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Certification de gestion durable des forêts et efficacité socioéconomique des entreprises du secteur dans le bassin du Congo. Cas du Cameroun

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par Jonas NGOUHOUO POUFOUN
Université de Yaoundé 2  - Diplôme d'études approfondies/ Master II en sciences économiques 2008
  

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I.2.2. Bilan des réformes

Les réformes forestières présentées ci-dessus ont abouti à quelques effets attendus. Cependant, on en retiendra aussi quelques limites.

a) les résultats positifs

Les actions menées par l'Etat en matière de GDF ont généré quelques résultats louables en matière de contrôle et de sanctions, d'industrialisation, de gestion participative et de reboisement. Nous pouvons citer à ce titre :

· le démantèlement des infractions et sanctions dans le « sommier des infractions du secteur des forêts » telles que régi par les articles 154-165. Pour le dernier trimestre de l'année 2007, le MINFOF révèle un peu plus de 20 milliards de FCFA de pénalités, suspend entre autre 27 opérateurs du secteur accusés de fraude et sanctionne régulièrement les exploitations des essences non autorisées conformément aux conventions signées en matière de conservation de la biodiversité. Tout ceci est réalisé avec la contribution des brigadiers nationaux de contrôle forestier et des observateurs indépendants agréés23(*) ; qui ont pu juger de l'incapacité des opérateurs à produire l'origine de leurs bois suivant la loi et les conventions passées avec les partenaires qui exigent de démontrer l'origine du produit exporté ;

· de 1992 à 2008 les recettes forestières sont passées de 4 milliards à plus de 40 milliards (MINFOF, 2008). La stratégie forestière suivie par le gouvernement a favorisé une politique d'industrialisation, notamment entre 1994 et 1998, en partie due à l'arrêt partiel des exportations de grumes ainsi que l'adoption progressive par les exploitants forestiers et les transformateurs des normes associées à l'aménagement durable. Cette capacité de transformation est de l'ordre 2,2 millions de mètre cube (m3) en 2007. Elle est initialement tournée vers la première transformation, sciage principalement, s'est stabilisée tout en améliorant la création d'emplois. Ces dernières années, on observe également le développement d'une transformation plus poussée des bois en produits à valeurs ajoutés (transformations secondaire et tertiaire) chez bon nombre d'exploitants forestiers en conformité avec l'article 71 de la loi forestière. En effet, ces derniers possèdent 55% des capacités installées de transformation, disposent de 54% des superficies attribuées en concession propre et de 74% en partenariat ou affermage ;

· aujourd'hui, plus de 150 forêts communales et communautaires ont été créées dont 50 fonctionnent normalement. Dix d'entre elles détiennent un plan simple de gestion. Près de 50 milliards de FCFA sont distribuées aux communes et communautés forestières depuis 2000 (MINFOF, 2008) au titre le Redevance Forestière Annuelle (RFA) ;

· le Cameroun a lancé un programme national de reboisement en 2007 qui intègre toutes les parties prenantes concernées et des actions sont menées pour reboiser les zones urbaines et rurales. ces activités pour l'année 2008 ont consisté en la signature de14 conventions de collaboration avec les Communautés Urbaines, les communes, les exploitants forestiers et les privés avec le soutien d'Agence nationale d'appui au développement forestier (ANAFOR). Actuellement, 2.332.706 arbres ont été plantés pour une superficie de 7.776 hectares ; sur une prévision de 1.176.473 arbres équivalents à une superficie de 2.941 hectares ; soit un taux de réalisation de 198 % réparti ainsi qu'il suit :

ü privés : 1.736.790 arbres plantés, équivalents à 5.789 hectares ;

ü collectivités décentralisées : 492.372 arbres plantés, équivalents à 1.641 hectares ;

ü institutions scolaires et universitaires : 65.123 arbres plantés, équivalents à 218 hectares

ü exploitants forestiers : 38421 arbres plantés, équivalents à 128 hectares (EBIA DONGO, 2009).

Toutefois, il est important de revenir sur quelques Limites et défaillances de ces reformes.

b) les résultats négatifs

L'exploitation frauduleuse du bois au Cameroun reste alimentée par certaines formes de corruption largement répandues qui entravent l'évolution vers une foresterie durable (DINGA, 2005). Certains concessionnaires bénéficiant de couvertures politiques ne payent pas les amendes, ce qui non seulement, n'assure pas une bonne gouvernance forestière (KARSENTY, 2007), mais aussi, compromet sérieusement les efforts des pouvoirs publics et cause un préjudice de près de 80 milliard de Francs CFA à l'Etat contre 3 milliards seulement de pénalité payée au trésor en 2003 (Global Witness)24(*). Entre 1999 et 2004, 50% de l'exploitation forestière était illégale. Le gouvernement estime d'ailleurs à 100 millions de dollars le coût de cette exploitation illégale au Cameroun (GREENPEACE, 2008).

Les plans sont approuvés et mis en oeuvre, mais n'assurent pas un minimum de durabilité dans la gestion forestière. En 2006, 68% du bois produit ne respectaient pas les règles de gestion existantes, à cet effet, l'importance du nombre de plans d'aménagement existant (plus de 49) ne peut tenir lieu d'indicateur de gestion durable. Au Cameroun, cette dernière nécessiterait d'instruments plus performants que les plans d'aménagement approuvés (CERUTTI et al, 2008). Il est par exemple parfaitement légal de ne pas prévoir de mesures de gestion spécifiques concernant un certain nombre d'essences clés de la concession. Les niveaux de récolte sont souvent basés sur des inventaires périmés. Pour de nombreuses essences exploitées commercialement, les taux de reconstitution ne sont que de 50% (VANDENHAUTE et HEUSE, 2006) et même lorsque ces plans sont respectés, de nombreuses essences sont surexploitées et la forêt se dégrade (Greenpeace, 2007). Une étude récente effectuée à la demande de l'agence de développent allemande (GTZ) recommande que tous les plans d'aménagement soient revus afin de garantir une vraie durabilité (VANDENHAUTE et HEUSE, 2006).

Plusieurs exploitants continuent à exercer de façon illégale. De nos jours, le « sommier des infractions » répertorie encore pratiquement les mêmes infractions que dans les années 2000, à l'instar des coupes incontrôlées, hors concessions, hors limites des Assiettes Annuelles de Coupe (AAC), sous-diamètre, des sous-traitances non autorisées, l'exploitation sans titres25(*), ... ceci serait du à un dispositif de sanction peu contraignant et peu apprenant.

Selon Forest Monitor (2002), la production de grumes est estimée entre 4,5 et 5,1 millions de m3 pourtant, les estimations officielles, donnent 3,5 millions de m3 par an. Ces chiffres sont différents et traduisent une pratique étendue de l'exploitation. La GDF est sérieusement compromise au Cameroun du fait de la pratique permanente du braconnage et du commerce du gibier. La pression du braconnage est tellement forte que si elle est maintenue au niveau actuel, cette activité aura des conséquences désastreuses sur la biodiversité de la forêt tropicale. Le 9 mai dernier, la brigade forestière venait encore de saisir près de 250 gibiers issus des forêts camerounaises.

Dans le cadre de la décentralisation de la législation camerounaise, il est important de noter que la  convention d'aménagement d'une forêt communautaire ne confère à la communauté, ni des droits de propriétés sur le domaine, ni quelques titres de propriété sur la forêt elle-même. Dans les deux cas, les droits de propriétés sur le domaine foncier et sur la forêt demeurent ceux de l'Etat. Toutefois, les avantages dont bénéficie la communauté sont définis dans le cadre du plan simple de gestion concédé ; encore que « le plan de zonage provisoire des régions forestières de 1993 a été établi sans la participation [des populations] » (CERUTTI et TACCONI, 2006). Il est donc difficile de parler de gestion participative de la biodiversité en général et des forêts en particulier, à moins que l'Etat ne repense une redéfinition des conventions d'attribution des forêts communautaires et des concessions en offrant une place de choix aux populations locales (autochtones et allogènes) pour une bonne prise en compte de leurs intérêts et de leurs « droits de copropriété » du patrimoine forestier national.

L'état ne remplit pas entièrement ses obligations envers les populations. Par exemple si la RFA était convenablement reversée et bien gérée, les paysans exerceraient moins de pressions et poseraient moins de problèmes (HULEUX, 2007)26(*).

La politique de gestion forestière durable du Cameroun, basée principalement sur la loi 20 janvier 1994 est complète. Elle peut à elle seule garantir l'aménagement durable des forêts, la préservation des intérêts des parties prenantes dans l'exploitation; bref, au regard du contenu de la loi forestière, elle peut garantir à peu près à 70 % une gestion responsable du massif forestier camerounais. Cependant, l'Etat rencontre de grandes difficultés pour financer le fonctionnement de son administration forestière, cette dernière est défaillante et ne peut veiller à l'application de cette loi, les agents, insuffisants, sont mal formés, moins rémunérés, corrompus pour certains, et se tiennent trop souvent éloignés du terrain (BERGONZINI, 2000). Malgré de multitudes reformes et conventions ratifiées par le gouvernement, l'illégalité et l'anarchie dans la gestion perdurent, les forêts camerounaises font encore l'objet de pillage systématique de la part des entreprises forestières (FAO, 2005). Il existe encore deux grandes catégories d'activités illégales notamment (i) les coupes illégales (les coupes hors limites de la zone d'exploitation autorisée, les coupes sans autorisation, les sous-traitances de l'exploitation de coupe, les coupes d'arbres aux diamètres inférieurs aux DME, le non respect des restrictions locales (ex. coupe de moabis dans un rayon de 5 km d'un village)) et (ii) les fausses déclarations (le volume de bois non déclaré a été récemment estimé à 1/3 de la production totale27(*)...)

Cette persistance de l'illégalité entretient des conséquences graves telles que la déforestation et la dégradation environnementale, la rareté de revenus financiers dans les services publics, les conflits entre acteurs et la disparition des fonctions sociales dont bénéficient les populations riveraines et les employés. Il serait important de repenser un mécanisme correctif plus contraignant pouvant créer des nouveaux marchés pour assurer la conservation de la biodiversité. La certification forestière répondrait à ces exigences, non seulement, en conservant à la fois une dimension locale (garantie des intérêts des parties prenantes et de la pérennité des ressources pour les générations futures), et une dimension globale (fonctions écologiques contre le réchauffement planétaire et le maintien du climax), mais aussi, en assurant une viabilité économique des entreprises.

* 23 Forêt : la fraude se joue de la certification. http://www.cameroon-info.net/cmi_show_new.php?id=22178

* 24 Global Witness gestionnaire du respect de la réglementation et du professionnalisme dans toutes les étapes de l'activité d'exploitation forestière au Cameroun, in Forêt : la fraude se joue de la certification. http://www.cameroon-info.net/cmi_show_new.php?id=22178

* 25 Les titres attribués sont de plusieurs catégories: voir Annexe II

* 26 Interview, CARPO FOCUS Issue N° 011 October-December 2007

* 27 Sur base de l'enquête réalisée par les Amis de la Terre dans la province de l'est du Cameroun (2008)

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"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote