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Lutte contre l'impunité et effectivité des droits des accusés : le doux chant de sirène du tribunal pénal international pour le Rwanda.

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par à‰lise LE GALL
Université Pierre Mendès France - Master 2 Droit 2010
  

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Conclusion

En 1994, la résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies portant création du Tribunal Pénal International pour le Rwanda avait prévu à celui--ci un mandat de dix ans. Force est de constater que depuis 2004, de multiples résolutions conduisent à repousser inexorablement la fin de son mandat à une date ultérieure. La dernière résolution en date prévoit la fin du mandat du TPIR en 2011.

La stratégie d'achèvement du TPIR prend du temps: « Le temps qui émousse toutes choses, le temps qui travaille à l'usure du chagrin comme il travaille à l'érosion des montagnes, le temps qui favorise le pardon et l'oubli, le temps qui console, le temps liquidateur et cicatrisateur n'atténue en rien la colossale hécatombe: au contraire, il ne cesse d'en aviver l'horreur (...) les crimes contre l'humanité sont imprescriptibles, c'est-à- dire ne peuvent pas être prescrits ; le temps n'a pas de prise sur eux ».112Cette date butoir repoussée au fil des années ne traduit pas tant une idée sous jacente que les criminels seront poursuivis jusqu'à la fin des temps, mais bien la complexité d'exercice du mandat du Tribunal Pénal International pour le Rwanda.

Ave c beaucoup d'entrain et de détermination, le TPIR s'attèle dès 1994 à sa mission première: sanctionner les principaux responsables du génocide rwandais et de violations graves du droit international humanitaire. Agissant en écho avec le Tribunal Pénal International pour l'Ex--Yougoslavie, de nombreuses décisions jurisprudentielles vont permettre d'étoffer une matière encore naissante : le droit international pénal.

En effet c'est par certains jugements du TPIR et du TPIY que des notions théoriques ont pris toute leur dimension et leur profondeur. Notamment concernant la notion de crime de génocide, en y intégrant les violences sexuelles, précisant ainsi davantage l'élément moral de l'infraction de génocide. Les décisions du TPIR ont également permis d'ouvrir le champ des poursuites aux responsables politiques, aux médias, aux artistes, et pour la première fois à l'encontre d'une femme. Ces décisions sont d'une importance capitale

1 1 2 JANKELEVITCH VLADIMIR, Pardonner? Dans l'horreur et la dignité, Edition Seuil, 1997.

car porteuse de symboles au sein d'une communauté internationale. Symbole d'égalité, d' ouverture dans cette lutte contre l'impunité.

Le Tribunal Pénal International pour le Rwanda apporte beaucoup au sein de la Communauté Internationale, sa stature a rappelé et rappelle encore aujourd'hui combien il est important de combattre l'impunité des crimes contre l'humanité, et c'est ainsi qu'il a servi d'appui pour la construction de la Cour Pénale Internationale: «ces tribuna ux servent de tremplin pour la création d'une cour permanente: celle-ci présen terait l'avantage d'être stable et de n'être pas axée sur une région ou un situation déterminée »113. Le TPIR a également permit de révéler les failles possibles d'une juridiction pénale internationale.

Sa mission de sanctionner les principaux responsables du génocide et de violations graves du droit international humanitaire devait permettre d'oeuvrer pour une réconciliation des peuples ainsi que le rétablissement et le maintien de la Paix. Ici le bilan d'action du TPIR est beaucoup plus mitigé. L'emprise de considérations politiques (présentes depuis sa création) dans ses actions conduit à douter de sa probité. Une empris e conduisant le TPIR à un manque d'impartialité et d'indépendance certaines, mettant en exergue une impunité de fait. Comment justifier alors qu'aucune poursuite n'ait été diligentée à l'encontre de présumés responsables Tutsis de violations graves de droit international humanitaire, pourtant dénoncés dans de nombreux rapports d' experts ? Ce constat d'impunité de fait peut--il alors oeuvrer pour une réconciliation des peuples? Cette partialité dans le choix des poursuites ne peut mettre en lumière qu'une vérité de l'histoire du génocide : une vérité apaisant un peuple rwandais les Tutsis, mais non l'ensemble du peuple rwandais. Ce n'est pas La Vérité . Le Rwanda souffre ainsi d'une réconciliation nationale chancelante, comportant quelques notes d'animosités palpables.

Une lutte contre l'impunité sous la chape de plomb de considérations politiques parasite l'exercice d'une justice équitable au sein d'une institution judiciaire internationale, car dénuée d'impartialité et d'indépendance. Sous le joug politique du

1 1 3 Président du TPIY, M. Cassese, observations adressées au comité ad hoc de la
Commiission de droit international pour la création d'une cour criminelle internationale.

gouvernement de Kigali dirigé par les Tutsis, certaines enquêtes et la tenue de certains procès au TPIR démontrent une violation aux devoirs de la justice et de la morale. Cette volonté de lutte contre l'impunité des Hutus « à tout prix », actuellement mise en place par le TPIR sous l'influence de considérations politiques (liberté d'action du procureur entravée, l'empêchant souvent de mener à bien ses actions pour une justice impartiale) entraîne des violations graves du droit des accusés. Et ce, malgré une mappemonde protectrice reconnue par l'ensemble de la communauté internationale et une réglementati on interne soucieuse de garanties pour les droits des accusés.

Certes le Tribunal Pénal International pour le Rwanda dispose d'un arsenal législatif lui permettant d'agir dans le respect d'une justice équitable et impartiale. Son action l'accentue, notamment dans les grands jugements qu'il a rendus depuis sa création. Mais le principe universellement reconnu de séparation des fonctions impose à ce Tribunal Pénal International pour le Rwanda de pouvoir agir sans influence extérieure. Le dernier exemple en date, l'arrestation de l'avocat Peter Erlinder, doit éveiller une prise de conscience internationale quant à la dérive présente au sein du TPIR, mettant en péril l'état de droit. l'État de droit sous--entend que chacun soit soumis au respect du droit, du simple individu jusqu'à la puissance publique, dans le respect de la hiérarchie des normes, de la séparations des pouvoirs et des droits fondamentaux. Or du fait de cette non séparation des pouvoirs entre le pouvoir juridique et politique, des violations des droits des accusés sont visibles au sein du TPIR. Ceci conduit inévitablement à douter de la probité de cette instance, ne pouvant alors porter les fruits d'une réconciliation des peuples.

M ais une instance internationale de cette envergure ne peut pas agir sans aucune influence politique. Cependant la vision de l'éthique politique qu'elle doit prendre en compte ne doit pas être réduite aux relations internationales, aux seuls rapports de force, mais bien une vision politique soucieuse de privilégier la dimension universelle de l'humanité et la nécessaire mise en commun des richesses. Ceci permet de saisir les propos suivant: « Au total, l'effectivité des droits économiques, sociaux et culturels suppose une mise en commun des ressources, car il n'y a ni riches, ni pauvres, encore moins un Nord, et un Sud. La véritable urgence consiste à mettre en commun les richesses existantes. Et c'est bien là, la dimension éthique de l'approche des droits de l'Homme qui doit régir la coopération internationale. Pour y parvenir, il faut redonner du sens aux

institutions existantes, qu'il s'agisse des États actuels, des organisations internationales existantes, ou encore des institutions ».114

Ainsi la lutte contre l'impunité peut être exercée tout en préservant les droits des accusés, dès lors qu'elle n'est pas essentiellement guidée par des intérêts politiques divers. Il s'agit bien pour le tribunal de juger de la culpabilité ou non d'un individu, en agissant à la lumière d'une impartialité objective, garantissant l'exercice d'une justice saine et équitable. Et nul doute alors que la satisfaction des victimes et du peuple Rwandais pourra être quelque peu atteinte: connaître l'histoire de son drame, prémice d'une réconciliation des peuples profonde et assurée.

M alheureusement, les faits actuels du Rwanda corroborent l'idée de ce mémoire, à savoir que la lutte contre l'impunité telle que menée par le TPIR et ses conséquences notamment sur le plan des droits des accusés, n'ont pas permis d'aboutir à une réconciliation sereine des peuples. En effet , le 26 Août 2010 un rapport de l'ONU détaille une décennie (1993--2003) de crimes contre l'humanité commis en République démocratique du Congo. Elle met en cause Kigali pour des faits qui, selon les auteurs du rapport, pourraient être qualifiés de «génocide» à l'encontre des Hutus.115Ceci devrait enfin interrompre le doux chant de sirène qui couvre la réalité de l'exercice d'une justice dépendante et partiale au sein du Tribunal Pénal International pour le Rwanda. D'ailleurs le grondement face à constat était relayé de façon plus vigoureuse depuis quelques années dans les couloirs de la Défense.

Ainsi quelques recommandations pourraient être soulevées:


· Développer l'idée d'une police internationale habilitée à l'arrestation des criminels recherchés. Evitant ainsi d'être soumis aux manoeuvres politiques d'État abritant/entravant l'arrestation des criminels recherchés. Ceci

1 1 4 « L'Éthique de la coopération internationale et l'effectivité des droits humains », Actes du colloque international et inter--institutionnel, Université de Bergame, 12--14 mai, 2005, p 200

1 1 5 Annexe 8, Le Rwanda pointé du doigt pour les massacres en République Démocratique du Congo, le 26 Aout 2010.

permettrait ainsi un gain de temps dans la recherche de ces criminels, puisqu'une institution serait habilitée à cette mission.

· Appréhender les présumés responsables de violations graves du droit international humanitaire commises par les Tutsis envers les Hutus, lors du génocide rwandais de 1994 et entrant dans la compétence rationae temporis du TPI R.

· Prendre en considération les différents rapports et enquêtes concernant l'assassinat du président Habyarimana en avril 1994 et enclencher une procédure judiciaire.

· Renforcer le devoir de coopération et d'assistance internationales des États dans la conduite des affaires au sein du TPIR.

· Revoir profondément la question du partage des activités entre les juridictions rwandaises et le TPIR. S'assurer que les affaires transmises seront jugées par des institutions judiciaires rwandaises, respectant les principes d'une justice impartiale et indépendante, respectueuse des droits fondamentaux.

· Privilégier le développement de la compétence universelle des États dans l'optique de la stratégie d'achèvement du TPIR.

· Intégrer la Cour Pénale Internationale dans la stratégie d'achèvement du TPIR.

Annexe 1: Organigramme du TPIR
p.

Annexe 2, Résolution 955 portant création du Tribunal Pénal International
pour le Rwanda.

p. 1 3

S/RES/955 (1994)

8 novembre 1994

RÉSOLUTION 955 (1994)

Adoptée par le Conseil de sécurité à sa 3453e séance,
le 8 novembre 1994

Le Conseil de sécurité,

Réaffirmant toutes ses résolutions antérieures sur la situation au Rwanda,

Ayant examiné les rapports que le Secrétaire général lui a présentés conformément au paragraphe 3 de sa résolution 935 (1994) du 1er juillet 1994 (S/1994/879 et S/1994/906), et ayant pris acte des rapports du Rapporteur spécial pour le Rwanda de la Commission des droits de l'homme des Nations Unies

(S/ 1 9 94/ 1 1 5 7, annexe I et annexe II),

Saluant le travail accompli par la Commission d'experts créée en vertu de sa résolution 935 (1994), en particulier son rapport préliminaire sur les violations du droit international humanitaire au Rwanda que le Secrétaire général lui a transmis dans sa lettre du 1er octobre 1994 (S/1994/1125),

S e déclarant de nouveau gravement alarmé par les informations selon lesquelles des actes de génocide et d'autres violations flagrantes, généralisées et systématiques du droit international humanitaire ont été commises au Rwanda,

Constatant que cette situation continue de faire peser une menace sur la paix et la sécurité internationales,

Résolu à mettre fin à de tels crimes et à prendre des mesures efficaces pour que les personnes qui en sont responsables soient traduites en justice,

Convaincu que, dans les circonstances particulières qui règnent au Rwanda, des poursuites contre les personnes présumées responsables d'actes de génocide ou d'autres violations graves du droit international humanitaire permettraient d'atteindre cet objectif et contribueraient au processus de réconciliation nationale ainsi qu'au rétablissement et au maintien de la paix,

Estimant que la création d'un tribunal international pour juger les personnes présumées responsables de tels actes ou violations contribuera à les faire cesser et à en réparer dûment les effets,

Soulignant qu'une coopération internationale est nécessaire pour renforcer les tribunaux et l'appareil judiciaire rwandais, notamment en raison du grand nombre de suspects qui seront déférés devant ces tribunaux,

Considérant que la Commission d'experts créée en vertu de la résolution 935 (1994) devrait continuer à rassembler de toute urgence des informations tendant à prouver que des violations graves du droit international humanitaire ont été commises sur le territoire du Rwanda, et qu'elle devrait présenter son rapport final au Secrétaire général le 30 novembre 1994 au plus tard,

Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies,

1 . Décide par la présente résolution, comme suite à la demande qu'il a reçue du Gouvernement rwandais (S/1994/1115), de créer un tribunal international chargé uniquement de juger les personnes présumées responsables d'actes de génocide ou d'autres violations graves du droit international humanitaire commis sur le territoire du Rwanda et les citoyens rwandais présumés responsables de tels actes ou violations commis sur le territoire d'États voisins, entre le 1er janvier et le 31 décembre 1994, et d'adopter à cette fin le Statut du Tribunal criminel international pour le Rwanda annexé à la présente résolution;

2 . Décide que tous les États apporteront leur pleine coopération au Tribunal international et à ses organes, conformément à la présente résolution et au Statut du Tribunal international, et qu'ils prendront toutes mesures nécessaires en vertu de leur droit interne pour mettre en application les dispositions de la présente résolution et du Statut, y compris l'obligation faite aux États de donner suite aux demandes d'assistance ou aux ordonnances émanant d'une Chambre de première instance, conformément à l'article 28 du Statut, et prie les États de tenir le Secrétaire général informé des mesures qu'ils prendront;

3 . Considère qu'une notification devrait être adressée au Gouvernement rwandais avant que des décisions ne soient prises en vertu des articles 26 et 27 du Statut;

4 . Prie instamment les États ainsi que les organisations intergouvernementales et non gouvernementales d'apporter au Tribunal international des contributions sous forme de ressources financières, d'équipements et de services, y compris des services d'experts;

5 . Prie le Secrétaire général de mettre en oeuvre d'urgence la présente résolution et de prendre en particulier des dispositions pratiques pour que le Tribunal international puisse fonctionner effectivement le plus tôt possible, notamment de lui soumettre des recommandations quant aux lieux où le siège du Tribunal international pourrait être établi, et de lui présenter des rapports périodiques;

6. Décide qu'il choisira le siège du Tribunal international en fonction de critères de justice et d'équité ainsi que d'économie et d'efficacité administrative, notamment des possibilités d'accès aux témoins, sous réserve que l'Organisation des Nations Unies et l' État où le Tribunal aura son siège concluent des arrangements appropriés qui soient acceptables pour le Conseil de sécurité, étant entendu que le Tribunal international pourra se réunir ailleurs quand il le jugera nécessaire pour l'exercice efficace de ses fonctions; et décide d'établir un bureau au Rwanda et d'y conduire des procédures, si

cela est possible et approprié, sous réserve de la conclusion d'arrangements adéquats analogues;

7 . Décide d'envisager d'augmenter le nombre de juges et de chambres de première instance du Tribunal international si cela s'avère nécessaire;

8 . Décide de rester activement saisi de la question.

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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore