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L'universitarisation de la profession infirmière

( Télécharger le fichier original )
par Gaà¯ta Le Helloco-Moy
Université Bordeaux 2 - Sciences de l'Education 2009
  

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Université Victor Segalen Bordeaux 2

Faculté des Sciences de l'Homme

L'universitarisation de la profession infirmière

Une approche historique et pratique de l'étude de l'évolution de la profession infirmière

Mémoire de Licence

Mention Sciences de l'Éducation

Présenté par

Gaïta LE HELLOCO-MOY

Sous la direction de

M. le Pr. Alain MARCHIVES

L'universitarisation de la profession infirmière

Une approche historique et pratique de l'étude de l'évolution de la profession infirmière

À Arnaud, Chloé, Alexia et Nicolas,

avec qui chaque nouvelle journée est toujours plus belle qu'hier...

Je remercie tout particulièrement Yann Le Helloco mon relecteur le plus exigeant.

Sommaire

Introduction 7

1-Historique 8

1-1-Les racines de la profession infirmière 8

1-1-1-Avant 1878 : 8

1-1-2-De 1878 à 1918 : 8

1-1-3-Après 1945 : 9

1-2-Histoire d'un diplôme 9

2-La réforme 11

2-1-Les revendications des étudiants infirmiers 11

2-2-Les revendications des professionnels 14

2-3-Réalité du soin infirmier d'aujourd'hui 14

2-4-Prérequis à l'évolution de la formation 16

2-5-Réforme et attractivité 16

2-6-Réforme et VAE 17

2-7-Une voie pour l'avenir : la recherche en Soins Infirmiers 17

2-8-Le rapport du gouvernement 19

3-Analyse 19

3-1-Questions de départ 19

3-2-Méthodologie 20

3-3-Terrain 22

3-4-Synthèse des entretiens 23

3-5-De l'évolution des pratiques à celle de la formation ou inversement ? 25

3-6-Imaginer l'avenir 26

Conclusion 29

BIBLIOGRAPHIE et SITES INTERNET 30

1.Ouvrages et articles 30

2.Sites internet 31

Annexe n°1 32

Rapport de l'IGAS et l'IGAERN du 8-12-08 32

Aspects positifs : 32

Aspects négatifs : 33

Annexe n°2 34

Guide d'entretien 34

Annexe n°3 35

Présentation des entretiens auprès d'infirmier(e)s DE 35

Entretien avec Juan Martin le 7-11-08, 17mns : 35

Entretien avec Marie-Hélène le 15-01-09, 14mns : 35

Entretien avec Marion le 15-01-09, 12mns : 36

Entretien avec Delphine le 30-01-09, 13mns : 36

Entretien avec Armelle le 2-02-09, 16mns : 36

Entretien avec Etienne le 6-03-09, 13mns : 37

Entretien avec Isabelle le 6-03-09, 9mns : 37

Annexes n°4 38

Réforme 2009 IFSI 38

(Instituts de Formations en Soins Infirmiers) 38

En pratique : 38

Introduction

Au départ de cette recherche, il y avait un postulat incontournable : pour pouvoir effectuer une recherche il faut s'abstraire de ce que l'on croyait savoir. « Le fait scientifique est conquis, construit, constaté », telle qu'affirmée par BACHELARD et reprise par d'autres sociologues par la suite1(*), est une réalité difficile à mettre en oeuvre. Il m'aura fallu de long mois pour essayer de comprendre l'enjeu de cette démarche et d'enfin en apprécier la résultante. Alors qu'au premier abord je pensais conforter ce que je croyais être, voir ce qui se devait d'être, je me suis retrouvée bousculée dans mes croyances et cette interpellation m'a permis enfin de démarrer cette recherche non plus comme un exercice théorique imposé mais comme un travail de recherche autour d'un sujet a la fois fondamental et énigmatique : ce que souhaite la profession infirmière pour elle-même.

Pour parler de la profession infirmière, je me suis basée sur deux axes, l'un diachronique en me replongeant dans le passé de l'avènement de l'infirmier d'aujourd'hui, qui a découvert le masculin d'une profession, et l'autre synchronique en partant d'abord d'une revue de la question des écrits professionnels pour ensuite aller confronter mes hypothèses au terrain, directement auprès de ces infirmiers dont les propos résonnent encore à mes oreilles. Ainsi, après avoir exploré l'historique de l'évolution de la profession infirmière nous verrons l'évolution actuelle de la formation de cette profession pour ensuite explorer l'adéquation entre cette réforme et l'évolution des pratiques.

Bien que ce travail m'ait énormément apporté de réponses, il a aussi apporté d'autres questionnements permettant d'entrevoir l'étendue du travail à fournir dans ce domaine.

La santé est un domaine déjà exploré mais le soin infirmier reste encore peu regardé au sein de la communauté scientifique et ceci va peut-être changer.

1-Historique

1-1-Les racines de la profession infirmière

1-1-1-Avant 1878 :

L'hôpital est d'abord un lieu de charité et ne deviendra lieu de soins qu'au vingtième siècle aux alentours des années soixante c'est-à-dire tout récemment. C'est la misère et les grandes épidémies qui créent les premiers hôpitaux. Ils sont alors des oeuvres de charité créés par des congrégations religieuses où les soins n'ont rien à voir avec leur équivalent d'aujourd'hui. Dans ces hôpitaux, il existe deux catégories de personnes :

· D'une part les religieuses qui dirigent et organisent

· D'autre part le personnel domestique constitué, en grande majorité, de prostituées dont la moralité douteuse leur donnent obligation de servir les miséreux.

1-1-2-De 1878 à 1918 :

Dans un premier temps, on rencontre une volonté de remplacer les religieuses par des laïcs permettant, en parallèle, le développement des dispensaires.

A la fin du dix neuvième siècle, les découvertes de Pasteur remettent en cause l'organisation complète de l'hôpital avec la mise en place d'une politique de l'hygiène. Conjointement, l'état intervient de plus en plus. Une nouvelle infirmière apparait alors dont la mission est très proche de celle de la religieuse, devoir et assistance, mais qui est démise de sa fonction religieuse. Les qualités requises sont alors « vocation, idéal, enthousiasme, bonté, dévouement, oubli de soi, courage, énergie, sang-froid, méthode, obéissance, discipline, respect de la hiérarchie, politesse, tact, bonne humeur, propreté, ordre, économie et initiative »2(*).

A partir de 1878, les premiers cours infirmiers sont créés dans les principaux hôpitaux de Paris ; la formation dure 8 mois et est accessible à l'ensemble du personnel de l'assistance publique. Ces cours ayant lieu le soir après la journée de travail et s'adressant à des femmes logées sur place dans des dortoirs, peu de soignantes sont formées et les religieuses demeurent donc encore longtemps au chevet des malades.

A cette époque, Florence Nightingale ouvre la voie à la profession d'infirmière en Grande-Bretagne.

A la fin du dix neuvième siècle, il existe plusieurs types d'infirmières:

· L'infirmière de l'assistance publique

· L'infirmière visiteuse dont le champ d'action sociale s'élargit

· Les religieuses

· Les infirmières de La Croix-Rouge

· Les infirmières des écoles privées comme celle de Bagatelle à Bordeaux

Des rivalités apparaissent entre elles, fondées d'une part sur l'origine sociale et d'autre part sur la formation suivie, que chacune se targue d'avoir meilleure que l'autre.

Au début du vingtième siècle les infirmières sont souhaitées par le corps médical comme des femmes toujours prêtes à rendre service au médecin sans faire preuve de réflexion aucune envers la prescription. Pourtant, la profession d'infirmière entre dans une nouvelle période qui fera de la servante bonne, brave et soumise, une professionnelle à la formation spécifique, sanctionnée par un diplôme. Ceci ne se fera pas sans mal car l'origine de la profession lui associe une forte dimension philanthropique et a tendance à l'y cantonner.

1-1-3-Après 1945 :

Ce n'est qu'après la seconde guerre mondiale que l'infirmière va, progressivement, mettre en oeuvre des compétences et des savoirs qui lui sont propres et lui donner cette place spécifique dans le système de santé global. A cette même époque, on assiste à une dispersion des soignantes dans des lieux d'exercice multiples. Pour ce qui est de la formation, la diversité des écoles et donc des programmes entraîne un apprentissage réel, fortement axé sur la pratique du métier.

1-2-Histoire d'un diplôme

Léonie Chaptal, médecin, est à l'origine de la fondation de la profession infirmière suite à un rapport rédigé en 1921 sur la profession et la nécessité d'une formation technique, d'une législation et d'un diplôme d'Etat.

Un décret, le 27 juin 1922, institue trois brevets de capacité en créant conjointement un conseil de perfectionnement qui met au point les programmes des études, organise les examens et pose les conditions de recrutement. L'Etat crée un diplôme mais permet parallèlement l'embauche d'infirmières non diplômées. Elles sont moins payées et donc préférées à l'embauche, ce qui va avoir pour conséquence le chômage d'un certain nombre d'infirmières DE (Diplômées d'Etat) lors de la crise de 1929.

Le 18 février 1938, un décret dissocie la part sociale de la part technique des soins en divisant alors la profession selon deux axes : assistante sociale et infirmière DE.

C'est la loi du 15 juillet 1943, sous le régime de Vichy, qui propose la première définition de la profession infirmière. Cette même loi impose aux établissements publics hospitaliers l'obligation de recruter des infirmières diplômées d'Etat.

Après la seconde guerre mondiale, le « baby-boom » engendre une forte demande en infirmières alors que parallèlement les compétences à acquérir et la liste des technicités requises ne cessent d'augmenter.

Dans les années cinquante, la pénurie l'emporte sur la compétence à tel point qu'environ 70% des soignantes ne sont pas diplômées.

L'arrêté du 5 septembre 1972 écrit une page historique de la profession en y inscrivant des caractéristiques comme:

· L'infirmière est au service des personnes en matière de santé

· L'infirmière est éducatrice de santé

· L'infirmière est recrutée sur son aptitude à penser et à agir

· L'infirmière doit collaborer avec les autres travailleurs sanitaires et sociaux

La conception de cette nouvelle formation n'est alors plus centrée sur la maladie mais sur la santé et la personne humaine. Dès cet arrêté, la durée de formation passe à 28 mois pour atteindre 33 mois en 1979.

En 1966, l'Organisation mondiale de la santé définit le rôle de l'infirmière en déclarant que c'est à elle « qu'incombe le diagnostic infirmier, l'initiative, la réactualisation des soins et le contrôle ». La profession se voit alors responsable de son évolution et la fonction infirmière se précise alors peu à peu pour arriver, vingt cinq ans après, à la réunion de la profession en un diplôme commun aux infirmières de soins généraux et à celles spécialisées en santé mentale.

Le décret de 1992 porte les études à 36 mois et 7 semaines. Le nouvel infirmier  « tronc commun » a montré depuis que la richesse de la profession réside bien dans sa capacité à prendre en charge tout malade quelle que soit la pathologie dont il souffre. Cette capacité d'adaptation ne peut être qu'un plus à une époque où la santé publique doit évoluer.

Aujourd'hui, dans la construction de l'espace européen de l'enseignement supérieur et de la recherche, initiée lors d'une conférence à la Sorbonne en 1998 par quatre pays (Allemagne, Grande Bretagne, Italie et France), l'harmonisation des études passe à l'échelle européenne. Les accords de Bologne en 1999 qui ont été actualisés à Prague en 2001 puis à Berlin en 2003 sont l`avenir des études supérieures et donc de la profession infirmière. Cette politique concerne désormais 36 états de la « Grande Europe ».

Cet accord de Bologne présente les points essentiels suivants :

· Etablir un système lisible de diplôme

· Adopter une architecture comparable des études supérieures fondée sur trois niveaux (licence, Master, Doctorat ou encore LMD)

· Développer des formations modulaires selon le système européen de crédits dits ECTS (European Credits Transfer System)

· Faire du continent européen un vaste espace permettant facilement la mobilité des étudiants par la mise en place de bourses de mobilité

· Faciliter la mobilité des enseignants et des chercheurs et donner aux formations une dimension européenne

· Rendre cet espace lisible et attractif à l'échelle du monde entier

· Intégrer les besoins de formation professionnelle aux divers niveaux et répondre aux aspirations à la formation tout au long de la vie

2-La réforme

2-1-Les revendications des étudiants infirmiers

La FNESI (Fédération Nationale des Etudiants en Soins Infirmiers) est une association loi 1901 qui agit indépendamment de tout parti politique, de toute confession et de tout syndicat. La fédération a su se faire reconnaître par le Ministère de la Santé comme la seule structure représentant les étudiants en soins infirmiers (ESI). Dans une lettre d'information à tous les étudiants, Livia Lainé, sa présidente, exprime les revendications principales des étudiants infirmiers aujourd'hui :

« Aujourd'hui, aux vues de l'actualité de notre formation et en tant que présidente de la FNESI, je me dois de vous interpeller : Quelle réforme de nos études souhaitons-nous, nous étudiants infirmiers, étudiants de l'enseignement supérieur et étudiants européens ?

Actuellement, nous avons choisi une formation en santé qui se veut stimulante et enrichissante, permettant une ouverture d'horizon formidable. Cependant, nous pouvons remarquer qu'elle n'est pas forcément à la hauteur de ce qu'elle pourrait être.

Nous sommes étudiants infirmiers

Notre future profession est une profession en perpétuel mouvement ; notre formation se doit d'évoluer avec elle ! Comment ne pas regretter des décalages entre les apports théoriques et la réalité du terrain lorsqu'on sait que le contenu du programme de la formation n'a pas été modifié depuis 1992 !

Il nous faut donc une réforme de nos études répondant aux questions spécifiques à notre filière impliquant l'incorporation de nouvelles thématiques (évolution des soins, pratique de l'anglais et d'informatique, sciences humaines) et une approche différente des stages et de certains cours.

Il faut donner la possibilité à ceux qui le souhaitent de poursuivre leurs études et d'approfondir certains domaines et ce, de manière reconnue. L'accès à la recherche nous permettrait aussi de développer une expertise infirmière, d'être nous-mêmes acteurs des évolutions en santé et ainsi de réactualiser régulièrement la formation initiale par la réinjection de ces nouvelles connaissances.

Nous sommes étudiants français de l'Enseignement Supérieur (car post BAC)

Ce statut, acquis depuis 1992, devait améliorer nos conditions de vie et d'études, mais nous constatons bien que nous n'ayons pas accès, dans les faits, aux même services que nos copains de l'université, parce que le Ministère de la Santé n'est pas à même de nous garantir ce qu'assure le Ministère de l'Enseignement Supérieur :


· le respect de la démocratie étudiante grâce à la participation aux décisions, à la création des maquettes de formation, du projet pédagogique et la représentation des étudiants dans les conseils, du local au national, avec par exemple l'élection du représentant de l'établissement de formation (chez nous le directeur)


· L'amélioration des conditions sociales des étudiants infirmiers avec : la revalorisation annuelle du montant des bourses d'études ainsi que l'accès à l'ensemble des services sociaux du CROUS (accès au logement étudiant, à la restauration universitaire, à des assistantes sociales, à des allocations d'urgence, au sport, etc.)


· Les passerelles entre formations de santé et la conservation des acquis lors de réorientation ou d'échec de la formation

Pour stopper cet écart croissant entre étudiants en santé non universitaires et étudiants universitaires, il nous faut donc une réforme de nos études qui réponde aux questions relatives à notre statut d'étudiant de l'enseignement supérieur.

Nous vivons en Europe

Et en 2008, il est impossible d'envisager une réforme sans prendre en compte la dimension européenne. Car l'Europe, c'est la libre circulation des biens et des personnes, donc des étudiants ! Pour cela, il faut des repères communs (durée d'études, système de comptabilisation des acquis, d'objectifs de stage ...) permettant une harmonisation et une lisibilité de nos diplômes dans les différents pays. Ces repères existent et sont définis par le processus de Bologne. Deux repères primordiaux :

- le système LMD

- les Unités d'Enseignements (UE) associant les crédits ECTS pour valider les années d'études.

Il nous faut donc une réforme de nos études qui réponde aux exigences européennes et ne pas se mettre à l'écart du monde !
A la lumière de tous ces éléments, il est impossible d'envisager autre chose qu'une réforme profonde de la formation pour répondre à l'ensemble des problématiques citées pour l'ensemble des 80 000 ESI de France.

Les clés de cette réforme sont belles et bien :

- l'intégration au système universitaire, pour appliquer ensuite le processus de Bologne

- l'utilisation du système ECTS

- la mutation du statut des IFSI en Instituts Universitaires

- la transformation du statut des formateurs

- l'accès aux Master et Doctorat

- un diplôme unique : diplôme universitaire d'exercice

Tout ceci ne peut se faire sans une cogestion à part égale de la formation par le Ministère de la Santé et le Ministère de l'Enseignement Supérieur. Seule solution pour reconnaître à leurs justes valeurs, et de manière intelligente et cohérente, nos trois années d'études, mais aussi l'envie d'avancer, l'évolution de carrière, le statut d'étudiant, l'engagement associatif et contribuer à l'attractivité de la formation.

Ce rêve est si réalisable ! Tous les outils existent déjà et toutes les questions ont une réponse concrète et adaptée.

La FNESI est Votre fédération. Elle est la seule fédération représentative des étudiants en soins infirmiers (ESI), reconnue comme telle par le Ministère de la Santé. Elle travaille au quotidien, avec sérieux et rigueur, sur les problématiques des ESI, dans le domaine social, celui de la réforme des études, des conditions d'études et de la défense des étudiants, sans oublier celui de la vie associative.

Dans ce sens, nous avons toujours été attentifs à ce que les propositions des étudiants soient prises en compte et nous restons vigilants quant au risque d'une réforme allant à l'encontre de cette évolution naturelle et cohérente.

Associativement vôtre,

Livia LAINÉ, présidente de la FNESI »

Cette lettre ne demande pas plus de recherche, les étudiants considèrent donc la réforme LMD comme une « suite logique de notre formation »3(*)et exige que cette réforme « ouvre la voie de la création d'une filière infirmière universitaire »2(*).

2-2-Les revendications des professionnels

Au départ de cette recherche, un écueil m'est apparu immédiatement : les infirmiers DE sont aujourd'hui en France plus de 470 0004(*) mais aucun organisme n'est encore capable de se revendiquer comme le porte-parole de cette profession. L'ordre infirmier, en cours de réalisation, pourra peut-être permettre de préciser certaines exigences de la profession mais, pour l'instant, il faut se contenter de synthétiser l'ensemble des points de vue exprimés.

2-3-Réalité du soin infirmier d'aujourd'hui

Même si l'histoire de cette profession, marquée par le dévouement, a laissé des traces représentées par des valeurs fortes souvent à l'origine du choix de ce métier, à ce jour, les infirmiers sont surtout mobilisés par la reconnaissance de leurs compétences et de leur professionnalisme.5(*) Profession au carrefour des professions médicales et des autres professions paramédicales elle joue un rôle essentiel dans notre système actuel de santé.

L'infirmier a un rôle d'interface entre la technique, le social, l'éducatif et le relationnel. Il a une vocation de médiation et de coopération basée sur une approche bio-psycho-sociale de la personne soignée.

Ses fonctions de liens sont :

· Fonction d'organisation et de coordination afin d'effectuer les liaisons entre les différents professionnels de santé

· Fonction de relation de l'homme avec lui-même et son milieu

Son champ de compétences s'élargit toujours et il est maintenant un professionnel de l'éducation à la santé utilisant des approches des champs bio-psycho-sociaux, spirituels et éducatifs par un professionnalisme de la communication verbale et non verbale ainsi que des systèmes d'expertise et de polyvalence à la fois.6(*)

Le savoir clinique infirmier prend sa source dans plusieurs champs : la physiologie, la psychologie, la sociologie, l'anthropologie et la psychosomatique. Il associe de nombreuses compétences à ces savoirs :

· Maîtrises techniques

· Compétences relationnelles

· Connaissances du milieu professionnel

· Pratiques entre innovation et codification

· Développement de soi

· Et un rôle de conseil et de supervision de sa propre profession à développer par l'exploration de nouveaux champs comme l'expertise.7(*)

Ainsi, « l'évolution actuelle des pratiques fait évoluer les métiers et notamment celui d'infirmier.»8(*)

2-4-Prérequis à l'évolution de la formation

Un organisme, le CEFIEC (Comité d'Entente des Formations Infirmières et Cadres), a entamé le travail indispensable à l'évolution de la formation infirmière : le référentiel des compétences et des domaines d'activités.

Ce travail a permis à cet organisme d'imaginer des enseignements communs possibles aux professions paramédicales sur :

· La législation

· L'économie de la santé

· L'éthique

· La psychologie

De par cette formation commune on peut alors aussi entrevoir les passerelles possibles en cours de formation. Ces passerelles sont reprises et développées par l'UIPARM (Union Interprofessionnelle des Associations de Rééducateurs et Médico-techniques) lors des concertations pour une inscription des professions paramédicales dans le système LMD (Licence-Master-Doctorat). Ce futur n'est pas encore construit mais l'on peut croire qu'un impact commun à l'ensemble des filière devrait voir le jour et que dans un avenir indéterminé ce type de recherche devrait pouvoir être élargi à l'ensemble du champ de la santé.

2-5-Réforme et attractivité

Depuis plusieurs années, le système de santé doit faire face à une pénurie d'infirmiers. Un taux de non-remplissage des écoles sans cesse croissant entraîne avec l'abandon en cours de formation un déficit supérieur à 30% depuis les années 2000 par rapport aux quotas prévisionnels.9(*) La logique comptable ne suffit pas à faire face à la pénurie et les exemples des infirmières recrutées dans la CEE comme du rappel des « jeunes » retraités le montrent bien car ils n'ont pas résolu le problème.

Parce que les infirmiers sont indispensables au système de santé, il faut rendre ce métier plus attractif et, sur ce point, professionnels, syndicats et pouvoirs publics sont en accord. On peut alors imaginer que le passage de la formation IDE ( Infirmier Diplômé d'Etat) au système LMD puisse être un des leviers de cette attractivité par la reconnaissance de cette profession à un niveau universitaire européen en adéquation avec les accords de Bologne.

2-6-Réforme et VAE

Je ne pouvais pas discuter de cette universitarisation sans aborder l'antithèse de la formation initiale : la VAE (Validation des Acquis de l'Expérience). Les domaines de la santé étant les plus porteurs de certifications10(*), il me semble que la question de la VAE comme frein ou moteur de la réforme doit être posée.

Si l'on reste dans le modèle français où le diplôme a valeur immédiate sur le marché du travail, c'est donc la qualification basée sur la formation et le diplôme qui a cette valeur11(*) et la VAE serait alors un frein puisque l'exercice ne pourrait se faire sans le diplôme.

Si l'on privilégie les compétences et la reconnaissance des aptitudes et des expériences individuelles, la VAE semblerait alors être plutôt moteur de cette réforme en utilisant chacun des professionnels en place pour réorganiser la formation en adéquation avec la réalité du terrain. Etant donné « le glissement sémantique actuel de la qualification aux compétences »12(*)il faut penser que la VAE devrait aider l'évolution perpétuelle de la formation et devrait donc pouvoir s'inscrire également dans le processus de passage au système LMD.

2-7-Une voie pour l'avenir : la recherche en Soins Infirmiers

« Sommes-nous prêt à accepter la suprématie de l'esprit, de la pensée, du savoir, dans un secteur où jusqu'ici la position, le grade, confèrent l'autorité? »

Marie Odile Galant, Directeur des Soins, Coordinateur des IFSI, CHU de Nantes

L'universitarisation est un mot complexe pour une notion floue qui a permis de fédérer la profession infirmière dans les espoirs d'une filière universitaire motion Soins Infirmiers.

En 2004, lors de la conférence des présidents d'université, le ministre de l'éducation nationale réaffirme sa volonté « d'ouvrir le chantier de l'application de la démarche LMD aux formations du secteur santé ». Il insiste sur le fait qu'il lui semble parfaitement possible « de conjuguer formation professionnalisée et initiation à la recherche ».

La recherche en soins infirmiers pourrait permettre « d'enrichir le grand chantier de la santé publique d'un apport infirmier » 13(*)et il faut donc voir l'universitarisation comme « une ambition et un moyen »14(*) et non pas comme une fin en soi. Le passage à cette universitarisation peut avoir des conséquences non seulement pour la profession mais aussi pour la société car elle changera les représentations des pratiques de soins, par là-même engendrant la transformation de leur place dans notre société par un regard renouvelé sur la santé. Pourtant, la question se pose aujourd'hui en termes de « divergence entre des diplômes de pratique et des diplômes académiques »15(*) alors que la profession doit s'engager dans un travail personnel surtout dans les champs de l'enseignement et de la recherche et, plus largement, des sciences sociales intéressées par le développement des soins infirmiers.

Si certains pensent que ce passage peut « aider à forger les aptitudes au changement, stimuler ce qu'on appelle la réflexivité, le questionnement sur l'ordre établi », c'est un grand chantier qui s'ouvre et qui est à investir par la profession infirmière tout d'abord comme « celui de la formation des enseignants et chercheurs dont elle a besoin pour établir cette fameuse discipline ».13(*) « Ce chantier oblige à affronter la tension qui ne peut que surgir entre les infirmières qui dispensent les soins et celles qui pensent ».16(*)

Alors pourquoi produire des savoirs infirmiers ? Pour faire entendre une voix méconnue mais spécifique, voix qui n'est pas entendue aujourd'hui dans les reconfigurations en cours des politiques de santé par difficulté de se faire entendre. Parce qu' « un jour est venu où la vérité s'est déplacée de l'acte (...) d'énonciation, vers l'énoncé lui-même »17(*), l'émergence d'une discipline universitaire nouvelle devrait permettre une meilleure compréhension des soins offrant « une réelle opportunité pour les usagers dans la mesure où la qualité des soins ne pourrait qu'être optimisée ».18(*)Cette discipline pourrait s'appuyer sur « trois principes, l'universitarisation, la professionnalisation et avec la VAE la personnalisation ».16(*)

2-8-Le rapport du gouvernement

Suite à une longue attente de plus d'un an, l'Inspection Générale des Affaires Sociales (IGAS) et l'Inspection Générale de l'Administration, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche (IGAENR) ont remis leur rapport le 8 octobre 2008 sur l'évaluation de l'impact du dispositif LMD sur les formations et le statut des professions paramédicales19(*).

Après lecture de celui-ci, je me suis glissée dans la peau de tous ceux qui s'étaient exprimés avant pour en faire une approche critique relative aux attentes de tous les auteurs professionnels actuels de ce sujet.

J'ai ainsi repris les aspects positifs comme les négatifs en récapitulant et synthétisant les points qui me paraissaient importants. Vous retrouverez ces aspects en annexe n°1.

3-Analyse

3-1-Questions de départ

Ma question de départ se portait plutôt sur la volonté ou non d'une réforme de la part des infirmières. Après l'étude des écrits de la profession, il s'avère que cette question n'a plus lieu d'être puisque que la réforme est en marche. En exergue à cette question, une autre s'est révélée sur l'évolution de la profession.

Je n'aborderais pas le point de vue médical ici car la compréhension entre le médical et le paramédical me semble trop difficile à aborder sans avoir les moyens de l'approfondir suffisamment étant donné le niveau de recherche où je me situe.

Cependant, il existe sûrement une variable que je ne peux prendre en compte en ne m'attachant que sur les écrits professionnels : ceux qui s'y expriment ne sont pas ceux qui vivent la pratique au quotidien. Pour conceptualiser le soin, il faut se donner les moyens de prendre du recul et donc de se positionner dans une approche différente de ceux qui exercent sans forcément réfléchir au pourquoi et au comment, de pouvoir se dégager du temps et in fine d'entrer dans la skholè.

A mi-chemin entre l'infirmière de terrain de celle qui cherche à conceptualiser les pratiques de par mon projet professionnel d'enseignement qui explique ce travail aujourd'hui, je ne suis pas neutre dans cette recherche mais mes acquis me permettent un engagement prégnant pour entrer dans le cadre de référence des problématiques concernées.

Parce que je veux aller plus loin dans la théorie, essayer de comprendre et affiner les comportements, je souhaite confronter le terrain et l'explication compréhensive du monde social.

Quel avenir se dessine aujourd'hui pour les infirmiers par le biais de la réforme de leurs études ?

La recherche est-elle l'instrument prépondérant désiré par les infirmiers pour leur permettre d'être acteurs de l'évolution de leur profession ?

3-2-Méthodologie

Etant donné la richesse pressentie du matériel des réponses, j'ai préféré utiliser une méthode qualitative par un recueil de données effectué par entretiens. Pour cela, j'ai choisi l'entretien compréhensif20(*) pour me permettre de faire une analyse critique de ce que me diront les praticiens en leur permettant, par une écoute attentive et une prise de distance, de s'engager dans leurs réponses afin d'explorer plus avant les concepts de départ. Utilisant en grande partie les techniques de l'entretien semi-directif21(*) ces entretiens ont pour but une vérification de l'évolution de la profession infirmière telle qu'annoncée vers la recherche et un approfondissement de la répercussion de l'universitarisation de cette profession sur son avenir.

Le guide d'entretien que j'ai utilisé n'a été qu'un guide et les entretiens se sont déroulés au gré du récit de la personne interrogée certains demandant de l'aide pour mieux s'exprimer d'autres parlant sans difficulté ni besoin d'aiguillage autre que le thème abordé (cf. annexe n°2, guide d'entretien).

Afin de ne pas être reçue comme un poids supplémentaire à la charge de travail et en accord avec les hiérarchies des personnes interrogées, j'ai préféré me présenter directement sur les lieux de travail pour y effectuer les entretiens.

Le choix des différents lieux s'est fait au mieux des locaux présents avec le souci d'une recherche de calme et de distance du travail en lui-même.

Deux entretiens ont été réalisés hors du lieu de travail car les professionnels étaient dans un exercice à domicile.

Dans la mesure du possible j'ai essayé d `éviter les faces à faces par un positionnement de biais afin de ne pas être dans la confrontation mais plutôt dans l'écoute de l'autre. De la même manière, la distance d'avec mon interlocuteur était de préférence en-dessous du mètre, pour ne pas empêcher le mode de la confidence qui me paraissait parfois à même de m`apporter des réponses plus riches.

Ma présentation personnelle a été celle d'abord d'une infirmière seule capable de donner confiance aux autres infirmières selon l'ensemble de mes collègues directes interrogées : les 14 infirmières interrogées ont répondu qu'elles faisaient confiance à une infirmière ce qui n'aurait pas été systématiquement le cas si j'étais étudiante car peu crédible

Le partenariat avec l'université me permettait de présenter mon sujet sans avoir à l'expliciter car il s'inscrivait directement et naturellement dans cette association infirmière-université. J'ai décidé de parler d'une recherche auprès des praticiens pour faire entendre leur voix qui n'est la plupart du temps pas prise en compte car plutôt citée à titre d'exemple et/ou d'illustration. Cette présentation étant ambitieuse, je me suis située comme une professionnelle soucieuse de redonner la parole à notre profession en utilisant le biais de ma formation actuelle pour soutenir ma légitimité et capacité à mener cette étude à bien.

J'ai arrêté le nombre d'entretiens à 7 réalisant que la diversité des professionnels ne venait absolument pas des lieux d'exercice mais des professionnels en eux-même, tous à la fois uniques, complémentaires et possédant une identité professionnelle commune.

Pour ne pas rendre la lecture de la synthèse trop lourde et fastidieuse, je l'ai rédigée comme un récit retranscrivant uniquement ce qui pouvait étayer, dans le corps du texte, sans forcément citer le professionnel ayant exprimé tel ou tel phrase quand la pensée était commune à tous. Les citations des professionnels sont entre guillemets et en italique pour mieux les distinguer. Je n'ai pas retranscrit les entretiens dans leur ensemble mais j'ai réalisé une image des professionnels rencontrés en essayant de les représenter le plus fidèlement possible à travers ce qu'ils m'avaient eux-même renvoyé lors de leur entretien ( cf. annexe n°3). Cette image, plus parlante qu'un monologue ou qu'un dialogue, permet de mieux appréhender la synthèse.

Choisissant de garder le récit comme fil conducteur de la synthèse j'ai volontairement omis les présentations sous forme de tableaux y préférant le texte, plus explicite sur ce sujet à mon sens. Etant effectivement passée par le tableau pour regrouper les réponses par items, je me suis rapidement détournée de celui-ci pour plutôt tenter de déchiffrer le sens réel de ce qui m'était livré avec autant de sincérité et de clairvoyance que possible. J'ai donc procédé à des écoutes répétées jusqu'à presque connaître par coeur les entretiens pour pouvoir redonner ce qui m'a semblé être le plus proche possible de ce que les professionnels ont voulu exprimer.

3-3-Terrain

L'échantillon s'est établi assez naturellement en fonction des disponibilités de chacun des professionnels qui ont bien voulu me répondre et je les en remercie encore une fois ici.

Pour parvenir à un balayage de l'ensemble des professionnels, j'ai choisi de les interroger selon leur lieu d'exercice :

· Un service de médecine au CHU

· Un service de réanimation chirurgical au CHU

· Des exercices à domicile

· Un service d'urgences d'un hôpital des armées

Au sein de ces lieux, le choix de la (des) personne(s) interrogée(s) s'est fait au hasard de la présence sur les lieux et de la disponibilité pour me répondre. Je n'ai donc le récit que des infirmiers volontaires pour ces entretiens.

Un premier écueil est apparu lorsqu'il a fallu commencer les entretiens : la hiérarchie infirmière demande beaucoup de justification pour pouvoir atteindre l'IDE en elle-même. Cette découverte, alors que je suis moi-même infirmière, peut sûrement être une première réponse à la question suivante : pourquoi les infirmiers s'expriment-ils aussi peu sur leur profession ?

Ensuite, j'ai aussi découvert une profession à bout de souffle dans une taylorisation de son travail, lui donnant l'impression d'être aux limites possibles de ses capacités avec le sentiment de faire de la productivité dans un domaine où elle aimerait prendre son temps. De nombreux services n'ont pas pu détacher la vingtaine de minutes que durait mon entretien par défaut de personnel que cela soit dû à des arrêts maladie non remplacés comme à un manque perpétuel dû à une impossibilité d'embauche de par l'absence même d'IDE sur le marché du travail.

Dans cette ambiance où une profession souffre du manque, l'attractivité revendiquée dans cette réforme semble effectivement être vitale pour que les soins puissent continuer d'être assurés avec le niveau de qualité requis.

Cet état de fait peut également être une explication au peu de recul qu'ont les professionnels sur leur pratique et le peu de conceptualisation fait au sein même des différentes structures puisque je n'ai retrouvé aucun temps institutionnel pour échanger sur les pratiques et la profession en elle-même.

3-4-Synthèse des entretiens

Alors que le premier entretien réalisé me donnait l'enthousiasme du fondement de ma question de recherche, au travers de réponses extrêmement similaires à celles que j'aurais pu moi-même donner, les autres m'ont beaucoup plus bousculée, remettant en question l'ensemble des hypothèses construites durant la revue de la question.

Pour comprendre ce qu'ils ont voulu me dire sans pour autant remettre en question la véracité de leurs propos j'ai écouté et réécouté ce que tous ces professionnels m'ont dit.

Une fois imprégnée de leurs propos, j'en ai dégagé des similitudes ainsi que des divergences pour ensuite pouvoir analyser ces réponses.

Une première réalité s'est imposée dès le départ, c'est la connaissance mesurée de la réforme en cours des études menant à leur profession. Quelle que soit l'année d'obtention du diplôme et même pour ceux qui viennent juste de terminer leurs études, la réforme actuelle est vague, floue et ne comporte que des questionnements face à l'avenir sans aucune certitude. Ce manque d'information constaté ne semble pas déranger les professionnels qui me posent peu de questions à ce sujet alors que je me présente comme « experte » en ce domaine. Pourquoi ce déficit de demande sur le sujet ?

Ensuite, il s'avère que les craintes d'une réforme sont palpables puisque les professionnels interrogés mettent leurs attentes sous le même versant que les craintes ; ainsi, lors de l'entretien de Marion, elle me dit : « il y a quand même un petit avantage c'est que les étudiants arriveront et logiquement ils auront déjà eu toute la théorie donc quel que soit le service où ils vont aller ils sont censés être au clair [...]je ne suis pas convaincue du tout. Je pense que je serais beaucoup plus exigeante. » En réalité seuls deux professionnels sur les huit interrogés y voient de réels avantages uniquement sur le plan de la valorisation du diplôme et aucun d'entre eux ne pense que le changement de lieu et de forme ne peut apporter quoi que ce soit à une formation qu'ils jugent déjà exigeante et surtout professionnelle.

Derrière les réponses à mes questions centrées sur la formation ils ont en effet tous été unanimes sur le professionnalisme exigé par eux comme par l'ensemble de la profession : « on risque d'être plus exigeant », on émet des « craintes sur la valeur professionnelle » ou encore plus « qu'ils (les futurs professionnels) se fassent leur pratique au détriment des patients qu'ils vont avoir sous leur responsabilité ».

Les infirmiers ne veulent rien perdre sur leur profession actuelle, bien au contraire, ils ont des attentes multiples et variées : « conserver leur rôle propre » et même « développer notre rôle propre », « reconnaissance », « possibilité de transmettre », « polyvalence » et à la fois « spécialisation », « savoir se remettre en question », « être réceptif », « meilleure maîtrise des gestes », « collaboration avec les médecins », « notre métier évolue »...derrière ces attentes on retrouve un métier en pleine évolution avec différents profils professionnels, des gens différents et se retrouvant pourtant dans l'approche de leur métier qu'ils veulent tous à la mesure de la demande du patient : Dans l'excellence.

Là où ils disent la différence j'ai perçu la ressemblance quand Isabelle me dit « pourquoi pas » à la filière commune puisqu' « on travaille ensemble alors pourquoi pas une base commune », elle dit aussi : « Il faut tout de même les bases » et « il faut se recentrer sur lui (le patient) car il est avant tout un être humain ». Les autres revendiquent tous une spécificité qui ne peut qu'y perdre dans la mise en commun des études et, par la même, la perte de la filière infirmière qui « existe déjà alors pourquoi enlever une filière. »

Ainsi le professionnalisme est présent dans tous les entretiens dans une volonté commune et très forte d'excellence de l'exercice. Tandis que Marie-Hélène met l'accent sur «  la maturité relationnelle et professionnelle pour pouvoir gérer un service ou des étudiants par la connaissance du terrain », Delphine affirme que « la profession a beaucoup évolué, de bénévole volontaire et consacré, on arrive à un métier à part entière que l'on écoute plus avec une meilleure reconnaissance de l'IDE même si ce n'est que bac +2 », Etienne note que « L'infirmier fait plus qu'accompagner le médecin, il est à côté de lui » et Juan Martin n'imagine l'avenir de l'infirmier qu' « à travers la recherche en Soins Infirmiers. »

Ils se rejoignent également tous sur l'importance de la spécialisation de certains infirmiers dans le contexte actuel de l'évolution de la santé pour être en adéquation avec elle : alors que penser de la méconnaissance absolue de la recherche en soins infirmiers à l'exception notable de Juan Martin interrogé dans le cadre de mon entretien test ?

3-5-De l'évolution des pratiques à celle de la formation ou inversement ?

Difficile de parler de l'infirmière d'aujourd'hui sans un petit détour par l'évolution de l'éducation en France. En effet, le terme laïc a été introduit par Ferdinand Buisson dans ses premiers discours sur l'instruction au début du 20e siècle. Aussi il me paraît essentiel de faire ici un petit détour pour pouvoir mieux comprendre ce que peut être l'infirmière laïque dont je parle depuis le début de ce travail. Ce sont sûrement des valeurs communes avec l'éducation qui ont fondé cette infirmière qui « élève et unit les hommes à l'exclusion de ce qui les divise.»22(*)

Ainsi, le parallèle aux réformes actuelles de la filière de l'enseignement ne peut pas être ignoré de par la similitude de métiers axés sur les hommes et leur devenir.

Peut-on imaginer un enseignant n'ayant jamais approché un enfant avant de devenir enseignant dans une école ? Peut-on imaginer une infirmière n'ayant jamais effectué une piqûre avant de se retrouver face au malade à perfuser ?

Le problème de l'enseignement étant plus facilement compréhensible par le public car concernant tout le monde ce détour me permet de mieux vous expliquer le questionnement supplémentaire apparu devant l'expression de professionnels de la santé interrogés : ces professions peuvent-elles se passer de la pratique ?

La réponse semble évidente si la question est formulée ainsi mais pourtant la réalité est bien plus complexe.

Le professionnalisme requis a été prédominant tout au long des entretiens que j'ai effectués et l'indubitabilité de la pratique ne peut être reniée à aucun instant de la parole des infirmiers. Pourtant, la méconnaissance de la recherche en Soins Infirmiers, alors que l'expertise infirmière est pressentie comme une évolution actuelle de la profession, me semble une des clés à décrocher pour tirer le meilleur parti d'une réforme déjà en marche. Conserver la pratique et la « base » pour développer un rôle propre et permettre des évolutions dans le cadre de la VAE est ce que l'on pourrait appeler construire de bonnes fondations mais, pour que la profession continue d'évoluer, il faut plus. Devenir une profession reconnue à part entière, différente et non pas juste complémentaire des professions médicales, c'est le pari qui s'engage aujourd'hui à travers cette nouvelle réforme. Il est temps pour les infirmiers de s'investir plus loin dans la recherche seulement au stade des prémices en France, j'entends par-là non reconnue en dehors de la profession en elle-même.

La réforme sur le système Licence-Master-Doctorat peut ainsi permettre à certains d'entre nous de s'interroger sur leurs pratiques afin de permettre à l'ensemble d'évoluer par une identification à ceux qui réfléchissent et sont issus de la profession. Bien sûr, l'inquiétude actuelle touchant les métiers de l'enseignement ne peut que mettre en garde notre profession contre une trop grande « théorisation » du métier qui reste un métier dont l'intelligence des pratiques est essentielle pour le quotidien des patients qui doivent avant tout se retrouver face à des professionnels de la relation et du soin. C'est dans ce positionnement, qu'à mon sens et à travers de ce qu'ont exprimé les infirmiers interrogés, il faut que cette réforme soit abordée : en luttant pour conserver ce qui fait l'universalité de la profession infirmière tout en permettant à celle-ci de progresser et de continuer son évolution au sein même du champ de la santé.

La recherche en Soins Infirmiers, méconnue des professionnels, est donc un instrument non négligeable pour la profession en elle-même mais elle doit être menée en accompagnant et en améliorant la pratique du métier.

3-6-Imaginer l'avenir

Difficile de prédire ici ce que sera demain alors que rien n'est encore vraiment organisé, alors que les IFSI sont tout juste en train de refondre leurs enseignements sans vraiment savoir ce que sera réellement la formation future. La nouvelle refonte de la formation est désormais en route et les IFSI viennent de rendre compte des nouveautés auprès de l'ensemble des professionnels. (cf. Annexe n°4)

Pour se mettre en accord avec la réforme LMD, la formation infirmière se calquera désormais sur l'année universitaire en suivant son calendrier et en concentrant les stages sur 10 semaines par semestre.

Comme à l'université, les étudiants vont désormais valider des Unités d'Enseignement (UE) donnant lieu à des ECTS (European Credits Transfer System) afin d'arriver à 6 semestres validant une licence.

Une UE de Sciences Infirmières apparaît pour la première fois.

Cette nouvelle formation est donc dans le principe d'une pédagogie par alternance mais sans prendre en compte les besoins en formateurs découlant de cette alternance où la durée des stages augmente alors que leur nombre diminue significativement et sans se demander si les étudiants arriveront à prendre en charge suffisamment leur formation.

La crainte des professionnels est palpable au quotidien dans un contexte de pénurie et de pénibilité du travail pour conserver voir augmenter la qualité de cette formation alors qu'à ce jour le déficit d'IDE grandit et que l'échec des étudiants de première année ne fait qu'augmenter.

Comment conserver la qualité quand l'encadrement ne semble pas suffisant pour effectuer une pédagogie individualisée et progressive adaptée à chaque futur étudiant ?

Ce mémoire étant réalisé au moment d'une actualité brûlante de réformes dans toutes les tranches de l'éducation et de la formation en santé comme en sciences sociales, il est difficile ici d'avoir le recul nécessaire à ce qui pourrait me permettre de me dédouaner de la situation dans laquelle je suis directement impliquée. Pourtant, je ne peux arrêter l'analyse de cette réforme sans un crochet vers les étudiants eux-mêmes.

Je pense donc à tous ceux qui peuvent accéder à des enseignements supérieurs grâce à la proximité des IFSI dans de nombreuses villes et ne pourront faire de même si ces IFSI disparaissent, ainsi que grâce à la rémunération actuelle des stages de 2e et 3e année qui permet à de nombreux étudiants d'arriver au terme de la formation sans trop souffrir financièrement. Devons nous permettre un tel critère d'accès supplémentaire ?

Certains étudiants apprécient grandement le lien fort qui existe entre la théorie et la pratique au sein de la formation actuelle aussi la question suivante se pose-t-elle ici : doit-on calquer complètement la formation infirmière sur le mode universitaire ?

Si l'on en croit Bertrand SCHWARTZ23(*), la formation infirmière serait actuellement le type de formation permettant la réussite par une pédagogie en alternance qui a fait ses preuves quand on voit le professionnalisme affirmé durant le questionnement de ceux qui sont actuellement sur le terrain. Cette formation, loin du schéma classique des études universitaires doit-elle être bouleversée pour l'ensemble de la profession ou ne faut-il pas permettre à ceux qui le souhaitent de continuer leurs études dans une voie universitaire mais seulement à ceux qui le souhaitent ?

La possibilité de devenir doctorant doit-elle être accessible dès le cursus ou ne vaut-il pas mieux que celle-ci soit limitée à des professionnels aguerris qui partent du terrain pour réfléchir sur leurs pratiques ?

Autant de questionnements auxquels la refonte de la formation nous permettra d'ébaucher des réponses, mais sera-t-il trop tard pour orienter cette future formation sur un axe différent ?

Théorie versus pratique, il est difficile d'imaginer qu'une bataille puisse s'engager entre ces deux concepts dans une profession où l'un ne peut exister sans l'autre.

Pourtant des professions arrivent déjà à rester en lien avec les évolutions constantes des pratiques et des techniques et si l'on se réfère aux écoles d'ingénieurs actuelles on peut imaginer que les professions de santé puissent trouver une voie possible à la conciliation entre l'évolution des pratiques et une formation théoriques de qualité.

Le lien pédagogique entre les lieux de formation théorique et ceux de formation pratique doit alors se renforcer et l'on peut imaginer que les professionnels actuels vont mettre en place des outils pour permettre un suivi et un encadrement de qualité répondant à l'exigence de l'ensemble de la profession.

Pour épiloguer sans vraiment pouvoir arrêter un positionnement étant donner la fluctuation palpable de la situation actuelle ; je pense que la profession infirmière doit s'inscrire dans cette nouvelle réforme en développant la partie spécifique des Soins Infirmiers tout en gardant à l'esprit que la formation a réellement besoin de cette réforme. Les pratiques changent et il faut donc rester acteurs de ces changements, ne pas les subir mais plutôt les investir. Sans perdre de vue la volonté prégnante de l'excellence en terme de professionnalisme, il faut laisser le champ théorique se développer tout en permettant aux valeurs primitives de rester les fondements de la profession. L'étendue des possibilités est offerte aujourd'hui alors que la réforme démarre juste. C'est en faisant vivre cette réforme que les solutions permettant l'indispensable adéquation théorie-pratique apparaîtront comme indubitables comme elles le sont actuellement dans les domaines en constante évolution que sont ceux des télécommunications ou de l'informatique. Cette recherche demande donc un peu de temps pour prendre le recul nécessaire à l'existant pour ensuite utiliser plus les parallèles avec d'autres métiers pouvant servir de béquille à une réalisation optimale de ce grand bouleversement dans le champ de la santé qu'est le réforme de la formation infirmière et des autres filières paramédicales.

Conclusion

Durant ce travail, j'ai exploré un nouveau statut, celui d'étudiant-chercheur. Ce statut est parfaitement nommé dans mon cas car j'ai vraiment l'impression d'avoir découvert un monde chargé de questions à explorer. Plutôt que de faire de ma fonction et de mon état d'étudiante salariée un handicap, j'ai choisi, au contraire, de tenter de m'impliquer un peu plus encore au sein de ma profession tout en utilisant les compétences et les nouvelles connaissances acquises. La recherche qui en a découlé m'a accompagnée tout au long de cette mutation d'infirmière à « infirmière-étudiante-chercheur ». Grâce à ce parcours, j'ai pu redonner la parole à une profession muselée par son histoire et un quotidien prenant. Maintenant que je comprend mieux les valeurs communes et le professionnalisme qui caractérisent le métier d'infirmier, il est plus facile pour moi de décrypter les enjeux et les risques d'une telle réforme.

C'est dans le quotidien que l'on a trouvé les réponses et c'est donc bien dans ce même quotidien que l'on perçoit l'infirmier de demain, autonome, responsable, exigeant et compétent. Cet infirmier doit prendre à son compte l'évolution de son métier, connaître l'histoire de son métier pour ensuite pouvoir aborder l'avenir. La voie universitaire peut être un moyen d'évoluer, mais il n'est sûrement pas le seul. L'infirmier ne doit effectivement pas oublier ce qui est la trame de son métier et, pour cela, il doit demeurer plus que jamais fort du savoir-faire et du savoir-être qui sont indispensables à cette profession.

La réforme tant attendue est en train de se profiler et je me vois impatiente de découvrir ce que la profession va en retirer, ne doutant aucunement qu'elle en retirera des bénéfices même s'ils risquent d'être assortis de certains travers. Nous avons ici déjà pu aborder un certain nombre de perspectives futures possible mais l'avenir devrait sûrement permettre d'en dégager d'autres ne serait-ce que par l'évolution future des autres professions de santé actuellement aussi au stade d'avenir plutôt que de présent. Dans cet abord, et de par mon appartenance désormais commune à la profession comme à l'université, je souhaite ardemment continuer la réflexion sur le terrain de la formation infirmière qu'elle soit initiale ou continue. Il me semble que la profession ne peut que gagner à continuer de se questionner.

Qui formera l'infirmier de demain ? La formation restera-t-elle l'apanage des cadres issus de leur fonction professionnelle ?

J'espère que nous pourrons un jour répondre à toutes ces questions et que nous le ferons sans avoir à rougir des réponses données.

BIBLIOGRAPHIE et SITES INTERNET

1.Ouvrages et articles

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· BOUDON Raymond, les méthodes en sociologie, Paris, PUF, 1969.

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· BOURDIEU & CHAMBOREDON & PASSERON & KRAIS, le métier de sociologue : préalables épistémologiques, Paris, Mouton Gruyter, 5e édition 2005.

· CHARLES Geneviève, Les infirmières en France : d'hier à aujourd'hui, Paris, Le centurion, 1979.

· COUDRAY Marie-Ange, CHABOISSIER Mercedes, DUBOYS-FRESNEY Catherine, Profession Infirmière, quel avenir?, Revue Soins Cadres, août 2004, n°51, p29-31.

· Entretien avec Guy JOBERT, Revue Sciences Humaines, mars-avril-mai 2003, hors-série n°40, .

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· FOUCAULT Michel, L'Ordre du discours. Leçon inaugurale au Collège de France prononcée le 2 décembre 1970,Paris, Gallimard, 1971.

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· GHIGLIONE Rodolphe & MATALON Benjamin, les enquêtes sociologiques, théories et pratique, Paris, Armand Colin, 1998.

· JAUNAY Yves, De l'évolution des pratiques à l'évolution des métiers, Revue Soins Cadres, août 2004, n°51, p19.

· KAUFMANN Jean-Claude, l'entretien compréhensif, 2e édition refondue, Paris, Armand Colin, 2007.

· KNIEBIEHLER Yvonne, Cornettes et blouses blanches, Paris, éditions Hachette, 1984.

· LECOURT Anne-Juliette, Me HAUT Philippe, La VAE entre poursuite et inflexion du modèle français du diplôme, Revue de l'IRES, mars 2007, n°55, p32-37.

· MOUNIER Pierre, Pierre Bourdieu, une introduction, ParisPocket, La découverte, 2001.

· OUROUH Fatima, Système LMD, quelle reconnaissance pour les infirmiers? , revue Soins, mai 2007, n°175, p16.

· SCHWARTZ B., moderniser sans exclure, Paris, La Découverte, 1994, 1997

· SCHWEYER François-Xavier, L'universitarisation de la formation en soins infirmiers : les promesses et leurs ombres, Revue Recherche en soins infirmiers, juin 2008, n°93, p120-121.

· ST ETIENNE Mireille, Pour une expertise clinique reconnue en Soins Infirmiers, Revue Soins Cadres, août 2004, n°51, p35.

2.Sites internet

http://conseil-ordre-infirmier-ain.kazeo.com/

www.cadredesante.com

www.cefiec.com

www.icn.ch/french.htm

www.infirmiers.com

www.insee.fr

www.ires-fr.org

www.languedoc-roussillon.sante.gouv.fr

www.paca.sante.gouv.fr

www.sante.gouv.fr

www.sante-jeunesse-sports.gouv.fr/IMG//pdf/rapport_evaluation_impact_dispositif_LMD.pdf

www.travail.gouv.fr

ANNEXES

Annexe n°1

Rapport de l'IGAS et l'IGAERN du 8-12-08

Aspects positifs :

Il s'agit bien d'une reconnaissance d'un niveau de qualification d'exercice des métiers paramédicaux

Il s'inscrit dans les accords de Bologne

La valorisation financière est jugée légitime

La recherche d'attractivité est avancée par le biais de passerelles entre les différentes formations, la mobilité européenne engendrée

La préservation d'un contenu et d'une finalité professionnelle

La conservation des IFSI reconnus comme organismes compétents

L'évitement du phénomène de massification des étudiants par le respect habituel des quotas

La mise en route rapide dès 2009 si le rapport est appliqué

Aspects négatifs :

La supposition d'une demande d'amélioration de l'enseignement prodigué actuellement dans les IFSI

La supposition d'une tendance des niveaux pour les infirmières évoquant l'apparition de nouveaux métiers sans pour autant les évoquer

La supposition que les professionnels n'ont pas de langage ni de culture communs à l'heure actuelle

La volonté de décloisonner les filières médicales des paramédicales alors que les professionnels revendiquent leurs spécificités

La supposition que les professionnels actuels ne font ni recherche documentaire ni analyse de publications (sans évocation aucune des publications autonomes existantes)

L'évocation de la recherche clinique sans parler de la recherche en soins infirmiers

L'impossibilité pour les infirmiers de faire un master recherche car issus d'une licence professionnelle et ne pouvant accéder au doctorat que sur dérogation

L'affirmation erronée du recrutement des étudiants infirmiers alors que la majorité viennent des bacs généraux et de plus en plus des études supérieures24(*)

Le fait que l'admission en master ne puisse concerner « qu'un nombre limité de personnes » et que le grade de docteur serait « d'accès très restreint ».

La perte de la qualification de poste pénible pour la retraite

L'absence de reconnaissance de la pénurie actuelle des infirmiers

Annexe n°2

Guide d'entretien

Après présentation comme infirmière faisant une recherche en qualité d'étudiante à l'université sur la réforme des études infirmières :

Questions d'introduction :

· Année d'obtention du diplôme

· Lieux d'exercice du métier

· Projet professionnel à court et long terme

La réforme LMD (Licence-Master-Doctorat) ou universitarisation de la profession infirmière, pour vous, qu'est-ce que cela signifie ?

ð S'assurer par les relances que les personnes expriment :

· Leurs craintes

· Leurs attentes personnelles

· Leurs attentes sur un plan professionnel.

Le rapport demandé par l'Etat ne préconise pas la séparation des études infirmières des autres filières paramédicales, quels sont les avantages et les inconvénients de cet état de fait ?

ð Expliciter le rapport s'il n'est pas connu.

Dans l'ensemble des revues professionnelles, on retrouve la volonté de création d'une filière spécifique infirmière, que pourrait-elle apporter de plus à la profession selon vous ?

Comment voyez-vous la profession infirmière de demain et quels moyens pensez-vous être nécessaires pour y arriver ?

ð Y introduire les notions d'expertise et de niveaux différents si pas encore évoquées.

Annexe n°3

Présentation des entretiens auprès d'infirmier(e)s DE

Entretien avec Juan Martin le 7-11-08, 17mns :

J'ai reçu Juan Martin chez moi, un après midi à 16h sur un de ses jours de congés. Cet entretien était celui qui devait valider ou invalider mon guide aussi cet infirmier qui travaille dans un service d'hospitalisation à domicile est-il un professionnel déjà connu sur un plan personnel. Il est jeune diplômé d'avril 2008 et son premier poste est celui-ci depuis juste quelques mois.

Sur un plan professionnel il a, pour l'instant, surtout des projets à court et moyen termes et, même si l'avenir professionnel lui semble plein d'opportunités, il ne sait pas encore avec précision vers lesquelles il se tournera réellement.

Il se présente comme un garçon plein d'espoir pour la profession et avec une volonté réelle de s'inscrire lui-même dans l'évolution de cette profession.

Entretien avec Marie-Hélène le 15-01-09, 14mns :

Profitant d'une accalmie relative d'un service de réanimation chirurgicale du CHU de Bordeaux, j'ai rencontré Marie-Hélène, pilier du service dans lequel elle exerce depuis 8 ans, alors qu'elle prenait un peu des temps libre engendré par des départs de patients non encore remplacés. Elle occupait ce temps libre à la lecture de texte en lien avec son projet actuel de faire l'école des cadres afin de devenir Cadre de Santé dans un service. C'est donc au départ de sa prise de fonction à 15h que j'ai pu entendre ses opinions sur le temps qu'elle a bien voulu m'accorder.

Venant d'une expérience riche et variée tant sur un plan géographique que disciplinaire, elle m'a fait part de son inquiétude sur l'avenir de la profession à travers les changements existants au sein de la société et engendrant eux-mêmes une évolution des pratiques des jeunes diplômés, « plus exigeants » selon ses dires.

Entretien avec Marion le 15-01-09, 12mns :

Rencontrée à la suite de Marie-Hélène elle en paraît l'opposé par sa timidité, sa jeunesse et ses incertitudes. Jeune diplômée de 2005, elle a un projet unique de devenir IADE pour rester dans le domaine qu'elle connaît à l'heure actuelle et où elle exerce depuis son diplôme : la réanimation.

Malgré cet abord d'une fragilité apparente, elle affirmera sa volonté tout au long de l'entretien de garder le niveau d'excellence actuel de notre profession notamment par l'exigence de réussite et de connaissances pratiques comme théoriques des étudiants qu'elle rencontrera durant sa carrière et ce quel que soit le mode de formation à venir.

Entretien avec Delphine le 30-01-09, 13mns :

Sa journée de travail était finie quand Delphine a gentiment accepté de me répondre et une fois l'entretien fini elle m'a affirmé l'intérêt qu'elle trouvait à ce que les infirmières puissent avoir un temps de recul institutionnalisé afin de pouvoir réfléchir sur leurs pratiques car cet entretien lui avait permis de se poser des questions sur des thèmes qu'elle n'aurait peut-être pas envisagés autrement.

Cette infirmière toute jeune mais affirmée n'a pas de projet professionnel autre que d'apprécier son statut actuel dans le service de médecine vasculaire où elle exerce pour l'instant depuis les quelques mois qui la séparent de l'acquisition de son diplôme en décembre 2008.

Avec son accent du sud-ouest c'est avec toute la conviction de son tout récent statut d'infirmière qu'elle me racontera les bienfaits de la spécialisation de notre filière infirmière permettant l'amélioration des pratiques au quotidien.

Entretien avec Armelle le 2-02-09, 16mns :

Diplômée en 2001 à Lille, Armelle a d'abord travaillé en médecine cancérologie pendant 4 ans avant de vouloir travailler avec les enfants après deux séjours à l'Envol, association pour les vacances des enfants atteints de maladies chroniques. Elle a donc intégré un séjour de cancérologie pour les enfants à Bordeaux pendant 10 mois et s'est ensuite tournée vers le travail à domicile devant la difficulté de ce service depuis 3ans ½ . Elle pense aujourd'hui revenir vers les enfants via le travail à domicile.

Pleine de doutes mais aussi remplie de convictions profondes cette infirmière est persuadée que la remise en question au quotidien est la condition sine qua non à l'évolution de chacun pour que tous ensemble nous puissions permettre à notre profession de grandir et progresser.

Entretien avec Etienne le 6-03-09, 13mns :

Depuis son diplôme en 1999, Etienne s'est spécialisé dans la réanimation et les urgences où je l'ai retrouvé sur son lieu de travail qu'il a conservé depuis la fin de ses études. Des urgences un peu à part puisque au sein de l'armée et donc de la médecine militaire. Infirmier techniciste et investi, il souhaite pouvoir acquérir une plus grande autonomie dans le cadre de son exercice via la spécialisation. Conscient de l'importance des enjeux d'une réforme comme celle qui se profile, il souhaite ardemment que la profession dans son ensemble en tire le meilleur profit.

Entretien avec Isabelle le 6-03-09, 9mns :

Se présentant comme une infirmière « banale », diplômée depuis 1992 sans un parcours extraordinaire, avec plusieurs services spécialisés de chirurgie puis des urgences et une ancienneté d'1 an ½ dans son service actuel, Isabelle n'impressionne pas. Pourtant, en toute simplicité, avec douceur et tact, elle m'engage dans son histoire professionnelle où l'importance de la relation prend toute son ampleur. Inscrite dans l'importance du rôle propre elle exprime ce qui est l'essence de notre métier : le soin. Empreinte de ce concept elle renvoie la formation infirmière à une pratique indispensable que cela soit sur le plan relationnel comme sur celui des actes de soin. Pourtant, forte de tout cela, un engagement de l'ensemble de la filière paramédicale au sein de l'université ne lui semble pas être un obstacle à la réalisation de ce professionnalisme.

Annexes n°4

Réforme 2009 IFSI

(Instituts de Formations en Soins Infirmiers)

Ou « réingenerie » de la formation en Soins Ifirmiers

Depuis la loi du 17 janvier 2002, la certification avec la VAE a ouvert une nouvelle voie d'accès aux diplômes et les accords de Bologne en 1998 ratifiés à Bergen en 2005 ont confirmé la volonté d'entrée dans une politique européenne de mobilité des professionnels de santé à l'instar des autres professions issues de l'université à travers les ECTS (European Credits Transfer System).

L'enjeu de la réforme 2009 est le maintien de la formation infirmière dans un cadre législatif avec des garantis de connaissances et de savoir-faire tout en respectant la réforme LMD universitaire.

Les principes d'exercice professionnel soumis à un diplôme d'Etat sont respectés à travers un diplôme attestant des compétences tout en offrant des possibilités de passerelles entre les différentes formations paramédicales et les différents pays de la communauté européenne.

Le référentiel de formation sera donc fonction du référentiel d'activités et de celui de compétences à acquérir.

Les compétences seront uniquement validées par des activités donc l'analyse pratique sera indispensable à l'acquisition de ces compétences obligeant les étudiants à réfléchir sur leur pratique.

On peut considérer que par ce biais la clinique infirmière pourra être valorisée.

En pratique :

La formation sera calquée sur l'organisation universitaire de septembre à juin avec les congés universitaire (noël, février, printemps et été) avec 2 semestres par an pour un total de 6 semestres pour la formation.

L'étudiant doit être acteur de sa formation.

L'accent est mis sur les compétences dans une pédagogie en évolution sans pour autant mettre de côté les savoir-faire.

Quelques UE à retenir ou à oublier pour en retenir surtout le contenu :

o Sciences contributives = Sciences humaines, sociales et droit ( psychologie, anthropologie, sociologie, législation, éthique...) avec les Sciences biologiques et médicales.

o Sciences constitutives que sont les Sciences Infirmières.

o Unités d'intégration pour les avoirs et postures infirmiers où s'intègrent les stages professionnels.

o Unités de méthodologie et savoirs transversaux avec l'apparition des TIC (techniques d'information et de communication) ainsi que de l'anglais professionnel.

Les stages auront lieu à raison de 1 stage par semestre.

Leurs durées seront de 5 semaines pour le 1er semestre puis de 10 semaines pour les semestres suivant pour atteindre enfin 15 semaines non consécutives pour le dernier semestre.

Ces stages seront avant tout des lieux de professionnalisation sur une base de 35h par semaine.

Pour la réussite de ces stages, une charte d'encadrement est en cours d'élaboration entre les établissements de soins et les IFSI.

L'organisation de ces stages se fera à travers des professionnels désignés comme tels et prenant la charge de :

o Maître de stage responsable avant tout de l'organisation et de la coordination avec le centre de formation

o Tuteur de stage avec la responsabilité pédagogique des étudiants sur les lieux de stage exercée par le biais d'entretien

o Professionnel de proximité pour la pédagogie du quotidien

Les questions posées à la suite de la présentation de cette réforme ont été non seulement pragmatiques permettant de rassurer l'ensemble de l'assistance sur la qualité de la formation future mais aussi plus générales montrant de réelles craintes des professionnels présents.

Le problème de la pénurie actuelle ainsi que de la pénibilité du travail ont été abordés posant directement la question de la qualité de l'encadrement de ces futurs étudiants alors que la difficulté existe déjà pour des stages ayant une durée et un engagement moindre pour les professionnels.

La validation des acquisitions des compétences n'est pas très claires actuellement sur la synthèse de ces différentes compétences et l'ensemble des professionnels présents souhaite rester vigilant sur ce point qui semble essentiel pour le futur de la profession. Des compétences pourraient ainsi être validées dans un stage mais non dans un autre, quid de la validation de ces acquisitions à terme ?

La question de l'attractivité a également été abordée à la fois du côté de la peur de perdre certains étudiants moins scolaires mais possédant les valeurs requises de la profession comme du côté économique de par la rémunération actuelle des stages ou la non-valorisation des salaires actuelle.

Index

CHU (Centre Hospitalier Universitaire) p22

DE (Diplôme d'Etat) p10, 14, 16, 22, 23, 24 et 27

ECTS (European Credits Transfer System) p11, 13 et 27

IFSI (Institut de Formation enSoins Infirmiers) p13 et 26

LMD (Licence-Master-Doctorat) p11, 13, 14, 16, 18 et 26

UE (Unités d'Enseignement) p13 et 27

VAE (Validation des Acquis par l'Expérience) p17, 19 et 26

* 1 Bourdieu P, Chamboredon JC, Passeron JC, Krais B, Le métier de sociologue : préalables épistémologiques, Paris, Mouton de Gruyter, 5e édition 2005, p24.

* 2 Kniebiehler Yvonne, Cornettes et blouses blanches, éditions Hachette, Paris, 1984.

* 3 Ourouh Fatima, vice présidente représentation FNESI, revue Soins n°175, mai 2007, p16

* 2

* 4 Source INSEE juillet 2008

* 5 cf. Coudray, Chaboissier, Duboys-Fresney, Profession Infirmière, quel avenir?, Revue Soins Cadres n°51, août 2004, p29-31.

* 6 cf. Coudray, Chaboissier, Duboys-Fresney, Profession Infirmière, quel avenir?, Revue Soins Cadres n°51, août 2004, p29-31.

* 7 cf. St Etienne M., Pour une expertise clinique reconnue en Soins Infirmiers, Revue Soins Cadres n°51, août 2004, p35

* 8 Jaunay Y., De l'évolution des pratiques à l'évolution des métiers, Revue Soins Cadres n°51, août 2004, p19

* 9 DREES - Enquête auprès des centres de formation aux professions de santé 2004, ADELI et INSEE - Estimations localisées de population.

* 10 DARES-2008-34.1 -les candidats à la VAE : majoritairement des femmes recherchant une certification dans le secteur sanitaire et social.

* 11 Lecourt A.J., Me Haut P., La VAE entre poursuite et inflexion du modèle français du diplôme, Revue de l'IRES, n°55, mars 2007.

* 12 Entretien avec G. Jobert, Revue Sciences Humaines, hors-série n°40, mars-avril-mai 2003.

* 13 Schweyer F.X., Revue Recherche en soins infirmiers n°93, juin 2008, p120

* 14 Schweyer F.X., Revue Recherche en soins infirmiers n°93, juin 2008, p121

* 15 Acker F., Revue Recherche en soins infirmiers n°93, juin2008, p123

* 13

* 16 Acker F., Revue Recherche en soins infirmiers n°93, juin2008, p124

* 17 Foucault Michel, L'Ordre du discours, Paris, Gallimard, 1971, p. 15-18.

* 18 Galant M.O., Revue Recherche en soins infirmiers n°93, juin 2008, p126

* 16

* 19 http://www.sante-sports.gouv.fr/IMG//pdf/rapport_evaluation_impact_dispositif_LMD.pdf

* 20 Kaufmann J.C., l'entretien compréhensif, 2e édition refondue, Armand Colin, Paris, 2007.

* 21 Ghiglione R. & Matalon B., les enquêtes sociologiques, théories et pratique, A. Colin, Paris, 1998.

* 22 BUISSON F., la foi laïque, Paris, Hachette, 1912.

* 23 SCHWARTZ B., moderniser sans exclure, Paris, La Découverte, 1994, 1997.

* 24 DRASS PACA, info-stat n°3, novembre 2006 et DRASS info Languedoc-Roussillon n°43, juin 2007.






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"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo