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La problématique de la rénovation des sciences sociales africaines;lecture et reprise de la théorie searlienne de la construction de la réalité sociale

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par Barnabé Milala Lungala Katshiela
Université de Kinshasa et université catholique de Louvain - Thèse de doctorat 2009
  

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3.1. La transformation searlienne des déterminations structuro -fonctionnelles

De quoi s'agit -il ici ? Nous allons montrer d'une part les différentes divergences de John Searle avec l'approche dite structuro-fonctionnalisme, en tant qu'elle se réalise de façon reconstructive, et les différentes convergences d'autre part. Searle tente ici justement la transformation pragmatico - intentionnelle du structuro- fonctionnalisme. Nous verrons que son point de départ est intentionnel ou cognitiviste (dans le naturalisme la Raison émerge à un certain niveau comme émerge la conscience du biologique : la conscience émerge du processus neurobiologique dans le physicalisme de Searle), et qu'il retourne subrepticement sur ses premières amours pragmatistes à la fin. Sa reconstruction épistémologique des approches est au demeurant intentionnalico- langagière. Finalement Searle débouche sur ses propres modalités de la construction de la réalité sociale.

Toutefois, il faut dire que sa conception de la construction de la réalité sociale, bien que proche de celle de Friedrich Hayek, ne manque pas de forcer l'admiration par sa richesse en tant qu'elle se ressource dans la logique, dans le cognitivisme, dans la philosophie de la nature et dans la sémio -pragmatique. Searle part d'un projet colossal d'un édifice naturaliste qui reprend la physique comme base, la biologie comme le sommet et la psychologie comme stade intermédiaire.

Nous pouvons ici évoquer chez Searle la reconstruction épistémologique au moyen du concept normatif de « comportement régi par des règles » des structures profondes. A ce propos, John Searle réfute plusieurs points de vue qui recèlent en fait des contradictions : « nous ne pouvons pas (...) décrire (...) ces structures comme des ensembles de règles de calcul inconscient, ainsi qu'on le fait aujourd'hui en sciences cognitives et en linguistique, parce qu'il est incohérent de postuler un suivi des règles inconscientes qui soit en principe inaccessible à la conscience ».395(*)

Les règles phonologiques que Claude Lévi-Strauss a utilisées sont remplacées chez Searle par des règles constitutives que nous verrons. Searle reconstruit cette problématique de l'omniprésence de l' « inconscient » par la notion de l'Arrière-plan.

A propos Searle et Pierre Bourdieu se démarquent du concept de l'inconscient pour respectivement l'Habitus et l'Arrière-plan. Marc Maesschalck nous renseigne par ailleurs que le recours à l'Habitus est « une réaction à la prédominance de l'oeuvre de Lévi-Strauss sur le travail sociologique à l'époque où Bourdieu menait ses études sur les structures de parenté au Bearn et en Kabylie ».396(*) La notion de l'Arrière-plan est une reconstruction de la question de la commande du langage, du mental et de l'interaction au moyen des structures profondes comme un ensemble des règles.

La question théorique de John Searle est la suivante : « quelle est (...) la bonne méthodologie, pour décrire la structure de la réalité sociale ? »397(*) Pour lui déjà, en effet « ce qui crée un problème au théoricien, c'est le caractère invisible de la structure de la réalité sociale ».398(*) La cristallisation théorique de cette question est, par delà la rupture saussurienne et le rôle des règles dans les sciences sociales, la fameuse question de Ludwig Wittgenstein, celle de savoir si les règles causent l'action ou ce qu'obéir à la règle signifie. 399(*) Qu'est-ce qu'être commandé par les règles ?

On part du fait que « les gens qui participent aux institutions (comme l'argent, la guerre, la propriété, le mariage, le procès, etc.) ne sont pas conscients, habituellement, de ces règles ; ils ont même souvent de fausses croyances sur la nature de l'institution, et il arrive même que ceux qui ont créé en personne l'institution n'aient pas conscience de sa structure ».400(*) Comment Searle explique-t-il cette situation ? Il rappelle le fait que « Chomsky dans son analyse de la Grammaire universelle, dit que l'enfant n'est capable d'apprendre la grammaire d'une langue naturelle donnée que parce qu'il ou elle est déjà de façon innée en possession des règles d'une Grammaire universelle, et ces règles sont si profondément inconscientes qu'il n'y a aucun moyen pour un enfant de prendre conscience de leur déroulement. Ces analyses ne me satisfont pas, conclut-il.»401(*) Et il poursuit, «cette façon de procéder est très courante en science cognitive. Fodor dit que pour comprendre une langue quelle qu'elle soit, il nous faut tous connaître le Langage de la Pensée. Et ce langage est profondément inconscient que nous ne pouvons jamais prendre conscience de son déroulement ».402(*)

John Searle ne procède pas de cette façon : « depuis Freud, nous trouvons utile et commode de parler de manière désinvolte de l'esprit inconscient sans en payer le prix : expliquer exactement ce que nous entendons par là ».403(*) Quelle est la thèse de Searle ? «  Pour expliquer comment nous pouvons rattacher à des règles des structures telles que le langage, la propriété, l'argent, le mariage, et ainsi de suite, dans le cas ou nous ne connaissons pas les règles et ne les suivons ni consciemment ni inconsciemment, je dois faire appel à la notion que j'ai appelé l' « Arrière-plan » ».404(*) Searle distingue les règles de l'Arrière-plan.

Cette problématique est à la suite de l'hypothèse de Ludwig Wittgenstein selon la quelle « parler est un type de comportement régi par des règles ». Searle présente déjà 1969 la nature des règles. En fait, John Searle explicite justement l'aphorisme de Ludwig Wittgenstein selon lequel « parler une langue c'est accomplir des actes conformément à des systèmes des règles constitutives ».405(*) Plusieurs règles peuvent ici entrer en compte : les règles constitutives, les règles normatives, les règles de force illocutoire (les règles de contenu propositionnel, les règles essentielles, les règles de sincérité, etc.). Pour Searle, ces règles sont celles fondamentales auxquelles obéit d'une façon générale l'activité communicationnelle dans le monde de la vie quotidienne. « Il existe (donc ) des règles constitutives du monde vécu ».406(*)

Ce que tente de faire John Searle,c'est de mettre en exergue ces règles : « Les institutions comme l'argent, la propriété, la syntaxe, et les actes de langage sont des systèmes des règles constitutives, et nous voulons connaître le rôle de cette structure régulatrice dans l'explication causale du comportement humain ».407(*) Les règles ne fonctionnent pas comme les causes du comportement. « Les règles sont donc un procédé qu'emploie le linguiste pour caractériser les phénomènes, mais elles se bornent à décrire le comportement, elles ne jouent en vérité aucun rôle pour ce qui est de le causer ».408(*)

Et Searle de conclure : « Je propose donc de dire, c'est Searle qui conclut ainsi, qu'en apprenant à se débrouiller avec la réalité sociale, nous acquérons un ensemble d'aptitudes cognitives (Arrière-plan) qui sont partout sensibles à une structure intentionnelle, et en particulier aux structures régulatrices d'institutions complexes, sans nécessairement contenir partout de représentations des règles de ces institutions ».409(*) Il s'oppose ici à la non intentionnalité d'Emile Durkheim.

* 395 John Rogers SEARLE, La constrcuction de la réaliét sociale, p.18.

* 396 Marc MAESSCHALCK, Normes et contextes , p.113.

* 397 John Rogers SEARLE, La construction de la réalité sociale, p.18.

* 398 Ibidem.

* 399 Pierre LIVET, Les normes, Armand Colin, Paris, 2006, p.168.

* 400 John SEARLE, La construction de la réalité sociale, p.167.

* 401 Ibidem, p.168.

* 402 Ibidem.

* 403 Ibidem.

* 404 Ibidem, p.169.

* 405 John SEARLE, Les actes de langage ; essai de philosophie de langage, Herman, Paris, 1972, p.93.

* 406 Jürgen HABERMAS, La logique des sciences sociales et autres essais, « édition Puf, 1987, première édition « Quadrige », Paris, 2005, p.139.

* 407John SEARLE, La construction de la réalité sociale, p.183.

* 408Ibidem, p.182.

* 409 Ibidem, p.189.

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