nature comme simple
réserve des matières premières.
En ce qui concerne le deuxième chapitre, il sied pour
nous de dire que nous y avons souligné le fait que dans le monde,
l'homme joue un rôle prééminent fondé sur la
diversité ontologique profonde par rapport au reste de la
création. Sa spiritualité est indissociable de la matière
et elle le place au plus haut niveau. Cependant, cette suprématie
l'oblige à respecter la nature. Il est donc nécessaire de
créer une éthique de responsabilité, comme l'a
déjà fait Hans JONAS dans son ouvrage intitulé Le
principe responsabilité, en la concevant non seulement comme une
responsabilité individuelle, mais comme une responsabilité envers
les générations futures. C'est dans cet ordre d'idées que
se range la théorie de la durabilité qui est le principe
même du pragmatisme environnemental.
La véritable cause de tout problème
écologique provient d'une mauvaise perception de la relation
homme-nature, à cause du désir de l'homme d'être tout
puissant et de se substituer à Dieu créateur, en perdant le sens
de la limite. Ceci justifie alors l'importance d'une éthique
biocentriste et écocentriste de l'environnement pour rappeler à
l'homme ses limites. Cependant, l'homme doit demeurer et être
considéré comme un administrateur de la nature.
Le troisième chapitre consacré à
l'appréciation critique a consisté à relever les
mérites et les limites de l'apport de l'ouvrage d'Afeissa dans la
conception du rapport entre l'homme et la nature. Ayant une connaissance
limitée, nous restons ouvert en prêtant le flanc aux remarques de
quiconque s'avérerait mieux éclairé que nous. Ses
contributions, en rapport avec cette investigation, seront d'une
importance capitale dans l'érection de l'immense édifice
philosophique.
BIBLIOGRAPHIE SELECTIVE
Ouvrage de l'auteur
1. Hicham-Stéphane AFEISSA, Ethique de
l'environnement. Nature, valeur, respect, coll. « textes clés
», Vrin, Paris, 2007.
Autres ouvrages
2. ARISTOTE, Ethique à Nicoma que, traduction et
présentation de Richard BODEÜS, Ed. GF Flammarion, 2004.
3. Elisabeth. BOURGOIS, La bioéthique pour tous,
coll. « un autre regard sur l'homme », Edition du Sarment, France,
2001.
4. Emile BREHIER, Histoire de la philosophie, tome
II, XVII-XVIII ème siècle, Edition revue et mise
à jour par Pierre-Maxime SCHUHL et André-Louis LEROY, Ed.
Quadrige/ PUF, Paris, 2000.
5. Emmanuel KANT, Fondement de la métaphysique des
moeurs, IIème section, trad. en français, OEuvres
philosophiques, tome II, Paris, Gallimard, Bibliothèque de la
pléiade, 1985.
6. GONZAGUE TRUC, Histoire de la philosophie, Ed.
Fischbacher, Paris, 1950.
7. Henk A. M. TEN HAVE (dir.), Ethique de l'environnement et
politique internationale, coll. « éthique », Ed. UNESCO,
Paris, 2007.
8. René DESCARTES, Discours de la
méthode, commentaires et notes par J.- M. BEYSSADE, Ed. du Brodard
et Taupin, Paris, 1973.
9. Thomas D'AQUIN, Somme théologique, t. II,
Cerf, Paris, 1993.
Articles
10. Catherine LARRERE, L'éthique environnementale
: axiologie ou pragmatisme ? , université de Paris 1-
Panthéon-Sorbonne-France, inédit, sans date.
11. Donald SWEARER, Buddhism and ecology challenge and
promise (le bouddhisme et l'écologie: un défi et la
promesse, in « Earth ethics », ni, 1998 at http : //www.unites,
uqam.ca/Religiologiques.
12. Denis MÜLLER, Le rapport des humains aux animaux
dans la perspective de l'éthique : Mise en situation sociale, in
« Théologiques », vol. 10, n° 1, 2002, pp. 90-91.
13. Gilbert HOTTOIS, Panorama critique des
éthiques du monde vivant, in « Revista colombiana de
bioética », Vol. 1, ni, En ero-junio de 2006, pp. 7- 28.
14. Gucy-GabrielARSENE, La relation homme-nature.
L'émergence de l'éthique de l'environnement, at.
URL/www.agro
campus-rennes.fr
15. Mohammad YOUNES, Les repères islamiques pour
la protection de l'environnement, in « l'Islam aujourd'hui »
N°20 Revue périodique de l'Organisation Islamique pour
l'Éducation, les Sciences et la Culture (ISESCO), pp.5-9.
16. Nicolas AGAR, Biocentrism and the concept of life,
in «Ethics», ni 08 (october 1997), pp. 147-1 68.
Cours inédit
17. Pascal KOBA, Notes de cours des philosophies
orientales, Scolasticat Jean XXIII, inéd., Kolwezi, 1998-1999.
Site Web
18. Edward TAYLOR, L'Hindouïsme, in http//
wikipédia.org
Dictionnaires et encyclopédies
19. Noëlla BARAQUIN et Jacqueline LAFFITTE,
Dictionnaire des philosophes, deuxième édition, Armand
Colin, Paris, 2002.
20. Sylvain AUROUX (dir.), Les notions philosophiques.
Dictionnaire, Tome II, Coll. « Encyclopédie philosophique
universelle », PUF, Paris, 1990.
21. Josette REY-DEBOVE (dir.), Le nouveau petit Robert, Ed. de
Maury, Paris, 2005.
41
TABLE DES MATIERES
EPIGRAPHE I
DEDICACE II
AVANT PROPOS .III
0. INTRODUCTION GENERALE 1
0.1. Choix et intérêt du sujet 1
0.2. Problématique et hypothèses 2
0.3. Sources et méthode du travail 3
0.4. Délimitation du sujet 3
0.5. Division du travail 3
0.6. Notes biographiques 4
0.7. Difficultés rencontrées 4
CHAPITRE I : LES GENERALITES SUR LA RELATION ENTRE
L'HOMME ET LA
NATURE. 5
1.0. Introduction. 5
1.1. Selon les morales religieuses 6
1.1.1. Le bouddhisme 6
1.1.2. L'Hindouisme 7
1.1.3. Le mazdéisme 9
1.1.4. Le sinisme, le taoïsme, le confucianisme 9
1.1.5. L'animisme 10
1.1.6. Le judaïsme 11
1.1.7. Le Christianisme. 12
1.1.8. L'Islam 13
1.2. Selon la conception moderne 14
1.3. Conclusion 16
CHAPITRE II : L'HOMME FACE A LA CRISE DE L'ENVIRONNEMENT
18
2.0. Introduction 18
2.1. L'anthropocentrisme 18
2.2. Le biocentrisme et l'écocentrisme 22
2.2.1. Le biocentrisme 22
2.2.1.1. Le bien d'un être vivant 22
2.2.1.2. La valeur intrinsèque 23
2.2.2. L'écocentrisme 25
2.3. Le pragmatisme environnemental 26
2.4. Conclusion 29
CHAPITRE III : LES CONSIDERATIONS CRITIQUES
30
3.0. Introduction 30
3.1. Les mérites 30
3.2. Les limites 31
3.3. Conclusion 34
C0NCLUSION GENERALE 35
BIBLIOGRAPHIE SELECTIVE 38
TABLE DES MATIERES 41