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Etude des conséquences immédiates et à  terme des phénomènes associés à  un événement El Nino


par Florent Demoraes
Université de Savoie - DEA Interface Nature / Sociétés 1999
  

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B / - El Niño / Oscillation Australe (ENOA) : une modification

récurrente et acyclique de la circulation marine et aérologique

moyennes du domaine Pacifique

1 / - Mécanismes du système couplé Océan-Atmosphère et déroulement

d'un événement ENOA

a / - les mécanismes et paramètres de base

Nous l'avons déjà abordé auparavant, l'ENOA est un système, où interfèrent une

composante aérologique et une composante océanique, qui se développe essentiellement audessus

du domaine Pacifique.

La composante aérologique, l'oscillation australe (OA) est un phénomène

atmosphérique naturel apériodique qui correspond à une variation du différentiel de pressions

existant entre le bassin pacifique occidental et oriental. L'indice de l'Oscillation Australe

(IOA) est une valeur standardisée basée sur la différence de pressions de surface généralement

mesurées d'une part à Darwin (Nord de l'Australie) et d'autre part à Tahiti. Lorsque la

pression est particulièrement élevée à Tahiti26 et inhabituellement basse à Darwin27, l'IOA est

anormalement élevé. Ce schéma annonce un épisode froid ou La Niña, c'est à dire une phase

anti-ENOA. A l'inverse, lorsque le gradient barométrique devient minimal (IOA négatif), se

déclenche alors un événement El Niño, c'est à dire une phase ENOA qui dure entre 12 et 18

mois. Toutefois, tous les épisodes El Niño ne sont pas forcément suivis d'une phase La Niña :

il existe une phase intermédiaire ou situation moyenne au cours de laquelle l'IOA est proche

de la valeur zéro.

En ce qui concerne la composante océanique, elle dépend étroitement de la dynamique

aérologique. Comme le souligne M. Leroux28, «le couplage océan-atmosphère s'exerce

d'abord, simplement par l'intermédiaire de la pression atmosphérique : à une variation d'1

hPa correspond une hausse / baisse d'1 cm du niveau de la mer. La zone tropicale est

délimitée au nord et au sud par des agglutinations anticycloniques (AA) subtropicales29, qui

sont constamment alimentées par des anticyclones mobiles polaires (AMP), vastes lentilles

d'air initialement froid originaire des pôles (figure n°2). Sous ces AA, le niveau de la mer est

relativement bas de quelques centimètres. Les flux tropicaux (alizés) issus des AA se

réchauffent et convergent vers l'Equateur Météorologique (EM) où ils s'élèvent : température

et ascendance entraînent une baisse de pression et donc un relèvement du niveau de la mer de

quelques centimètres. Les eaux marines superficielles sont poussées vers l'ouest par les alizés,

tandis qu'un contre-courant équatorial (CCE)30 se dirige vers l'est sous l'EM (zone de calme),

26 compte tenu de l'agglutination anticyclonique de l'île de Pâques

27 Darwin est localisée dans la zone dite de la dépression indonésienne

28 Leroux M., 1998, El Niño, in La Recherche N°310, juin 1998, p.67.

29 Au dessus du Pacifique, on trouve l'AA des Hawaii et l'AA asiatique dans l'hémisphère nord et l'AA des îles

de Pâques dans l'hémisphère sud

30 le CCE de composante ouest est un courant marin chaud de compensation situé entre le Courant Nord

Equatorial et le Courant Sud Equatorial (froids) impulsés par les alizés issus respectivement de l'AA des Hawaii

et de l'AA des îles de Pâques en direction de l'ouest, initialement à l'origine des upwellings côtiers californien et

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et atteint les côtes de l'isthme (...). En raison du net refroidissement de l'Arctique, observé

depuis les années 1940, la fréquence et la puissance des AMP augmentent. (...) (On constate)

une hausse de pression sur la trajectoire des AMP et à la latitude (plus méridionale) des AA

dans le Pacifique Nord (comme dans l'Atlantique Nord), davantage d'air plus froid (plus

dense) migrant vers le sud31. (...) Le dynamisme boréal accru déplace l'EM vers le sud,

décalant l'intense pluviogenèse associée à cette structure aérologique, ainsi que les eaux

chaudes du CCE. Dès la fin de l'été boréal, les puissants AMP asiatiques qui atteignent

l'ouest du Pacifique alimentent vigoureusement la mousson australienne (vents d'ouest

renforcés) et accélèrent le transfert des eaux chaudes vers l'est, provoquant ainsi un épisode

El Niño».

Figure n°2 - Les composantes aérologiques lors d'une phase ENOA en hiver boréal sur le Pacifique tropical,

d'après Leroux M., 1996.

«En ne considérant que la dynamique de l'hémisphère nord, l'EM est animé par trois

impulsions boréales (figure n°2) : un segment à l'est (Amérique Centrale) dépend de la

circulation sur l'Amérique du Nord à l'est des Rocheuses (extension de l'espace atlantique

nord), un autre au centre dépend de la dynamique sur le Pacifique oriental au sud de l'AA dite

« des Hawaii », un segment plus étendu à l'ouest dépend du dynamisme de l'alizé

asiatique/mousson australienne. Mais ces facteurs, qui n'agissent pas nécessairement de façon

simultanée, relèvent de la même cause initiale, et par le déplacement de l'EM vers le sud, ils

traduisent une puissance accrue de l'hémisphère météorologique nord»(Leroux 1996).

Trenberth32 fait allusion à la migration de cette ZCIT33 et à son positionnement vers 5° de

latitude. Il ajoute que la ZCPS34 se transfère quant à elle vers le nord-est. Ces deux zones de

confluence en phase ENOA sont des secteurs de convection très active et finissent par se

rencontrer pour ne former plus qu'une seule bande nuageuse. A l'inverse, en phase anti-

ENOA, un déplacement de l'EM à une latitude anormalement septentrionale est observé.

sud-américain (courant de Humboldt). En situation normale, le CCE correspond au courant chaud saisonnier

péruvien, c'est à dire le courant du Niño originel stricto sensu.

31 Une telle situation est associée à une circulation méridienne rapide

32Trenberth K.E., 1997, The different flavors of La Niña, d'après http://www.dir.ucar.edu/esig/lenina, 4p.

33 Zone de Convergence Intertropicale, voir le glossaire en annexe

34 Zone de Convergence du Pacifique Sud, voir le glossaire en annexe

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D'autres chercheurs font état dans leurs publications de cette translation méridienne de

l'EM. C'est le cas par exemple de J.F. Nouvelot et de P. Pourrut35. «La circulation

méridienne, et plus précisément la zone de convergence intertropicale, présente également des

caractères anormaux qui se manifestent dès le mois de janvier par un fort déplacement vers le

sud. La ZCIT peut arriver à proximité de l'équateur, ou parfois même le franchir, alors que sa

position méridionale normale se situe à 3° nord. Quand la ZCIT arrive près de l'équateur, le

phénomène s'accélère : les alizés faiblissent anormalement le long de la ligne équatoriale

alors que les températures de surface de l'océan se maintiennent au-dessus de la normale ;

parallèlement, la thermocline36 tend à s'approfondir dans le Pacifique du sud-est, pouvant

atteindre, très près des côtes sud-américaines, une profondeur de - 100 m».

b / - Le déroulement

Certains auteurs ont établi des scénarios-type de déroulement des phénomènes El Niño

mais ils diffèrent les uns des autres car l'avènement des phases chaudes ne suit pas

scrupuleusement un modèle unique en dépit de certaines caractéristiques communes.

Ainsi, des chercheurs tels que Rasmusson et Carpenter (1982, in Enfield 1989) ont

construit un «El Niño composite» ou «El Niño canonique». Ils ont établi, à partir des données

de vents, de précipitations et de températures des épisodes El Niño de 1951 à 1973, des

moyennes des anomalies. Un El Niño composite s'étend sur trois années. L'année précédent

l'avènement du phénomène est nommée t-1. L'année de l'occurrence du El Niño est nommée

t 0 et l'année suivante t+1.

Au cours de la phase précédent le El Niño (août, septembre et octobre de l'année t-1),

les vents d'est (alizés) dans le Pacifique équatorial sont forts et, en impulsant les eaux de

surface, favorisent l'accumulation d'eau à l'ouest indispensable aux reflux. Les TMS37 sont

anormalement basses dans le Pacifique Est (upwelling renforcé).

La phase de déclenchement se produit en novembre, décembre et janvier des années t-

1 et t 0. On observe alors une composante inhabituelle d'ouest dans les vents zonaux à la

longitude de la ligne de changement de date. Les TMS restent basses le long des côtes

d'Amérique du Sud. Par contre, une irrégularité positive des TMS se manifeste dans la région

équatoriale de la ligne de changement de date.

L'année t 0 correspond à l'année des maxima. En mars, avril et mai, consécutivement

à la relaxation initiale de l'océan (propagation d'ondes de Kelvin), d'importantes anomalies

positives des TSM se localisent dans le Pacifique tropical est, principalement le long des

rivages de l'Equateur et du Pérou. Cette élévation des eaux marines de surface est couplée

d'une hausse du niveau marin (surcotes marines). Le trait caractéristique enregistré au niveau

du champ des vents de surface est l'affaiblissement des alizés sur le centre du bassin pacifique

équatorial.

35J.-F. Nouvelot et P. Pourrut, 1985, El Nino, phénomène océanique et atmosphérique - Importance en 1982-83

et impact sur le littoral équatorien, Cahiers Orstom, série Hydrologie, vol. XXI, No 1, pp. 46.

36 couche de transition thermique rapide entre les eaux superficielles et les eaux sous-jacentes de température

différente, voir le glossaire en annexe.

37 Température de Surface de la Mer

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La phase de transition qui suit en août, septembre et octobre de l'année t 0, coïncide

avec une translation le long de l'équateur des eaux les plus chaudes depuis les côtes

sudaméricaines vers une zone comprise entre 120° et 85° ouest.

La phase terminale équivaut à un retour à la situation originelle c'est à dire une chute

rapide des TSM qui retrouvent leurs valeurs moyennes initiales au printemps de l'année t+1.

Ceci dit, l'épisode de 1982-83 n'a en rien suivi ce schéma ce qui confirme le fait que

ce scénario classique ne s'applique pas à tous les événements et qu'il est donc sujet à caution.

c / - Le cas de l'Amérique Latine

L'étude étant ciblée sur la région latino-américaine, attachons-nous désormais à

analyser plus en détail la situation en phase ENOA sur cette partie du monde. Cette zone

apparaît comme une interface entre les unités de circulation Pacifique et Atlantique (figure

n°3). D'un côté, à l'ouest des Rocheuses, nous l'avons vu, se développe à une latitude plus

méridionale une puissante agglutination anticyclonique dite des Hawaii alimentée par des

AMP boréaux renforcés. Sur leur face avant prennent naissance des alizés plus intenses. Ces

vents d'est plus vigoureux se dirigent en direction de l'EM et contribue à le déplacer vers le

sud. De l'autre côté, les alizés renforcés issus de l'agglutination anticyclonique située plus au

sud que d'ordinaire sur le Golfe du Mexique franchissent l'isthme hispano-américain

contribuant là encore à repousser l'Equateur météorologique vers une position davantage

méridionale. C'est ainsi qu'en phase El Niño, l'EM est établi dans l'hémisphère sud (figure

n°2).

Figure n°3 - Conditions aérologiques en hiver boréal au niveau de l'Amérique Intertropicale. En phase ENOA,

cette structure de circulation subit une translation vers le sud sous l'effet des AA boréales plus puissantes avec

pour conséquence, le positionnement de l'EM dans l'hémisphère sud, d'après Barbier E, 1997.

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Cette localisation de l'EM exceptionnellement au sud va influer à leur tour les

courants marins impulsés par la circulation aérienne puisqu'on observe la translation de leur

circulation en direction du sud (figure n°4).

Figure n°4 - Les courants marins dans la partie orientale de l'Océan Pacifique Intertropical en situation normale

(à gauche) et au cours des événements El Niño (à droite), d'après Barbier E., 1997

d / - bilan

Les événements ENOA font donc intervenir de multiples facteurs appartenant à des

espaces aérologiques distincts qui expliquent la diversité des causes et la variété des

physionomies des épisodes El Niño et qui s'accompagnent d'une translation de la circulation

atmosphérique et marine en direction du sud. Cette singularité des phénomènes rend d'ailleurs

les travaux de prévision météorologique extrêmement difficiles.

Dans le même ordre d'idée, la composante océanique est elle aussi en communication

avec les autres sous-systèmes marins comme l'ont démontré notamment J.-F. Nouvelot et P.

Pourrut38. «... (Le volume de l'Océan Pacifique) serait de 700 millions de Km, soit la moitié

des eaux océaniques totales. Cependant, il est intéressant d'observer que seulement 40% des

pluies qui tombent sur le globe y parviennent, compte tenu du fait que les fleuves et rivières

qui s'y jettent ne drainent que le quart des terres émergées. Intervenant malgré tout pour la

moitié dans l'évaporation du globe, son bilan serait déséquilibré sans les apports d'autres

océans qui proviennent essentiellement du sud et de l'ouest (Océans Antarctique et Indien)».

Cette démonstration relativise la théorie selon laquelle, les eaux de surface entraînées par les

alizés viennent «s'accumuler» dans l'ouest du bassin Pacifique avant de revenir en direction

des côtes latino-américaines.

Quoi qu'il en soit, l'ENOA ne constitue finalement sur le plan physique qu'un

événement naturel aléatoire existant depuis des millénaires39, faisant intervenir une multitude

de facteurs en interrelations, dont les mécanismes sont encore loin d'être compris

intégralement. Par contre, ce sur quoi les chercheurs semblent s'accorder, c'est que l'on

constate actuellement des modifications significatives de l'intensité et de la récurrence des

événements El Niño.

38 J.-F. Nouvelot et P. Pourrut, 1985, pp. 40-41.

39 Toutefois, des analyses en sédimentologie lacustre ont montré que les épisodes El Niño ne se sont

certainement pas manifesté entre - 5 000 et - 12 000 ans, in KERR R.A., 1999, El Niño grew strong as cultures

were born, News of the week, in Science, Vol. 283, 22 January 1999, pp. 467-468.

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius