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La territorialisation des plans climats

( Télécharger le fichier original )
par Yannick MONLOUIS
AgroParisTech Clermont-Ferrand - Mastère spécialisé ACTERRA 2011
  

Disponible en mode multipage

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La territorialisation des Plan-Climats

Yannick MONLOUIS

Elève Mastère spécialisé ACTERRA
Action publique pour le développement durable des territoires et de l'agriculture

Promotion 2010-2011

Rapport de thèse professionnelle rédigé suite à la mission en alternance auprès du cabinet ARGOS_8 rue Raymond Bank - BP 1523 38025 Grenoble Cedex 01

Fiche signalétique

AUTEUR

Yannick MONLOUIS

Promotion

2010-2011

TITRE

La territorialisation des Plan-climats

 

RESUME :

Cette thèse vise à observer la manière dont les territoires s'approprient la question climatique. Nous essayons de comprendre comment, à partir de leurs compétences respectives, ils participent à l'effort nécessaire à la réduction des émissions de Gaz à Effets de Serre et comment ils s'adaptent aux impacts du changement climatique. Afin de montrer la diversité des situations, cette réflexion fut menée sur 3 territoires différents. Elle vise à identifier et à comprendre les freins et les leviers d'intégration des questions climatiques dans les politiques territoriales : Selon quelles conditions les préoccupations liées au changement climatique pénètrent l'agenda politique et selon quelles modalités sont-elles intégrées aux politiques territoriales. Quels en sont les acteurs et les actions ?

Domaines

Mots clés : Climat, changement climatique, territorialisation

des politiques

publiques

Caractéristiques : nb. vol. : 1 nb. pages : [ ] illus. [ ] biblio.

CADRE DU TRAVAIL :

Nom du tuteur AgroParisTech Clermont-Ferrand Carole MAURY

Organisme pilote ou contractant : Cabinet ARGOS

Nom, prénom et fonction : Michel BASSET (Gérant)

Type de travail : Dates de début

[ ] Travail de groupe d'élèves (TGE) Du 1er novembre

[ ] Mission en entreprise au 2 septembre

[ ] Stage en exploitation agricole Date et lieu de

[x] Mission / Thèse le 8 2011,

en alternance professionnelseptembre

et de fin :

2010

2011

soutenance :

Clermont-Ferrand

[ ] Projet à l'étranger

[ ] Autre travail (à préciser) :

Contrat junior entreprise [ ] oui [x] non

Diffusion envisagée après avis du commanditaire

[ ] Diffusion large : parution catalogue et vente autorisée

[ ] Consultation : dépôt au centre de documentation, consultation et/ou photocopie *

[ ] Contenu confidentiel jusqu'au :

[ ] Contenu confidentiel "à vie"

Domaines possibles : 1- Eau ; 2- Littoral - Milieux aquatiques ou humides - Aquaculture - Pêche ; 3- Environnement - Espaces naturels - Chasse - Pollution - Déchets ; 4- Forêt - Bois - Papier ; 5- Agriculture - Elevage - Agro-Alimentaire - Para-chimie ; 6- Développement local - Aménagement du Territoire - Monde Rural - Economie - PED (Pays en Développement) ; 7- Gestion, Management et Economie d'Entreprise - Finances - Droit - Informatique de gestion -- 8 -- Divers

"AgroParisTech Centre de Clermont-Ferrand n'entend donner aucune approbation ni improbation aux thèses et opinions émises dans ce rapport ; celles-ci doivent être considérées comme propres à leur auteur."

Je tiens à remercier d'une part Michel Basset, gérant du cabinet d'étude Argos, ainsi que l'ensemble des « Argossiennes et Argossiens » qui m'ont permis de réaliser des missions diverses et intéressantes. Bien qu'ayant souvent un emploi du temps chargé, ils ont toujours été disponible pour m'orienter et échanger sur les pratiques d'évaluation.

Je remercie également Frédéric Jacques et Xavier Favrolt, tous deux respectivement chargés « Plan-climat » de la commune de Voiron et du Conseil Général d'Isère, ainsi que Mme Anne Micoud, directrice du Pays d'Ardèche Verte, qui m'ont accordé de leur temps et ont grandement facilité ma compréhension de la territorialisation des plans-climat.

Une pensée également pour Alain Roumieu qui a pris le temps de relire mon travail, et s'est particulièrement intéressé pour le sujet, lui-même victime de la hausse du niveau des températures à travers la fonte accélérée des glaçons du petit punch !

Je tiens enfin à remercier Mme Caroline Maury, professeur-chercheur à l'ENGREF qui m'a accompagné tout au long de mon stage et m'a orienté et conseillé dans la réalisation de cette thèse professionnelle.

Sommaire

INTRODUCTION 8

METHODOLOGIE 10

I. LA LUTTE CONTRE LE CHANGEMENT CLIMATIQUE : UNE POLITIQUE DE

DEVELOPPEMENT DURABLE 11

Les principes des politiques de développement durable 11

Rôle des collectivités : Agir local, penser global 12

II. LA DECENTRALISATION FRANÇAISE EST-ELLE ADAPTEE A LA LUTTE

CONTRE LE CHANGEMENT CLIMATIQUE ? 15

L'inévitable décentralisation 15

Critiques de la décentralisation 19

Une décentralisation inachevée 20

Enchevêtrement des compétences 20

Efficience financière 20

III. LA TERRITORIALISATION : INSTITUTIONNALISATION D'UNE NOUVELLE

FORME D'ACTION PUBLIQUE POUR LUTTER CONTRE LE CHANGEMENT

CLIMATIQUE 23

De la décentralisation à la territorialisation des politiques publiques 23

Caractéristiques du processus de territorialisation 26

IV. LE PCET : POLITIQUE TERRITORIALISEE DE LUTTE CONTRE LE

CHANGEMENT CLIMATIQUE 29

Le PCET : un outil de projet territorial de développement durable 29

Conséquences collatérales du Grenelle de l'Environnement 30

1. Imbrication des échelles 30

2. la nécessité d'avoir la maîtrise d'ouvrage 32

3. Accélération du processus 34

V. ETUDE DE CAS DE LA TERRITORIALISATION DES PCET EN REGION RHONE-

ALPES 36

A. Présentation des terrains d'études 36

1. La commune de Voiron 37

2. Le département d'Isère 37

3. Le Pays d'Ardèche Verte 38

B. Rôle de l'élu 39

C. Maitrise d'ouvrage/compétences 40

D. Coordination des échelles 41

E. Les chargés de mission « Plan-climat » 43

F. Les moyens financiers 44

G. Le suivi-évaluation 45

CONCLUSION 49

ANNEXES 51

Annexe 1 : Guide d'entretien 51

Annexe 2 : Entretiens 53

Annexe 3 : Tableau comparatif du nombre de PCET dans les régions 60

REFERENCES BIBLIOGRAPHIE 61

WEBOGRAPHIE 62

Table des sigles et abréviations

A21 Agenda 21

ADEME Agence De l'Environnement et de la Maîtrise de l'Energie

CAPV Communauté d'Agglomération du Pays Voironnais

CCEN Commission Consultative d'Evaluation des Normes

CDDRA Contrat de Développement Durable Rhône-Alpes

CG Conseil Général

CNRS Centre National de la Recherche Scientifique

CPER Contrat de Plan Etat-Région

ENGREF Ecole Nationale du Génie Rural, des Eaux et des Forêts

EPCI Etablissement Public de Coopération Intercommunale

FSL Fonds de Solidarité pour le Logement

GES Gaz à effets de serre

PAV Pays d'Ardèche Verte

PCED Plan Climat Energie Départemental

PCET Plan Climat Energie Territorial

PLH Programme Local de l'Habitat

PLU Plan Local d'Urbanisme

PNR Parc Naturel Régional

RGPP Révision Générale des Politiques Publiques

SCoT Schéma de Cohérence Territorial

SRADDT Schéma Régional d'Aménagement et de Développement Durable du Territoire

SRCAE Schéma Régional Climat Air Energie

TOS Technicien et Ouvrier de Service

TVB Trame Verte et Bleue

Introduction

L'histoire de la décentralisation française, appuyée par le concept du développement durable, a abouti au développement du phénomène de territorialisation des politiques publiques. La territorialisation est un terme polysémique qui est généralement perçue comme un processus. « C'est la mobilisation des acteurs endogènes d'un territoire pour la mise en place d'une politique publique » (B.Pecqueur, 2004). Aujourd'hui quelle collectivité décentralisée en France ne territorialise pas ses politiques publiques ?

Le concept de développement durable a grandement participé à ce phénomène en orientant la réflexion sur l'imbrication des échelles et la transversalité des démarches. « La transversalité est l'apparition d'un élément nouveau qui « traverse » l'existant » (L.Ménégoz, 2003). Elle aboutit à une vision décloisonnée des secteurs et des thématiques qui permettrait d'avoir un aperçu d'ensemble. Le dialogue entre des secteurs, qui auparavant s'ignoraient, amène à de nouvelles formes de gouvernance territoriale. Cette forme de gouvernance « se caractérise précisément comme le processus, essentiellement dynamique, qui vise à la formulation et/ou la résolution d'un ou de problème(s) productif(s) le plus souvent inédit(s) » (Zimmermann et al., 1998). Cette mise en compatibilité implique l'existence d'un compromis institutionnel composite dont les partenaires sont, d'une part les acteurs économiques et, d'autre part les acteurs publics qu'ils soient locaux ou non. Le compromis se situe dans deux dimensions qui sont le local et le global. Cela signifie que le processus de gouvernance territoriale permet d'articuler entre eux les acteurs situés sur le même site géographique mais aussi dans le même temps, il relie les acteurs locaux et les niveaux macro-économiques globaux du national voire du supranational (B.Pecqueur, 2003).

Poussée par le Grenelle, la lutte contre le réchauffement climatique est une politique qui connaît un processus de territorialisation important. Il a été admis que les collectivités territoriales ont un rôle déterminant dans le changement de comportement sociétal nécessaire à l'atténuation des émissions de GES et pour l'adaptation des territoires aux impacts du changement climatique. Certaines collectivités se sont d'ailleurs engagées bien avant que cette ambition territoriale soit impulsée par les lois Grenelle. Cependant, plusieurs d'entre elles doivent, si elles ne l'ont pas fait, mettre en place un Plan-Climat Energie Territorial (PCET) et si elles se sont déjà engagées, faire correspondre leur démarche par rapport aux objectifs et aux attentes nationales et régionales.

Le PCET est un outil permettant d'atténuer les effets du changement climatique et de s'y adapter. Il repose sur une démarche concertée qui permet à un ensemble d'acteurs d'identifier des actions à mettre en oeuvre en fonction de la situation de leur territoire. Après une phase d'expérimentation, l'Etat passe actuellement à une phase d'institutionnalisation des politiques climat, incitant les collectivités à territorialiser dans des délais « convenus » leur démarche climat afin d'atteindre les objectifs nationaux et internationaux.

Ce travail de réflexion a pour objectif de comprendre ce processus et d'identifier comment les collectivités décentralisées ainsi que les territoires de projet, territorialisent leur politique climat en fonction de leurs « compétences ».

Pour cela nous allons dans un premier temps déterminer les spécificités des politiques de développement durable afin de comprendre leurs incidences sur le cadre d'action collective. Puis, nous verrons pourquoi la décentralisation telle qu'elle se présente actuellement, ne représente pas un cadre de développement optimal pour établir une politique climat-énergie, et en quoi la territorialisation représente un processus de construction adaptée pour cette politique. Enfin, nous finirons pas l'analyse des points principaux relevés dans le cadre de l'étude comparative de 3 PCET de la Région Rhône-Alpes.

Méthodologie

L'objectif de ce travail est d'analyser la territorialisation des politiques publiques de développement durable en ayant comme objet d'analyse, les Plans Climats Energies Territoriaux.

Pour cela, je me suis basé d'une part, sur une analyse documentaire qui m'a permis de clarifier le sujet et de comprendre le développement du concept de territorialisation au travers des différents travaux1. Les principaux auteurs qui ont nourri ma réflexion sont, Alain Faure et Bernard Pecqueur. Tous deux font partie du PACTE, l'unité mixte de recherche du CNRS et de l'Université de Grenoble et ils travaillent depuis de nombreuses années sur la territorialisation des politiques publiques.

D'autre part, je me suis basé sur une étude comparative des démarches énergie-climat de trois territoires de la région Rhône-Alpes. Le choix de la région est pragmatique car je me situais lors de la réalisation de cette thèse professionnelle à Grenoble. Ensuite, je voulais absolument avoir trois territoires différents afin de toucher la diversité des situations et de mieux comprendre comment chacun se positionnent dans ce patchwork de territoire et de possibilités d'actions.

Enfin, je me suis servi de mes connaissances empiriques au travers des missions que j'ai pu réaliser au sein du cabinet Argos.

1 L'ensemble des travaux et documents sur lesquels je me suis basé pour ce travail sont dans la bibliographie.

I. La lutte contre le changement climatique : une politique de développement durable

La lutte contre le réchauffement climatique est une des 5 finalités du développement durable. En tant que telle, toute action publique de lutte contre le réchauffement climatique devra respecter les principes fondamentaux du développement durable. Afin de mieux comprendre ce qu'implique la mise en place d'une telle politique et en particulier les incidences dans la gouvernance des institutions locales, nous allons dans un premiers temps nous intéresser aux principes du développement durable puis au rôle que jouent les collectivités pour engager la société sur cette voie.

A. Les principes des politiques de développement durable

Le développement durable s'appuie sur des principes fondamentaux. Parmi l'ensemble de ces principes, trois nous intéresseront particulièrement car ils influent directement sur la gouvernance des collectivités territoriales.

Le premier est le principe de participation (principe n°10 de la déclaration de Rio). Il encourage tout processus de démocratie participative en incitant les acteurs publics à développer leur connaissance des besoins des citoyens. Cette meilleure connaissance sera possible grâce à la diffusion et la transparence d'information entre les acteurs publics et les citoyens, et en encourageant la concertation avec l'ensemble des acteurs, dont la société civile, afin de déboucher sur des prises de décision partagées.

Le second est le principe de subsidiarité2 (principe n°13 de la déclaration de Rio). Il s'agit d'agir au niveau le plus pertinent dans une perspective de politique de proximité tout en respectant le partage des compétences entre les différents niveaux territoriaux. Il faut responsabiliser les acteurs concernés dans la mise en oeuvre concrète des actions favorisant le développement durable. Le principe de subsidiarité s'applique également afin de répartir et coordonner les actions et les objectifs menés par les différentes échelles territoriales (commune, communauté de communes, département, région, etc.).

2 Cf. témoignage de Xavier Favrolt, Chargé de mission Plan climat du Conseil Général d'Isère, p 32

Enfin, le dernier est le principe de transversalité3 (principe n°27 de la déclaration de Rio) qui favorise l'intégration en amont des dimensions sociale, environnementale et économique. Ce principe s'applique également aux acteurs qui vont participer au processus de décision, dans le cadre de la gouvernance : toute personne compétente sur le sujet est invitée à participer. Ces acteurs peuvent être issus d'associations, d'entreprises, être élus ou simple citoyen : la représentation de tous les acteurs de la société est nécessaire pour la transversalité de la décision.

Ces principes réaffirment la nécessité d'effort collectif à toutes les échelles d'actions possibles. Ainsi les collectivités territoriales et les territoires de projets ont un rôle déterminant dans la transition que doit engager la société pour répondre à ses besoins sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs.

B. Rôle des collectivités : Agir local, penser global

« Je crois que ça ne sert à rien d'avoir une réflexion globale sur la planète, si on n'agit pas localement, et qui peut agir localement si ce n'est d'abord les collectivités locales ? » (Jacques BIGOT, Maire d'Illkirch-Graffenstaden, Président de la Communauté urbaine de Strasbourg)4

L'ensemble des collectivités territoriales françaises doivent s'inscrire dans une démarche permettant d'atteindre les objectifs européens et nationaux en matière de lutte contre le changement climatique :


· Les objectifs européens : les 3 fois 20 pour 2020

L'objectif est de réduire de 20 % les émissions de GES, d'améliorer de 20 % l'efficacité énergétique et de porter à 20 % la part des énergies renouvelables dans la consommation finale d'énergie. L'objectif de réduction européen des émissions d'ici 2020 pourrait être porté à 30 %, récemment 7 pays de l'Union Européenne (La France non incluse) estiment que le relèvement de l'objectif est impératif5.

3 Cf. témoignage de Frédéric Jacques, Chargé de mission Plan-climat de la commune de Voiron, p24

4 Interview Terre TV [ http://www.terre.tv/fr/1959le-plan-climat-territorial]

5 « Climat : 7 pays de l'UE plaident pour une réduction de 30% des émissions de GES d'ici 2020 », 20 minutes, le 14/03/2011 [en ligne] [ http://www.20minutes.fr]


· Le facteur 4 pour la France à l'horizon 2050

Afin de contribuer à la stabilisation du climat à une hausse des températures contenue à 2°C par rapport à la période préindustrielle, la France s'est fixée comme objectif national de diviser par 4 ses émissions de GES (sur base 1990) d'ici 2050. La France, par le facteur 4, contribuera à l'objectif de convergence mondiale des trajectoires d'émission pour une stabilisation du climat sur terre dans le XXIe siècle. Cet objectif a été inscrit dans la loi en juillet 2005 (Loi n°2005-781 du 13 juillet 2005). Ce niveau d'exigence est exprimé dans la loi sous la forme d'une réduction de l'intensité carbone de 3 % des émissions par an. C'est le niveau de progrès que la France doit accomplir pour s'inscrire dans l'objectif global planétaire. Car la division par deux des émissions mondiales d'ici 2050 devra être obtenue tandis que la population humaine devrait augmenter de moitié d'ici là.

Si le changement est global, ses conséquences en revanche, seront bien locales. Les modifications de température, de précipitations (annuelles ou saisonnières), de vents, auront des traductions spécifiques et ciblées dans chaque territoire. Ces conséquences devront donc être traitées au niveau local. Par ailleurs, les problèmes posés varieront selon le territoire concerné, sa géographie, son développement urbain et économique, sa population ; autant de données qui définissent le degré d'exposition aux principales menaces du changement climatique (montée des eaux, inondations, érosion des sols, épisodes caniculaires, sécheresses, etc.). Les collectivités sont les plus à méme d'identifier les spécificités de leurs territoires et de concevoir des actions répondant aux besoins locaux.

Actuellement, elles contribuent, de façon directe, à environ 12 % des émissions nationales de GES et agissent, de façon indirecte, sur plus de 50 %, à travers leur politique d'aménagement du territoire et d'urbanisme, d'habitat, de transport,... 6 En tant que premier niveau de l'autorité publique, elles sont les mieux placées pour mobiliser les multiples acteurs de la vie locale et pour favoriser les évolutions de comportements des citoyens. Or, ces évolutions sont déterminantes car la sphère privée représente 50 % des émissions de GES.

6 Source : Ademe [ http://www2.ademe.fr/servlet/KBaseShow?sort=-1&cid=96&m=3&catid=13092]

Le lois Grenelle I et II réaffirment l'importance des collectivités territoriales en rendant obligatoire l'établissement de PCET pour les collectivités de plus de 50 000 habitants (art.7 du chapitre II, loi « Grenelle 1 »). La loi Grenelle 2 (Article L. 2224-34) précise que toutes les collectivités de moins de 50 000 habitants, ainsi que les territoires de projet ont la possibilité, s'ils le souhaitent, d'engager volontairement un PCET.

Les efforts qui doivent être consentis pour atteindre les objectifs nationaux et internationaux sont en premier lieu portés par les collectivités locales et les territoires de projets. Ce sont leurs efforts collectifs qui feront la différence. En tant que politique de développement durable, les PCET devront s'appuyer sur une gouvernance multi-niveaux et leur démarche devra être transversale. Nous pouvons alors nous demander si le système de décentralisation Français, avec les réformes actuelles (RGPP et réforme des collectivités), peut répondre à ces impératifs ?

II. La décentralisation française est-elle adaptée à la lutte contre le changement climatique ?

De grandes avancées ont eu lieu en matière d'organisation et de partage du pouvoir ces 30 dernières années, cependant le chantier est loin d'être fini, la preuve en est les réformes conséquentes que connaissent l'Etat et les collectivités territoriales. Dans un premier temps nous verrons en quoi la décentralisation fut nécessaire et comment elle est appliquée. Cette partie ne va pas développer en détail le système décentralisé Français, cependant comprendre comment sont réparties les compétences et quels sont les limites de ce système nous permettra d'appréhender le concept de « territorialisation des politiques publiques » développé dans la partie suivante.

A. L'inévitable décentralisation

Dès lors que l'on évoque la décentralisation, nous faisons référence aux lois Defferre du 2 mars 1982, cependant le processus fut antérieur à ces lois et continue à nos jours. A travers son histoire la France et surtout les territoires de France se sont toujours efforcés d'obtenir une participation plus importante dans les processus de décisions, assurant ainsi plus de démocratie à la population. La décentralisation est considérée comme la réponse la plus adaptée à la gestion publique. A travers ce système politique, les élus créent un lien de proximité avec les administrés permettant de gérer au mieux la Cité. Dans cette quête permanente vers plus de démocratie, il est incontestable que les lois Defferre revêtent d'une ampleur sans précédent depuis le début du XIXème siècle. Ces lois avaient pour but de réduire les résistances à un bouleversement qui poursuivait trois objectifs : rapprocher les citoyens des centres de décision, responsabiliser les autorités élues et leur donner de nouvelles compétences, et favoriser le développement des initiatives locales.

Selon J.C Thoenig et P. Duran, « La politique de décentralisation décidée par le gouvernement et par le Parlement a, de manière inattendue et spectaculaire, redistribué la donne institutionnelle. Sans nul doute, le changement des règles a profondément modifié le jeu. Elle constitue une réforme à la fois rétrospective et prospective. Rétrospective, car elle

entérine les évolutions de la gestion publique locale; prospective, car elle ouvre de nouvelles perspectives d'action. »7

Parmi les principaux changements constitués par ces lois, les transferts de compétences représente le sujet le plus controversé. L'Etat a transféré des blocs de compétences qui étaient auparavant les siennes au bénéfice des communes, des départements et des régions.

La loi du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat a posé trois grands principes devant présider aux transferts de compétences :

1°) Les transferts doivent être globaux : chaque domaine de compétence est attribué en totalité soit à la région, soit au département, soit à la commune. Mais la loi assortit cette règle d'une réserve : il en est ainsi « dans la mesure du possible »

2°) Les compétences, à chaque niveau, sont, en principe, exclusives. Cela signifie que les transferts ne doivent pas provoquer l'ingérence d'une collectivité dans les affaires d'une autre. En effet, est interdite toute tutelle exercée par une collectivité supérieure (par exemple, la région) sur une collectivité de niveau inférieur (par exemple, le département ou la commune). Suite à la révision constitutionnelle de mars 2003, ce principe a été inscrit dans la Constitution (à l'article 72 alinéa 5).

3°) Les transferts de compétence doivent être rigoureusement accompagnés du transfert par l'Etat aux collectivités ou de la mise à leur disposition des moyens nécessaires à l'exercice des compétences transférées. Là encore, ce principe a été constitutionnalisé (à l'article 72-2 alinéa 4 de la Constitution).

7 Jean Claude Thoenig et Patrice Duran, L'Etat et la gestion publique territoriale, Revue française de science politique, 46ème année, n°4, 1996.pp. 580-623

Il convient d'ajouter un quatrième principe introduit par la révision constitutionnelle de mars 2003 : le principe de subsidiarité. L'article 72 alinéa 2 de la Constitution dispose ainsi que « Les collectivités territoriales ont vocation à prendre les décisions pour l'ensemble des compétences qui peuvent le mieux être mises en oeuvre à leur échelon ».

Le tableau suivant permet d'avoir une vision complète des compétences des collectivités.

Tableau des compétences actuelles des collectivités

Formation professionnelle et

apprentissage

Région

Définition de la politique régionale et mise en oeuvre

Département

Communes ou EPCI

Enseignement

Culture, vie

sociale,

jeunesse, sport et loisir

Lycées (bâtiment, TOS)

· Culture (patrimoine,

éducation, création,

bibliothèques, musées,

archives)

· Sports (subventions)

· Tourisme

 

Collèges (bâtiment, TOS)

· Culture (éducation, création,
bibliothèques, musées, archives)

· Sports (équipements et
subventions)

· Tourisme

 

Ecoles ((bâtiment)

· Culture (éducation, création, bibliothèques, musées,
archives)

· Enfance (crèche, centre de loisirs)

· Sport (équipements et
subventions)

· Tourisme

 

· Schéma régional
(SRADDT)

· CPER

Espace naturel

Parcs régionaux

Eau (participation au

SDAGE)

SRADDT (avis, approbation)

Espace naturel

Déchets (plan départemental) Eau (participation au SDAGE)

Action sociale facultative

(CCAS)

PLU, SCoT, Permis de construire, ZAC

SRADDT (avis, approbation)

Déchets (collecte, traitement) Eau (distribution, assainissement) Energie (distribution)

Port de plaisance Aérodromes

Voirie

Transports

Schéma régional

Transports ferroviaires

Voies départementales

Transports routiers et scolaires hors milieu urbain

Voies communales

Transports urbains et scolaires

Communication

Logement et

habitat

Gestion des réseaux

Financement

Gestion des réseaux

Financement, parc et aide (FSL), plan et office de l'habitat

Gestion des réseaux

Financement, parc et aides (PLH)

Développement économique

Sécurité

Aides directes et indirectes

Aides indirectes

Circulation

Prévention de la délinquance Incendie et secours

Aides indirectes

Police municipale

Circulation et stationnement Prévention de la délinquance

Action sociale et médico sociale

Urbanisme

L'action sociale en faveur des personnes âgées, des personnes handicapées, de l'enfance, de la famille et des personnes en difficulté

Aménagement du territoire

Environnement

Grands Equipement

 

Ports fluviaux Aérodromes

 

Ports maritimes, de commerces et de pêches

Aérodromes

Tableau élaboré par l'auteur

En analysant ce tableau nous constatons que dans plusieurs domaines les collectivités ont des compétences similaires. Bien que dans certains cas l'attribution des rôles peut sembler claire (éducation), la coordination inter-territoriale devient indispensable pour certaines thématiques, particulièrement celles qui ont attrait à l'environnement naturel. Afin de se prémunir d'une rigidité qui nuirait à l'action publique, le législateur à élaboré une clause générale de compétence. Par celle-ci la loi dispose qu'indépendamment des compétences que les collectivités tiennent expressément de la loi, elles peuvent agir et prendre des décisions sur le fondement de l'intérêt général local.

Les bilans couramment dressés relèvent les nombreux acquis de la décentralisation (meilleure prise en compte des problèmes locaux, renforcement de la capacité d'initiative des collectivités, participation accrue des citoyens à l'échelle locale...) mais ils soulignent aussi des frictions entre l'Etat et les collectivités et entre collectivités ainsi qu'un insuffisant transfert de moyens. Il est important pour nous de comprendre les faiblesses actuelles de ce système de gouvernance car au regard de ce que nous avons analysé, la centralisation du pouvoir ne va pas de paire avec les politiques de développement durable qui doivent se reposer en grande partie sur l'échelon local. Ainsi, la décentralisation semble être le cadre politique le plus approprié pour répondre aux enjeux de lutte contre le changement climatique.

B. Critiques de la décentralisation

« La loi désormais votée a comme premier défaut majeur de ne pas traiter le sujet clé des compétences, celles des collectivités mais aussi celles de l'Etat, qui s'est évidemment affranchi de ce devoir [...] Cette réforme est une évidente recentralisation, à un moment où l'Etat n'en a plus les moyens, ni financiers ni humains. »8 (Alain Rousset, Président de la Région Aquitaine)

Cette critique d'Alain Rousset, Président de la Région Aquitaine et de l'Association des Régions de France (ARF) illustre parfaitement l'inquiétude actuelle des collectivités face à une réforme qu'elles jugent pour la plupart nécessaire mais dont l'élaboration et la mise en oeuvre sont vivement critiquées. Nous allons analyser les principales critiques de la

8 Interview d'Alain Rousset, Institut François Mitterrand, le 16 décembre 2010, [en ligne] [ http://www.mitterrand.org/Revenons-a-l-espritdes-lois.html]

décentralisation avec pour objectif de juger si le système actuel est compatible avec les impératifs de gouvernance dans le cadre d'une politique de lutte contre le changement climatique.

1. Une décentralisation inachevée

La décentralisation française est réelle. Les collectivités sont administrées par des assemblées élues qui bénéficient de ressources propres et qui possèdent des compétences inscrites dans la loi. Cependant, ces grands mouvements de décentralisation n'ont pas été accompagnés d'un recul suffisant de l'Etat.

« De manière générale, l'Etat, l'administration centrale, rechigne à sélectionner ses interventions, à se concentrer sur ses responsabilités régaliennes, pourtant majeures. Au lieu de quoi, l'Etat paraît toujours désireux de s'occuper de tout, alors même qu'il porte un discours de rationalisation que l'on ne peut que partager sur le fond.9 » (Alain Rousset, Président de la Région Aquitaine)

2. Enchevêtrement des compétences

Les politiques transversales (lutte contre le changement climatique, gouvernance alimentaire, etc.) ne trouvent pas de chef de file pour les porter. L'enchevêtrement des compétences et la concurrence entre les territoires tend à diluer les rôles de chacun et au final, c'est un facteur de déresponsabilisation des décideurs. Cet imbroglio fut renforcé par la constitutionnalisation (article 72) en 2003 de l'interdiction de toute tutelle d'une collectivité territoriale sur une autre. Au final cette situation a opposé les grandes villes aux petites, la ville à la campagne et la région au département.

3. Efficience financière

La gestion publique nécessite une utilisation efficiente des finances, or les chevauchements
institutionnels nuisent à la maitrise de la dépense publique. Les citoyens et les élus perdent du
temps à se repérer dans cet éventail de financements croisés. Des projets prennent du retard et

9 Interview d'Alain Rousset, Institut François Mitterrand, le 16 décembre 2010, [en ligne] [ http://www.mitterrand.org/Revenons-a-l-espritdes-lois.html]

certaines actions sont parfois redondantes ou contradictoires. Par exemple, dans le cadre de la lutte contre le réchauffement climatique plusieurs collectivités mettent en place des actions des sensibilisations (Département, intercommunalité, etc.) ayant pour cible le grand public. Il est alors difficile de juger de l'efficacité de l'action et surtout de son efficience.

Bien que les faiblesses précédemment citées soient partagées, la réponse apportée est loin de l'être. La situation ne va pas en s'arrangeant puisque la souplesse qui était permise par la clause de compétence générale va disparaître. En effet, au 1er janvier 2015 cette clause sera supprimée pour les régions et les départements. En remplacement, ces collectivités auront la possibilité de mettre en place un « Schéma d'organisation des compétences et de mutualisation des services » qui fixera les délégations de compétences, l'organisation des interventions financières en matière d'investissements et de fonctionnement. A priori, les possibilités de partenariats sont donc maintenus. Toutefois nous pouvons craindre que cette évolution aura pour conséquence de spécialiser les collectivités désignées. D'autre part, les dotations de l'Etat aux collectivités territoriales sont gelées pour une période de 3 ans, de 2011 à 2013. Le risque est au final d'avoir un système plus rigide qui n'aura pas les moyens ni humains, ni financiers de traiter des domaines transversaux.

Nous avons pu constater les difficultés que pose le système de décentralisation français. Le dialogue entre les collectivités et l'Etat, et entre collectivités n'est pas aisé, pourtant la discussion est l'outil le plus adapté pour répondre aux maux actuels que connaissent les institutions politiques.

La notion de développement durable qui peut se résumer à travers l'adage « agir local, pensez global » ne va pas de paire avec un mouvement de recentralisation du pouvoir et le développement des logiques sectorielles favorisées par la spécialisation des collectivités. La prise en compte de la diversité des territoires est nécessaire afin d'atteindre les objectifs nationaux et internationaux. Il est donc impératif de poser les bases d'un système permettant le dialogue et la transversalité.

Ce mouvement est déjà en marche. Le Grenelle de l'Environnement fut la première action institutionnalisée à l'échelle de l'Etat d'une démarche partagée. Toutefois, les collectivités locales ont depuis longtemps innové afin de pallier aux défauts du système décentralisé français. Portées par le mouvement de démocratie participative10, plusieurs collectivités ont initié des démarches favorisant la discussion entre acteurs institutionnels, privés et issus de la société civile. Dans la partie suivante nous analyserons comment ce mouvement volontaire répond en partie aux faiblesses de la décentralisation.

10 La démocratie participative est une forme de partage et d'exercice du pouvoir, fondée sur le renforcement de la participation des citoyens à la prise de décision politique.

III. La territorialisation : institutionnalisation d'une nouvelle forme d'action publique pour lutter contre le changement climatique

La décentralisation avait pour objectif de rendre plus efficace la gestion publique en améliorant son adaptation à la complexité des situations territoriales. Cependant, les entités administratives se sont vite aperçues du manque de flexibilité et de cohérence face à un environnement systémique qui connait des changements aussi brutaux que rapides. Les collectivités territoriales sont les premières concernées par la complexité du réel et elles ont du depuis longtemps trouver des moyens et des procédures leur permettant de répondre de façon efficace et pertinente aux enjeux du terrain, tout en respectant les règles édictées par l'administration. Nous allons voir dans cette partie comment le dogme des blocs de compétences s'est émietté au fil du temps et en quoi la territorialisation, comme processus de construction des politiques publiques, est une alternative propice afin de réconcilier la gestion publique aux enjeux du développement durable des territoires

A. De la décentralisation à la territorialisation des politiques publiques

En transposant des blocs de compétence à d'autres niveaux, la décentralisation n'a pas permis de prendre en compte la diversité des territoires. Au final, les compétences n'étaient considérées qu'en termes de répartition y voyant le seul moyen de parvenir à une clarté des responsabilités, condition de la sanction citoyenne par le vote. Nous comprenons d'autant mieux les critiques vis-à-vis du monde politique : trop de bureaucratie, trop d'enchevêtrement des procédures et pas assez de cohérence, ni de projet collectif. Ce sont ces raisons qui ont donné lieu en mars 2003, à l'instauration du principe de subsidiarité qui remet en cause la logique des blocs de compétences en permettant à toutes les collectivités, de quelques niveaux que ce soit, de prendre directement en charge les affaires qui leur sont propres, même si elles ne correspondent pas à leurs compétences obligatoires, ceci afin de maximiser l'efficacité de l'action.

Historiquement, ce principe a permis aux collectivités de se questionner sur l'échelle la plus
appropriée pour traiter d'une thématique. Cette réflexion a mis en exergue l'absurdité des

limites administratives pour traiter certaines thématiques. Par exemple, la gestion de l'eau n'est cohérente que si elle se gère à l'échelle d'un bassin versant ; idem pour la question des transports et des modes de déplacement, qui pour être pertinente s'aborde à l'échelle d'un bassin de vie. Il fut donc nécessaire pour les collectivités d'innover afin d'inventer des modes de gestion qui favorisent l'articulation des échelles. On constate alors la création de nouveaux territoires. Selon Bernard Pecqueur, « dès lors que dans un espace géographique délimité, même s'il n'est pas strictement borné, il est globalement délimité, des acteurs font immerger une question et ensuite tentent de résoudre le problème commun, ils fabriquent du territoire et dès lors on a de la construction territoriale »11. Ces territoires sont spécifiques car ils n'existent qu'au travers d'un intérét, d'une problématique, d'un projet partagés par les acteurs qui le composent. Ils peuvent correspondre à des découpages politico-administratifs (régions, départements, etc.) mais également se superposer à eux.

La « découverte du territoire » a profondément modifié le cadre d'intervention de l'action publique en questionnant la logique sectorielle qui prévalait. Par tradition, les collectivités territoriales, et particulièrement les régions et les départements, ont défini des politiques verticales, sectorielles, cloisonnées en fonction des différents secteurs d'activité. Cette logique ne permet pas d'aborder la complexité du territoire et elle conduit parfois à une fragmentation excessive des politiques publiques, à une perte de visibilité et au final à une multiplication des coûts cachés. Dès lors la logique de projet est favorisée puisqu'elle permet le passage d'une obligation de moyens à une obligation de résultats. Ce n'est plus le respect de la règle qui prévaut mais le résultat final. Cette logique fondamentalement transversale, modifie les politiques publiques en les ajustant aux spécificités du territoire sur lequel elles s'appliquent. Le débordement du cadre d'intervention sectoriel par les politiques dites « territoriales » apparaît aujourd'hui comme la règle. « La « territorialisation » des politiques publiques devient [...] une sorte d'évidence dans l'action publique sans que l'on sache toujours s'il s'agit de déconcentration, de décentralisation ou de management organisationnel » (A. Faure, 2004).

La territorialisation des politiques publiques implique le passage d'une politique uniforme,
pour laquelle les mémes règles sont applicables sur l'ensemble du territoire de compétence, à

11 B.Pecqueur, Vidéo XLVIème colloque de l'ASRDLF, le 7 juillet 2009, [en ligne] [ http://www.territoriesnet.org/territoryconcept/?p=49&lang=fr]

une politique adaptée aux spécificités des espaces identifiés12. Le territoire est le résultat, alors que la territorialisation est le processus, c'est-à-dire la mobilisation des acteurs endogènes pour la mise en place d'une politique publique. La territorialisation ne correspond pas à une définition juridique stabilisée mais elle semble être devenue la nouvelle norme. On le constate au travers d'un véritable mouvement de territorialisation des politiques publiques.

La territorialisation de la gestion publique locale concerne tout à la fois la définition des

politiques publiques et de façon plus opérationnelle les pratiques administratives. Elle

contraint à repenser les rapports entre administrations sectorielles. Lors de mes entretiens,

hormis le Pays d'Ardèche Verte qui est un territoire de projet13 et a une organisation assez

souple, les chargés de mission PCET des deux collectivités (commune de Voiron et Conseil

Général d'Isère) m'ont parlé d'une évolution du management en interne qui se déroule de

façon concomitante avec la territorialisation de leur plan-climat. Cette transformation

progressive a pour objectif, entre autres, de favoriser l'approche transversale de l'élaboration

des politiques publiques.

« On travaille sur une modernisation de l'Administration, donc il y a un programme au

niveau de « l'entreprise » collectivité Ville de Voiron où l'on trouve des référents par service

et par direction pour se poser les bonnes questions sur le travail que l'on fait [...] Le fait

qu'il y ait des référents, c'est des gens quand même qui sont convaincus. C'est des gens qui

sont porteurs des messages et puis c'est intéressant parce que ça donne du poids en fait. Faut

surtout pas qu'un Plan climat ne soit que de la responsabilité d'une seule personne, le chargé

de mission. Il faut qu'après dans chaque direction, etc., il y ait une déclinaison » (Frédéric

Jacques, Chargé de mission PCET, Ville de Voiron)14

La territorialisation concerne également les relations avec les citoyens et les acteurs du

territoire qui vont être amenés à participer, à co-construire des politiques publiques locales

complètement adaptées aux besoins de chacun des territoires.

12 La territorialisation : menace ou levier de l'action publique ?, Atelier organisé par l'INET, 5 et 6 décembre 2007

13 Un territoire de projet se définit comme « l'espace économique, social et physique sur lequel un projet de territoire s'élabore. Organisé, il est en capacité de contractualiser sur un projet global avec les autorités chargées de l'aménagement et du développement territorial ».

14 Frédéric JACQUES, chargé de mission PCET, entretien réalisée le lundi 1er août 2011, ville de Voiron, [42 min. 30 secondes de l'enregistrement]

Afin de clarifier le processus de territorialisation nous allons dans la partie suivante nous intéresser aux caractéristiques de ce concept.

B. Caractéristiques du processus de territorialisation

Le concept de territorialisation n'étant pas encore stabilisé, il nous est impossible de donner une liste établie des caractéristiques endogènes de ce processus. En revanche, la littérature actuelle sur le sujet est riche et les auteurs sont nombreux. En nous appuyant sur un nombre important de travaux réalisés, nous essaierons d'identifier les caractéristiques des processus de territorialisation. Cette clarification du concept nous servira notamment, dans la partie suivante, pour l'analyse des PCET.

L'ensemble des lectures m'a permis d'isoler cinq caractéristiques importantes des processus de territorialisation. Tout d'abord la vision partagée, nous l'avons vu un territoire apparaît autour d'un projet, d'une problématique partagée par un ensemble d'acteurs qui fait, qu'à un moment donné, ils se rencontrent et discutent pour établir une réponse collective. C'est donc à partir de cet accord commun que va débuter le processus de territorialisation.

Ensuite, les pratiques partenariales sont la règle. « Les acteurs ou groupes d'acteurs qui participent à cette construction territoriale peuvent avoir des mobiles et des processus très divers pour se regrouper en vue d'un avantage dont chaque membre serait bénéficiaire (groupe de pression, syndicat, entreprise) »15. Ce sont les échanges qui vont enrichir le processus car c'est la confrontation d'acteurs engagés dans l'action concrète qui permet de dégager une philosophie générale de l'action (vision partagée).

Puis le changement de paradigme à travers le passage de la règle aux résultats. L'expression des intérêts dont sont garants les « niveaux supérieurs » ne se fait pas par la mise en oeuvre de règles uniformes s'appliquant à des individus isolés, mais par la formulation d'obligations de résultats. Cette évolution favorise le passage d'une logique sectorielle à une logique territoriale. « Il serait aujourd'hui impensable de comprendre l'action publique sans prendre

15 Fabienne LELOUP, Laurence MOYART et Bernard PECQUEUR, La gouvernance territorial comme nouveau mode de coordination territoriale (Article scientifique), Géographie, économie, société 7, 2005

en compte les relations sociales localisées, ce qui constituerait un tournant de taille dans la mesure où les analyses « classiques » de l'action publique ont précisément expliqué le développement des politiques publiques par le passage du territoire au secteur comme mode de régulation sociale » 16 (Anne-Cécile Douillet, 2005). Ces obligations de résultats s'adressent à la communauté des partenaires (fonctionnaires d'Etat, fonctionnaires territoriaux, acteurs privés économiques et associatifs, etc.) et à travers la pratique partenariale qu'elles créent, elles favorisent un apprentissage permanent de la pertinence de l'action et de la recherche de sens.

Ainsi, les échanges d'expériences encadrent tous processus de territorialisation. « Des auteurs ont déjà montré que l'action publique locale relevait de plus en plus d'un processus d'apprentissage, le tournoi, dans lequel différents acteurs confrontaient et adaptaient sur un espace politique réduit et dans une temporalité limitée leur vision des problèmes collectifs » (Lascoumes, Le Bourhis, 1998)17. Il n'y a pas de savoir supérieur transcendant le local et dont la légitimité immanente permettrait de définir dans l'abstrait des obligations de résultat. Ce n'est plus le respect de la règle qui prime mais la manière dont elle a été définie et mise en oeuvre localement, en double référence aux finalités poursuivies (dont certaines sont formulées par des instances régionales ou nationales) et aux réalités spécifiques de chaque contexte.

Enfin, l'adaptabilité permanente qu'imposent tous processus de territorialisation entraîne la démarche dans une recherche constante d'TINTIMITT. Celle-ci permet d'une certaine façon de s'affranchir d'un carcan de réglementations ou de représentations juridiques détaillées et minutieuses. L'entretien réalisé avec le chargé du PCED d'Isère nous montre l'importance de l'innovation à travers l'expérimentation au sein des collectivités.

« Chacun en fonction de la position qu'il a, a développé la méthodologie appropriée et donc
aujourd'hui les méthodologies standards nationales ne sont qu'une compilation des
différentes expériences au niveau intercommunale et communale qui ont été lancées. En

16 Anne-Cécile Douillet, 2005, Fin des logiques sectorielles ou nouveaux cadres territoriaux ?, paru dans L'action publique et la question territoriale, Presses Universitaires de Grenoble

17 Alain Faure, 2005, Intercommunalité et pouvoir d'agglomération : les nouveaux tournois de l'action publique, paru dans L'action publique et la question territoriale, Presses Universitaires de Grenoble

essayant de faire valoir cet aspect « mobilisation du terrain » et cet aspect « gestion des compétences propres ». Nous, on s'inscrit dans cette démarche »18.

Dans une telle dynamique, l'administration centrale de l'Etat ne va pas tirer sa légitimité de l'autorité hiérarchique, exercée par l'édiction de normes générales, mais plutôt de son aptitude à animer un travail en réseau où sont impliquées différentes catégories d'acteurs.19

La territorialisation des politiques publiques permettant de repositionner le cadre de l'action collective au réalité du terrain est devenue la nouvelle norme. Toutefois, il convient de rester prudent car ce processus comporte également des risques. Par exemple, les échanges d'expérience, favorisés par le développement de notre société de communication, contribuent au processus d'isomorphisme institutionnel qui imprègne le fonctionnement des collectivités et de leurs élites administratives, techniques et politiques. Ce phénomène de mimétisme risque d'être contre productif car l'adaptabilité, la personnalisation des politiques publiques tant recherchée risque de n'être qu'au final une pâle copie de ce qui aura était fait ailleurs sans cohérence avec le contexte local. Nous ne développerons pas ici les risques que peuvent comporter tous processus de territorialisation puisque nous allons l'étudier au prisme de notre analyse comparative des PCET dans la dernière partie. Cependant, il est intéressant de constater le renouveau des politiques publiques locales au travers de leur territorialisation. Les politiques de lutte contre le réchauffement climatique n'y ont pas échappé puisque la France, via les Grenelle I et II a renforcé la territorialisation des politiques climatiques et énergétiques.

18 Xavier Favrolt, Chargé de mission PCED Isère, entretien réalisé le mardi 2 août, Conseil Général, [33 min. 30 secondes de l'enregistrement]

19 Pierre Calame, le principe de subsidiarité active, [en ligne] [ http://www.institut-gouvernance.org]

IV. Le PCET : politique territorialisée de lutte contre le changement climatique

Nous avons établi que le système de décentralisation français, et surtout la tendance qu'il prend, ne constitue pas un cadre optimal de gouvernance pour l'établissement d'une politique de lutte contre le réchauffement climatique. L'adaptation nécessaire d'une telle politique aux spécificités du territoire serait freinée par les frictions entre les échelles administratives. En revanche la territorialisation, comme processus de construction de cette politique, semble correspondre aux impératifs nécessaires au développement d'un Plan Climat. La souplesse requise, la vision sur le long terme, et la démarche fédératrice nécessaire, sont « les ingrédients » qu'offrent les processus de territorialisation. C'est d'ailleurs le choix qu'a fait la France en rendant obligatoire l'instauration de PCET au sein de toutes les collectivités de plus de 50 000 habitants et ceci avant le 31 décembre 2012. Après avoir clarifié ce qu'est un PCET, nous allons analyser les modalités de leur mise en place et ses conséquences sur la gouvernance des territoires.

A. Le PCET : un outil de projet territorial de développement durable

Un PCET est un projet territorial de développement durable dont la finalité première est la lutte contre le changement climatique. Institué par le Plan Climat national et repris par les lois Grenelle 1 et 2, il constitue un cadre d'engagement pour le territoire. Le PCET vise deux objectifs : l'atténuation, qui a pour ambition de limiter l'impact du territoire sur le climat en réduisant les émissions de gaz à effet de serre (GES) dans la perspective du facteur 4 et l'adaptation, qui consiste à réduire la vulnérabilité du territoire puisqu'il est désormais établi que les impacts du changement climatique ne pourront plus être intégralement évités. Le PCET vient s'intégrer au projet politique de la collectivité. Si un Agenda 21 local préexiste, il en renforcera le volet « Energie-Climat. Dans le cas contraire, il pourra en constituer le premier volet.

La loi Grenelle 2 définit précisément le cadre d'établissement des PCET. Selon son article L.222-1, « [...] les départements, les communautés urbaines, les communautés l'agglomération ainsi que les communes ou communautés de communes de plus de 50 000 habitants doivent avoir adopté un plan climat-énergie territorial pour le 31 décembre 2012.

Source : Ademe, Observatoire des PCET, août 2011

[...], ce plan est défini, dans les champs de compétences respectifs de chacune des collectivités publiques énumérées. »

L'article L. 2224-34 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé : « Les communes ou établissements publics de coopération intercommunale de moins de 50 000 habitants, les syndicats mixtes, notamment les syndicats visés au premier alinéa du présent article et les pays prévus par l'article 22 de la loi no 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire qui ne sont pas soumis à cette obligation peuvent adopter un plan climat-énergie territorial. »

B. Conséquences collatérales du Grenelle de l'Environnement

A la lecture de ces articles, nous relevons deux points importants.

1. Imbrication des échelles

Premièrement, il est important de noter que les Plans-Climat sont obligatoires pour un peu
plus de 200 collectivités (régions, départements, communauté de communes, communauté
d'agglomération, communes, etc.) et qu'ils recouvrent l'ensemble du territoire national. A

cela, viennent s'ajouter les territoires de projets (Pays, PNR SCoT, etc.) qui ont la possibilitéd'établir un PCET. Les territoires les plus denses seront forcément plus investis et ils verront s'entremêler un nombre plus important d'initiatives climat.

Au total cela fait un grand nombre de PCET d'autant plus que la transversalité de la démarche impose une cohérence avec les autres politiques du territoire. Le schéma ci-dessous représente l'articulation entre les politiques climats et les documents d'urbanisme.

L'importance majeure est la différence entre la compatibiité et la prise en compte. Dans le premier cas, même si des différences peuvent subsister entre les documents, ceux de rang inférieur ne devront pas remettre en cause les options fondamentales arrêtées à l'échelon supérieur. En revanche, la prise en compte ne définit aucun lien juridique. Par exemple, les SCoT doivent prendre en compte les PCET qui sont sur leur territoire, mais si l'instance instigatrice du PCET n'est pas satisfaite de l'orientation que prend le SCoT, elle n'aura pas la possibilité de le retoquer sous prétexte qu'il représente un frein à l'atteinte des objectifs du

Energie

Bâtiment

Transports

Déchets

Eau

Santé

PCET. Néanmoins, ces derniers (instigateurs) pourront prendre part aux ateliers qui détermineront les conditions de réduction des émissions de gaz à effet de serre, la maîtrise de l'énergie et la production des énergies renouvelables, la préservation de la qualité de l'air (L 121-1 du Code de l'urbanisme).

2. la nécessité d'avoir la maîtrise d'ouvrage

Les actions d'atténuation et d'adaptation doivent se limiter aux compétences de chacun. A priori, certaines collectivités sont plus favorisées que d'autres par leurs compétences dans tel ou tel champ du PCET, toutefois l'enjeu est d'appliquer une politique d'ensemble, cohérente à l'échelle des territoires. Le tableau suivant ne se veut pas exhaustif, cependant il permet d'avoir un aperçu des possibilités d'actions des collectivités en fonctions de leurs compétences, ainsi que les possibilités d'actions concernant les territoires de projets.

« ACTIONS PCET » des Collectivités territoriales

Commune ou
Intercommunalité

 

Département

 

Régions

 

Territoire de projet
(PNR, Pays, SCoT, etc.)

 
 
 
 
 
 

· Augmenter la part
d'énergie renouvelable de la collectivité

· Augmenter la part d'énergie renouvelable de la collectivité

n Effectuer des travaux d'isolation dans les
écoles

n Effectuer des travaux d'isolation dans les collèges

n Favoriser le

développement des modes de transport qui émettent le moins de GES en milieu urbain

n Favoriser le

développement des modes de transport qui émettent le moins de GES hors milieu urbain

n Amélioration des usines
de gestion des déchets

n

n Promouvoir la
prévention des déchets dans les collèges et en interne

type pour

 
 

Favoriser

l'implantation d'éoliennes et champs photovoltaïque

Animation d'une

démarche « économie

d'énergie »

Effectuer des travaux

Sensibilisation

à

d'isolation dans

lycées

les

l'isolation
bâtiments.

des

Favoriser

le

Sensibilisation

au

développement

des

développement

des

TER

 

modes de transports

doux.

· Promouvoir la
prévention des déchets dans les lycées et en interne

Sensibilisation au

triage des déchets

 

Améliorer l'efficience du

Diminuer les pressions

Diminuer les pressions

Sensibilisation aux

réseau de distribution des

sur la ressource en eau

sur la ressource en eau

économies d'eau

eaux

 
 
 

· Sensibiliser la population

Intégrer des critères

· Développer des

Sensibiliser la

concernant les périodes

d'adaptation aux

observatoires de la

population concernant

de canicule

changements climatiques dans le

santé

les périodes de

canicule

 

plan départemental

santé-nutritions

Etc.

 

·
·
·

·

·
·
·

·

·
·
·

·

·
·
·

Il peut paraître surprenant de constater que les collectivités ont la possibilité d'agir sur l'ensemble des thématiques, sachant que leurs compétences sont distinctes. Cependant, il faut rappeler que la clause générale de compétence leur permet d'agir, pour l'intérêt général, dans un domaine de compétence qui n'est pas forcément le leur. En revanche, en observant de plus près les actions, nous nous apercevons que celles qui ne relèvent pas directement du domaine de compétence de la collectivité se limitent soit à de la communication et de la sensibilisation, soit à des actions en interne. Dans tous les cas, même lorsque les actions sont à priori les mêmes, les collectivités essayent de se différencier afin d'éviter les redondances avec les autres échelles de gouvernance. Elles ont alors la possibilité de se différencier soit au niveau de la nature de l'action, soit au niveau de sa cible.

« Notre position fait que, à mon avis, on doit prendre en compte le fait qu'il y a beaucoup d'acteurs qui sont obligés de mettre en place un Plan-climat et que si on veut avoir une lisibilité publique, il ne faut pas que l'on fasse la même chose que les autres. Donc ça implique deux choses. D'abord travailler sur nos compétences propres qui ne sont pas gérées par les autres niveaux de collectivités, parce qu'il n'y a personne qui le fera à notre place, et puis éviter de marcher sur les plates-bandes des autres.... Et puis pareil, s'adresser à un public sans marcher aussi sur les plates-bandes des autres pour éviter ce problème de

lisibilité20 » (Xavier Favrolt, Chargé de mission PCED d'Isère)

Ce constat nous montre que la capacité de maîtrise d'ouvrage est l'élément fondamental pour jauger de l'étendue du champ d'actions possibles. Il est indéniable que pour certaines thématiques, les territoires de projet, bien souvent démunis de la maîtrise d'ouvrage, auront des moyens limités pour mener des actions. Le cas du Pays d'Ardèche Verte (PAV) est révélateur de ce problème. D'après Anne Micoud, directrice du PAV, ce n'est pas évident de motiver les élus du territoire sur les problématiques climatiques et en particulier sur la question de la mobilité. Le Pays d'Ardèche Verte est un territoire rural où les déplacements en véhicules motorisés sont fréquents. Au vu des connaissances incertaines de l'impact du changement climatique sur le territoire, une majorité d'élus ne voient pas l'intérêt de prendre des mesures qui, en l'état actuel, nuiraient au mode de vie des habitants. Le Pays n'ayant pas

20 Xavier Favrolt, Chargé de mission PCED Isère, entretien réalisé le mardi 2 août, Conseil Général, [33 min. 50 secondes de l'enregistrement]

la maîtrise d'ouvrage, le développement d'actions est, selon sa directrice, un exercice délicat. Le PAV est principalement financé par le Contrat de Développement Durable Rhône-Alpes (CDDRA) qui s'est orienté sur les actions de diminution des émissions de GES et l'adaptation du territoire aux effets du changement climatique. Le peu d'intérêt des élus sur ces questions, remet en question l'existence méme du Pays. Un territoire de projet se construit à travers le consensus des acteurs autour d'une « vision partagée ». Dans le cas du PAV, l'initiative vient de l'échelon supérieur à travers l'orientation que prennent les financements. Ces derniers, vitaux pour ce territoire, sont axés sur une problématique qui n'est pas partagée par ses élus. Ainsi, les actions actuelles consistent essentiellement à sensibiliser les élus sur l'importance d'engager le territoire dans la lutte contre le changement climatique. En d'autres termes le territoire « Pays » tente de construire la vision partagée nécessaire pour légitimiser son existence.

3. Accélération du processus

La période actuelle est marquée par une très forte inflation législative. L'empilement de réformes au sein des services déconcentrés de l'Etat (fusions des directions régionales, ...), des collectivités locales (modification des ressources financières : réforme territoriale), ainsi que la multiplication des documents de planification à élaborer (Schéma de Cohérence Ecologique, PCET obligatoire pour les collectivités de plus de 50 000 habitants, Schémas Régionaux Climat Air Energie à réaliser dans les 12 mois...) rendent incertain et difficilement lisible la traduction effective des multiples injonctions faites par le niveau central aux collectivités locales. Le caractère obligatoire de certains PCET et des SRCAE marque le second temps pour les politiques climatiques locales françaises, qui passent d'une période d'expérimentation volontaire à une période de normalisation réglementaire.

« J'ai l'impression que ce SRCAE qui a pour but de créer des orientations précises, à respecter par les plans-climat, c'est encore quelque chose d'assez mou quoi, mal défini... On n'a du mal à saisir comment les choses vont ressortir. Parce que, aujourd'hui le constat qu'on a fait à travers tous les scenarios qui ont été étudiés dans le cadre du SRCAE, c'est que même en plaçant les curseurs très hauts et en envisageant même parfois des sauts technologiques ; on n'arrive pas aux logiques « facteur 4 ». [...] Pour essayer de mettre en place ces changements forts d'organisation de société, il faut vraiment qu'il y ait un changement d'organisation sur plein de choses, la logistique, les déplacements, les outils de

travail,... enfin on n'est pas seulement « je rajoute des voitures électriques ». Je pense qu'aujourd'hui la Région et l'Etat sont forcément embarassés par rapport à ce constat. Parce que, comment approuver un schéma régional qui dans les faits n'arriverait pas à respecter les objectifs fixés au niveau national et européen ? [...] Au-delà d'un plan d'action et de concertation, on souhaite faire remonter à l'Etat que la mise en place d'un facteur 4 ne peut se faire que si des actions fortes au niveau de l'Etat, et notamment dans le domaine réglementaire, sont prises. Parce que le système incitatif ne sera pas suffisant.21 » (Xavier Favrolt, Chargé de mission PCED d'Isère)

Le témoignage exprime parfaitement l'empressement du processus de territorialisation imposé par l'Etat. Les territoires doivent se mettre en ordre de marche pour atteindre, dans les délais, leurs objectifs et ainsi contribuer à atteindre ceux de la France, de l'Europe et du Monde. Cependant cette course complexifie la reconfiguration des cadres de l'action publique. Pour ne pas retomber dans les travers de la décentralisation, les territoires doivent reconstruire leur identité vite et bien, afin de mieux discuter des modalités de leurs partenariats. Dans la dernière partie de notre réflexion, nous verrons comment trois territoires, situés à des échelles différente, territorialisent leur politique climat.

21 Xavier Favrolt, Chargé de mission PCED Isère, entretien réalisé le mardi 2 août, Conseil Général, [38 min. 18 secondes de l'enregistrement]

V. Etude de cas de la territorialisation des PCET en Région Rhône-Alpes

Les territoires de la Région Rhône-Alpes sont depuis de nombreuses années pionniers dans le domaine des politiques environnementales. L'exceptionnalité de l'environnement naturel du territoire et sa fragilité expliquent en partie cette sensibilité accrue. D'ailleurs, avec 25 PCET recensés et plusieurs autres en cours d'élaboration, la région est aujourd'hui celle qui compte le plus de plans-climat en France22. Ce développement rapide aboutit aujourd'hui à une situation particulière dans le sens où une grande partie des territoires rhône-alpins sont dotés d'un PCET alors méme que le SRCAE n'est pas encore élaboré. Une concertation a donc été lancée par la Conseil régional qui évidemment compte s'appuyer sur l'expérience de terrain des collectivités qui composent son territoire. Dans cette partie nous nous intéresserons justement à trois territoires qui sont engagés dans une démarche climat-énergie. Après les avoir présenté brièvement et constaté ce qui les sépare, nous allons analyser ce qui les rapproche afin de comprendre les difficultés relevées concernant la territorialisation des plansclimats.

A. Présentation des terrains d'études

Nous allons présenter les territoires d'études mais surtout les entités de gestion publique qui mettent en place le PCET. Un territoire se formant à partir des interactions entre les acteurs, leur présentation est aussi importante que celle de l'espace physique sur lequel ils interagissent. Notre échantillon se compose de deux collectivités (Département et commune) et d'un territoire de projet (Pays).

22 Cf Annexe 3 p60

LES TERRITOIRES D'ETUDES

 
 

Légende :

 

Pays d'Ardèche Verte Département d'Isère Commune de Voiron

 
 

Source : Daniel Dalet/ d-maps.com Conception : Yannick Monlouis, août 2011

1. La commune de Voiron

Voiron est une commune d'Isère située à 25 km au nord-ouest de la ville de Grenoble. La commune est une des portes du massif de la Chartreuse. Ayant une population d'environ 21 000 habitants23, elle ne fait pas partie des collectivités qui ont l'obligation de mettre en place un PCET. Cependant, les élus ont eu la volonté de s'engager dans cette démarche et le plan climat de la ville fut voté en mai 2009. Pour faire vivre le PCET un chargé de mission a été recruté et actuellement le plan est en phase de mise en oeuvre.

2. Le département d'Isère

L'Isère est le département le plus vaste de la région Rhône-alpes et le deuxième en termes de
population. En tant que département, la collectivité a l'obligation de mettre en place un PCET,
toutefois les démarches climat-energie portées par le Conseil Général d'Isère sont antérieures

23 Données Insee

au Grenelle puisque dès la fin des années 1990, le département s'intéresse aux énergies renouvelables et aux questions d'efficience énergétique. L'obligation légale entraînée par le Grenelle n'a fait que confirmer le processus qui était déjà engagé dans cette collectivité. En 2008, le premier Plan Climat Energie Départemental (PCED) a été lancé pour une période de 3 ans. Le nouveau PCED est actuellement en phase d'élaboration avec pour but d'avoir, au début de l'année prochaine, des objectifs définis et les conditions de leur mise en oeuvre. Le chargé de mission Plan-climat s'occupe seul de la politique par contre il n'est pas à 100% dessus, il a d'autres projets à mener par ailleurs.

3. Le Pays d'Ardèche Verte

Le PAV situé au nord du département de l'Ardèche, est un territoire de projet créé en 2004. Il

compte environ 80 000 habitants en 200724, 64 communes et 6 communautés de communes. Le territoire a la particularité de compter 49% de sa population qui vit en milieu rural. La région Rhône-Alpes porte les Pays via ses CDDRA qui sont des outils adaptés à la définition et à la réalisation de projet de territoire. La première génération de CDDRA s'est achevée en 2010. Le PAV élabore actuellement la prochaine convention qui sera davantage axée sur les questions climatiques. La démarche qui consistait au départ à la mise en place d'un PCET volontaire a aujourd'hui évolué pour devenir une démarche climat permettant à la fois de maintenir les financements du CDDRA, sans toutefois être contrainte par les règles de mise en place d'un PCET. Actuellement, l'équipe technique du Pays se compose de trois personnes, dont un chargé de mission climat.

Nous constatons que les trois territoires sont différents à plusieurs niveaux. Il y a leur superficie, le nombre d'habitants, leurs compétences propres, leur histoire par rapport aux actions climat-énergie, d'autres différences qui n'ont pas encoré été révélées mais que nous allons traiter par la suite, telles que la nature des actions mises en place, leurs cibles, leurs relations avec les autres échelles de gouvernance, etc. Cependant, ce qui surprend le plus, ce ne sont pas les différences, mais plutôt les similitudes. Annoncer des lois générales, applicables à toutes les échelles de gouvernance serait un exercice hasardeux, cependant il y a

24 Données Insee

bien des leçons à tirer des trois cas étudiés. Nous essaierons d'identifier et de comprendre les enseignements tirés de l'expérience de ces territoires concernant les processus de territorialisation des politiques publiques.

B. Rôle de l'élu

Selon M. F. Jacques, « les PCET sont un objet politique comme un autre »25, en ce sens, la place de l'élu est déterminante. Toutes les personnes interrogées ont insisté sur le rôle important du politique. Que le PCET soit obligatoire ou non, ce sont les élus qui vont faciliter ou non sa mise en place. M. F.Jacques a souligné la rapidité de mise en oeuvre du Plan-Climat de Voiron.

« Quand vous rentrez dans une collectivité où un élu est porteur, les élus sont sensibilisés, des directions aussi, on va très vite. S'il faut déjà, avant de discuter sur des actions, sur des diagnostics.... S'il faut déjà sensibiliser, on perd du temps. Enfin, avec des gens sensibilisés on gagne du temps [...], Moi je suis arrivé, j'ai bénéficié du diagnostic qui est arrivé pendant que j'étais embauché [...], ça m'a permis de voir les points forts et les points faibles et de monter des actions en 3 mois1/2 , 4 mois... enfin, proposer une première série d'actions26. » (Frédéric Jacques, Chargé du plan-climat de la commune de Voiron)

Dans le cas du PAV, nous l'avons vu la situation est ralentie par l'intérêt moindre des élus du territoire pour cette thématique27. Dès le début de la mise en place du Pays, sa construction autour de la question climatique n'était pas évidente. Selon Anne Micoud, plus de 50% des élus du territoire étaient climato-sceptiques. Actuellement, cette propention est moindre bien qu'elle ne note toujours pas une ferveur autour de cet enjeu.

En tant qu'objets politiques, les élus ont tendance à privilégier les actions qui ont des résultats
rapides et qui sont facilement évaluables. Selon F. Jacques, ce n'est pas un inconvénient car
ces actions aboutissent souvent à de très bons résultats et permettent de maintenir la

25 Frédéric Jacques, entretien réalisé le mardi 2 août [en off]

26 Frédéric Jacques, entretien réalisé le mardi 2 aoüt [53 min. 45 secondes de l'enregistrement]

27 P33.

dynamique. Ce constat explique entre autre pourquoi un grand nombre de collectivités privilégient les mêmes actions. L'isolation des bâtiments publics est particulièrement sollicitée car non seulement cette action entraîne des résultats rapides, mais elle a l'avantage d'être lisible et visible. Pour les collectivités de grandes échelles, comme la région ou le département, il est difficile de mettre en oeuvre des actions rapides qui s'inaugurent. L'isolation des bâtiments est une des rares actions qui offre cette possibilité. Ce constat nous conduit à nous demander si la dimension politique du PCET ne mènera pas les territoires à privilégier les actions d'atténuation au dépend des actions d'adaptation qui demandent, en général, un investissement plus important en temps et en argent et qui sont plus difficiles à évaluer.

L'engagement des décideurs est important, cependant il est liée à un cadre d'action limité par les règles publiques. La réussite de la politique dépendra donc aussi, des compétences de chaque acteur.

C. Maitrise d'ouvrage/compétences

Nous l'avons beaucoup évoqué dans la partie précédente, la capacité d'une collectivité ou d'un territoire de projet à mettre en oeuvre des actions est la clé pour discuter les partenariats nécessaires à tous processus de territorialisation. Afin de clarifier cette compléxité d'échelles et de règles, les territoires se concentrent sur leurs compétences propres afin de mieux se coordonner autour d'un projet commun. Tout acteur qui ne sera pas en capacité de se différencier n'aura aucune légitimité à entrer dans le processus de territorialisation. En effet, le processus favorise les complémentarités et élimine les doublons. Un acteur qui s'engage dans une politique sans que sa participation n'apporte de plus-value à la démarche, constitue un frein à l'action. Ainsi, il est normal de voir que le PAV développe des actions de sensibilisation envers les collectivités de son territoire, car il se positionne, pour l'instant, sur une thématique pour laquelle il n'a pas de légitimité. En n'affirmant cela nous ne disons pas que les Pays représentent une échelle non adaptée pour mettre en oeuvre un PCET. Beaucoup d'exemples montrent au contraire que ces territoires peuvent constituer un espace pertinent. Cependant dans le cas du PAV, la source de sa légitimité doit venir des élus et force est de constater qu'actuellement, l'enjeu climatique est loin d'être partagé.

Une fois que les acteurs sont en capacité de se positionner par rapport à ce qu'ils peuvent mettre en oeuvre, il faut qu'ils se coordonnent pour mener une action cohérente à l'échelle de leur territoire.

D. Coordination des échelles

La territorialisation suggère de mettre l'accent sur les formes de coordination verticale et horizontale de l'action publique.

Concernant le niveau vertical, les acteurs et les espaces d'application des politiques publiques sont nombreux. Les bouleversements que connaît l'administration politique française n'arrange en rien la situation. Pourtant cet environnement n'est pas aussi chaotique qu'il y paraît puisque l'Etat fixe un cadre de l'action publique. Les collectivités territoriales étant bien plus flexibles que l'Etat, ce sont elles qui expérimentent les actions sur le terrain. Ensuite les « bonnes pratiques » sont capitalisées afin que l'Etat s'en saisisse et fasse un guide qui constituera le cadre d'action à destination de l'ensemble des territoires. Ce processus fonctionne également aux échelles décentralisées. En effet pour la région Rhône-Alpes, le SRCAE s'inspire des expériences des territoires qui le composent pour construire le cadre d'action régional, tout en restant en cohérence avec les objectifs nationaux et européens.

Au niveau horizontal, la situation s'améliore mais le dialogue n'est pas encore systématique. Les territoires, comme les services déconcentrés de l'Etat, sont en pleine mutation. Dans ce contexte, chacun travaille en premier lieu à son organisation en interne avant de complexifier le cadre d'intervention. M. X.Favrolt nous indique la difficulté et dans le même temps la nouveauté d'un fonctionnement transversal en interne.

« Si on veut intégrer dans chacune des politiques publiques les problématiques énergieclimat, il faut que les autres Vice-présidents chargés des différentes thématiques s'en emparent. [...] Il y a vraiment un travail à faire de transversalité entre personnes responsables dans l'exécutif des différentes thématiques et ça, c'est un travail à mettre en place. L'A21 comme le PCET [...]concernent énormément de domaines puisque ce sont des projets complexes, et donc ça implique de travailler en transversalité, ce qui est quelque chose d'assez novateur dans la plupart des grosses administrations, qui ont l'habitude de fonctionnement plutôt vertical, avec le Vice-président, le directeur et les services thématiques

consacrés, mais pas forcément de relation de l'un à l'autre. [...] C'est déjà une évolution dans la façon de faire de l'administration et il faut arriver à convaincre pour aller dans ce sens là. Je pense aussi que c'est un challenge pour les élus. [...] C'est plus compliqué de gérer avec ses collègues des objectifs communs, que de gérer sa propre politique seul et d'avoir son plan d'action en lien direct avec l'administration ».28

Ainsi pour le département d'Isère, la transversalité des actions énergie-climat se fait à deux niveaux. Chaque service doit intégrer des actions d'atténuation ou d'adaptation en fonction de son domaine d'actions (thématique) et chaque direction territoriale déclinera les orientations en fonction de ses caractéristiques (territoire). Les directions territoriales n'ont pas l'obligation de travailler sur l'ensemble des thématiques. Elles identifient celles qui correspondent aux leviers les plus importants en fonction de leur situation. Le mode de fonctionnement du département est assez innovant dans le sens où il favorise réellement la transversalité tant recherchée.

 
 

Les 13 territoires de l'Isère

Source : Conseil Général d'Isère

Le Shéma de Cohérence Territoriale (SCoT) représente également un moyen pour les
territoires de s'inscrire dans une démarche transversale. Ce document d'urbanisme a

28 Xavier Favrolt, Chargé de mission Plan Climat d'Isère, entretien réalisé le mardi 2 aoüt, Conseil général d'Isère [27 min. 40 secondes de l'enregistrement]

l'avantage de mettre en cohérence l'ensemble des politiques sectorielles à l'échelle d'un territoire. Le SCoT prend de plus en plus d'importance en intégrant des objectifs de développement durable. Il s'enrichit au fil du temps, devant prendre en considération de plus en plus de domaines tels que la dernière évolution en date, la prise en charge de la régulation de l'aménagement commercial des territoires.

L'articulation des territoires d'études est satisfaisante au niveau vertical et horizontal. La commune de Voiron a une échelle adéquate pour développer le dialogue entre les services et elle maintient un contact permanent avec la Communauté d'agglomération du Pays Voironnais qui développe son propre PCET. le Pays d'Ardèche Verte a, de fait, une certaine flexibilité dans son fonctionnement et enfin le Conseil général d'Isère qui est une organisation plus lourde, a élaboré un système innovant de territorialisation des politiques qu'il met en place. L'articulation entre les PCET est également favorisée par le phénomène de réseau entre les chargés de mission Plan-climat de la région qui se connaissent presque tous.

E. Les chargés de mission « Plan-climat »

Tous les territoires étudiés disposent d'une personne référente pour le Plan-climat. Le nombre de personnes en charge de cette thématique va dépendre de l'engagement du territoire, cependant le domaine étant par nature transversal, il demande une disponibilité à temps complet. M. X. Favrolt nous explique les difficultés qu'il peut parfois rencontrer du fait que son temps de travail ne soit pas uniquement réservé au PCED.

« Sur le plan-climat, je suis seul. En plus, je ne suis pas à 100% sur le sujet, j'ai d'autres projets à mener parallèlement. Donc ce n'est pas évident, et c'est ce qui explique aussi un petit peu les problèmes de dérapages dans le temps, parce que, à un moment donné, il faut gérer les priorités dans le travail et que, quand on est pas à 100%, automatiquement on fait avec les impondérables des différents projets »29.

La réussite de leur mission repose principalement sur leur capacité à sensibiliser et à
convaincre les acteurs, et en premier lieu leurs collègues (services, collectivités, etc.), sur la

29 Xavier Favrolt, Chargé de mission Plan Climat d'Isère, entretien réalisé le mardi 2 aoüt, Conseil général d'Isère [24 min. 50 secondes de l'enregistrement]

question climatique afin de les mobiliser à tous les niveaux en maintenant une cohérence d'ensemble. En effet, bien que la thématique soit connue, les chargé(e)s de mission constatent qu'il est important de rappeler à chacun l'importance de sa contribution. D'après F. Jacques, parfois les agents ne considèrent pas qu'il y ait une différence entre une mise en veille prolongée et l'arrêt complet de leur ordinateur. Il lui revient donc la tâche de rappeler à ses collègues que les efforts ne se feront pas uniquement par des grandes actions mais que chacun, à son échelle, peut agir. La sensibilisation participe à la construction d'une vision partagée et facilite d'autant plus la mise en oeuvre du plan d'actions.

Nous pouvons également relever le recours très fréquent à des bureaux d'études pour des questions techniques ou l'animation de la politique. Les thématiques étant nouvelles, les chargés de mission n'ont pas toujours les compétences techniques nécessaires. La réduction de la masse salariale favorise également l'externalisation des études, diagnostics, évaluations, etc. Les chargés de mission se concentrent sur le pilotage de la politique publique.

F. Les moyens financiers

Dans son bilan d'activités 2010, la Commission consultative d'évaluation des normes (CCEN) juge "significatif" le coût pour les collectivités territoriales des textes d'application des lois Grenelle 1 et 2. Elle évalue le coût pour les collectivités à 1,84 milliard d'euros entre 2010 et 2022. Le décret relatif aux bilans des émissions de gaz à effet de serre et au plan climat énergie territorial (PCET) "générerait pour les 440 collectivités potentiellement soumises à cette réglementation un coût global compris entre sept et douze millions d'euros", estime la CCEN. Parmi notre échantillon, excepté le PAV qui est principalement financé par le CDDRA, les deux collectivités n'ont pas de source de financement spéciale pour la mise en oeuvre des actions climat-énergie, cependant elles possèdent un budget propre « Plan-climat » en complément des budgets thématiques (bâtiment, eau, etc.). Hormis pour le financement d'un éventuel renforcement des moyens humains, les deux collectiviés ne semblent pas rencontrer de difficultés à financer leurs actions, d'autant plus que plusieurs d'entre elles vont leur permettre, sur le long terme, d'économiser de l'argent qu'elles pourront réinvestir dans de l'investissement.

« L'an dernier, il y a un bâtiment avec 800 m2 de toiture, les combles n'étaient pas isolés et le fait de les isoler.... C'est estimé à 3% de la consommation dans les calculs qui ont été faits. C'est énorme 3% sur un bâtiment dont la consommation est de 40 000-45 000 euros/an. C'est une opération qui est facile à faire et qui rapporte entre 3 et 10%. 10% c'est bien, c'est-à-dire qu'au bout de 10 ans, on amortit l'investissement, c'est ce que l'on recherche aussi. L'argent qui permet d'être économisé est réinjecté. C'est ce que recherchent les élus. Tout l'argent économisé est remis systématiquement en investissement30. » (F.Jacques, Chargé de mission Plan-Climat, commune de Voiron)

La gestion publique, encore dans cette période d'instabilité, impose une gestion très rigoureuse de l'argent public. Les élus sont très attentifs et privilégient des actions sans regrets, c'est-à-dire des actions dont les coûts nets sont négatifs car elles entraînent des avantages directs et indirects. Toutefois, afin de juger des choix faits aujourd'hui, il est nécessaire de mettre en place un système de suivi-évaluation qui servira aux décideurs de piloter l'action publique.

G. Le suivi-évaluation

Le PCET de Voiron étant en phase de mise en oeuvre, c'est le seul territoire de notre échantillon qui dispose d'un système de suivi-évaluation. Chaque fiche action dispose de son indicateur, lequel est actualisé une fois par an. Concernant le Conseil général d'Isère, leur système de suivi-évaluation se limite pour le moment à un suivi de projet. Cependant une réflexion est menée pour disposer d'un système d'évaluation performant.

« Aujourd'hui la personne qui est innovante dans cette conception des choses, c'est mon collègue qui passe avant moi sur l'agenda 21, et qui, lui, cherche à développer un certains nombres d'indicateurs d'effets. Ça c'est le plus important, c'est-à-dire en quoi l'action menée contribue à l'évolution sociétale ? C'est pas évident, mais bon, c'est ce qu'il y a de plus pertinent pour une évaluation. Parce que savoir qu'on a fait vraiment, qu'on a fait bien,

30 Frédéric Jacques, Chargé de mission Plan Climat de la commune de Voiron, entretien réalisé le lundi 1er août, Voiron [38 min. 00 secondes de l'enregistrement]

qu'on a fait pas cher, c'est une chose, mais quels effets vraiment ça a autour ? Ça, c'est aussi très important. »31

Le PAV rencontrant des difficultés pour lancer ses actions, l'élaboration du système de suiviévaluation est laborieuse. Selon A. Micoud32, l'équipe du Pays n'est pas au point sur les questions de suivi-évaluation des actions climat-énergie et c'est une des raisons pour laquelle elle a souhaité participer au projet « ClimactRegions » lancé par l'agence RhônalpénergiesEnvironnement. L'organisation compte notamment à travers cette initiative rendre évaluable le projet de territoire par l'attribution de résultats attendus et des indicateurs à la stratégie et aux projets là où ils n'existent pas, et les vérifier là où ils sont déjà définis. La participation à ce projet permettra de diffuser les expériences du Pays et également de renforcer les compétences de l'équipe pour le suivi-évaluation de la démarche climat.

Le suivi-évaluation est un exercice nécessaire afin d'adapter en permanence l'action en fonction de l'environnement. La transversalité induite par les questions de développement durable et la complexité du vivant accroissent la difficulté de l'exercice. Les questions climatiques ont la particularité d'être mondiales. D'ailleurs les connaissances sur lesquelles se basent l'ensemble des politiques climat, même au plus petit échelon (commune), sont pensées à l'échelle du globe. Nous savons qu'il est crucial de diminuer l'impact des activités anthropiques sur l'environnement, nous savons également que ce changement étant inéluctable, il faut que nous nous y préparions en nous adaptant au mieux à ses effets. Chaque geste est nécessaire et l'ensemble des habitants de la planète doit s'engager vers cette transition. C'est précisement ce phénomène qui rend l'exercice impossible. Comment peut-on réellement isoler les effets d'une action ? Afin de contourner la difficulté, les indicateurs devront représenter une réalité construite, une sorte de susbstitut du réel. Par exemple, un nombre de kilomètres parcourus par une moto correspondra à un étalon d'émissions de GES. Même si les émission réelles ne correspondent pas aux émissions de l'étalon. Ainsi, l'ensemble des indicateurs d'effets ou d'impacts repose sur une modélisation. Les personnes

31 Xavier Favrolt, Chargé de mission Plan Climat d'Isère, entretien réalisé le mardi 2 août, Conseil général d'Isère [23 min. 53 secondes de l'enregistrement]

32 Anne Micoud, Directrice du Pays d'Ardèche Verte, entretien téléphonique réalisé le mercredi 3 aoüt

en charge de mettre en place le système de suivi-évaluation devront être attentivent à ne pas évaluer uniquement les moyens mais également les finalités.

Les chargés de missions étant seuls, l'actualisation des données prend du temps. M. F.Jacques nous dit que pour son cas, l'actualisation des données est facilitée du fait qu'il travaille dans une commune. La taille de l'organisation rend possible le suivi dans des délais raisonnables. Cependant, dans tous les territoires interrogés, Voiron y compris, on compte beaucoup sur la participation des différents services et directions. Sans quoi non seulement l'évaluation sera difficile mais le portage par le chargé de mission uniquement ne favorisera pas l'intégration d'action climat dans chaque domaine.

« Moi aujourd'hui, parce que ça fait pas mal d'années que je travaille dessus.... De toute façon, il n'y a pas eu de renforcement d'équipe depuis que je suis là, ça fait au moins 7 ans [...] je ne compte plus là-dessus pour développer les projets. Je compte plus sur l'implication des directions et des personnes dans les directions pour relayer le message et s'approprier un certain nombre de projet, que dans le renforcement d'équipe. C'est notre stratégie, mais comme on dit, ça prend plus de temps que d'avoir quelqu'un sous ses ordres et de lui dire :

« tu fais ci » et « tu vas faire ça ». Ça demande du travail transversal, de la conviction, voilàça demande beaucoup de choses. C'est très prenant de temps, effectivement33. »

Le suivi-évaluation des activités climat va donc dépendre des activités et du nombre d'acteurs impliqués.

Les territoires de notre échantillon tâtonnent mais avancent certainement et progressivement dans la mise en place de leur plan-climat. La sensibilisation et le partage de l'enjeu semblent être une clé importante pour appliquer la politique. L'exemple du PAV illustre l'impact que peut avoir une mauvaise définition de la « vision partagée ».

Une fois les acteurs rassemblés autour d'une cause, se sont les questions d'ordre
organisationnel qui se posent. Comment se coordonner ? Comment prendre en compte les
impératifs climat dans mon domaine d'activités ? etc. Le Conseil Général d'Isère est

33 Xavier Favrolt, Chargé de mission Plan Climat d'Isère, entretien réalisé le mardi 2 août, Conseil général d'Isère [49 min. 57 secondes de l'enregistrement]

particulièrement innovant sur ces questions et bien que le chargé de mission insiste sur le travail d'orfèvre pour changer les habitudes, la structure s'oriente favorablement dans ce sens, aidée par son mode de gouvernance34.

En revanche l'articulation horizontale n'est pas encore évidente, chacun préférant dans cette période de reconfiguration de l'identité des territoires, se concentrer sur ses compétences et sur son management en interne avant de développer ses partenariats et ses modalités d'articulation avec les autres échelles de gouvernance. La réforme des collectivités accompagne la transversalité des démarches, notamment en mettant en place des outils juridiques permettant de formaliser le contour des partenariats entre acteurs (schéma de mutualisation des services), mais actuellement les collectivités ont des difficultés à percevoir quelles formes de coopération elles pourront adopter. Faut-il qu'elles se contentent d'une prestation de service, qu'elles mettent en place une mutualisation des services ou qu'elles aillent plus loin en transférant des compétences au sein d'une entité supraterritoriale ? Ce transfert va-t-il aboutir à moins de pouvoirs pour les élus ? Etc. Aujourd'hui le recul n'est pas suffisant. Les collectivités sont dans une période d'expérimentation et d'incertitudes fortes, accélérées par les réformes des collectivités.

34 P42

Conclusion

Les démarches climat sont une des politiques de développement durable que les collectivités territoriales et les territoires de projets sont « invités » à développer. L'exemple du Conseil général d'Isère a illustré les difficultés que peut rencontrer une administration de taille importante pour travailler de façon transversale, mais il nous a également permis de constater les initiatives innovantes qui sont trouvées pour engager cette transition. Le processus de territorialisation n'est pas une chose aisée surtout dans ces temps de réformes, mais les collectivités semblent s'accomoder de cette situation puisque dans l'obligation, elles trouvent des moyens d'intégrer ces politiques. En revanche, les territoires qui ne se voient pas imposer de manière cohercitive cet enjeu, doivent entreprendre une démarche concertée pour coconstruire le référentiel commun, au risque de ne pas être en capacité de développer des actions.

La réussite d'un PCET dépend de la capacité des acteurs locaux à construire le cadre d'action publique selon plusieurs éléments. Premièrement, la définition des modalités de leur partenariat, puis en fonction de leurs compétences, ensuite de la situation des territoires et enfin de l'enjeu abordé. Alors que certains souhaitent que l'Etat prennent ses responsabilités, particulièrement en matière de réglementation (X. Favrolt), d'autres au contraire aspirent à plus d'autonomie quant à leurs champs d'action (A.Rousset). Méme si les temporalités sont souvent asymétriques entre la règle, plus longue, et le projet, plus dynamique, l'analyse de nos collectivités montrent que les pratiques évoluent de façon positive.

Le 1er janvier 2015 est appelé à marquer une nouvelle étape de la décentralisation, avec l'entrée en vigueur du dispositif de répartition des compétences conçu par la réforme des collectivités territoriales du 16 décembre 2010. A quatre ans de l'échéance, le débat n'est pas clos entre les adversaires de la logique des « blocs de compétences », qu'ils estiment condamnée par le verdict des faits, et les partisans de la spécialisation des différents niveaux de collectivités, seul moyen, selon eux, d'assurer la lisibilité d'une action locale perdue sous l'enchevêtrement des interventions et dans le labyrinthe des cofinancements.

Le rapport d'Antoine LEFÈVRE, établi au nom de la délégation du Sénat aux collectivités
territoriales et à la décentralisation, refuse d'entrer dans une discussion qui oscille souvent
entre fausse rhétorique et vrai manichéisme. Il vise à dresser un état des lieux au lendemain

d'une réforme d'envergure, qui a souhaité mettre la répartition des compétences sur de bons rails et émettre quelques pistes de réflexion dans le cadre d'un dispositif qui annonce lui même des « mesures d'adaptation » à ses propres dispositions. Ces propositions pragmatiques suivent la ligne directrice tracée en 2009 par la mission temporaire du Sénat sur l'organisation et l'évolution des collectivités territoriales : faire confiance à l'intelligence territoriale.

« La seule manière d'apporter une réponse satisfaisante n'est ni de nier la diversité pour faire prévaloir l'égalité ni d'admettre l'arbitraire pour faire prévaloir la diversité mais d'élaborer une jurisprudence publique.35 »

L'ambition affichée est de trouver une certaine stablilité dans la manière d'aborder les problèmes. Il ne s'agit plus de savoir quelles solutions correspondent à tel problème mais plutôt, de savoir quel processus puis-je mettre en place pour trouver des solutions à ce problème et surtout quels résultats je souhaite au final? Faire confiance aux territoires est la base de la décentralisation et des processus de territorialisation. Une telle démarche transforme l'attitude des fonctionnaires qui ne sont plus détenteurs de la règle, mais deviennent détenteurs du sens.

Toutefois, avant d'arriver à une stabilité de nombreux changements sont encore à prévoir puisque l'identité des territoires est encore mis en ballotage par l'avènement des métropoles et des pôles métropolitains qui sont en construction. La métropole sera à priori une collectivité cohérente puisqu'elle pourra bénéficier, sur son territoire, à la fois de compétences émanant du département et de celles de la région. Cependant, nous pouvons nous demander si cette nouvelle entité, en phagocytant les compétences départementales et régionales ne va pas complexifier davantage les démarches laborieuses actuelles ?

35 Pierre Calame, Le principe de subsidiarité active, 1996, Institut de recherche et de débat sur la gouvernance, [en ligne] [ http://www.institut-gouvernance.org/fr/analyse/fiche-analyse-32.html]

Annexes

Annexe 1 : Guide d'entretien

Pouvez-IIXVP 11111EFIVe111 l'KIMI111iTXRCX 3 &( 7 ?

- Historique du PCET (ante-PCET ?) : Votre motivation pour le faire

- Intérêt pour le territoire

PCET

- Objectifs (Atténuation, réduction, chiffre)

- Thématique(s) abordée(s) : agriculture, eau, transport, bâtiment ?

- Moyens humains et financiers

- Communication

- Système de suivi-évaluation ?

- Critères ?

- Indicateurs ?

- Résultats

Comment fonctionne la gouvernance au sein du PCET ?

- Système organisation (organisation fonctionnelle) : qui décide ? Comment ça fonctionne ?

- Temps commun (réunion, forum, etc.)

- Partenaires (quelles sont vos relations, fréquence des rencontres, moyens de les mobiliser, leur engagement ?) - Animateur (formation, type, compétences, etc. ?)

- Rôle de ou des élus

- Existence de Relais locaux ?

Territorialisation

Le PCET est une politique qui se limite aux compétences du territoire qui le met en oeuvre, à partir de vos compétences, comment répondez-vous à la problématique du changement climatique ?

- Comment vos compétences peuvent être liées au PCET ?

- Difficulté par rapports aux compétences ?

- Difficulté par rapports au territoire (espace géophysique) ?

- Innovation ?

- Au niveau financier quels moyens supplémentaires avez-vous ?

- En quoi votre politique est-elle adaptée à votre territoire ? N'est ce pas une pâle copie de ce que vous avez pu

voir ailleurs ?

- Quelle lisibilité pour le citoyen ?

Quelle est la place de l'Etat (service déconcentré) dans votre PCET ?

- Comment imaginez-vous votre collaboration avec les services de l'état ? - Le cadre réglementaire, lois, application, etc., est-il assez précis ?

- Quelles sont vos marges de liberté par rapport ce qui est promulgué par la loi ? - La loi est-elle trop précise ou trop évasive ?

prendre en compte ? (Descendant)

- La compatibilité avec les schémas régionaux est-elle aisément possible ?

- Comment imaginez-vous votre collaboration avec la région ?

Comment les différentes politiques de développement durable sur votre territoire

s'articulent ? (Ascendant)

- Comment vous coordonnez vous avec les autres PCET du territoire ?

- Comment vous coordonnez vous avec toutes autres actions de développement durable sur le territoire ? (Agenda 21 ? SRCAE ?, etc.)

Perspective/Prospective

- Comment peut-on améliorer votre PCET ?

- Au niveau de la territorialisation de la politique

Annexe 2 : Entretiens

Notes de l'entretien avec M. Frédéric Jacques36 (Charge de mission PCET) Lieu : Commune de Voiron

Date : Lundi 1er août

La station de référence de Grenoble pour les températures, est située en dehors de l'agglomération (Versoud). Les températures ne correspondent donc pas à celles de l'agglomération.

Le PCET est une volonté des élus de la commune car il ne sont pas dans l'obligation de le faire. Toutefois ils ont souhaité s'inscrire dans le protocole de Kyoto. L'objectif du mandat de diminuer les émissions de GES de 10%.

Le PCET est porté par l'élu en charge de l'environnement et un conseiller « environnement ». Une cellule plan climat a été créée. Ses membres se composent du Maire, d'un conseiller adjoint, du service urbanisme et du service responsable des bâtiments publics. 39 actions ont été actées.

La Communauté d'Agglomération du Pays Voironnais (CAPV) a un agenda 21 et élabore actuellement un PCET. Son diagnostic est réalisé par un bureau d'étude. A Voiron, l'audit énergétique des bâtiment fut également externalisé. Comme types d'actions communes avec la CAPV ils ont fait la 4ème édition de la semaine éco-énergie. Il participe également régulièrement à des animations, des conférences organisées par la CAPV. La sensibilisation est leur compétence commune.

Les élus de Voiron privilégient les actions à court terme qui rapportent le plus. Dans le cadre du PCET, les citoyens et les agents de la commune ont été sensibilisés aux déplacements doux. La commune a mis à disposition des agents des vélos électriques. L'action est satisfaisante puisque, à la demande des agents, 5 autres vélos vont être rajoutés. A chaque renouvellement de voiture, la commune privilégie l'achat de celles qui émettent le moins de

36 Ce sont mes notes, donc elles ne reflètent pas in extenso les propos de la personne interrogées. L'intégrale de l'entretien est disponible dans le CD qui accompagne cette thèse professionnelle

CO2. Le PLU travaille sur le concept d'îlots verts avec des points verts éparpillés dans le centre ville.

Le PCET n'est pas forcément un agenda 21.

Le PCET de la commune fut rapide car l'objet était partagé et décidé en amont.

Concernant le financement, pour chaque action, ils font une recherche classique auprès des partenaires habituels (Conseil Général, Conseil Régional, Europe, etc.)

Il est important de travailler avec le service communication pour faire connaître le projet, rassembler, expliquer son fonctionnement. Il est important de valoriser la démarche.

L'évaluation de la démarche se fait de façon annuelle. Les chefs de service sont les relais climat et ils actualisent les données au niveau de leur service.

Les chargés de mission « Plan-Climat » des territoires de Rhône-Alpes et parfois par delà se connaissent, il n'y a pas besoin de séminaire pour qu'il y aient des échanges.

M. F. Jacques pense qu'il faut aller très vite dans l'action. Certains territoires prennent trop de temps dans la phase de conception. Il est bien de penser la démarche mais le but est de la faire. Elle pourra être réajustée au fur et à mesure.

Il est associé régulièrement aux réflexions menées dans le cadre du SRCAE.

Il attend des nouvelles de la TVB sur son territoire.

Notes de l'entretien avec M. Xavier Favrolt37 (Chargé de mission PCED) Lieu : Conseil Général d'Isère (CG)

Date : Mardi 2 août

Le PCED d'Isère commence par la thématique énergétique à la fin des années 1990. Les actions concernent le solaire et le bois-énergie, les politiques d'aides en complémentarité des aides fournies par l'Ademe et le Conseil Régional.

En 2004, les élus ont la volonté d'aller plus loin. En 2006 est créé le plan énergie pour l'Isère. Ce plan concerne les économies d'énergies, l'éco-conditionnalité des aides, les énergies renouvelables et la sensibilisation/communication. Il est mis en place en 2009, à cause de nombreuses évolutions du mode d'organisation en interne.

Le prochain PCED est en cours d'élaboration. Il ont commencé par un bureau d'étude mais ils ne furent pas satisfaits, donc ils ont décidé de gérer l'élaboration en interne. Le nouveau PCED souhaite inciter les partenaires à des actions vertueuses (éco-conditionnalité). Le PCED est également un support pour faire évoluer le système de management par objectif. Les directions territoriales ont la possibilité de s'organiser comme elles le souhaitent, cependant il faut qu'elles atteignent les objectifs qui sont construits collectivement (directions territoriales et services thématiques).

La question qui se pose en permanence est : « comment introduire des critères énergies-climat au niveau de nos compétences propres qui concernent à la fois l'atténuation mais aussi l'adaptation ? ». Pour nous aider dans cette tâche nous avons mis en place une phase de consultation afin de travailler sur la façon dont nous pouvions relier nos compétences aux différentes thématiques concernées par le changement climatique. Quatre ateliers furent réalisés : Ressources naturelles, précarité énergétique, activité économique (tourisme, agriculture, etc.), risques du changement climatique.

Etant donné que le PCED est en phase d'élaboration, il ne dispose pas encore d'un système de suivi-évaluation. Les indicateurs se limitent au suivi du projet.

37 Ce sont mes notes, donc elles ne reflètent pas in extenso les propos de la personne interrogées. L'intégrale de l'entretien est disponible dans le CD qui accompagne cette thèse professionnelle

Le chargé de mission ne travaille pas à 100% sur le PCED, à certains moments il a besoin de renfort et demande le soutien de ses collègues.

L'élu en charge de l'environnement est le référent pour le PCED. Il pilote et porte la démarche mais pour qu'elle aboutisse il faut que l'ensemble des élus se saisissent de cette question. On voit que ces démarches sont assez innovantes dans la plupart des grandes administrations et elles représentent un challenge pour les élus. Ce sont des démarches qui prennent du temps mais qui sont incontournables et plus riches qu'une démarche non concertée.

Nous sommes dans une période où l'on cherche à optimiser les budgets publics. Il y a une volonté importante de rendre efficiente la gestion publique. Par exemple, la direction des routes va fusionner avec la direction des transports pour devenir la direction de la mobilité unique. On ne peut plus cloisonner ces activités l'une n'allant pas sans l'autre.

L'action est proactive et vise à l'adhésion dans un premier temps des membres en interne et de l'éco-compatibilité de l'ensemble des politiques relevant des compétences du Conseil Général. Il faut éviter de marcher sur les plates-bandes des autres, d'où le fait que le CG a choisi de ne pas faire de concertation avec le grand public. Les directions territoriales doivent inciter les collectivités « inférieures » (géographiquement parlant) si aucune démarche climat n'est entreprise et se coordonner si elles existent.

Afin de faire entendre la voix des départements, les 8 départements de la région se sont répartis dans chaque atelier thématique du SRCAE. Actuellement, nous avons des difficultés à percevoir comment les choses vont ressortir ? L'atteinte du facteur 4 dans les délais impartis n'est pas possible. Le système incitatif n'est pas suffisant. Il faut des outils réglementaires qui imposent la mise en place de telle ou telle activité. Il faut un certain niveau de contrainte sans quoi on ne peut pas y arriver. Les appels à projet fonctionnent mais ce sont des opérations vertueuses qui portent quelques uns. Il faut au contraire un modèle qui permette à l'ensemble d'avancer.

Aujourd'hui le CG d'Isère ne travaille pas trop avec l'Etat sur ces questions. L'équipe est
restreinte (1 seul) et le chargé de mission avoue que ce ne sont pas dans les habitudes.

Cependant, il estime qu'il faut que les collectivités territoriales évoluent et fassent de la place à l'Etat au niveau local car c'est par eux que pourront remonter les besoins réglementaires.

Le PCED voulait au départ travailler sur le partage des méthodes et des données afin d'éviter que chacun réinvente l'eau chaude, mais le chargé de mission manque de temps pour ça. Il travaille davantage sur la mobilisation en interne avant de s'ouvrir aux autres. « Lorsque l'on créé des appétits vers l'extérieur, il faut assurer ».

Notes de l'entretien avec Ms Anne Micoud38 (Directrice du PAV) Lieu : Entretien téléphonique

Date : Mercredi 3 août

En avril 2009, ce fut la fin du précédent contrat (CDDRA). La démarche climat fut lancée par Didier Jouve (Europe-Ecologie-Les Verts), qui était vice-président CDDRA à la Région Rhône-Alpes. Il n'y avait pas encore le Grenelle, ni de collectivités qui étaient désignées pour mettre en place des démarches climat-énergie. Les éléctions ont entraîné un changement au niveau de l'équipe régionale, désormais c'est Hervé Soulignac (PS) qui prend en charge les CDDRA. Sous sa direction, il y a eu un coup de frein. La démarche ne s'est pas arrêtée, mais l'ambition de départ est changée. Il n'est plus question de réaliser un PCET mais plutôt d'être climato-compatible. Ceci pour ne pas non plus sortir des critères de financement des CDDRA.

En 2010, une élue du Pays (PS), également conseillère du territoire auprès de la Région, porte le projet d'une démarche climat. Il n'y avait pas d'obligations, mais elle affectionnait particulièrement ce projet. A la suite de sa démarche, des ateliers furent lancés pour impliquer les élus du territoire sur la question. Au premier atelier, l'équipe technique s'est vite rendue compte qu'il y avait plus de 50% des élus qui étaient climato-sceptiques.

Alain Cabanes (Europe-Ecologie-Les Verts), à l'époque président de la Communauté de communes du Haut-Vivarais était motivé par cette démarche. Le président actuel, M. Bernard Couedel poursuit le travail de son prédécesseur.

En 2010, les bilans des émissions de GES de 3CDDRA + 1 PNR sont réalisés. A partir de son diagnostic, chaque territoire a pu définir des actions à mettre en oeuvre. Cependant, il faut rappeler que le PAV n'a pas de compétences. Il fait essentiellement de l'accompagnement de projet auprès des collectivités qui le composent. Il n'a pas la maîtrise d'ouvrage. La situation fait qu'actuellement la démarche énergie n'est pas évidente à mettre en place. Les élus ne sont pas très motivés, c'est une des raisons pour laquelle la directrice a souhaité faire partie du programme « ClimactRegions » afin de relancer la dynamique. Actuellement, le Pays finalise le livre blanc qui compile l'ensemble des propositions qui ont été faites durant les ateliers

38 Ce sont mes notes, donc elles ne reflètent pas in extenso les propos de la personne interrogées.

énergies-climat. Il a également édité un guide pour les éco-manifestations. La participation au programme « ClimactRegions » va également servir pour améliorer le système de suiviévaluation de projet.

Le PAV travaille sur l'atténuation et l'adaptation. L'atténuation à travers de la sensibilisation aux économies d'énergies et l'adaptation à travers diverses activités telles que l'accompagnement des agriculteurs du territoire dans l'évolution de leurs pratiques agricoles, idem pour les sylviculteurs.

En termes de moyens humain, il y a une personne : M. Guillaume Bacciotti qui monte en compétence sur ce sujet en suivant des formations. Autrement, toute l'équipe est active sur la thématique.

Les activités et le fonctionnement du Pays sont financés à 60% par le CDDRA et à 40% par les collectivités du territoire.

Il y a un fossé culturel avec certains élus concernant les questions de développement durable. Selon A. Micoud, il y a une différence « incroyable » parmi les territoires. Il y a un travail important de sensibilisation à faire. Il faut d'une part informer les élus sur les questions climatiques et l'importance qu'elles revétent et d'autres part accompagner ceux qui sont déjà lancés dans des projets plus précis.

A l'échelle du département une agence de la mobilité va se créer (Drôme Ardèche Mobilité ) avec le soutien de l'association «Mobilité 07-26 ». Une des communes du territoire s'intéresse à cette initiative. On s'aperçoit que sur la question des transports, les habitants du territoire manquent d'informations.

Le PAV n'a pas de contact avec le SRCAE, d'après ce que A. Micoud sait, l'enjeu pour l'instant est plutôt interne à la Région. Ils ont été invités une fois mais c'est surtout parce qu'il font partie des 10 territoires accompagnés par la Région.

Annexe 3 : Tableau comparatif du nombre de PCET dans les régions39

Régions

Nombre de PCET

%

Rhône-Alpes

25

12,5

Midi-Pyrénées

19

9,5

Île-de-France

16

8

Bourgogne

15

7,5

Languedoc-Roussillon

15

7,5

Aquitaine

12

6

Alsace

10

5

Lorraine

10

5

Franche-Comté

9

4,5

Nord-Pas-de-Calais

9

4,5

Basse-Normandie

9

4,5

Poitou-Charentes

8

4

Champagne-Ardenne

7

3,5

Picardie

7

3,5

Bretagne

5

2,5

Haute-Normandie

5

2,5

Pays-de-la-Loire

5

2,5

PACA

5

2,5

Auvergne

4

2

Centre

3

1,5

Corse

1

0,5

Limousin

1

0,5

Total

200

100

39 Source : Site de l'observatoire des PCET [http:iobservatoire.pcet-ademe.fr/]

Références bibliographie

BERTRAND F. ; « Projet de recherche : Gestion territoriale du changement climatique_Une analyse à partir des politiques régionales » ; Rapport final, volume 1 - synthèse ; Juillet 2007

BERTRAND F. ; « Projet de recherche : Gestion territoriale du changement climatique_Une analyse à partir des politiques régionales » ; Rapport final, volume 2 - études régionales ; Juillet 2007

BOULESTEIX-COUTELIER C. : « Thèse professionnelle : Articulation entre projets sur un même territoire », Septembre 2010

Sous la direction de, FAURE A. : Symposium « Territoires et subsidiarité, l'action publique locale à la lumière d'un principe controversé », L'Harmattan, 1997

FAURE A. : « Article scientifique : Territoires/Territorialisation », CNRS PACTE IEP Grenoble, 2004

Sous la direction de, FAURE A. et DOUILLET C.: Symposium « L'action publique et la question territoriale », Presses Universitaires de Grenoble, 2005

Sous la direction de, FAURE A. et NEGRIER E.: « Les politiques publiques à l'épreuve de l'action locale : critiques de la territorialisation », Paris : l'Harmattan, 2007

GAZIER A. : Fiche « Les compétences des collectivités territoriales », Paris 10, 2007

HOUZIR M. : Rapport final PNUD : Approche locale et territoriale du changement climatique dans les Pays Arabes », Novembre 2010

LEFEVRE A. : Rapport d'information de M. Antoine LEFÈVRE, fait au nom de la délégation aux collectivités territoriales, n° 283 (2010-2011), Février 2011

MERCIER J.P. : « Communcation lors du séminaire « Régions, décentralisation, et coopération internationale », Kinshasa, Novembre 2008

THOENIG JC et DURAN P. : « L'Etat et la gestion territoriale », In: Revue française de science politique, 46e année, n°4, 1996. pp. 580-623.,

Webographie

Histoire de la décentralisation : http://www.assemblee-nationale.fr/histoire/decentralisation.asp

Observatoire des PCET : http://www.pcet-ademe.fr/

Label Energie-climat des communes et intercommunalités : http://www.citergie.ademe.fr/

Finance territoriale : http://finances-territoriales.over-blog.com/

Institut de recherche et de débat sur la gouvernance : http://www.institut-gouvernance.org

Site du SRCAE de la Région Rhône-Alpes : http://srcae.rhonealpes.fr/

BON A TIRER ET FICHE DE DIFFUSION DU RAPPORT PROVISOIRE

CONSIGNES DE CONFIDENTIALITE : [X] non conf. [ ] contenu conf [ ] titre

Si confident. jusqu'au : conf.

Promotion : 2010-2011 Date de publication :

Auteur : Yannick MONLOUIS

REPROGRAPHIE : Date de dépôt : / /

de retrait : / /

Titre : La territorialisation des plan-climats

 

Type de travail : [ ] Travail de groupe (TGE)

[ ]MISSION ENENTREPRISE []STAGE EN EXPLOITATION AGRICOLE

[x] THESE PROFESSIONNELLE [ ] PROJET A L'ETRANGER

[ ] AUTRE TRAVAIL :

Nb.

DESTINATAIRE

ADRESSE

Date envoi

Tuteur AgroParisTech Tuteur professionnelle Secrétariat formation initiale élève auteur :

Autres destinataires :

1

Total :

La diffusion est assurée par les élèves en accord avec le commanditaire et le tuteur AgroParisTech Centre de Clermont-Ferrand.

L'envoi pourra se faire par le secrétariat du tuteur ou de son représentant. Pensez à rédiger une lettre d'accompagnement et préparer les enveloppes. Merci






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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams