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Lutte contre l'impunité et effectivité des droits des accusés : le doux chant de sirène du tribunal pénal international pour le Rwanda.

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par à‰lise LE GALL
Université Pierre Mendès France - Master 2 Droit 2010
  

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II . Une lutte contre l'impunité mettant en péril les droits des accusés.

Ce contraste d'une lutte contre l'impunité apparente d'une part, et immergée d'autre part entraîne inéluctablement des conséquences sur les droits des accusés, malgré une volonté textuelle affirmée assurant la protection de leurs droits fondamentaux (A). Mais le constat de leur application au sein de cette institution internationale assombrit le principe d'équité attendu dans toute juridiction internationale. (B)

A. Une volonté textuelle affirmée assurant la protection des droits fondamentaux du droit des accusés.

1. Au niveau international: une mappemonde protectrice.

Une juridiction internationale est une juridiction créée par un accord entre États (par exemple l'Accord de Londres, le Statut de la Cour Pénale Internationale) ou par un acte dérivé d'une organisation internationale. C'est ainsi qu'en ce qui concerne plus précisément le Tribunal Pénal International pour le Rwanda, il découle de la création d'une résolution du Conseil de Sécurité des Nations Unies.

L'arti cle 14 du Pacte International relatif aux droits civils et politiques(PIDCP) du 16 Décembre 1996, reconnaît à toute personne le «droit à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal compétent, indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera soit du bien fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil ». Il découle de cet article que la protection des droits de la défense repose tant sur les garanties procédurales spécifiques au droit pénal que sur les attributs essentiels de la fonction juridictionnelle. Cet article pose le principe de garanties juridictionnelles réelles, à savoir des garanties qui assurent à l'accusé qu'il est jugé par un tribunal légalement constitué et en application des règles de droit. Ce souci de l'effectivité de ces différentes garanties par les acteurs de la justice internationale est visible, notamment à travers le travail d'analyse, d'étude, de questionnement ressortant dans les différentes décisions jurisprudentielles des tribunaux pénaux internationaux.

Ainsi dans l'affaire Dusko Tadic, la Chambre d'appel a vérifié la qualification du TPIY, comme un «tribunal établi par la loi ». Pour cela, son raisonnement est de considérer que le tribunal international est «établi par la loi» dès lors que ses règles de composition et de procédure garantissent les droits de la défense. C'est ainsi qu'au travers de ce raisonnement, les droits de la défense de la personne individuelle, jugée par un tribunal formé par la communauté internationale, constituent «la clef de voûte du système, en conciliant les attributs du droit « international» et « pénal» ».77

Les instruments universels de protection des droits de l'Homme et notamment le PIDCP doivent être respectés par les tribunaux internationaux créés sous l'égide des Nations Unies . C'est pourquoi les garanties procédurales prévues par l'article 14 des pactes ont été visées tant par le Secrétaire général que par les tribunaux. Il ne s'agit pas ici de dresser la liste de l'ensemble des droits de la défense. Cependant il peut être noté qu'en mati ère d'accusation en matière pénale au sein du PIDCP, la présomption d'innocence (article 14 paragraphe 2) est protégée, tout comme le droit à un double degré de juridiction (article 14 paragraphe 15), le principe de non bis in idem (article 14 paragraphe 7), ainsi que des garanties procédurales relatives à l'information et à la défense de l'accusé (article 14 paragraphe 3). Quant à l'article 15 du même texte, il impose le respect des principes de légalité des délits et des peines et de non-- rétroactivité de la loi pénale.

Ensuite, la mappemonde protectrice au niveau des sources internationales trouve également son expression au sein des Conventions de Genève et leurs Protocoles additionnels. Ce sont des traités internationaux contenant les règles fixant un cadre dans un contexte de guerre. L'article 3 commun aux quatre Conventions de Genève constitue une référence dans la protection des différents droits et notamment ceux des accusés, en interdisant plus particulièrement le meurtre, les mutilations, la torture (...) et les procès inéquitables. Cet article confirme une exigence de procès équitable, incluant donc le respect des droits des diverses parties au procès : exigences que 194 États parties, dont le Rwanda et la Tanzanie doivent respecter.

7 7 « Les droits de la défense », in H. Ascensio, E. Decaux, A. Pellet (dir.), Droit international pénal, Pedone, 2000, p. 791

Les droits de la défense sont des droits proclamés textuellement, cependant face à la rigidité textuelle, il est permis aux tribunaux pénaux internationaux de pouvoir agir en adé quati on avec le contexte particulier dans lequel ces droits s'exercent. Cette adaptabilité est louable et peut permettre une meilleure effectivité de ces droits. Dans l'affaire Duko Tadic, la chambre d'appel semble vouloir ainsi éviter une multitude de recours fondés sur les textes précités de protection des différents droits, notamment de ceux de la défense. En effet la chambre d'appel suggère que les tribunaux pénaux internationaux sont bien tenus de respecter les droits de la défense, tant en interprétant, voire adaptant la définition de ces garanties à la lumière du contexte particulier dans lequel ils agissent, celui de l'ordre international. 78

D e ce fait, il est impératif que le Tribunal Pénal International pour le Rwanda, inscrit dans un cadre de justice internationale, intervienne dans une indépendance et une impartialité exemplaires. Or dans un contexte de joug politique sur l'institution judicaire, le danger de cette décision de la chambre d'appel est d'inciter, légitimer certaines interprétations restrictives des droits fondamentaux et notamment ceux des accusés.

De plus les décisions des tribunaux pénaux internationaux se réfèrent aux sources universelles mais aussi régionales par l'utilisation des conventions africaines, américaines et européennes des droits de l'Homme. S'il est difficile de définir leur place précise dans la hiérarchie des instruments juridiques utilisés par les tribunaux pénaux internationaux, ces conventions représentent un appui non négligeable dans cette recherche de protection et d'effectivité des droits des accusés. Ceci peut être illustré dans l'exemple suivant: si les garanties de l'article 6 de la CEDH ne sont pas respectés devant le TPIR ou TPIY les États coopérants pourraient se voir imputer la violation de la Convention Européenne des Droits de l'Homme.79 De même l'arrêt de la CEDH S.W et C.R contre Royaume Uni, 22 novembre 1995 , montre bien que le principe de légalité s'applique non seulement en matière de droit pénal de fond (incrimination, sanction)

78 IT--94--1--AR72, 2 octobre 1995, paragraphe 42.: Relatif à l'appel de la défense concernant l'exception préjudicielle d'incompétence.

79 CEDH, Soering contre Royaume-Uni, 7 juillet 1989, à propos de l'extradition.

mais aussi en matière procédurale ou de droit pénal de forme. Ainsi donc le principe de légalité est garanti par des textes internationaux, régionaux mais aussi à l'article 18 de la constitution du Rwanda.

C ette protection des droits de la défense est assurée également à l'article 7 de la charte africaine des droits de l'homme et des peuples, du 27 Juin 1981, qui contient notamment le droit d'être jugé dans un délai raisonnable par une juridiction impartiale. Enfin l'article 8 de la convention américaine relative aux droits de l'homme contient l'ensemble des garanties judicaires auquel un individu peut avoir droit.

D e cette mappemonde textuelle des droits de l'homme, il en ressort une exigence d'indépendance et d'impartialité, qui est renforcée par la notion large de « procès équitable », tel qu'elle ressort clairement de l'article 6 paragraphe 1 de la Convention Européenne des droits de l'homme. Toute la difficulté consiste à donner un contenu à ces notions.

L'indépendance du TPIR se mesure au fait qu'il ne peut être soumis à des ordres ou à des instructions provenant de l'extérieur de la juridiction. Le tribunal doit pouvoir prendre ses décisions uniquement sur la base des règles de droit et conformément à son intime conviction. Or évoluer au sein d'une équipe de Défense au sein de cette institution internationale, permet de saisir la difficulté de l'exercice. 80

L'impartialité quand à elle présuppose l'indépendance mais davantage encore. Définir l'impartialité comme une absence de préjugé ou de parti pris est cependant insuffisant car il existe deux façons de l'apprécier: subjectivement et objectivement. L'impartialité subjective s'apprécie eu égard aux dispositions personnelles des magistrats composant le Tribunal mais elle est difficile à caractériser puisqu'elle impli que de sonder les individus. En revanche l'impartialité objective se rapporte quant à elle aux apparences. Ainsi dans l'arrêt de la CEDH du 27 Aout 2002 Didier contre France, l'impartialité objective consiste à se demander si «indépendamment de la conduite personnelle du juge, certains faits vérifiables autorisent à suspecter l'impartialité de ce dernier. En la matière, même les apparences peuvent revêtir de l'importance ».

8 0 Cf infra, un constat de violations assombrissant ce principe d'équité, p 59

La Cour Européenne des droits de l'Homme apporte son approche concernant le sens que doit revêtir l'impartialité dans l'arrêt Piersack du 1 er octobre 1982. En effet la Cour Européenne des Droits de l'Homme va retenir l'impartialité objectif au regard de « la confian ce que les tribunaux d'une société démocratique se doivent d'inspirer aux justiciables ». La juridiction doit donc offrir des garanties suffisantes pour exclure à cet égard tout doute légitime. Ici aussi l'exercice semble périlleux au sein du TPIR, dès lors qu'il est constaté que seuls des Hutus ont été jugés et condamnés 81

Pourtant cette mappemonde protectrice des droits de l'Homme, et soucieuse d'une justice indépendante et impartiale se retrouve au coeur même des bases textuelles encadrant le Tribunal Pénal International pour le Rwanda.

8 1 Cf.supra, «la pratique du TPIR: le face immergée de l'iceberg, p 35 et s.

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"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon