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Dépénalisation des délits de presse en République Démocratique du Congo : analyse de l'action de journaliste en danger (JED). Approche sociologique du droit de l'information.

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par Innocent OLENGA LUMBAHEE
IFASIC - Licence 2010
  

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I.2. Délit de presse

Le mot délit vient du latin delictum qui signifie  faute ou péché. Lorsqu'on prend le préfixe de et on l'associe au participe passé de linquere qui signifie laisser, délaisser ou renoncer, on a le verbe delinquere qui veut dire « manquer à son devoir, pécher ou fauter ». C'est de ce mot latin delinquere qu'est issu le mot délinquance ou délinquant.

Le délit peut être civil (tout fait illicite et dommageable commis envers autrui avec intention de nuire et qui entraîne une obligation de réparation) ; politique (celui qui porte atteinte à l'organisation et au fonctionnement des pouvoirs publics) ; de presse (infraction commise par voie de presse) ; de chasse, etc.

Dans le langage courant, le mot « délit » est souvent synonyme d'infraction. En droit français, par exemple, est considéré comme délit « toute infraction que les lois punissent de peines correctionnelles ». Mais en droit congolais, les juristes révèlent que le concept « délit » ne relève qu'en matière civile. Ils renvoient à l'article 258 du Code civil, livre III portant sur les contrats ou les obligations conventionnelles qui définit le délit comme « tout fait quelconque de l'homme qui cause un dommage à autrui ». Un délit étant donc un fait quelconque, la loi congolaise n'en prévoit ni une liste ni un contenu précis. Il est tel du seul moment qu'il cause préjudice à autrui.

Pour certains juristes congolais, un délit n'est pas à confondre avec une infraction en droit pénal congolais. Ils qualifient de confusion entretenue par le législateur lorsque ce dernier utilise l'expression « délit » en droit pénal. Non sans raison, ils argumentent que les infractions sont prévues d'avance par le législateur du point de vue de leur nombre, de leur contenu et de leurs éléments constitutifs. Ce qui n'est le cas pour les délits qui relèvent du droit civil. Ces juristes estiment tout simplement que cette expression participe d'un mimétisme légistique et d'un copier-coller sur le modèle des textes occidentaux. En effet, contrairement à la législation congolaise, le délit est du domaine pénal en France comme en Belgique.

En RDC, lorsqu'on parle de « délit de presse », on doit vite recourir à l'article 74 de la loi n° 96-002 du 22 juin 1996 fixant les modalités de l'exercice de la liberté de la presse, pour en tirer la définition. L'article cité de cette loi définit le délit de presse comme « toute infraction commise par voie de presse écrite ou audiovisuelle ».

Par cette définition, Pierre Akele18(*) décèle dans le chef du législateur congolais une vision très large du délit de presse du fait que celui-ci incrimine en quelque sorte « l'abus de la liberté de la presse, c'est-à-dire l'usage des médias à des fins de commettre quelque infraction que ce soit.

Par contre, cette définition prévue dans l'article 74 de la loi du 22 juin 1996 est jugée vague à souhait par Léopold Mbuyi19(*), au point qu'on doive considérer le délit de presse plus comme un mode particulier de commission d'une infraction que comme une infraction propre. Les délits de presse dans cette loi, fait-il savoir, tiennent plus des circonstances aggravantes et des modes de participation criminelle que des infractions autonomes. Léopold Mbuyi fait savoir que l'organisation de la responsabilité civile, la prescription et surtout la compétence y sont lacunaires. Cet oubli du législateur de l'époque n'était pas un hasard.

De cette définition du délit de presse donnée à l'article 74 de la loi du 22 juin 1996 sur la presse, Ghislain Mabanga20(*) dégage une observation : il y a délit de presse chaque fois qu'une infraction aura été commise par voie de presse, c'est-à-dire par l'entremise d'un support médiatique écrit, électronique ou audiovisuel. Selon lui, il est clair que sont passibles des peines prévues par la loi du chef des délits de presse, non seulement les professionnels de la presse, mais aussi toute personne généralement quelconque qui userait de l'outil médiatique pour enfreindre la loi.

Il faut noter que la notion de délit de presse n'est pas l'apanage du seul droit congolais. Jean-Marie Charon et Claude Furet21(*) considèrent le délit de presse comme un délit d'opinion par le moyen de la presse. Pour eux, chaque fois que la presse sert de moyen d'expression à une infraction, cette infraction devient un délit de presse pour autant que la matière porte sur le délit d'opinion.

Pour sa part, Fernand Terrou22(*) note que la définition des délits de presse est inévitablement formulée en termes très généraux qui peuvent prêter à des interprétations, à des applications diverses et mouvantes. Dans le domaine de l'information, remarque-t-il, c'est du libéralisme du juge que dépend pour une large part le libéralisme du régime.

En définitive, tout fait, comme le font savoir Charles Mugagga Mushizi et Donat M'baya Tshimanga23(*) dès lors qu'il peut être interprété comme enfreignant une des dispositions pénales en vigueur en RDC ou dans l'ordre judiciaire international, constitue un délit de presse pour autant qu'il soit perpétré par voie de presse. Il engendre ainsi, automatiquement, une responsabilité pénale dans le chef de son auteur, même si les poursuites ne s'en suivent pas automatiquement ni immédiatement. On pourrait donc déduire que chaque fois que la presse sert de moyen d'expression à une infraction, cette infraction devient un délit de presse. Le délit de presse peut donc être le fait d'un professionnel des médias ou de n'importe quel individu qui se servirait d'un support écrit ou audiovisuel propre aux médias pour commettre une infraction.

* 18 AKELE P., « Dépénaliser les délits de presse en RDC : pourquoi et comment ? », in Plaidoyer pour la dépénalisation des délits de presse en République Démocratique du Congo, Kinshasa, mai 2004

* 19 MBUYI L., « La problématique de la diffamation et des imputations dommageables par voie de presse », in Code de déontologie des journalistes en RDC, OMC, Kinshasa, février 2005.

* 20 MABANGA, op.cit

* 21 CHARON J-M et FURET C., Un secret si bien violé : la loi, le juge et le journaliste, Paris, Seuil, 2000.

* 22 TERROU F., op. cit.

* 23 MUGAGGA C. et M'BAYA D ; Comprendre les textes juridiques et déontologiques régissant la presse en RDC, février 2006, Institut Panos Paris, p.69

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