Redéploiement industriel et grands
projets
structurants dans la métropole de
Chennai:
Quelle place pour les quartiers Nord ?
Paul Bertin
Master 2 Territoires, Développement et Cultures
Sous la co-direction de Loraine Kennedy
Chargée de recherche CNRS et Directrice adjointe du
CEIAS
Et de Kamala Marius-Gnanou
Ma»tresse de conférence - Université Bordeaux
III
Université Bordeaux III
UFR Sciences des
Territoires et de la Communication
Septembre 2011
Ce travail a été réalisé en
partenariat avec le programme de recherche européen Chance 2
Sustain -
www.chance2sustain.eu -
SOMMAIRE
Introduction 5
1ère partie : Une métropole
complexe
1-1 De Madras la coloniale à Chennai, ville
indienne du XXIème siècle 8
1-2 Les enjeux d'une ville duale 13
2ème partie : Modalités d'une enquête
de terrain originale
2-1 Une cartographie participative, explications
20
2-2 Quels ajustements pour notre étude?
23
3ème partie : North Chennai de
l'intérieur
3-1 Du Spatial au mental 29
3-2 De la donnée au spatial 38
4ème partie: Grands projets à venir : un
rééquilibrage?
4-1 A l'échelle de l'agglomération
47
4-2 Au Nord, un remodelage qui pose problème
52
Conclusion 58
Remerciements 59
Bibliographie 60
Annexes 62
Introduction
Madras, devenue Chennai en 1996, est aujourd'hui la
quatrième aire métropolitaine indienne en terme de population,
avec ses 9 millions d'habitants. Capitale du Tamil Nadu, état le plus
urbanisé du pays et 3ème puissance fédérale, elle
est à l'heure actuelle l'un des hauts lieux du nouvel ordre mondial en
Inde, et se place en première position des villes attractives en terme
d'IDE au cours des 5 dernières années. Cette situation a
impulsé de profonds changements dans les dynamiques urbaines de Chennai,
et on tend aujourd'hui à une spécialisation croissante des
espaces métropolitains, sous la forme de ce que l'on a appelé des
ÇcorridorsÈ de développement. Cette stratégie
ressemble étroitement à celle adoptée par les pays
occidentaux depuis les années 80, et s'accompagne bien souvent de grands
projets dans le domaine des infrastructures, visant à réduire
l'espace-temps et à maximiser la productivité des entreprises
installées autour de ces nouveaux nÏuds économiques.
Chennai, ville réputée traditionnelle et vieux
centre industriel textile, s'est ainsi transformée en une
métropole plurielle, à l'économie diversifiée.
Profitant d'une main d'oeuvre qualifiée et d'un environnement urbain qui
la place au premier rang des villes les plus agréables à vivre,
devant Delhi et Bangalore, elle a su en tirer les bénéfices pour
devenir un centre économique majeur, dont l'influence dépasse
aujourd'hui les frontières nationales. En l'espace de dix ans, elle est
devenue un centre incontournable dans le domaine de la programmation et du
software, avec l'arrivée de géants du secteur tels qu' HP, IBM,
Infosys ou Sun Microsystems, menacant sérieusement le leadership
établi depuis longue date par sa grande rivale, Bangalore. L'IT
corridor, au Sud de la ville, permettra à terme la création de
300.000 emplois dans ce secteur d'ici à 2020. Plus récemment, par
la création de vastes Zones Economiques Spéciales dans sa partie
Ouest, Chennai a étendu son emprise sur l'économie high-tech en
développant un ambitieux parc de production électronique,
regroupant à la fois les activités d'assemblage et de R&D.
Dell, Nokia, Samsung ou Motorola fabriquent désormais une partie de
leurs circuits électroniques et assemblent leurs
téléphones portables et leurs ordinateurs dans la banlieue de
Chennai. La ville non seulement concoit, fabrique mais aussi exporte
elle-même tous ces produits à forte valeur ajoutée.
Mais la liste de ses spécialités ne
s'arrête pas là, et il faut savoir qu'elle participe
également à
hauteur de 60% des exportations indiennes dans le
domaine de l'automobile. A ce titre, on la
surnomme aujourd'hui la Ç Détroit asiatique
È, tant son importance atteint aujourd'hui des sommets dans ce secteur.
Carrosseries, moteurs, pneumatiques, accessoires: la cha»ne
complète de production est assurée, et la ville produit
même les pièces détachées nécessaires au
reste du pays. L'engouement économique est tel qu'on prévoit
d'étendre la liste des savoirs-faire industriels au domaine de
l'aéronautique au cours des prochaines années, à travers
la création du Chennai Aero Park, le plus ambitieux projet dans
ce secteur à l'échelle mondiale. Plus de 100.000 emplois
répartis sur 16km2 regrouperont les activités de design, de
production et de maintenance de systèmes civils et militaires.
La ville reste par ailleurs un centre majeur dans les domaines de
la banque et de la finance, des industries pétrochimiques, du tourisme
médical, du cinéma1 et de la mode.
Mais Chennai, c'est avant tout un port, par lequel transitent
chaque jour 170.000 tonnes de marchandises, issues en partie de sa propre
production, mais aussi de celle de sa voisine Bangalore et de tout le Sud de la
péninsule. Dans le même temps, il confère à la ville
un rTMle de poumon énergétique, puisque c'est par ses docks que
les matières premières nécessaires à
l'activité économique d'une partie du pays font leur
entrée sur le territoire national. Le port de Chennai a connu une telle
explosion de son activité qu'au cours des années 2000 a
été décidée la construction d'un nouveau nÏud
portuaire, à la périphérie Nord de la ville: le port
d'Ennore. Celui-ci viendra prendre place dans une zone jusque là
délaissée par les aménageurs, en marge des
étincelants corridors concentrés dans les
périphéries Sud et Ouest de Chennai. En effet, les dynamiques
d'étalement et de redéploiement industriel massif qu'a connu la
ville au cours des dernières années n'ont pas recouvert
l'agglomération dans son ensemble, et n'ont fait qu'amplifier une
fragmentation et une dualité historique entre un Sud dynamique et
attractif, et des quartiers Nord plus pauvres et moins bien fournis en
infrastructures. Cet espace, North Chennai, semble avoir
conservé les stigmates des temps passés, et appara»t comme
le reflet d'un certain laxisme de la part des politiques qui ont eu tendance
à laisser la ville se constituer par elle-même, au gré des
interventions et des intérêts d'un secteur privé tout
puissant. En a résulté la constitution d'un espace mutant et
original, mi-urbain, mi-rural, et en apparence totalement livré à
lui-même.
Pourtant, avec la création du port d'Ennore et de ses
installations annexes, on peut supposer que la
donne est en train de
changer. Le Nord, quasi invisible jusqu'à une période
récente, pourrait être au
1 Kollywood, en référence au quartier Kodambakkam
oü sont rassemblés les studios de cinema et de television, produit
d'avantage de films qu'Hollywood en Californie, et se place en deuxième
position au niveau mondial derrière l'énorme machine de Bollywood
(Mumbai)
cÏur de nouveaux enjeux, d'autant que l'espace disponible
devenant rare et cher au Sud, il serait naturel que l'agglomération
cherche à poursuivre sa croissance, vers le Nord. Qu'en est-il
réellement? Quels projets sont achevés et quel impact ont-ils pu
avoir jusqu'à présent sur le Nord de Chennai? Quels en ont sont
les acteurs : publics ou privés ? L'Etat est-il à la hauteur du
défi, ou préfère-t-il déléguer ses
responsabilités ? Et puis, quelles sont les priorités à
l'heure actuelle, et quelle place est accordée aux habitants de la zone?
Car c'est bien là le cÏ ur des enjeux. Peuvent-il aspirer à
une meilleure prise en compte de leurs aspirations ? Et peuvent-ils
espérer de nouveaux débouchés? Assistera-t-on à un
rééquilibrage, ou au contraire à un creusement des
inégalités? La question des infrastructures et d e
l'accessibilité sera véritablement au cÏur de nos
questionnements, puisqu'il s'agit là du problème majeur duquel
dépendra la réussite de l'intégration du North
Chennai.
La suite de l'exposé se déroulera en 4 parties:
Une première partie nous permettra de mieux comprendre
les enjeux actuels, en retracant l'historique des dynamiques qui ont
amené la ville de Chennai à devenir ce qu'elle est aujourd'hui:
une ville duale. Nous ferons le point sur la mise en place des projets
déjà réalisés. (Quel est le visage de Chennai
aujourd'hui ? Comment en est-on arrivé là?)
Dans une seconde partie, nous détaillerons les outils
et les méthodes qui vont nous servir au cours de l'enquête de
terrain, et qui vont nous permettre de dresser le portrait du Nord de Chennai
et des problèmes qui lui sont propres (Comment mettre en avant les
particularités et les enjeux propres au Nord de Chennai?)
Dans une troisième partie, nous détaillerons et
analyserons les résultats de cette enquête, construite autour
d'une cartographie participative réalisée auprès des
habitants. Nous serons amenés à mettre en avant ses
défauts, et ses atouts. (De quelle facon les populations du North
Chennai percoivent-elles leur ville? Quels sont les problèmes qui
émergent de ce ressenti ? Le Nord de Chennai possède-t-il
vraiment une identité propre?)
Enfin, dans une quatrième et dernière partie,
nous ferons le point sur les grands projets à venir, et sur les
évolutions que devrait conna»tre notre zone d'étude. Avec un
regard critique, nous évalueront les impacts probables de ces
aménagements. (Dans quelle mesure les futurs aménagements
répondront-il au déséquilibre actuel?)
1ère Partie - Une métropole complexe
1-1 De Madras la coloniale à Chennai, ville
indienne du XXIème siècle
Avant d'aborder les dynamiques actuelles de la métropole
qu'est devenue Chennai, un bref détour par l'histoire para»t
incontournable.
1-1-1 Un village de pêcheurs devenu capitale
Madras, en fait le diminutif employé par les
britanniques pour désigner Madraspattinam, n'est à l'origine
qu'un petit port de péche parmi tant d'autres disséminés
le long de la côte de Coromandel. A cette époque, la plupart des
villes de taille importante se trouvent à l'intérieur des terres,
comme Madurai ou Kanchipuram, qui constituent le cÏur de la culture
tamoule. Capitales d'empires, centres religieux ou plate -formes commerciales
ont au fil des siècles organisé un espace équilibré
autour de cette logique d'impulsion par l'intérieur du territoire, comme
on peut la retrouver, par ailleurs au Maroc, avec l'édification
successive des fameuses villes impériales en retrait des côtes.
C'est seulement avec l'arrivée des colons européens, portugais,
hollandais puis britanniques et francais, que l'organisation du territoire va
véritablement basculer vers les ports. Les portugais sont les premiers
à établir un comptoir dans la région, le port de Sao
Thome, dès 1522. Ils choisissent de s'établir sur les bords de la
rivière Adyar, à l'endroit méme oü l'apôtre
Saint Thomas aurait été assassiné au début de notre
ère. Ce premier établissement sera au fil des années
absorbé par la ville, et deviendra le quartier de Santhome à
Mylapore, au Sud de Chennai. Viennent ensuite les hollandais qui s'installent
à une soixantaine de kilomètres au Nord de Sao Thome, et fondent
le comptoir de Pulicat en 1609. C'est seulement quelques années plus
tard, en 1639, que Francis Day, agent de la Compagnie Britannique des Indes
Orientales jète son dévolu sur le petit port de Madraspattinam
pour y établir un comptoir. Les terres acquises au cours de cette
méme année permettent la construction du Fort Saint Georges,
siège de l'administration coloniale mais surtout véritable
cÏur historique autour duquel se constituera la ville moderne de Madras au
fil des siècles.
Rapidement, c'est par le Nord que la ville va se constituer. Le
village de Madraspattinam fusionne
avec son voisin Chennapattanam (qui
donnera finalement son nom à la ville à la fin du
XXème
siècle) pour former ce que l'on a d'abord appelé
la Ç ville noire È, l'actuelle George Town, quartier
des populations indiennes asservies par les colons. La ville
va ensuite continuer sa progression le long de la côte et de facon moins
marquée vers l'intérieur, et va successivement absorber les
villages alentours, qui sont achetés au fur et à mesure du
processus d'agglomération. C'est ainsi que Triplicane est
intégrée en 1676, suivi d'Egmore, de Purassavakkam et de
Tondiarpet en 1693, puis de Thiruvottiyur, Nungambakkam, Vyasarpady et Ennore
au milieu du XVIIIème siècle. On remarque donc que la progression
de la ville se fait d'abord principalement par le Nord, oü se
concentreront de facon toujours plus intense les activités industrielles
et ouvrières liées à l'émergence du Port. Les
populations noires occupent cette partie de la ville, tandis que les quartiers
résidentiels blancs progressent d'avantage vers le Sud, autour de noyaux
villageois existants, et qui transparaissent aujourd'hui encore dans le paysage
urbain contemporain. Cette situation particulière confère
à Madras une hétérogénéité spatiale
très marquée, qui s'exprime par l'absence d'un centreville
(Oliveau 2007). Dès les origines on constate donc l'existence d'un
espace fragmenté, constitué d'un multitude de centralités.
L'étalement en Çtâche d'huile È viendra combler les
vides au fur et à mesure de la croissance de la ville, et viendra
finalement buter contre les barrières naturelles (pour Chennai les cours
d'eau et les réservoirs naturels principalement).
C'est au XIX ème siècle que cette tendance
à une progression vers le Nord va atteindre ses limites, puisque
l'étalement y est déjà fort important. George Town est
à ce moment-là déjà très dense, et
l'accès aux marges septentrionales de la ville requiert un parcours
excédant les 10 km. Par ailleurs, les terrains s'y
révèlent de mauvaise qualité et souvent insalubres,
puisque la faible altitude les rends vulnérables aux inondations,
très courantes dans cette zone marécageuse et soumise à
l'oscillation des marées. La ville va donc s'étendre
désormais de facon privilégiée en direction du Sud et du
Sud- Ouest, le long des principaux axes de communication qui relient Chennai
aux villes majeures du Tamil Nadu qui constituent l'hinterland dont
dépend l'activité du port. La création des
premières liaisons ferroviaires à la fin du XIXème
siècle viendra accentuer le phénomène. On recherche
désormais le confort et l'espace, lors de cette nouvelle poussée
urbaine qui sera d'avantage résidentielle qu'industrielle.
1-1-2 L'évolution post-coloniale
|
1901
|
1921
|
1941
|
1961
|
1981
|
2001
|
Population (Chennai City, en millions)
|
0,54
|
0,56
|
0,87
|
1,75
|
3,29
|
4,34
|
Densité (habts/km2)
|
793
|
815
|
847
|
1357
|
1866
|
2468
|
Tableau n°1 - Evolution de la population au
XXème siècle
La population de Chennai, qui atteint le demi million
d'habitants au tournant du 20éme siècle, n'évolue que
trés peu jusqu'à l'indépendance en 1947. Au cours de cette
période, l'étendue de la ville reste contenue dans le même
périmétre, et c'est plus par une densification et par un
comblement des Ç dents creuses È que l'évolution
s'opére.
Aprés 1947, la population explose, et Chennai conquiert
sans cesse de nouveaux espaces. La creation de la CMA (Chennai Metropolitan
Area) et de son organisme de gestion, la CMDA (Chennai Metropolitan Development
Authority) en 1971, fixent un cadre administratif à cette croissance
urbaine. La logique d'une croissance par le Sud s'amplifie, et
l'amélioration des conditions de transports et d'accessibilité
dans cette partie de la ville accompagne une croissance en Ç
étoile È ou en « doigts de gant », le long des
accés privilégiés. C'est ainsi que Mount Road,
renommée en Anna Salai, devient l'artère principale de la ville,
en même temps que les voies de chemin de fer en direction de Tambaram (au
Sud Ouest) et d'Ambatur (à l'Ouest) se dotent de nouvelles gares et de
voies supplémentaires qui permettent des debits toujours plus
importants. C'est véritablement le développement de l'offre en
terme de transports collectifs qui va permettre cette nouvelle dynamique
d'écoulement vers le Sud et l'Ouest, à mesure que l'espace temps
se réduit. A partir des années 50, cette nouvelle donne va
permettre le développement de nouveaux noyaux industriels, toujours
à proximité des grands axes que l'on vient de développer,
dans les environs d'Ambatur principalement, puis dans une moindre mesure autour
de Guindy (au delà de l'Adyar, dans la partie sud d'Anna Salai).
Dans le Nord, en paralléle de la longue bande
d'urbanisation cTMtiére préexistante depuis le XVIIIéme
siècle, et là encore à proximité de la voie
ferrée, va se constituer le cÏur énergétique et
industriel lourd. Ces installations prennent place sur de nouveaux terrains
conquis sur les marais jusque-là inoccupés. La proximité
des installations portuaires permet un accés direct aux matiéres
premières, qui sont transformées sur place avant d'être
acheminées aux quatre coins du pays. Raffineries (Indian Oil, Bharat
Petroleum), cimenteries (Dalmia, Chettinad), usines metallurgiques et petro
-chimiques s'établissent dans un triangle Tondiarpet-Ennore-Manali. Au
fil du temps, et au fur et à mesure que la demande
énergétique va augmenter, Chennai va se doter de nombreuses
unites de production electrique, qui vont egalement coloniser cet espace par
lequel le charbon transite depuis le port. Les écoulements
nauséabonds, les poussiéres en forte quantité et le bruit
engendrés par cette massification et cette forte spécialisation
empêchent le développement de quartiers résidentiels. Seul
un habitat informel, et quelques essais rates d'implantation de villes
nouvelles dans les années 70 (Athipattu Pudu Nagar, Manali) viendront
combler de façon trés
partielle les interstices entre cet espace et le reste de
l'agglomération. Les transports, concentrés presque exclusivement
sur le rail, expliquent aussi en partie le manque d'attrait de cette partie
Nord de Chennai, puisqu'ils ne permettent pas une irrigation suffisante
à l'établissement d'une population importante.
Carte n°1 Ð Evolution de l'emprise spatiale de
l'agglomération 1640-2001
1-1-3 Ouverture économique et défi de la
mégapolisation
A partir de 1991, et donc de l'ouverture économique du
pays aux capitaux étrangers, l'espace Chenna
·te va encore
évoluer, se complexifier, pour donner la métropole de rang
international que l'on conna»t aujourd'hui. Dans le centre,
déjà dense (on dépasse désormais les 10.000
habts/km2 dans les quartiers de Kodambakkam, George Town ou
T-Nagar2), on construit toujours plus en hauteur, même si la
réglementation en vigueur n'autorise pas une verticalisation excessive.
Pour cette raison, et gr%oce à l'amélioration des conditions de
circulation (les autoroutes font leur apparition, les boulevards à
grandes capacité sont créés (Inner Ring Road et Chennai
Bypass), et l'on met en place une gare routière géante, la plus
grande du sous-continent indien: la CMBT, à Koyambedu), le glissement
vers le Sud et l'Ouest va s'intensifier. L'arrivée massive de
l'automobile, surtout à partir des années 2000, participe
grandement au phénomène. Dans le même temps, on assiste
à l'explosion logique du péri-urbain, oü les bourgs ruraux
en dehors de l'agglomération mais entretenant des relations
étroites avec celle -ci, vont parfois conna»tre un doublement de
leur population entre 1991 et 2001 (Chengalpet, Sriperumbudur,
Tiruvallur3).
L'arrivée massive de capitaux, par ailleurs, va
complètement bouleverser la physionomie de la ville, en participant au
redéploiement des activités et à la spécialisation
des espaces, le long de ce qu'on a appelé des ÇcorridorsÈ
de développement. Le secteur privé occupe désormais une
place prépondérante dans le processus de création de
nouveaux espaces, et le secteur public est relégué au rTMle de
facilitateur. C'est ainsi que va émerger, au cours des années
2000, un IT corridor au sud de la ville, le long d'une nouvelle voie express,
l'OMR. En l'espace de dix ans, près d'une centaine de milliers d'emplois
sont créés dans le domaine des technologies de l'information, ce
qui va impulser l'arrivée de nouvelles populations, plus
qualifiées et plus exigeantes en matière de qualité de
vie. Pour cette raison, de nouveaux quartiers sont créés,
composés essentiellement de gated communities et de
résidences de standing, toujours le long de cet IT corridor .
L'ouverture de l'East Coast Road en 2001, qui constitue un véritable
Touristic Corridor en parallèle de l'OMR, ne fera que
participer à la conquête de nouveaux espaces
résidentiels, toujours plus au Sud. Désormais, la distance qui
sépare les marges Sud de l'agglomération au cÏur de la ville
excède les 50 km, et ce n'est là qu'un début.
Mais l'émergence de ces nouveaux espaces ne concerne pas
seulement cette zone, puisque des
corridors industriels viennent
compléter la donne, le long cette fois des voies express NH 4
2 D'après documents internes - CMDA
3 Source: Census of India 2001
(Bangalore) et NH 45 (Madurai), oü de vastes usines
d'assemblage vont s'installer. Gr%oce à l'apparition du système
de Zones Economiques Spéciales, sortes de zones franches visant à
réduire les coüts de production et à fournir toutes les
facilités nécessaires à une attractivité optimale,
les entreprises étrangères vont affluer, notamment autour de
Sriperumbudur pour la NH 4 (Nokia, Saint Gobain, L&T), ou de Mahindra World
City pour la NH 45 (Ford, Renault-Nissan, Infosys...). L'ampleur de ces
nouvelles structures va nécessiter la présence d'une main
d'oeuvre qualifiée et abondante, ce qui va amener à l'explosion
de l'offre de formation. Des écoles d'ingénieur (au nombre actuel
de 250) et des universités privées vont être
créées aux quatre coins de la ville, et viendront
compléter le processus de création, en somme, de edge-cities
suivant le modèle américain.
1-2 Les enjeux d'une yille duale
1-2-1 La question des centralités
Comme on l'a largement évoqué, l'une des
principales caractéristiques de l'agglomération de Chennai repose
sur un glissement perpétuel vers le Sud, depuis presque deux
siècles. Cette situation particulière, conjuguée à
une histoire urbaine faite d'une absorption successive de bourgs pré-
existants et d'un comblement des interstices plus que d'une extension en
territoires vierges, confèrent à la ville un aspect
particulièrement intéressant. En effet, ces dynamiques ont
provoqué l'émergence d'une multitude de centralités et de
nÏuds urbains, qui laissent le centre historique en marge du rTMle naturel
qui devrait lui incomber. Cette réalité surprend le visiteur
étranger, habitué au modèle classique d'une ville
impulsée par un cÏur ancien et identifiable. A Chennai, il est
très difficile de s'orienter par rapport à un centre, tant
l'espace para»t homogène en tous points de la ville. Le centre
historique, George Town, se trouve en fait noyé dans une masse qui le
rend invisible.
D'un point de vue économique, le constat n'est pas
différent. Et même si George Town conserve un rTMle commercial,
puisqu'il s'agit d'un point de transit important entre les biens
manufacturés arrivés fra»chement par la mer et le reste de
la ville, il s'agit là du dernier aspect qui pourrait encore faire de
lui un cÏur. Mais il n'est plus qu'un quartier de grossistes,
spécialisé au même titre que d'autres, comme Koyambedu
(marché de gros pour l'alimentaire) ou T-Nagar (marché
textile).
L'ouverture récente de Chennai sur le monde n'a fait
qu'accentuer la mise à l'écart de George Town,
et il est aujourd'hui très facile d'identifier les
points chauds de la ville au travers des marqueurs de la mondialisation, qui
peuvent être considérés comme autant
d'éléments de modernité et de centralité dans une
métropole indienne. Pour mettre en évidence ce visage très
contemporain de Chennai, nous nous sommes livrés à un exercice
original, qui a consisté à cartographier ces marqueurs, que nous
détaillerons plus bas.
Carte n°2 Ð Hot-Spots de la mondialisation
à Chennai en 2011
Par le biais d'un moteur de recherche, nous avons
répertorié 4 types de lieux emblématiques de ce nouvel
aspect de Chennai :
Les centres-commerciaux tout d'abord, nouvelles vitrines du
rêve à l'occidentale,
Les enseignes de supermarchés et d'hypermarchés de
la grande distribution (Nilgiri's, Nuts n' Spices, Star Bazaar et
Big Bazaar),
Les cha»nes de restaurants et de fast-foods (Mc
Donald's, KFC, Pizza Hut, Subway, Domino's Pizza, Marrybrown, Café Coffe
Day, Barista et French Loaf),
Enfin, les principales grandes enseignes du prêt à
porter (Levi's, Reebok, Celio et Benetton). Il s'agit
là de listes non exhaustives, mais qui nous donnent une idée
générale de la situation.
On remarque tout d'abord que ces enseignes ont tendance
à se concentrer autour de pTMles bien distincts, répartis
majoritairement au sein d'un triangle Anna Nagar West - Egmore - Thiruvanmiyur.
Ces pTMles sont au nombre de 4:
Anna Nagar au Nord-Ouest, avec le centre commercial Ampa
Skywalk, Nungambakkam/Royapettah en position centrale avec les centre
commerciaux Spencer Plaza et Express Avenue
Mylapore, un peu plus au sud, avec le centre commercial Citi
Centre,
Enfin, Adyar/Thiruvanmiyur, à la limite Sud de la
municipalité.
D'autres pTMles mineurs, moins évidents à
identifier et plus nombreux, font office de relais entre ces pTMles majeurs. On
reconna»t par exemple le quartier de T-Nagar ou celui de Guindy. On
remarque aussi une tendance à la colonisation d'un espace plus vaste,
compris entre l'autoroute NH 45 et l'ECR.
Bien sür, ces marqueurs ne reflètent que les
points d'attraction propres aux classes moyennes et aisées, et il serait
maladroit de penser qu'il s'agit là de nÏuds à portée
universelle. Néanmoins, ils préfigurent le futur d'un mode de vie
qui tend à se généraliser, c'est à ce titre qu'on
peut les considérer comme les marqueurs d'une certaine idée du
<<centre-ville È. Si l'on avait ajouté à cette
représentation les sièges de grandes entreprises, les banques ou
les équipements d'agglomération (bibliothèques,
musées, lieux du pouvoir), le résultat n'aurait été
que plus flagrant (mais la carte aurait été illisible). Il est
clair que Chennai ne possède pas véritablement de centre-ville,
mais des centres-villes, compris dans un ensemble plus vaste qu'on peut
identifier sous la forme d'un triangle correspondant plus ou moins à la
moitié Sud de la ville de Chennai << intra-murros È, et qui
aurait tendance à déborder sur les marges les plus dynamiques, au
Sud là encore. Le centre historique appara»t très clairement
en marge de cet espace.
Chennai est une ville poly-nucléaire, et victime d'un
déséquilibre flagrant entre Nord et Sud. Car c'est là le
cÏur de notre travail, et il n'appara»t que de façon trop
visible sur notre représentation. Au delà d'une ligne qui
grossierement suit la Poonamale High Road, il n'y a guere que du
vide.
1-2-2 Au Nord, un espace mutant à
(re)conquérir
Le Nord de Chennai, ou North Chennai, appara»t
avant tout comme un espace méconnu, tant par la population que par la
sphere de la recherche. Pour un chenna
·te du sud, rares sont les
occasions de se rendre dans cette partie de la ville, hormis pour des raisons
professionnelles. En effet, comme on l'a vu précédemment, c'est
là que se concentrent les activités industrielles lourdes, une
partie de l'industrie mécanique (Ashok Leyland), ainsi que les
plates-formes de stockage de frêt en provenance du port de Chennai. La
population n'y cro»t que tres faiblement4, et l'emprise
spatiale des zones résidentielles n'y est encore que tres
limitée. L'essentiel de l'espace est occupé par les industries et
les espaces agricoles, même si les friches et les marais dominent encore,
du fait de la forte salinité des sols qui rend impossible leur mise en
culture. Mais avant de nous pencher plus en détail sur la situation,
il est important de fixer le cadre spatial de notre
étude.
Carte n°3 - Chennai North : cadre de
l'étude
4 5,2% d'augmentation entre 1991 et 2001, contre 20,3% pour
l'ensemble de la CMA - Census of India 2001
Nous désignerons donc par Ç North Chennai
È l'espace compris entre les eaux du Golfe du Bengale
et l'autoroute
NH 5 (Kolkata), partant des quartiers de Tondiarpet et Washermanpet pour la
limite
Sud, jusqu'aux limites Nord de la CMA. Il s'agit là d'un
espace vaste, mais encore faiblement
5
peuplé. La population n'y excède pas les 400.000
habitants en 2011. Les infrastructures routiéres accusent un retard
considerable en comparaison du reste de la ville, et ressemblent d'avantage
à ce que l'on pourrait trouver en milieu rural, surtout d'un point de
vue qualitatif. Les grands axes y sont rares, et la majorité des flux
sont concentrés le long de la cTMte sur la Ennore High Road et
la Thiruvottiyur High Road, ne pouvant supporter qu'un trafic
réduit. Plus au Nord, la Manali High Road permet de connecter
les deux axes précédents à la TPP Road (ou
Minjur High Road), construite il y a une dizaine d'années pour
permettre un accés direct au nouveau port d'Ennore. Enfin, cette TPP
Road a été récemment connectée à
l'Inner Ring Road de Chennai, grand boulevard permettant de contourner
les espaces centraux pour rallier le Sud de la ville. Toutes ces voies,
à l'exception de l'Inner Ring Road, ne permettent pas un
raccordement au réseau des bus de ville. En effet, leur encombrement et
leur étroitesse est telle qu'il leur est tout simplement impossible de
circuler. Seules quelques lignes serpentent sur les routes plus tortueuses et
assurent un service minimum (en principe un bus toutes les heures ou toutes les
deux heures), au prix de nombreuses crevaisons et accidents6. Pour
cette raison, les habitants du North Chennai circulent principalement par leur
propre moyen, ou gr%oce au systeme d'auto-rickshaw (individuels) mais surtout
de share-autos (collectifs) qui quadrillent le secteur. Les coûts s'en
trouvent bien évidemment augmentés par rapport au bus.
Néanmoins, la voie ferrée traverse le secteur,
par la cTMte, et offre une alternative plus intéressante aux voyageurs
en terme de cofit. Mais elle reste difficilement accessible aux habitants
situés à l'Ouest de la longue zone industrielle qui la longe. Par
ailleurs, les trains de voyageurs y circulent à vitesse réduite,
et les passages sont rares (un à deux passages par heure, soit une
frequence moyenne divisée par trois par rapport aux autres lignes
urbaines). Pour toutes ces raisons, il est extrêmement difficile de se
déplacer dans cette partie Nord de la ville. Et c'est là un
aspect primordial de notre etude.
1-2-3 Grands projets et espaces et mutation
Depuis les années 90, le gouvernement du Tamil Nadu a
initié la mise en place de nouvelles zones
5 Chiffre approximatif base sur des discussions avec des membres
du CMDA
6 D'apres les recits recoltes aupres de chauffeurs, sur place.
d'activités, en lien avec la creation d'un port
satellite, le port d'Ennore. En effet, avec l'explosion du trafic au cours des
années 80 et 907, le port historique de Chennai se trouve en
situation critique, et frTMle la saturation. L'espace disponible étant
limité, et les extensions par poldérisation se
révélant fort coateuses, le gouvernement decide donc de
transférer une partie des activités et donc des volumes vers une
zone oil de nouveaux aménagements puissent prendre place sans
compromettre la rentabilité. Le Sud étant déjà
fortement urbanisé, et le prix des terrains particulièrement
élevé, le choix se tourne tout naturellement vers la limite Nord
de l'agglomération, au contact direct de la North Chennai Power
Station, oil de larges parcelles de terres avaient été
acquises depuis 1991. Cependant, malgré cette situation, le cofit du
projet se révèle encore trop élevé, et l'Etat des
finances gouvernementales ne permet pas un lancement dans l'immédiat.
Pourtant, l'urgence bien réelle de la situation implique une mise
à execution rapide. C'est ainsi qu'on va decider, pour la
première fois en Inde, de faire appel à un fond d'investissement
entiérement privé, qui sera en charge de la construction, de la
gestion et de l'entretien des installations. En contrepartie, l'Etat s'engage
à fournir les infrastructures nécessaires à ce
développement : de nouvelles voies d'accés doivent être
créées, la voie ferrée sera élargie à trois
voies, et la creation de nouveaux équipements nécessaires
à la fourniture en eau et électricité sera assurée.
L'investissement de 400 millions d'euros, entiérement supporté
par des fonds privés (principalement japonais et singapouriens)
regroupés au sein d'une nouvelle compagnie, la Ennore Port Limited,
n'assurera par consequent aucun revenu direct pour le gouvernement du Tamil
Nadu. Il s'agit là d'une entité entiérement autonome.
Le port d'Ennore, initialement, a été concu
comme un port énergétique, chargé d'accueillir et de
stocker les matiéres premières nécessaires au
fonctionnement des installations électriques de la ville. Dans le
même temps, on a cherché à y concentrer le trafic de
marchandises Ç sales » et gourmandes en espace, telles que le
charbon, le pétrole, et les produits chimiques, de façon à
libérer le port de Chennai. Toute une série d'installations
annexes viendront prendre place à proximité du nouveau port,
telles que décrites dans le Infrastructure Development Plan for
Ennore Area mis en place par le CMDA en 1999 :
Une plate-forme charbonniére de stockage et d'acheminement
(ouverte en 2009)
Une nouvelle centrale électrique au charbon d'une
puissance de 1900 MW, sous partenariat public-privé (ouverture en 2012),
ainsi que le doublement de la capacité de production de la North
Chennai Power Station qui verra ainsi augmenter sa puissance pour
atteindre 2400 MW (à la fin 2011)
7 Le volume de marchandises passe de 10 millions de tonnes en
1980, à 25 millions en 1992, pour atteindre 32 millions en 1998 Ð
Source Chennai Port
Un parc pétro-chimique de grande ampleur, initié
par la Madras Fertilizers Limited et concentré sur la
production d'engrais (en construction)
Deux plateformes de stockage de produits pétroliers,
initiées par Indian Oil et la Tamil Nadu Petro Products
Limited (en partie opérationelles)
Il faut ajouter à cela la construction d'une usine de
désalinisation, décidée plus tardivement. Ouverte en 2010,
elle assure l'approvisionnement en eau potable à hauteur de 100 millions
de litres par jour, ce qui équivaut aux besoins de 2 millions
d'individus. C'est par la mise en place d'une joint venture entre
l'espagnol Befessa et l'indien IVRCL Infrastructures and Project Ltd que le
projet a pu voir le jour en 2004. Par l'utilisation de nouvelles techniques
économes en énergie, l'installation parvient à produire de
l'eau potable pour un cofit inférieur à un euro pour 1000
litres.
Au total, ces nouvelles installations couvrent une surface
supérieure à 1.200 hectares, et prennent place pour l'essentiel
sur des terrains initialement inoccupés. Les acquisitions ont
été effectuées en intégralité par le biais
de la Tamil Nadu Industrial Development Corporatio n (TIDCO), et n'ont
impliqué le déplacement que d'une cinquantaine de familles,
toutes relogées in situ par le gouvernement. Le nombre d'emplois directs
et durables générés par la création du port
d'Ennore et de ses installations annexes reste pour l'insta nt trts
limité (moins de 500), mais les extensions à venir risquent de
rapidement changer la donne. Les promesses consenties par le gouvernement en
matiére de création et d'amélioration des infrastructures
n'ont pas été tenues, et les travaux ne sont que trts
partiellement achevés. Ces retards concernent principalement les
infrastructures routiéres, et compromettent l'acces des véhicules
lourds. La zone est victime d'une congestion qui affecte non seulement
l'activité économique, mais surtout la vie des habitants. Cela
n'a que peu compromis le succés du port d'Ennore qui est aujourd'hui
classé au 12éme rang national8, et qui a permis de
libérer de l'espace sur les docks du port historique. Aujourd'hui
réorganisé, il peut continuer de cro»tre, et affiche une
belle santé puisqu'il est à ce jour le port le plus important
dans le Golfe de Bengale, et le 2éme en Inde aprés celui de
Mumbai.
Il est nécessaire de comprendre qu'à l'heure
actuelle, la mise en place du port d'Ennore et d'un certain nombre
d'installations « passives » n'a eu que peu d'impact sur les
dynamiques propres au Nord de Chennai, mis à part, bien entendu, en
terme de dégradation des conditions de transports. L'habitat,
l'infrastructure en services publics ou le marché de l'emploi n'ont pour
l'heure pas connu
8 Le trafic a atteint 12 millions de tonnes en 2011
de bouleversements notables. Cependant, les prochaines
années promettent de nombreux changements, du fait du lancement
progressif de nouveaux grands projets. Au contact direct du port d'Ennore a
déjà été entamée la construction d'un
troisieme port, le port de Kattupali. Plus ambitieux encore que son voisin, son
ouverture promet de belles retombées en terme d'emploi, et ne fera que
renforcer l'attrait de la zone pour les industriels qui
bénéficient ici d'un accés privilégié au
marché de l'exportation, à moindre cofit. Par ailleurs, le port
d'Ennore poursuit son extension, et l'ouverture de nouveaux terminaux permet
désormais le traitement des containers, ce qui le place en situation de
concurrence directe avec le port de Chennai. Les grands groupes industriels,
tels que Renault-Nissan ou Ford, ont également pour projet d'exporter
leurs véhicules via Ennore. Enfin, d'une façon plus large, on
note un net regain d'intérêt pour les espaces Nord de la ville, du
fait de la hausse accélérée des tarifs du foncier dans les
parties Sud et Ouest. Déjà, les projets immobiliers commencent
à fleurir autour de Tondiarpet ou de Washermanpet, au Sud de notre zone
d'étude, et l'amélioration prévue des
conditions de circulation conjuguée à un contrTMle accru des
rejets polluants émis par l'industrie devraient permettre de renforcer
l'attractivité de ces quartiers, oil l'espace ne manque pas.
Il para»t intéressant, dans ces conditions, de
nous pencher sur le ressenti des habitants du North Chennai à
la veille de ces profonds changements, qui devraient modifier en profondeur cet
espace aujourd'hui si particulier.
2eme Partie - Modalités d'une enquête de
terrain originale
2-1 Une cartographie participative, explications
2-1-1 Intérêt de l'approche
Avant toute chose, il convient de faire le point sur le terme
même de Ç cartographie mentale È, qui
n'est en fait
qu'un outil lié à un domaine plus large, la cartographie
participative ou participatory
mapping, et qui doit etre absolument
différencié du domaine de la cartographie mentale dans son
sens <<heuristique >>. Il est pourtant courant en
effet de nommer ainsi (<< carte mentale >>) le rendu de
l'expérience que j'ai réalisé à Chennai (Gould,
White, 1974). Pourtant, sous son sens premier, la cartographie mentale ou
heuristique ne s'applique qu'à un type bien précis d'exercice,
qui consiste à dresser en vérité un schéma des
idées, sous diverses formes de diagrammes en arborescence. L'idée
d'une carte heuristique repose sur la représentation des liens
hiérarchiques entre différents concepts, différentes
idées, de facon à les rendre plus explicites. On utilise cette
technique principalement dans la mise en forme de brainstormings,
d'exposés ou de structuration de projets. On peut aussi la rapprocher,
dans une certaine mesure, de la systémique, dans l'apparence graphique
qu'elle peut revêtir. Par conséquent, il est clair que la
cartographie mentale vue sous cet angle ne possède aucun lien avec la
cartographie au sens géographique du terme. Et le même paradoxe
existe en anglais, oü l'on utilise aussi le terme de <<mental
mapping>> indifféremment de celui de <<mind mapping
>>. Nous utiliserons donc malgré tout le terme de carte
mentale, puisqu'il n'existe aucun terme véritablement approprié,
même s'il serait plus exact de parler de carte mémorielle ou
personnelle.
Le participatory mapping, terme que l'on
hésite encore à utiliser en France, reste difficile à
définir tant il recouvre des approches différentes. La
littérature offre par conséquent une grande variété
de définitions et de termes relatifs à cette technique
d'enquête, comme la cartographie communautaire (community
mapping) ou les SIG participatifs (participatory GIS). En
règle générale cependant, la littérature
désigne le participatory mapping comme un terme
général pour la collecte et la représentation
spatialisée, auprès d'un public non-spécialiste, de
données relatives à la perception et à la pratique
d'espaces familiers (Burini, 2008). Le plus souvent, sa réalisation
requiert le concours d'organisations d'appui, notamment des gouvernements, des
ONG, des universitaires ou d'autres acteurs engagés dans le
développement et la planification. Il s'agit donc de représenter
ou plutTMt de faire représenter un type de données qui
d'ordinaire échappent à la sphère des spécialistes,
des politiques et des aménageurs. En ce sens l'optique de l'exercice
vise à une approche de type bottom - up, et s'avère
utile dans une démarche de prise de pouvoir (empowerment) et
d'implication des populations exclues du processus décisionnel qui
impacte pourtant sur leur lieu de vie.
Le participatory mapping invite donc à la
discussion, à la construction d'un consensus, dans le cadre d'une prise
de décision en lien avec les communautés et leurs re ssources.
Simplement, il fait office de consultation. C'est pour toutes ces raisons qu'on
le nomme <<participatif >>.
Les informations recueillies peuvent être ensuite
interprétées et rendues sous forme de
représentations
cartographiques qui deviennent un instrument dans la gestion du territoire.
L'intérêt
donc de ce type de cartographie s'exprime à deux
niveaux, en premier lieu comme un produit social qui révèle les
pratiques de construction de la connaissance territoriale d'une
communauté, ensuite comme un moyen de communication en mesure de
conseiller les actions de planification. Par voie de conséquence, le
processus peut influer sur les dynamiques internes d'un groupe social, en
contribuant au renforcement de sa cohésion, et en encourageant ses
membres à s'investir. Les initiatives de cartographie participative
peuvent par ailleurs jouer le rTMle de plaidoyer, dans la mesure oü elles
permettent la mise en évidence de dysfonctionnements, ou la
reconnaissance de territoires ancestraux par exemple dans le cadre de la
fixation de nouvelles frontières. Ainsi ces initiatives jouent un rTMle
d'appui envers les groupes marginalisés dans leur lutte pour la
reconnaissance de leurs droits coutumiers (particulièrement dans le cas
de populations autochtones, pastorales et forestières). La carte devient
alors une alternative à la lutte armée dans le processus
revendicatif.
Pour synthétiser, on peut dire que la cartographie
participative vise principalement à (Corbett2009) : Aider les
communautés isolées politiquement à mettre en forme et
à transmettre leur savoir spatial à des organismes
extérieurs
Permettre aux communautés de conserver et d'archiver un
savoir ancestral local
Aider les communautés à s'impliquer dans la
planification de l'utilisation de leurs terres et la gestion des ressources
Permettre aux populations d'organiser un plaidoyer, comme
Çune Çcontre-cartographieÈ Renforcer le lien social au
sein des communautés, inter -générationel notamment
Et enfin, à traiter les conflits liés aux
ressources
2-1-2 Outils et méthode
La cartographie participative est un outil relativement
nouveau, apparu pour la première fois dans les années 80, et qui
a intéressé un nombre toujours croissant de chercheurs au cours
des dernières décennies, des géographes aux
anthropologues, en passant par les ethnographes et les agronomes, mais aussi
par les consultants de diverses institutions locales et internationales, dans
les pays en développement comme dans les pays dits
développés. Elles se veut donc pluridisciplinaire. Percue comme
un instrument qui facilite le dialogue entre acteurs
hétérogènes, elle a permis la conduite de
négociations qui n'auraient pas eu lieu dans un cadre décisionnel
classique. On comprend que cette approche n'a rien de neutre, puisqu'au
contraire, elle vise à la persuasion en donnant à voir des
elements territoriaux qui font sens pour une communauté
et distille l'information de maniere à produire un message
géographique spécifique. Elle ne représente en rien une
vision fidele et objective de la réalité, et la finalité
n'est pas d'en tirer des informations exactes. Il est important de comprendre
que les cartes participatives, au contraire des cartes standard qui se veulent
conformistes, sont en fait tout le contraire, et nous emmenent parfois aux
frontieres de la psychologie tant c'est dans leur interprétation que
l'on puise l'information. Le producteur de l'information possede donc un rTMle
capital, tout autant que le commanditaire qui se doit de conna»tre en
profondeur le contexte territorial et social auquel il a affaire, même si
dans la réalité la cartographie participative est perçue
comme un bon moyen de collecte de données pour des chercheurs disposant
de peu de connaissances concernant l'aire géographique
étudiée, et de peu de temps pour comprendre les
réalités de la zone. Souvent, à ce titre, la cartographie
participative est outil particulièrement adapté au «
défrichage È d'une thématique spatialisée. Elle
explore l'inconnu et vise à créer de la connaissance.
Les outils lies à la cartographie participative sont
divers et dependent du type de rendu et d'informations que l'on souhaite
obtenir, ainsi que des moyens financiers et techniques disponibles. Parmi ces
outils, on retrouve donc (Corbett 2009) :
la cartographie mentale
la cartographie au sol
les croquis topographiques participatifs
les transects
les maquettes et la modélisation participative en
trois dimensions
Il ne s'agit là que des outils de type traditionnel,
car depuis peu, on commence à utiliser des technologies de l'information
géographique techniquement avancées, comme le GPS, les SIG, ou
les images satellite. L'éventail de ces nouveaux outils ne cesse de
s'élargir et rend possible une plus grande flexibilité et
fiabilité dans les démarches en matiere d'accompagnement aux
projets de développement.
2-2 Quels ajustements pour notre etude de cas ?
La finalité de notre etude sera de mettre en evidence
les caracteristiques spécifiques qu'ont les
habitants de notre zone
d'étude dans leur perception et leurs pratiques de la métropole
de Chennai.
Les questions de mobilité, de connectivité et
d'accessibilité, sont le cÏur et la raison d'être de notre
enquête. L'utilisation de la carte mentale devra nous
permettre, simplement, de donner un visage à un espace de vie. Pour
être lisibles, les spécificités de notre zone
d'étude devront être comparées aux réalités
vécues par les habitants d'autres quartiers, que nous
présenterons dans le paragraphe suivant. Au final, l'idée sera,
à partir des résultats obtenus, de mesurer la force des liens qui
unissent chaque quartier au reste de la ville, et de mettre en exergue
certaines discontinuités qui participent, ou pas, à la mise
à l'écart des quartiers nord de Chennai.
2-2-1 Déroulement de l'exercice
Par rapport à une cartographie participative classique,
oü la réalisation de l'exercice implique plusieurs individus, nous
nous concentrerons sur une perception personnelle et intime de l'espace. Il
sera même important de veiller à ce que le participant ne
bénéficie d'aucune aide extérieure au cours de
l'élaboration de la carte mentale. Il ne s'agira donc pas d'une
cartographie communautaire, mais d'une succession d'exercices individuels qui
une fois mis bouts à bouts pourront être le reflet d'un ressenti
global pour les habitants du quartier concerné.
Par ailleurs, là oü la cartographie participative,
en règle générale, oriente l'exercice de la cartographie
mentale en précisant les éléments qui doivent
appara»tre sur le papier, nous choisirons de ne donner aucune indication
au participant, puisque l'on recherchera avant tout la
spontanéité. Le participant, ainsi, ne fera mention que des
éléments spatiaux qui lui semblent significatifs dans sa vie
courante, des lieux qu'il a l'habitude de fréquenter et qu'il
conna»t bien.
Des indications, pourtant, il est indispensable d'en donner,
notamment lorsqu'il est question d'expliquer les raisons et les
finalités de l'enquête. Aussi, au début de chaque
interview, après les présentations, on explique l'utilité
de notre enquête et de l'intervention des locaux, le temps
nécessaire à l'exercice ainsi que ses modalités, mais on a
évite de développer sur les résultats attendus, de facon
à ne pas orienter les réponses. En tous les cas, il est
intéressant de valoriser le participant, en insistant sur le fait que la
qualité de la réalisation cartographique importe peu, et que
chaque participation nous sera utile. En effet, il est très difficile,
lors des premiers contacts, de convaincre les locaux de prendre un crayon, et
de dévoiler ainsi leurs faiblesses, d'autant qu'une large partie d'entre
eux ma»trise mal l'écriture ou le dessin. Il est clair que la
confrontation au crayon et à la feuille blanche est un
élément de stress à prendre en compte. Il est aussi
parfois compliqué de convaincre le participant de réaliser un
travail sans compensation salariale! Enfin, une autre
difficulté provient du fait que la carte, ses usages,
ses regles, appartiennent pour une partie du public au domaine de l'inconnu.
Pour toutes ces raisons, les capacités de persuasion sont soumises
à rude épreuve. A partir de ces constats, une stratégie se
doit d'être élaborée.
De maniere à faciliter l'exercice, on proposera un
éventail de solutions visant à mettre à l'aise le
participant. Pour commencer, celui-ci aura la possibilité de visualiser,
tres brievement, des exemples multiples de cartes réalisées par
d'autres, sans qu'il nÕait le temps de les parcourir en detail, ce qui
pourrait influencer ses representations. Il pourra egalement utiliser
indifféremment le tamoul de l'anglais (beaucoup des interviewés
n'osent pas dire qu'ils ne connaissent pas l'anglais et se renferment à
cause de cela, c'est pour cette raison qu'il est important de les rassurer en
leur expliquant que ce n'est pas un probleme). Ceux qui ma»trisent mal
l'écriture, quant à eux, pourront se contenter de dessiner et
d'indiquer les marqueurs spatiaux qui seront énoncés à
l'oral puis reportés sur papier par l'interprete, au fur et à
mesure de l'elaboration de la carte. La convivialité et le cTMte amical
de l'approche importent énormément, et viennent compenser
l'aspect scolaire qu'elle semble revetir de prime abord. L'énonce de
l'exercice, par ailleurs, se veut clair et objectif : Ç Dessinez,
sous forme de carte, la ville de Chennai dans son ensemble, d'apres ce que vous
en connaissez È. Pour terminer, et c'est certainement là le
point le plus important, la carte mentale n'est évoquée
qu'à la fin de l'interview, apres une longue introduction par un
questionnaire, qui en plus de jouer le rTMle de facilitateur de l'exercice,
viendra surtout le completer et surtout combler ses imperfections.
2-2-2 Un complément nécessaire
Le fait, donc, de commencer l'entretien par un questionnaire,
plus classique, permet d'ouvrir le dialogue et de plonger la personne
sondée dans le vif du sujet, ce qui facilitera, le moment venu, la
justification de l'utilisation de la cartographie mentale. Le questionnaire
fixe la thématique, en posant les questions, qui, intuitivement, doivent
refléter les elements devant logiquement transpara»tre sur la
carte. Je vous propose de visualiser ce questionnaire disponible en annexe
à la fin du mémoire. Il s'agit d'un questionnaire plutTMt court,
de façon à laisser le temps nécessaire à la
realisation de la carte. Le tout est concu pour durer une vingtaine de
minutes.
La grille de questions se decompose en 3 parties :
La première partie, classique, nous renseigne sur les
informations personnelles du
participant, mais plus important, sur son occupation, son lieu
de travail, et son ancienneté dans la région, ce qui devrait
avoir un impact sur ses perceptions et ses pratiques.
La deuxième partie se concentre sur
l'accessibilité et la mobilité. Toutes ces données, ainsi
que celles de la partie suivante, nous fournissent des renseignements à
même d'être comparés à ceux d'autres
localités, et qui mêlent le spatial au temporel. Le but de cette
deuxième partie vise tout d'abord à nous éclaircir sur
l'intensité des liens qui unissent la personne avec son environnement
extérieur, par des données de récurrence sur des parcours
habituels. Ces données nous renseignent aussi sur la qualité de
ces liens en abordant la question des facilités offertes en terme de
loisirs, de commerces, de culture, ou de services pratiques (santé,
éducation, transport s...). Elles mêlent donc le quantitatif et le
qualitatif. Par ailleurs, on aborde en parallèle la question des moyens
disponibles, en transports privés et publics, pour que des liens
puissent se mettre en place.
Enfin, la troisième partie demande plus de
réflexion de la part du participant, en l'invitant à s'exprimer
sur ses manques, ses besoins, mais aussi sur ses envies, son affectif. La
dernière question, quant à elle, nous servira à faire le
lien entre questionnaire et cartographie. Simple, elle demande cependant
beaucoup de rigueur de la part du participant, et vient compléter, et en
même temps vérifier la carte mentale.
2-2-3 Qui interroger? Cadre de l'exercice.
Pour chaque localité, au nombre de 7, on devra choisir
un échantillon de dix intervenants. Comme l'on cherche à comparer
ensuite les résultats liés à chacune de ces
localités, il est important que nos échantillons disposent d'une
même base qualitative.
En premier lieu, étant donné que notre
enquête se concentre essentiellement sur la mesure de la mobilité,
il est nécessaire d'avoir affaire à des individus
possédant le même potentiel technique pour se déplacer, et
d'une certaine facon, à des individus possédant des moyens
financiers équivalents. Dans le même temps, la répartition
des moyens de transports privés propres à nos intervenants doit
refléter la proportion de ces moyens de transports à
l'échelle régionale. Tout cela par souci d'égalisation et
d'adaptabilité des résultats. Pour chaque localité, donc,
on interrogera 1 individu possédant une automobile, 5 possédant
un deux-roues motorisé, et 4 ne possédant qu'un vélo, ou
rien du tout. Ensuite, la question de l'%oge est elle aussi primordiale,
partant du principe que l'%oge influe sur la volonté, la capacité
et la nécessité de se déplacer. Par conséquent, on
préfèrera faire intervenir des actifs et des jeunes en %oge de se
déplacer librement, ce qui devra nous donner une
moyenne d'%oge par échantillon comprise entre 30 et 40 ans
(entre 32 et 39 ans en réalité une fois l'enquête
achevée).
La question de l'équilibre dans le genre des
intervenants, que j'avais envisagé au départ, n'est pas sans
soulever quelques problèmes. En effet, au commencement de
l'enquête j'avais fait le choix d'interroger équitablement (50%)
hommes et femmes. Puis très vite est apparue une évidence: les
femmes se déplaçaient peu, ou en tout cas beaucoup moins que les
hommes, ce qui rendait nul, dans près d'un cas sur deux, les
résultats de l'enquête. Sur un échantillon plus large, cela
n'aurait pas posé de problème, et l'on aurait même pu
comparer les différentes tendances entre hommes et femmes, mais sur un
échantillon de 10 personnes seulement, l'efficacité de la
démarche de notre enquête s'est trouvée fortement
compromise. Ce constat reste cependant à nuancer, ca r le
véritable problème, en réalité, repose plus sur le
fait de l'exclusion de ces femmes de la sphère professionnelle, que sur
le fait du genre, et particulièrement dans les quartiers nord, plus
pauvres, par lesquels mon enquête a commencé. Il est probable que
la situation diffère significativement en fonction de la zone
étudiée. Toujours est-il qu'après avoir
réalisé les 20 premières interviews, nous avons donc
décidé avec mon interprète, non sans regret, de nous
concentrer uniquement sur les hommes, ce qui nous a du même coup
contraint à nous rendre de nouveau dans les premières
localités sondées.
2-2-4 Quelles localités pour une lisibilité
optimale?
Carte n°4 : Répartition des localités
de l'étude
Comme on peut le voir sur la carte ci-dessus, on a
donné la priorité au nord Chennai, puisque notre but, je le
rappelle, sera de mettre en avant les spécificités de cet espace
singulier par rapport au reste de la ville. Dans le même temps, si l'on
choisit 3 localités au sein de cet espace, c'est pour pouvoir en tirer
des régularités, des points communs qui nous permettent de
l'identifier potentiellement comme un espace homogène. Avant de me
lancer dans l'enquête de terrain, j'avais déjà parcouru la
zone à plusieurs reprises, ce qui m'avait permis d'identifier lieux.
Toutes les trois ont attiré mon attention car elles m'ont paru, chacune
à leur facon, représentatives du Ç north chennai
È.
Athipattu Pudu Nagar, la localité la plus
septentrionale, est aussi la plus proche de la zone d'activités
émergente, autour des ports d'Ennore et de Kattupali.
Il s'agit d'une ville nouvelle établie dans les années 70 autour
d'une nouvelle gare construite sur la voie ferrée reliant Chennai
à Kolkata. Cernée de toutes part par les chantiers, elle se
trouve au cÏur d'un espace en mutation rapide, il sera donc
intéressant de nous pencher sur la situation de ses habitants à
la veille de grands bouleversements.
Manali New Town, elle aussi, semble être au
cÏur des enjeux liés au redéploiement industrialo- portuaire
qui se prépare, puisqu'elle est traversée par la TTK road, qui
constitue la voie d'accès privilégiée aux nouveaux
terminaux portuaires, mais aussi au port historique de Chennai en
journée, lorsque la circulation des containers est prohibée
partout ailleurs. Congestionnée en permanence depuis des années,
on peut supposer que la situation de cette route, la seule permettant
d'irriguer Manali New Town, compromet fortement l'accessibilité
au lieu.
A Sekkadu, la situation est quelque peu
différente. Adossée à l'énorme complexe
pétro-chimique de Manali, cette localité para»t
tout à fait représentative des espaces anciennement
industrialisés. Les accès y sont particulièrement
limités et en très mauvais état, l'empreinte agricole y
est encore très présente, et malgré une situation
géographique qui la rapproche du cÏur de Chennai, on a du mal
à y ressentir l' Ç urbain È.
Les localités suivantes ont été
sélectionnées de facon à être représentatives
de réalités communes au tout Chennai, plus proches d'une certaine
Çnormalité È, si l'on peut dire. Les trois
premières appartiennent à la couronne péri-urbaine, comme
nos trois localités au nord, ce qui est indispensable pour une
comparaison équilibrée. La dernière, à contrario,
se situe en plein cÏur du triangle qui constitue le centre
économique de Chennai, à proximité des zones les plus
dynamiques et les mieux
dotées en infrastructures et facilités. Ce choix
para»t nécessaire si l'on souhaite faire ressortir des tendances
propres au péri-urbain.
Mogappair West, pourtant très à l'ouest
comme son nom l'indique, n'en appartient pas moins à la moitié
nord de la ville si l'on s'en tient à une division par la Poonamalle
High Road et l'autoroute NH4. C'est cette situation sur un espace
potentiellement de transition qui nous intéresse.
Tambaram est une ville satellite en pleine expansion
(mais son cas ne fait que refléter une situation plus
générale pour les localités situées au sud-est, le
long de la NH45), et para»t particulièrement bien
connectée au centre-ville et aux espaces périphériques,
par le rail comme par la route.
Sholinganallur ou Shozinganallur,
située entre l'ECR et l'OMR ou IT
Expressway, est quant à elle la localité la plus
ÇneuveÈ de notre sélection, puisque son
développement très récent est entièrement
lié à l'émergence du corridor technologique ou IT
Corridor.
Teynampet, enfin, comme on l'a expliqué, fait
partie des quartiers les plus centraux, et constitue notre point de comparaison
entre centre et périphérie.
3ème Partie Ð North Chennai de
l'intérieur
3-1 Du spatial au mental
Pour chaque localité, il s'agira principalement de
dégager des grandes tendances, qui donneront du sens aux cartes mentales
que nous avons récolté sur le terrain. Pour cela, on tentera de
lire le subjectif, reflété par l'utilisation de figurés
particuliers, la mention récurrente de certains lieux, la forme
générale de ces cartes, la richesse de celles-ci, ainsi que les
limites et les discontinuités qui pourront éventuellement en
ressortir. Il s'agit véritablement d'un travail d'interprétation,
plus lié à la psychologie qu'à des critères de
mesures cartésiens et établis scientifiquement. Hors, comme je ne
peux prétendre à la ma»trise de la psychologie, l'analyse de
ces résultats n'engage donc que mon propre jugement.
A partir de ces observations et de ces interprétations,
on tentera de mettre en avant, pour chaque
localité, une typologie qui lui sera propre, et qui nous
permettra de synthétiser nos observations pour faciliter, ensuite, leur
comparaison.
Athipattu Pudu Nagar
Ici, les figurés de type linéaire dominent
largement, et représentent les liens entre des localités, des
pTMles d'attractivité comme les établissements industriels ou les
écoles, sans qu'on puisse en déterminer la nature (rail ou route)
directement sur la carte. Dans 90% des cas, c'est donc en recoupant les
données obtenues avec google map qu'on parvient par
déduction à en déterminer la nature, ou à partir
des récits explicatifs des participants au moment de la
réalisation, notés sur un carnet séparé. Mais ces
linéaires ne correspondent pas forcément à des voies
précises de communication, mais parfois plus simplement à des
directions empruntées, comme des couloirs de mobilité. Ces
constats seront récurrents pour toutes nos localités.
Pour Athipattu , donc, le lien qui ressort de
façon la plus récurrente est celui reliant notre localité
à la gare centrale de Chennai, la voie ferrée. Elle appara»t
souvent comme une « colonne vertébrale » sur nos cartes, et
exprime donc un lien trts fort avec le centre (historique) de la ville. Par
ailleurs, on remarque dans 40% des cas une bipolarité tres nette entre
d'une part, les localités au contact direct d'Athipattu (Minjur,
Pooneri, Ennore, Manali New Town), et celles qui représentent les
pTMles d'attractivité en centre-ville (avec, en tête,
Central Station, George Town, Egmore Station, Anna Salai, T-Nagar ou Koyambedu
Market). Entre les deux, souvent, rien. On peut donc dire que la voie
ferrée provoque tres clairement un « effet tunnel » entre les
deux pTMles principaux. En réalité, cette voie ferrée
appara»t comme un véritable cordon ombilical, reliant
Athipattu aux zones d'approvisionnement.
En dehors de ce type de cartes, on note une assez grande
confusion, un aspect particuliérement désorganisé dans la
représentation. Parfois même, les liens manquent et donnent une
impression de morcellement de l'espace, et mettent en avant des zones plus
inaccessibles. Cette remarque concerne surtout les espaces situés au
nord, entre Athipattu et le centre-ville.
Si l'on devait marquer les limites pour cette série de
cartes mentales, on pourrait les fixer, pour le nord à Pooneri
(au delà des limites de la CMA mais proche d'Athipattu), pour
le sud à Anna Salai et T-Nagar (donc le cÏur
économique de Chennai). A l'ouest, la limite atteint le réservoir
de RedHills. Par ailleurs, à l'inverse de ce qu'on remarquera
pour les localités du sud, le lieu de vie est placé au
en périphérie de la carte, et le place en situation
de « cul de sac ».
Enfin, ce qui doit nous frapper dans cette première
série de cartes mentales, c'est surtout l'aspect ramassé et
minimaliste de la majorité de nos représentations, les lieux
mentionnés et les connexions étant souvent peu nombreux. C'est
d'ailleurs Athipattu qui posséde le plus faible score en terme
d'éléments mentionnés (on comparera les données
quantitatives dans la partie suivante).
On obtient au final une typologie à deux formes dominantes
:
En étoile double Minimaliste
Ce que l'on doit retenir pour cette première
localité :
Une predominance de la voie ferrée Ð Une
forte polarisation vers le centre-ville Ð Un aspect souvent ramassé
qui peut traduire l'enfermement Ð Une absence des espaces Ç nord
È en dehors des localités adjacentes.
Manali New Town
Les cartes mentales issues de cette localité se
caractérisent en premier lieu par une trés grande
variété des représentations et des lieux
mentionnés, au contraire d'Athipattu ou de grandes tendances
pouvaient etre dégagées. Ici, c'est particuliérement
délicat.
Les liens et connexions se révélent souvent
tortueux et confus, et l'orientation est souvent inexacte. Le trait manque de
franchise. On perçoit une plus grande difficulté à rallier
les points extérieurs, et on est frappé par les détours
qui apparaissent pour relier des localités pourtant proches les unes des
autres. On a ici le seul exemple d'une représentation oil la
localité étudiée, donc le lieu de vie, n'appara»t pas
du tout, comme si elle n'appartenait pas à Chennai. Une autre
représente Manali New Town dans un rectangle, sans liens avec
les points extérieurs.
Par ailleurs, on remarque que les localités
reliées par le nord à Manali N.T se retrouvent de
maniere récurrente, alors qu'au sud, elles sont presque toujours
différentes. La localisation de notre localité sur la carte,
enfin, est très aléatoire, au contraire d'Athipattu
qu'on retrouvait souvent en position de cul de sac, à
l'extrémité nord.
Ces observations nous donnent une forte impression
d'isolement, et de mauvaise connaissance de l'espace de l'agglomération.
Etant donnée la variété des représentations, il est
impossible de faire ressortir une typologie.
Ce que l'on doit retenir :
Une forte confusion qui révèle une
pratique limitée de l'espace métropolitain - Des choix
représentatifs qui suggèrent l'enfermement - Des tracés
tortueux et des détours qui semblent signifier une mauvaise
connectivité.
Sekkadu
C'est pour cette localité que l'on retrouve les
exemples des plus pauvres et les moins aboutis de toute nos séries.
L'exercice de cartographie s'est révélé particulierement
difficile. On retrouve ici beaucoup d'exemples de cartes en « points
solitaires », c'est à dire sans aucuns liens entre eux, et en
étoile simple, pourvue seulement de directions, sans bifurcations ni
embranchements, ce qui laisse supposer une faible connaissance du
réseau, ou peut être la prédominance de l'utilisation de
transports collectifs donc passifs pour se rendre à
l'extérieur.
Là encore, aucune voie n'est nommée, comme
c'était le cas pour nos localités précédentes (ce
que j'avais omis de préciser), ce qui exprime sans doute un acces
difficile et chaotique aux axes principaux de la ville. La
désorganisation est encore une fois tres marquée.
Peu d'éléments « centraux » sont
mentionnés, ou lorsqu'ils le sont, les liens de Sekkadu vers le
centre de Chennai impliquent des contournements, généralement par
le Nord, l'Ouest, ou bien par le Nord-Est, comme si un obstacle majeur
compromettait les liens directs. En vérité, c'est l'inexistence
pure et simple de voies d'acces par le Sud qui explique ces
représentations. L'écart entre les distances géographiques
et les distances effectives para»t considérable et transpara»t
dans les représentations.
On observe par ailleurs la forte récurrence des
éléments spatiaux industriels dans les cartes
obtenues, qui paraissent même barrer l'espace
à l'Est, puisque derrière eux, plus rien.
Enfin, on retrouve
des representations en Ç étoiles doubles
È, Sekkadu se trouvant au cÏur d'une des deux. Mais
là oil le centre de Chennai apparaissait au cÏur de la seconde
pour Athipattu, ici, on retrouve des localités situées
plus au nord, et qui font office de hub pour rejoindre d'autres parties de la
ville.
Ci-dessous, les formes dominantes que l'on retrouve de
façon récurrente pour notre localité :
Minimaliste
Points solitaires
Etoile simple Etoile double
Ce que l'on doit retenir :
Une impression d'enfermement largement dominante, surtout
par rapport aux espaces centraux et au Sud.
Mogappair West
Une polarisation trés nette appara»t ici vers le
centre-ville par Poonamale High Road via le quartier
d'Anna
Nagar, ainsi qu'une polarisation plus diffuse de part et d'autre de
l'Inner Ring Road jusqu'à
Guindy et
Tambaram. La gare routiére de Koyambedu appara»t de
façon systématique sur la
majorité des cartes mentales, et semble faire partie
des éléments structuraux puissants, à tel point qu'il est
même parfois placé au centre de la carte tant les
déplacements semblent conditionnés par ce nÏud.
Mogappair, en contrepartie, est souvent représentée sur
les marges extérieures de la carte.
On observe ici les premiers exemples de hiérarchisation
dans les voies de communication (elles sont représentées de facon
plus ou moins large), avec des figurés ponctuels, des dessins, qui
amènent plus de précision.
Le tout se révèle plus facile à
comprendre et à interpréter, d'autant que l'orientation est
souvent correcte. En recoupant toutes les informations, on obtient une vision
relativement large de l'agglomération, mais on observe dans le
méme temps une disparition totale du Nord. Les intersections, les
ramifications sont plus présentes, et révèlent une
meilleure connaissance du réseau.
Formes dominantes:
Axe central
|
Plan schématique,
avec hiérarchisation
|
Ce que l'on doit retenir:
Le Nord de l'agglomération dispara»t
totalement des cartes - Le style se veut plus précis et permet
l'émergence de grands axes de communication - On percoit une plus grande
facilité dans les déplacements.
Tambaram
Très nettement, on voit ici la richesse des transports
disponibles, et des voies d'accès qui confèrent à
Tambaram une qualité de hub. Les cartes sont riches et
complexes, les routes sont nommées, les
figurés variés.
La voie ferrée et l'autoroute NH 45 apparaissent de
façon claire sur la majorité des cartes, et font office de
colonne vertébrale. Les autres grands axes sont aussi présents,
mais de façon moins récurrente. Il est très difficile de
faire ressortir des Çpoints chaudsÈ tant la variété
des lieux est importante. Ce que l'on observe malgré tout, c'est la
prédominance de la périphérie, les franges Ouest,
Sud-Ouest et Sud dominant largement l'ensemble, ainsi qu'une percée vers
le centre-ville par Anna Salai, voie d'accès
privilégiée. Là encore, les localités du Nord sont
inexistantes.
Les déplacements semblent conditionnés en grande
partie par la voie ferrée, qui relie Tambaram à la gare
d'Egmore, tant les localités traversées par celle-ci
transparaissent très clairement sur la majorité des cartes.
A trop vouloir en mettre, cependant, les participants ont
tendance à négliger l'orientation, ce qui donne souvent une
impression assez confuse.
Enfin, on retrouve deux cartes (sur un total de 10, je le
rappelle) à très grande échelle, oü Chennai se
résume pratiquement à la seule localité de Tambaram.
On retrouvera de nouveau ce phénomène plus tard, à
Teynampet . Cela peut para»tre étonnant, mais c'est
vraisemblablement la profusion et la variété de l'offre
présente sur place qui semble expliquer un certain enfermement, mais
conséquence de l'absence de nécessité de se
déplacer loin pour satisfaire à ses besoins (c'est du moins ce
que j'ai conclu d'après le discours explicatifs des participants
concernés).
Formes dominantes:
Complexe En réseau de linéaires En
stations
Ce que l'on doit retenir:
Les styles deviennent plus complexes, et on gagne
encore en précision - L'espace pratiqué s'élargit et
s'enrichit, même si ponctuellement, on note un resserrement, reflet d'une
autosuffisance -
Sholinganallur
Tout logiquement, l'ECR et l'OMR dominent
les représentations et font office de colonne vertébrales. Les
limites Nord s'arrêtent souvent au sud du triangle qui constitue le
centre-ville, autour d'Adyar et de Thiruvanmiyur, et le
cÏur de Chennai est peu représenté.
Les lieux mentionnés apparaissent de facon très
récurrente, surtout de part et d'autre des grandes
pénétrantes (ECR/OMR).
On a la sensation, comme pour Tambaram, d'une
périphérie qui se suffit à elle-méme, à
l'inverse d'Athipattu, par exemple, qui semble dépendre
totalement du centre.
Ce qui frappe, par ailleurs, c'est la qualité des
cartes, dans leur orientation comme dans leur exactitude. Elles se ressemblent
énormément. Les linéaires se coupent souvent à
angle droit, et le tout forme un ensemble très
géométrique, et facilement compréhensible. Les cartes en
ÇH È et en plan schématique dominent largement.
Formes dominantes :
|
|
|
En croix ramifiée
|
En "H"
|
Plan en "H"
|
Ce que l'on doit retenir:
Un aspect particulièrement schématique
reflet d'une perception clarifiée de l'espace - Une auto-suffisance par
rapport au centre-vile -
Teynampet
On retrouve ici les cartes les moins étendues dans
l'espace métropolitain, très resserrées sur le
centre.
Les voies de circulation sont larges, nommées, et les choix
représentatifs privilégient le plan.
Elles recouvrent
d'avantage l'idée de couloirs que de liens les indications se
trouvant
majoritairement sur la voie elle-même.
Anna Salai, ainsi que la plage de Marina Beach
, font office de colonnes vertébrales de façon
réguliére. Le long de celles -ci, on observe une grande precision
dans les intersections. Les liens vers la périphérie sont
simplement suggérés, par des directions à
l'extrémité des axes mentionnés.
De ces cartes ressortent surtout les points chauds compris
à l'intérieur du triangle du centre-ville. Une faible
mobilité vers les franges périphériques transpara»t
donc trts clairement. Le Nord est ignore, et là oil des directions sont
mentionnées à l'issue des voies en direction du Sud ou de
l'Ouest, les voies buttent souvent sur George Town et forment un cul
de sac pour le Nord.
Les cartes issues de cette série se ressemblent
particuliérement, dans le style comme dans l'échelle et les lieux
représentés. Peut-être qu'une meilleure connaissance de la
cartographie et un meilleur niveau d'éducation influent sur ces
similitudes, et n'ont pas nécessairement un rapport direct avec la
perception de l'espace.
Formes dominantes :
|
|
En plan schematique, avec hierarchisation
|
Complexe
|
Ce que l'on doit retenir :
Une disparition presque totale des espaces
périphériques, donc une étroitesse de l'espace
pratiqué - Une précision inégalée et un aspect
global particulièrement ressemblant -
Conclusions - Observations générales
Il appara»t difficile, j'en suis conscient, de se faire
une idée des cartes récoltées sur le terrain à
partir de toutes ces observations. Aussi, j'espére avoir ete
suffisamment clair dans mes explications pour que vous puissiez vous rendre
compte de certaines réalités evidentes qui peuvent
transpara»tre par le biais de ces cartes mentales. A l'issue de ces
premières observations, faisons un point rapide sur les
grandes idées utiles pour la suite de notre
exposé.
Pour commencer, on remarque que malgré la
variété des représentations, il est possible d'observer
des similitudes profondes au sein de chaque localité. C'est bien
là le signe d'un lien très fort entre lieu de vie et
représentation mentale de l'espace. Ainsi, pour nos trois
localités du Nord, Athipattu Pudu Nagar, Manali New Town et
Sekkadu, on ne peut que constater un manque de précision, qui
transpara»t majoritairement à travers l'utilisation
privilégiée de représentations en Çétoile
È. On a une idée de ce qui nous entoure et des directions, sans
avoir la capacité de le situer précisément dans l'espace,
dans un ordre précis, et le long de voies de communications que l'on
peut nommer. Cela vient s'ajouter au nombre relativement faible
d'éléments mentionnés et à un aspect mettant en
avant des discontinuités majeures, lisibles à travers les
coupures, les culs de sacs, les zones blanches et les contournements nombreux.
On percoit un enclavement relatif, surtout pour Manali New Town et
Sekkadu, qui souffrent d'un accès difficile aux autres parties
de la ville du fait de l'encombrement, de l'absence ou de la mauvaise
qualité du réseau disponible. Athipattu, par un
accès privilégié à la voie ferrée,
para»t moins isolée, mais entièrement dépendante de
ce moyen de transport, pas toujours efficace (la fréquence des trains y
est très critique, du fait du manque de voies et de l'augmentation du
trafic de frêt). En tous les cas, si l'on compare les résultats de
ces trois premières localités aux suivantes, donc au Grand
Chennai, le constat ne fait qu'être renforcé, et le Nord fait
véritablement figure d'espace marginalisé, puisqu'il
dispara»t de facon radicale de l'espace métropolitain. L'absence
d'axes pénétrants ou contournants, clairement, participent
à son enclavement et à son enfermement.
Les apports du questionnaire, que nous allons
développer dans le paragraphe suivant, doivent nous permettre de
compléter et confirmer nos observations.
3-2 De la donnée au spatial
Avant de nous pencher sur ces résultats, il est
important de rappeler l'étroitesse de nos échantillons, qui nous
amène à relativiser nos résultats. En effet, avec
seulement dix individus pour chacune de nos localités, il serait
maladroit de penser que les données récoltées sont le
reflet exact de la réalité. Une étude plus large et plus
approfondie nous aurait permis de gagner en légitimité, mais
néanmoins, comme nous allons le voir, les résultats issus des
questionnaires se révèlent être un complément
efficace à même de préciser notre perception du Nord de
Chennai.
3-2-1 Nébuleuses de fréquentation
Pour faire un lien direct avec la cartographie mentale, nous
commencerons par analyser les résultats issus de la toute
dernière catégorie de notre questionnaire. On a compilé
pour chaque localité la totalité des lieux
fréquentés par nos participants au cours du mois
précédent notre enquête, qu'on a pu ensuite
transférer sur une carte gr%oce à logiciel de cartomatique. Le
rendu de cette expérience prend la forme de Ç nébuleuses
È, plus ou moins étirées, plus ou moins denses, et nous
renseigne sur les points d'attraction propres à chacune de nos 7
entités spatiales, et dans le même temps sur l'intensité
des échanges avec l'extérieur. (voir page suivante)
Carte n°5 - Nébuleuses de
fréquentation
41
Sur la page de gauche, on reconna»t nos localités
représentatives du ÇSud È et du grand Chennai,
confrontées à nos localités Nord sur la page de droite. La
vue de ce document ne nécessite que peu de commentaires, tant les
constats paraissent évidents. Il est clair que les nébuleuses
Nord comportent tout d'abord un nombre
de points beaucoup moins important que celles du Sud et du
grand Chennai. On obtient une moyenne de 19 points au Nord, contre 32 au Sud.
Il est intéressant par ailleurs de remarquer que les observations issues
de nos cartes mentales ressortent de facon évidente sur les cartes dont
on dispose ici. Pour Athippatu, par exemple, on repère l'impact
de la voie ferrée (le long de la côte et vers le Nord-Ouest), pour
Teynampet un resserrement sur le centre uniquement, pour Mogappair une
percée vers le centre de part et d'autre de la Poonamalle High Road,
ou encore une importance marquée de la zone
périphérique pour Tambaram et Sholinganallur.
La fréquentation de l'espace Nord, compris entre l'autoroute NH 5
et la mer, se révèle pratiquement nul pour toutes nos
localités.
On remarque l'émergence de points qui ressortent de
facon systématique pour toutes nos localités, et qu'on peut
considérer comme les points de passage obligés, à savoir
Parrys Corner (le quartier des grossistes), la gare routière de
Koyambedu, la plage de Marina Beach et enfin le
centre-commercial Spencer Plaza.
Néanmoins, ce qui doit surtout nous intéresser
dans ces représentations, c'est le retrait très marqué du
Nord en terme de mobilité effective, et sa dépendance très
forte au centre-ville. Avec nos cartes mentales, ces représentations en
nébuleuses viennent confirmer les spécificités
supposées de notre zone d'étude.
3-2-2 Des données quantitatives
précieuses
On a ici compilé toutes les données liées
à la mobilité au sens large. A partir de celles-ci
(hors
distance Domicile/Travail), on propose un Ç coefficient de
mobilité È, qui repose simplement sur le
calcul de la moyenne de ces résultats. Attention
cependant, la valeur affichée pour Teynampet doit être
manipulée avec précaution, en raison des résultats nuls
obtenus dans deux catégories, du fait de sa situation
géographique en centre-ville. En réalité Teynampet
devrait obtenir le coefficient de mobilité le plus fort si l'on ne
tenait pas compte de ces deux colonnes.
Point par point, on note d'abord que la distance entre le
domicile et le lieu de travail (il s'agit, comme pour le reste de la moyenne
sur chaque localité) ne semble en rien représentative de
tendances spécifiques. La fréquence de la mobilité vers le
centre-ville non plus. Il aurait fallu interroger un échantillon plus
large pour pouvoir tirer des conclusions.
La fréquence des déplacements
intra-agglomération du Nord vers le Sud, et inversement du Sud vers le
Nord révèlent une très faible intensité des
rapports, si on les compare aux déplacements en direction du
centre-ville. On note cependant un attrait plus important du Sud (pour le
Nord), que du Nord (pour le Sud), ce qui reflète tout à fait nos
observations liées aux cartes mentales.
Les tendances à l'observation des fréquences des
déplacements hors de l'agglomération et hors du Tamil Nadu, quant
à eux, se révèlent particulièrement similaires. Le
Nord accuse des scores en retrait par rapport, notamment, à
Teynampet et à Tambaram , oü ce type de
mobilité appara»t comme particulièrement intense.
Sekkadu, qui paraissait pourtant fortement enclavée par le
biais des cartes mentales, obtient des scores tout à fait
étonnants dans ces deux séries, équivalents à
Mogappair ou Sholinganallur. Ce qui nous conforte dans
l'idée que les résultats liés à la cartographie
mentale restent à nuancer. Par ailleurs, la mobilité hors
agglomération et hors Tamil Nadu n'est pas seulement liée
à la qualité du réseau de tran sports, mais aussi et
surtout à une question de moyens. Hors, comme on a pris soin
d'équilibrer nos échantillons sur ce plan, il n'est pas
étonnant de se retrouver face à une telle situation.
Plus surprenant, dans la série suivante qui concerne le
nombre d'entrées (oü d'éléments figurant) sur nos
cartes mentales, les habitants de Manali New Town paraissent aussi
prolifiques que ceux des localités du Sud. Cependant, si l'on se
remémore les caractéristiques des cartes obtenues pour cette
localité, on avait noté une très grande confusion,
beaucoup de détours et de discontinuités. Plus que le nombre
d'entrées sur une carte mentale, ce sont d'avantage les
éléments qualitatifs qui restent significatifs. Malgré
tout, les localités du Nord restent en retrait, de manière plus
générale, par rapport à celles du Sud, notamment
Teynampet et Tambaram, qui dominent encore largement.
Pour notre dernière série, la tendance para»t
plus nette, et les déplacements des Çgens du NordÈ se
caractérisent par une plus faible variété des lieux
visités.
Enfin, la création de notre coefficient de
mobilité vient gommer les inégalités et exceptions que
l'on a pu noter, et vient confirmer la tendance classique d'un Nord en retrait
sur le plan de la mobilité. Le cas de Moggappair, pourtant,
révèle une tendance semblable à celle du Nord. Finalement,
on peut dire que la mesure quantitative de la mobilité s'avère
très problématique, et imparfaite. Heureusement, les
données suivantes vont nous permettre d'affiner nos observations.
On insiste ici d'avantage sur la qualité de vie que sur
la mobilité. Il s'agit de mettre en avant l'intégration plus ou
moins marquée dans un système urbain moderne, à travers la
fréquentation de lieux représentatifs, et la perception
qualitative de l'offre dans les domaines de la santé et de
l'éducation. Le mixage de ces données nous permet de créer
un Çcoefficient d'urbanité È, représentatif de
l'intensité de cette immersion.
Le cinéma, très populaire à Chennai,
n'est visiblement pas accessible à tous. Partant toujours du principe
que les personnes issues de nos échantillons disposent de moyens
financiers identiques, on peut clairement énoncer que les habitants du
Nord de la ville fréquentent beaucoup moins ce type de lieux. Si l'on
considère que l'attrait pour le cinéma est comparable en tous
points de la ville, ce faible niveau de fréquentation ne peut
s'expliquer que par une accessibilité difficile.
Le constat est sensiblement identique pour la
fréquentation des restaurants, des centrecommerciaux, et des lieux
dédiés aux loisirs et à la culture (musées,
concerts, expositions, parcs d'attraction...etc), même si l'on note,
comme pour les séries précédentes, quelques
irrégularités de facon très ponctuelle. L'intensité
de la fréquentation des supermarchés, qu'on doit d'avantage
relier à une question pratique qu'au domaine du plaisir, reflète
une même réalité: le Nord reste très en retrait, et
on doute fortement de son intégration dans un mode de vie moderne, qui
semble être acquis, en partie tout du moins, pour le reste de Chennai.
Par ailleurs, lorsque les participants sont amenés
à se prononcer sur la qualité des infrastructures accessibles
dans les domaines de la Santé et de l'Education, l'écart se
creuse de nouveau entre le Nord et le reste de la ville. Ces constats, j'ai pu
y etre confronts par moi -même lors des déplacements sur le
terrain, et je ne peux que les confirmer. Les écoles, hormis les
écoles primaires, sont quasi-absentes du paysage du Nord de la ville.
L'acces à des niveaux College et Lycée implique des
déplacements sur de longues distances, comme ce pourrait etre le cas
dans un cadre rural. Parfois, d'après les témoignages recueillis,
plusieurs heures sont nécessaires aux étudiants pour rallier leur
établissement, le matin, puis le soir. Il existe bien quelques
établissements privés, mais de par leur nature, il ne sont
accessibles évidemment qu'à une partie de la population. La
situation est comparable sur le plan de la Santé, oil seuls de petits
dispensaires publics et quelques cliniques privées existent.
Les chiffres révélés par notre
coefficient d'urbanité, finalement, apparaissent comme la consequence
directe et attendue de l'enclavement mis en evidence jusque-là. Les
spécificités de ce Ç Nord È de la ville se
précisent. Le document suivant nous renseigne quant à lui sur les
besoins exprimés par les habitants, et se propose de faire ressortir
quelques priorités, telles qu'elles devraient etre prises en compte par
les politiques et les aménageurs. Il a été realise
à partir des réponses obtenues à la question n du
questionnaire (Si vous aviez le pouvoir d'améliorer votre quartier, dans
quels domaines agiriez-vous?).
3-2-3 Des données qualitatives qui laissent la
parole aux participants
Encore une fois, Athipattu Pudu Nagar, Manali New Town
et Sekkadu se distinguent des autres localités. Le nombre
de requêtes y est nettement plus important, et les priorités y
sont particulières. De facon logique, c'est le domaine des transports et
de l'accessibilité qui domine, puisqu'il concerne environ la
moitié des requêtes propres à ces trois localités.
Viennent ensuite l'accès à l'eau et à
l'électricité, suivi de l'accès aux soins et de la
question du drainage et de l'assainissement, qui appara»t de facon moins
significative. Par ailleurs, l'accès à l'éducation,
même s'il n'est pas percu comme une priorité, n'appara»t que
dans le cas de nos trois premières localités, ce qui concorde
tout à fait avec nos observations précédentes.
Le profil de Mogappair, de nouveau, fait office de
transition, ce qui justifie d'autant plus notre idée de
séparation Nord/Sud. Ce que l'on doit remarquer par ailleurs, c'est la
différenciation entre les priorités. A Teynampet et
Tambaram, le nombre de catégories se trouve réduit, et
la question de la qualité de l'environnement et la propreté sont
clairement la préoccupation majeure, là oü cette
catégorie reste très largement minoritaire pour les autres
localités. Les transports et l'accessibilité persistent, mais si
l'on entre dans le détail des questionnaires, les requêtes sont
d'un tout autre niveau. Là oü les idées restent basiques
pour le Nord (construction de nouvelles routes, meilleur entretien), on
évoque ici le métro, les passerelles pour piétons, et les
flyovers.
3-2-4 Quel lieu de vie rêvé?
Je passerai rapidement sur la question des quartiers que les
participants privilégieraient pour une installation future, dans la
mesure oü il est très difficile d'interpréter les
résultats à l'échelle d'une localité propre. En
revanche, si l'on considère l'ensemble de nos résultats, le
constat est très parlant.
Quartier
|
Récurrence
|
Anna Nagar
|
11
|
ECR
|
9
|
Adyar - Besant Nagar - Thiruvanmiyur
|
6
|
Centre-ville
|
4
|
Hors de la ville
|
4
|
Guindy
|
2
|
Velachery
|
1
|
Prefère son quartier actuel
|
33
|
On constate ici la prédominance des quartiers les plus
au sud de Chennai (ECR, Adyar, Guindy, Velachery), disposant d'une part du plus
grand nombre de facilités, et d'un environnement à la fois calme
et verdoyant. Les opportunités en terme d'emploi ne sont pas
étrangères à cet état de fait. Plus surprenant,
Anna Nagar arrive en tête, du fait, vraisemblablement, d'un
urbanisme propre et ordonné, ainsi que d'une offre commerciale parmi les
plus riches de Chennai. Le centre-ville au sens large séduit, surtout
les plus jeunes. Les plus âgés préfèreraient, au
contraire, fuir la ville et vivre à la campagne. Mais plus nombreux sont
les participants à apprécier tout simplement leur lieu de vie, et
à vouloir y rester, particulièrement dans le Nord, assez
curieusement. Il aurait été intéressant, en
parallèle, de questionner les participants sur les points les plus
répulsifs.
4ème partie - Grands projets à venir: un
rééquilibrage?
4-1 A l'échelle de l'agglomération
4-1-1 De la nécessité d'agir rapidement
On estime que d'ici à 2026, la population de
l'agglomération de Chennai devrait atteindre les 13 millions
d'habitants. Cette croissance devrait se traduire par un doublement du flot de
circulation par rapport à la situation actuelle. Longtemps
réputée comme étant une ville particulièrement
aérée et fluide, Chennai est actuellement victime de son
succès et les axes principaux ne suffisent plus à drainer une
nombre de véhicules en augmentation constante, surtout depuis les
années 90. Cette nouvelle donne repose principalement sur la
motorisation accélérée des particuliers, permise par un
accroissement considérable du niveau de revenus d'une nouvelle classe
moyenne en recherche de confort. Ainsi, en même temps que le revenu moyen
par foyer a été multiplié par 8 en 20 ans, le taux
d'équipement en véhicules motorisés a été
multiplié par 6. Avec l'expansion de la ville, la distance moyenne des
trajets journaliers a pendant la même période augmenté de
25%.
La ville de Chennai, oü les projets
démesurés n'en finissent pas de fleurir, doit prévenir
l'asphyxie
qui se profile déjà si elle tient à attirer
de nouveaux investisseurs. L'agrandissement et la
48
modernisation des ports, l'émergence
accélérée des Zones Economiques Spéciales dans le
domaine des technologies de l'information, l'expansion de l'aéroport
puis la creation probable d'un deuxieme site aéroportuaire à
Sriperumbudur dans les décennies à venir, la creation d'un
Telecom Corridor le long de la NH 4 et la densification de l'IT corridor, et
enfin la mise en service du metro, vont propulser la ville au rang des grandes
métropoles mondiales et nécessitent une efficience maximale en
terme de déplacements et d'accessibilité. Pour toutes ces
raisons, la CMDA a mis en place le Chennai Comprehensive Transportation Study
(CCTS) pour 2026, qui propose de grandes mesures visant à relever le
défi de la mondialisation.
Comme on a pu le voir, le réseau routier
chenna
·te se caractérise par la predominance de quelques
grandes voies radiales qui convergent vers George Town, le cÏur
historique. Ces axes, au nombre de 4 (NH5 vers Kolkata, NH4 vers Bangalore,
NH45 vers Madurai et NH205 vers Thiruvallur), sont reliées par deux
voies Ç orbitales È, l'Inner Ring Road et le Chennai Bypass. La
première de ces voies orbitales est d'ores et déjà
complete, mais déjà fortement congestionnée. Le Chennai
Bypass, quant à lui, est en cours d'achèvement. Cependant, ces
deux voies express ne permettent pas aux véhicules transitant par
Chennai du Nord vers le Sud de contourner la ville, qui viennent grossir le
flot de la circulation. Par ailleurs, elles se révelent
incomplètes du fait qu'elles ne bouclent pas les cadrans Nord et Sud.
3-1-2 Articulations d'un remodelage
(ci dessus) Carte n°7 - Vitesse moyenne de
déplacement en 20079
Voici la condition du réseau de transports en terme de
fluidité à l'heure actuelle. On remarque tres
clairement l'extreme congestion du centre-ville d'une part, et celle
des voies permettant un acces au Nord de la ville par l'Est d'autre part. Il
est important de préciser qu'en 4 ans, la situation n'a fait que
s'accentuer. Pour résoudre les problemes du centre-ville, il est
difficile de créer de nouvelles voies de circulation, et la seule
solution en terme routier consiste à mettre en place des intersections
aériennes ou souterraines, travail déjà entamé
depuis 15 ans et qui se poursuivra de façon réguliere dans
l'avenir. Mais la solution la plus efficace et la seule réellement
valable repose sur le développement des transports collectifs. Une
première phase de construction du metro est déjà en cours,
et nous verrons quelle stratégie sera adoptée pour l'avenir.
L'amélioration du réseau de bus est à l'étude, et
nous verrons quelles en seront les modalités. Pour le reste, nous
détaillerons les efforts qui devraient etre mis en Ïuvre en terme
d'infrastructures routieres au niveau de l'agglomération, puis plus
particulierement dans le Nord de Chennai.
Carte n°8 - Outer Ring Road Project (source
CMDA)
9 Source CMDA
Afin de répondre au probléme de contournement
tout d'abord, on prévoit la creation d'une Outer Ring Road (ORR), qui
devrait permettre aux véhicules transitant entre le Tamil Nadu et le
Nord du pays de ne pas encombrer la circulation urbaine. L'acquisition des est
cours 10
terrains en , et
l'achévement est prévu pour 2018 au plus tard.
La moitié Sud de L'ORR, de Vandalur à Nemilichery, sera
achevée en 2013. C'est gr%oce à la mise en place classique d'un
Partenariat Public Privé (PPP) que le projet a pu voir le jour. Les
prestataires privés assurent la construction et l'entretien des
installations, en contrepartie d'une redevance reversée par le
gouvernement, chaque annee.
Sur une longueur de 62 km, l'ORR permettra de relier les
nouveaux pTMles d'activité (construction automobile sur le NH45,
assemblage electronique sur la NH4) au marché national de façon
plus efficace. Il est prévu de libérer de l'espace le long des
voies, de façon a permettre la construction à plus long terme
d'une voie ferrée de contournement. L'apparition de l'ORR devrait
permettre le développement de nouveaux hubs commerciaux et
résidentiels, au niveau des points d'intersection avec les grands axes
radiaux, et d'offrir par consequent une solutio n de déconcentration
à moyen terme.
L'autre grand projet en terme routier concerne la mise en
place d'une nouvelle voie d'accés en radial, l'Elevated Freight
Corridor (en rose sur la carte). Cependant, et comme son nom l'indique,
son accés sera reserve aux véhicules lourds transportant du fret
depuis le Port de Chennai. Le trace de cette nouvelle voie est directement
calque sur celui de la riviére Coom, et doit permettre le transfert
integral des véhicules en provenance et à destination du Port. Au
débouché de l'EFC, on prévoit la creation d'une large
plateforme de stockage de containers, qui jusqu'à present sont
entreposés de façon désordonnée le long de la cTMte
au Nord de la zone portuaire, dans une multitude de plateformes privées
et non sécurisées. Ce projet de grande envergure permettra par
ailleurs la liberation des axes reliant George Town et le Nord de Chennai,
comme la Thiruvottiyur High Road et la Ennore High Road,
seule alternative actuelle au transport de fret en journée (la nuit, les
poids lourds peuvent transiter par la Poonamale High Road).
10 Acquisition menée par le TNHD (Tamil Nadu Highway
Department)
Carte n°9 - Corridors de transports publics
à l'horizon 2026
En matière de transports publics, les projets ne
manquent pas, et leur objectif est de porter la part de des trajets intra
-agglomération à 46%. Le métro, dont la première
phase sera achevée en 2014 (en rouge), devrait être étendu
au Nord jusqu'à Ennore, le long de la voie ferrée existante (en
orange). En complément, une troisième ligne sera
créée entre Marina Beach et Madavaram au Nord-Ouest. A l'horizon
2020, un nouveau mode de déplacement devrait faire son apparition dans
la périphérie Ouest de Chennai : le monorail (en bleu). Les
modalités de sa mise en place restent encore mystérieuses, mais
l'idée consisterait à concevoir une version allégée
et bon marché du métro. En complément, un quadrillage par
un réseau de bus en site propre viendra combler les vides au Sud et au
Nord de la ville. Enfin, un grand contournement par le rail devrait permettre
de relier des villes de taille moyenne situées en lointaine
périphérie (dans le sens des aiguilles d'une montre:
Mamallapuram, Chengalpattu, Thiruvallur et Gummunipundi). Plus qu'un
contournement, ce dernier projet doit permettre, à terme, la conversion
de ces villes moyennes en véritables villes satellites.
4-2 Au Nord, un remodelage qui pose problème
4-2-1 Le Ennore Manali Road Improvement Program
Même si lÕon constate une prise en compte
nouvelle des espaces Nord dans le cadre des futurs projets que nous venons de
décrire (extension du metro, réseau de bus en site propre), on ne
peut que regretter lÕabsence de plans dÕenvergures dans le
domaine des infrastructures routieres et ferroviaires. Cependant,
lÕapparition de lÕElevated Freight Corridor qui vise
à réduire les flux urbains en provenance et à destination
du port de Chennai se révelera certainement bénéfique
à la situation generale de notre zone dÕétude, puisque
lÕun des aspects principaux qui pose actuellement probleme, cÕest
justement le flux discontinu de ces poids lourds en transit vers les terminaux.
Par cette reconcentration des flux, on libere ainsi les deux axes principaux
entre George Town et les quartiers Nord. On estime que le trafic pourra
conna»tre une diminution supérieure à 60%. Mais cela ne
suffit pas, et lÕorage gronde actuellement entre les grandes compagnies
qui réclament la creation dÕun acces fiable et rapide au port
dÕEnnore, et le gouvernement qui avait promis, depuis plus de dix ans,
la mise en place de voies dÕacces privilégiées (cf.
1-2-3). Le projet de rehabilitation du réseau routier Nord portait un
nom : Ennore Manali Road Improvement Program. Toshiba, qui vient de
sÕinstaller à proximité dÕEnnore ou il a investi
120 millions dÕeuros pour la creation dÕune usine de turbines
géantes destinées à la production electrique et qui
devrait entrer en service en 2012, ainsi que le groupe Renault Nissan qui
compte à court terme exporter ses véhicules via Ennore, tirent
aujourdÕhui la sonnette dÕalarme. Ce sont eux qui des 2009 ont
ressorti le dossier de lÕEMRIP des tiroirs, et sont venus relancer le
gouvernement.
LÕEMRIP a été élabore des 1998.
Apres quelques premières difficultés liées à la
question du financement de ce projet, on a mis en place un SPV (Fond commun de
créance) en 2003 entre la National Highways Authority of India, le
Chennai Port Trust, le gouvernement du Tamil Nadu et Ennore Port Ltd
(privés). A lÕorigine, la mise en application aurait dil aboutir
en 2007, pour un montant de 22 millions dÕeuros. Depuis, le cofit a
été multiplié par quatre, et atteint aujourdÕhui
les 100 millions. Le but de lÕEMRIP repose sur la transformation de
voies existentes (Ennore High Road (en jaune sur la carte ci-dessous
), Manali High Road (en violet), TPP Road (en orange) et
Northern Chennai Thermal Power Station Road (en bleu clair) en voies
express, par leur elargissement et par la construction de nouveaux ponts
adaptés au véhicules lou rds. Pour lÕheure, aucune de ces
voies express nÕest achevée, et les travaux en
réalité viennent tout juste de démarrer.
C'est le ministre des transports maritimes, G K Vasan, qui a
pris l'initiative de relancer le projet en février dernier, sous la
pression des compagnies que l'on a déjà évoqué.
L'EMRIP devrait être achevé d'ici deux ans.
Carte n°10 - Connectivité souhaitée au
Port d'Ennore (Toshiba 2010)
4-2-2 La barrière du social : réalité
du terrain
L'exécution du projet de l'EMRIP a donc
commencé, dès le début 2011. Cependant, l'avancée
des travaux, réalisés par la NHAI (National Highway Authority of
India), se heurte à un obstacle de taille, qui en plus des
problèmes de financement et d'initiatives publiques avait sans doute
déjà freiné le bouclage du projet. En effet, la Ennore
High Road, qui doit être transformée en Ennore
Expressway, se trouve cernée par un slum gigantesque, qui
s'étire sur près de 6km. De part et d'autre de la route qui n'est
pas très large à l'heure actuelle (environ 8m), se sont
installées au fil des années des milliers de familles, dans des
conditions extrêmement précaires. En fait, à
l'époque de la construction de cet axe, on avait anticipé les
besoins futurs en prévoyant l'espace nécessaire à
d'éventuels élargissements. Pour cela, on avait construit une
digue qui permettait de gagner du terrain sur la mer, là oü se
trouvait auparavant la plage. On disposait ainsi d'une longue bande de terre,
large d'une cinquantaine de mètres, qui permettrait les travaux si
nécessaire. Evidemment, l'inévitable s'est produit, et les slums,
principalement constitués de familles de pêcheurs, sont venus
conquérir ce nouvel espace disponible, jusqu'à
l'occuper dans sa totalité.
Aujourd'hui, le temps presse, et la route doit être
élargie à 20m. En l'espace de 4 mois, depuis janvier 2011,
près de 1000 habitations ont été détruites, forcant
leurs occupants à se déplacer. Les agents en charge de la
construction sont venus sur place au préalable, ont pris des photos des
maisons, et fourni aux habitants un document officiel attestant de leur
occupation des lieux. Ce document leur donne le droit d'exiger un nouveau
logement, en compensation du préjudice causé. Déjà,
depuis 5 ans, le gouvernement a entamé la construction d'un complexe
résidentiel qui à terme devrait fournir les logements
nécessaires aux 10.000 personnes déplacées et donc
résoudre le problème. Il a été convenu que chaque
famille disposerait d'un appartement privatif, d'une quinzaine de m2.
En haut à gauche, le slum d'Anna Nagar à New
Washermanpet, oü les destructions on déjà
commencé.
En haut à droite, le complexe résidentiel de
Netaji Nagar à Ennore, déjà investi par ses nouveaux
habitants.
En bas, paysage classique au bord de l'Ennore High Road, à
Anna Nagar, New Washermanpet.
Mais voilà, la solution de relogement proposée
par le gouvernement ne convient pas à tout le monde. Tout
dÕabord, celui-ci se situe à Ennore, à 7km dÕAnna
Nagar (à ne pas confondre avec le quartier dÕAnna Nagar à
lÕOuest de Chennai, oil les conditions de vie nÕont rien de
commun avec lÕAnna Nagar de New Washermanpet), le quartier oil nous
avons rencontré les habitants. Hors, les habitants du Sud de
lÕEnnore High Road survivent gr%oce aux ressources issues de la
seule activité praticable : la pêche. Là oil les nouveaux
logements ont été regroupés, lÕacces à la
mer est impossible, et un déplacement dans ce quartier implique donc
lÕabandon de lÕactivité nourriciére. Les
populations se retrouvent donc en situation extreme, ne disposant pas
dÕun niveau dÕéducation ou dÕune condition sociale
qui leur permette de sÕadapter. Par ailleurs, il a été
stipulé quÕun appartement serait propose pour chaque famille
déplacée. Mais la taille de ces foyers nÕa absolument pas
été prise en compte, et les conditions de relogement sont les
même quelque soit le nombre de membres dans celui-ci. Des familles
nombreuses, parfois comprenant jusquÕà 8 ou 10 membres, se
retrouvent condamnées à survivre dans un espace de 15m2. Parmi
les populations qui se sont déjà installées dans Netaji
Nagar à Ennore et auxquelles jÕai pu rendre visite, une grande
partie nÕa dÕautre choix que de dormir dans la rue, par manque de
place.
Par ailleurs, lÕeau manque cruellement, puisque les
nouveaux immeubles ne sont pas raccordés au réseau de
distribution. Ils dependent entiérement des précipitations qui
sont recueillies dans des cuves sur le toit, et nÕont pas dÕautre
choix que dÕacheter la ressource à lÕextérieur.
LÕalimentation électrique est bien présente, mais le
gouvernement nÕexigeant pas le paiement dÕun loyer (il y a
renoncé alors que cÕétait initialement prévu), il
impose en contrepartie le reglement de factures
dÕélectricité absolument exorbitantes. Les habitants ne
disposant pas des moyens suffisants se voient donc coupés de leur
alimentation. SÕajoute à cela lÕabsence totale de
structures nécessaires à lÕinstallation des commerces, qui
nÕont dÕautre choix que de sÕétablir au bas des
immeubles, dans de petits cabanons construits à la h%ote. Les
problémes de criminalité, par ailleurs, compromettent fortement
lÕattrait de la zone, totalement à lÕécart de la
couverture policiére. Ainsi, on mÕa rapporté quÕun
meurtre avait eu lieu dans le quartier la nuit précédent ma
visite, mais quÕil ne sÕagissait en rien dÕun fait
isolé puisque ce genre dÕévénements survenait en
moyenne une fois par semaine. On comprend donc les réticences des
familles à venir sÕétablir à Netaji Nagar.
Cependant, les travaux de destruction et
dÕélargissement nÕont été entamé que
dans la partie la plus au Sud de la Ennore High Road, au niveau
dÕAnna Nagar et des quartiers voisins. Pour la partie Nord, les
bulldozers se sont heurtés à des groupes de resistance, sans
doute mieux organisés et donc plus virulents que ceux qui avaient
été mis en place, sans succés, au Sud. Cette situation
trouve son
explication dans un éventail de population different
entre les deux zones. En effet, autour dÕAnna Nagar, même si les
familles de pêcheurs sont fortement représentées, elles ne
constituent pas la majorité, comme cela peut etre le cas plus au Nord.
Et il semblerait que la capacité des habitants à sÕunir
face à la crise repose en grande partie sur une certaine
homogénéité du groupe. Donc pour lÕinstant, une
partie des habitants de la zone semble avoir été
épargnée, malgré les interventions parfois violentes des
forces de police et au prix de nombreuses arrestations.
Pour lÕheure, 2000 personnes ont investi leurs
nouvelles habitations, et 5000 logements ont été construits
à Netaji Nagar. Ceux qui ont fait le choix de resister, bien conscients
du fait quÕils devront tTMt ou tard ceder aux requêtes du
gouvernement, demandent seulement une solution alternative, qui leur
permettrait non pas d'être relogés mais simplement
déplaces, à proximité, sur des terrains ou ils puissent
reconstruire leur vie sans renoncer à leur moyen de subsistance.
4-2-3 L'envolée du secteur portuaire au Nord :
Kattupali
Si la réussite de la mise en route de lÕEMRIP
appara»t vitale pour les grands groupes tels que Renault ou Toshiba, elle
lÕest encore dÕavantage pour un nouvel acteur qui devrait
émerger des 2012 : le complexe portuaire de Kattupali. Kattupali est le
nom dÕun minuscule village de pêcheurs, qui borde le port
dÕEnnore sur ses marges Nord. Ce village existe encore, mais il se
trouve maintenant encerclé de toutes parts par une nouvelle structure,
gigantesque par son étendue, qui devrait offrir de belles perspectives
de développement pour tout le North Chennai.
Le projet a été concu conjointement par la TIDCO
(Tamil Nadu Industrial Development Corporation) et le géant indien
Larsen & Toubro (L&T). Kattupali sera non seulement un nouveau port, le
troisieme de Chennai, mais pas seulement. En effet, au sein de la nouvelle
entité qui va na»tre, on va aussi créer un chantier naval,
le plus grand en Asie, et lÕun des plus importants à
lÕéchelle mondiale. Pour un cofit total de 700 millions
dÕeuros, cette mega-structure offrira des possibilités tout
à fait inédites en Inde. Ces chantiers navals, installés
sur 500 hectares, permettront la fabrication et la mise en eau de navires de
toutes sortes, incluant les navires commerciaux de tres grand gabarit de types
pétroliers, gaziers, mais aussi des paquebots de croisiere, des navires
destines à la defense et notamment des sous-marins. La liste ne
sÕarrête pas là puisquÕil sera aussi en mesure de
concevoir des plateformes pétrolieres de derniere generation, de
réparer et de reaménager tous types de navires, et enfin, une
part de la production sera concentrée sur la production de pieces
détachées pour le domaine maritime. Plus qu'un
chantier naval, cette nouvelle entité constituera un nouveau corridor de
l'ingénierie maritime, renforcant encore d'avantage la diversification
économique de Chennai et du Tamil Nadu.
Le port de Kattupali, quant à lui, sera exclusivement
spécialisé dans le traitement du fret par containers, avec une
capacité qui devrait atteindre 1,8 millions d'unités en 2015, ce
qui le placerait en première position dans ce secteur devant le port de
Chennai (1,5 millions TEUs) et le port d'Ennore (1,2 millions TEUs). A eux
deux, les ports d'Ennore et de Kattupali surpasseront largement le port
historique, et on comprend mieux la nécessité d'une mise en place
rapide de solutions de transports. Kattupali, gr%oce à son port en eaux
profondes et ses équipements permettant l'escale des navires les plus
imposants, deviendra probablement une étape incontournable sur la route
maritime Asie-Europe d'ici quelques années. Aussi, en complément
de l'EMRIP, une nouvelle voie d'accès est actuellement à
l'étude, la Northern Port Access Road, qui permettra de relier
les ports d'Ennore et de Kattupali directement à l'autoroute NH 5
(Calcutta). Son coüt est estimé à 60 millions d'euros pour
une longueur de 25km, et son financement devrait être supporté par
la création d'une joint venture entre Ennore Port Ltd, L&T
Ship Building Ltd et la TIDCO.
Si l'on considère l'ensemble des nouvelles
entités qui vont être créées au cours des 5
prochaines années dans la zone d'activité des ports d'Ennore et
de Kattupali, avec la mise en service de la centrale électrique de
Vallur (NTECL), le doublement de la capacité de production de la North
Chennai Thermal Power Station (NCTPS à Ennore), et le lancement du
complexe Toshiba, ce sont près de 18.000 emplois directs qui vont
être créés.
Conclusion
Au terme de ce mémoire, le Nord de Chennai
appara»t comme un espace original sous bien des aspects. Longtemps
négligé, souvent ignoré, il semblerait qu'il soit
aujourd'hui au cÏur d'enjeux décisifs, qui pourraient être la
clé de son intégration dans la métropole bouillonnante
qu'est devenue Chennai. Mais le chemin à parcourir promet d'être
long et périlleux, tant l'ampleur de la tâche para»t
démesurée. En effet, même si les perspectives d'avenir,
notamment économiques, connaissent à l'heure actuelle une
embellie jamais vue jusque là, on peut se poser la question de l'impact
réel de ce renouveau industriel et portuaire sur les populations.
Dans la mesure où les grands projets mis en place
à la fois par les privés et par le gouvernement visent
principalement à servir leurs propres intérêts, ce qui
après tout n'a rien de surprenant, on ne peut que constater une relative
mise à l'écart des questions profondes et sociales qui font que
Chennai a été pendant longtemps, et reste toujours, une ville
coupée en deux. Mais peut-on réellement parler de ville lorsqu'on
évoque les quartiers Nord de Chennai? Au cours de notre enquête,
on a pu démontrer à quel point le manque d'intérêt
des planificateurs et des politiques à l'égard de ces quartiers a
pu aboutir à l'émergence d'une poche d'urbanisation presque
stérile, à l'écart de tout, et oü les services les
plus fondamentaux viennent à manquer. Hors, quel est le rTMle de la
ville ? Et finalement, qu'est-ce qu'une ville ? Maximisation des connexions,
concentration des richesses, accroissement des opportunités et de la
qualité de vie sont à mon sens les fondamentaux qui font que la
ville est ville. Lorsqu'elle ne remplit pas ces fonctions, elle ne l'est plus.
Et c'est ce qui se passe actuellement dans les quartiers Nord de Chennai,
oü la ville n'est plus. Alors comment faire pour lui redonner du sens ?
Comme un corps organique, une ville fonctionne par les flux. C'est pour cette
raison que la question des transports est primordiale. Or, la politique de
grands proj ets dans ce domaine ne propose qu'un renforcement des zones
déjà fortement irriguées, ou le raccordement à des
points stratégiques, et c'est en cela qu'elle est imparfaite. Pour
qu'une réelle volonté de désenclavement puisse
émerger, il faut que les aménageurs y trouvent un
intérêt. C'est là l'un des derniers défis à
relever pour le Nord de Chennai, et c'est sur ce point qu'il faut agir.
REMERCIEMENTS
Je tiens à remercier, tout d'abord, mon
interprète et ami, Antoni, qui a accepté de m'aider sur ce projet
en dépit de la distance qui l'a séparé de sa famille
pendant plusieurs semaines. Sans lui, mon travail de terrain n'aurait pas
été aussi plaisant et efficace.
Je remercie également Kamala Marius-Gnanou et Loraine
Kennedy, qui depuis la France m'ont aidé à aiguiller mes
recherches et ont su me redynamiser dans les moments de doute
Merci aussi à Eric Denis, mon responsable à
l'Institut Francais de Pondichéry
Merci à Aurélie Varrel, toujours de bon conseil et
très soucieuse de la réussite de mon projet
Merci à Karen Coelho et à M. Vijayabaskar, du
Madras Institute ofDévelopment studies
Merci au personnel de la Chennai Metropolitan Development
Authotithy et de la TamilNadu Industrial Development
Corporation
Et un grand merci, enfin, à toutes les personnes
croisées de près ou de loin au cours de mon enquête sur le
terrain, merci pour leur accueil, leur patience et leur efficacité !
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TROIN J-F. (2000), Les métropoles des Ç Sud
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VIJAYABASKAR M. (2010), Saving Agricultural Labour from
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Political Weekly, fevrier 2010
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Participation and GIS. Position Paper for Spoleto Workshop.
ZENEIDI-HENRY D. (2002), Les SDF et la ville,
géographie du savoir survivre, Bréal.
ANNEXE 1 - Localités et infrastructures
récurrentes
62
June 2011 - S SURVEY CHENNAI : A CITY CUT IN
TWO?
Name / Gender: Place of birth:
Age: Occupation:
Home place: Work place / Distance:
Can read / Write: Arrival in Chennai (reason if
move):
Private vehicle :
Mean of transport used for going to work /
school:
How many times a month do you go to ?
- Chennai downtown: - North / South Chennai:
- Cinema: - Family restaurant:
- Shopping: - Supermarket:
How many times a year?
- Out of Chennai (precise which places):
- Out of Tamil Nadu:
- Cultural event/ Concert/Sporting event/Museum/Exhibition?
(encircle)
Ever gone out of India?
Access to the i nte rnet (individual / cafe)?
Give details about Electricity / Water facilities
situation : Public transport facilities offered here (list):
Evaluation of facilities environment (from worst, 0, to
best, 5) - Hospitals:
- Schools:
If you had the power to change your direct environment,
what would you need? ( i n terms of accessibility, transports,
facilities) :
According to you, what is the best place for living in
Chennai?
Now try to list all the places you visited in Chennai
during the last month:
ANNEXE 2: QUESTIONNAIRE (ENQUETE DE TERRAIN)
ANNEXE 3 : Exemple de carte mentale Ç en
étoile È - Sekkadu
ANNEXE n°4 : Exemple de carte mentale Ç complexe
È - Tambaram
ANNEXE n°5 : Exemple de carte mentale Ç en
stations È - Tambaram
ANNEXE n° 6 : exemple de carte mentale Ç en points
solitaires È - Sekkadu
ANNEXE n°7 Ð Exemple de carte mentale Çen double
étoile È - Manali New Town
ANNEXE n°8 : Exemple de carte mentale Çplan
shematique, en H È - Teynampet
69
ANNEXE n°9 : Exemple de carte mentale Ç
minimaliste È - Teynampet
ANNEXE n° 10 : Exemple de carte mentale Ç en H
È - Sholinganallur
71
ANNEXE n°11 Ð Exemple de carte mentale Ç hors
catégorie È - Manali New Town