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De Laurent Désiré Kabila à Joseph Kabila. La désillusion d'un régime révolutionnaire en République Démocratique du Congo

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par Eder Kitapandi Luzau
Université de Kinshasa, RDC - Licence en Sociologie 2006
  

Disponible en mode multipage

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    UNIVERSITE DE KINSHASA

    Faculté des Sciences Sociales, Administratives et Politiques

    Département de Sociologie et Anthropologie

    De Laurent-Désiré Kabila à Joseph Kabila

    La désillusion d'un régime révolutionnaire en République Démocratique du Congo

    Par

    Eder KITAPANDI LUZAU

    Mémoire présenté et défendu en vue

    de l'obtention du grade de licencié

    en sociologie

    Dir. : André Lubanza Mukendi

    Professeur Associé

    Rap. : J.P. Mpiana Tshitenge wa Masengu

    Chef de Travaux

    Année académique 2006-2007

    EPIGRAPHE

    « A tous ceux qui nous combattent. Car, plus que nos amis, ils nous aident à ne rien affirmer au hasard ainsi qu'à travailler sans relâche. Plus qu'ils nous compliqueront la vie, plus ils nous rendront savant. »

    Matthieu Kalele ka Bila

    Et

    « La vie ne vaut que les efforts qu'elle vous a coûtés. Il faut toujours la considérer comme un combat, une lutte acharnée où le désir de vaincre doit sans cesse pointer à l'horizon quel qu'en soit le prix. C'est ça être homme. On lutte, on s'affirme et on s'impose. »

    Eder Kitapandi Luzau

    DEDICACE

    A Jéhovah Dieu, le maître de temps et de circonstances qui m'a aidé d'arriver à la fin de mes études. Sans toi, rien ne peut se réaliser ; que ton nom soit glorieux.

    A mon défunt père Bernard Kitapandi et à ma mère Philomène Madiata pepe, pour m'avoir donné la vie et m'ouvert les yeux aux prodiges de la terre, trouvez à travers ce mémoire, combien je vous suis reconnaissant, car sans vous, je ne serai rien dans ce monde.

    A toi Freddy Kwanza « Le Jocker », pour tant de privations et de sacrifices consentis pour ma formation et l'affection que tu as toujours témoignée à mon égard. Je te dédie ce modeste travail, puisse-t-il être un signe d'amour et un souvenir de temps parfois durs.

    A mon grand frère Fraizer Kwanza Chango et à son épouse Mère Ngita, pour votre hospitalité, vos conseils, encouragements et votre assistance tant matérielle que morale.

    A toi mon cher ami bien aimé Dr Serge Kimolo, pour ton amitié combien dévouée a été pour moi un grand réconfort, me relevant chaque fois que j'allais sombrer dans le désespoir, le relâchement. A travers mes écrits, fruit de pénibles efforts et de longues nuits d'insomnie trouve ici ma reconnaissance.

    A mes neveux et nièces Trésor, Junior, Neville, Chaïda ; Hans, Freddy, Beni, Keffi, Ruben, Fred, Magloire, Armando, Degoline et Exaucée.

    A mes frères, soeurs, cousins et cousines, que ce travail soit pour vous un modèle de courage, de persévérance, d'abnégation et de discipline. C'est après avoir enduré des peines que nous sommes arrivé à ce résultat. Entrez donc à l'école de caméléon.

    A Marcelline Ngunga notre cadette, que ce travail te serve de modèle et d'exemple.

    Je dédie ce mémoire

    AVANT-PROPOS

    Au seuil de ce mémoire qui marque la fin de notre deuxième cycle d'études universitaires en sciences sociales, administratives et politiques, au Département de sociologie et anthropologie, il nous est un agréable devoir de remercier tous ceux qui, de près ou de loin, d'une manière directe ou indirecte, ont contribué à son aboutissement.

    L'honneur revient en premier lieu au Professeur André Lubanza Mukendi, notre directeur, qui a volontiers accepté d'assurer la direction de ce mémoire. C'est grâce à ses compétences scientifiques, ses observations, ses remarques pertinentes et qualités humaines que nous sommes parvenu à élaborer le présent travail.

    En second lieu, notre gratitude s'adresse au Chef de Travaux Jean Pierre Mpiana Tshitenge wa Masengu, notre encadreur, qui, malgré ses occupations scientifiques et familiales, a accepté d'être notre encadreur. Nous lui devons vive et sincère reconnaissance.

    A travers notre directeur et notre encadreur, nous remercions également tous nos professeurs, Chefs de Travaux et Assistants de la faculté des Sciences sociales, administratives et politiques en général, et ceux du département de sociologie et anthropologie en particulier qui se sont dépensés jour et nuit pour notre formation précieuse tant intellectuelle que morale à l'Université de Kinshasa.

    Que l'éloge soit adressé aux familles Kwanza, Bala-Bala, Mpiana, Bakomba, Temene, Ngiama, Kifunga. Nous avons demeuré dans le sanctuaire de leur assistance. Ce qui nous a permis de figurer ou de nous classer en ordre utile dans les registres et listes de la mère nourricière. Qu'elles trouvent à travers ces lignes nos remerciements et le sceau de notre profonde gratitude.

    Nous dirons également nos sincères et profonds remerciements à nos partenaires Léon Mbu, Géorges Kizefu, Seba Temene, Bopaul Amanako, Bula Kaarp, Mireille Mbombo Mpiana, Odile Mukonkole, Thaman Pika, Dieudonné Musa, Zing Kwanza, Kamanda Espé, Pitshou Mungul et les autres qui nous ont été utiles dans les moments les plus difficiles de notre vie estudiantine par leurs conseils et soutiens matériels. Qu'ils trouvent ici la marque de notre profonde affection.

    A nos amis et amies avec qui nous avons partagé la joie et les peines de la vie, nous disons notre profonde gratitude : Gauthier Kahungu, Mbuta rené Temene, Franck Ngiama, Mado Ngalula, Zhe Muangu, Pitshou Abongi, Justine Ngalula, Moïse Mushongo, Chouchou Kifunga, Massaro Mutelesi, JD Ngunza, Djo Kas Kasiama, Espe Mukundi Kabasele.

    Que tous ceux qui ne sont pas cités dans ce travail, ne puissent pas nous en tenir rigueur , car cela n'exprime aucunement une ingratitude, au seuil d'un travail si limité.

    Eder Kitapandi Luzau

    INTRODUCTION GENERALE

    1. Etat de la question 

    Tout chercheur hérite d'une littérature de ses prédécesseurs dans son domaine. Il en fait lecture pour situer l'objet de sa recherche par rapport au niveau du débat. Cette revue critique de la littérature existante appelée l'état de la question, aide le chercheur à se démarquer en montrant son originalité.

    Nous conformant à cette exigence de la recherche scientifique, nous revisitons un ensemble des travaux qui ont des accointances avec notre étude.

    Nyamoblema dans son travail de fin de cycle en sciences politiques s'est préoccupé de savoir si la lutte armée menée par l'Alliance des Forces Démocratiques pour la Libération du Congo (AFDL), a contribué à accélérer ou à ralentir le processus démocratique en RDC.1(*)

    Pour cet auteur, la lutte menée par l'AFDL a ralentie le processus démocratique. Il en veut pour preuve la remise en cause des acquis de la CNS, la suspension des activités des partis politiques et la traque des opposants politiques.

    Préoccupé par la même question, celle de savoir si l'AFDL a effectivement mis une croix sur le processus démocratique au Congo, Lumpungu Bakadi pense que l'AFDL avait plutôt accéléré ce processus, car elle avait publié et commencé à exécuter un calendrier politique reprenant toutes les étapes à franchir pour l'instauration d'une véritable démocratie dans notre pays ; avec quelques erreurs certes.2(*)

    Mais, en voulant justifier l'action politique exclusive de l'AFDL comme moyen de lutte contre les ingérences étrangères et particulièrement contre l'impérialisme occidental, l'auteur semble ignorer que l'AFDL, elle-même, devait son succès au soutien massif et déterminant de certaines puissances occidentales en complicité avec quelques pays africains notamment le Rwanda, l'Ouganda, le Burundi, l'Angola, la Zambie et le Zimbabwe.

    Donc, l'AFDL a été aussi le fruit de ces ingérences étrangères et de cet impérialisme occidental qu'elle prétend vouloir remettre en question. En outre, l'option militaire pour la conquête du pouvoir, l'auto proclamation de l'AFDL comme la seule et l'unique autorité de transition et la suspension de toutes les activités politiques au pays pour une durée de deux ans par l'AFDL, avaient mis en péril le processus démocratique en gestation depuis le 24 avril 1990.

    Ali Kikana M. dans son étude sur les gouvernements de transitions sous l'AFDL3(*), stigmatise la déviance de l'AFDL face à sa mission d'instaurer un Etat démocratique. Selon cet auteur, ce déviationnisme est la cause fondamentale de l'échec de tous les gouvernements AFDL et de la guerre qui a sévi à l'Est du pays d'août 1998 à 2003.

    Pour sa part, Mangaya Mutokenda4(*) a soutenu que le Président LD. Kabila avait instauré un régime de confusion des pouvoirs en RDC en concentrant tous les pouvoirs entre ses mains. Et pour rester le seul maître du jeu politique, comme le constate Kanyinda Tshamala5(*), le Président LD. Kabila, sous prétexte de préserver le pays de l'instabilité et de l'imbroglio politiques constatés depuis le 24 avril 1990, a exclu toutes les forces qui ne partageaient pas ses options politiques sur la gestion de la chose publique en suspendant les activités des partis politiques.

    Dans sa récente publication, Modeste Mutinga6(*) montre comment l'AFDL arrivée au pouvoir a offert au peuple congolais la démocrature en lieu et place de la démocratie. En effet, l'entrée à Kinshasa des troupes de l'AFDL a été vécue par la très grande majorité des congolais de Kinshasa comme un grand jour pour sa libération d'un régime vermoulu qui a déçu les espoirs placés en lui. Cette joie de la liberté retrouvée a été de très courte durée. Les « libérateurs» se sont très rapidement illustrés par des méthodes totalitaires et des exactions qui rappelaient l'époque coloniale léopoldienne : coups de fouet publics par-ci, bastonnade pour un oui ou un non par-là, occupation illégale de propriétés privées sous divers prétextes. Moins d'un an après sa prise de pouvoir, AFDL n'avaient plus la côte d'amour dans les coeurs des Kinois épris de liberté. Devant cette nouvelle dictature, certains parmi eux en étaient même venus à regretter le président Mobutu.

    Contrairement à ces études, nous nous proposons, à travers notre travail, d'analyser les fortunes et les misères du régimes AFDL qui s'est assigné le rôle historique d'affranchir le Congo de la tutelle impérialiste aux lendemains de sa victoire militaire sur le régime Mobutu considéré comme allié local de l'impérialisme. Aussi, de démontrer que contrairement à son engagement exprimé lors de sa prise des fonctions présidentielles de continuer et de parachever l'oeuvre politique de son prédécesseur assassiné, Joseph Kabila a bifurqué vers l'impérialisme occidental combattu par le régime AFDL dont il est l'émanation. Il s'agit, en fait, pour sortir du discours militant (impérialisme, révolution, anti-impérialisme, lutte de libération nationale) d'examiner comment ces deux figures de la « révolution du 17 mai » (LD Kabila et J. Kabila) ont négocié les défis de la mondialisation en RDC. Tant il est vrai que ce processus de mondialisation bouscule frontière et souveraineté et se réalise au seul profit des Etats puissants au détriment des nations faibles, telle la RDC.

    2. Problématique

    L'émancipation des Etats dominés de la tutelle des puissances euro-américaines a été, depuis de lustre, au centre de préoccupation des scientifiques, des politiques et des agents de développement. Elle a forgé tout un courant des pensées, mieux toute une tradition en sociologie dénommée « sociologie de l'impérialisme.» « Celle-ci se réalise comme un courant théorique de la sociologie du développement qui s'attache à étudier la dialectique de l'impérialisme et les mouvements nationaux. Elle se préoccupe fondamentalement de l'élaboration des réflexions critiques sur la vie sociale dans les ensembles économico - politiques et idéologiques de domination et d'exploitation des peuples en liaison avec la formation historique concrète de ces ensembles.»7(*)

    En clair, la sociologie de l'impérialisme analyse les mécanismes de domination et d'exploitation mis en place par le capitalisme à l'échelle mondiale. Par ces mécanismes, le capitalisme devenu impérialisme et se constituant en centre, subjugue, par les bourgeoisies locales interposées, les peuples entiers de la périphérie pour assurer sa propre survie.

    Ce courant de pensée a été marqué par les travaux des sociologues de renommée mondiale tels que Samir Amin, Abdel Malik, Peter Sweezy, André Gunder Frank, Jean Ziegler, et au niveau national par des sociologues tels que  Edouard Dominique Longandjo O., Matthieu Kalele ka Bila, Clément Mwabila Malela, Emile Bongeli Yeikelo a Yato, Kankwenda Mbaya, Mabika Kalanda, etc.

    Pour ces sociologues, l'impérialisme a soumis à sa logique les Etats du sud et impose dans ces Etats ses représentants comme le montre Jean Ziegler dans son ouvrage intitulé « Main basse sur l'Afrique ». La seule arme que les peuples dominés d'Afrique disposent pour se libérer de l'humiliation, de l'asservissement que leur inflige le dominateur impérialiste est la lutte de libération nationale.

    Ainsi donc, la thèse fondamentale de la sociologie de l'impérialisme est que pour se libérer, le peuple dominé n'a qu'une seule possibilité, la révolution.

    Cette thèse a trouvé une audience particulière dans les milieux politiques des nouvelles sociétés issues de la décolonisation avec notamment Nkwame Nkrumah, Sekou Toure et Patrice Emery Lumumba à ce qui concerne la RDC.

    Ce dernier constatant au lendemain de l'indépendance que la tutelle belge continuait à peser sur le nouveau Etat dont il était premier ministre, avança quatre idées maîtresses pour libérer le Congo de ladite tutelle :

    1. il n'y a pas de compromis possible avec l'impérialisme, la lutte entre le nationalisme authentique et l'impérialisme est une lutte à mort ;

    2. seule la mobilisation des masses populaires permet de constituer une force capable de l'emporter sur l'impérialisme ;

    3. la domination de l'impérialisme étant basée sur l'emploi des armes, la libération passe nécessairement par la victoire de la résistance armée ;

    4. la lutte contre l'impérialisme ne peut aboutir qu'à condition d'être liée à la lutte contre les collaborateurs de l'impérialisme.8(*)

    De par ses idées, P.E. Lumumba rêvait de construire un Congo dont la dynamique devait contrarier, par son indépendance et sa souveraineté, les intérêts du capitalisme mondial. La logique de la domination internationale a rendu impossible l'apparition d'un tel Etat en organisant l'assassinat de P.E. LUMUMBA dans les conditions aujourd'hui connues.

    Au lendemain de sa prise de pouvoir, après avoir démantelé le régime Mobutu considéré comme allié de l'impérialisme à la suite d'une « guerre de libération », le Président L.D. Kabila reprit pour son compte ce catéchisme révolutionnaire légué par P.E. Lumumba.

    Il dit en substance le 29/05/1997 à l'occasion de sa prestation de serment comme président de la nouvelle RDC, que la « troisième République », inaugurée par son avènement au pouvoir, était l'anti-thèse de la deuxième République. Cela signifie qu'un changement profond devait se faire. Il déclarait également que le Congo ne pouvait recevoir aucun dictat fut-il de soit disantes puissances du monde ou de la communauté internationale.

    Pour joindre l'acte à la parole, M'zee L.D. Kabila avait entrepris, d'une part, de défaire toutes les forces sociopolitiques supposées être alliées locales de l'impérialisme afin que, selon lui, s'instaurasse la véritable démocratie et, d'autre part, de contrer la logique de la domination internationale pour que la RDC devienne véritablement un Etat souverain dans le concert des nations. C'est dans cette perspective que les partis politiques ont étaient suspendus, que les CPP ont été créés comme creuset de la démocratie directe et que les relations avec les partenaires bilatéraux et multilatéraux traditionnels de la RDC (France, Belgique, USA, FMI, BM) ont été dénoncées et revisitées.

    Suite à cette prise de position politique, constate Colette Braeckmann, « les puissances qui avaient porté à bout de bras la révolution de L.D. Kabila depuis les montagnes du Kivu jusqu' à Kinshasa n'ont pas tardé à se rendre compte qu'elles avaient misé sur un mauvais cheval.»9(*) Un tel  pouvoir aussi peu orthodoxe que celui de LD.Kabila, poursuit Colette Braeckmann, ne pouvait que susciter la méfiance des occidentaux. Les pays voisins, quant à eux, constatent rapidement que le nouveau maître du Congo n'est pas un allié docile qui pouvait garantir leurs intérêts. Profitant du fait que le nouveau régime n'a pas encore eu le temps de créer une armée nationale, ils décident de revoir la copie. »10(*)

    C'est pourquoi, il n'a suffit qu'une année et deux mois au régime de LD.Kabila pour déboucher sur un nouveau conflit militaire qui a occasionné l'occupation des territoires de l'Est par des forces armées rwandaises, ougandaises et burundaises et plusieurs mouvements rebelles congolais.

    Devenu l'homme à battre, L.D. Kabila fait l'objet d'enquêtes sur les violations massives des droits de l'homme perpétrées par ses troupes pendant la campagne militaire menée contre le Président Mobutu. Le président LD. Kabila est désormais un homme seul et il sera assassiné le 16 janvier 2001.

    A son arrivée aux affaires de l'Etat, le président Joseph Kabila, son fils et son successeur, avait pris l'engagement de poursuivre et de parachever l'oeuvre « salvatrice » de son père. Mais ses actions politiques ont suffisamment montré qu'il a pris une distance vis-à-vis de la politique de son prédécesseur. En effet, il a réchauffé les relations difficiles que LD Kabila avait avec la communauté internationale et petit à petit, il s'est débarrassé des anciens collaborateurs de son père et a sabordé les « acquis » de la révolution du 17 mai.

    Ce sont ces contradictions qui s'observent entre ces deux figures du mouvement politico-militaire AFDL qui ont attiré notre attention.

    De tout ce qui précède, trois questions principales constituent l'essentiel de notre étude à savoir :

    - le président L.D. Kabila et son régime « révolutionnaire » du 17 mai avaient-ils réussi à libérer le Congo de la tutelle impérialiste ?

    - pourquoi Joseph Kabila n'a pas poursuivi le schéma « révolutionnaire » de son père ?

    - s'agit-il d'une stratégie pour la survie du régime ou d'un réalisme politique à cette période de mondialisation ou encore  d'une reddition mettant fin aux illusions d'un régime qui s'est voulu révolutionnaire?

    3. Hypothèses de travail

    Au regard de la problématique, les hypothèses suivantes semblent mieux se prêter à sa saisie. Nous pensons que le Président L.D. Kabila et le régime AFDL, en dépit de leur détermination, n'auraient pas réussi à libérer le Congo de l'impérialisme. L.D. Kabila et l'AFDL auraient été désillusionnés par le contexte de la mondialisation qui ne se prête pas à l'autarcie dans laquelle ils ont voulu enfermer la R.D.Congo. Aussi, l'anachronisme des orientations politico-idéologiques de L.D. Kabila se portait en faux aux aspirations démocratiques du peuple congolais telles que formulées par la Conférence Nationale Souveraine. Néanmoins, sa philosophie d' « autoprise en charge » est une valeur cardinale pour l'émancipation du Congo.

    Par ailleurs, nous pensons que le président Joseph Kabila n'a pas poursuivi l'oeuvre de son prédécesseur parce qu'il serait soumis aux pressions de la guerre et de la communauté internationale ; il voudrait aussi s'affirmer en tant que nouveau leader avec sa propre vision sur le Congo et, probablement, il ne s'estimerait pas gestionnaire de l'encombrante idéologie de LD Kabila.

    Donc, le président Joseph Kabila n'aurait pas eu de choix pour assurer sa survie politique. Dans le monde interconnecté et interdépendant d'aujourd'hui, il serait suicidaire de se replier sur soi-même alors qu'on n'a pas les moyens de sa politique comme l'avait fait son père.

    4. Choix et intérêt du sujet

    Ce travail porte un double intérêt à savoir : l'intérêt scientifique et l'intérêt pratique.

    Du point de vue scientifique, la présente étude est un essai de validation, par la confrontation aux faits de l'histoire récente de la R.D. Congo, de la théorie de la dépendance ou la sociologie de l'impérialisme en vue d'en dégager les atouts et les limites dans le contexte actuel de mondialisation.

    Sur le plan pratique ou politique, cette étude esquisse quelques réflexions pour l'édification au Congo d'un Etat souverain dans le contexte de la mondialisation. Dans cette perspective, elle s'inscrit dans le prolongement des travaux consacrés à la recherche des pistes de solutions aux différentes crises que traverse notre pays. Comme le font remarquer Arsène Mwaka, Colby Ngoy et Jean Pierre Mpiana, la résolution de la crise congolaise passe par la recherche d'un consensus national minimum dégagé du dialogue entre congolais et d'un autre consensus négocié avec les multinationales et les maîtres du monde pour bâtir la paix, la démocratie et le développement.11(*)

    5. Démarche méthodologique

    Tout travail scientifique doit suivre une démarche méthodologique ; en effet, il n' y a pas d'observation de la réalité sociale sans un minimum des théories au départ. On ne regarde pas ce qui se passe dans la société sans avoir quelques idées préconçues ou quelques hypothèses de bon sens issus d'autres recherches sociologiques.12(*)

    5.1. Méthode de recherche

    Comme totalité en mouvement, les régimes politiques renferment en leur sein des aspects contradictoires à l'origine de leur développement ou de leur déclin. Telles les contradictions du régime issu de la « révolution » du 17 mai 1997 aussi bien sous le règne de M'zee L.D. Kabila que sous celui de Joseph Kabila avant le dialogue intercongolais. L'analyse de ces contradictions suggère le recours à la méthode dialectique qui nous paraît la mieux adaptée.

    Selon Loubet Del BAYLE. J.C, la méthode dialectique « est d'abord associée au concept de totalité » en niant l'isolement entre les ensembles et leurs parties » et en soulignant que la réalité sociale est faite de l'ensemble des interactions entre ses différents éléments. Elle tend en suite à privilégier l'analyse des contradictions au sein de cette réalité en mettant en relief l'apparente unité du réel, les tensions, les oppositions, les conflits, les luttes des contraires et les contradictions13(*). Ce principe dialectique a été coulé sous forme de 4 lois.

    Les phénomènes ou les faits qui constituent la réalité sociale sont en connexion et agissent les uns sur les autres et ne peuvent être étudiées de manière isolée, mais comme un processus en chaîne. Il s'agit là de la première loi de la dialectique. Partant, nous considérons que les péripéties de L.D.Kabila et de son régime « révolutionnaire » ne peuvent être appréhendées sociologiquement que si elles sont inscrites dans les contradictions aussi bien internes qu'externes dans lesquelles ce régime a fonctionné.

    En suite, vient la loi de la contradiction qui soutient que les faits de la nature y compris les faits sociaux, évoluent par contradiction. En effet, les phénomènes naturels et sociaux se développent sous le poids de leurs propres contradictions. En rapport avec cette deuxième loi, nous mettons en lumière les contradictions qui ont caractérisé le régime de LD Kabila. En effet, au lieu d'instaurer la démocratie au nom de laquelle avait menée la lutte armée contre le régime Mobutu, le Président LD Kabila avait plutôt mis en place un pouvoir autocratique. Aussi, en lieu et place de rompre avec les puissances occidentales (impérialistes) comme l'avait préconisé L.D. Kabila, Joseph Kabila qui avait pourtant prétendu poursuivre et parachever l' « oeuvre salvatrice » de son père lors de sa prise de pouvoir, a plutôt mis son règne sous le signe de « consolidation » des liens avec lesdites puissances.

    La troisième loi celle du changement dialectique ou de la négation de la négation, elle prône le changement comme principe première de tout ce qui existe. Cela veut dire qu'il n'y a rien dans cet univers qui soit immuable et absolu. Elle souligne le fait que toute société recherche toujours à dépasser les situations présentes par des nouvelles. Ce n'est pas la destruction totale des aspects négatifs et la conservation des côtés positifs. Cette loi s'illustre dans ce travail par le changement d'optique opéré par le Président Joseph Kabila en vue d'assurer sa survie politique en abandonnant les options politico-idéologiques de son défunt père L.D. Kabila.

    La loi du changement qualitatif, postule que « tant dans la nature que dans la société, d'une manière général et dans chaque cas concret, les changements qualitatifs ne peuvent se produire qu'à travers les changements quantitatifs par addition ou soustraction.» Le changement de perspective opéré par le Président Joseph Kabila a eu des répercussions sur le « régime du 17 mai. » L'action menée par le président Joseph Kabila depuis sa prise de pouvoir a vidé le régime du 17 mai de sa substance révolutionnaire dont il se targuait.

    5.2. Techniques de recherche

    La méthode seule ne suffit pas pour réaliser un travail scientifique. Elle doit mobiliser des techniques de collecte de données qui seront soumises à son crible. Les techniques se définissent alors comme des moyens au service de méthode afin de faciliter la récolte et le traitement des donnes.

    Ainsi pour élaborer ce travail, nous avons fait recours à la technique documentaire étant donné que nous ne sommes pas le premier à traiter ce sujet. Nous avons consulté divers documents que nous avons soumis à une analyse critique.

    Nous avons également recouru à la technique d'entretien grâce à laquelle nous avons eu des discussions avec quelques acteurs et analystes politiques.

    6. Délimitation du sujet

    Notons que tout chercheur doit savoir circonscrire son sujet aussi bien dans le temps que dans l'espace. Ce faisant, dans le temps, cette étude couvre la période allant du 17 mai 1997 au 30 juin 2003. Cette période est celle au cours de laquelle les deux Kabila ont exercé le pouvoir en tant que leaders du régime issu de la « révolution » du 17 mai. Dans l'espace, nous limitons notre étude à la République Démocratique du Congo, Etat dans lequel les deux présidents ont exercé leur pouvoir.

    7. Difficultés rencontrées

    Aucun travail scientifique ne peut se réaliser sans difficultés, notre étude ne fait pas exception. Ainsi, tout au long de notre recherche nous avons relevé les difficultés ci-après :

    - nos enquêtés affichaient une certaine méfiance au regard de notre sujet d'étude ;

    - sur le plan financier, nos enquêtes nous ont exigé des moyens financiers énormes pour obtenir les informations utiles à la réalisation de ce travail.

    8. Subdivision du travail

    Hormis l'introduction et la conclusion, notre travail s'articule autour de trois chapitres à savoir :

    -le premier porte sur les mécanismes de domination et d'exploitation impérialistes en Afrique et en RDC ;

    -le deuxième, quant à lui, étudie le régime politique de LD. Kabila ;

    -le troisième chapitre porte sur la succession de Joseph Kabila au pouvoir et sa rupture avec les options politico-idéologiques de son prédécesseur.

    CHAPITRE I :

    LES MECANISMES DE DOMINATION ET D'EXPLOITATION

    IMPERIALISTES EN AFRIQUE ET EN RDC

    Introduction

    Dans ce chapitre, nous allons commencer par décrire les mécanismes de domination et d'exploitation capitalistes ou impérialistes. Nous montrerons par la suite comment ils se produisent au niveau de la RDC.

    Nous devons avant tout préciser le sens que nous donnons aux concepts domination et exploitation. Nous utilisons ces deux concepts dans le même sens que Matthieu Kalele ka Bila. D'après cet auteur, la domination signifie que ce sont les pays sous développés qui dans leurs propres intérêts orientent et dirigent l'activité économique dans les pays sous développés. Par exploitation, il faut entendre que ce qui est ainsi produit dans les pays sous développés, sert à satisfaire plutôt les besoins des habitants de ces derniers pays que ceux de premiers. L'auteur montre que les habitants des pays sous développés sont amenés à produire pour le compte des habitants des pays développés, ceux-ci mettent sur pied un appareil politique qui les y contraint.14(*)

    A la suite de Charles Bettelheim, M. Kalele ka Bila note que les concepts domination et exploitation économiques ont pour corollaire une domination politique et culturelle. Cette façon de concevoir le conduit à définir les pays sous développés comme étant ceux qui subissent de la part des pays développés, une domination et une exploitation économique engendrant une domination politico - culturelle.15(*) D'une manière générale les pays sous développés sont des pays exploités et dominés économiquement, politiquement et culturellement.

    Section 1. Nature du néo-colonialisme

    « Le néo-colonialisme d'aujourd'hui représente l'impérialisme dans sa phase finale, peut-être la plus dangereuse [...] Une fois qu'un territoire est devenu indépendant, il n'est plus possible, comme cela a été le cas au XIXème siècle, de revenir au stade précédent. On peut encore trouver des colonies où il est toujours en vigueur, mais il ne s'en créera plus de nouvelles. A la place du colonialisme. Nous avons aujourd'hui le néo-colonialisme.»16(*)

    L'essence du néo - colonialisme comme le démontre Nkwame NKrumah, c'est que l'Etat qui y est assujetti est théoriquement indépendant, possède tous les insignes de la souveraineté sur le plan international. Mais en réalité, son économie, et par conséquent sa politique sont manipulées de l'extérieur.

    Cette manipulation peut revêtir des aspects divers. Par exemple, dans un cas extrême, les troupes de la puissance impériale peuvent être stationnées sur le territoire de l'Etat néo-colonial et contrôler le gouvernement. C'est le cas en 1960 de la présence de l'armée belge au Katanga après la proclamation de l'indépendance du Congo ou des Forces de l'Union Européenne (EUFOR) stationnées à Kinshasa pour contenir toute velléité insurrectionnelle pouvant retarder le processus électoral en RDC enclenché en décembre 2006 avec l'organisation du référendum constitutionnel. A certains moments, les forces armées des Etats-Patrons sont invitées par les « appareils de contraintes » dans les Etats dominés pour assurer leur survie face aux forces de subversion. Au Zaïre (la RDC actuelle), le président Mobutu avait sollicité l'intervention de l'armée française pour contrer l'avancée des ex gendarmes katangais lors de la guerre de quatre-vingts jours déclenchée le 8 mars 1977. En 1986, le gouvernement tchadien avait invité l'armée française pour le secourir face à l'agression libyenne.

    Il peut s'agir aussi de la mise en place des gouvernements valets de l'impérialisme. Ces « appareils de contrainte » d'un type nouveau sont administrés par les mercenaires, hommes et femmes formés, dans les centres du capital financier hégémonique. Ces mercenaires accèdent au pouvoir par des coups d'Etat organisés, financés par les sociétés multinationales ou de services étatiques. Ce sont des appareils dont la principale, sinon l'unique fonction est des garantir la sécurité nationale du travail de l'homme, des sociétés multinationales et le capital financier du centre. Ils gouvernent par l'extermination physique, par l'assassinat, la torture et la disparition.17(*) Le régime Mobutu a pleinement joué ce rôle sous la deuxième République. Il a été mis en place par les américains, les français et les belges afin de garantir leurs intérêts sur le sol congolais. Actuellement, ces « appareils de contrainte » se reproduisent à travers les élections truquées, financées et soutenues par les Etats puissants. C'est le cas au Togo avec l'élection truquée du Président Faure Gnassingbé Eyadema, au Gabon où le président Omar El Hadji Bongo se fait élire et réélire en violation de la constitution gabonaise et au Congo Brazzaville où le président Sassou N'gouesso a été porté au pouvoir par le biais des élections trop peu démocratiques et transparentes. Mais tous ont bénéficié du soutien et de la reconnaissance de leur ancienne métropole, la France.

    Cependant, le plus souvent, le contrôle néo-colonialiste est exercé au travers de l'économie ou des moyens monétaires. L'Etat néo-colonial peut être forcé d'acheter des produits manufacturés ou de vendre ses matières premières au pouvoir impérialiste à l'exclusion de tout autre produit d'autre provenance. En ce qui concerne la RDC, cette situation se manifeste par l'obligation faite jadis à la Gécamines de vendre son cuivre exclusivement à la métallurgie Hoboken Overpelt de Belgique.

    Le contrôle de la politique gouvernementale peut être assuré en versant à l'Etat colonial des fonds destinés à sa gestion, ceci par le truchement de fonctionnaires bien placés à qui l'on peut dicter une politique, par le contrôle monétaire sur le commerce avec l'étranger et l'imposition du système bancaire contrôlé par le pouvoir impérialiste. Nous en voudrons comme exemple le financement des élections de 2006 par la Communauté internationale qui a en dicté l'issue.

    Section 2. Les mécanismes de domination impérialiste

    Comme le fait remarquer Bertrand Badie, ces mécanismes sont mieux perceptibles à travers les relations entre les Etats, patrons et les Etats- clients ou dominés, ainsi que dans les captations de la souveraineté de ces derniers.18(*)

    La dépendance suppose un échange des faveurs : l'Etat - patrons alloue à l'Etat - client des biens indispensables à sa survie. Ce dernier apporte les faveurs les plus diverses notamment : l'usage de son territoire, l'usage de son pouvoir symbolique sur la scène internationale ainsi que le mimétisme institutionnel.

    1. L'usage du territoire

    Il s'agit pour l'Etat-client :

    - de faciliter principalement le pillage des matières précieuses diverses et variées dont regorge son sous-sol ;

    - d'assouvir les visées géopolitiques de l'Etat patron, octroi des bases militaires, faciliter la traversée du territoire de l'Etat client, servir de base arrière pour la sécurisation ou l'insécurisation des autres Etats - poubelles qui conduit le client à rétribuer son patron en lui laissant la libre disposition de son sol ou de son espace maritime pour y stocker les déchets de la société industrielle. Nous nous rappellerons de la société OTRAG (Orbital Transport und Racketen-Aktiengesllschaft dont le siège est basé à Stuttgard en Allemagne), qui opérait dans le Nord Katanga et dont l'activité principale était d'enfouir dans le sol congolais les déchets toxiques qu'elle produisait à partir de l'Allemagne.19(*) Nous citerons également la situation qui a défrayé la chronique dans le dernier trimestre de l'année 2006 en Côte d'Ivoire sur les déchets toxiques. 580 tonnes de déchets toxiques déversés sur une douzaine de sites d'Abidjan et ses environs, ont entraîné 08 morts officiellement connus avec plus de 56000 personnes intoxiquées de ces émanations à l'odeur d'oeuf pourri qui prend à la gorge, provoque irritations cutanées, malaises, diarrhées, maux de tête, vomissements et saignement de nez.

    2. L'usage du pouvoir symbolique de l'Etat client sur la scène internationale

    Dans ce cas précis, il s'agit pour l'Etat-client d'aliéner sa souveraineté en faveur de l'Etat patron lors des assises internationales. La belle illustration concerne le vote des pays d'Afrique francophone au côté de la France dans les institutions internationales.

    Le cas le plus frappant est leur refus d'approuver les résolutions présentées devant l'assemblée générale des nations unies, en 1986 et 1987, condamnant la politique française en Nouvelle Calédonie. Il en est de même du soutien apporté à la France par les Etats francophones de l'Afrique au Conseil de Sécurité de l'ONU qui s'opposait à l'envoi par cette dernière des troupes en Irak.

    3. Le mimétisme institutionnel

    L'Etat - client se voit obligé d'imiter l'Etat - patron sur tous les plans : financier, économiques, militaire, technologique, politique.

    En termes de mimétisme institutionnel, l'Etat-client est obligé de conformer ses institutions politiques à celle de l'Etat-patron : les Etats africains progressistes aux partis uniques se sont conformés au modèle des pays de l'Est alors que récemment les patrons occidentaux ont invité leurs Etats clients à se conformer à leur propre histoire de démocratisation (conditionnalité politique). En 1989, lors du sommet de la Baule, la France avait conditionné l'octroi de son aide aux Etats africains par la démocratisation de leurs institutions politiques. Cette démocratisation piégée, pour singer la formule de Ngbanda, a néanmoins fait échos des aspirations à la démocratie déjà présentes au sein des forces sociopolitiques internes aux Etats africains.

    En définitive, ces rapports inégalitaires mettent l'Etat-patron dans l'obligation morale de veiller à la survie de l'Etat - client alors que le dernier est face à une inconditionnelle obligation de respecter ses engagements avec le premier.

    Le fait pour l'Etat-client de changer l'Etat patron lui crée des ennuis car il peut occasionner l'asphyxie interne et la mise au ban de la communauté internationale. Le cas de LD Kabila qui s'est attiré le courroux de la France en boycottant le sommet de la francophonie et qui manifestait l'intention de coopérer désormais avec les pays asiatiques.

    Au de là des obligations, les deux Etats ont des droits. Si les droits de l'Etat -patron ont été largement décrits ci-haut, il reste à préciser ceux de l'Etat-client. En effet :

    - au plan diplomatique : l'Etat-patron peut lui obtenir des avantages d'un autre Etat-patron ou d'un de ses Etats-clients.

    - au plan socio-économique : l'Etat-client bénéficie du soutien économico-financier de son patron ;

    - au plan politique : l'Etat-patron veille à ce que l'Etat-client soit protégé face à tout ce qui pourrait menacer les acteurs politiques valets ;

    - au plan financier, l'instrumentalisation des institutions de Bretton Woods en sa faveur ;

    - au plan militaire : l'Etat-patron renforce les dispositifs militaires de l'Etat- client ;

    - au plan technologique : le transfert technologique en faveur de l'Etat- client.

    Comme on peut s'en rendre compte, ce ne sont pas des facteurs mais des mécanismes d'insertion dans la logique de la domination impérialiste.

    Section 3. Les captations de souveraineté

    Les captations de souveraineté se font dans les trois secteurs essentiels d'accomplissement de la souveraineté : diplomatique, économique et politique.

    Les lignes qui suivent permettront de faire voir comment la République Démocratique du Congo a une souveraineté de façade que le nouvel ordre institutionnel tente de rendre effective.

    1. Sur le plan diplomatique

    Elle remonte à la période de signature des traités inégaux et aux capitulations qui visaient d'empêcher l'Etat dominé d'exprimer sa souveraineté sur la scène internationale.

    Le traité de 1960 entre la Belgique et la République Démocratique du Congo est le cas le plus flagrant. L'ouvrage de Pierre Joye et Rosine Lewin sur les trusts au Congo, présente une image très nette des événements qui ont précédé et suivi l'indépendance. D'après les auteurs de cet ouvrage, l'Etat Indépendant du Congo, sous Léopold II possédait une part importante des sociétés initiales, ainsi que des « compagnies à charte » créées à cette époque et des entreprises privées. Après l'indépendance 1960, les trusts ont accéléré leurs manoeuvres pour empêcher les congolais de prendre possession de leur patrimoine.20(*)

    Actuellement, la captation de cette fonction ne se fait plus par la signature des traités inégaux ou par les capitulations. Elle s'opère au travers des mécanismes plus informels qui ménagent à l'Etat dominé une souveraineté de façade. Pour donner l'impression de ne pas s'ingérer dans les affaires intérieures des Etats dominés, les Etats dominants passent dorénavant par leurs Etats gendarmes et par leurs valets nationaux.

    La captation de la fonction diplomatique a pour conséquence de faire primer le conformisme que la remise en cause. Ce qui permet de perpétuer un ordre international décrié, mais qu'aucun Etat ne peut individuellement dénoncer sans que cela ne lui coûte cher.

    2. Sur le plan économique

    Elle surmonte et contourne les indépendances formelles des Etats dominés. Ces derniers sont invités par les Etats dominants à aménager leur environnement socio - économique conformément aux règles de l'économie de marché et celles du néo - libéralisme, malgré les faits que ces deux modèles économiques ont une histoire et un fondement culturel particulier et que la plupart des sociétés extra - occidentales sont caractérisées par un réseau complexe d'économie informelle et communautaire difficilement réductibles à la logique du marché.

    La tutelle économique des Etats dominés est ainsi confiée à la Banque mondiale et au Fonds Monétaire International qui ont imposé des programmes d'ajustement structurel comme conditionnalité économique.

    L'octroi de ce qui est faussement appelé aide est conditionné par l'obligation faite à l'Etat dominé de faire preuve d'un conformisme économico-financier au lieu de toute innovation qui pourrait asphyxier le capitalisme mondial.

    Ainsi le bilatéralisme et le multilatéralisme (ce dernier offre l'alibi de l'anonymat), accroissent les possibilités de captation de la fonction économique des Etats dominés. Les politiques de restructuration et celles d'ajustement structurel ont pour effet :

    - de maintenir la dépendance économique des pays du sud en les soumettant à des conditions inégales de traitement de la crise internationale ;

    - d'organiser un certain type de régulation du système économique international ;

    - de favoriser l'économie de marché comme le modèle unique de conception de l'économie. C'est dans ce cadre que Joseph Kabila, nouveau Président de la R.D.Congo, était appelé à promulguer un nouveau code minier et un nouveau code des investissements en remplacement de ceux laissés par LD Kabila.

    3. Sur le plan politique

    L'Etat-client se voit empêché de mettre en place des institutions politiques qui échappent au contrôle de l'Etat-patron. Celui-ci s'arroge le droit de mettre en place ou de déchoir un régime, de déterminer ses animateurs, de lui confier une mission précise. C'est donc de cette façon que se présente la logique de la domination impérialiste.

    Comme le note Bertrand Badie, « La logique de la domination internationale rend dysfonctionnelle l'apparition, à la périphérie d'un Etat dont la dynamique pourrait contrarier, par son indépendance et sa souveraineté, les intérêts du capitalisme mondial. »21(*)

    Conclusion partielle

    Nous avons passé en revue, à travers ce chapitre, les différents mécanismes par lesquels les puissances euro-américaines subjuguent les sociétés de la périphérie du système capitaliste, particulièrement les sociétés africaines. Sans se soumettre à merci ni capituler, nombre d'Etats, à travers leurs leaders, se sont battus pour s'émanciper de cette domination, de cette exploitation, de cette humiliation que leur imposent les Etats puissants. L'histoire retient des célébrités comme Nkwame Nkrumah, Patrice Emery Lumumba, Mahatma Gandhi, Fidel Catro, Che Guevara, Mao Tse Toung, Kim Il Sung, Anouar El Sadate, Etienne Tshisekedi wa Mulumba, etc.

    Dans son maquis et dans l'exercice du pouvoir, LD Kabila s'était investi de la mission de briser tous ces mécanismes qui font ployer la RDC sous l'exploitation et la domination capitalistes. Il rêvait ainsi bâtir au Congo un Etat véritablement « souverain », « démocratique » et « défenseur » des intérêts du peuple congolais. Cet Etat centré sur lui-même et fondé sur la philosophie d'autoprise en charge, devait produire la richesse à redistribuer équitablement à toutes les composantes de la société congolaise. Comment cette lutte devait-elle se mener dans le contexte actuel de mondialisation qui bouscule frontières et souverainetés ? Sans tenir compte de ce nouveau contexte, LD Kabila s'est engagé, comme aux années 60, dans une offensive contre les puissances du monde. Ces actions que nous qualifions d'illusions d'un régime révolutionnaire se sont avérées fatales pour lui. Il a laissé la RDC sans avoir réaliser ses principales ambitions.

    CHAPITRE II :

    LE REGIME DE L.D. KABILA

    Introduction

    Le but de ce chapitre est d'analyser ce qu'a été le régime politique de L.D. Kabila issu de la « révolution» du 17 mai 1997. En effet, le Président L.D. Kabila et son AFDL s'étaient donnés l'objectif de libérer le peuple congolais de la dictature mobutiste, de redémocratiser la société congolaise en redonnant le pouvoir au peuple et de reconstruire le Congo détruit par la gestion prédatrice des mobutistes qu'ils considéraient comme des laquais locaux de l'impérialisme occidental. La réalisation de ces objectifs a conduit L.D. Kabila à mener des actions aussi bien sur le plan politique, économique que diplomatique. Inspiré de l'idéologie maoïste, mais aussi du marxisme-leninisme, l'ensemble de ces actions ont mis L.D. Kabila en déphasage tant avec les forces socio-politiques internes qu'avec les intérêts des puissances régionales et internationales.

    Au vu de ces actions, certains Analystes, à l'instar de Colette Braeckmann, ont soutenu que « Kabila était prisonnier de lui - même de son idéologie forgée dans les années 1960, des réflexes de maquisard qui inspire une méfiance instinctive à l'égard de tout ce qu'il ignore ou ne contrôle pas. Prisonnier des zones d'ombre de son passé et des secrets de la guerre. Celui qui se prévaut d'avoir libéré son peuple doit aussi se libérer lui - même»22(*)

    C'est ainsi que tout au long de son court règne, son régime avait fait face aux mécontentements de la population et de la classe politique et à une résistance politique interne ; à des difficultés économiques découlant de l'embargo économique et financière lui imposé par la communauté internationale dont il a déçu les intérêts et à l'agression de ses anciens alliés (le Rwanda, le Burundi et l'Ouganda). La conséquence en sera un règne écourté et le démantèlement de son régime. Mais, reconnaissons que L.D.Kabila n'avait pas bénéficié de répit pour réaliser ses ambitions. Aurait-il mieux fait si le contexte tant national qu'international ne lui était pas hostile ?

    Dans la première section, nous ferons le point sur la « révolution  du 17 mai 1997 », dans la deuxième section nous examinerons la gestion de la République par le président LD Kabila.

    Section 1: LD. KABILA et la Révolution de 17 mai 19972323(*)

    1. Laurent Désiré Kabila et le maquis de Fizi- Baraka

    Il s'agit dans cette section de tracer un bref aperçu historique sur la vie politique de LD .Kabila, son parcours, ainsi que la manière dont il a organisé le maquis. 

    Laurent Désiré Kabila a été un des anciens de la guerre d'indépendance, une des vieilles connaissances de Patrice Emery Lumumba, de pierre Mulele, de Léonard Mitudidi, de Jean Ziegler, de Janson Sendwe, de Christophe Gbenye, de Gaston Soumialot et de Ernesto Che Guevara.

    Membre de la Balubakat, parti allié au MNC/Lumumba dirigé par Jason Sendwe, L.D.Kabila est en février 1962 Directeur de cabinet du Ministre de l'information dans le gouvernement provincial du Nord Katanga. En octobre de la même année, il est devenu Directeur de cabinet au Ministère de travaux publics, puis en novembre, il est coopté députe à l'Assemblée provinciale du Nord Katanga à Monono.

    Cofondateur du conseil national de libération, CNL en octobre 1963, il y a assumé plusieurs responsabilités. Après la dislocation du MNC-L, plusieurs tentatives de sa réunification vont se solder par un échec. C'est alors qu'il va se résoudre de créer, lors d'un congrès extraordinaire, en décembre 1967, le Parti de la Révolution Populaire (PRP) qui tiendra son maquis dans l'axe Fizi-Baraka au Sud-Kivu, jusqu'en 1986, année au cours de laquelle ce maquis a été dispersé.

    Ses nombreux voyages à l'étranger notamment en Yougoslavie, en chine, en France, en Tanzanie, en Ouganda, au Rwanda, au Soudan, au Burundi, au Kenya, etc., élargiront son champ d'action dans sa lutte contre l'impérialisme occidental. Il sera signalé dans le maquis soudanais du général John Garang, dans ceux qui ont conduit Yoweri Kaguta Museveni, et Paul Kagame au pouvoir, avant de déclenche la guerre de «libération» du Congo.

    2. Ses idées maîtresses

    A ce niveau, nous revenons sur ses reproches au gouvernement de Mobutu ainsi que sur la formulation de son idéologie et de son projet politique.

    1°. Ses reproches au gouvernement de Mobutu

    Lors d'un congrès politique tenu à Sungwe dans le territoire de Fizi du 9 au 13 Août 1968, ses reproches au gouvernement de Kinshasa ont été définis.

    LD. Kabila avait montrée à la population que le pouvoir appartient au peuple. Ainsi, seul le peuple a le droit de l'accorder à l'homme qu'il se choisit pour décider de sa destinée. Lorsque le peuple trouve que son élu ne répond plus à sa volonté et à ses intérêts, il a le pouvoir et le droit de le remplacer par quelqu'un d'autre qui répondra à ses intérêts.

    Il avait reproché au gouvernement de Mobutu d'être dictatorial, de ne pas émaner de la volonté du peuple et de ne pas répondre aux intérêts du peuple. C'est un gouvernement vassal. Même les trois principes primaires d'une démocratie y sont foulés aux pieds : l'élection du gouvernement du peuple, l'établissement d'un gouvernement du peuple, pour le peuple, c'est-à-dire pour l'intérêt du peuple. Le gouvernement de Mobutu était à la solde des américains et des belges qui l'ont mis en place et qui assurent sa survie. Il entretient l'exploitation du pays et du peuple sous toutes les formes possibles par les capitalistes.

    Il avait aussi souligné dans ses reproches l'absence de liberté politique, de liberté d'expression, de liberté de presse. Les prétendus commissaires du peuple dans ce régime ne transmettent jamais les voeux de la population. La classe politique au pouvoir vulgarisait et favorisait le tribalisme, en avantageant certaine tribus au détriment des autres dans l'exercice du pouvoir.

    2°. Son idéologie et son projet politique

    L'idéologie et le projet politique de LD. Kabila sont d'inspiration maoïste. Il se proposait de faire du Congo une société démocratique et socialiste. Le maoïsme, selon L.D. Kabila, repose sur trois principes :

    1. la connaissance des différents courants de pensée (matérialisme, idéalisme),

    2. la maîtrise d'une science qui conduit à l'autosuffisance (économie politique) ;

    3. La conviction que toutes les richesses (potentialités) agricoles industrielles et minérales appartiennent à l'Etat socialiste.24(*)

    Il préconisait faire du Congo un pays où toutes les richesses devraient être au profit de la population. Dans cet Etat démocratique, seul le peuple devait détenir le pouvoir de décider de la destinée du pays. Le Gouvernement démocratique et l'Etat socialiste auraient mission de garantir à la population l'égalité de tous, l'élimination de toute forme de discrimination, la justice pour tous, la répartition équitable des revenus, et l'élimination du chômage.

    Trois décennies plus tard, la lutte armée, menée cette fois-ci avec le soutien des grandes puissances et des pays des Grands Lacs africains, va porter LD Kabila au pouvoir, lui donnant ainsi l'opportunité de matérialiser ses idées longtemps caressées pour bâtir au coeur de l'Afrique un Etat du peuple, véritablement démocratique. Sa gestion de la chose publique s'est-elle rapprochée de cet idéal ? Nous pouvons noter que les idées de LD Kabila au maquis et sa gestion du pouvoir n'ont pas fait bon ménage. Il y a eu des contradictions et des écarts entre le dire et le faire. Nous y reviendrons plus loin.

    3. Création de l'AFDL

    Pour trouver des solutions à la crise politique qui a secoué la RDC au cours de la décennie 1990 ; et qui fut provoquée par la dictature de Mobutu contre laquelle aucune solution pacifique n'avait triomphé, certains compatriotes, vivants à l'intérieur comme extérieur et soutenus par les puissances étrangères et les pays de la région des Grands Lacs africains, prirent la décision de mener la lutte armée contre la dictature mobutienne.

    C'est ainsi que l'AFDL sera créée et regroupera en son sein les partis ci-après :

    1. le parti pour la révolution populaire (PRP) dont le chef était L.D. Kabila ;

    2. le conseil national de résistance (C.N.R) dont le leader était Ngandu Kisase ;

    3. le mouvement national pour la résistance et la démocratie du Masasu Nindanga ; enfin ;

    4. l'Alliance Démocratique du Peuple (ADP) avec comme leaders Déogracias Bugera.

    Ces partis avaient, à travers leurs leaders précités, créé en date du 18 octobre 1996 à Lemera dans le territoire d'Uvira dans la province du Sud-Kivu, un mouvement politico-militaire dénommé Alliance des Forces Démocratiques pour la Libération du Congo, en sigle AFDL.

    Cette Alliance avait pour objectifs, le renversement par la force de la dictature mobutiste, l'instauration de la démocratie par l'organisation des élections démocratiques et transparentes.

    Pour atteindre ses objectifs, l'AFDL avait, en octobre 1996, déclenché la guerre dite de libération avec l'appui des Rwanda, Burundi, Ouganda, Angola. Cette guerre qui a commencé au Sud-Kivu en 1996, s'étendra à d'autres provinces de la République. Petit à petit, les villes tombaient une à une sans résistance des forces armées zaïroises. La population qui en avait marre de la dictature prêtera mains fortes à l'AFDL.

    Le 17 mai 1997, les troupes de l'AFDL marchent sur Kinshasa qu'elles ont conquis presque sans combat. De Lubumbashi où il était, le président de l'AFDL LD. Kabila s'autoproclamera président de la République Démocratique du Congo.

    Arrivé au pouvoir, LD Kabila est resté fidèle à ses options politiques développées depuis les années 60 et réaffirmées dans le maquis de Fizi. Ainsi, il disait lors de son discours de prestation de serment comme président de la République, la victoire de l'AFDL et son accession au pouvoir marquent la fin d'un régime corrompu, autocratique, de la régression économique et annonçait la naissance d'une nouvelle société. Le Président LD. Kabila a dénoncé les méfaits du régime déchu, un régime qui n'était qu'un instrument de domination, d'exploitation du peuple et un protecteur des étrangers dont la mission consistait à piller les richesses du pays et assujettir la population. La 2ème république ayant échoué, le nouveau régime s'était fixé les objectifs de la démocratisation et de la reconstruction nationale. Et pour réaliser ces deux objectifs, L.D.Kabila se devait de se défaire de l'encombrante tutelle de la « Communauté internationale », mieux des grandes puissances.

    Section 2. LD. KABILA et la démocratisation de la R.D. CONGO

    En vue de mettre un terme au refus du président Mobutu d'ouvrir le pays à une démocratie véritable, L.D. Kabila prendra le pouvoir à la faveur d'une lutte armée, largement soutenue, appuyée par le peuple qui attendait de ce dernier des changements politiques conformes à sa nouvelle aspiration démocratique. Mais, il sied de noter que L.D. Kabila avait une conception maoïste ou socialiste de la démocratie différente de la démocratie représentative qu'il avait trouvé en cours et qu'il qualifiait de « démocratie bourgeoise ». Dans la perspective maoïste, il y a démocratie véritable lorsqu'on en vient à la suppression du pouvoir d'Etat et des partis politiques qui sont des instruments dont se sert la bourgeoisie pour opprimer le peuple. Et Mao Tse Toung précise que la véritable démocratie, qu'il qualifie de la dictature démocratique populaire, consiste à « exercer une dictature sur les valets de l`impérialisme, sans tolérer de leur part aucun propos ou acte contre le pouvoir établi. Tout propos ou acte de ce genre sera aussitôt réprimé et puni. C'est au sein du peuple que la démocratie est pratiquée, le peuple jouit de la liberté de parole, de réunion, d'association, etc. Le droit de vote n'appartient qu'au peuple, il n'est point accordé aux réactionnaires.25(*) Il est donc clair que pour M'Zee L.D. Kabila, inspiré par ce précepte, la « démocratie bourgeoise à l'occidental » qu'il avait trouvée en cours de consolidation devait céder la place à la démocratie populaire. Comme le fait remarquer Lobho lwa Djugu Djugu, « le nouveau président tenta d'organiser le pays à sa manière avec un décret-loi constitutionnel élaboré à la hâte et qui portait tous les germes des turpitudes. Du processus de démocratisation qu'il trouva sur place, il n'en fit qu'une vague allusion. De toute les façons, personne dans son entourage, ni les rwandais, ni les ougandais et moins encore les alliés banyamulenge, n'avaient besoin de poursuivre un processus qui les laisseraient au bord de la chaussée politique. »26(*)

    Ainsi, l'ensemble des textes qui ont régi l'exercice du pouvoir, les activités des partis politiques comme celles des associations montre bien la volonté du président L.D. Kabila de restructurer le champ politique congolais à l'aulne des principes maoïstes.

    Nous examinerons, pour étayer notre affirmation, le décret-loi constitutionnel 003, la loi sur les partis politiques, la loi sur les manifestations publiques et la loi sur les Asbl.

    1. Décret-loi n°003 du 27 mai 1997

    Sous le régime AFDL dirigé par M'zee LD Kabila, l'organisation et l'exercice du pouvoir sont consacrés par le décret-loi constitutionnel n°003 du 27 mai 1997. Ce texte instaurait une véritable autocratie.

    Le nouveau texte constitutionnel comprend quatre chapitres subdivisés en quinze articles qui semblent manquer, de toute évidence, toute cohérence entre eux. A la place d'une analyse formelle conséquente que nous ne saurons faire adéquatement à cause de la brièveté du texte, il est utile seulement d'analyser quelques dispositions en rapport avec la compétence et l'articulation des institutions de la République, les unes par rapport aux autres.

    Ce décret, bien qu'un texte provisoire, pour régir le pouvoir conformément à son article 1er la période transitoire jusqu'à l'adoption de la nouvelle constitution, se référait uniquement à la déclaration de prise du pouvoir par le Président de l'AFDL du 17 mai 1997.

    Politiquement, outre ce qui a été évoqué précédemment concernant le texte, les institutions de la République sont au nombre de trois : le président de la République, le gouvernement et les cours et tribunaux. Contrairement à la déclaration de prise de pouvoir par L.D. Kabila, l'AFDL n'apparaît pas dans le chapitre II, article 3 consacrés aux institutions comme l'autorité qui assume réellement le pouvoir d'Etat pendant la transition. Car si cela était vrai, c'est bien un organe collectif de l'AFDL qui aurait pu apparaître comme organe suprême détenteur du pouvoir d'Etat.

    L'article 3 ne fait aucune place à une institution législative, ce qui ouvre la voie à la confusion des pouvoirs au profit du Président de la République qui est le chef de l'Etat, représente la nation ; il exerce le pouvoir législatif par décrets-lois délibérés en conseil des ministres ; il est le chef de l'exécutif et commandant suprême de forces armées congolaises.

    Concernant le fonctionnement des institutions politiques, ce décret-loi constitutionnel était loin de rencontrer les préoccupations démocratiques notamment la séparation des pouvoirs entre l'exécutif, le législatif et le judiciaire. Cela apparaît dans  le rôle prépondérant du chef de l'Etat sur les autres institutions. Dans son article 8, il est stipulé que « le gouvernement conduit la politique de la nation, telle que définie par le président de la République ; il exécute les lois de la République et les décrets du Chef de l'Etat. Il dispose de l'administration et des forces armées ; il négocie les accords internationaux sous son autorité » ce qui dénote la tendance d'une certaine concentration du pouvoir entre les mains du Chef de l'Etat. Le gouvernement est réduit à simple organe d'exécution des décisions du président de la République. Ce que confirme l'article 10 du décret, qui stipule : « les ministres sont responsable de la gestion de leurs ministères devant le président de la République. » C'est qui est fréquent dans les régimes présidentiels.

    En outre, à son article 5, il a précisé que le chef de l'Etat exerce le pouvoir réglementaire par voie de décret, il a le droit de battre la monnaie et d'émettre de papier-monnaie en exécution de la loi. C'est lui qui nomme et révoque discrétionnairement les grands cadres de l'Etat et du secteur paraétatique.

    Les cours et tribunaux ont la mission de dire les droits. La magistrature par ailleurs, est indépendante dans l'exercice de cette mission. Ainsi, l'ensemble des cours et tribunaux forme le pouvoir judiciaire, et celui-ci est indépendant du pouvoir législatif et du pouvoir exécutif, donc du président de la République.

    C'est autant dire que le décret-loi constitutionnel 003 ne mentionne aucun mécanisme de contrôle légal, ni a priori, ni a posteriori. Ce manque préjudicie la meilleure gestion des affaires de l'Etat.

    Dans une telle situation comme il est difficile d'avoir totalement confiance en son entourage (sauf bien sur quelques exceptions), LD. Kabila n'a pas tardé à mettre de coté chaque fois qu'il trouvait nécessaire, certains membres de son gouvernement ainsi que des responsables militaires. Il aura retouché à plusieurs reprises son gouvernement et nommé à plusieurs reprises les chefs d'Etat major de l'armée sans compter d'autres services.

    A cet effet, Colette Braeckmann souligne que la « première année de pouvoir est erratique, difficile, la greffe ne parvient pas à s'implanter, car l'organisation manque des cadres, des moyens, de bases populaires ; elle se juxtapose aux partis existants, et bien rodés. En outre, soucieux de conquérir son autonomie, LD Kabila rompt avec les partenaire qui avaient cosigné avec lui l'acte de base de L'AFDL : Kisase Ngandu est mort, Anselme Masasu était arrêté, Bugera lui - même est peu à peu marginalisé et un an après la prise du pouvoir, il est écarté de la direction de L'AFDL au profit de Vincent Mutomb Tshibal, un neveu du président »27(*)

    La concentration du pouvoir entre les mains du président de la République a eu un impact majeur sur le paysage politique national. De l'espace libéral et pluraliste qu'il était, l'espace politique congolais était devenu monolithique et autoritaire.

    2. Suppression des activités des partis politiques

    L'on se souviendra que lors de sa prise du pouvoir, LD Kabila avait institué l'AFDL comme la seule autorité de transition. Dans un contexte marqué par un pluralisme intégral et où s'étaient déjà implantés des grands partis politiques (UDPS, PDSC, MPR, UDI, UFERI,...), l'AFDL devait ménager son espace pour asseoir son autorité. Sans ménagement, l'AFDL, après s'être frottée notamment à l'UDPS qui lui reprochait ses velléités dictatoriales, avait suspendu les activités des partis politiques (qui lui portaient certainement ombre) pour une durée de deux ans sur toute l'étendue de la République. L'obligation était ainsi faite à toutes les formations politiques de retirer de l'espace public leurs emblèmes, d'effacer leurs dénominations des murs de leurs sièges respectifs, de ne plus organiser les manifestations publiques ni de tenir des réunions politiques et d'exprimer des opinions en tant que partis politiques.

    Cette suspension des activités des partis politiques avait suscité des polémiques et des contradictions au sein de la classe politique congolaise qui s'était battue pour la levée de cette mesure.

    Le président LD. Kabila n'hésite pas de traquer les opposants non armées qui l'ont d'ailleurs soutenu. Les exemples sont légions :

    1. le 26 mai 1997, Etienne Tshisekedi wa Mulumba est arrêté, puis relâche, on lui reproche d'avoir tenu une conférence à l'université de Kinshasa, par la suite, il sera relégué dans son village natal (Mupompa dans le territoire de Kabeya Kamuanga, Province du Kasaï oriental).

    2. Arthur Zahidi Ngoma, Olenga Nkoy et le professeur Matthieu Kalele seront à leur tour arrêtés et condamnés à plusieurs années de prison.

    Mais sous la pression des événements, notamment la guerre et la nécessité de décrisper l'espace politique pour couper l'herbe sous le pied des « rebelles », LD Kabila prit quelques décrets-lois réorganisant les activités des partis politiques et des mouvements associatifs en RDC.

    01. Decret-loi n°194 du 09 janvier 1999 relatif aux partis politiques

    La liberté d'association et regroupement politique ou social est l'une des conditions majeures de la démocratie.

    Rappelons que le nouveau régime avait suspendu les activités des partis politiques, mais sans procéder à leur dissolution. Le décret-loi 194 du 09 janvier 1999 leur dénis implicitement toute existence juridique à la date de sa promulgation, puisqu'il conditionnait la création d'un parti politique à son agrément par le pouvoir. De plus, son application pouvait conduire à refuser cet agrément à nombre des formations politiques dont les activités ont été suspendues. Toutes celles qui, s'étant plus ou moins vigoureusement opposées à la prise du pouvoir par l'AFDL, pouvaient se voir reprocher une attitude « contraire aux intérêts de la nation » « (...) il est fait défense, stipule l'article 5, à tout parti ou regroupement politique de se doter des dénominations, sigle et autres signes distinctifs ayant appartenu à un parti, à une association ou à une organisation dont l'attitude ou l'action ont été contraires aux intérêts de la nation, aux principes et aux idéaux de l'émancipation intégrale du peuple congolais »28(*)

    Si la nécessité de conformer le fonctionnement des partis politiques aux dispositions de la nouvelle loi était avérée, il est évident que celle-ci limitait l'expression démocratique quant à leur constitution et à l'exercice de leurs activités. C'est pourquoi, ce décret-loi a été qualifié de liberticide par les partis d'opposition. Mais, il faut noter que quelques partis politiques proches au président LD Kabila ont été créés et ont fonctionné sous cette loi. C'est le cas de l'Union de la Gauche congolaise (UGC) de Banza Hangankolwa, du Mouvement pour la démocratie et le développement (MDD) de Kisombe Kia Kumwisi et de l'Union pour le renouveau du Congo (URC) de Ntumba Luaba. André Lubanza Mukendi fait remarquer que ces partis constituent moins une expression du pluralisme qu'un argument de faire valoir d'une législation contestée. L'UGC est créée par Monsieur Banza Hangankolwa qui est un cousin propre du président LD KABila ; il était même membre de la commission constitutionnelle et de la commission des réformes institutionnelles. Il en va de même du fondateur de l'URC, Ntumba Luaba. A propos de Kisombe Kia Kumwisi, président du MDD, c'est un ancien mobutiste, président fédéral (provincial) du MPR/ Kinshasa qui, de son retour d'exil, avait dit, répondant à la question d'un journaliste, qu'il était auparavant mobutiste et que maintenant est kabiliste. Ce qui montre que ces formations politiques étaient des partis-alibi pour conforter le décret-loi 194.29(*)

    02. Décret-loi du 29 janvier 1999 portant réglementation des manifestations et réunions publiques

    Ce texte soumet les manifestations et réunions publiques à un régime de déclaration préalable auprès des autorités politico-administratives compétentes, ou si elles sont « organisées sur le domaine public » à un régime d'autorisation préalable. Relevons la manière dont le législateur définit ce qu'il faut entendre par une « réunion ». Tous rassemblement d'au moins deux personnes et ne comportant aucun mouvement continu de déplacement d'un lieu à un autre.

     

    03. Décret-loi du 29 janvier 1999 portant réglementation des associations sans but lucratif et des établissements d'utilité publique.

    Nous allons nous limiter à quelques observations concernant le régime des associations sans but lucratif définit par ce texte. Le décret-loi distingue trois catégories ; les associations à caractère culturel social ou éducatif ; les organisations non gouvernementales de développement (ONG-D) : les associations des droits de l'homme entrent dans la première catégorie.

    Les associations concernées ne sont désormais autorisées à fonctionner que si elles bénéficient de la personnalité civile, ce qui exige une intervention du chef de l'Etat lui-même : « le président de la République, lit-on à l'article 3, peut accorder la personnalité par décret délibéré en conseil des ministres ».

    Les ONG de développement font l'objet de disposition particulière, visant à assurer qu'elles « participent à la conception et à la mise en oeuvre de la politique de développement dans leurs interventions aux orientations du gouvernement... ».

    Les mesures concernant les associations confessionnelles visent à contrecarrer le phénomène de prolifération des sectes religieuses. Il est difficile de ne pas juger excessif certain de garde fous introduits à cette fin. Le fondateur d'une association confessionnelle doit notamment : jouir de la nationalité congolaise, être âgé d'au moins quarante ans, posséder une licence ou un doctorat en théologie d'une université congolaise ou étrangère (dont l'équivalence dans ce dernier cas aura été établie), n'avoir jamais exercé dans une autre association confessionnelle les fonctions de pasteur ou de prêtre et n'en être pas sorti dissident, avoir au départ un capital de deux millions de francs congolais, soit environ 830.000 $ indexables sur compte de dépôt dans une des banque congolaises.

    Comme nous pouvons le constater, la loi sur le fonctionnement des asbl, traduit la volonté du pouvoir d'avoir un contrôle sur les activités des associations soupçonnées être en connivence avec les puissances étrangères.

    3. Dissolution de l'AFDL, création des CPP et FAP.

    1. De la nécessité de dissoudre l'AFDL

    Le déclenchement de la guerre et la nécessité de mobiliser les masses populaires laissaient déjà profiler la mutation que l'AFDL devait subir pour s'adapter au nouveau contexte socio-politique. « Ne pas le faire, ne pas se transformer, comme l'indiquait M'zee LD Kabila lui-même, c'est aller à contre-courant de l'histoire, (...), l'AFDL deviendra réactionnaire, elle va disparaître, (...). L'AFDL ce n'est pas la recherche de positionnement individuel, c'est une cause et celle-ci est que le peuple gouverne. La lutte est encore très âpre, on doit entreprendre sa propre transformation, sinon on est dépassé par les événements »30(*)

    Dans l'esprit de ses collaborateurs, nombreux d'entr'eux pensaient à la mutation de l'AFDL en un parti politique. Ainsi, en décembre 1998, le secrétaire général, Vincent Mutomb Tshibal, annonce que dans le cadre de la libéralisation des activités politiques, l'alliance va se transformer en un parti, tout en précisant que cela ne changera que la forme ; l'idéologie du mouvement restera inchangée et ses membres demeureront unis.31(*)

    En lieu et place d'un parti politique, M'zee pensait plutôt à un vaste mouvement pour mobiliser les masses populaires autour de lui en vue de contrer l'avancée des troupes rebelles et d'agression et les partis politiques qui devaient reprendre leurs activités dans les prochains jours. Dans cette perspective, le président LD Kabila annonce le 20 avril « la disparition de l'AFDL en tant qu'organisation politique qui était destinée à se transformer en un parti politique ». Il faut renoncer ; dit-il, à faire de l'AFDL un parti parce que celui-ci ne pouvait être qu'  « un foyer de médiocrité et un conglomérat d'opportunisme ». Pour justifier ce sévère jugement, M'zee LD Kabila se livre à une intéressante et déroutante relecture critique de la courte aventure de l'Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo.

    Il rappelle que le mouvement s'est constitué à partir de l'union de quatre formations politiques, et il relève que trois de celles-ci, excepté bien entendu sa propre formation, le Parti de la Révolution Populaire, se sont révélées sans expérience révolutionnaire ni orientation idéologique. De ce fait, il n'hésite pas à affirmer, l'Alliance n'était qu'  « un Conglomérat d'opportunistes et d'aventuriers. »

    Soulignons que l'AFDL, dit le président LD. Kabila avait accompli sa première mission, qui était de libérer le pays de l'oppression exercée par un « Etat anti - peuple » il dit « (....) a l'origine, lorsque nous avons crée l'AFDL comme mouvement, c'était pour la libération de notre pays, alors dirigé par un « Etat anti - peuple », un Etat dont la mission essentielle était de défendre les intérêts étrangers et de contenir le courroux des populations congolaises exploitées afin de permettre à ces intérêts étrangers de saigner à blanc la RDC. Le résultat : c'est la création de la misère un peu partout ; c'est l'économie dite ravagée, extravertie. Toutes les critiques ont convergé pour dire que l'Etat mobutiste d'alors n'était pas autre chose qu'une sorte de chien de garde, un Etat qui avait une seule mission : que les intérêts de grands pays et de petits pays priment sur l'intérêt national. »

    Plus loin, le président explique que c'est pour avoir débarrassé le pays d'un Etat « compradore » que le nouveau régime est en butte à une propagande internationale hostile ».

    La deuxième raison d'être de l'AFDL était de « créer un Etat populaire, un Etat du peuple, qui n'a plus (pour) mission de protéger uniquement les intérêts d'autrui, les intérêts des pays étrangers. »

    Il ajoute, « ...maintenant que l'AFDL a assumé le pouvoir, il faut, parce que c'est dans le cadre des objectifs fondamentaux, organiser le peuple, le conscientiser (et non pas le sensibiliser), afin qu'il prenne son destin en mains. Organiser le peuple suppose le mettre en mobilisation permanente et lui confier des pouvoirs qui dans des administrations et à des gouvernements qui se disent représenter les intérêts du peuple ». La création de comités du pouvoir populaire sera le moyen de réaliser cette auto organisation du peuple. (« Dans notre cas, organiser le peuple c'est le prédisposer à s'assumer »). L'alliance doit dès lors accomplir une « mutation ». « L'AFDL, martèle le président, doit accepter la mutation, c'est-à-dire se transformer en comités du pouvoir populaire. C'est la finalité de ceux qui ont crée l'AFDL.

    Ces changements paraissent signifier une volonté de reprise en mains de l'espace politique par le président dans la perspective de libéralisation des activités politiques. Ils dévoilent également l'influence qu'avait commencé à exercer du leader Libyen Mouammar El Kadhafi sur les idées de LD Kabila, notamment en ce qui concerne l'organisation de l'espace politique à travers les CPP.

    2. Création des CPP et FAP

    La création des Comités du Pouvoir Populaire traduit la conception de M'Zee L.D. Kabila de l'organisation du champ politique conformément à son idéologie maoïste.

    L'idée est exprimée pour la première fois par le chef de l'Etat Le 21 janvier 1999 dans un long discours prononcé au palais du peuple, discours qu'il adresse à ceux qu'il appelle ses camarades de l'AFDL et, en procédant par anticipation, ses amis des Comités du Pouvoir Populaire (CPP). Mais la thématique de la démocratie directe était déjà présente dans des interventions antérieures du président.

    Le 08 décembre, il a tenu une conférence de presse à la cité de l'OUA, à Kinshasa. Interpellé sur la présence illégale d'étrangers (libanais et pakistanais surtout) dans les zones minières, il aurait préconisé la création des comités populaires afin de défendre les intérêts du pays, non seulement dans le secteur minier mais aussi dans tous les domaines de la vie nationale.

    Trois mois plus tard, la promesse présidentielle se concrétise avec le premier congrès des CPP au palais du peuple. « Nous remettrons le pouvoir au peuple et faire participer le peuple à l'exercice du pouvoir » disaient les slogans. Ce congrès était tenu du 20 au 23 avril 1999. « Les CPP fixent la politique, assurent son exécution et son contrôle sur tous les aspects de la vie nationale et l'Etat assure le fonctionnement des CPP ». « Une assemblée populaire de base » organisera le peuple dans les cités, les groupements, secteurs, les chefferies, les cités, districts. « Les partis politiques ne peuvent avoir de représentants au seins des organes des CPP l'unique source de légitimité est le peuple »32(*)

    Un tel discours en rappelle bien d'autres, prononcés au début des indépendances, par des leaders de défense de la révolution (CDR), Mouammar Kadhafi les « comités populaires », Julius Nyerere le « socialisme Africain ». Tous visaient comme LD Kabila, à instaurer une démocratie directe. »

    01. Nature et rôle des Comites du Pouvoir Populaire

    Le président LD Kabila entreprend de définir la nature du régime politique qu'institueront les CPP. Les CPP, dit-il, c'est la vraie démocratie, cette démocratie qui n'a jamais été réalisée. « Pouvoir du peuple, pour le peuple, par le peuple, mais ça n'a jamais été comme ça. C'est avec les comités du pouvoir populaire que la possibilité matérielle de ce que représentes la démocratie, va se réaliser ». « C'est le pouvoir dans les mains du peuple congolais, ce pouvoir à partir de la rue, du village qui doit être un pouvoir effectif et qui doit débattre de la vie de la communauté, soit de la rue, soit du village, soit du quartier, etc. ça doit être un pouvoir effectif ».

    Abordant la question du rôle des CPP, le président LD Kabila met résolument l'accent sur l'économie. Le régime, adaptant des mesures de contrôle de la circulation monétaire et de l'activité économique, s'engage dans la mise en oeuvre d'une « économie de guerre ».

    Plus concrètement, et plus modestement, le président assigne aux CPP le rôle d'une police économique, en les chargeant : de défendre la monnaie nationale (les CPP, qui « sont des gouvernement de rue », doivent « en découdre avec ceux qui, dans les rues, vont essayer de s'adonner au petit commerce frauduleux des cambistes »33(*)

    02. Les CPP et les partis politiques

    Le président annonce la promulgation d'une « loi légalisant les activités politiques des groupements ». Les propos qu'il tient le 21 janvier montrent ou plutôt confirment que le chef de l'Etat est en fait profondément hostile au système des partis politiques, générateur de division. L'institution des CPP apparaît alors comme un moyen de combattre l'influence néfaste que pourraient exercer les partis politiques si d'aventure ils remontaient sur la scène publique, en même temps que de leur couper l'herbe sous le pied en faisant d'un autre type d'organisation l'instrument de la vie politique. Donnons un extrait significatif du discours présidentiel ; « nous sommes à la veille de la promulgation de la loi légalisant les activités politiques de groupements. Chaque groupement politique va vendre ce qu'il pense être son projet de société, son programme, et tous vont s'adresser au peuple. (...) ils vont, vous en avez l'habitude, suggérer au peuple qui n'est pas organisé, mais éparpillé de, voter pour tel ou tel, voter pour ceci ou cela, tel parti. Et on lui donnera tout le miracle du monde, etc. »

    03. Les CPP et pouvoir d'Etat

    Le CPP est le détenteur du pouvoir, les organes du pouvoir d'Etat populaire, ils assument le pouvoir politique donc la direction. Vous êtes à la direction des affaires ». « c'est ça le pouvoir ».mais il précise en quel sens il faut entendre que les CPP « ont un pouvoir gouvernement », dit-il encore le reste, ils « ont l'obligation d'appliquer et de faire appliquer les décisions du gouvernement, les lois, les décret-loi, les arrêtés ministériels ou des gouvernorats ». Même si ses détracteurs dénonçaient la confusion entre les organes des CPP et ceux de l'administration publique, pour LD Kabila, il n' y avait pas de télescopage entre les deux, d'ailleurs les premiers devaient remplacer les seconds. Les CPP étaient donc une institution publique émargeant du budget de l'Etat.

    04. Les CPP et les ONG

    Alors que dans son discours de janvier le président LD Kabila, tout en annonçant leur retour sur la scène politique, disqualifiait les partis politiques au profit des CPP. Cette fois il entend remettre à leur place les ONG en leur rappelant que par définition elles ne participent pas au gouvernement de la société, donc n'ont pas de pouvoir politique, ce qui les différencie radicalement des CPP.

    Il se livre à une sévère critique des ONG congolaises, les accusant d'avoir, en laissant politiser et corrompre le société civile, pris la relève des politiciens de la deuxième République : il dit : « les CPP sont venus mettre fin à la politisation et au pourrissement de la société civile entrepris par ceux qui, à l'époque, avaient fait pourrir la classe politique de la deuxième République s'étant rendu compte, ce sont eux-mêmes qui les disent, que les politiciens zaïrois sont pourris, corrompus, incapables, et tous les mots ont été déversés pendant la conférence nationale souveraine ».

    Lors de la tentative de prise de la ville de Kinshasa, les Kinois, en soutien aux Forces armées congolaises et alliées, avaient repoussé les rebelles. C'est alors que le président LD Kabila eut l'idée de créer les FAP (forces d'autodéfense populaires) pour que le peuple se prenne en charge pour défendre le territoire national. Christophe Muzungu, vice gouverneur de la ville de Kinshasa sera chargé de recrutement.

    Pour clore cette section consacrée aux CPP, nous constatons que pour M'zee LD Kabila les CPP constituaient l'instrument par lequel il comptait créer en RDC, une « société nouvelle ». Il en a montré l'importance à travers les moyens financiers mis à la disposition de cette institution.

    En somme, la redémocratisation inspirée du maoïsme initiée par LD.Kabila s'est inscrite en faux au processus démocratique enclenchée en 1990 qui se déroulait dans le cadre d'un multipartisme intégral, de la liberté d'expression et d'association. En cherchant à contrôler le champ politique congolais pour le soustraire de l'influence des grandes puissances, L.D.kabila était conduit à entreprendre certaines actions qui rappelaient malheureusement la deuxième République de triste mémoire : suspension des activités des partis politiques, traque des opposants, arrestation et emprisonnement des journalistes, etc. ceci a contribué à le fragiliser sur le plan interne en lui privant du consensus politique avec les forces socio-politiques dont il avait pourtant besoin pour lutter efficacement contre l'impérialisme occidental. Il a ainsi trahi un des principes indispensables à la réussite de la lutte contre l'impérialisme, à savoir : la constitution d'un front uni anti-impérialiste que Edouard Dominique Longandjo appelle Bloc historique nouveau. En effet, la révolution anti-impérialiste ne peut aboutir, postule Mao Tse Toung, que si « à l'intérieur du pays, on éveille les masses populaires. Cela signifie unir la classe ouvrière, la paysannerie, la petite bourgeoisie urbaine et la bourgeoisie nationale en vue de former un front uni placé sous la direction de la classe ouvrière et, à partir de là, édifier un Etat de dictature démocratique populaire dirigé par la classe ouvrière et basé sur l'alliance des ouvriers et des paysans. »34(*)

    Ainsi, M'Zee L.D. Kabila, avec une telle conception de l'organisation du champ politique et de la démocratie que certains ont considérée comme surannée, ne pouvait bénéficier du soutien ni des forces politiques internes ni de la communauté internationale qui ne reconnaissent que la démocratie représentative.

    Section 3 : LD KABILA et la reconstruction nationale

    Le deuxième point de mire de LD Kabila a été la reconstruction nationale. Il s'agissait de reconstruire le tissu économique du pays détruit par la gestion prédatrice du régime mobutiste. Cette reconstruction était inspirée par les principes d'autosuffisance alimentaire et d'autoprise en charge pour amener le peuple congolais à créer lui-même sa richesse, d'une part, et, d'autre part, par la coopération sud-sud. Pour y parvenir le gouvernement de l'AFDL, sous la houlette de M'zee L.D. Kabila, avait mis en place un plan triennal qui avait fait suite à l'échec de la conférence des amis du Congo à Bruxelles.

    Dans le cadre de réalisation de ce plan, Lobho lwa Djugudjugu note que « jusqu'avant l'agression ougando-rwando-burundaise, il y a lieu de relever au plan socio-économique la stabilisation de la monnaie, du taux de change, des prix des produits manufacturés, des denrées alimentaires et du carburant ; la réhabilitation de certaines routes dans la capitale et à l'intérieur du pays ; la réforme mettant en circulation le Franc Congolais permettant ainsi l'uniformiser les nombreuses zones monétaires ; la stabilité des prix de transport en taxi, taxi-bus, fula-fula, kimalu-malu... »35(*)

    Mais ces quelques performances s'avérèrent éphémères. Le déclenchement de la guerre et les mesures économiques qui s'en ont suivi ont eu pour conséquence la perturbation des activités économiques. Le président LD Kabila entreprit quelques actions pour consolider sa politique économique qualifiée de l' « économie sociale du marché ».

    Pour réaliser sa politique d'autosuffisance alimentaire, il mit en place le Service national. Celui-ci assurer l'encadrement des « bâtisseurs » recrutés dans tous les coins de la république et regroupés dans quelques centres de production agricole dont le plus célèbre a été le centre de Kanyama Kasese dans le Katanga. A l'image de Kibboutz, sovkhoz et de kolkhoz, le service national avait reçu la mission d'accroître la production agricole en vue de garantir l'indépendance alimentaire de la République Démocratique du Congo. Bref, faire sortir le pays du recours aux importations des produits alimentaires de base.

    Et face à la montée des prix des denrées alimentaires LD Kabila créa les cantines populaires. La création des cantines populaires à Kinshasa répondait de la nécessité d'éliminer les intermédiaires et autres spéculateurs qui sont à l'origine de la flambée des prix des produits alimentaires de base. Ces cantines étaient disséminées à travers les communes populaires de la plupart des villes congolaises. Elles étaient approvisionnées par les pouvoirs publics et vendaient à un prix relativement bas les denrées alimentaires. Les difficultés de gestion ont conduit à la faillite de ces cantines populaires.

    Après une reprise de l'inflation en août 1998, le gouvernement commença à essayer de réguler les prix par des lois. Dans la foulée de ces mesures, LD Kabila s'employa, sans succès, à la dédollarisation de l'économie nationale, en bannissant des transactions commerciales l'utilisation du dollar américain.

    Il a institué un monopole d'achat des matières précieuses, et notamment de l'or et du diamant. Il avait également repris le contrôle des exportations. C'est dans ce cadre qu'il était notamment interdit d'importer le bois brut.

    Ensemble, ces mesures affectèrent grandement la continuation des activités liées au commerce extérieur, accroissant encore un peu plus les difficultés de l'économie congolaise. A ces difficultés, il lieu d'ajouter la rupture de relations avec la Banque mondiale et le Fonds monétaire international.

    Section 4 : LD KABILA et la diplomatie

    Comme il fallait refuser d'être un autre président d'un Etat compradore, LD. Kabila avait mis sur pied dans un premier temps, une diplomatie qui avait en réalité des relations difficiles avec la communauté internationale. Il en donna le ton lors de ses premières sorties à l'étranger en tant que Président de la « troisième République ». En effet, au lieu d'aller se faire « bénir » en Occident comme le font tous les présidents africains lorsqu'ils arrivent au pouvoir, L.D. Kabila avait effectué son premier voyage en Chine et est passé par la Libye sur son chemin de retour. Il a nouait des relations privilégiées avec le Cuba, la Libye, la Corée du Nord, etc. des pays qualifiés d'axe du mal par les puissances occidentales. Il a soutenu son homologue soudanais le Président Omar El Bechir et condamné le bombardement de l'usine pharmaceutique d'Al Shiphar de Khartoum par l'aviation américaine. Dans la quête de son indépendance vis-à-vis des grandes puissances, L.D. Kabila avait boycotté le sommet de la francophonie qui se tenait à Hanoï au Vietnam. Mais plus tard, LD Kabila s'était employé ( grâce à la médiation du président gabonais Omar Bongo) à normaliser les relations avec la France dont il attendait le soutien face à l'agression dont le Congo était victime. C'est à ce titre qu'il avait personnellement participé au sommet France-Afrique tenu à Paris en 2000.

    Les systèmes des nations unies étaient aussi tombés dans le bourbier de ladite diplomatie à propos du massacre de réfugies Rwandais qui fuyaient l'avancée de l'offensive de l'AFDL. En effet, le gouvernement congolais arguait implicitement ou explicitement du principe de la souveraineté nationale et de la non ingérence dans ses affaires intérieures, et estimait de surcroît que la mission d'investigation des Nations-Unies rentrait dans le cadre d'un complot international de « forces intérieures et extérieures » contre le peule congolais, et il n'avait jamais été disposé à ce que la lumière soit faite sur les « massacres ».

    Le gouvernement de l'AFDL avait accablé la France dont l'ambassadeur à Kinshasa aurait constitué un quartier général de la subversion et de la propagande contre la RDC et menaçait de retirer l'Etat congolais de la francophonie si la France ne soutenait pas sa politique de développement.

    La consolidation de cette diplomatie avait atteint son paroxysme lorsque LD. Kabila avait refusé de recevoir le pasteur Jesse Jackson; l'envoyé spécial du président Bill Clinton. La secrétaire d'Etat américaine Madeleine ALBRIGTH s'était également butée à la rigueur de la diplomatie du président LD Kabila. Elle a dû attendre plusieurs heures dans l'antichambre avant être reçue par le président LD Kabila le 11 décembre 1997. LD Kabila a maintenu en détention pendant plusieurs mois le PDG Belge de la société SIZARAIL.

    Il ne cessait de reprocher à ses ministres le fait qu'ils adoptaient un profil bas vis-à-vis des ambassadeurs des pays considérés comme des grandes puissances.

    La conséquence de cette diplomatie a été l'isolement total du régime AFDL et sa mise au ban par la communauté internationale.

    Section 5 : LD KABILA et le dialogue intercongolais

    Le volte face de LD Kabila vis-à-vis de ses anciens alliés et des puissances étrangères dont il n'a pas garanti les intérêts, d'une part, la déception d'une fraction de l'AFDL et d'autres composantes des forces sociopolitiques internes, d'autre part, ont débouché sur le déclenchement de la guerre « d'agression-rebellion » le 02 août 1998. Sous la pression de la communauté internationale, les belligérants, après moult tergiversations, se sont retrouvés à Lusaka où ils avaient signé un accord de cessez-le-feu, connu désormais sous l'appellation de l'Accord de Lusaka. Cet accord, outre les modalités de désengagement des troupes qu'il avait fixées, prévoyait dans son chapitre 5 la tenue du dialogue entre congolais. Le dialogue devait déboucher sur la mise en place des institutions devant conduire la période de transition. C'est dans ce contexte que l'ancien président botswanais, Ketumire Masire, avait été désigné comme facilitateur.

    L'ancien Président botswanais, Ketumire Masire, aura été l'homme de l'année 2000 vu sous l'angle de la crise congolaise. Il a inscrit son nom sur longue lignée de ceux qui, périodiquement et depuis quatre décennies, interviennent dans les affaires de la RDC. Bien avant lui, des personnalités comme le suédois dag Hammarskjöld, le birman Sithu Uthant, le sénégalais Abdoulaye Wade, le sud - africain Nelson Mandela et l'américain Bill Richardson, ont eu à s'impliquer dans la résolution des conflits ayant émaillé l'histoire de ce pays. L'itinéraire du botswanais Masire a connu des moments à la fois intenses en activité et très tumultueux, déprimants à la limite. Désigné facilitateur conformément à l'accord de Lusaka, Masire a reçu la gestion d'un dossier complexe en tout point de vue.

    Malgré les réticences constatées au départ, il a été finalement accepté par toutes les parties. Les contacts avec le pouvoir en place à Kinshasa, l'opposition non armée et la société civile seront ponctués de quelques malentendus et incompréhension. Ceux-ci vont se révéler avec le temps, très néfastes envers lui. Son plan de travail divulgué en Avril 2000 va diviser la classe politique congolaise.

    L'opposition non armée (avec E. Tshisekedi wa Mulumba notamment) semble adopter son approche. Il n'en a pas été le cas de L D Kabila et de son gouvernement. Intervenant sur RFI le 23 avril 2000, A. Yerodia Ndombasi, alors ministre des affaires étrangères donnera la position du gouvernement : refus de voir les consultations préparatoires au dialogue intercongolais se dérouler en présence de quelques chefs de missions diplomatiques ; rejet de la proposition d'organiser ces assises hors de Kinshasa (1). Loin de baisser les bras, Masire rencontre la classe politique le 14 mai 2000 au grand hôtel de kinshasa. A l'occasion, la pomme de discorde réside dans la constitution du comité organisateur de 16 à 20 membres. Cette proposition du facilitateur sème zizanie dans la classe politique. L'UDPS menace même de désavouer Ketumire Masire pour qui le dialogue intercongolais n'était l'affaire que des belligérants.

    Emaillé de diverses incompréhensions, le séjour kinois du facilitateur se terminera en queue de poisson. Non seulement LD Kabila refuse de le recevoir, mais encore il se fait  tancer  par Abdoulaye Yerodia Ndombasi. Cette mauvaise humeur du gouvernement de L.D Kabila aurait été provoquée par les déclarations du facilitateur qui a trouvé la création de L' ACLPT comme une initiative susceptible de bloquer la tenue du dialogue intercongolais. Masire quitte Kinshasa le 23 mai 2000. Pendant que Kinshasa boude Masire, celui - ci s'efforce d'organiser une réunion du comité à Cotonou (Bénin).

    Cette rencontre n'aura pas lieu faute des composantes de l'intérieur (pouvoir et opposition non armée). Le facilitateur prend acte de cette défection et fixe un nouveau rendez - vous à Gaborone en juillet 2000. Il n'aura pas le temps de réaliser ce projet. Car, dès le 9 juin 2000, une sérieuse brouille se crée entre lui et le gouvernement de LD Kabila. La déclaration officielle lue le même jour par M. Didier Mumengi, ministre de l'information et porte parole du gouvernement à l'époque, est explicite. Le désaveu infligé à Masire repose sur trois raison : son silence sur les affrontements entre rwandais et ougandais à Kisangani, son obstination à organiser des rencontres pendant que « le peuple congolais est préoccupé à compter ses morts et à les enterrer », et son manque d'expertise sur le dossier de la RDC et sur les réalité de la sous région des Grands lacs.

    Pour le gouvernement de LD Kabila, il faut que L'OUA désigne un autre facilitateur en lieu et place de Masire dont la crédibilité et la neutralité ont été mises en cause. Le 20 juin 2000, son bureau est scellé.

    La récusation du Botswanais Masire a soulevé indignations et réactions tant à l'intérieur qu'a l'extérieur. Les Etats-Unis et la grande Bretagne n'avaient guerre apprécié ce désaveu. Le Département d' Etat américain l'a précisé dans sa déclaration du 21 juin 2000. Celui - ci a réaffirmé son soutien à M. Masire. A l'instar d'une réponse du berger à la bergère, le gouvernement congolais par la bouche de M. Mwenze Kongolo, ministre de la justice et garde des sceaux, réagit vigoureusement deux jours plus tard. Outre les récriminations contre les deux grandes puissances et l'explication de la décision prise, la déclaration de Kinshasa spécifie que «la fermeture du bureau de M. Masire est un acte de souveraineté posé par le gouvernement de la RDC. Celui - ci se réserve le droit de lever cette mesure à n'importe quel moment de son choix, sans contrainte»36(*)

    C'est dans cette confusion autour de la tenue du Dialogue Intercongolais que succombera M'Zee LD Kabila.

    Conclusion partielle

    A tout prendre, le Président L. D. Kabila avait inscrit son action politique, économique et diplomatique dans la perspective d'une autonomie politique et économique. Il est resté attaché à son idéologie révolutionnaire forgée dans les années 60 à l'époque de la guerre froide où les deux grandes puissances mondiales (USA et URSS) cherchaient à étendre leurs influences respectives dans certaines régions en s'appuyant sur des régimes politiques qu'elles soutenaient. Mais le contexte dans lequel L.D. Kabila a exercé son pouvoir ne se prêtait pas à une telle idéologie. Avec le capitalisme triomphant qui a universalisé ses valeurs depuis la chute du mur de Berlin, il s'avère utopique de croire édifier une société qui serait entièrement hors de son emprise.

    C'est ainsi que, sur le plan interne, L.D. Kabila n'a pas obtenu le consensus des forces sociopolitiques autour des modalités d'aménagement du champ politique congolais. Aussi, pris au dépourvu par les contradictions internes à son propre régime, il n'a pas pu restaurer l'Etat démocratique et de droit souhaité par tout le peuple congolais. Honoré Ngbanda souligne quelques faits relatifs au régime Kabila, notamment « la corruption, le tribalisme, la misère, l'injustice, le détournement des fonds publics, le favoritisme, le trafic d'influence, la pratique de la politique d'exclusion, la non démocratisation du régime Kabila... »37(*)

    Sur le plan externe, ses relations tumultueuses avec la France, la Belgique, les USA, les autres pays occidentaux et les institutions de Breton Wood lui ont privé leur soutien dont il avait pourtant besoin pour la reconstruction nationale.

    Toutefois, son rêve d'un Congo grand, indépendant et souverain reste un projet à inscrire dans les ambitions de tous les dirigeants, actuels et futurs, si l'on tient à ce que ce pays soit respecté dans le concert des nations. Nous devons, nous tous, comme nous recommande notre hymne national, assurer la grandeur de la mère patrie, prêter serment de liberté à léguer pour toujours à notre postérité. M'zee LD Kabila, quelles que soient ses incohérences, l'avait compris et réaffirmé dans l'hymne dédié aux opprimés : « Il n' y a point de doute d'abattre l'exploitation et de créer une juste société... Tenons bien nos armes dans nos mains...Quoi qu'il en coûte, jamais de servitude. »

    CHAPITRE III :

    JOSEPH KABILA ET LA FIN DE LA REVOLUTION

    DU 17 MAI

    Introduction

    L'avènement au pouvoir du Général-Major Joseph Kabila à la suite de l'assassinat du feu président LD Kabila, avait laissé penser aux ténors de la révolution du 17 mai qui avaient planifié cette succession aux allures monarchiques, à la continuité dans le changement. En effet, la remise du pouvoir à Joseph Kabila par les compagnons de LD Kabila, s'il faut s'en tenir aux déclarations officielles, était perçue comme une capacité autorégulatrice du régime après la disparition inopinée de son concepteur à l'effet de préserver les acquis de la « révolution du 17 mai 1997 ».

    Mais, force est de constater que de sa prise du pouvoir jusqu'à l'installation des institutions de la transition postdialogue (30 juin 2003), Joseph Kabila, sous la pression des événements et de la communauté internationale, a mené des actions marquant sa prise de distance vis -à--vis de l'orientation idéologico-politique de son prédécesseur. Sa gestion du processus de paix, de l'économie et de la diplomatie démontre bien cette rupture.

    Dans ce chapitre, nous rassemblons différents faits qui marquent cette rupture, mieux la fin de la révolution du 17 mai. C'est pourquoi, dans la première section, nous esquissons les défis auxquels Joseph Kabila devait relever au moment de son accession à la magistrature suprême. Dans le deuxième point, nous démontrons comment Joseph Kabila, de par sa gestion desdits défis, avait remis en question la politique de son prédécesseur. Et dans la troisième section, nous dégageons les perspectives pour une paix et un développement durables en RDC.

    Section 1. : J. KABILA et les défis de l'heure

    1. Une succession non codifié

    Le 16 janvier 2001, le Congo se prépare à célébrer (le lendemain) le 40e anniversaire de l'assassinat de P.E. Lumumba. Le président LD Kabila est dans son bureau du palais de Marbre à Kinshasa. Un homme tire à coups de revolver sur le président. Mort ou mourant, celui-ci est transporté par hélicoptère à la clinique Ngaliema. La nuit, un avion le conduit au Zimbabwe. Le 18 janvier à 20 heures le ministre de la communication et presse revient à la charge pour enfin annoncer la mort du Président de la République LD. Kabila.

    Le 17, le gouvernement se réunit. Il diffuse un communiqué annonçant que le chef de l'Etat, sorti blessé d'un attentat, a été transféré à l'extérieur du pays, et qu'il a pris la décision de confier la direction de l'action gouvernementale et le haut commandement militaire au général major Joseph Kabila.

    Quand la mort du chef de l'Etat aura été reconnue, c'est le parlement qui, en l'absence de toute disposition constitutionnelle concernant la succession, sera charge de l'investiture du nouveau président Joseph Kabila. Réuni en session extraordinaire, il adopte le 24 cette résolution : «  Monsieur Joseph Kabila, général - major des forces armées congolaise, est investi des pouvoirs constitutionnels dévolus au président de la République, chef de l'Etat. »

    Et le 26 Joseph Kabila prête serment devant la cour suprême de justice. Comme il l'avait fait le 29 mai 1997, lors de la prestation de serment de LD. Kabila, le procureur général de la République invoque, pour justifier la procédure suivie, une ordonnance du 14 mai 1886 (ordonnance qui impose aux cours et tribunaux de recourir notamment aux principes généraux du droit et aux coutumes, pour résoudre une contestation en l'absence d'un texte).

    La cour a entendu le procureur général de la République Luhonge Kibinda Ngoy qui a établi dans ses réquisitions qu'aucune cause d'empêchement ne faisait obstacle à l'investiture de Joseph Kabila. Celui-ci, en effet, n'a « aucun antécédent juridique », est « sain de corps et d'esprit », et (point plus crucial, une rumeur persistante attribuant à Joseph Kabila une mère tutsi Rwandais) est de père et de mère congolais : « attendu, renchérit à ce propos le procureur, que l'examen par l'organe de la loi du dossier personnel de M. Joseph Kabila général major, révèle que ce dernier est congolais d'origine de père et de mère, qu'il est né le 04 juin 1971 à Hewa-Bora II (dans le maquis de son père, donc !), collectivité de Lulenge en territoire de Fizi, province du Sud Kivu, République Démocratique du Congo, qu'il est originaire de la localité Ankoro, chef-lieu de la collectivité de Kamalondo en territoire de Manono, district de Tanganyika, province du Katanga, en RDC ; que sa mère, maman Sifa Mahanya, qui est en vie est fille de Assumani Bwanu et de Habamuyali, tous deux originaires du village Mupapayi, collectivité de Babangubangu Baombo, en territoire de Kabambare, province du Maniema en RDC »38(*)

    Cette déclaration confirme officiellement la succession intervenue au sommet de l'Etat. Joseph Kabila, qui est ainsi investi de tous les pouvoirs, accède à la magistrature suprême, en dehors d'un quelconque texte constitutionnel, par la seule volonté d'un groupe d'individu, membres du proche entourage de M'Zée LD. Kabila.

    Lors de cette cérémonie d'investiture, Joseph Kabila avait prononcé son premier discours en tant que nouveau chef de l'Etat au cours duquel il avait épinglé trois défis auxquels le Congo était confronté et qu'il devait, avec le soutien de toutes les forces socio-politiques, relever dans les prochains jours.

    2. Les trois défis de l'heure

    Joseph Kabila accède au pouvoir et hérite de son prédécesseur (son défunt père) d'une situation aussi difficile que complexe. Le Congo traverse une grave crise multiforme subséquente à une accumulation des effets pervers provoqués par une gestion inconséquente et prédatrice du pays. Dans son diagnostic de la situation, Joseph Kabila a stigmatisé trois défis auxquels il devait s'attaquer illico pour sortir le Congo de la crise.

    1°. Le défi de l'instauration de la paix et de la consolidation de la « communion nationale ».

    Joseph Kabila entendait ainsi, en premier lieu, instaurer la paix et consolider la « communion nationale » (unité nationale sous entendu) eu égard à une nation déchirée par plus de deux ans de guerre d'agression inacceptable. En effet, au moment où Joseph Kabila accède au pouvoir, la RDC se trouve en proie à une guerre (d'agression selon les uns, de libération selon les autres) qui a embrasé toute la partie orientale du pays. Les provinces du nord et du sud Kivu, du Maniema, la province orientale et certaines parties des provinces de deux Kasai, du Katanga et de l'Equateur étaient sous le contrôle des rébellions qui bénéficiaient officiellement du soutien militaire du Rwanda, du Burundi et de l'Ouganda. Cette guerre déclenchée le 02 août 1998 suite aux dissensions intervenues au sein de l'AFDL (mouvement politico-militaire qui a porté LD Kabila au pouvoir) et à la rupture de la coopération militaire avec ses anciens alliés militaires (Rwanda, Ouganda et Burundi) produit quatre rébellions39(*) et menaçait le pays de partition. Et le Gouvernement de la République n'a pu faire face à cette guerre que grâce à l'intervention militaire de ses alliés l'Angola, la Namibie, le Tchad et le Zimbabwe dont les armées ont fait échec la tentative de prise de Kinshasa (27, 28,29 août 1998) par les rebelles et leurs alliés ruandais, ougandais et burundais. L'implication de toutes ces armées dans la guerre congolaise conduit certains analystes à la qualifier de la première guerre mondiale africaine.

    Si les voisins orientaux de la RDC, c'est-à-dire le Rwanda, l'Ouganda et le Burundi faisaient prévaloir les motifs sécuritaires pour justifier la présence de leurs armées sur le territoire congolais, les insurgés congolais reprochaient au Gouvernement de Kinshasa ses « dérives dictatoriales ». Face à la rupture de la paix et à la violation de l'intégrité du territoire national induites par cette guerre, le nouveau chef de l'Etat a proposé une thérapeutique en tenant compte de la double dimension de la crise. Ainsi, sur le plan extérieur ou régional, il a requis le retrait immédiat et sans condition des Etats agresseurs, en l'occurrence, le Rwanda, le Burundi et l'Ouganda. Il a invité par ailleurs ces voisins du Congo à revenir aux meilleurs sentiments de bon voisinage, de règlement pacifique des différends, de coopération fructueuse et de l'unité pour assurer le progrès de l'Afrique centrale. Joseph Kabila avait également résolu de consulter les alliés du Gouvernement de Kinshasa pour examiner les voies et moyens pour relancer l'Accord de Lusaka afin qu'il puisse, non seulement arriver à un cessez-le-feu effectif, mais aussi, ramener la paix dans la région des Grands Lacs, en prenant en considération toutes les résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies tout en veillant à préserver les attributs fondamentaux de la République à savoir l'indépendance, la souveraineté, l'intégrité territoriale et l'unité du pays.

    Sur le plan interne, Joseph Kabila s'est engagé à consolider la « communion nationale » en normalisant la vie démocratique mise en mal par son prédécesseur.

    Concrètement sur le plan politique, KABILA joseph comptait donner un coup d'accélérateur aux négociations politiques qui semblaient être bloquées du règne de son prédécesseur.

    Cependant, les problèmes politiques d'importance majeur, avait- il noté devraient trouver leurs solutions dans le cadre du dialogue inter congolais.

    Aussi, a-t-il promis d'oeuvrer au renforcement de l'Etat de droit, de promouvoir la bonne gouvernance et la démocratie par l'organisation des élections libres et transparentes sur toute l'étendue de la République Démocratique du Congo.

    Sur le plan des droits de l'homme, Joseph Kabila s'est engagé à garantir les droits de l'homme et la justice afin que toute congolaise, tout congolais tout étranger accueilli sur le sol congolais jouisse, dans le respect de la loi, de la liberté, de l'égalité, de la dignité, de la protection de sa personne et de ses biens.

    Au niveau juridique et judiciaire, le nouveau chef de l'Etat prenait l'engagement de voir les organes et services de l'Etat à oeuvrer dans le respect de lois, afin que la sécurité juridique et judiciaire devienne une réalité, avec comme conséquence la sécurité des biens et des personnes sur toute l'étendue du territoire congolais. Dans le même ordre, la reforme de la justice militaire devrait être minée à terme et la compétence de la cour d'ordre militaire limité aux seuls infractions relatives aux codes et règlements de la justice militaire.

    Pour y parvenir, il déclarera qu'il se rendra partout où l'on parlera de paix. Ce qu'il fit en rendant successivement aux Usa, en France puis en Belgique. Dès le 15 février 2001, il  prendra part au sommet de Lusaka sur le processus de paix en RDC...

    2°. Le défi de la reconstruction nationale

    La guerre d'agression a eu des conséquences néfastes sur l'économie nationale, déjà en ruine sous la deuxième République. Ce qui a non seulement détruit toute l'infrastructure économique nationale mais aussi et surtout accru la misère du peuple congolais.

    Pour sortir de cette situation Joseph Kabila entendait mobilier toute les forces vives de la nation dans la production, à fin d'améliorer, par le travail, les conditions de vie des ses concitoyens et de pourvoir à une éducation et à des soins médicaux qualitatifs et accessibles à tous. L'économie congolaise étant caractérisée par une baisse des affaires, et dans le but de créer des richesses et combattre aussi la pauvreté, joseph Kabila avait opté pour la libéralisation des activités économiques. Concrètement, Joseph Kabila a décidé de : libéraliser les marchés des biens et services, du diamant et du change ; d'autoriser la libre circulation concomitante des devises étrangères et du Franc Congolais et de promulguer un nouveau code minier et celui des investissements. En outre, tout promettant de ménager un cadre de concertation et de dialogue avec les opérateurs économiques en vue d'assainir l'environnement économique, Joseph Kabila a sollicité l'appui de la communauté financière internationale à l'effet de mobiliser les ressources humaines, techniques et financières utiles à l'accélération du programme de reconstruction nationale.

    3. Le défi diplomatique.

    La RDC se trouve pratiquement dans l'isolement diplomatique à l'accession de Joseph Kabila au pouvoir. Outre la SADC dont les Etats membres étaient d'ailleurs partagés quant à la position à prendre sur la situation au Congo, les autres organisations (Union européenne, FMI, BM, notamment) et les partenaires traditionnels (France, Belgique et Etats-Unis) avaient cessé de fréquenter la RDC sous le régime de LD Kabila. Cet isolement a contribué à l'enlisement de la crise congolaise en privant le Congo du soutien diplomatique dont il avait besoin pour faire entendre sa voie sur la scène internationale. Aussi, l'a-t-il privé des moyens financiers et logistiques indispensables pour la relance de l'économie et la reconstruction nationale.

    C'est ainsi que Joseph Kabila s'était résolu d'améliorer les rapports de coopérations avec les principaux partenaires de la RDC, à savoir l'Union européenne, les Etats-Unis, la France et la Belgique, en pansant, disait-il, les plaies causées par certaines incompréhensions qui ont prévalu entre ces partenaires et le régime de son défunt père. Car, estime-t-il, ces partenaires avaient un rôle important à jouer dans le développement du Congo. Il a pensé aussi renforcer les relations fraternelles qui existaient déjà entre la RDC la Chine, la Russie et les autres Etats d'Asie.

    Au niveau africain, tout en appelant à la redynamisation de l'Union africaine dans l'esprit des pères fondateurs, Joseph Kabila avait plaidé pour une grande intégration dans le cadre de la SADC et du COMESA. C'est dans cette perspective qu'il promettait de s'impliquer personnellement pour la réussite de processus de paix au Burundi.

    Ainsi, Joseph Kabila s'était fait fort de voir la RDC jouer un rôle plus actif dans les affaires internationales et de contribuer aux cotés des autres pays à des solutions adéquates devant la prolifération des guerres, l'aggravation de la pauvreté et de la mondialisation.

    En définitive, et comme nous pouvons le constater, les propositions de solutions faite par Joseph Kabila pour relever les défis de l'heure suscitent des interrogations quant à son engagement d'inscrire son action dans « l'esprit et l'orientation politique » de LD Kabila, comme il n'a cessé de le rappeler dans ce discours d'investiture. Ces propositions de solutions, pour tout analyste averti, montrent plutôt sa volonté de rompre avec la ligne politique et idéologique de LD Kabila. Car, face à la gravité de la crise, Joseph Kabila a souligné qu'il n'avait plus droit à l'erreur (sous-entendues les erreurs commises par son père dans la conduite de la République). C'est ainsi que dans ce même discours, en acceptant la magistrature suprême lui confiée par les Institutions de la République, il affirmait qu'il s'emploiera à réaliser des changements profonds et ce, dans tous les secteurs de la vie nationale. Ces changements profonds sous-entendaient une nouvelle manière de conduire les affaires publiques différente de celle de l'ordre ancien. La rupture avec son père se concrétisera à travers les actions qu'il a pu menées pendant les trois ans de survie du régime AFDL (2001-2003). Ainsi, nous semble-t-il l'assassinat de LD Kabila et l'avènement de Joseph Kabila avaient mis fin aux illusions d'un régime qui se voulait révolutionnaire.

    Section2 : Joseph KABILA ou la remise en question de LD KABILA

    Les changements profonds annoncés par le nouveau président de la République Joseph Kabila lors de son investiture, et ce dans tous les secteurs, même s'ils n'ont pas introduit des mutations profondes dans les champ politique, diplomatique et économique congolais, ils ont néanmoins marqué un moment de discontinuité, de rupture avec les rêves d'autodétermination que caressait LD Kabila. Ses actions dans les différents secteurs de la vie nationale montrent bien ce changement de perspective.

    1. De l'arrêt de guerre au processus de désengagement et de retrait des troupes.

    Contre l'option de la guerre longue et populaire chère à M'zee LD Kabila, Joseph Kabila engage la RDC dans les négociations avec les pays agresseurs afin d'obtenir le retrait de leurs armées sur le territoire congolais.

    Puisque le processus de paix est arrangé par l'accord de Lusaka, c'est donc à la réactivation de celui - ci que Joseph Kabila s'est attelé. Tout a commencé par le sommet régional de Lusaka du 15 février 2001, premier sommet du genre auquel Joseph Kabila a participé. La rencontre au sommet a été préparée par les ministres de la défense des six pays belligérants et les délégués des mouvements rebelles qui, après deux jours de travail, accordent leurs violons sur le désengagement. Un plan et un calendrier précis qui mèneraient à l'achèvement du retrait total et en bon ordre des toutes les troupes étrangères se trouvant en RDC ont été adoptés.

    Le 15 mars 2001, date du début du désengagement sur 15 kilomètres, comme objectif final : retrait total des troupes étrangères au 15 mai 2001. Entre temps (29 mars 2001) la MONUC avait déployé son premier contingent dans l'est, en territoire rebelle, et le 4 avril 2001 en zone gouvernementale conformément au voeux exprimé par le président Joseph Kabila dans son discours d'investiture. A ce sujet, il avait fait savoir qu'il réitérait « l'engagement de la RDC de collaborer étroitement avec la mission d'observation des nations unies au Congo de manière à lui permettre de remplir avec efficacité son mandat, notamment en ce qui concerne le déploiement urgent de ses forces sur le territoire congolais en vue de ramener la paix ».

    C'est dans cette lancée que le 30 juillet 2002 le président Joseph Kabila et le président rwandais Paul Kagame signent un accord bilatéral à Pretoria (Afrique du Sud) assorti d'un calendrier de 90 jours prévoyant le désarmement et le démantèlement des ex-Forces armées rwandaises (Far) et des miliciens interhahamwe rwandais qui opèrent au Congo depuis 1994. Le président Joseph Kabila s'est également engagé à désarmer ces rebelles rwandais, utilisés par l'armée gouvernementale depuis 1998, en vue de leur rapatriement. En échange, le président rwandais Paul Kagame s'engage à retirer ses troupes du Congo. La supervision de cet  Accord de Pretoria est confiée à un «mécanisme de vérification de la Tierce partie» composé de représentants de la Monuc et du gouvernement sud-africain. Au final, 23 400 soldats rwandais quitteront le Congo. Pour autant, le démantèlement des forces de l'ancien régime rwandais présentes en RDC n'était toujours pas achevé en juillet 2006.

    Le 6 septembre 2002  le président Joseph Kabila et le président ougandais Yoweri Kaguta Museveni signent à Luanda un accord bilatéral qui programme le retrait des troupes ougandaises du Nord-Est, la création d'une Commission de pacification de l'Ituri et la mise en place d'une administration intérimaire en Ituri. Il était aussi convenu qu'après le départ des troupes ougandaises, une force de police congolaise devait assurer la sécurité en Ituri. L'Accord autorisait l'Ouganda à maintenir un contingent dans les montagnes du Rwenzori. Pendant ce temps le MLC de Jean-Pierre Bemba tentait d'occuper les territoires abandonnés par les Ougandais en jouant la carte du Rassemblement congolais pour la démocratie-National, le RCD-N de Roger Lumbala qui se disputait en vain, mais au prix d'exactions sanglantes, la ville de Beni avec Rassemblement congolais pour la démocratie-Mouvement de libération (RCD-ML, une autre scission du RCD-Goma) de Mbusa Nyamwisi.

    Pour le gouvernement de Kinshasa, l'application harmonieuse des Accords de Pretoria et de Luanda en ce qui concerne spécialement le retrait des troupes rwandaises et ougandaises aura une incidence certaine sur la conclusion d'un accord global et inclusif dans le cadre du processus politique interne pour la réconciliation nationale et la réunification du territoire de la RDC en vue de l'organisation rapide des élections libres, démocratiques et transparentes à tous les niveaux.

    A la suite de ces deux accords, et sans attendre leur mise en exécution par les deux pays agresseurs, le gouvernement congolais, sous la direction du président Joseph Kabila, avait demandé à ses alliés de retirer leurs troupes du territoire congolais. C'est ainsi que le 5 septembre 2001  le gouvernement namibien avait retiré ses troupes du Congo, il sera suivi par le gouvernement zimbabwéen et plus tard par le gouvernement angolais. Et pour montrer « sa bonne foi », le gouvernement de Kinshasa avec l'aide de la Monuc avait rapatrié à Kigali 64 rebelles rwandais, cantonnés à Kamina dans le cadre du DDRRR volontaire : cela a porté à 677 les personnes rapatriées depuis le début du processus le 30 septembre 2002, parmi lesquelles 375 ex-combattants et 302 personnes dépendantes. Il a fallu attendre une année plus tard, c'est-à-dire le 17 septembre 2002  pour que le Rwanda annonce le début du retrait de ses troupes de la RDC. La fin de cette opération de retrait de troupes rwandaises a été confirmée par la Monuc le 5 octobre de la même année.

    S'il vrai que le retrait officiel de toutes ces troupes armées du territoire congolais a contribué à la réduction du nombre des foyers de tensions (zones opérationnelles), il n'a pas permis la pacification totale du pays. Hormis le Burundi et les alliés du Gouvernement de Kinshasa qui ont effectivement retiré leurs troupes du Congo, le Rwanda et l'Ouganda ont continué à maintenir leur présence militaire sur le sol congolais soit en intervenant directement, soit à travers les groupes armés congolais acquis à leur cause. C'est le cas notamment de Mai-Mai et de Kunda Batware (avec le soutien occulte du Rwanda) dans les deux Kivu et des plusieurs bandes armées opérant dans l'Ituri (instrumentalisés par l'Ouganda). L'incapacité du gouvernement de Joseph Kabila à mater ces insurgés et l'option politique (négociation) qu'il a privilégiée pour résorber cette crise de l'Est conduisent certains analystes à conclure à la complicité du pouvoir dans l'enlisement de la belligérance.

    2. La restauration de la « communion nationale »

    Dans la perspective de restaurer la communion nationale, Joseph Kabila entreprit la relance du Dialogue intercongolais qui aboutit à la conclusion de l'Accord global et inclusif qui a aménagé le cadre juridique, politique et institutionnel de la transition et, d'autre part, ce qu'il a appelé l'ouverture politique en prenant un ensemble des décrets-lois dans le but de normaliser la vie démocratique.

    1°. La relance du Dialogue intercongolais

    Nonobstant tout ce qui a été dit sur l'Accord de Lusaka, celui-ci mit en place un cadre juridique et politique pour permettre au congolais de se parler en vue de se réconcilier avec eux-mêmes dans le but de doter le pays des institutions démocratiques pour l'avènement d'un Etat de droit en passant par les institutions de la transition40(*). Mais, il sied de rappeler ici que cet Accord a été récusé par le défunt président M'zee LD Kabila estimant qu'il avait failli à ses objectifs. C'est ainsi qu'il avait même fermé le bureau du facilitateur Ketumile Masire.

    Après sa prise du pouvoir, et évidemment sous la pression des événements ainsi que de la communauté internationale et après avoir reçu les garanties de la préservation de son pouvoir et de sa fonction présidentielle après le dialogue, le président joseph KABILA créa des conditions favorables à la tenue du Dialogue intercongolais, notamment :

    *Le repêchage de Ketumile Masire

    Réagissant à une question de collette Braeckman du journal belge « le soir » joseph KABILA dit : « mon père avait déjà accepté qu'il revienne, mais accompagné d'un co-facilitateur, de quelqu'un qui connaisse bien la situation géographique de notre pays (...) mais puisque les autre exigent un facilitateur, nous l'acceptons, il peut venir ».

    Joseph Kabila ayant ainsi permis le retour du facilitateur du Dialogue intercongolais désigné par l'ONU et UA, l'ancien président botswanais Ketumile Masire, celui-ci entreprit des contacts avec les mouvements rebelles, les partis politiques et les organisations de la société civile qui abouti à la tenue du Dialogue intercongolais à Sun City en Afrique du sud.

    *La participation au Dialogue

    Il y a lieu de noter également que contrairement à son défunt père opposé à l'idée de négociations directes avec les rebelles, Joseph Kabila avait accepté de négocier avec les rebelles dans le cadre du Dialogue intercongolais après avoir obtenu les assurances du facilitateur qu'il s'y présenterait comme chef de l'Etat et qu'il allait conduire la transition qui devait suivre la tenu dudit dialogue.

    2°. La normalisation de la « vie démocratique »

    Sur le plan politique, institutionnel et des droits de l'homme, les avancés ne sont pas notables. Notons d'abord que Joseph Kabila a continué administré le pays sous le régime du décret-loi constitutionnel 003 qui pratiquement abolissait la séparation des pouvoirs exécutif, judiciaire et législatif.

    Certes la loi N° 001 du 17 mai 2001 est venue abroger la très controversée décret loi N° 194 pris en son temps par LD KABILA ; lequel interdisait pratiquement les activités politiques. Bien que cette nouvelle loi reconnaît les partis politiques ayant existé avant l'avènement de L'AFDL au pouvoir, l'interprétation de celle - ci par le gouvernement ne permettait pas aux anciens partis politiques de fonctionner normalement avant le dialogue inter - congolais.

    Mais, le signale le plus important dans la perspective de normalisation de la vie démocratique a été la dissolution des Comités du pouvoir populaire, CPP en sigle, juste à la veille des travaux de Sun city II, part voie du décret N° 33 / 2003 du 28 mars 2003, qui, au fait, étaient incompatibles avec un système démocratique pluraliste. Cette dissolution a marqué la rupture totale d'avec la philosophie politique de son père et un affranchissement du cercle constitué par les compagnons de ce dernier.

    Quant à la situation des droits de l'homme, elle est restée trop préoccupante. Dans le bulletin N° 042 de la MONUC, M.Gurane NDIAYE de la section droit de l'homme note que les arrestations des dirigeants politiques se poursuivent jusqu'à présent. Mais un fait est vrai la fréquence a diminué par rapport au temps de LD Kabila. Sur le plan de la sécurité juridique et judiciaire, les arrestations arbitraires continuent et l'administration de la justice se fait à la tête du client sauf, la cour d'ordre militaire qui a été instruite de dessaisir des dossiers relevant des juridictions du droits commun et de ne s'occuper que des infractions relatives aux code et aux règlements militaires, aujourd'hui des moins en moins des civiles comme justiciables.

    3. La reconstruction nationale

    Au plan socio - économique, le gouvernement est loin de mobiliser toutes les forces vives dans la production afin d'améliorer par le travail, les conditions des vie des populations, les soins médicaux et l'éducation restent aléatoire. Néanmoins, des mesures ont été prises pour stabiliser l'économie en vue de sa relance.

    La libéralisation des activités économiques a été effective, autant que la circulation concomitante des devises étrangères et des francs congolais. Le commerce de diamant et d'autres matières précieuses a été libéralisé. L'exécution des dépenses s'est fait sur base de caisse et le non recours à la planche à billets ont conduits à la stabilité relative des prix intérieurs et du taux de change. Ce qui a cassé la spirale de l'hyper inflation et amener le FMI, dans le cadre du programme intermédiaire renforcé (PIR), à donner son satisfecit.

    Dans la foulée de cette libéralisation, et sous la pression des bailleurs des fonds, le président Joseph Kabila a promulgué un nouveau code minier (11 juillet 2002) et un nouveau code des investissements (21 février 2002) à l'origine des contrats léonins et du bradage du patrimoine national tant déplorés à ce jour.

    4. La remise du Congo sur la « scène internationale »

    C'est, en effet, dans le domaine de la diplomatique que le président Joseph Kabila a véritablement pris le contre-pied de la politique de son père. Contrairement à ce dernier qui avait choisi l'axe socialiste, Joseph Kabila a fait sa première sortie internationale par le truchement d'une tournée euro-américaine qui l'a successivement conduit en France, aux Usa et en Belgique. Cette tournée qui s'était inscrite dans le cadre de la quête de la bénédiction des grandes puissances annonçait l'ouverture tout azimuts que Joseph Kabila comptait opérer pour obtenir de la communauté internationale le soutien aussi bien diplomatique qu'économico-financier. Ce, pour mettre fin à la guerre et reconstruire le pays.

    L'ouverture sur le plan international lui avoué un soutien quasi unanime, au point de constituer un engouement particulier dans le monde occidental. La conséquence a été que la voix de la RD Congo à été entendue, au point que la condamnation du Rwanda et Ouganda n'a pas tardé d'être faite. Et la mobilisation de la communauté internationale au sein du conseil de sécurité quant à l'autorisation pour l'envoi d'une force multinationale d'imposition, en vue de sécuriser l'est du pays.

    Nous avons également observé la reprise de la coopération structurelle entre l'union européenne et la RDC, particulièrement avec la France, la Belgique, la Grande Bretagne et l'Allemagne. Les USA ne sont pas restés en marge de cette relance de la diplomatie. Tous ces partenaires ont pesé pour l'arrêt des hostilités et la tenue du dialogue intercongolais.

    La présence des experts de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international, le rôle déterminant des nation unies ces derniers temps par le truchement de la MONUC, le réchauffement des relations avec la troïka occidentale ( Belgique , France, états unis) ; sans négliger l'appui attendu de l'Allemagne en coopération bilatérale, l'engagement de la grande Bretagne, mais aussi des pays africains dont l'Afrique du sud, le Sénégal, le Maroc avec la présence de leurs troupes pour la paix en République Démocratique du Congo constituent des signes non trompeurs du retour de la République Démocratique du Congo sur la scène internationale après sa mise au ban sous le régime du défunt président LD Kabila.

    5. Le sabordage des « acquis » de la révolution du 17 mai

    Nombre d'observateurs et d'analystes ont salué le style de gouvernance du président Joseph Kabila. Pour les uns et les autres, Joseph Kabila a réussi à restaurer la paix, à unifier le pays déchiré par une guerre de cinq ans, à remettre le Congo sur la scène internationale. Ce qui a sauvé la RDC de la partition à laquelle l'exposait la belligérance qui a prévalu depuis 1996.

    Dans la foulée de la recherche des voies et moyens pour restaurer la paix en RDC, le Président Joseph Kabila avait sabordé ce que l'on peut qualifier d' « acquis » de la révolution du 17 mai que les compagnons de son défunt père et prédécesseur pensaient qu'il préserverait. Nous pouvons noter au passage la suppression des CPP, des FAP, de BNPS ; l'abandon jusqu'à la faillite totale des Cantines populaires, de la Réserve stratégique et de Service national. Il s'agit là des instruments mis en place par M'zee LD Kabila dans la perspective de la mobilisation des masses populaires, de l'autodéfense populaire et de l'autoprise en charge collective. Leur suppression symbolise la fin de la révolution du 17 mai.

    Si de manière générale, la majorité des compagnons de LD Kabila se sont simplement rangés dans la nouvelle dynamique insufflée par le nouveau Président, espérant évidemment que cette position les mettrait en situation favorable dans la course aux privilèges, quelques uns ont cependant réagi ou même dénoncé ouvertement le sabordage des acquis de la révolution du 17. C'est ainsi que Mwenze Kongolo, ancien ministre de l'Intérieur et de la Justice sous LD Kabila avait, au cours d'un point de presse tenu à l'occasion de l'inauguration du mouvement (ou parti) politique qu'il venait de créer, l'abandon de l'héritage de M'zee par le nouveau pouvoir. Il assignait à son mouvement (ou parti), « Patriotes Kabilistes » (PK), la lourde mission de pérenniser la pensée du soldat du peuple qu'était LD Kabila. Et au cours d'une interview qu'il avait accordée au quotidien le potentiel dans sa publication du 19 septembre 2005, il stigmatisait le fait que l'actuel président, donc Joseph Kabila, ne faisait pas de la souveraineté nationale son cheval de bataille comme c'est fut le cas avec M'zee LD Kabila. A la question de savoir ce qui le (Mwenze Kongolo) différenciait avec Joseph Kabila, il répondit en substance : «Je ne veux pas, une nouvelle une fois, engager une polémique avec le président de la République. Mon seul souci est de voir le pays dirigé comme il faut. J'ai apprécié comment M'zee dirigeait le pays : il tenait à ce que le peuple se l'approprie pour le sortir d'une crise de plusieurs décennies. Moi je ne m'en tiens qu'à cette vision. Je constate tout simplement que le président J. Kabila ne tient pas à la même valeur. C'est cela qui nous différencie. Tant qu'il maintiendra ce cap, nous marcherons toujours sur des voies parallèles.»

    De leur part, en réaction à la suppression des CPP, Edouard Dominique Longandjo et Vincent Mutomb Tshibal, respectivement ancien Secrétaire général Adjoint des CPP et ancien Secrétaire général de l'AFDL, avec quelques uns de leurs « camarades » ont créé leur parti politique dénommée Mouvement des Comités du Pouvoir Populaire (MCPP) dans le but de continuer la lutte amorcée par M'zee LD Kabila. On connaît également un autre parti politique dénommé Mouvement du 17 Mai (M17) créé par Victor Mpoyo (proche de LD Kabila) et dirigé par Augustin Kikukama qui ne cesse de dénoncer le déviationnisme de l'actuel Président et son parti le PPRD. Dans une interview donnée au quotidien Laconscience dans sa parution du 3 décembre 2005, Augustin Kikukama faisait remarquer que «  notre organisation ne nourrit aucune haine contre la personne de Joseph Kabila. En revanche, les kabilistes sont désabusés par la politique qu'il conduit. Une politique qui ne cadre plus avec les idéaux qui animaient ceux qui avaient chassé Mobutu du pouvoir. La majorité de la population congolaise paraît déçue par la mauvaise gouvernance qui règne au sommet de l'Etat. »

    Tous ces partis et mouvements qui se réclament du Kabilisme authentique, n'ont jamais bénéficié du soutien du Président Joseph Kabila ni de son entourage. C'est qui présage un divorce entre ces deux groupes.

    La question principale est celle de savoir pourquoi Joseph Kabila a-t-il pris une telle distance vis-à-vis de l'orientation politique de son père ? Au-delà des contraintes de l'environnement dans lequel il avait pris le pouvoir, il y a lieu d'affirmer que Joseph Kabila devait s'affranchir du cercle et de la philosophie de L.D. Kabila pour s'affirmer en tant que nouveau leader avec qui il fallait désormais compter. Il devait ainsi procéder symboliquement au « meurtre du père » pour éviter que l'ombre de ce denier entrave l'action qu'il projetait de mener en tant que chef d'Etat. Ensuite, il sied de reconnaître que Joseph Kabila n'est pas aussi imprégné de l'idéologie maoïste qui a éclairé depuis des années entières son prédécesseur. A ce titre, il ne se sent probablement pas héritier politique et idéologique de son défunt père. Surpris par l'assassinat de son père, Joseph Kabila n'a pas eu le temps de se forger sa propre ligne politico-idéologique pouvant le singulariser dans le champ politique. Par conséquent, il ne pouvait que s'abriter sous le parapluie des maîtres du monde pour préserver son pouvoir.

    Nous pensons que s'il est vrai que la gouvernance de Joseph Kabila a, dans une certaine mesure, ramené la paix, la réunification et le retour du Congo sur la scène internationale. Elle a néanmoins mis en péril la souveraineté de notre pays à telle enseigne que la R.D. Congo est devenue un « Etat bébé », selon la formule du professeur Emile Bongeli.41(*)

    Section 3 : Des perspectives : le dialogue avec les maîtres du monde

    Le tableau comparatif que nous venons de dresser au sujet de style de gouvernance de deux leaders du régime révolutionnaire du 17 mai, à savoir L.D. Kabila et Joseph Kabila, reflète le mieux la délicate situation dans laquelle se trouvent les Etats sous développés dans le contexte de la mondialisation. Il s'agit du choix à faire entre l'indépendance qui requiert des sacrifices énormes et l'alignement sur les diktats des grandes puissances pour préserver les ordres établis. Cette situation a été brillamment décrite par Mabika Kalanda en ces termes : « L'homme noir en général et l'homme congolais en particulier sont à la croisée des chemins. Ils doivent choisir d'être eux-mêmes ou se fondre et disparaître dans les autres. Le choix doit porter sur la liberté ou sur l'esclavage.»42(*)

    La liberté choisie par L.D. Kabila, dans une optique socialiste et dans le contexte de la mondialisation, a conduit au déchaînement de la colère de la communauté internationale ayant abouti à son assassinat. La refonte totale dans les autres choisie par Joseph Kabila nous conduit à l'aliénation incapacitant la RDC d'entreprendre toute action s'inscrivant dans la logique de l'indépendance.

    Mais parce que personne ne peut choisir l'esclavage pour garantir sa survie et que la liberté reste la seule condition humaine acceptable, nous pensons que la RDC doit opter pour la liberté. Mais comment ?

    Une fois de plus, Mabika kalanda nous propose ses recettes pour parvenir à cette liberté. En effet, pour être soi-même, mieux, libre, indique Mabika Kalanda, il faut :

    Ø S'accepter comme une valeur ;

    Ø S'attacher à son sol ;

    Ø S'organiser politiquement et

    Ø Créer soi-même ses moyens de penser et d'agir. Ces moyens sont entre autres la langue, la culture, le bien-être économique et moral. Pour parvenir à cet état de choses, il faut se désaliener sur les plans religieux, culturel et économique43(*), et nous ajoutons sur le plan politique.

    Nous pensons que cette voie est la seule susceptible de conduire le Congo à s'autodéterminer. Mais la question qui se pose est celle de savoir si la RD.Congo dans la situation actuelle est en mesure de s'engager dans cette voie qui semble être à la fois audacieuse, sinueuse et périlleuse. Dans l'immédiat, une telle entreprise parait illusoire et dangereuse. Les cas de Lumumba et L.D. Kabila sont illustratifs. C'est une entreprise qui doit s'inscrire dans la durée, c'est-à-dire un projet qui doit être mûri et projeté à long terme. Car comme le stigmatisait Mudimbe Vumbi Yoka, « pour l'Afrique, échapper réellement à l'Occident suppose d'apprécier exactement ce qu'il en coûte de se détacher de lui ; cela suppose de savoir jusqu'où l'Occident, insidieusement peut-être, s'est approché de nous, cela suppose de savoir dans ce qui nous permet de penser contre l'Occident, ce qui est encore occidental, et de mesurer en quoi notre recours contre lui est encore peut-être une ruse qu'il nous oppose et au terme de laquelle il nous attend, immobile et ailleurs.»44(*)

    Tenant compte de cette prudence que nous recommande Mudimbe V. Y. et en attendant de consolider l'entreprise d'émancipation nationale, une entreprise de longue haleine, nous pensons que entre le radicalisme et le l'alignement, il y a une voie médiane : la RDCongo doit négocier avec les maîtres du monde pour bâtir la paix, la démocratie et le développement.

    1. Négocier la paix.

    Le cycle de violence armée dans lequel se trouve enfermée la RDCongo depuis une décennie a comme fondement la convoitise des richesses congolaises par les puissances étrangères et les velléités hégémoniques de certains Etats de la région des Grands Lacs africains face à un Congo incapable de se défendre militairement et de s'organiser politiquement. En effet, selon Pierre Baracyetse, les maîtres de deux guerres au Congo sont les sociétés minières. Entre autres sociétés, il cite la Consolidated eurocan ventures du lundin group, Barrick gold corporation (BGC), aujourd'hui en deuxième position pour la production mondiale de l'or, l'Anglo american corporation (AAC) d'Afrique du sud, la plus importante compagnie minière du monde, abstraction faite des pétrolières. Il y en a aussi de « petites », moins connues mais qui osent en pleine crise : c'est le cas de l'American mineral fields Inc (AMFI) et de son associé l'American diamond buyes, et d'autres encore des Usa, du Canada, d'Afrique du sud, d'Ouganda, de Belgique, d'Israël, etc. »45(*) A côté de ces multinationales, Colette Braeckman cite Kenrow international of gaither burg des Usa, Littlerock Ltd, Tienfields Holdings Ltd, Collier ventures Ltd, Sapora Mining Ltd... qui se sont installées au Rwanda et exploitent et commercialisent le niobium, le tantale et le colombium provenant du Congo.46(*)

    Face à la pression de ces multinationales et autres Etats puissants , La RDC ne peut opposer une politique de protectionnisme pour protéger ses richesses ou ses ressources naturelles comme l'a fait M'zee L.D Kabila. Une telle politique va continuer à alimenter les guerres. Pour restaurer la paix, la RDC doit créer un environnement qui puisse permettre l'exploitation de ces ressources à l'avantage aussi bien des congolais que des multinationales, la mondialisation oblige. Dans cette perspective, La RDC doit faire prévaloir l'idée qu'une bonne exploitation de ses ressources naturelles, c'est-à-dire qui soit profitable à tous ne peut se réaliser que dans un environnement pacifié susceptible de garantir et de sécuriser les investissements étrangers. En d'autres termes, c'est dans le cadre d'une paix durable que les investisseurs étrangers peuvent tirer profit de leurs fonds placés au Congo.

    2. Négocier la démocratie

    Cette perspective résulte de la nécessité de passer de la démocratie imposée par l'Occident dans le cadre des politiques de conditionnalité pour en arriver à la démocratie souhaitée et désirée par le peuple congolais. Cette dernière perspective suggère ainsi que le fait remarquer Hilary Rodman Clinton, qu'il faut civiliser la démocratie pour « garantir l'autonomie de la société civile, des associations et de la démocratie participative non seulement par rapport à l'Etat, mais surtout vis-à-vis des marchés et de leur prétention à occuper tous les espaces de nos sociétés », éviter le danger que nous courons : « que les « clients » prennent la place du citoyen. »

    Cela suppose que la RDC doit lutter pour obtenir que désormais, en dépit des liens historiques avec l'Occident, que les dirigeants congolais soient véritablement issus de la volonté populaire et donc représentent réellement leurs intérêts, et non imposés par l'Occident à travers des élections de façade.

    3. Négocier le développement

    Une fois la paix retrouvée et la démocratie restaurée, il est possible de négocier le développement. Dans cette perspective, il est question de promouvoir une coopération bilatérale et multilatérale dans le respect mutuel des intérêts respectifs.

    Par ailleurs, nous savons à la suite de la dialectique que les causes externes agissent par l'intermédiaire des causes internes. Au clair, les puissances étrangères ont la main mise sur le Congo parce que les congolais eux-mêmes leur prêtent le flanc. C'est pourquoi, nous pensons que les négociations avec les « maîtres du monde » ne peuvent avoir un sens et un impact sur le devenir de notre nation que si au niveau national un consensus est dégagé entre les forces sociopolitiques. Ce consensus devra porter sur les modalités d'aménagement de l'espace politique, sur la gouvernance de la chose publique, le respect des droits de l'homme ainsi que sur certaines valeurs qui devront désormais guider toute action politique. C'est autour de ces préoccupations que l'unité nationale peut se constituer, qu'il est possible de rêver de former plus tard un « front uni » ou un « bloc historique nouveau » anti-impérialisme afin que le Congo devienne un véritable Etat dans le concert des nations.

    Conclusion partielle

    A travers ce chapitre, notre effort était de démonter que par son action politique, le Président Joseph Kabila avait pris distance vis-à-vis de l'orientation politico-idéologique de son défunt père et prédécesseur. Son avènement au pouvoir, contrairement à ce qu'avaient pensé les compagnons de M'zee L. D. Kabila, sonné le glas de la révolution du 17 mai 1997. Le démantèlement des « acquis » de la révolution, notamment la suppression des CPP, des FAP, des BNPS, la faillite de Réserve stratégique, des cantines populaires et de Service national, a été le signe évident de cette fin d'une révolution. Les ambitions personnelles du Président Joseph Kabila, les contraintes de l'environnement interne et externe ont été retenues comme variables explicatives de ce volte-face du nouveau président de la RDC. Tenant compte des faiblesses actuelles qu'accusent la RDC, nous avons pensé qu'il était intelligent de négocier la paix, la démocratie et le développement avec les « maîtres du monde », tout en nous préparant à leur opposer une résistance dans le futur. Ceci n'est possible que si au niveau national, les principales forces sociopolitiques se liguent comme un seul homme pour défendre l'intérêt de la nation. C'est à ce prix que le Congo survivra comme une véritable Nation.

    CONCLUSION GENERALE

    Nous voici arriver à la fin de notre dissertation qui a porté sur « De Laurent Désiré Kabila à Joseph Kabila. La désillusion d'un régime révolutionnaire en RD.Congo »

    Notre objectif principal était d'analyser les fortunes et les misères du régime AFDL qui s'était assigné le rôle historique d'affranchir le Congo de l'encombrante tutelle impérialiste au lendemain de sa victoire militaire sur le régime Mobutu considéré comme allié local de l'impérialisme occidental. Aussi, de démontrer que contrairement à son engagement exprimé lors de sa prise des fonctions présidentielles de poursuivre et de parachever l'oeuvre salvatrice de son prédécesseur assassiné, Joseph Kabila a bifurqué à 180° vers l'impérialisme occidental combattu par le régime AFDL dont il est issu.

    Nous avons, à la lumière de cette contradiction, poser les questions de savoir :

    - si le président L.D. Kabila et son régime « révolutionnaire » AFDL avaient-ils réussi à libérer le Congo de la tutelle impérialiste ?

    - pourquoi Joseph KABILA n'a pas suivi le schéma « révolutionnaire » de son père ?

    - s'agit-il d'une stratégie pour la survie du régime ou d'une reddition mettant fin aux illusions d'un régime qui s'est voulu révolutionnaire ou encore d'un réalisme politique à cette période de mondialisation ?

    Au regard de ces questions, nous avons postulé que le Président L.D. Kabila et le régime AFDL, en dépit de leur détermination, n'ont pas réussi à libérer le Congo de l'impérialisme. L.D. Kabila et l'AFDL avaient été désillusionnés par le contexte de la mondialisation qui ne se prête pas à l'autarcie dans laquelle ils ont voulu enfermer la R.D. Congo.

    Les contradictions observées entre les deux présidents du régime AFDL seraient dues au fait que Joseph KABILA n'avait pas de choix pour assurer sa survie politique. Dans le monde interconnecté et interdépendant d'aujourd'hui, il serait suicidaire de se replier sur soi-même alors qu'on n'a pas les moyens de sa politique comme l'avait fait son père.

    Pour vérifier cette hypothèse, nous avons fait recours à la méthode dialectique par le biais de ses quatre lois. Les techniques documentaire et d'entretien ont été mobilisées pour rassembler les données soumises au crible de la méthode dialectique pour en tirer la quintessence.

    L'argumentation pour étayer notre hypothèse a été déployée à travers trois chapitres. Le premier chapitre a exposé les mécanismes de domination et d'exploitation capitalistes ainsi que leur opérationnalité en Afrique et au Congo. Dans le deuxième chapitre, nous avons analysé la gouvernance révolutionnaire de L.D Kabila et ses conséquences tant au niveau interne qu'au niveau international. En cherchant à contrôler le champ politique interne et à s'émanciper vis-à-vis de ses anciens alliés et des puissances euro-américaines, LD. Kabila s'est mis en faux par rapport aux aspirations démocratiques du peuple congolais et par rapport aux intérêts du capitalisme mondial. C'est pourquoi, son règne a été écourté et a débouché sur son assassinat. Dans le troisième chapitre, nous avons montré comment le président Joseph Kabila depuis sa prise de pouvoir jusqu'à l'installation des institutions de la transition post-dialogue, avait progressivement pris distance vis-à-vis des options politico-idéologiques de son prédécesseur. Après avoir sabordé les « acquis » de révolution du 17 mai (suppression des CPP, des FAP, des BNPS, des cantines populaires, de la réserve stratégie, du service national), le président a renoué les relations avec les puissances euro-américaines considérées par son père et prédécesseur LD Kabila comme défenseurs de l'ordre international. Sa gestion du processus de paix, de l'économie et de la diplomatie démontre bien la rupture entre Joseph Kabila et L.D. Kabila. Ce qui a marqué la fin de la « révolution » dont se targuer ce dernier.

    BIBLIOGRAPHIE

    I. Ouvrages et articles

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    11. Longandjo O. E.D, Les autoréflexions critiques et violences. Le degré zéro de l'anthropologie praxéologique, Labossa, Lubumnbashi, 1982.

    12. Mao Tse Toung, Textes choisis, éditions des langues étrangères, Pékin, 1972.

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    II. TFC, Mémoires et thèse

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    2. Kanyinda T., La suspension des activités des partis politiques par le pouvoir AFDL en RDC, TFC en SPA, UNIKIN, 2000.

    3. Lubanza A. M., Construction, déconstruction et reconstruction de la classe politique de transition. Crise d'identité et permanence d'assimilation par fusion, Thèse de doctorat en Sociologie, Unikin, 2004.

    4. Lupungu B., L'AFDL et la transition vers la 3ème République en RDC : Essai d'analyse sociologique, Mémoire de licence en sociologie, FSSAP, UNIKIN, 1999.

    5. Mangaya M., Les incidences sociopolitiques du régime LD Kabila en RDC, TFC en sociologie, FSSAP, UNIKIN, 2003

    6. Mpiana T. J.P., Discriminations et conflits. Contribution à l'étude de la « conscience de condition » de la population de Ngaba, Mémoire de D.E.S en sociologie, UNIKIN, 2004.

    7. Nyabolema, L'impact de la lutte de l'AFDL sur le processus démocratique au Congo, TFC en SPA, FSSAP, UNIKIN, 1997.

     

    TABLE DES MATIERES

    EPIGRAPHE I

    DEDICACE II

    AVANT-PROPOS III

    INTRODUCTION GENERALE 1

    1. ETAT DE LA QUESTION 1

    2. PROBLÉMATIQUE 4

    3. HYPOTHÈSES DE TRAVAIL 7

    4. CHOIX ET INTÉRÊT DU SUJET 8

    5. DÉMARCHE MÉTHODOLOGIQUE 9

    5.1. Méthode de recherche 9

    5.2. Techniques de recherche 11

    6. DÉLIMITATION DU SUJET 11

    7. DIFFICULTÉS RENCONTRÉES 11

    8. SUBDIVISION DU TRAVAIL 12

    CHAPITRE I : LES MECANISMES DE DOMINATION ET D'EXPLOITATION IMPERIALISTES EN AFRIQUE ET EN RDC 13

    SECTION 1. NATURE DU NÉO-COLONIALISME 14

    SECTION 2. LES MÉCANISMES DE DOMINATION IMPÉRIALISTE 16

    1. L'usage du territoire 16

    2. L'usage du pouvoir symbolique de l'Etat client sur la scène internationale 17

    3. Le mimétisme institutionnel 17

    SECTION 3. LES CAPTATIONS DE SOUVERAINETÉ 19

    1. Sur le plan diplomatique 19

    2. Sur le plan économique 20

    3. Sur le plan politique 21

    CHAPITRE II : LE REGIME DE L.D. KABILA 23

    SECTION 1: LD. KABILA ET LA RÉVOLUTION DE 17 MAI 199723 24

    1. Laurent Désiré Kabila et le maquis de Fizi- Baraka 24

    2. Ses idées maîtresses 25

    3. Création de l'AFDL 27

    SECTION 2. LD. KABILA ET LA DÉMOCRATISATION DE LA R.D. CONGO 28

    1. Décret-loi n°003 du 27 mai 1997 30

    2. Suppression des activités des partis politiques 32

    3. Dissolution de l'AFDL, création des CPP et FAP. 35

    SECTION 3 : LD KABILA ET LA RECONSTRUCTION NATIONALE 42

    SECTION 4 : LD KABILA ET LA DIPLOMATIE 44

    SECTION 5 : LD KABILA ET LE DIALOGUE INTERCONGOLAIS 45

    CHAPITRE III : JOSEPH KABILA ET LA FIN DE LA REVOLUTION DU 17 MAI 50

    SECTION 1. : J. KABILA ET LES DÉFIS DE L'HEURE 51

    1. Une succession non codifié 51

    2. Les trois défis de l'heure 52

    3. Le défi diplomatique. 56

    SECTION2 : JOSEPH KABILA OU LA REMISE EN QUESTION DE LD KABILA 57

    1. De l'arrêt de guerre au processus de désengagement et de retrait des troupes. 58

    2. La restauration de la « communion nationale » 61

    3. La reconstruction nationale 63

    4. La remise du Congo sur la « scène internationale » 64

    5. Le sabordage des « acquis » de la révolution du 17 mai 65

    SECTION 3 : DES PERSPECTIVES : LE DIALOGUE AVEC LES MAÎTRES DU MONDE 67

    1. Négocier la paix. 69

    2. Négocier la démocratie 70

    3. Négocier le développement 71

    CONCLUSION GENERALE 73

    BIBLIOGRAPHIE 75

    TABLE DES MATIERES 77

    * 1 Nyabolema, L'impact de la lutte de l'AFDL sur le processus démocratique au Congo, TFC en SPA, FSSAP, UNIKIN, 1997.

    * 2 Lupungu B., L'AFDL et la transition vers la 3ème République en RDC : Essai d'analyse sociologique, Mémoire de licence en sociologie, FSSAP, UNIKIN, 1999

    * 3 Ali- Kikana M., Les gouvernements de transition sous l'AFDL, TFC en sociologie, FSSAP, UNIKIN, 1999

    * 4 Mangaya M., Les incidences sociopolitiques du régime LD Kabila en RDC, TFC en sociologie, FSSAP, UNIKIN, 2003

    * 5 Kanyinda T., La suspension des activités des partis politiques par le pouvoir AFDL en RDC, TFC en SPA, UNIKIN, 2000

    * 6 M. Mutinga M., La RDC à l'aube de la troisième République. Démocratie ou démocrature, éd. Espace Afrique, Bruxelles, 2005

    * 7 J.P. Mpiana T., Discriminations et conflits. Contribution à l'étude de la « conscience de condition » de la population de Ngaba, Mémoire de D.E.S en sociologie, UNIKIN, 2004.

    * 8 Ludo M. cité par A. Mwaka, C. Ngoy et J.P., « R.D.Congo : Dialoguer avec les maîtres du monde », in M.E.S., n°10, mars-avril 2003, p.42

    * 9 C. Braeckmann, L'enjeu congolais : l'Afrique centrale après Mobutu, éd. Fayard, Paris, 1999, p.331

    * 10 Idem

    * 11 A. Mwaka, C. Ngoy et J.P. Mpiana, Art.-cit p.44

    * 12 R.K. Merton, Eléments de théorie et méthode sociologique, Paris, Plon, 1965, p.156

    * 13 J.C. Loubet Del Bayle, cité par S. Shomba K.. et G. Kuyunsa B. , Op-cit, p.123

    * 14 M. Kalele ka Bila, Capitalisme et sous développement à Kabinda. Une étude des mécanismes de domination et d'exploitation capitalistes, Lubumbashi, Labossa, 19884, p.9

    * 15 C. Bettelheim cité par M. Kalele, idem.

    * 16 K. NKrumah cité par J. Ziegler, Main basse sur l'Afrique, Paris éd. du Seuil, 1978, p.42

    * 17 J. Ziegler, Op-cit. p.42

    * 18 B. Badie, L'Etat importé. L'occidentalisation de l'ordre politique, Fayard, Paris, 1992.

    * 19 Pour plus d'amples informations lire M. Kalele ka Bila, Analyse sociologique des infrastructures économiques de la RDC, cours inédit, L1 et L2 Sociologie, Unikin, 2004.

    * 20 P. Joye et R. Lewin, Op-cit, p.29

    * 21 B. Badie, Op-cit, p.31

    * 22 C. Braeckmann, Op-cit, p.297.

    * 23 Pour cette section, nous nous référons essentiellement à l'ouvrage de Cosma Wilungula intitulé : Fizi 1967-1986. Le maquis de Kabila, publié aux éditions L'Harmattan, à Paris en 1997

    * 24 M. Ludo, Solidarité, Hebdomadaire du parti du travail de Belgique, n° 45 du 25 Novembre 1998, pp 217-218

    * 25 Mao Tse Toung, Textes choisis, éditions des langues étrangères, Pékin, 1972, p. 413

    * 26 Lobho Lwa Djugu Djugu, Le Congo à l'épreuve de la démocratie. Essai d'histoire politique, PUK, Kinshasa, 2006, p.254

    * 27 C. Braeckmann. Op.-cit, pp .319 - 329

    * 28 G. De Villers, J. Omasombo et E. Kennes, RDC. Guerre et politique, les 30 derniers mois de LD. KABILA, L'harmattan, Paris, 2201, P173

    * 29 A. Lubanza M., Construction, déconstruction et reconstruction de la classe politique de transition. Crise d'identité et permanence d'assimilation par fusion., Thèse de doctorat en Sociologie, Unikin, 2004, p.97

    * 30 Discours prononcé au Palais du Peuple le 21 janvier 1999

    * 31 Le Potentiel du 21 décembre 1998

    * 32 C. Christian « La démocratie directe s'installe », in Jeune Afrique économique, n°286 du 03 au 16 mai 1999, p.32

    * 33 Discours prononcé le 21 janvier 1999

    * 34 Mao Tse Toung, Op-Cit, p.409

    * 35 J.P. Lobho L., Op-Cit, p. 230

    * 36 La Référence Magazine n° 38, p.37

    * 37 H. Ngbanda, cité par Mbepongo, Op-cit, p.36

    * 38 LePotentiel du 29 janvier 2001

    * 39 Le RCD/ Goma occupait le nord et le sud Kivu, le Maniema, une partie du Katanga, de deux Kasaï et de la province orientale. Le RCD/KML occupait une partie du Nord Kivu, le RDC/N occupait une partie de la Province orientale et le MLC occupait une partie de l'Equateur.

    * 40 J.P. Lobho lwa Djugu Djugu, Le Congo à l'épreuve de la démocratie. Essai d'histoire politique, PUK ; Kinshasa, 2006, p.260

    * 41 E. Bongeli Y.A, « L'Etat bébé. Lutte contre la pauvreté : nouveau mythe onusien », in Analyses sociales, Volume X, numéro unique, janvier - décembre 2004

    * 42 Mabika Kalanda, cité par H. Ntumba Lukunga, La remise en question. Profil d'une approche, sociological papers, n°3-4, Unikin, Mai-juin 2005, p.9

    * 43 idem

    * 44 Mudimbe V.Y., L'odeur du père. Essai sur les limites de la science et de la vie en Afrique noire, Présence africaine, Paris, 1982, pp. 12-13

    * 45 P. Baracyetse, L'enjeu géopolitique des transnationales minières au Congo. Un dossier de VZW S.O.S Rwanda-Burundi Asbl, Buzet, 1999,p.9

    * 46 C. Braeckman cité par Kibanda Matungila, La convoitise des multinationales minières et pétrolières occidentales sur les ressources naturelles du Congo comme véritable enjeu de la guerre en RDC, symposium internationale de Kinshasa, 2000,p.12






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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille