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La problématique de la rénovation des sciences sociales africaines;lecture et reprise de la théorie searlienne de la construction de la réalité sociale

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par Barnabé Milala Lungala Katshiela
Université de Kinshasa et université catholique de Louvain - Thèse de doctorat 2009
  

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3.5. L'esquisse d'une ontologie des faits sociaux juridiques

L'ontologie juridique vise justement une prise directe du droit sur la réalité sociale actuelle en « intégrant à la norme juridique d'autres normes, (on enrichit) le droit d'une prise directe sur les réalités vivantes du milieu professionnel ou social. La norme juridique ainsi enrichie prend pied dans la réalité sociale évitant (...) la clôture des systèmes juridiques sur eux-mêmes ».501(*)

Quelle est la nature des faits sociaux juridiques ? Nous allons emprunter la réponse Samuel Jerry : « En tant que faits sociaux, les règles juridiques n'ont pas l'existence propre indépendamment de la signification que les individus leur octroient ».502(*) Ici, les faits sociaux juridiques dépendent d'un a priori qui est humain. Cette assertion peut être explicitée comme suite : les règles de droit « sont avant tout des règles mentaux, de contenus de pensées, d'intentionnalité et des croyances individuelles ».503(*)

Cette entrée théorique qui s'opère par la question de signification à octroyer aux faits sociaux juridiques rétablit les liens, non continuels avec Durkheim, entre la société et l'individu.  Les « caractères subjectifs des faits sociaux sont, pour reprendre l'expression de Robert Nadeau, constitués causalement par les croyances et les opinions des gens. Dans les sciences sociales les choses sont ce que les individus pensent qu'elles sont. La monnaie est la monnaie, un mot est un mot. (...) Si et parce que les individus le croient ».504(*)

A propos, allons plus en détails pour signaler que « Hayek opère une distinction entre deux sortes d'idées ou d'opinions : les idées constitutives (ou opinions constituantes) et les idées explicatives (ou vues spéculatives) : celles qui `font partie de leur objet' et celles qui sont ` idées sur cet objet' ».505(*) Il y a « là des idées qui sont réellement constitutives des faits sociaux des autres idées théoriques ».506(*) Cette distinction sera reprise par John Searle.

L'effort qui est poursuivi est l'analyse précisément des faits sociaux en tant qu'ils se distinguent des faits tout simplement physiques. « La plupart des objets de l'action humaine ou sociale sont distincts des « faits objectifs » au sens précis et étroit où ce terme est utilisé par les sciences(...) et ne peuvent être définis en termes physiques. »507(*) Friedrich Hayek insiste donc sur la distinction à établir « entre les sciences de la nature et l'étude (sociale) du langage ou du marché, du droit et de la plupart des autres institutions humaines. Ces faits sont une catégorie particulière des faits car ils sont subjectifs ».508(*)

La dimension significative est centrale dans la démarcation : «  les croyances partagées sont non seulement une condition du fait social mais sa cause. Renoncer à mettre au centre du social l'intentionnalité des agents et leurs croyances subjectives serait alors renoncer aux sciences sociales tout court. On ne verrait plus dans la monnaie par exemple que des « disques ronds de métal ».509(*) Ainsi, « depuis le tournant des années 1960 la théorie générale de droit a été marquée parce que l'on a appelé le tournant herméneutique ».510(*)

Cette idée qui se rapporte à la loi comme fait social est corroborée également par Jules Coleman : « la loi est (...) à comprendre comme un fait social (social fact thesis), écrit Marc Maesschalck, qui incorpore ou inclut une pratique collective de reconnaissance constitutive du système juridique lui-même et de notre compréhension de la règle de droit ».511(*) Ceci participe de la révolution pragmatiste en théorie du droit aujourd'hui et suppose le double dépassement des paradigmes juridique du positivisme juridique et de position herméneutique tel que nous l'explique Marc Maesschalck. En effet, dit-il, notre conception philosophique actuelle de la loi se situe sur l'horizon d'une coupure épistémologique fondamentale entre positivisme et herméneutique héritée du XX e siècle. (Parce que), alors que le positivisme juridique visait à construire une théorie du droit autonome, fondée sur un concept d'usage des règles à même de réduire l'incertitude des habitudes et prédictions, l'herméneutique tendait à montrer le rôle primordial pour tout jugement interne au droit d'une référence aux standards de moralité de la communauté d'appartenance, c'est-dire d'une référence à un état déterminé des idéaux de régulation sociale du groupe concerné ».512(*)

Les deux positions se cristallisent dans la position herméneutique de Donald Dworkin et dans la position positiviste de Hart : « chez Dworkin (position herméneutique), la moralité individuelle du juge devient la garantie d'un système dont le principe réside dans l'intégrité de la référence à une « morale substantielle supposée homogène au groupe social et à un juge idéalisé capable d'en assumer une réinterprétation constante »513(*), le juge Hercule. «  Chez Hart (position positiviste), l'existence d'un ordre juridique est garantie par la pratique convergente des officiels fondés sur le type de convention de coordination qu'ils adoptent entre eux pour maintenir la cohésion de leurs pratiques ».514(*) Ainsi, « là où Dworkin juge nécessaire l'exclusion d'une forme de coordination préalable des praticiens au profit d'un sens du devoir intériorisé par chaque patricien, Hart renvoie à une forme implicite de convention de coordination supposée garantir la convergence de l'action des praticiens ».515(*)

Finalement quel est l'enjeu du tournant pragmatiste que nous avons annoncé ? C'est, explique Marc Maesscchalck celui « de déterminer la structure normative du type de comportement auquel les différents acteurs concernés s'engagent dans la pratique d'un système juridique. Cette pratique collective, Jules Coleman propose d'en approcher l'unité référentielle à partir du modèle d'action coopérative partagée par Micheal Bratman. Rendre justice constitue une action fondée sur une règle de reconnaissance inhérente à la fonction d'officiel ».516(*) Ce qui fait que « la question de la normativité du droit se déplace alors de la cohérence formelle de son contenu sémantique vers son potentiel pragmatique de gouvernance comme institution sociale. Ce potentiel de gouvernance dépend d'un engagement collectif des acteurs concernés allant au-delà de l'adhésion à des objectifs conjoints : il s'agit de partager une responsabilité (mutuel responsiveness) à l'égard de la réalisation conjointe de ces objectifs, tant au niveau des moyens à mettre en oeuvre qu'au niveau du soutien éventuel à apporter au maintien des différents rôles à remplir (commitment to mutuel support) ».517(*) La loi acquiert une nouvelle mission, celle d'encadrement pédagogique où les vertus de négociation et de concertation doivent s'avérer nécessaires pour « rendre possible un processus d'apprentissage de nouveaux modes d'engagement des acteurs concernés à son égard. »518(*) D'où l'option de l'expérimentalisme démocratique où les compétences d'action collective de groupes eux-mêmes sont en jeu, soutient Marc Maesscchalck.519(*)

Marc Maescchack ,au demeurant, présente les limites d'un tel système : « il suppose de la part des acteurs concernés un accroissement de l'intelligence collective ».520(*) C'est ici que nous proposons le récalibrage de tout le système avec des nouvelles formes des ressources cognitives.

Du reste, il faut donner une vue d'ensemble en planchant sur les trois dimensions constitutives du droit, du point de vue de la philosophie du droit. Nous pouvons dire qu'un des enjeux de la philosophie du droit depuis cinq siècles reste l'avancement de la théorie du droit naturel depuis le XVII e siècle qui a été gravement arrêté par le positivisme et l'historicisme. Dans l'ordre des normes, le paradigme admet que le droit positif est nécessaire pour réaliser le droit naturel. Mais ce droit est composé des normes. D'où la nécessité de connaître la spécificité des normes en tentant de répondre à la question suivante : « Quelle est l'autorité qui gouverne les normes ? ». La contribution de la tradition analytique se fait spécialement par l'entremise de Hart. Pour lui la spécificité des normes se trouve dans la structure d'ensemble du système juridique.

Dans l'ordre de fait, la tradition analytique est exploitée sous forme de thématisation par John Searle avec l'hypothèse de « fait institutionnel », destiné à combler l'hiatus de la tradition humienne (entre le is et le ought) avec une ontologie. Le fait institutionnel est un fait dont l'existence présuppose les systèmes des règles constitutives qu'on nomme institutions. En effet, les normes juridiques créent la réalité avec l'idée des faits institutionnels.

Dans l'ordre des valeurs pour le jusnaturalisme, une grande question est au centre du problème : par où passe la réalisation de la justice et de l'ordre juste, étant donné que le droit naturel veut se confondre à la notion de justice ? Il y a certes une réponse avec des nuances multiples liées : aux rapports entre individus, entre individus et groupes, à l'organisation de groupe (Cité, Etat), au rapport entre la philosophie du droit elle-même et la philosophie politique.

Contre la nécessité de l'institutionnalisation de la Religion (catholicisme médiéval), la Reforme exige la re-individualisation du christianisme. Le jus naturalisme qui s'est développé dans les milieux protestants est une sorte de code supra-positif dont l'expression la plus visible est dans les Déclarations des droits de l'homme. Les droits de l'homme sont les droits du chrétien qui exige de l'Etat les différentes formes de liberté nécessaire pour assumer sans Etat la responsabilité de son destin. La vie meilleure provient de la Grâce, l'individu qui est orienté vers sa destinée surnaturelle transcende les compétences de l'Etat. Il n'attend de l'Etat que la liberté de diriger sa vie en fonction de ses fins suprêmes.

* 501 Eric CARPANO, Etat de droit et droits européens, évolution du modèle de l'Etat de droit, dans le cadre de l'européanisation de systèmes juridiques, L'Harmattan, Paris, Budapest, Turin,2005,p.352.

* 502 Samuel JERRY, « Economie et le juge : réflexion sur la théorie hayekienne du droit »in Cahier d'économie politique : histoire de la pensée et théorie, N° 54, L'Harmattan, 2008, p.71.

* 503 Ibidem.

* 504 Ibidem, p.70.

* 505 Ibidem.

* 506 Ibidem, p.72.

* 507 Ibidem, p.70.

* 508 Ibidem.

* 509 Ibidem, p.71.

* 510 Ibidem, p.58.

* 511 Marc MAESSCHALCK, « La loi, entre délibération et apprentissage », dans Philippe ABADIE, Aujourd'hui, lire la Bible, exégèses contemporaines et recherches universitaires, Profac, Bruxelles ,2008, p.297.

* 512 Ibidem, p.296.

* 513 Ibidem.

* 514 Ibidem.

* 515 Ibidem.

* 516 Ibidem, p.297.

* 517 Ibidem, p.298.

* 518 Ibidem, p.299.

* 519 Marc MAESSCHALCK, « La loi, entre délibération et apprentissage », p.302.

* 520Ibidem, p.305.

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"Nous devons apprendre à vivre ensemble comme des frères sinon nous allons mourir tous ensemble comme des idiots"   Martin Luther King