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Le défi du désendettement soutenable en Afrique Subsaharienne: Au-delà de l'Initiative PPTE.

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par Claire Barraud
Université Pierre Mendès France, Grenoble II - M2 recherche Politiques économiques et sociales 2006
  

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2 L'instauration d'une législation et d'un Tribunal international de la dette (TID).

Dans la mesure où tous les mécanismes de gestion de la dette extérieure publique qui ont été mis en place par les créanciers depuis des décennies se sont avérés partiels et inefficaces (y compris l'IPPTE), il convient d'instaurer un dispositif plus équitable. L'impasse dans laquelle s'est trouvée l'Argentine met en évidence les problèmes posés par l'absence d'un mécanisme international de gestion de la dette extérieure publique (y compris celle liée à la garantie de l'Etat des emprunts privés). Ce type de juridiction internationale a surtout été proposé pour les pays émergents faisant largement appel aux capitaux privés pour se financer mais attirant par là même les capitaux spéculatifs et les prises de risque excessives. Toutefois, il serait tout aussi judicieux de créer une législation internationale sur la dette souveraine (LIDS) accompagné, dans son application, d'un Tribunal international de la dette (TID17) pour les pays pauvres, notamment les «très endettés ». Un tel organisme s'inscrit dans la lignée d'une autre lecture de la soutenabilité; celle qui tient compte des intérêts et des responsabilités des créanciers, comme de ceux des débiteurs. Il a de plus le grand avantage de pouvoir contraindre les créanciers commerciaux, initialement réfractaires, à participer aux négociations de restructurations et d'allègements de dettes.

La mise en place d'un mécanisme formel de restructuration de la dette souveraine18 doit s'inscrire dans un cadre de justice et de transparence (contrairement aux négociations dans le cadre du Club de Paris, dont les modalités sont souvent très opaques et au sein desquelles le débiteur est seul face à tous ses créanciers organisés). Un tel mécanisme pourrait s'inspirer du code de la faillite américain, qui conjugue les intérêts et la responsabilité du débiteur et ceux de créancier.

17 Les abréviations sont « inventées » par l'auteur dans la mesure où elles ne sont pas apparues dans les documents utilisés.

18 Dette des Etats souverains.

Le FMI s'est récemment déclaré favorable à une telle instauration. Et certains éléments de sa proposition paraissent séduisants. En outre, le Fonds adhère au caractère préventif d'une telle législation, qui viserait à responsabiliser non seulement le débiteur mais également le créancier. Selon lui, les pays débiteurs seraient alors les initiateurs d'une «mise en faillite provisoire » puisqu'ils déclareraient un moratoire sur leurs remboursements pour déclencher la procédure. Dans ces conditions, la procédure prendrait en compte les spécificités du pays «redevable» (comme l'article 9 du code de la faillite américain), mais elle devrait également tenir compte du degré de responsabilité du créancier (FMI compris). Ensuite, le FMI se dit favorable au contrôle temporaire des flux de capitaux dans le pays débiteur, ce qui constitue une avancée compte tenu de sa dévotion traditionnelle pour une libéralisation totale. Il envisage même la mise en place dune « entité internationale qui pourrait arbitrer les désaccords et superviser les négociations »19.

Néanmoins, le FMI n'a pu s'empêcher de se réserver une place de choix dans la procédure. En effet, si beaucoup d'auteurs à ce sujet estiment que la procédure doit relever d'une instance neutre et impartiale, le FMI se déclare quant à lui compétent pour jouer un rôle d'approbation ex ante. Pourtant, le FMI n'est ni neutre ni impartiale puisque non seulement il est lui-même créancier mais il est également dans son ensemble gouverné par les pays riches, notamment par les Etats-Unis20. Surtout que le Fonds insiste sur son statut prioritaire dans le cadre de sa fonction de prêteur en dernier ressort. D'autre part, le FMI se focalise toujours sur l'aspect financier de l'analyse de l'endettement. C'est son droit puisqu'il s'agit d'une institution financière. Mais il doit dans ces conditions, puisqu'une dette insoutenable englobe aussi des aspects tels que ceux liés à la réalisation des OMD, laisser laplace à une institution apte fournir une analyse globale. Qui plus est, le FMI reste touj ours muet au sujet de la nécessaire transparence de la procédure et de la participation de la société civile, pourtant toutes deux indispensables.

Le compromis décelé au sein du G721 en 2002 est donc insuffisant dans la mesure où il constitue un « mixage » de la position américaine et de celle du FMI. En effet, bien que favorables à la proposition du FMI dans un premier temps, les Etats-Unis s'en sont très vite

19Ajaltouni N. et al., sous la direction de Merckaert J., 2004, Rapport 2003 de la plate-forme Dette et Développement, op. cit., p.51.

20 Les Etats-Unis étant le seul pays à disposer d'un droit de veto dans le cadre de certaines décisions compte tenu du fait qu'ils versent la quote-part la plus élevée.

21 La Russie n'y étantpas incluse à cette époque, le groupe n'était encore pas dénommé G8.

éloignés car ils refusaient de renforcer le rôle de l'institution. Ils ont alors proposé «une approche de régulation par le marché »22. L'idée s'éloigne donc totalement de l'instauration d'un mécanisme et d'une institution formels pour procéder à de telles restructurations. Par ailleurs, en préconisant simplement l'établissement de nouvelles clauses dans les futurs contrats de prêts, permettant la facilitation des négociations en cas de défaut, l'idée ne permet pas de résoudre les problèmes tenant aux prêts antérieurs. De fait, le consensus du G7 vise seulement à appliquer la proposition américaine avec un FMI dans le rôle de gendarme «en dernier ressort ». Or, le problème de l'asymétrie entre débiteur et créancier n'est alors pas réglé.

L'idée ici prônée s'inspire des quatre principes préconisés par J. E. Stiglitz [2006] dans le cadre de la systématisation de « l'opération de restructuration/effacement de la dett e »23. D'abord, l'effacement éventuel de la dette doit être assez conséquent pour permettre un niveau soutenable à moyen terme au moins (cinq ans selon Stiglitz). Les IFI doivent donc baser leurs estimations sur des projections réalistes, du moins beaucoup davantage qu'aujourd'hui. Deuxièmement, les détenteurs étrangers n'étant pas les seuls créanciers, une priorité doit être réservée, dans la mesure du possible, aux créanciers domestiques que représentent les populations dans le besoin (devoir d'éducation et d'apport de soins de santé pour les Etats). Troisièmement, «la restructuration doit être rapide et favorable au débiteur. Tout délai a un coût prodigieux »24, comme le montrent les retards pris en phase intérimaire de l'IPPTE. Le chapitre 11 du code américain des faillites peut inspirer les mesures à prendre à cet égard. Enfin, et c'est le plus important, la procédure, quelle qu'elle soit, ne doit pas être déterminée par les créanciers, FMI compris, ces derniers ne pouvant par définition être impartiaux.

Pour conclure, «je suis convaincu[e] que la mise en place d'une organisation des faillites internationales finira par s'imposer ». (...) Mais, à court terme, il pourrait être utile de créer un service de médiation internationale pour établir des normes »25. Une telle organisation a l'avantage de ne pas nécessiter une création ex nihilo dans la mesure où une institution qui peut la prendre en charge existe déjà. En effet, «un groupe de travail élargi sur la dette au sein du programme «financement

22 Ajaltouni N. etal., sous la direction de Merckaert J., 2004, op. cit., p. 52.

23 J. E. Stiglitz, 2006, «Un autre monde », éd. Fayard, p. 327.

24Id.,p. 328.

25 Id. p. 329.

du développement » des Nations Unies [pourrait être crée], impliquant délégués gouvernementaux, IFI, experts et sociétés civiles du Nord et

du Sud »26.

Ce même groupe de travail pourrait tout aussi bien avoir pour tâche d'identifier et d'annuler les dettes dites «odieuses », avant de réorienter les politiques dites «de bonne gouvernance » des PPTE. Ce n'est que dans ces conditions qu'une dette peut effectivement s'avérer soutenable à moyen/long terme.

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