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Rentabilité financière et économique des systèmes de production maraà®chers au Sud-Bénin: une application de la Matrice d'Analyse des Politiques

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par Landry FANOU
Université Abomey-Calavi - Ingénieur-Agroéconomiste 2008
  

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Liste des sigles et abréviations

AIC :

Association Interprofessionnelle du Coton

AUP :

Agriculture Urbaine et Péri-urbaine

BM :

Banque Mondiale

BPI :

Bonne Pratique d'Irrigation

CAF :

Coût Assurance Fret

CeCPA :

Centre Communal de Promotion Agricole

CeRPA :

Centre Régional de promotion Agricole

CFD :

Coût des Facteurs Domestiques

CFE :

Coût des Facteurs Echangeables

CPE :

Coefficient de Protection Effective

CPN :

Coefficient de Protection Nominal

CRL :

Coût des Ressources Locales

CRDI:

Centre de Recherche pour le Développement International

DSCRP:

Document de la Stratégie de Croissance et de Réduction de la Pauvreté

EMICOV:

Enquête Modulaire Intégrée sur les Conditions de Vie des ménages

FAO:

Food and Agriculture Organization

FSA:

Faculté des Sciences Agronomiques

HTS:

Hors Taxes et Subventions

IITA:

International Institute of Tropical Agriculture

INRAB:

Institut National pour la Recherche Agricole au Bénin

INSAE:

Institut National de la Statistique et de l'Analyse Economique

ISBA:

Institut des Sciences Biomédicales Appliquées

LARES:

Laboratoire d'Analyse Régionale et d'Expertise Sociale

MAEP:

Ministère de l'Agriculture de l'Elevage et de la Pêche

MAP:

Matrice d'Analyse des Politiques

MEPN:

Ministère de l'Environnement et de la Protection de la Nature

OBEPAB:

Organisation Béninoise pour la Promotion de l'Agriculture Biologique

OMS:

Organisation Mondiale de la Santé

ONASA:

Office National d'Appui à la Sécurité Alimentaire

ONG:

Organisation Non Gouvernementale

ONS :

Office National de Soutien des revenus agricoles

ONU

Organisation des Nations Unies

PADAP :

Programme d'Appui au Développement de l'Agriculture Périurbaine au Sud du Bénin

PAN :

Pesticide Action Network

PAS :

Programme d'Ajustement Structurel

PNUD :

Programme des Nations Unies pour le Développement

PPN :

Profitabilité Privée Nette

PSN :

Profitabilité Sociale Nette

PVD :

Pays en Voie de Développement

RCB :

Ratio Coût/Bénéfice

RGPH :

Recensement Général de la Population et de l'Habitat

SBEE :

Société Béninoise Energie Electrique

SPV :

Service Protection des Végétaux

UAC :

Université d'Abomey-Calavi

UCOMAC :

Union Communale des Maraîchers de Cotonou

UCP :

Union Communale des Producteurs

UMALGA :

Union des Maraîchers du Littoral de Grand - Popo et d'Agoué

Introduction générale

Introduction

L'Agriculture Urbaine et Périurbaine (AUP) constitue un des sous-secteurs clés de l'agriculture au Bénin. Elle a connu un développement important à la suite d'une forte croissance démographique induisant un accroissement des besoins alimentaires dans les centres urbains (Assogba-Komlan et al., 2007).

Les cultures maraîchères sont devenues une activité répondant de façon efficace à la demande alimentaire urbaine (Singbo et al., 2004). Elles jouent un rôle sociologiquement et économiquement important au sein de la population béninoise (Adorgloh-Hessou, 2006).

En effet, l'Enquête Modulaire Intégrée sur les Conditions de Vie des ménages (INSAE, 2007) montre que l'incidence de la pauvreté monétaire en milieu urbain s'est aggravée. Elle est passée de 17,7% en 2002 à 22,1% en 2006. Il s'est avéré que le maraîchage représente aujourd'hui, une source importante de revenu et d'emploi (Adorgloh-Hessou, 2006). A Cotonou, sur 263 ha de superficies cultivées en l'an 2000, le maraîchage a rapporté pour l'ensemble des producteurs plus de trois cents (300) millions de francs CFA de marge brute Hounkpodoté et Tossou (2001).

Le maraichage a également un fort potentiel en gain de devises. Selon le document de la Stratégie de Croissance pour la Réduction de la Pauvreté (SCRP, 2007-2009) au Bénin l'économie béninoise est vulnérable aux chocs externes car elle est essentiellement basée sur le coton (40 % des recettes d'exportation). La diversification des cultures d'exportation est alors un volet qui pourrait réduire progressivement cette vulnérabilité. Compte tenu de ce qui précède, les cultures maraîchères ont été identifiées comme filières prioritaires à promouvoir.

Cependant, plusieurs contraintes limitent la production maraîchère au Sud-Bénin: la pénurie foncière ; les difficultés d'approvisionnement en intrants agricoles spécifiques ; les attaques parasitaires ; la maîtrise de l'eau (quantité et qualité) et l'absence de crédit (Adorgloh-Hessou, op cit.). Pour faire face à ces défis, les maraîchers produisent en utilisant des techniques qui vont des plus archaïques et peu recommandées à celles modernes respectueuses de l'environnement et de la santé publique Assogba (2007).

Tenant compte du caractère multidimensionnel que revêt la filière « culture maraîchère » nous voulons à travers cette étude appréhender de façon quantitative le surplus financier et économique que génèrent les exploitations maraîchères sous différents systèmes de production.

Problématique et Justification.

La production maraîchère constitue une composante importante de l'AUP dans les villes du Sud Bénin (Agossou et al, 2001). Elle contribue à la sécurité alimentaire des villes (Adéoti, 2003). La production des villes de Cotonou, Porto Novo, Sèmé Kpodji et Grand Popo représente en moyenne pour certains légumes (chou, gboma, laitue, tomate, poivron, carotte et concombre) 64% de la consommation annuelle de ces villes (Adorgloh-Hessou, 2006). Sans cette activité de nombreux citadins seraient dans l'incapacité de se procurer certains légumes dont la consommation régulière permet de limiter les carences nutritionnelles graves (Gandonou et al, 2007).

Le maraîchage est également une activité rémunératrice principalement pour les groupes vulnérables ou marginalisés de la population urbaine (Gerstl, 2001). Au Sud du Bénin, d'après le PADAP (2003), les exploitations axées sur le maraîchage sont porteuses de plus de 60.000 emplois directs (chefs d'exploitation, actifs familiaux, salariés et main d'oeuvre temporaire) et 25.000 emplois indirects (commerçants, éboueurs etc.) en amont et en aval de la filière.

Cependant, malgré les contributions positives (sécurité alimentaire et nutritionnelle, recyclage des déchets urbains, source de revenus et d'emplois), les systèmes de productions maraîchères présentent des risques sanitaires et environnementaux très élevés. Ces risques sont liés à l'utilisation inadéquate des engrais et produits phytosanitaires, aux pratiques d'irrigation inefficaces (FAO, 2003), à la pollution de la nappe phréatique et à la santé des consommateurs du fait de la présence des résidus dans les légumes (Amoussougbo, 1993).

Assogba (2007), souligne que différentes méthodes sont utilisées pour la protection des cultures maraîchères contre les maladies et ravageurs. Au nombre de ces méthodes, la lutte chimique est la plus utilisée. Malheureusement, il s'agit aussi bien des pesticides chimiques recommandés et non recommandés (insecticides coton). Les maraîchers appliquent des doses inadéquates sans tenir compte de leur rémanence (Vodouhè, 2007). L'utilisation de ces pesticides non recommandés engendre, beaucoup de risques pour la santé humaine et pour l'environnement (Pesticides news, 1999). Le phénomène devient plus préoccupant quand, nous savons que certains de ces légumes sont consommés à l'état frais, sans aucune transformation préalable. Une étude de dosage de résidus de pesticides dans le lait maternel réalisée par le Service de Protection des Végétaux (SPV) à Agonli-Lowé situé dans la vallée de l'Ouémé, et dans trois villages du Zou, a montré que certains de ces laits étaient contaminés, avec des teneurs au-delà des normes autorisées par la FAO et par l'OMS (Adjé, 2004). D'autres méthodes de lutte présentant moins de risques sont les extraits de plantes comme Azadirachta indica, Hyptis suaveolens et Carica papaya, de fabrication artisanale (Assogba, op cit.). Elles sont économiques, efficaces, saines, respectueuses de l'environnement et de la santé humaine. Elles permettent de valoriser également au mieux les ressources locales, d'améliorer la qualité des produits, de réduire les coûts de production et favorisent l'augmentation de la productivité, et par conséquent, l'amélioration des revenus des producteurs (Adétonah, 2007). Cependant, force est de constater que les maraîchers continuent d'utiliser à grande échelle, les pesticides chimiques prohibés (Zossou, 2004).

L'APU étant essentiellement une agriculture de contre-saison, elle fait usage de quantités importantes d'eau pour l'irrigation. Mais les pratiques observées dans ce domaine sont rarement conformes aux normes (Gandonou et al, 2007). L'adoption des Bonnes Pratiques d'Irrigation (BPI) s'avère nécessaire. Les BPI sont définies comme des pratiques qui permettent d'optimiser la production tout en économisant l'eau et en minimisant les risques liés à ces pratiques sur l'homme et l'environnement, de satisfaire les besoins actuels et d'améliorer les moyens d'existence (FAO, 2003). Les BPI doivent assurer un rendement maximal sur tous les plans : économique, agronomique, social et environnemental, Zella et Smadhi (2007). Selon Atidégla (2006), le système d'irrigation utilisant la technique d'exhaure mécanisée ou motorisée (utilisation de pompe manuelle, motopompe ou pompe électrique) et la technique d'arrosage modernisée (utilisation de tuyauterie flexible plus pomme d'arrosage) est considérée comme le plus innovant. L'auteur précise que ce système permet une application efficace de l'eau d'irrigation et contribue à réduire sensiblement le gaspillage des ressources en eau. Autrement dit, il démontre que la mise en application de ce système est un important facteur pour assurer la durabilité environnementale de l'APU. Elle est adoptée en AUP, pour réduire la pénibilité et le temps de travail et utiliser toute l'année les superficies cultivées, ceci en réponse à la pression foncière de plus en plus remarqué au sein des systèmes de production maraîchers au Sud-Bénin Hounkponou, K. (2003). 

C'est donc dans le but d'augmenter la productivité et la qualité des produits maraîchers tout en sauvegardant la santé et le cadre de vie des populations urbaines et péri-urbaines que les variétés améliorées, les Bonnes Pratiques Phytosanitaires (BPP) et les Bonnes Pratiques d'Irrigation (BPI) ont été diffusées par les programmes de vulgarisation et institutions tant nationales qu'internationales tels que l'IITA, la FAO, la SPV les CeRPA etc.;

Mais, la politique agricole au Bénin a aussi conditionné les pratiques de protection phytosanitaires et d'irrigation au sein des systèmes de productions maraîchers au Sud-Bénin. En effet depuis 1994 où les prix des intrants sont passés du simple au double à cause de la dévaluation du FCFA, le gouvernement, sur décision du conseil des Ministres, Relevé n° 36/SGG/REL du 15 septembre 1994, exonèrent les intrants agricole (engrais minéraux et produits phytosanitaires), les semences et appareils phytosanitaires. Ces mesures sont actuellement en vigueur en témoigne les articles 6 et 7 de la Loi n°2007-33 portant loi de finances pour la gestion 2008, PASP (2008). Cependant L'application du régime d'exonération pour les intrants est en réalité très sélective; en plus, elle se fait dans une certaine confusion et les procédures sont aussi fastidieuses. Ce sont les intrants destinés à la filière Coton qui dans la pratique sont exonérés Adégbidi et al. (2000). Ceci explique le coût relatif faible des insecticides cotons utilisés au sein des systèmes de production maraîchers et donc l'accessibilité facile, relativement aux pesticides chimiques recommandés pour le maraîchage qui sont taxés Vodouhè (2007). Cependant, Il est important de noter que les exonérations actuellement concédées ne sont pas prévues par la loi. Elles sont donc conjoncturelles et devrait être relevé en vue d'être en conformité au Tarif Extérieur Commun en vigueur dans la zone UEMOA. Pour la campagne 2007-2008, objet de cette étude, les semences améliorées des cultures maraîchères, les pesticides chimiques recommandés pour le maraîchage et le matériel d'irrigation (pompe, tuyauterie) n'ont pas bénéficié d'exonération de droits et taxes Simeni Tchuinte (2008).

Même si l'augmentation du revenu des maraîchers passe nécessairement par la mise en application de ces technologies améliorées, force est de constater que le niveau d'adoption reste faible (Assogba, op cit et Vodouhè, op cit). La production maraîchère sous ces technologies améliorées n'est elle pas en réalité rentable pour les producteurs ?  Les mesures fiscales actuelles ont elles une incidence négative sur la rentabilité des systèmes de productions maraîchers ayant recours aux technologies améliorées de production ? Tels sont les préoccupations essentielles de cette étude portant sur la rentabilité financière et économique des systèmes de production maraîchère au Sud-Bénin. Elle inclut d'une part la détermination des coûts et avantages liés à l'adoption ou non de ces technologies améliorées de production autant pour le producteur que pour la collectivité. Et d'autre part l'évaluation de l'effet des subventions agricoles sur cette rentabilité. Nous nous proposons de le faire en concentrant nos efforts sur deux spéculations maraîchères : la tomate (Lycopersicum esculentum) et le chou pommé (Brassica oleracea capitata).

Objectifs de Recherche

L'objectif principal de cette étude est d'évaluer et d'analyser la rentabilité financière et économique des technologies améliorées de production de tomate et de chou, et de mesurer l'effet des politiques agricoles sur la rentabilité de ces systèmes de production au Sud-Bénin.

Pour aboutir à cet objectif principal, les objectifs spécifiques (Os) suivants doivent être atteints :

Os 1: Evaluer la rentabilité financière des différents systèmes de production de tomate et de chou au Sud-Bénin.

Os 2 : Evaluer la rentabilité économique des différents systèmes de production de tomate et de chou au Sud-Bénin

Os 3 : Evaluer l'effet des politiques de subventions agricoles sur la rentabilité des systèmes de production de tomate et de chou au Sud-Bénin.

Hypothèses de recherches

Les hypothèses (Ho) associées respectivement à ces objectifs spécifiques  sont:

HO1 : Les systèmes de production de tomate et de chou utilisant les technologies améliorées sont financièrement rentables.

HO2 : Les systèmes de production de tomate et de chou utilisant les technologies améliorées sont économiquement rentables.

HO3: La subvention des principaux intrants importés affecte positivement la rentabilité des systèmes de production de tomate et de chou.

Plan d'ensemble

Le présent document est structuré en trois points essentiels.

- La première partie (chapitre 1) traite de l'introduction générale et de la revue bibliographique sur l'agriculture urbaine et périurbaine.

- La seconde partie du document (chapitre 2) présente d'une part, la zone d'étude (Sud-Bénin). Elle présente d'autre part, la méthodologie adoptée pour l'étude.

- La troisième partie (chapitres 3, 4 et 5) de ce document présente les résultats et discussions de même que la conclusion générale.

Chapitre 1 : Revue de littérature

1.1. Cadre conceptuel

1.1.1. Concept d'agriculture urbaine et péri-urbaine

D'après Moustier et Mbaye (1999), l'agriculture péri-urbaine -- correspondant à l'agriculture urbaine selon la terminologie anglo-saxonne -- est considérée comme l'agriculture localisée dans la ville et à sa périphérie, dont les produits sont destinés à la ville et pour laquelle il existe une alternative entre usages agricoles d'une part et non agricoles d'autre part des ressources ; l'alternative débouche sur des concurrences, mais également sur des complémentarités entre ces usages :

- foncier bâti et foncier agricole ;

- eau destinée aux besoins des villes et eau d'irrigation ;

- travail non agricole et travail agricole ;

- déchets ménagers et industriels et intrants agricoles ;

- coexistence en ville d'une multiplicité de savoir-faire dus à des migrations, cohabitation d'activités agricoles et urbaines génératrices d'externalités négatives (vols, nuisances) et positives (espaces verts).

Selon Fleury et Donnadieu (1997), l'agriculture péri-urbaine, au strict sens étymologique, est celle qui se trouve à la périphérie de la ville, quelle que soit la nature de ses systèmes de production. Avec la ville, cette agriculture peut soit n'avoir que des rapports de mitoyenneté, soit entretenir des rapports fonctionnels réciproques. Dans ce dernier cas, elle devient urbaine et c'est ensemble qu'espaces cultivés et espaces bâtis participent au processus d'urbanisation et forment le territoire de la ville.

Les interactions entre la ville et l'agriculture, en termes de flux de ressources et de produits, sont au coeur de l'identité de l'agriculture urbaine. Ainsi pour Doucouré et Fleury (2004), cette agriculture contribue à plusieurs titres à la gestion de la ville :

- en participant à l'approvisionnement, surtout en produits frais ;

- en créant des emplois et des revenus, qui contribuent à l'équilibre social ;

- en améliorant l'environnement par une gestion spécifique des déchets ;

- en occupant des terrains qui font office de coupures vertes dans le tissu urbain et en participant ainsi à l'aménagement des espaces verts et à l'amélioration de la qualité de l'air.

Cependant, elle est également source d'externalité négative. Nous avons à ce titre les pollutions agricoles liées aux apports d'engrais (concentration de nitrates), aux pesticides et aux déchets et effluents d'élevage, à la proximité des bas-fonds cultivés, parfois considérée par les citadins comme source d'insalubrité et de paludisme (pullulation des moustiques). (Moustier et Salam, 2004).

Outre sa dimension strictement agronomique, l'agriculture urbaine permet de résoudre certaines questions sociales graves en jouant un rôle d'intégration (migration des ruraux, chômage endémique). Nous emploierons dans ce document le terme agriculture urbaine pour désigner à la fois l'agriculture intra et péri-urbaine.

1.1.2. Exploitation agricole et système de production agricole

Dans le langage courant, une exploitation agricole est un ensemble de terres, de bâtiments et de cheptels vifs et morts (Chombart et al., 1969). Pour les auteurs, il s'agit d'une définition purement descriptive. L'exploitation agricole implique avant tout, un centre de décision, une unité de production, une organisation, et un ensemble d'interactions entre les différentes composantes (Assogba, 2007).

Rethore et Riquier (1989), identifient l'exploitation agricole à un centre de décision. Pour faire fonctionner, en augmentant son profit, l'unité économique, que constitue l'exploitation agricole, l'agriculteur prend des décisions de nature très différentes. (Chombart, op cit.).

Adégbidi (1994), insiste sur la dimension organisationnelle de l'exploitation. Il définit l'exploitation agricole comme la forme d'organisation technico-économique et sociale de la production agricole. C'est un cadre organisationnel que l'on peut repérer à partir d'un ensemble de personnes dont les décisions vont déterminer une production agricole, des moyens de production et les résultats réalisés.

Chombart (op cit.) propose alors l'une des définitions les plus élaborées de cette notion. « L'exploitation agricole est une unité économique dans laquelle l'agriculteur pratique un système de production en vue d'augmenter son profit. Le système de production est la combinaison de productions et de facteurs de production (capital foncier, travail et capital d'exploitation) dans l'exploitation agricole ».

Dans le cadre de notre étude, l'exploitation maraîchère est une exploitation agricole où se pratique le maraîchage. C'est une unité économique dans laquelle le maraîcher réalise des combinaisons plus ou moins complexes de productions et de facteurs de production (terre, travail, capital) en vue de produire des biens alimentaires (légumes), destinés pour une grande part au marché et en vue d'augmenter son profit.

La notion de système de production est quant à elle très ancienne et essentielle pour les agronomes et les économistes. Elle a évolué dans le temps et est diversement appréciée par les chercheurs qui lui confèrent des contenus variés.

Pour Reboul (1976), le système de production désigne le mode de combinaison des facteurs comme la terre, la force et les moyens de travail à des fins de production végétale ou animale.

Jouve cité par Daane et al., (1989), définit le système de production comme un ensemble structuré de moyens de production (force de travail, terre, équipement, etc.) combinés entre eux pour assurer une production végétale et ou animale en vue de satisfaire les objectifs des responsables de l'exploitation agricole.

Adégbidi (op cit.), définit le système de production comme un ensemble organisé et combiné de sous-systèmes de culture et d'élevage, et des ressources en terre, en moyens de production et en force de travail, permettant la mise en oeuvre de ces sous-systèmes. Le système de culture quant à lui, se définit comme une surface de terrain traitée de manière homogène par des cultures avec leur ordre de succession, et par les itinéraires techniques qui leur sont appliqués. Le système de production se réfère à l'organisation de la production au niveau de toute l'exploitation alors que le système de culture est pertinent pour le niveau de la parcelle.

Etant données que les exploitations maraîchères sont essentiellement orientées vers la production végétale, le système de production maraîchère sera identifié dans notre cas au sous-système de cultures maraîchères en considérant le système de production tel que défini par Jouve.

Par ailleurs Carloni (2001) a défini quinze (15) grandes catégories de systèmes de production agricole en Afrique subsaharienne parmi lesquels nous avons le système irrigué. D'après cet auteur, le système irrigué possède un potentiel élevé de croissance en agriculture et dans la réduction de la pauvreté. Les projections de la FAO pour l'année 2030 indiquent que dans les trente prochaines années, la production provenant des terres irriguées pourrait s'accroître de 100 à 200 %. Les systèmes de production maraîchère étant par excellence des systèmes irrigués, nous avions jugé important de définir ce qu'est un système irrigué.

1.1.3. Concept de système irrigué

En principe, toutes les cultures peuvent être mises en valeur par un système irrigué. Mais, d'une manière générale, la culture irriguée par excellence est le riz. Les cultures maraîchères étant des cultures de marais, elles nécessitent un approvisionnement permanent en eau pour leur production. L'eau constitue en conséquence un intrant au même titre que l'engrais, les pesticides et les semences. Ainsi, les productions maraîchères peuvent être assimilées à des cultures irriguées d'où l'importance de préciser les caractéristiques de ce système.

Selon Ruthenberg (1980), l'irrigation décrit les pratiques qui sont adoptées pour approvisionner en eau une surface où les cultures sont installées afin de réduire la longueur et la fréquence des périodes au cours desquelles, l'absence de l'eau dans le sol est le principal facteur limitant de la croissance de la plante. Comparés aux systèmes non irrigués, les systèmes irrigués se caractérisent d'après cet auteur par :

- les rendements élevés par hectare pour une culture donnée ;

- la possibilité de réaliser plusieurs récoltes par an ;

- un processus continu de production à cause de l'utilisation permanente de la terre ;

- la réduction des fluctuations entre les rendements d'une année à l'autre ;

- leur adaptabilité relative selon le type et l'intensité de la production ;

- l'emploi productif d'un nombre relativement élevé de travailleurs par hectare.

Cependant, malgré ces avantages, le système irrigué requiert des investissements importants, donc des coûts élevés :

- il nécessite un niveau d'investissement élevé pour l'approvisionnement en eau, la préparation du sol et la répartition des activités. Ces investissements élevés se ressentent surtout au niveau des coûts fixes;

- le système offre des possibilités élevées de production mais un certain niveau de connaissances est nécessaire s'il veut être pleinement exploité ;

- il est évident que pour exploiter les potentialités du système irrigué, les rendements élevés, les cultures multiples doivent être accompagnées par une utilisation intensive d'engrais et par des efforts destinés à éviter la salinité.

Dans le système irrigué, les techniques traditionnelles de fertilisation qui sont très exigeantes en temps de travail ont été largement complétées ou même substituées par les engrais minéraux. De faibles quantités d'engrais minéral sont utilisées de préférence sur les terres irriguées, parce que les rendements par unité d'input sont plus élevés et plus efficaces.

1.1.4. Concept de maraîchage.

Dérivé du mot latin mariscus relatif aux lacs et marais, le terme maraîchage s'est d'abord appliqué aux cultures de légumes effectuées dans les marais. Ce terme a connu des évolutions dans le temps et est devenu une branche de l'horticulture orientée vers la culture intensive et professionnelle des légumes (Habault, 1983). L'horticulture est définie comme une branche de l'agriculture comprenant la culture des légumes, des petits fruits, des fleurs, des arbres et arbustes d'ornement (Petit Larousse, 2003).

Le maraîchage est une forme d'agriculture urbaine et péri-urbaine orientée vers la production des légumes pour la vente dans les villes (Lavoisier, 1977). Le Petit Larousse (2003) signale que le maraîchage est la culture intensive des légumes et de certains fruits, en plein air ou sous abris. Selon Assogba (2007) cette définition est plutôt généraliste et ne prend pas en compte les spécificités africaines en général et béninoises en particulier.

Ainsi, selon Gonroudobou (1985), le maraîchage est une activité complexe qui se caractérise par la mise en valeur de superficies très réduites et par la production d'une multitude de spéculations. Il s'agit alors d'une production intensive et continue. Une série d'opérations (le labour et le dressage des planches, le repiquage, l'arrosage, la récolte, la vente etc.) occupe la journée du maraîcher. Cette définition se borne au système moderne, occultant une bonne partie des exploitations, en l'occurrence les systèmes de décrue. Assogba (2007), précise que les systèmes de décrue sont une composante non moins importante du maraîchage au Sud-Bénin qui est d'ailleurs assez fournie en bas fonds exploitables périodiquement.

Le concept de maraîchage sera compris ici, à l'instar de Tiamiyou (2002), comme la culture intensive, continue ou saisonnière de légumes et de certains fruits, pratiquée sur différents types de sols, en saison des pluies ou en saison sèche, dans les villes ou en zone rurale, en plein champ ou sur un périmètre préalablement délimité et aménagé ou non.

1.1.5. Technologie améliorée

Les technologies améliorées de production maraîchère ont été élaborées dans le but d'accroître le revenu des producteurs tout en préservant l'environnement et en garantissant aux consommateurs des produits d'une qualité sanitaire irréprochable. Cependant, elles connaissent pour la plupart un faible taux d'adoption (Assogba, 2007 ; Vodouhè, 2007). Les contraintes liées à l'utilisation de ces technologies améliorées sont pour la plupart : la précarité du foncier, les attaques parasitaires, la maîtrise de l'eau, les difficultés d'approvisionnement en intrants (engrais et pesticides), l'accès au crédit agricole, le mode de gestion des exploitations et le manque d'information du prix de vente de produits sur le marché. Cependant suivant les objectifs de notre étude, nous allons nous limité seulement à trois technologies améliorées : les semences améliorées, les pesticides botaniques et le système d'irrigation motorisé.

- Semences améliorées : il s'agit essentiellement dans le cadre de notre étude des variétés améliorées adaptées aux zones tropicales de basse altitude. S'agissant de la tomate, les variétés améliorées (Mongal, Petromech) se distinguent des variétés locales (Tounvi, Akikon et Gbogan) par leur adaptation à la température (Aptitude à nouer sous des températures élevées), et leur résistance au flétrissement bactérien. Les variétés KK cross et Cabus pour le chou sont quant à elles résistantes à la fusariose et tolèrent également mieux la chaleur. La variété cabus est la plus utilisé actuellement ; elle a un cycle court et résiste beaucoup plus aux parasites et à la chaleur que la variété KK cross.

- Extraits de plantes : ils sont obtenus à partir des feuilles de neem (Azadirachta indica), de papayer (Carica papaya) ou d'autres plantes à effet insecticide ou insectifuge connu telles que les feuilles de tabac, les feuilles de Hyptis suavolens. Ces insecticides, utilisés pour lutter contre les nuisibles du chou et de la tomate, sont obtenus à partir d'extraits de ces feuilles. Le principe d'obtention consiste à piler 1,5 kg de feuilles de neem à laquelle on ajoute 1litre d'eau ou 500 g de graines de neem dans 10 litres d'eau plus un peu de savon afin de permettre à la solution obtenue d'être adhésive ; pour les feuilles de papayer, il faut 12 à 15 feuilles dans 1 litre d'eau. Le mélange obtenu est laissé pendant douze (12) heures environ. Ensuite, l'on procède au filtrage. Ce filtrat est automatiquement utilisé pour traiter les plants de tomate et de chou à l'aide d'un pulvérisateur à la dose de 10L/ha et par traitement (Adorgloh Hessou, 2006).

- Système d'irrigation motorisée : au sein de ce système, la technique d'exhaure est motorisée (utilisation de motopompe ou pompe électrique) et la technique d'irrigation est `modernisée' (utilisation de tuyauterie flexible plus pompe d'arrosage). Il se distingue du système d'irrigation semi-motorisé et manuel par son efficacité dans l'application de l'eau d'irrigation, sa contribution à réduire sensiblement le gaspillage des ressources en eau et le gain de temps. La mise en application de ce système est un important facteur pour assurer la durabilité environnementale de l'agriculture urbaine et péri-urbaine.

1.1.6. Concept de produit maraîchers sains

Selon Adéoti (2003) plusieurs définitions ont été données selon que l'on parle d'agriculture biologique ou d'agriculture organique.

D'après le Codex Alimentarius (1999), l'agriculture biologique est un système de gestion holistique de la production qui favorise la santé de l'agro système, y compris la biodiversité, les cycles biologiques et les activités biologiques des sols. Elle privilégie les pratiques de gestion plutôt que les méthodes de production d'origine extérieure. Dans cette optique, des méthodes culturales, biologiques et mécaniques sont, dans la mesure du possible, utilisées de préférence aux produits de synthèse, pour remplir toutes les fonctions spécifiques du système.

L'agriculture organique est donc considérée comme une option intéressante pour une agriculture durable au sein des pays sous développés. Elle offre une combinaison de technologies à faible input extérieur, une préservation de l'environnement et une efficience input/output. Elle permet également l'obtention d'un prix premium à travers la labellisation. Beaucoup d'ONG et de paysans adoptent les techniques de l'agriculture organique comme méthode d'amélioration de la productivité et de la sécurité alimentaire (Scialabba, 2007).

Au Sud-Bénin, les pratiques des producteurs ne nous permettent pas de justifier l'existence de produit biologique. En effet, Assogba (2007), a travers son étude sur la production maraîchère à montré que peu de producteurs (24%) enquêtés au Sud-Bénin utilisent les biopesticides et les extraits aqueux des végétaux, mais cela n'exclut pas par exemple l'utilisation d'engrais minéral, et surtout l'inexistence d'une certification officielle. Il nous faudra donc faire recours à un autre concept qui valorise l'utilisation des biopesticides et des extraits botaniques tout en ne se substituant pas au concept de produits biologiques : les produits maraîchers sains.

Moustier (2003) définissent les légumes sains comme les légumes issus d'une technique de production traditionnelle dont l'utilisation des insecticides est contrôlée, l'eau utilisée est propre et l'environnement de production n'est pas pollué. Ils concluent en disant que les légumes sains représentent toutes les plantes potagères dont les graines, les feuilles, les tiges ou les racines ne présentent aucune atteinte pathologique ou anomalie et dont la consommation est favorable à la santé et ne présentent aucun danger. Lorsque les maraîchers utilisent les biopesticides pour traiter leurs cultures, ils ne polluent pas l'environnement, évitent les pathologies ou anomalies aux plantes et la consommation de ces légumes ne présente aucun danger pour la santé du consommateur.

Nous identifierons donc dans le cadre de notre étude, ce type de production maraîchère saine à l'utilisation de pesticides chimiques recommandés, de biopesticides et d'extraits aqueux botaniques dans le système de production.

1.2. Rentabilité des cultures maraîchères

Singbo et al., (2004) ont réalisé une étude financière qui a porté sur l'évaluation de la rentabilité des légumes au Sud-Bénin. L'utilisation du taux marginal de rentabilité a montré que c'est la tomate qui procure la meilleure rentabilité dans la vallée de l'Ouémé et dans les villages de Gnito et Sazoué de la Commune de Grand-Popo. Les principales cultures dans ce système sont la tomate, le piment et la grande morelle. Dans la zone côtière (Communes de Grand-Popo, de Sèmé-Kpodji et de Ouidah) c'est l'oignon qui représente par contre la culture la plus rentable pour les maraîchers à l'instar de la tomate dans la basse vallée de l'Ouémé. Enfin, pour ce qui est des systèmes très intensifs des zones urbaines de Cotonou et Porto- Novo, la laitue et la grande morelle apparaissent comme étant les cultures les plus importantes et dans une moindre mesure l'amarante. L'amarante est plus rentable que les deux autres cultures.

Coste et al., (2004) se sont appuyés sur une analyse de la compétitivité prix, des coûts de revient (coûts de production et coûts de commercialisation) des filières tomate et pomme de terre au Bénin, au Niger et au Nigéria pour montrer que les coûts de production de tomate augmentent fortement au Bénin en contre-saison. Dans le bassin de Lalo, la technique d'arrosage avec de l'eau achetée à l'ex-Société Béninoise d'Electricité et d'Eau (SBEE) est très coûteuse ; à Natitingou, l'augmentation des coûts provient de la faiblesse des rendements de cette période, due à l'absence d'un système performant d'irrigation ; à Guéné, la culture de contre-saison implique l'utilisation de la motopompe qui représente alors 75% du coût de production et le fait augmenter de plus de 60% par rapport à la saison pluviale. En saison des pluies, le prix de revient de la tomate béninoise est plus bas que ceux des produits provenant des bassins concurrents. Pour ce qui est de la pomme de terre, celles en provenance du Nigéria sont plus compétitives que celles originaires du Bénin.

La Matrice d'Analyse de Politique (MAP) a été utilisée par l'IITA (2002b) pour déterminer la compétitivité des systèmes de production de la tomate et du chou au Bénin et au Ghana. Les résultats obtenus montrent que le système de production de chou le plus rentable au Bénin est celui qui utilise la motopompe pour l'irrigation et assure les traitements phytosanitaires par un biopesticide (Dipel ou biotit). Au Bénin, la tomate produite dans un système utilisant les pesticides chimiques et les engrais est la plus rentable ; mais ses coûts sont aussi les plus élevés.

Dans le cas des recherches localisées au Bénin, Ando (1985) a effectué dans la basse vallée du fleuve Ouémé, une étude sur le problème de l'allocation rationnelle des facteurs de production dans les systèmes de production maraîchère en rapport avec les autres cultures vivrières. L'approche de programmation linéaire a été utilisée. Ce modèle a révélé que les productions de piment et de gombo ne sont suffisantes que pour l'autoconsommation ; seule la tomate permettrait de réaliser un surplus commercialisable, le gombo procurant les revenus marginaux les plus faibles. Au même moment, la détermination des marges a montré que le piment représentait 40% du revenu total par hectare et la tomate 36%. D'autre part, les enquêtes ont établi que le piment avait la préférence des paysans. Ces derniers résultats ont été confirmés par Singbo et al., (2004).

1.3. Le concept de rentabilité et modèle empirique d'analyse.

Pour survivre de façon durable, une entreprise doit optimiser ses facteurs de production et en tirer des excédents et des avantages. La rentabilité est la première condition nécessaire, mais non suffisante de sa survie. La notion de rentabilité paraît en première analyse très simple : le capital génère un profit, et donc le rapport entre le capital et le profit se traduit par un taux de rentabilité. Elle traduit donc le rapport entre le revenu obtenu ou prévu et les ressources employées pour l'obtenir. La notion s'applique notamment aux entreprises mais aussi à tout autre investissement. La rentabilité représente alors l'évaluation de la performance de ressources investies par des investisseurs.

Cependant la décision au sujet de l'utilisation d'une technologie améliorée dépend de son avantage en termes de rapport coût-bénéfice. Il s'en suit que la mesure de l'impact d'une technologie améliorée sur la rentabilité d'une entreprise adoptante est un critère important pour prédire ex-ante ou justifier ex-post l'acceptation de cette technologie par les adoptants potentiels. L'évaluation de la rentabilité d'une technologie peut être approchée à deux niveaux d'observation: celui de l'exploitation agricole et celui de la collectivité.

Du point de vue du paysan individuel ou de l'exploitation agricole, l'analyse de la rentabilité faite est de nature financière. L'analyse financière utilise les prix directement payés ou reçus par le producteur. Cette analyse permet de déterminer le profit réel du paysan en vue d'apprécier la compétitivité de son activité.

En ce qui concerne la collectivité, l'analyse de la rentabilité est essentiellement économique. Elle utilise des prix et des coûts qui reflètent les objectifs, les ressources et les contraintes de la société entière. Elle illustre une situation idéale de l'économie internationale où tout fonctionne normalement. Contrairement à l'analyse financière, l'analyse économique prend en compte les effets exercés par des décisions de politique générale sur des individus, l'environnement et l'économie de la localité, et aussi les effets secondaires et indirects des investissements.

Pour faire l'analyse économique, les prix des intrants et des produits sont corrigés des distorsions introduites dans l'économie par les politiques gouvernementales (subvention sur intrants, taxation, taux de change, crédit intrant) et le mauvais fonctionnement des marchés (pratiques monopolistiques). La Matrice d'Analyse des Politiques (MAP) est le modèle théorique d'analyse qui sera utilisé pour mesurer la rentabilité des systèmes de production dans notre étude.

1.4. Modèle théorique d'analyse de la rentabilité.

1.4.1. La Matrice d'Analyse des Politiques (MAP)

La mesure de la rentabilité financière et économique se fera grâce à la Matrice d'Analyse des Politiques (MAP). Elle est développée pour analyser la rentabilité des systèmes et l'impact des politiques agricoles sur cette rentabilité.

Elle est composée de deux types de budgets: un budget évalué aux prix du marché ou prix financiers (budget financier) et l'autre aux coûts d'opportunité social ou prix économique (budget économique). Les prix financiers sont ceux que les paysans paient ou reçoivent tandis que les prix économiques reflètent le coût de l'économie ou de la société ; ce sont les coûts qui n'ont subi aucune distorsion. Ensuite, les divergences entre le budget financier et le budget économique sont également calculées. Le budget est construit pour chaque système de production qui contribue aux ressources. Avant la conception du budget, tous les intrants de la production maraîchère seront classés en biens échangeables et en ressources locales. Les facteurs échangeables ou commercialisables (pesticide chimique, engrais, semences etc.) sont ceux qui peuvent être théoriquement importés ou exportés et évalués aux prix du marché international, tandis que les produits non-échangeables ou facteurs locaux (terre, main d'oeuvre, capital etc.) sont ceux qui ne sont pas normalement commercialisables sur le marché international. Le tableau N°1 ci-dessous donne une synthèse des grandes étapes du modèle de la MAP.

Tableau N°1: Matrice d'Analyse des Politiques (MAP)

 

Revenus

Coûts

Profits

 
 

Intrants échangeables

Facteurs locaux

 

Budget Financier

A = Pf.Qf

B = Pt.Qt

C = Pn.Qn

D (1)

Budget Economique

E = Pe.Qe

F = Pi.Qi

G = Pd.Qd

H (2)

Divergences

I (3)

J(4)

K(5)

L(6)

Source : Monke, E. A. et Pearson, S. R. (1989)

A, B, C et D sont les éléments du budget financier; et E, F, G et H ceux du budget économique, représentés respectivement par les vecteurs de prix et de quantités physiques des sorties (Pf, Qf) et (Pe, Qe), des entrées échangeables (Pt, Qt) et (Pi, Qi), et des facteurs locaux non échangeables (Pn, Qn) et (Pd, Qd). I, J, K et L sont les différences entre le budget financier et le budget économique.

(1) = Profit financier ; D=A-B-C. D mesure la compétitivité du système de production. D est appelé le Profit Financier Net (PFN). Si PFN > 0, il implique que le système de production considéré est financièrement rentable.

(2) = Profit économique ; H=E-F-G. H mesure l'avantage comparatif. H est appelé le Profit Economique Net (PEN). Si PEN > 1, l'activité considérée présente un avantage comparatif statique.

(3) = Transferts de revenus; I=A-E.

(4) =Transferts des intrants échangeables ; J=B-F.

(5) =Transferts des facteurs domestiques ; K=C-G.

(6) = Transferts nets; L=D-H=I-J-K.

Plusieurs indicateurs d'analyse des effets des politiques ont été développés par Monke et Pearson (1989) :

1.4.2. Les indicateurs de l'avantage comparatif.

Les principaux indicateurs de l'avantage comparatif calculés à partir de la MAP sont : le Profit Economique Net (PEN), le Coût des Ressources Locales (CRL), le Ratio Coût Bénéfice (RCB).

1.4.2.1. Le Coût des Ressources Locales (CRL)

Il est mesuré par le rapport du coût social des facteurs locaux et de la valeur ajoutée aux prix sociaux soit :

CRL = G/(E-F) = (Pd . Qd)/ (Pe . Qe - Pi. Qi)

Il est utilisé pour mesurer l'avantage comparatif ou la compétitivité internationale d'un produit. Il est interprété comme le coût d'opportunité des ressources locales puisqu'il mesure le coût d'opportunité de la production d'une unité de produit en employant les ressources locales.

0 < CRL < 1 signifie que la production à base de la technologie considérée a un avantage comparatif. Autrement dit, l'activité de production est économiquement efficace. Il est moins coûteux en ressources locales de produire localement le bien considéré que de l'importer.

CRL > 1 signifie que la production à base de la technologie considérée n'a pas un avantage comparatif dans la production du bien considéré. Il n'est pas rentable pour le paysan de produire localement le bien considéré; il vaut mieux pour lui de l'importer.

CRL = 1 traduit un cas d'indifférence; c'est-à-dire que le paysan ne réalise ni bénéfice ni perte en produisant localement ou en important le bien considéré.

1.4.2.2. Le Ratio Coût/Bénéfice (RCB)

Le Ratio Coût/Bénéfice économique est le rapport des coûts totaux (coûts des facteurs échangeables et locaux) et des revenus bruts (Gross Revenue). Ces coûts et revenus sont valorisés aux prix économiques.

RCB = (F+G)/E

Si RCB < 1, l'activité de production considérée est économiquement rentable. Par contre, si RCB > 1 l'activité de production n'est pas économiquement rentable. Enfin, lorsque RCB est égal à 1, l'activité de production n'engendre ni perte ni profit.

On peut également estimer à partir de la MAP, un coefficient de protection environnementale dans la mesure des avantages économiques. Mais, nous n'avons pas pris en compte les coûts environnementaux dans la présente étude. Vu l'importance et l'envergure de la question, cet aspect peut faire l'objet d'une étude future.

1.4.3. Principaux indicateurs des effets des politiques

Les principaux indicateurs des effets des politiques sont le Coefficient de Protection nominale (CPN) ou "Nominal Protection Coefficient"  et le Coefficient de Protection Effective (CPE).

1.4.3.1. Coefficient de Protection Nominale (CPN)

Ce ratio est égal au rapport du prix financier du bien considéré et de son prix économique.

CPN = A/E = Pf.Qf / Pe.Qe

CPN = 1 traduit l'équilibre ou le niveau optimum de la compétitivité des échanges entre le marché national et international. La structure de protection est neutre. Les producteurs ne sont ni favorisés ni défavorisés.

CPN > 1 signifie que le bien bénéficie d'une protection par rapport au bien importé ou exporté. Les producteurs profitent d'une subvention due à l'intervention d'une structure de protection (protection positive).

CPN < 1 signifie que le pays ne protège pas son marché. Les producteurs sont taxés, défavorisés (protection négative).

1.4.3.2. Coefficient de Protection Effective (CPE)

Ce ratio est égal au rapport de la valeur ajoutée évaluée aux prix domestiques et de la valeur ajoutée évaluée aux prix sociaux (ou rapport de la différence entre le revenu brut financier et le coût financier des facteurs échangeables par celle entre le revenu brut économique et le coût économique des intrants échangeables). Ce coefficient indique l'effet combiné des politiques de prix des produits et des intrants échangeables sur les incitations à la production agricole.

CPE = (A-B)/(E-F) = (Pf.Qf - Pt.Qt) / (Pe.Qe - Pi.Qi)

CPE > 1, indique que les acteurs de la branche d'activité considérée gagnent plus de revenus qu'ils ne gagneraient sans distorsion de prix. Les producteurs bénéficient d'une subvention implicite sur les intrants et/ou d'une protection du prix du produit.

CPE = 1 traduit l'équilibre ou le niveau optimum de la compétitivité des échanges entre le marché national et international. La structure de protection est neutre. Les producteurs ne sont ni favorisés, ni défavorisés.

CPE < 1 signifie que le pays ne protège pas son marché. Le produit est implicitement taxé. Les producteurs gagneraient un meilleur revenu s'ils achètent et vendent aux prix économiques, définis comme étant les prix sur le marché international. Ils sont donc défavorisés sur le marché interne.

La technique présente un intérêt indubitable du fait de sa simplicité et de son intelligibilité. Elle ne requiert des décideurs, aucune connaissance experte pour conforter des choix, et permet aux analystes d'obtenir des résultats rapides dans un contexte d'urgence (Randolph, 1997).

La MAP permet aussi d'effectuer des simulations pour prévoir l'impact d'une mesure de politique agricole susceptible de modifier le système de prix sur les gains ou pertes potentielles de revenus pour les agriculteurs et la collectivité. Elle constitue donc un outil d'aide à la décision et de prévision pour les planificateurs.

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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore