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Formation professionnelle et professionnels formateurs : le cas des stages cliniques infirmiers

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par Gaà¯ta Le Helloco-Moy
Université Bordeaux 2 - Master 0000
  

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3.2 - Cadre institutionnel

Parce que nous nous trouvons à la croisée du champ de la formation et de celui du monde du travail, il existe des contraintes institutionnelles incontournables pour les professionnels. Ainsi, le décret de compétences actuel des infirmiers en date de juillet 2004 leur impose un rôle légiféré :

[Selon le secteur d'activité où il exerce, y compris dans le cadre des réseaux de soins, et en fonction des besoins de santé identifiés, l'infirmier ou l'infirmière propose des actions, les organise ou y participe dans les domaines suivants :

1. Formation initiale et formation continue du personnel infirmier, des personnels qui l'assistent et éventuellement d'autres personnels de santé ;

2. Encadrement des stagiaires en formation ;

3. Formation, éducation, prévention et dépistage, notamment dans le domaine des soins de santé primaires et communautaires ; ]18(*)

Dans ce cadre les étudiants relèvent des différences de motivation et d'envie d'exercer ces actions. Ainsi, Cassandra nous exprime la difficulté que lui renvoient « des professionnels de santé qui ne souhaitent pas encadrer » plus insidieusement retrouvée dans des propos comme ceux d'Arnaud où il décrie ces stages « où on nous ne considère pas comme de futurs professionnels. La façon de nous parler, la façon de nous faire des remarques, le peu d'intérêt porté lorsque nous disons quelque chose. » Ainsi, certains professionnels se retrouvent contraints dans un rôle dévolu par une législation mais dans lequel ils ne se sentent pas à leur aise et où ils vont jusqu'à imaginer que « leur » service pourrait choisir les étudiants voire leur interdire complètement l'accès, comme en témoigne les propos d'Eric à qui une infirmière lui a dit qu'il « n'avait rien à faire dans un tel service » avant de lui assener le lendemain un « tiens t'es revenu, toi. » D'autres professionnels ne semblent même pas s'inscrire dans cette obligation allant jusqu'à considérer l'étudiant comme des bras supplémentaires, « pour d'autres j'étais plutôt une aide » nous écrit ainsi Laurie.

Comment déterminer une fonction lorsqu'une obligation légale n'est parfois pas suivie ? Comment permettre à des étudiants comme Glawdys de pouvoir affirmer avec soulagement que « l'infirmière est restée très objective » malgré ses erreurs liées à sa situation d'apprentissage ?

Ces professionnels ont marqué négativement les étudiants par leur approche et nous sommes en droit de nous demander si leur formation pédagogique voir didactique est suffisante pour exercer alors un tel rôle auprès de futurs professionnels. Cependant, d'autres sont perçus inversement de manière positive aussi nous ne pouvons incriminer ici que d'éventuelles lacunes théoriques. Alors que ces différences semblent participer également à la construction réflexive des étudiants puisqu'ils sont capables de déterminer ce qui semble aidant de ce qui ne l'est pas ; les réactions diffèrent, certes, mais n'est-ce pas cette différence qui permet à l'étudiant de se construire une image du futur professionnel qu'il souhaite être ? De même, la perception d'un étudiant est également reliée à l'image que donne tel ou tel service, ce dont Arnaud se fait le reflet lorsqu'il prétend que « ce sont toujours dans les mêmes stages où nous sommes mal encadrés » et même s'il modère lui-même ses propos en les qualifiant d'« une simple constatation. » L'effet d'image joue très certainement également un rôle qui n'autorise pas les étudiants à s'inscrire dans un stage sans les préjugés que nous pourrions comparer à ceux que pourrait avoir un enseignant de CM2 sur un enfant décrit comme mauvais élève par tous ses prédécesseurs. Nous nous retrouvons donc ici face à un effet Pygmalion inversé ou négatif, le regard de l'étudiant créant la crainte du stage devenant alors « LE » stage maudit. Cet effet Pygmalion négatif est retrouvé dès les entretiens exploratoires auprès de la Directrice de l'IFSI interrogée qui, au début de l'entretien me glisse un « puisqu'on est obligé de faire appel à ce genre de stage hein ? », finissant par dévoiler complètement son ressenti sur certains lieux qu'elle n'utilise qu'à regret et au décours de soucis d'organisation : « Il nous manque plus que 2 stages mais ça va être dans des lieux obscurs qu'on va les trouver... des lieux obscurs. Donc ça c'est un vrai problème. Ça c'est un vrai, vrai problème ... » La véritable question serait alors dans ce que les étudiants puisent au sein de ces stages ressentis négativement et, finalement, ne serait-ce justement pas cet effet négatif qui apporte le plus ?

De la même manière, les étudiants pointent la dichotomie théorie-pratique où la théorie, à l'instar du travail intellectuel par rapport au travail manuel, serait l'apanage des IFSI reconnaissant finalement à ces derniers la connaissance de la vérité applicable par tous, en tous lieux et en toutes circonstances. Ainsi, Glawdys nous rapporte le cas d'une infirmière qui « répondait que c'était parce que j'étais là qu'elle faisait comme ça mais que d'habitude elle faisait différemment... » Allant plus loin, une autre étudiante nous raconte la difficulté éprouvée face aux « professionnels de santé qui ne se remettent pas en question sur leur pratique professionnelle » comme ci cette pratique lui était acquise suffisamment pour l'intégrer et l'utiliser au sein d'une analyse lui permettant d'affirmer que ces professionnels n'ont pas de bonnes pratiques et devraient peut-être se mettre à jour sur les théories en cours.

Le décret de juillet 2004 détermine pourtant que [pour garantir la qualité des soins qu'il dispense et la sécurité du patient, l'infirmier ou l'infirmière a le devoir d'actualiser et de perfectionner ses connaissances professionnelles]19(*) et le fait d'effectuer les actes différemment en présence de l'étudiant montre bien une parfaite connaissance. Ce que relèvent les étudiants serait donc plus de l'ordre d'une distance importante entre ce que les IFSI leur enseignent et ce qu'ils peuvent observer dans la réalité. A l'heure d'une actualité brûlante sur les erreurs professionnelles il est difficile d'imaginer que les praticiens en place ne soient pas conscients de leurs actes mais ceci nous montre cependant la difficulté des liens actuels entre IFSI et professionnels, soulignés par les propos de la Directrice de l'IFSI : « pour pouvoir construire, je dirais, un partenariat beaucoup plus important par rapport à ce qui existait auparavant (...) qui était un partenariat ... un partenariat gris comme moi j'appelle cela. » De manière identique, la Directrice des Soins Infirmiers, qui plus est, affirme que « le but à atteindre, c'est qu'je peux vraiment, je le souhaite pour les uns et les autres : c'est arriver à avoir un partenariat le plus large possible avec les instituts de formation, ça c'est très clair. »

Contrairement à ce qu'affirment les étudiants, il semble donc qu'une remise en question institutionnelle soit en marche avec une réelle volonté d'amélioration de cette situation dont les étudiants pâtissent aujourd'hui.

* 18 Article R4311-15 du décret de juillet 2011

* 19 article R 4312-10 du décret de juillet 2004

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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore