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Etude de la condition de la femme face à  la violence du terrorisme intégriste dans le recueil de nouvelles « Oran, langue morte » d'Assia DJEBAR

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par Lamia AKERMOUN
Université Saad Dahleb de Blida - Licence de français 2010
  

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I-3) ETUDE DES CARACTERISTIQUES DES PRINCIPAUX PERSONNAGES ET DE LEUR EVOLUTION DANS LE RECIT

Après avoir nous être intéressées aux repères spatio-temporels et leur poids dans le récit, nous allons clôturer cette première partie par l'étude des principaux personnages, leurs caractéristiques ainsi que leur évolution dans le roman.

En effet, l'étude des personnages se présente comme une donnée fondamentale dans la fiction, étant donnée qu'il n'existe presque pas un récit sans personnage. C'est autour d'eux que s'organise l'histoire ainsi que l'enchaînement des actions : «  les personnages ont un rôle essentiel dans l'organisation des histoires. Ils déterminent les actions, les subissent, les relient et leur donnent un sens. D'une certaine façon, toute histoire est histoire des personnages, c'est pourquoi leur analyse est fondamentale. »37(*)

Par ailleurs, R. Bourneuf et R.Ouellet notaient que le personnage n'existe pas en soi mais puisant dans une « dynamique de groupe » agissant les uns sur les autres :

Les personnages de roman, comme celui du cinéma ou celui du théâtre, est indissociable de l'univers fictif auquel il appartient : hommes et choses. Il ne peut exister dans notre esprit comme une planète isolée : il est lié à une constellation

et par elle seule il vit en nous avec toutes ses dimensions.  38(*)

Dans notre corpus d'étude, il est question de trois personnages qui relatent leurs vies à travers leurs regards de femmes, ayant subies toutes les atrocités de la guerre fracticite.

Ce sont des personnages qui ont suivis des chemins identiques. Ainsi, ils ont été confrontés à plusieurs conflits souvent d'ordre social et politique.

En effet, les renseignements qui concernent ces personnages sont donnés sous différentes formes :

I-3-1) A TRAVERS LE DISCOURS DU PERSONNAGE

Dans ce cas, le personnage révèle son identité et celle des autres personnages, son métier, ses origines etc.

Dans La fièvre dans des yeux d'enfant, le personnage principal se présente lui-même dans la sixième page : « Donc moi, l'amie de Nawal-Nawal explosée, disloquée, effacée- je me présente : Isma. « Isma ». Le nom, mais quel nom, plutôt le cherchant, mon nom, ou celui de l'autre. Isma donc, cela suffit, avec l'indication de mon âge, et dès la première rencontre. -Trente-six ans ! »39(*)

A côté des renseignements d'Isma, s'ajoutent ceux de son amie. Isma nous donne une idée sur son amie et sur elle-même :

Or, à vingt ans, je me souviens avec mon air bougon-en fait, cuirasse de timidité, car venue de ma ville forteresse de l'est, je n'avais pas l'habitude « de parler aux garçons », comme on disait alors. Je leur parlais, je conversai donc, mais je cachais, par une austérité de maintien, mon inhabilité, parfois mon affolement devant le moindre tutoiement. A vingt ans, étudiante à peine débarquée à la capitale, je paraissais, me semble-il, cinq ou six ans de plus.40(*) 

En ce sens, Isma nous rend compte, d'une manière implicite, de sa personnalité, ainsi que de sa façon maladroite d'agir en arrivant à la capitale.

Selon A.Bekkat ; l'antériorité permet de fournir une épaisseur aux personnages : «  donner un passé à un personnage lui donne de l'épaisseur ainsi le héros sera enraciné ou nom dans une famille, une tradition, une région, etc. »41(*)

A travers son discours, Isma nous révèle son statut social et familial : « J'allais au studio, à chaque fin d'après midi, en sortant de mon lycée [...] Je me retrouvais seule chez moi, enfin, au domicile conjugal ! Car Ali était parti trois jours après l'arrivée du Somalien. Appelé dans son village des Béni-Ourtilane. »42(*)

Nous saurons à travers les propos d'Isma qu'elle est professeur et qu'elle est mariée. L'incise « enfin » nous révèle le soulagement d'Isma à l'égard de l'absence de son époux. Également, elle nous donne une idée sur le musicien qui arrive.

Ce sont là des signes auxquels il faudrait prêter attention, car ils peuvent échapper au lecteur.

Dans L'Attentat, Naima, le personnage principal se révèle également à travers son discours. Elle nous donne l'idée sur son statut familial, en premier lieu : «  Je dormais si bien ces quinze jours où mon mari vit à nouveau à la maison, où mon garçon se remet peu à peu à marcher avec ses béquilles. »43(*)

La situation alarmante du personnage Naima et de sa famille apparaît dès les premières pages :

 Mourad, depuis au moins trois mois, à raison d'un article (long, véhément, polémique) par semaine, tient désormais à signer ce qu'il analyse, ce qu'il dénonce, ce qu'il clame au pays tout entier [...] Auparavant, il écrivait ses articles hebdomadaires dans deux journaux indépendants. Il prenait toutefois des prête-noms.  44(*)

Mourad est, en effet, journaliste et inspecteur de français .A cause de son engagement contre les intégrismes, il sera condamné par ceux-ci. C'est cette condamnation que va explorer Naima tout au long du récit.

Naima se révèle également par ce qu'elle fait : « Je suis enseignante d'arabe au lycée voisin »45(*) et par ce qu'elle ressent face à la mort de son époux :

Je te regarde Mourad, ton front, la ligne de ton nez ; j'observe le grain de ta peau près des tempes. Tes yeux fermés, plus jamais hélas ton regard, et ourlant tes paupières, tes signes de jeunes homme d'autrefois, ta ride aussi, creusée sous ta bouche. Je te contemple, oui, au dessus de ton visage d'aveugle-toi, ô gisant de pierre- se creuse un vertige de silence, s'installe un sommeil ennui. 46(*)

Nous remarquons que la romancière s'attache à décrire les traits physiques du cadavre de Mourad, l'expression des sentiments de Naima qui observe ce dernier enveloppé dans un linceul, ainsi que ses manifestations : « je retourne vers mon mari, à terre, je tourne sur moi-même, désorientée : je vais me réveiller ! « Un jeu » ai-je pensé face au garçon à l'arme. »47(*)

La vie des deux couples

Ces personnages n'ont pas une différence de culture ni de savoir. Or, la communication entre eux semble très difficile. Ainsi, Naima n'arrive pas à convaincre son mari de ne pas publier l'article qui met ce dernier en danger : « Tu ne peux pas te tenir tranquille ! Rester avec nous deux, avec le petit et moi ?...tout bonnement !...oublier un moment tout ça ! » 48(*)

De même, Isma décide de quitter son mari pour ce musicien : « J'attendrai le quarantième jour de cette mort, décidai je. J'irai avec lui au village, jusqu'à la tombe de Lalla Salma et les deux autres, le couple fusillé. Mais au retour, je lui expliquerai ; je le convaincrai : je désire, oh oui, comme je désire vivre seule. »49(*)

Ainsi, elle préfère livrer ses confidences à son amie bien qu'elle soit « disparue ».

Finalement, seules les femmes paraissent libres de partager entre elles ce qui produit et tisse la trame de leur quotidien : «  Nawal, ma meilleure amie, écoute, laisse moi te parler ! Te raconter [...] te relater les moindres détails. »50(*)

En ce sens, Isma, en se retrouvant avec son amie, ou alors l'image de son amie, fait preuve de connivence immédiate, puisqu'elle n'hésite pas à s'éplucher sur la réalité : «  Nawal (je prends le discours avec toi : ma si proche, aide moi par ton amitié, par ton souffle, près de moi, aide moi à rendre compte de ces jours bousculés. »51(*)

Ces personnages s'évoluent donc à partir de ce qu'ils ont enduré. Ils ont envisagé leurs histoires comme une sorte de journal intime dans lequel leurs expériences ont été révélées.

Il s'agit d'un choix d'écriture. Pour l'auteure, ce serait une sorte de délivrance dans laquelle ces personnages s'expulsent des espaces voilés, racontant leurs deuils, leurs luttes ainsi que leurs espoirs.

* 37 Y. Reuter, Introduction à l'analyse du roman, Paris, éd. Dunod, 1996, p 51

* 38 R.Bourneuf, R.Ouellet, L'univers du roman, Paris, éd. Presses Universitaires de France, 1972, p 142

* 39 Assia Djebar, Oran, langue morte, Op.cit, p 78

* 40 Idem, p 79

* 41 C.Achour, A.Bekkat, Clefs pour la lecture des récits, Op.cit, p 46

* 42 Assia Djebar, Oran, langue morte, Op.cit, pp 95-96

* 43 Idem, p 139

* 44 Idem, p 141

* 45 Idem, p 146

* 46 Idem, p 152

* 47 Idem, p 143

* 48 Assia Djebar, Oran, langue morte, Op.cit, p 145

* 49 Idem, p 113

* 50 Idem, p 75

* 51 Idem, p 106

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"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon