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Crises, réformes économiques et pauvreté en Haiti. Des perspectives ouvertes par les cadres strategiques de réduction de la pauvreté

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par King Pascal Pecos Lundy
Institut Universitaire d'étude du développement / Université de Geneve - DEA en Etudes du Développement 2003
  

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CHAPITRE IV: CONSIDERATIONS SUR LA LUTTE CONTRE LA PAUVRETE EN HAÏTI

« Il n'existe pas de formule simple et universelle pour passer à l'action. Les pays en développement doivent déterminer eux-mêmes les mesures les plus appropriées pour réduire la pauvreté, compte tenu des priorités nationales et des réalités du terrain. »

Banque mondiale, Rapport sur le développement dans le monde

2000/2001 : combattre la pauvreté, Editions Eska, Paris, 2001

Aujourd'hui on fait le constat d'une situation économique très déprimée en Haïti. Ce constat révèle un pays marqué particulièrement par des indicateurs sociaux alarmants, un faible développement humain, d'importants déséquilibres macroéconomiques et spatiaux, des inégalités criantes, un environnement complètement dégradé, le tout couplé à des perturbations politiques incessantes. La question fondamentale devrait se rapporter à celle-ci : Comment sortir le pays de la spirale de cette pauvreté qui

se manifeste dans toutes les sphères de la société et qui ne cesse de le ronger depuis tantôt deux cents

ans d'existence ?

Sur les trente dernières années, malgré la multiplication des interventions des acteurs de développement pour résorber la situation de marasme, le niveau socio-économique des gens, contrairement aux objectifs de ses interventions, s'est considérablement détérioré. Ces interventions, mises en place à travers soit des grands projets de développement régional d'organismes publics, soit des projets d'organisations non gouvernementales ou des initiatives ponctuelles d'organisations caritatives ou religieuses, ont toutes montré leurs limites. Au-delà de leurs effets et impacts limités, il

y a lieu de s'interroger sur les secteurs et mesures prioritaires à prendre dans le cadre de la lutte contre

la pauvreté. Sans vouloir négliger les autres secteurs, et pour des raisons que nous tenterons de justifier, l'accent n'est-elle pas à mettre sur le développement rural ?

1 DE L'ELABORATION DU CADRE STRATEGIQUE : QUELQUES OBSTACLES A SURMONTER

Les stratégies nationales de pauvreté font actuellement défaut. Les principaux éléments de stratégies dérivent des déclarations générales de politique des premiers ministres, des politiques sectorielles des différents ministères (agriculture, santé, commerce, éducation,...), et des stratégies sectorielles, des documents de projets et autres documents rédigés par les institutions internationales de financement,

les agences de coopération, d'organisations non gouvernementales, d'associations socio-

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professionnelles. La Banque mondiale, le PNUD, l'USAID sont particulièrement actifs. Les politiques macro-économiques sont déterminées dans les lettres d'intention destinées et agrées par le FMI. La priorité des pouvoirs publics serait de chercher à harmoniser et intégrer l'ensemble de ces stratégies dans le cadre des politiques de réduction de la pauvreté. Ce qui revient à élever le niveau de cohérence entre les différentes sources de formulation de politiques et de stratégies nationales.

De nombreux éléments peuvent jouer en défaveur de l'élaboration du cadre stratégique de réduction de

la pauvreté en Haïti. Ils constituent des contraintes importantes qui ne peuvent que miner la concertation requise pour son élaboration. Nous avons essayé de mettre l'accent sur quelques-unes d'entre elles.

i) La méfiance vis à vis de l'Etat

En ce qui a trait à la participation effective de la société civile (groupe de base, organisations paysanne, etc.) le climat de méfiance qui existe au sein de la population n'offre pas les bases requises.

Il faudra à l'Etat de traduire cette volonté en acte quand on sait que celui-ci est perçu comme prédateur, et « source d'insécurité et d'appauvrissement pour la société civile »82 . La situation a peu évolué depuis la mission de la restauration de la démocratie de l'ONU. Pour bon nombre d'observateurs, depuis 1994, date marquant le retour à l'ordre constitutionnel, l'autorité publique est quasi-absente, la population manifeste peu de confiance dans l'Etat.83 Comment rétablir le climat de confiance indispensable à la participation des différents acteurs dans la conception du stratégie nationale anti-pauvreté quand les citoyens - notamment les paysans et les ouvriers - ne se sentent pas pris en compte par leurs dirigeants ?

Il est difficile d'esquisser une démarche concrète des paysans à l'établissement de cette stratégie. Cette participation doit aller au-delà des convocations habituelles qui réunissent dans quelques centres urbains les dirigeants d'organisations venus valider des options préalablement établis par les preneurs

de décisions de la capitale. Malgré que certaines structures institutionnelles font encore défaut dans le

milieu rural, de nombreuses organisations paysannes, ayant déjà fait leur preuve, ont développé leur autonomie. Ils constituent des acteurs incontournables, qui sont à différencier des ONG et d'autres développeurs qui quadrillent ce milieu, en mesure de contester ou de menacer les droits économiques

et politiques des dominants.

Dans un cadre plus général devant permettre à la communauté de participer pleinement à ces programmes et d'exercer un contrôle sur le développement, il faudra en pus de concevoir des

82 OPL, ibid., p.41.

83 « Restaurer l'autorité de l'Etat » figurait comme l'un des objectifs prioritaires définis par M. René Préval lors de son accession à la présidence du pays en 1996.

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structures administratives appropriées, mais aussi, d'instaurer un climat politique généralement favorable à la participation démocratique.

ii) Contraintes techniques et financières

Les difficultés techniques et financières constituent des contraintes majeures à relever. Au niveau technique, la préparation des différentes consultations à l'échelle nationale nécessite un certain apprentissage (par exemple pour rédiger le document suivant le canevas défini) qui jouera en défaveur

du temps imparti à la réalisation du document. Les maigres capacités techniques dont dispose l'Etat ne

peuvent pas être concentrées uniquement dans ce processus au détriment de l'administration publique.

Ce qui équivaudrait à engager des ressources supplémentaires qui augmentera la charge financière du processus.

Le cadre stratégique constitue, dans son élaboration et ses implications, un outil plus complexe par rapport aux instruments des politiques d'ajustements structurels, lesquels concernaient beaucoup plus

la banque centrale et le Ministère de l'économie et des finances. Nonobstant la présence de quelques cadres qualifiés, il se pose le problème de l'efficacité des administrations, qui sont pour la plupart désorganisées. Il ne sera pas toujours évident de dégager les capacités locales pour concevoir, appliquer et suivre le Cadre stratégique national.

La réalisation du document risque de se faire dans un temps record dans la perspective de bénéficier le plus rapidement des financements des bailleurs. L'autre risque serait d'adapter le document d'un autre pays sous prétexte de caractéristiques similaires. L'obtention des données sur ce laps de temps n'est pas non plus évidente. Dans ces pays, la disponibilité des informations statistiques fait énormément défaut et, quand ces informations existent, elles sont loin d'être fiables et contiennent d'énormes lacunes. Or, l'analyse et les recommandations seront en partie établie à partir de ces données. Que faire ? Il y va des indicateurs qui seront retenus et de la manière qu'ils seront construits.

De ceci découle le problème du suivi et de l'évaluation des politiques qui seront retenues. Il est à relier

à la faible capacité de gestion des administrations publiques qui continuent à perdre leurs cadres et cette perte ne se fait pas au profit du secteur privé vu que secteur en pâtit aussi. Pour des raisons à la fois économique et politique, les différents professionnels sont de plus en plus touchés par le phénomène de la migration qui affectait auparavant le milieu rural. Aujourd'hui, c'est l'ensemble de la population qui est affecté par ce virus. De récentes enquêtes montrent que plus d'une personne sur deux serait prête à laisser le pays si elle en avait la possibilité. Or, pour les pays du Sud, comme le fait remarquer Christian Chavagneux, le suivi à long terme des politiques locales anti-pauvreté suppose que ces pays, soit disposent d'une administration efficace, soit bénéficient d'une aide technique

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conséquente et efficace, à même d'encadrer des politiques sectorielles sur une longue durée. Deux conditions qui ne semblent pas être remplies pour le moment en Haïti..

iii) Faiblesse des capacités d'analyse de la pauvreté

Le problème d'analyse statistique se rencontre à la fois en amont et en aval du Document stratégique

de réduction pauvre. En amont, les enquêtes de conditions de vie des ménages et notamment les données désagrégées par genres font défaut. En aval, les pays rencontrent des difficultés financières et budgétaires qui font obstacle à la mise en place de systèmes de collecte d'informations.

Les pouvoirs publics des pays concernés ne disposent pas suffisamment de données concrètes sur la situation locale, nécessaires pour une analyse plus ciblée. Et les services responsables de la collecte de ces données ne disposent souvent pas des moyens nécessaires ni des personnels qualifiés pour pouvoir remplir leur tache. De ce fait, les chances de succès d'une politique efficace de lutte contre la pauvreté, axée sur les besoins spécifiques de groupes donnés, sont minimes. Comment catégoriser les pauvres ?

Les pays pauvres manquent généralement de données et de connaissances systématiques sur leur propre situation socio-économique. Cette inssufisance limite les possibilités d'élaborer de manière adéquate des politiques et programmes solidement étayés axés sur le long terme. Ces pays sont donc handicapés par la difficulté à formuler leur vision de leur propre avenir.

iv) La persistance de la crise politico-institutionnelle

La crise politique et institutionnelle actuelle est née des contestations électorales d'avril 1997 qui a été suivi par la démission du Premier ministre deux mois plus tard sans être toutefois résolue. Les élections générales de 2000 n'ont pas favoriser le dénouement de cette crise puisqu'elles ont conduites

à de nouvelles contestations. Il en résulte la paralysie du pays malgré la médiation de l'organisation des Etats américains. Les conséquences de cette crise sont nombreuses telles le blocage de l'assistance externe, la chute des investissements et l'aggravation de la pauvreté. En égard avec l'élaboration du cadre stratégique de réduction de la pauvreté, la principale conséquence réside dans

les possibilités de rendre délicat la mise en place du processus participatif que requiert ces programmes.

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