1.2 PROBLEMATIQUE
On parle aujourd'hui des pays développés d'une
part et des pays du tiers monde d'autre part. Au rang de cette dernière
catégorie, l'Afrique s'illustre par une situation
caractérisée par la persistance voire l'aggravation de la
pauvreté, du sous-emploi et de la famine.
Face à cette situation de paralysie
générale du développement économique et social, et
devant la nécessité de combler les insuffisances de la croissance
économique dont l'objet était pourtant de réduire la
pauvreté et d'assurer le bien-être des populations, de nouvelles
approches du développement ont vu le jour, sollicitant une participation
active d'une plus large couche des sociétés.
A la conférence des Nations Unies sur l'environnement
et le développement tenu le 3 juin 1992 à Rio de Janerio
(Brésil), est apparu le concept de Développement Humain Durable
(DHD). Celui-ci ne se contente pas seulement de la croissance
économique, mais à en répartir aussi équitablement
les fruits. Il donne aussi la priorité aux pauvres en élargissant
leur liberté de choix et leur champ de possibilité avec leur
participation aux prises de décisions influant sur leur vie. D'ailleurs
de nouveaux concepts et engagements, tels que les Objectifs du
Millénaire pour le Développement (OMD) ou les Documents de
Stratégie pour la Réduction de la Pauvreté (DSRP),
illustrent cette tendance dans la coopération pour le
développement.
Dans les faits, de nombreuses couches sociales à
l'instar des femmes, des enfants, des personnes âgées et des
personnes handicapées, particulièrement vulnérables
à la pauvreté, sont mises à l'écart de ce nouveau
processus de développement pour l'Afrique.
Partout dans le monde entier, les personnes vivant avec un
handicap, au-delà des difficultés auxquelles elles doivent faire
face dans leur vécu quotidien (accès aux services de
santé, à l'éducation, aux édifices publics...) sont
socialement marginalisées, politiquement oubliées et
économiquement désavantagées. Cette situation
préoccupante a amené déjà à la fin de la
deuxième guerre mondiale les gouvernements des pays occidentaux, avec le
soutien des Nations Unies et certaines ONG, à initier des actions afin
de venir en aide à cette frange de la population évaluée
aujourd'hui à 600 Millions, soit 10% de la population mondiale selon le
dossier N°4 de la chronique des Nations Unies de 2004. Ces actions se sont
intensifiées avec l'institution de l'année internationale des
personnes handicapées en 1981. Cette intensification s'est faite en
matière de prévention des incapacités et la
réadaptation des personnes handicapées en leur proposant des
centres de rééducation gérés par un personnel
technique bien formé.
Les Gouvernements africains, malgré le retard pris dans
leur développement, ne sont pas restés en marge de la protection
des personnes handicapées dont la situation est devenue plus criarde
dans cette partie du monde avec le VIH/SIDA et la multiplication des foyers de
guerre.
Au Togo, dans la nouvelle dynamique de développement
participatif, le Gouvernement avec l'aide de ses différents partenaires,
s'est engagé en faveur de l'amélioration des conditions
socioéconomiques des personnes vivant avec un handicap. Avant même
les années 1990, au-delà des programmes à caractère
préventif, plusieurs centres et écoles de formation
spécialisés furent créés pour faciliter l'insertion
sociale et professionnelle des personnes vivant avec un handicap. Pour
poursuivre cette insertion socioprofessionnelle, des réformes juridico
sociales ont été faites (tant par les Nations Unies que par ses
Etats membres dont le Togo) par la ratification de nouvelles lois comme
« les règles sur l'égalisation des chances des
handicapés » adoptées par l'Assemblée
Générale en 1993.
A l'article 33 de la constitution de la IVe
République, l'Etat Togolais s'engage à prendre ou à faire
prendre en faveur des personnes handicapées et des personnes
âgées, des mesures susceptibles de les mettre à l'abri des
injustices sociales. Il a aussi adopté une loi relative à la
protection sociale des personnes handicapées le 06 janvier 2004 par
l'Assemblée Nationale.
Cette catégorie de personnes déjà
diminuées physiquement ou mentalement est en effet
reléguée au second plan dans tous les domaines de la vie sociale
et surtout en matière d'insertion professionnelle. Aussi, les
différents organismes militant en faveur des personnes
handicapées, organisés en réseaux ou en associations
ont-ils fait de cet aspect juridico social, l'un de leur cheval de bataille en
ce sens que ces individus en tant que personnes humaines se doivent de
recouvrer leur dignité et de jouir des mêmes droits que tous les
autres individus.
Au rang de ces différents acteurs qui ne cessent de
mener un combat acharné pour la cause des personnes handicapées,
il y a lieu de mettre un accent particulier sur les approches de Handicap
International. Depuis sa création et son installation en 1997 au Togo,
l'ONG n'a cessé d'apporter sa contribution à la
réhabilitation des personnes vivant avec un handicap, en appuyant les
départements de formation des techniciens orthopédistes,
kinésithérapeutes et orthophonistes. Permettre aux personnes en
situation de handicap de vivre dans leur famille, dans leur communauté
en tant que citoyens à part entière et favoriser
l'égalité des chances sont au coeur de ses préoccupations.
C'est pourquoi, en plus de son appui technique et organisationnel à
plusieurs associations pour les personnes handicapées, elle ne cesse
d'intensifier ses actions pour une réelle insertion de ces personnes,
soit en suivant et en réalisant des microprojets, soit en créant
des emplois pouvant utiliser cette main d'oeuvre négligée.
De nombreuses recherches menées aussi bien dans le
domaine de la santé que celui du développement ont longtemps
insisté sur la nécessité de la non exclusion d'une couche
de la société ou d'une catégorie de personnes. Cela se
justifie par le souci de ne pas remettre en cause la nouvelle dynamique de
développement des pays en voie de développement qui se veut
participative et de ne pas bafouer la dignité et l'épanouissement
de ces personnes. Des politiques de réinsertion socioprofessionnelle des
personnes handicapées ont alors été mises en oeuvre,
insistant soit sur la réhabilitation ou la rééducation de
ces personnes, soit sur l'utilité de leur formation. Ces politiques dans
leur logique visent tout simplement à donner des moyens à ces
personnes de se faire une place acceptable au sein de leur communauté
qui a le devoir de les soutenir. Le rôle prépondérant du
soutien de l'Etat n'est pas absent dans la liste de leurs priorités.
Le constat que l'on fait aujourd'hui par rapport aux efforts
déjà fournis tant par les ONG que par l'Etat Togolais en
matière d'insertion des personnes handicapées est fort
mitigé, car, nombreuses sont ces personnes en situation de handicap,
qui, après avoir suivi des formations qui les rendent aptes à
exercer un métier, vivent aujourd'hui dans une situation
précaire. Parmi celles-ci, le cas des handicapés moteurs de
Lomé ne laisse indifférent personne. Elles éprouvent
toujours des difficultés à s'insérer socialement et
professionnellement et se livrent à la mendicité ou toujours
à la charge de leurs familles malgré leur
rééducation et leur aptitude à exercer un
métier.
Face à cette situation, faut-il remettre en cause les
logiques et les contenus des programmes et politiques de réinsertion
socioprofessionnelle de Handicap International? Quel est le rôle de la
rééducation dans la formation professionnelle des personnes
handicapées? Ces personnes deviennent-elles aptes à exercer un
métier après leur formation ? Le manque d'un suivi rigoureux
et adapté aux besoins réels des personnes handicapées ne
rend-t-il pas difficile leur insertion socioprofessionnelle ? Quel est le
véritable rôle joué par Handicap International dans la
rééducation, la formation et le suivi des personnes
Handicapées motrices de Lomé ?
C'est à ces multiples interrogations que cette
recherche telle que libellée tente d'apporter des éléments
de réponses.
|