WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Le droit à la guerre préventive: essai de réflexion sur la légalité et la légitimité du concept

( Télécharger le fichier original )
par Tohouindji G. Christian HESSOU
Université d'ABOMEY CALAVI - Cycle I de l'ENAM 2005
  

Disponible en mode multipage

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

    REPUBLIQUE DU BENIN

    MINISTERE DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE

    UNIVERSITE D'ABOMEY CALAVI (UAC)

    ECOLE NATIONALE D'ADMINISTRATION ET DE MAGISTRATURE (ENAM)

    OPTION : Administration Générale

    FILIERE: Diplomatie et Relations Internationales

    LE DROIT A LA GUERRE PREVENTIVE :

    ESSAI DE REFLEXION SUR LA LEGALITE ET

    LA LEGITIMITE DU CONCEPT

    Présenté et soutenu par : Sous la direction de :

    HESSOU T. G. Christian Monsieur ABDOU Mohamed

    Professeur de Droit International Public

    à l'ENAM

    Promotion : 2002 - 2005

    L'ECOLE NATIONALE D'ADMINISTRATION ET DE

    MAGISTRATURE N'ENTEND DONNER AUCUNE APPROBATION NI IMPROBATION AUX OPINIONS EMISES DANS CE MEMOIRE. CES OPINIONS DOIVENT ETRE CONSIDEREES COMME PROPRES A LEUR AUTEUR

    IDENTIFICATION DU JURY

    Président: Mr TOUDONOU J. Athanase

    Vice-Président : Mr AGBANGLA Eusèbe

    Membre: Mr ATTENOUKOUN SERGE

    ii

    Je dédie ce mémoire à :

    Mes parents Joséphine et André HESSOU,

    Tous mes frères et soeurs sans exception,

    Mlle Albine Carmen MORGEAN,

    Romuald HESSOU tout particulièrement.

    iii

    Plus qu'à quiconque, c'est à Monsieur ABDOU Mohamed que ce mémoire doit d'avoir

    vu le jour. Voilà plusieurs mois qu'il m'apporte son soutien intellectuel sans faille et ses commentaires perspicaces sur sa confection. Il a accompli tout au long de la rédaction, un travail de correction soigneux, allant du fond jusqu'aux moindres ponctuations. Ses conseils éclairés me redonnaient à chaque fois, l'inspiration nécessaire pour achever cette oeuvre. Je lui exprime toute ma gratitude pour toutes ses contributions.

    J'ai eu d'un autre coté, l'immense chance d'avoir pu consulter certains professeurs qui m'ont

    fait pleinement profité de leurs compétences. Ils m'ont prodigué des conseils et m'ont fait des observations de tout genre. Je ne saurai jamais les remercier assez de tout ce qu'ils ont fait pour moi

    au fil de tout ces mois de travail qui ont conduit à la réalisation du mémoire. Je veux nommer : Mr TOPANOU Victor, Mr TOUDONOU Athanase, Mr LOKO Théodore et Mr ADELOUI Arsène-Joël. A ces professeurs, je dois une fière chandelle.

    C'est aussi le moment pour moi de faire hommage à tous les autres professeurs de l'Ecole Nationale d'Administration et de Magistrature qui ont contribué sans relâche à ma formation universitaire (ENAM). Si je puis un jour dire que j'ai été formé à l'ENAM, c'est grâce à eux.

    Nul n'a jamais eu la chance d'avoir été entouré d'amis aussi dévoués que ceux que j'ai eu la chance de réunir autour de moi. DASSIGLI Fiacre et BEHINGAN David ont travaillé avec

    moi d'arrache pied, souvent jusqu'à une heure tardive. Ils ont lu et relu mon travail tant qu'ils le

    pouvaient. Mr GANMADOUALO Jean Luc (employé à la médiathèque du Centre Culturel Français), sans me connaître au départ, avait mis à ma disposition tous les CDs-ROM concernant mon thème. Sans le connaître, il est devenu mon ami et a considérablement oeuvré pour mon travail.

    Je remercie enfin, tous ceux dont j'ai dû malheureusement taire les noms, mais qui m'ont été d'une grande utilité pour la confection de ce mémoire. Je suis conscient que ces simples lignes de papier ne suffiront jamais pour le faire. Mais, si vous lisez ce travail, sachez qu'il est aussi votre

    oeuvre. Sans vous, je n'aurais sincèrement abouti à rien. Je suis fier de vous remercier.

    iv

    LISTE DES SIGLES ET ABBRÉVIATIONS

    ADM : Armes de destruction massive

    AG : Assemblée Générale des Nations Unies

    AIEA : Agence Internationale de l'Energie Atomique

    CIA : Central Intelligence Agency (service de renseignement américain)

    CS : Conseil de Sécurité des Nations Unies

    DI : Droit international

    Di : Droit interne

    E-U : Etats-Unis

    GP : Guerre préventive

    LD : Légitime défense

    LDP : Légitime défense préventive

    NSS : National Security Strategy (document sur la stratégie nationale de sécurité adopté par les Etats-Unis en 2002)

    NU : Nations Unies

    ONU : Organisation des Nations Unies OPI : Opinion publique internationale SDN : Société des Nations

    TNP : Traité de non prolifération nucléaire

    v

    SOMMAIRE

    INTRODUCTION.....................................................................................................................1

    PREMIERE PARTIE : DE LA LEGALITE DU CONCEPT DE LA GUERRE PREVENTIVE..................................................................................6

    Chapitre 1er : La légalité de la guerre préventive au regard de la doctrine.........................7

    Section 1 : La doctrine de la guerre juste....................................................................................8

    Section 2 : La doctrine de l'état de nature...............................................................................15

    Chapitre 2ème : La légalité de la guerre préventive au regard de la norme........................21

    Section 1 : La Charte de l'ONU et la notion de légitime défense préventive...........................22

    Section 2 : Les dispositions constitutionnelles des Etats..........................................................29

    DEUXIEME PARTIE : DE LA LEGITIMITE DU CONCEPT DE LA GUERRE PREVENTIVE................................................................................34

    Chapitre 1er : La deuxième guerre d'Irak : les faits et les mobiles présumés du conflit...35

    Section 1 : Historique de la guerre d'Irak.................................................................................36

    Section 2 : Les mobiles présumés de l'intervention..................................................................42

    Chapitre 2ème: Quelle légitimité pour le concept de la guerre préventive au regard

    de la croisade irakienne ?..............................................................................50

    Section 1 : Les facteurs favorables à la légitimité du concept..................................................51

    Section 2 : Les facteurs d'illégitimité du concept.....................................................................58

    CONCLUSION.......................................................................................................................66

    BIBLIOGRAPHIE.................................................................................................................69

    vi

    INTRODUCTION GENERALE

    INTRODUCTION GENERALE

    En 1750, se référant à la guerre de succession d'Espagne de 17001, De Vattel écrivait :

    «Dès qu'un Etat a donné des marques d'injustice, d'avidité, d'orgueil, d'ambition, d'un désir impérieux de faire la loi, c'est un voisin suspect dont on doit se garder : on peut le prendre au moment où il est sur le point de recevoir un accroissement formidable de puissance, lui demander des sûretés et s'il hésite à les donner, prévenir ses desseins par la force des

    armes »2. Cette assertion trouve toute sa pertinence en ce que la guerre n'était pas encore une

    chose tout à fait prohibée entre les Etats au XVIIIe siècle. Pour prévenir la puissance d'une autre nation, un Etat se réservait le droit d'agresser cette nation. Mais depuis lors, le droit international s'est beaucoup plus affermi et la portée du droit à la guerre a considérablement diminué. Le recours à la force est désormais strictement régi par la Charte des Nations Unies. Seule une autorisation du Conseil de Sécurité (CS) des Nations Unies (NU) ou une légitime défense, peut en principe permettre sa mise en oeuvre.3

    Cependant, toujours à la recherche d'une marge de manoeuvre plus grande, les Etats

    ont procédé à une interprétation très large de la légitime défense, afin de donner un fondement juridique à certaines de leurs actions armées controversées. Sans ce fondement juridique, lesdites actions se verraient qualifiées d'agression et les conséquences pourraient en suivre.

    La notion de la légitime défense a pour ce fait connu des interprétations diverses tendant à l'élargir. C'est entre autres, le problème de la légitime défense préventive qui s'est dessinée d'abord par la crise des fusées de 19624 pendant la guerre froide. Mais, c'est en 1967 qu'elle

    fut concrétisée par l'Etat d'Israël qui l'invoqua contre l'Egypte, lors de la guerre des six jours.

    A l'origine de cette guerre, l'Egypte avait en effet opéré un déploiement massif de ces troupes aux frontières israéliennes et proférait ouvertement son intention de détruire l'Etat

    d'Israël. Le Président égyptien Nasser ferma le détroit de Tiran afin d'empêcher Israël d'avoir

    1 Cette guerre déclenchée par l'Angleterre pour « prévenir les desseins » de Louis XIV sur l'Europe, trouve ses origines dans

    le décès du Roi d'Espagne qui mourut sans descendance et dont le testament offrait le trône d'Espagne au petit fils du roi de France (Louis XIV). Or, en 1700 la France et l'Angleterre étaient les seules puissances dominantes de l'Europe. Dans le but d'accroître sa suprématie sur l'Europe en surpassant l'Angleterre, Louis XIV refusa d'exclure son petit fils, le Duc d'Anjou

    de la succession au trône de France, envisageant ainsi une union franco-espagnole très redoutée. C'est alors qu'à la tête d'une

    coalition, l'Angleterre attaque le royaume de France avant même que ce dernier n'accroisse sa puissance au risque de menacer la domination anglaise.

    2Michaël Walzer. Guerres justes et injustes : Argumentations morales avec exemples historiques. 2ème édition. Paris : Bélin,

    1999, p. 126

    3 Confer chapitre VII de la Charte des Nations Unies.

    4Au cours de la guerre froide, pour intimider les Etats-Unis (E-U), la Russie décida d'installer des missiles nucléaires dans l'île de Cuba. Les ogives nucléaires installées sur l'île, avec le soutien du Président cubain, auraient pu atteindre en quelques heures, le territoire américain. Après avoir détecté grâce aux avions d'espionnage américains, l'existence de la menace, le Président John Kennedy réagit fermement en exigeant le démantèlement des fusées. Il menaça d'envahir Cuba si cela n'était

    pas fait dans les plus brefs délais.

    accès à la Mer Rouge. Nasser mobilisa par des accords, des soldats d'autres pays arabes à sa disposition et renvoya même la force d'interposition onusienne dans la zone depuis 1957. L'Etat hébreu se retrouva face à des armées arabes hostiles sur tous les fronts (au Nord par la Syrie, à l'Est par la Jordanie et au Sud-ouest par l'Egypte). En Israël, le bruit courait que l'Egypte était en position de frapper, ou du moins, qu'elle en avait l'intention. Sans attendre la concrétisation de l'attaque égyptienne, les forces armées israéliennes ont débuté les offensives

    le 5 juin 1967 contre l'Egypte et contre certains autres pays arabes ayant pactisé avec l'Egypte.1 L'Etat hébreu s'était-il défendu, ou bien avait-il commis une agression ? Ce qui est

    sûr, cette opération préventive a déclenché des polémiques de toutes parts, au sein de la communauté internationale.

    Relancé par la récente guerre d'Irak (2003), le concept de la guerre préventive se veut une guerre par laquelle, un Etat menacé d'agression peut anticiper sur son ennemi en frappant

    le premier. A mi-chemin entre une guerre défensive et une guerre offensive, il pose un problème d'interprétation évident. Il y a d'un côté, ceux qui soutiennent qu'il s'agit d'une agression, et de l'autre, ceux qui pensent que c'est une légitime défense.

    Tout le problème juridique posé par cette guerre offensive dite défensive, est celui de

    sa conformité au droit international. Le droit international autorise-t-il la légitime défense préventive comme prolongement de la légitime défense normale ?

    Nonobstant la réponse qui peut être donnée à ce questionnement, le droit ne peut pas faire abstraction de la sociologie des Etats. Ainsi, le concept de la guerre préventive mérite d'être aussi analysé sous un angle autre que celui du droit pur ; c'est-à-dire sous un angle plus réaliste.

    Grâce à la science aujourd'hui, sans déplacer son armée, un Etat peut atteindre plus facilement en un temps record, un autre Etat sans que celui-ci n'ait eu le temps nécessaire pour préparer sa défense. Cela aura des conséquences d'autant plus graves, si cette attaque était bactériologique ou nucléaire et combinée avec un groupe terroriste. Le cas le plus illustratif des dangers du terrorisme international qui puisse être donné, est celui d'Al Qaeda2

    et de son attaque du 11 septembre 2001. Le terrorisme international, soutenu par certains

    Etats, semble devenir une nouvelle forme d'agression encore plus redoutable que les armées

    1Michael Walzer. Guerres justes et injustes. Argumentations morales avec exemples historiques. Paris : Bélin, 1999, pp.130-

    135. Cf. aussi : http://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_des_Six_Jours (page consultée le 21 novembre 2005)

    2 Groupe terroriste auteur d'attentats divers contre les Etats-Unis.

    officielles. Le 11 septembre nous a révélé combien les Etats sont vulnérables à ce genre d'agression. Lorsqu'une telle agression est en phase d'élaboration sous la coupole d'un Etat dangereux et que ses preuves sont disponibles, serait-il indiqué que l'Etat menacé y réponde

    par anticipation, afin de se prévenir des dommages ? Est-il juste d'attendre d'avoir subi l'éventuelle agression avant d'y répondre ? Ou bien convient-il simplement de mettre hors d'état de nuire un adversaire menaçant avant même qu'il ait formellement accompli et revendiqué son acte ?

    Voila l'ensemble des questions auxquelles nous sommes soucieux de répondre dans notre mémoire intitulé : « Le droit à la guerre préventive : essai de réflexion sur la légalité et

    la légitimité du concept ». A travers ce mémoire, nous comptons dire si la notion de la guerre préventive est conforme au droit ; si elle est conforme à la morale, et enfin, si elle recouvre au minimum une certaine légitimité.

    A cet effet, notre méthodologie de recherche a essentiellement consisté en la collecte

    de textes juridiques internationaux et constitutionnels, de documents afférents à la doctrine de

    la guerre et enfin des documents concernant la guerre d'Irak. Cette recherche s'est opérée, entre autres, au Centre Culturel Américain et au Centre Culturel Français. En outre, nous avons eu des entretiens importants, parfois téléphoniques, avec certains professeurs spécialistes du droit international public et des relations internationales. Enfin, une part très large a été réservée aux nouvelles technologies de l'information et de la communication, notamment à l'Internet, dont l'utilisation nous a procuré les informations que nous n'avons

    pas pu trouver dans les bibliothèques béninoises parcourues. La difficulté majeure à laquelle nous avons été confrontés, a été de trouver des ouvrages consacrés exclusivement à la question de la guerre préventive. C'est d'ailleurs pourquoi, l'usage de l'Internet nous a été très bénéfique.

    Notre méthodologie de rédaction se veut scientifique et analytique. Ainsi, ce mémoire sera subdivisé en deux parties conformément à l'intitulé du thème.

    Dans la première partie (De la légalité de la guerre préventive), nous exposerons certaines positions doctrinales et des dispositions légales afin d'en déduire la licéité ou non du concept de la guerre préventive. Rappelons à ce niveau que notre objectif primordial ne sera

    pas d'apprécier la légalité de la guerre d'Irak. Pour déterminer la légalité de cette guerre, il

    nous faudra forcément faire un détour dans la notion du droit d'ingérence et dans d'autres

    concepts du droit international tels que l'applicabilité dans le temps des résolutions des Nations Unies1 etc. Or cela n'est pas notre objectif dans le cadre de ce travail. Si légale ou illégale, est la guerre d'Irak lorsqu'on tient compte du seul concept de la guerre préventive, nous ne manquerons pas de le dire. Mais cela ne nous autorisera point à nous détourner de notre travail pour analyser la légalité de la guerre d'Irak dans tous ses contours conceptuels. C'est dans la deuxième partie du mémoire que nous traiterons plus amplement de cette guerre,

    mais pas de sa légalité.

    La deuxième partie sera consacrée à la légitimité de la guerre préventive (De la légitimité de la guerre préventive). Mais comme la légitimité ne peut s'analyser seule, tel qu'on se basera sur la doctrine et la norme pour analyser la légalité, nous nous fonderons aussi sur un exemple illustratif de la guerre préventive, afin de la déterminer. Et l'exemple le plus indiqué en ce moment est celui de la récente guerre d'Irak. De cette guerre nous dégagerons les proportions de légitimité qu'on peut accorder à toute idée de légitime défense

    préventive.

    1 Nous verrons dans le développement que la guerre d'Irak ne s'est pas basée que sur le concept de la GP. En dehors de ce dernier, il y en a aussi d'autres. Or seule la GP fait l'objet de notre étude.

    PREMIERE PARTIE :

    DE LA LEGALITE DU CONCEPT DE LA GUERRE PREVENTIVE

    CHAPITRE 1er : LA LEGALITE DE LA GUERRE PREVENTIVE AU

    REGARD DE LA DOCTRINE

    La doctrine est l'un des principaux fondements du droit. Parler de légalité au regard de la doctrine peut paraître un peu abusif. Mais il n'en est pas réellement ainsi. La doctrine sert valablement de source au droit, et plus principalement au droit international de la

    guerre1.

    Ainsi, deux doctrines nous serviront de fondements pour analyser la valeur juridique de la guerre préventive. Il s'agit en premier, de celle de la guerre juste (section 1) et en second, de celle

    de l'état de nature (section 2).

    1 A plus forte raison, c'est de la doctrine qu'est née l'idée d'un droit international, notamment à partir des écrits célèbres de plusieurs auteurs tels que Hugo Grotius ( De jure belli pacis [du droit de la guerre et de la paix], 1625), Francisco de De Vitoria, Suarez, De Vattel etc. Ainsi par exemple on va jusqu'à attribuer à Hugo Grotius la paternité du droit international. Il

    en en résulte que sans la doctrine, le droit serait dépourvu d'une source très importante. Se faisant, on ne peut parler de légalité en vertu de la loi ou du droit sans faire allusion à la doctrine.

    Section 1 : La doctrine de la guerre juste

    Au sens large, l'expression ``guerre juste'' désigne l'ensemble des considérations et pratiques qui visent à déterminer les motifs pouvant justifier ou non l'usage de la force. Mais dans un sens restrictif, elle est utilisée pour désigner la théorie classique de la guerre juste, élaborée au Moyen-Age par certains auteurs. Cette théorie instaure certaines conditions à la guerre et ces conditions valent dans une certaine proportion pour justifier de la valeur d'une guerre préventive.

    Nous ferons d'abord, à toutes fins utiles, l'exposé de cette célèbre doctrine (paragraphe 1) et ensuite, nous analyserons ses implications sur la guerre préventive (paragraphe 2).

    Paragraphe 1 : Exposé de la théorie

    Elaborée tout d'abord au Moyen Age par les ecclésiastiques, cette théorie a été reprise

    à partir du XVIIème siècle par d'autres penseurs qui l'ont laïcisée pour l'intégrer au droit international. Ainsi, nous avons d'une part, la version originelle de la théorie qui porte les marques de la religion chrétienne (A) et d'autre part, la version laïcisée (B).

    A- La thèse chrétienne de la guerre juste

    La thèse chrétienne a été initiée par un certain nombre de penseurs catholiques dont

    l'un des plus importants, reste Saint Augustin. Dans son ouvrage La Cité de Dieu, Saint Augustin s'était déjà montré comme le précurseur de la thèse chrétienne de la guerre juste. Mais, c'est Saint Thomas d'Aquin qui s'est montré en vrai défenseur de ladite théorie à travers son ouvrage de renom intitulé, Somme théologique. Non seulement il rassembla tous

    les éléments qui étaient disséminés chez Saint augustin, mais il y ajouta quelques autres points très importants qui valent aujourd'hui à la théorie toute sa pertinence.

    Se questionnant si c'était toujours un péché pour un chrétien de faire la guerre, il part des principes bibliques suivants pour dégager, dans un premier temps, la réponse affirmative : Primo, toute peine infligée est un péché commis. Or, d'après certaines paroles bibliques, le seigneur inflige en retour une peine à ceux qui commettent le péché de guerre: « celui qui

    aura pris le glaive, périra par le glaive » (cf. Evangile selon Matthieu, chapitre XXVI, verset

    52)1.Toute guerre est alors illicite. Secundo, « tout ce qui est contraire au précepte divin est péché. Or il est contraire au précepte divin de faire la guerre ; car il est dit dans Matthieu (chapitre V, verset 39) : « Je vous dis de ne point résister au méchant » et dans l'Epître de Paul aux Romains (chapitre XII, verset 19) : « ne vous défendez point, mes très chers frères, mais laissez agir la colère de Dieu » C'est donc toujours un péché de faire la guerre ». Tertio, il n'y a que le péché qui soit contraire à un acte de vertu. La paix étant un acte de vertu, et la guerre étant contraire à la paix, donc contraire à la vertu, elle est forcément un

    péché. 2

    En vertu de ces principes bibliques, la guerre ne devrait être autorisée sous aucun prétexte, car elle constitue un péché absolu. Mais, s'inspirant de certains arguments de St Augustin3, St thomas admet en revanche quelques souplesses à ce principe du péché absolu de guerre. C'est ainsi qu'il fait ressortir certaines conditions sous lesquelles un chrétien peut exceptionnellement faire la guerre. Il est requis pour cela trois conditions selon St thomas : le juste titre, la juste cause et l'intention droite.

    Le juste titre suppose que la personne habilitée à prendre la décision de déclarer la guerre doit être le prince, car il n'appartient pas à une personne privée de le faire. Seule celui

    qui a la gestion des affaires publiques, donc de l'intérêt général, peut procéder à une déclaration de guerre. Selon St thomas, il est le seul à porter l'épée de Dieu afin de réprimander aussi bien les méchants du dedans que les ennemis du dehors. Mais à l'heure actuelle, on peut se demander si le juste titre revient aux institutions internes (au parlement

    par exemple) ou bien au Conseil de Sécurité des NU.4

    1 Notons que les citations bibliques ne sont pas formulées de la même manière dans toutes les bibles. Elles varient selon la traduction qui en a été faite. Mais, les idées de fond restent les mêmes quelque soit la traduction.

    2 Thomas d'Aquin. Somme théologique. In Dominique Colas. La pensée politique. Paris : Larousse, 1992, p. 136

    3 Selon Saint Augustin, « Si la discipline chrétienne, condamnoit absolument la guerre, l'évangile conseilleroit à ceux qui

    qui demandent à s'éclairer, comme le meilleur parti, de quitter les armes et de se soustraire complètement au joug de la milice.Or il leur dit : « n'usez de violence ou de fraude envers personne ; contentez-vous de votre solde ». Puisqu'il leur ordonne de se contenter de leur propre solde, il ne leur défend donc pas de faire la guerre.»

    (Cf. Thomas d'Aquin. Op cit, p. 136)

    Précisons qu'ici la solde s'entend de la rémunération versée aux militaires. Avec cette précision on perce mieux le fond de la pensée de saint Augustin tel qu'exposée par Saint thomas. Si la guerre était donc absolument interdite l'évangile ne permettrait même pas l'existence de milices ou de militaires jusqu'à autoriser la perception de solde par ces groupes.

    4 Par exemple dans la Constitution béninoise, la déclaration de guerre revient à l'exécutif, une fois qu'elle est autorisée par le

    Parlement (Cf. article 101de la Constitution béninoise). De même, dans la Constitution américaine, la déclaration de guerre

    est un pouvoir exclusif du Congrès : « le congrès aura le pouvoir de déclarer la guerre » dispose l'article 1er section8

    paragraphe11 de la Constitution américaine. Ces deux pays réservent en principe le juste titre aux institutions internes. Mais

    La juste cause, quant à elle, impose que ceux qui sont attaqués l'aient réellement mérité en se rendant coupable de quelque injustice. Reprenant ainsi Saint Augustin, la guerre juste est celle qui est sensée punir une injustice. Il n'y a donc pas de guerre juste sans une injustice commise par l'autre partie.

    L'intention droite est la dernière condition posée. Elle implique pour le prince qui veut déclarer la guerre de n'avoir pour autre idée que de poursuivre la paix, d'éviter le mal et de n'avoir aucune intention immorale cachée derrière cette guerre. Il peut donc arriver qu'une guerre soit déclarée par une autorité légitime pour une juste cause, et que cependant elle devienne illicite par la mauvaise intention de celui qui la fait.

    Voilà ainsi résumée la théorie chrétienne de la guerre juste qui, comme nous l'avons observé, conserve un aspect purement théologique. Avec l'évolution, à partir du XVIIème siècle, elle sera reprise par des théoriciens sous un aspect laïc.

    B- La thèse séculière de la guerre juste

    C'est à Grotius que nous devons la laïcisation du concept de la guerre juste élaboré par

    les théologiens chrétiens. Son oeuvre maîtresse est intitulée De jure belli ac pacis (du droit de

    la guerre et de la paix) et a été publiée en 1625.

    Avant d'aboutir à l'analyse de ce droit, Grotius part du principe de l'inviolabilité de la souveraineté des Etats. Il en dit, tout comme ses prédécesseurs (De Vitoria et Suarez), que les actes d'un Etat ne peuvent être annulés au nom de quoi que ce soit, par une volonté humaine. Cette souveraineté ne peut être limitée que par le droit, et ce parce que la souveraineté elle- même découle d'un droit. Ce droit est le droit naturel. Parlant de ce droit naturel, il l'assimile

    à la morale. Laquelle morale, Grotius fonde sur la raison de l'homme (le rationnel) et non sur

    la loi divine (la religion), se distinguant ainsi des théologiens catholiques. Désormais fondée

    sur le rationnel, cette morale se voit laïcisée avec Grotius. C'est d'une telle morale laïque et non plus religieuse, qu'il fait ressortir son droit de la guerre.

    Sur cette base, il reconnaît la licéité de la guerre car celle-ci est un acte de souveraineté, et de plus il n'y a pas d'autorité supérieure aux Etats pour les départager.

    Toutefois, il pose une stricte condition à cette licéité : il faut que la guerre soit juste.

    puisqu'ils ont tous ratifié la Charte des Nations Unies, pourrait-on dire que le juste titre reviendra de ce fait au Conseil de

    Sécurité au détriment de leurs normes constitutionnelles ?

    D'après lui, la guerre est juste quand elle répond à une injustice et c'est le droit naturel

    qui détermine les cas d'injustice. Ces cas d'injustice surviennent quand il y a atteinte aux droits fondamentaux que le droit naturel reconnaît aux Etats souverains : droit à l'égalité, droit à l'indépendance, droit à la conservation, droit au respect, droit au commerce international.

    Aucun Etat n'est sensé porter atteinte à ces droits chez un autre Etat. Toute violation

    de cette interdiction ouvre le droit de légitime défense.1

    Grotius reprend ainsi à son compte la distinction canoniste (chrétienne) entre guerres justes et guerre injustes. Il se différencie néanmoins par son affirmation des droits fondamentaux des Etats, de telle sorte que nous sommes tentés d'y voir une symétrie avec les droits fondamentaux de l'homme2. Son oeuvre sera continuée par Pufendorf et De Vattel. Mais soulignons que ce dernier, bien que partageant certaines opinions de Grotius, s'écarte de

    lui sur d'autres aspects que nous verrons plus loin.

    Retenons pour le reste que cette théorie est d'une très grande portée. C'est d'ailleurs pourquoi nous l'avons exposée. Maintenant, il conviendra d'en spécifier la portée sur la guerre préventive. Autrement dit, la guerre préventive est-elle une guerre juste ?

    Paragraphe 2 : Les implications de la théorie sur la notion de la guerre préventive

    Les implications que nous allons étudier découlent de l'une et l'autre des thèses que nous venons de présenter. La thèse catholique de la guerre juste fait prévaloir trois conditions pour que la guerre soit juste : le juste titre, la juste cause et l'intention droite. Parmi ces trois conditions, nous privilégierons la juste cause et l'intention droite car elles donnent le plus lieu

    à interprétation. De son côté, la thèse séculière met en vogue comme condition à une guerre juste, la violation d'un droit fondamental des Etats.

    Nous retiendrons deux types d'implications sur la guerre préventive : les implications

    en rapport avec les notions de la juste cause et de l'intention droite d'une part (A), et d'autre part, les implications en rapport avec les droits fondamentaux des Etats (B).

    1Nguyen Quoc Dinh, Patrick Daillier, Alain Pellet. Droit international Public. 6ème édition. Paris : LGDJ, 1999, p. 56

    2Il est tentant de voir une symétrie entre ces deux notions au moins du point de vue de leur ampleur et de leur nature. Elles

    ont toutes une valeur fondamentale et découlent toutes d'un droit naturel qu'on ne saurait arracher à l'individu ou à l'Etat.

    A- Les implications en rapport avec les notions de la juste cause et de l'intention droite

    La notion de juste cause suscite beaucoup d'interrogation de notre part. La principale

    interrogation est la suivante : une menace d'agression, de la part d'un Etat à l'égard d'un autre, peut-elle constituer une juste cause de sorte à justifier le déclenchement d'une guerre dite préventive ?

    Lorsqu'on se réfère aux écrits de St Augustin et de St Thomas d'Aquin, on peut se borner à dire que la juste cause est une injustice grave dont un Etat s'est rendu coupable et dont seule la guerre est le remède. La grande question revient donc : préparer une agression contre un autre Etat et ses populations constitue t-il une injustice ? Ou bien c'est le fait d'exécuter cette agression qui constitue l'injustice ?

    Si la préparation d'agression est une injustice, alors la guerre préventive qui prétend réparer cette injustice, répond pleinement au critère de juste cause. Sous réserve des autres conditions de la doctrine de la guerre juste, elle peut être considérée comme une guerre licite. Mais si par contre, la préparation d'une agression ne constitue encore en rien une ``infraction internationale'', c'est-à-dire une injustice, la guerre de prévention devra être considérée hors

    la loi et injuste. Compte tenu de cette ambiguïté il est donc très difficile de prendre position.

    Des éléments de réponse à cette question seront trouvés dans l'ouvrage de Jean

    Bethke Elshtain qui est intitulé : Just War Against Terror: The Burden of American Power in

    a Violent World1. Dans cet ouvrage, l'auteur a estimé qu'une intervention préventive peut satisfaire les critères d'une guerre juste. S'inspirant de St Augustin et St Thomas d'Aquin2,

    elle insiste que « prévenir les innocents de certains maux pourrait constituer un casus belli

    justifié - les innocents étant ceux qui sont incapables de se défendre eux-mêmes ». Ainsi pour

    1 La guerre juste contre la terreur: le fardeau de la puissance américaine dans un monde violent, actuellement indisponible

    en français. Mais le résumé et l'analyse en français du livre sont disponibles sur la page Web suivante :

    www.terrorisme.net/p/article_148.shtm (page consultée le 31 août 2005)

    2 Il est dit dans la Somme théologique (Question 40 article 2 : Est-il permis aux évêques de faire la guerre ?) : « Les guerres

    ne sont licites et justes qu'autant qu'elles protègent les pauvres et toute la nation contre les injures de l'ennemi. Or ce devoir paroît surtout regarder les prélats ; car saint Grégoire dit : « le loup tombe sur les brebis, lorsqu'un injuste ravisseur opprime les fidèles et les humbles ; mais celui qui paraissoit être le pasteur, et ne l'étoit pas, abandonne les brebis et prend

    la fuite, parce que, craignant quelque danger pour lui-même il n'ose résister à une injuste agression. » Donc la guerre est permise aux prélats et aux clercs... Les prélats doivent résister, non seulement aux loups qui égorgent spirituellement le troupeau mais encore aux ravisseurs et aux tyrans qui le vexent matériellement. »

    (Cf. Thomas d'Aquin. Ibidem, p. 138)

    elle, tous les civils sont à ranger dans le groupe des innocents ; d'où la force utilisée pour les épargner serait licite. Le recours à une guerre de type préventif serait donc licite s'il est destiné à servir une cause noble : prévenir les innocentes populations d'une souffrance injuste

    qui est entrain d'être organisée contre elles. Et si la défense préventive des innocentes populations n'était qu'un alibi destiné à masquer une intention immorale et inavouable du Prince ? Serait-elle toujours licite ?

    Dans ce cas, la guerre préventive devrait être perçue comme une agression en bonne et due forme parce qu'elle procèderait, d'une menace imminente inexistante. Le casus belli que constitue la préparation d'agression par l'Etat ennemi a toutes les chances d'avoir été surestimé ou même d'avoir été concocté de toutes pièces. Mais sur ce point, les positions des théoriciens sont encore quelque peu divergentes, surtout si la faute commise par l'Etat ennemi

    est vérifiable, et que l'intention malsaine ne modifie en rien le caractère répressible de cette faute.

    Les critères qui permettent de définir le caractère répressible de cette faute, peuvent être retrouvés dans la notion des « droits fondamentaux des Etats ».

    B- Les implications en rapport avec la notion des droits fondamentaux des Etats

    Ici, il est question de savoir d'abord, ce que l'on entend par «les droits fondamentaux

    des Etats» et ensuite, si la violation potentielle de l'un de ces droits serait si grave jusqu'au point d'entraîner une réplique préventive (légitime défense préventive).

    Pour Grotius, les droits fondamentaux des Etats sont : droit à l'égalité, droit à l'indépendance, droit à la conservation (c'est-à-dire qu'un Etat ne peut se voir déposséder de quelque chose qui lui appartient sans en avoir décidé ainsi), droit au respect (aucun Etat n'a

    pas le droit d'humilier un autre, en vertu du principe de l'égalité des Etats), droit au commerce international.

    Mais pour De Vattel, l'Etat est le seul interprète de ses droits fondamentaux.Ainsi, chaque Etat souverain aurait le droit absolu d'apprécier seul, ce qu'il doit faire dans l'accomplissement de ses devoirs internationaux : « il appartient à tout Etat libre de juger en conscience de ce que ses devoirs exigent, de ce qu'il peut faire ou non avec justice. Si les

    autres entreprennent de le juger, ils donnent une atteinte à sa liberté et ils le blessent dans ses

    droits les plus précieux »1. Bien que reconnaissant l'existence de droits fondamentaux pour

    les Etats, De Vattel relativise ces droits, contrairement à Grotius qui les énumère de manière objective.

    En conséquence de cette interprétation discrétionnaire de leurs droits fondamentaux,

    les Etats auraient dès lors, le droit d'apprécier eux-mêmes quelles sanctions infliger aux violations de ces droits. Ils peuvent ainsi décider de recourir à la guerre. De Vattel affirme à

    ce sujet qu'en raison de leurs divergences dans l'appréciation de la justice qui légitime la guerre, les Etats conviennent simplement que la guerre juste est celle qui revêt certaines formes, soit une guerre conduite ouvertement et non une guerre clandestine et non avouée2. Pourvu que l'Etat qui fait la guerre accepte de se soumettre à cette forme, sa guerre sera jugée juste. Peu importe la valeur de ses buts de guerre. Selon De Vattel, l'Etat est donc entièrement libre de juger de ce qu'exige de lui, la défense de ses droits fondamentaux, d'apprécier s'il doit ou non recourir à un certain type d'usage de la force.3

    Si l'Etat décide de recourir, pour la défense de ses droits fondamentaux, à une prévention par voie de force (c'est-à-dire à une intervention préventive), il est libre de le faire pourvu que l'intention de procéder ainsi soit déclarée à l'avance pour qu'on en connaisse les raisons. Ainsi ne constituant pas une guerre par surprise, la guerre préventive menée par cet Etat, devrait être licite aux vues de la théorie de De Vattel.

    En définitive, la future violation des droits fondamentaux peut entraîner une réplique préventive si l'Etat en a décidé ainsi en vertu du libre arbitre dont il jouit d'après De Vattel. Mais chez Grotius, il y a un malaise à affirmer la légitimité d'une défense préventive car cette défense irait dans tous les cas, contre certains droits fondamentaux des autres Etats tels que le droit à l'égalité, le droit à l'indépendance et même le droit au respect. Aucun Etat ne pourrait donc violer les droits fondamentaux d'un autre en premier, sous prétexte qu'il défend les siens

    qui n'ont même pas encore été violés.

    Il y a donc une nette différence entre les arguments de Grotius et ceux de De Vattel. Dans l'écart de temps entre ces deux auteurs, la théorie de l'état de nature a eu son éclosion

    1 De Vattel. Le droit des gens ou principes de la loi naturelle appliquée à la conduite et aux affaires des nations et des

    souverains. Publié en 1758 (Cité par Nguyen Quoc Dinh, Patrick Daillier, Alain Pellet. Op cit, p.57)

    2 Les guerres par surprise seules seront illicites. Toutes les autres guerres, quelles que soient leurs formes seront licites, pourvu qu'elles soient ouvertement déclarées.

    3Nguyen Quoc Dinh, Patrick Daillier, Alain Pellet. Ibidem, p.58

    avec la sortie du Léviathan de Thomas Hobbes. Cette doctrine n'a donc pas manqué d'influence sur De Vattel, ce qui explique ses interprétations libertaires des droits fondamentaux des Etats. Nous étudierons la doctrine de l'état de nature et ses implications sur

    la guerre préventive dans notre section 2.

    Section 2 : La doctrine de l'état de nature

    Selon cette théorie le milieu international n'a pas encore atteint le stade de société. Il demeure à l'état sauvage où seule la loi de la jungle règne, et les Etats y sont libres de faire la guerre comme ils l'entendent. Dans un premier temps, nous ferons l'exposé de la théorie (paragraphe1). Ensuite nous déboucherons sur les implications de ladite théorie sur la notion

    de guerre préventive (paragraphe 2).

    Paragraphe 1 : Exposé de la théorie

    Cette théorie a certes connu son véritable essor1 avec le philosophe anglais Thomas

    Hobbes, notamment dans son célèbre ouvrage Le Léviathan paru en 1651 (A). Mais en dehors

    de lui, plusieurs autres ont aussi soutenu cette argumentation (B).

    A- La pensée de Thomas Hobbes

    Pour expliquer l'état de nature, Thomas Hobbes est parti du concept selon lequel

    l'homme est naturellement porté à se quereller avec ses semblables, soit pour la recherche du profit, soit pour la défense de sa sécurité, soit pour la gloire. Il estime que le seul droit qui puisse exister dans ces conditions est le droit de nature. Il définit à ce titre le droit de nature comme « la liberté qu'a chacun d'user comme il le veut de son pouvoir propre pour la préservation de sa propre vie et en conséquence de faire tout ce qu'il considèrera, selon son jugement et sa raison, comme le moyen le mieux adapté à cette fin »2. Ainsi selon lui, à l'état

    de nature, un homme ne peut pas se dessaisir du droit naturel de défense dont il dispose

    puisqu'il n'a pas la garantie qu'en échange de l'abandon de ce droit, sa sécurité lui serait assurée : car il n'y a pas un Léviathan3 à qui confier le pouvoir de sécurité dans l'état de

    nature.

    1 « Véritable essor » et non « naissance » parce qu'avant Hobbes, des auteurs tels que Machiavel avaient déjà brossé légèrement la question sans toutefois la développer sous cet angle exact de l'expression « état de nature ».

    2 Thomas Hobbes.Le Léviathan. In Dominique Colas. La pensée politique. Paris : Larousse, 1992, p. 225

    3 Le Léviathan est le prince à qui les hommes auront confié leur droit de défense naturelle afin que celui-ci le leur assure. Dans la société internationale, l'équivalent du Léviathan serait un gouvernement mondial s'il y en avait. Mais dans l'ordre interne, le Léviathan demeure l'autorité étatique.

    Mais depuis lors, l'état de nature a pu laisser place à l'état de société à l'intérieur des Etats1, confiant ainsi la sécurité à un pouvoir commun au dessus de tous.Cependant, il subsiste intégralement dans les rapports internationaux. De manière schématique, nous obtenons de ce fait une opposition radicale entre l'ordre interne et l'ordre international. Le premier incarne l'état de société et le second, l'état de nature. De ces considérations, nous aboutissons au point crucial de la pensée de Hobbes qui fait une description assez particulière

    des relations interétatiques.

    Conformément aux exigences de l'état de nature, Hobbes soutient que les relations internationales ne sont dès lors qu'un champ où la violence règne encore entre les Républiques. Rien ne peut alors être injuste : « les notions de légitime et d'illégitime, de justice et d'injustice n'ont pas ici leur place. La où il n'est pas de pouvoir commun, il n'est pas de loi ; là où il n'est pas de loi, il n'est pas d'injustice. La violence et la ruse sont en temps de guerre les deux vertus cardinales »2. Chaque entité souveraine a le droit de se conduire comme elle l'entend.

    Cette position a été aussi partagée par d'autres théoriciens.

    B- Les pensées des autres auteurs

    Dans son ouvrage célèbre Le Prince (Publié en 1513), Nicolas Machiavel s'était déjà

    montré comme un porte-flambeau de la nature belliqueuse de la société internationale. Présenté comme un apologiste de la force, il conseillait à son élève dans cet ouvrage, de ne jamais ôter sa pensée de l'exercice de la guerre. Ainsi pour Machiavel, « seule la fin justifie

    les moyens ». Si le Prince veut faire la guerre, qu'il le fasse ; pourvu que les résultats qu'il escomptait atteindre soient atteints efficacement. Des penseurs tels que Spinoza et Raymond Aron se sont aussi penchés sur la question.

    Pour Spinoza, « les hommes dans la condition naturelle, sont ennemis les uns des autres ; ceux donc qui, ne faisant point partie d'un même Etat, gardent l'un vis-à-vis de

    1 C'est d'ailleurs parce que l'état de nature a cédé place à l'état de société qu'on parle d'Etat. Car l'Etat représente l'intérêt général. Or si les individus avaient gardé leur droit de se rendre justice eux même, il n'y aurait pas d'intérêt général et seul le

    désordre serait maître. Parler d'Etat équivaut donc à parler d'intérêt général ; et qui parle d'intérêt général parle de société.

    En conclusion, reconnaître l'existence de l'Etat entraîne d'ores et déjà qu'on admet la substitution de l'état de société à l'état

    de nature dans les rapports internes.

    2Thomas Hobbes. Op cit, p. 225

    l'autre les rapports de droit naturel, restent ennemis. C'est pourquoi si un Etat veut déclarer

    la guerre à un autre Etat pour l'assujettir, il peut l'entreprendre à bon droit, puisque pour faire la guerre, il n'a besoin que de le vouloir »1

    Raymond Aron répondra d'une manière particulière à cette question en affirmant ceci :

    « j'ai cherché ce qui constituait la spécificité des relations internationales ou interétatiques et j'ai cru trouver ce trait spécifique dans la légitimité et la légalité du recours à la force armée

    de la part des acteurs.»2

    Cette affirmation, à l'image des précédentes, en dit déjà suffisamment sur la position

    de ces auteurs par rapport à la guerre préventive, même s'ils n'ont pas toujours spécifié leurs réflexions autour de ce concept uniquement. Il nous appartient dès cet instant, de faire ressortir toutes les implications que peut avoir la théorie de l'état de nature sur la valeur de la GP.

    Paragraphe 2 : Les implications de la théorie sur la notion de la guerre préventive

    Plusieurs raisons nous autorisent à penser que la théorie de l'état de nature tend à soutenir la licéité de la guerre préventive : c'est ce que nous appelons implications positives (A). Mais compte tenu des limites propres à la doctrine de l'état de nature, la reconnaissance

    de la guerre préventive peut s'avérer être une chose difficile : ce sont les implications négatives (B).

    A- Les implications positives

    Nous partons du principe selon lequel le seul droit qui règne dans la société

    internationale n'est que le droit de nature qui assure aux Etats la liberté d'user comme ils le veulent et selon leurs propres jugements de tous les moyens adaptés pour assurer leur sécurité. S'inspirant de ce principe, si l'Etat le juge important pour sa survie, la guerre n'est donc qu'un moyen parmi tant d'autres. Même une guerre d'agression ne serait pas interdite si elle était destinée à cette fin. Il en est de même pour la guerre préventive. Cela parce que rien

    ne peut être injuste dans les relations internationales, que ce soit l'agression ou la défense vis-

    à-vis de l'agression. Il est alors sans intérêt de savoir si la guerre préventive est une agression

    1 Spinoza. Traité politique. Publié en 1677. CHP III (Cité par Marcel Merle. Sociologie des Relations internationales. 3ème

    édition. Paris : Dalloz, 1982, p. 45)

    2 Revue française de science politique. Qu'est-ce qu'une théorie des relations internationales ? Octobre 1967 (Cité par de

    Marcel Merle. Op cit, p.47)

    ou une légitime défense, donc si elle est juste ou injuste. Il n'y a qu'une seule réponse. Elle

    est juste, légitime et légale tout simplement parce que toutes les guerres sont légales dans l'état de nature.

    Pourquoi alors distinguer une guerre préventive d'une autre guerre s'il en est ainsi ?

    De toute façon, cette distinction ne doit pas avoir pour but de légaliser l'une des formes de guerre au détriment de l'autre, car toutes sont justes.

    En outre, la fin justifiant les moyens, considérer la guerre préventive comme un moyen d'atteindre le but qui est celui de se défendre contre un futur agresseur, est tout à fait justifié. L'essentiel c'est que l'Etat qui se défend ait opté pour cela comme étant un moyen de défense.

    C'est toujours dans la même optique que Spinoza affirmait que « si un Etat veut déclarer la guerre à un autre pour l'assujettir, il peut l'entreprendre à bon droit ». Le seul droit qui importe en ce moment est la volonté de l'Etat qui veut déclencher la guerre. Si cette volonté opte pour la guerre préventive, cette dernière devient alors pleinement légale. Car, comme Raymond Aron eut à le dire, ce qui constitue la spécificité des relations internationales, est « la légitimité et la légalité du recours à la force armée. » Si on s'en réfère

    à cette conception d'Aron, la GP étant un type de recours armé parmi tant d'autres, elle se trouve de ce fait légale.

    Pour appuyer l'ensemble de ce raisonnement en faveur de la guerre et plus précisément en faveur de la guerre préventive, Montesquieu défendra de manière très éloquente que : « entre les sociétés le droit de la défense naturelle entraîne quelquefois la nécessité d'attaquer, lorsqu'un peuple voit qu'une plus longue paix en mettrait un autre en état de le détruire, et que l'attaque est dans ce moment le seul moyen d'empêcher cette destruction. » La portée d'une telle pensée à l'égard de la guerre préventive n'est plus à démontrer. Lorsqu'une paix trop durable a des risques assez élevés d'offrir l'opportunité à un

    Etat ennemi de se préparer contre soi1, l'idée de défense impliquerait donc nécessairement

    d'anticiper sur l'acte d'agression en rompant la paix en premier. L'idée principale qui germe

    de cette affirmation de Montesquieu est donc qu'en vertu de la légitime défense, un Etat puisse rompre la paix sans avoir à attendre de subir la destruction qui voulait lui être infligée

    par ses adversaires.

    1 Le soi représente l'Etat contre lequel une agression se prépare

    D'une manière générale nous devons reconnaître la pertinence de tous ces développements philosophiques qui tendent à reconnaître la valeur légale1 de la guerre préventive. Mais ces points de vue restent purement philosophiques et pour ce faire, au regard

    des reproches qu'ils encourent, on peut réfuter sur cette base la valeur qu'ils octroient à la notion de GP.

    B- Les implications négatives

    Peuvent être reprochés à la notion d'état de nature, d'une part son abstraction et

    d'autre part, son caractère caricatural.

    Elle est abstraite en ce sens qu'elle n'est qu'un postulat, c'est-à-dire une hypothèse qui

    ne peut être démontrée (mais qui est seulement nécessaire pour établir une démonstration). Pour cette raison, ses partisans n'ont jamais daigné se référer à une situation historique concrète où l'homme était réellement à l'état de nature et à fortiori, dans le milieu international. Certes, la notion, entendue comme un postulat, permet évidemment d'expliquer bon nombre de comportements interétatiques. Mais il n'en demeure pas moins qu'elle est purement philosophique et explicative : d'où son abstraction. Ainsi, ne rend t-elle pas suffisamment compte de l'ensemble des phénomènes internationaux jusqu'au point de démontrer une légalité éventuelle de la guerre préventive. Même en admettant que cette théorie pourrait situer la valeur juridique de la guerre préventive, elle se fonde sur une vision trop caricaturale de la société internationale pour le faire.

    Elle se fonde sur une vision caricaturale en ce sens qu'elle opère une distinction arbitraire entre la nature de la politique intérieure et celle de la politique extérieure ; c'est-à- dire une opposition radicale entre l'ordre interne et le désordre international. Il est vrai que sur

    la scène internationale, le recours à la force semblait être plus privilégiée jusqu'à une époque donnée2 et même jusqu'à présent, alors que dans l'ordre interne il est monopolisé par la

    puissance publique. Mais cette vision des choses demeure partielle et très formelle. « Elle

    1 Comme nous avons déjà eu à le dire dans les pages précédentes, il ne s'agit pas d'une légalité au sens formel mais plutôt au sens large, si non au sens très large.

    2A titre d'exemple nous pouvons citer l'expédition maritime que l'Allemagne, l'Italie et la Grande-Bretagne avaient organisée contre le Venezuela pour contraindre celui-ci à honorer ses obligations contractuelles envers eux. C'est d'ailleurs

    en réponse à ce type d'emploi de la force que la Convention Drago-Porter a été signée en 1907.

    introduit une différence de nature là où il n'y a plus, au moins actuellement, qu'une différence de degré entre les deux types de sociétés. »1

    Cette différence de degré suppose que sur la scène internationale, tout n'est pas aussi désordonné comme il est prétendu dans la théorie de l'état de nature. Certes on n'en n'est pas encore arrivé au stade d'organisation qui prévaut dans l'ordre interne, mais une certaine organisation en vue de limiter le désordre existe déjà. Nous pourrions donner l'exemple de la création tout d'abord de la SDN et ensuite de l'ONU. Ainsi, tout en reconnaissant qu'il n'y a

    pas encore un ordre complet sur la scène internationale, nous sommes néanmoins en mesure d'infirmer le concept selon lequel il n'y a que du désordre dans ce système. Or c'est ce dernier concept qui justifiait la légalité absolue de tous les types de recours à la force. Une fois qu'il trouve ses limites, il est normal que toutes les argumentations qui se sont basées sur

    lui soient, à leur tour, remises en cause dans un premier temps (à tort ou à raison)2. Ainsi, il ne

    sera plus opportun d'affirmer de manière systématique, que le recours à la force dans les relations internationales est une chose légale et légitime et que par conséquent la guerre préventive l'est aussi. La proportion d'une telle affirmation doit être très mesurée désormais à défaut d'être systématiquement rejetée.

    Aux vues de toutes ces limites que nous venons d'énumérer, soutenir sans distinction que la guerre préventive est légale, serait trop simpliste et trop complaisant. Mais en somme il faudra retenir que la tendance de la doctrine de l'état de nature va largement en faveur de ce concept.

    Une fois la position doctrinale étudiée, il sera aussi utile de montrer celle de la norme qui est une autre source incontournable du droit.

    1 Marcel Merle. Op. cit, p. 54

    2 A tort ou à raison car certaines argumentations peuvent se baser dans le même temps sur d'autres concepts justes et de ce

    fait ne pas s'avérer forcément fausses à l'image du concept de désordre international.

    CHAPITRE 2 : LA LEGALITE DE LA GUERRE PREVENTIVE AU REGARD DE LA NORME

    Nous allons étudier ici, les instruments juridiques qui régissent

    le recours à la force dans les relations internationales. Interviennent dans ce cadre, non seulement les instruments du droit international, mais également ceux du droit interne.

    S'agissant du droit international, nous pouvons citer comme instruments juridiques essentiels, les Conventions bilatérales et multilatérales qui réglementent le jus ad bellum1. Mais, vu toutes les difficultés qu'il y aura à recueillir, à analyser et à cerner l'ensemble des Conventions bilatérales existant entre les Etats, nous nous proposons de recentrer l'analyse autour de la Charte des Nations Unies qui est à l'heure actuelle l'instrument juridique de référence qui régit les conditions de l'entrée en guerre. A côté de la Charte, nous

    embrasserons pour les besoins de l'étude, les cas de quelques

    Conventions d'importance majeure.

    En revanche, pour ce qui est du droit interne nous nous focaliserons sur les lois fondamentales des Etats car elles constituent la source par excellence de la souveraineté des Etats. D'elles, découlent certaines obligations pour les Etats sur le plan de leurs relations internationales. Il s'agit par exemple de l'obligation de faire la guerre

    ou de ne pas la faire, l'obligation de faire la guerre de sécurité nationale

    ou encore l'obligation de s'abstenir de livrer une guerre d'agression. Il

    ne sera donc pas inutile d'analyser la légalité de la guerre préventive au regard du droit interne et plus précisément au regard de quelques dispositions constitutionnelles.

    Notre première section sera consacrée à la position de la Charte des Nations Unies sur la LDP. Ensuite, dans notre deuxième section, nous analyserons certaines dispositions constitutionnelles qui

    concernent le recours à la force.

    1Le jus ad bellum, c'est le droit qui régit les conditions d'entrée en guerre. Il diffère du jus in bello et du jus post bellum. Le premier (le jus in bello), réglemente le déroulement du conflit armé, tandis que le second (le jus post bellum) réglemente

    l'après conflit.

    Section 1 : La Charte des Nations Unies et la notion de légitime défense préventive

    Avant l'élaboration et l'adoption de la Charte des Nations Unies en 1945, l'emploi de

    la force par les Etats sur la scène internationale faisait déjà l'objet de quelques Conventions1 . Mais dans les faits, l'usage de la force était toujours laissé à la discrétion des Etats comme en

    ont témoigné les deux guerres mondiales. Dans ce contexte, il apparaissait alors inutile et inopportun de régir la légitime défense, puisque attaquer un Etat ou se défendre d'un Etat par

    la force, était déjà considéré comme une chose discrétionnaire. Il n'y avait de ce fait, aucune norme spécifique concernant la légitime défense. Mais, avec l'avènement de la Charte en

    1945, la notion de légitime défense allait désormais être dotée d'un cadre normatif formel.

    En effet, après avoir posé le principe du non recours à la force en son article 2 paragraphe 4, la Charte tempère cette interdiction par l'article 51 qui crée un droit exceptionnel de légitime défense au profit des Etats qui font l'objet d'une agression2 :

    « Aucune disposition de la présente Charte ne porte atteinte au droit naturel de légitime défense, individuelle ou collective, dans le cas où un membre des Nations Unies est l'objet d'une agression armée jusqu'à ce que le Conseil de Sécurité ait pris les mesures nécessaires pour maintenir la paix et la sécurité internationales ». Mais quelle peut bien être la portée d'une telle disposition ? Peut-on y voir une autorisation implicite ou même explicite de la légitime défense préventive ?

    Depuis la création de cette norme, les opinions sont divisées sur la question. Les uns plaident pour une interprétation restrictive qui exclurait du champ de la légitime défense la guerre préventive (paragraphe 1). D'autres plaident pour une interprétation extensive qui

    inclurait la guerre préventive dans le champ de l'article 51 (paragraphe 2).

    1D'abord c'était la Convention Drago-Porter de 1907 qui interdisait en son article 1er le recouvrement armé de dettes contractuelles entre Etats.Ensuite c'était le Pacte de la SDN signé le 28 juin 1919 qui faisait état dans son préambule,

    de « certaines obligations de ne pas recourir à la guerre ». On a enfin le Pacte Briand-Kellog du 26 Août 1928 par lequel les

    Etats signataires renonçaient à la guerre en tant qu'instrument de politique nationale.

    2 Selon la résolution 3314 du 14 décembre 1974 de l'Assemblée Générale des Nations Unies, « L'agression est l'emploi de la force armée par un État contre la souveraineté, l'intégrité territoriale ou l'indépendance politique d'un autre État, ou de toute autre manière incompatible avec la Charte des Nations Unies ». (Voir la résolution 3314 dans les annexes)

    Paragraphe1 : L'interprétation restrictive de la Charte

    Soutenue par d'éminents juristes tels que Brownlie, Zanardi et Roling1, cette interprétation limite le champ de l'article 51. Elle se fonde sur l'esprit de la Charte (A) dont le

    but étant de réduire l'usage de la force, n'autoriserait la LD sous aucune autre condition qu'une agression armée préalable (B).

    A- Le fondement : l'esprit de la Charte

    La Charte des Nations Unies a pour but, tout comme l'Organisation qu'elle régit, de

    veiller à la limitation scrupuleuse de l'insécurité internationale. Cette attitude se justifie par la longue évolution juridique observée depuis la Convention Drago-Porter en 1907 et par les horreurs suscitées par la deuxième guerre mondiale. Par cette Charte les Etats ont alors convenu de rendre presque inaccessible, le droit de faire la guerre. C'est à défaut de supprimer définitivement ce droit qu'ils ont autorisé à une fin exceptionnelle, la légitime défense. Cette dernière se situe donc dans le restreint sillage des exceptions à l'interdiction de recourir à la force.

    Ainsi, depuis l'entrée en vigueur de la Charte, le principe majeur des relations internationales semble désormais être l'obligation de règlement pacifique des conflits. A ce titre, l'article 33 de la Charte dispose comme suit : « Les parties à tout différend dont la prolongation est susceptible de menacer le maintien de la paix et de la sécurité internationales doivent en rechercher la solution, avant tout, par voie de négociation, d'enquête, de médiation, de conciliation, d'arbitrage, de règlement judiciaire, de recours aux organismes ou accords régionaux, ou par d'autres moyens pacifiques de leur choix. » L'article 33 est renchéri par l'article 2 paragraphe 4 qui stipule que : « Les Membres de l'Organisation s'abstiennent, dans leurs relations internationales, de recourir à la menace ou

    à l'emploi de la force, soit contre l'intégrité territoriale ou l'indépendance politique de tout Etat, soit de toute autre manière incompatible avec les buts des Nations Unies. » La lecture cumulée de ces deux dispositions prouve que non seulement la Charte interdit strictement le

    recours à la force, mais impose également aux Etats une obligation de règlement pacifique.

    1 Chacun de ces auteurs a exposé ses idées dans les ouvrages suivants: Brownlie. International law and the use of force by

    states. Oxford : Clarendon Press, 1963 ; Zanardi. La legitima difesa nel diritto internazionale. Milan: A. Giuffré, 1972 ; Roling. On the prohibition of the use of Force (essays in honour of J. STONE). Londres: Légal changes, 1983 (Cité par Jean-

    Pierre Cot et Alain Pellet. La Charte des Nations Unies: commentaire article par article. Paris: Economica, 1985, p. 770)

    L'esprit de la Charte semble donc très précis : il entend régir très solidement le recours

    à la force sur la scène internationale. Par conséquent, la légitime défense qui a été reconnue dans la Charte comme un droit naturel, ne doit s'appliquer que si une agression armée a eu lieu au préalable.

    B- Le problème de la condition : une agression armée préalable

    Nous ne saurions commencer sans rappeler encore une fois l'énoncé de l'article 51 :

    « Aucune disposition de la présente Charte ne porte atteinte au droit naturel de légitime défense [...] dans le cas où un membre des Nations Unies est l'objet d'une agression armée

    [...] »

    A la première lecture, le texte semble clair : la légitime défense doit être postérieure à une agression militaire. Mais pour une lecture interprétative, il n'est pas aisé d'apporter une appréciation. On pourrait lire le texte des deux façons suivantes : 1-``Aucune disposition de la présente Charte ne porte atteinte au droit naturel de légitime défense [...] dans le cas où un membre des Nations Unies est l'objet d'une agression armée en cours d'exécution [...] ''

    2- ``Aucune disposition de la présente Charte ne porte atteinte au droit naturel de légitime défense [...] dans le cas où un membre des Nations Unies est l'objet d'une agression armée

    en cours de préparation [...] ''. Dans l'un ou dans l'autre des cas, la suite de l'article coïncide très bien. Mais un certain nombre de raisons permettent de penser que la condition exigée est l'agression en cours d'exécution et non l'agression en cours de préparation.

    Tout d'abord, comme nous venons de l'indiquer, à une première lecture, nous ne pourrions penser innocemment à autre chose qu'à une agression dont l'Etat est déjà victime. C'est d'ailleurs pourquoi cette interprétation fait office d'interprétation restrictive : elle restreint la condition posée à la première pensée que suscite la lecture de l'article.

    Ensuite lorsqu'on se réfère à l'un des domaines du droit où la notion de légitime défense est très bien quadrillée, en l'occurrence le droit pénal interne1, parler de légitime

    défense en l'absence d'une agression exécutée paraît absurde.

    1 Certes, le droit international et le droit interne ne sont pas d'égale comparaison. Ils n'ont pas les mêmes origines, les mêmes sujets ni les mêmes objectifs. Mais toute comparaison n'est pas pour autant exclue car bien des notions sont nées du droit

    interne et ont malgré tout inspiré le droit international. Il s'agit entre autres de la notion de responsabilité, de la notion de coutume et même, dans une moindre mesure, de la notion de légitime défense.

    En effet, l'admission de la légitime défense en droit pénal est soumise à un certain nombre de conditions. Il faut en général pour cela: une violence grave en cours d'exécution, l'impossibilité de recourir à un autre moyen en dehors de la violence pour répondre à la violence subie et enfin la proportionnalité des moyens utilisés. Il s'agit d'une notion très étroitement quadrillée en droit interne et qui n'a nul intérêt à être étendue, car cet élargissement comporte un énorme facteur de risques pour la société. Ainsi, tout individu qui

    se sentirait menacé par un autre pourrait se prévaloir d'une LDP pour attaquer en premier son prochain.

    Vu les évolutions du milieu international sur le plan sécuritaire, il est possible que l'article 51 de la Charte se prévale de l'étroitesse conférée à la légitime défense en droit interne. En admettant que la LD est dotée de la même étroitesse, il sera difficile de comprendre l'érection par certains sur le plan international, d'une thèse stipulant la possibilité pour les Etats de recourir à une LD de type préventif. Sous cet angle, la légitime défense, aussi bien sur le plan interne que sur le plan international, semble être vidée de son contenu juridique. Elle a plutôt un sens purement littéraire et fictif. Une défense qui se veut préventive n'est plus une défense : elle est tout sauf une défense. Pour demeurer légitime, la défense doit forcément intervenir après qu'une attaque ait eu lieu et non lorsque l'attaque est inexistante.

    La notion de guerre préventive semble donc être un flou jeté sur le droit. La légitime défense

    ne peut être valablement invoquée que lorsqu'une agression a eu lieu au préalable. En conséquence, la guerre préventive est illégale. Mais, ce n'est point l'avis de ceux qui prônent l'interprétation extensive de la Charte.

    Paragraphe 2 : L'interprétation extensive de la Charte

    Elle est élaborée par d'éminents juristes tels que : Waldock, Stone, Bowett, Schwebel, McDougall, Kaplan et Katzenbach1. Ceux-ci ne réfutent pas entièrement toutes les idées émises par l'autre camp. Ils reconnaissent l'esprit initial de la Charte mais soutiennent

    néanmoins, que cet esprit doit être actualisé. Ils basent toute leur argumentation sur le -

    1 Chacun de ces auteurs a exposé ses idées dans les ouvrages suivants: Waldock. The regulation of the use of force by

    individual states in international law. RCADI, Tome II, vol 81, 1952; Stone. Aggression and world order. Londres : Stevens and sons, 1958 ; Bowett. Self defense in international law. New York: Frederick A. Prager, 1958; Schebel. Aggression,

    intervention and self-defense in Modern international Law. RCADI, Tome II, vol 136, 1972; McDougall. The soviet-cuban

    Quarantine and self defense. AJIL, vol 57, 1963; Kaplan, Katzenbach The political foundations of international law. New

    York: John Wiley and sons,1961

    (Cité par Jean-Pierre Cot et Alain Pellet. Op cit, p. 770)

    contexte actuel de la Charte (A) qui nécessite d'après eux, que l'agression imminente soit prise en compte comme condition à la LD (B), au même titre que l'agression préalable.

    A- Le fondement : le contexte actuel de la Charte

    La Charte avait en effet été rédigée à une époque où l'industrie de l'armement n'avait

    pas encore atteint l'évolution actuelle. Depuis lors, plusieurs changements ont eu lieu et la vision originelle qui a inspiré la rédaction de la Charte n'est plus forcément la même. L'esprit

    de la Charte doit pouvoir se recadrer sur les nouvelles réalités et évolutions.

    C'est ainsi que l'ex Secrétaire Général des Nations Unies, Javier Pérez de Cuellar, déclarait ce qui suit quarante ans après l'entrée en vigueur de la Charte: « les changements qui

    se sont produits dans les relations internationales depuis 1945 ont, en effet, profondément influencé la manière dont il est fait application de la Charte. Parmi ces transformations je citerai notamment l'avènement de l'âge nucléaire, les progrès scientifiques et techniques qui

    ont ouvert aux relations interétatiques, des perspectives naguère inimaginables... »1.

    Selon l'internationaliste américain McDougall, un des partisans les plus farouches de cette thèse, ne pas interpréter la Charte dans son contexte actuel, serait « transformer en une farce, soit sous l'aspect de son acceptabilité, soit sous l'aspect de ses applications potentielles, le but principal de la Charte qui est de réduire les hypothèses d'emploi illicite de

    la force et de violence entre Etats »2. Ce serait réellement une comédie si les Etats

    continuaient à se plier à la Charte telle que rédigée dans son contexte d'origine alors que ce dernier a connu des évolutions de toutes sortes que les dirigeants eux-mêmes reconnaissent.

    La Charte ne peut donc être strictement interprétée dans son contexte initial, sous peine d'être en déphasage avec la réalité. A défaut de la réécrire il faut l'actualiser dans sa lecture pour ne pas handicaper le droit international. Car le droit international serait inopérant

    s'il interdisait sans nuance aux Etats de prendre des mesures raisonnablement nécessaires en

    cas de menaces graves et pressantes. C'est pourquoi l'agression imminente est requise comme une nouvelle condition de la légitime défense.

    1Jean-Pierre Cot et Alain Pellet. Op cit, Préface de l'ouvrage.

    2 Cité par Jean-Pierre Cot et Alain Pellet. Ibidem, p.775

    B- Le problème de la condition : une agression imminente

    Comme nous l'avons dit, l'article 51 de la Charte ne précise pas s'il s'agit seulement

    d'une agression qui a déjà lieu ou bien s'il s'agit aussi des agressions en cours de préparation

    qui s'exécuteront prochainement. Plusieurs raisons sous-tendent qu'il s'agirait aussi des agressions imminentes.

    La première s'inspire du droit interne de la légitime défense. A ce titre, rappelons encore une fois les conditions requises pour cela : il faut une violence grave en cours d'exécution, l'impossibilité de recourir à un autre moyen en dehors de la violence pour répondre à la violence subie et enfin la proportionnalité des moyens utilisés.Il est évident qu'en droit interne la condition indispensable pour la légitime défense est celle d'une agression en cours. Cela peut se justifier aisément car, sur le plan interne il y a un pouvoir pour prévenir l'agression. Il n'appartient donc plus à l'individu d'oeuvrer pour une légitime défense préventive en prétextant d'une agression imminente. Si une agression est en cours de préparation contre lui, le seul moyen à sa disposition est de requérir l'autorité publique pour prévenir l'exécution d'un tel acte. Mais sur le plan international c'est tout le contraire.

    Il n'y a pas un ``super Etat'' pour assurer à chaque Etat la sécurité dont il a besoin. On dira peut être de l'ONU qu'elle est détentrice de ce rôle. Mais avec toutes les failles qu'on lui connaît, notamment l'usage subjectif et arbitraire du droit de veto, une telle prévention a toutes les chances de ne pas aboutir et d'être calamiteuse pour l'Etat qui s'en est remis à elle.

    La sécurité de chaque Etat est en définitive confiée à ses propres dirigeants puisqu'il n'y a pas

    de gouvernement mondial. Et cette position ne changera que lorsque les Etats auront fait concession entière de leur souveraineté à une administration mondiale. Une telle hypothèse étant à l'heure actuelle très loin de se réaliser, il paraît insensé de conformer le droit international aux conditions du droit interne qui prescrivent une agression en cours d'exécution. Sur le plan international toutes les conditions ne sont pas remplies afin que la défense préventive soit illégale comme en droit interne.

    La deuxième raison est une prolongation de la première. Il serait contre la nature rationnelle de l'homme qu'un Etat doive attendre de subir une agression sans réagir alors même qu'il est conscient que ce complot est dangereux pour sa survie, mettant ainsi à nu sa souveraineté et la sécurité de ses sujets. A l'époque des missiles et des armes nucléaires, la

    portée de la légitime défense s'est considérablement élargie. Soutenant cette thèse, le délégué

    israélien au Conseil de Sécurité en 1981 déclarait : « le concept a assumé une application nouvelle et plus ample avec l'arrivée de l'ère nucléaire. Quiconque est d'un avis contraire

    n'a jamais vu l'horrible réalité du monde dans lequel nous vivons, en particulier pour les petits Etats si vulnérables et si peu capables de survivre à une attaque nucléaire »1.

    Enfin, la dernière raison qu'on puisse évoquer pour justifier la thèse extensive est la position de l'actuel Secrétaire Général des Nations Unies (Kofi Annan). Il affirme dans un rapport que « Les menaces imminentes sont pleinement couvertes par l'article 51 de la Charte, qui garantit le droit naturel de légitime défense de tout Etat souverain, dans le cas où

    il est l'objet d'une agression armée. » Il ajoute que « Les juristes ont depuis longtemps établi

    que cette disposition couvre les attaques imminentes, ainsi que celles qui ont déjà eu lieu »2

    En définitive, il y a du vrai dans les arguments énoncés dans les deux hypothèses

    (interprétation extensive et interprétation restrictive), mais il ne faut pas les pousser trop loin.

    La lecture restrictive correspond au souci fondamental des rédacteurs de la Charte, de restreindre autant que possible le pouvoir discrétionnaire des Etats et de rendre exceptionnel

    le recours à la légitime défense. Cette interprétation est cohérente avec la longue histoire des efforts tendant à interdire le recours à la force. Séduisante par son sens du réalisme, la lecture extensive est encore un peu plus difficile à admettre car elle se fonde plus sur la morale que

    sur le droit. C'est d'ailleurs pourquoi elle embrasse quelques aspects qui seront beaucoup plus développés dans la deuxième partie. Le droit international est, en dépit de tout, encore un peu réticent vis-à-vis du concept de la guerre préventive.

    Mais, dans l'une ou l'autre des hypothèses, il faudra conjuguer nécessairement avec le droit interne car, il comporte des éléments d'éclairage sur la position définitive à adopter. Ainsi, nous traiterons des dispositions constitutionnelles de certains Etats (Bénin, Afrique du

    sud, Allemagne et Etats-Unis) comme source éventuelle de légalité pour la guerre préventive.

    1 Jean -Pierre Cot, Alain Pellet. Op. cit. p. 775

    2Kofi Annan (Secrétaire Général des Nations Unies). Dans une liberté plus grande : développement, sécurité et respect des

    droits de l'homme pour tous : rapport. New York, 2005, p. 39 [En ligne]. Disponible sur :

    http://www.un.org/french/largerfreedom/toc.html (page consultée le 31 août 2005)

    Nous étudierons plus largement ce rapport dans la deuxième partie de notre travail et plus précisément dans le chapitre 2 où nous parlerons de la reconnaissance par l'ONU du concept de la guerre préventive.

    Section 2 : Les dispositions constitutionnelles des Etats

    En dehors des règles de droit international l'usage de la force par un Etat est aussi régi

    par le droit interne. La question principale à laquelle nous essayerons de répondre est la suivante : Il y a-t-il des Constitutions dont on peut dire qu'elles autorisent la guerre préventive ?

    Nous verrons à ce titre, les positions de quelques Constitutions africaines (paragraphe1) et occidentales (paragraphe2) par rapport à la guerre et plus précisément par rapport à la guerre préventive.

    Paragraphe 1 : Cas des Constitutions africaines

    Nous étudierons ici, la Constitution béninoise (A) et celle de l'Afrique du Sud (B).

    A- La constitution béninoise de décembre 1990

    Aux termes de l'article 41 alinéa2 de la Constitution béninoise, le Président de la

    République est « le garant de l'indépendance nationale, de l'intégrité territoriale et du respect

    de la Constitution, des traités et accords internationaux ». A ce titre, si le Parlement l'y autorise, comme le précise l'article 101, il peut déclarer la guerre et la faire dans le but de préserver l'indépendance nationale. Pour cela la Constitution a prévu deux dispositions différentes (les articles 66 et 68) qui régissent deux différents aspects de la question. La première disposition, l'article 66, prévoit les cas où le Bénin fait déjà l'objet d'une agression

    et la seconde, l'article 68, les cas où le Bénin serait menacé d'une agression de manière grave

    et imminente.

    Voici ce que stipule l'article 66 :« En cas de coup d'Etat, de putsch, d'agression par

    des mercenaires ou de coup de force quelconque, tout membre d'un organe constitutionnel a

    le droit et le devoir de faire appel à tous les moyens pour rétablir la légitimité constitutionnelle, y compris le recours aux accords de coopération militaire ou de défense existants » Cette disposition ne traite pas de la guerre préventive mais vise seulement les cas

    où rien n'a pu être fait pour prévenir l'agression. Celle qui concerne l'agression imminente est

    l'article 68 dont le contenu est le suivant : « Lorsque les institutions de la République,

    l'indépendance de la Nation, l'intégrité du territoire national ou I'exécution des engagements internationaux sont menacées de manière grave et immédiate et que le fonctionnement régulier des pouvoirs publics et constitutionnels est menacé ou interrompu, le Président de la République, après consultation du Président de l'Assemblée Nationale et du Président de la Cour Constitutionnelle, prend en conseil des Ministres les mesures exceptionnelles exigées par les circonstances sans que les droits des citoyens garantis par la Constitution soient suspendus ». Si les conditions exigées par l'article 68 sont remplies, il est alors possible d'envisager une mesure exceptionnelle de l'ordre d'une guerre préventive, pourvu que cette mesure n'entame en rien les droits garantis aux citoyens. La Constitution n'a donc pris la peine de sauvegarder que les droits des citoyens et non ceux des autres Etats ; d'où une guerre

    préventive serait possible à notre avis.1

    B- La constitution sud africaine d'avril 1994

    La Constitution sud-africaine, en son article 227, stipule :

    « 1- Obéissant à cette Constitution, la Force nationale de défense peut être employée pour servir

    a) à la défense de la République, à la protection de sa souveraineté et de son intégrité territoriale ;

    b) en conformité avec les obligations internationales de la République en ce qui concerne des organismes internationaux et d'autres Etats [...]

    2- La Force nationale de défense [...]

    d) ne viole pas le droit international coutumier qui s'impose à la République en ce qui concerne l'agression ;

    e) respecte dans les conflits armés les obligations qu'elle a selon le droit et les traités internationaux coutumiers qui s'imposent à la République ;

    f) est principalement une force défensive dans l'exercice ou l'accomplissement de ses pouvoirs et fonctions [...] »

    A travers cette disposition, on voit que le constituant sud africain a conféré à la force armée le pouvoir de préserver la souveraineté de l'Etat. Mais, cette disposition prend bien

    1 Mais cette position est discutable.

    soin de préciser aux alinéas suivants, dans quelles limites l'armée sud-africaine doit défendre

    la souveraineté. Ainsi remarque t-on qu'il lui a été fait obligation de respecter non seulement

    le droit international1 mais aussi de ne jouer qu'un rôle défensif. Il ne sera donc pas question pour elle de prétendre à une défense offensive. Elle ne doit protéger l'Etat d'Afrique du Sud que dans la mesure où celui-ci fait déjà l'objet d'une agression. Conformément à cela l'Afrique du Sud ne peut procéder à une guerre préventive et encore moins à une guerre d'agression ou à toute forme de guerre interdite par le droit international.

    Paragraphe2 : Cas des Constitutions occidentales

    Ici, nous nous baserons sur la loi fondamentale de la République fédérale d'Allemagne

    (A) et celle des Etats-Unis d'Amérique (B).

    A- La constitution allemande de mai 1949

    La Constitution allemande interdit en son article 26, la guerre d'agression et toute

    autre forme de guerre s'inscrivant dans ce cadre: « les actes susceptibles de troubler la coexistence pacifique des peuples et accomplis dans cette intention, notamment en vue de préparer une guerre d'agression, sont inconstitutionnels. Ils doivent être réprimés pénalement. » Cependant, une telle disposition n'est pas assez claire à propos de la guerre préventive. C'est à l'article 115 que nous observons des dispositions concrètes qui ont rapport avec ce type de guerre.

    L'article 115a. de la Constitution allemande dispose de ce qui suit :

    « 1- Il appartient au Bundestag, avec l'approbation du Bundesrat, de constater que le territoire fédéral fait l'objet d'une agression armée ou qu'une telle agression est imminente (état de défense)...

    5- La promulgation de l'état de défense emporte transfert au Chancelier fédéral de l'autorité et du commandement sur les forces armées.»2

    A la lecture de cet article, on est peut être tenté d'affirmer que la guerre préventive est autorisée dès que l'état de défense a été constatée et promulguée. Car juste après cette

    1 En ce qui concerne le respect du droit international, la Constitution sud-africaine soumet la Force nationale de défense aussi bien au jus ad bellum (cf. article 227 alinéa 2-d) qu'au jus in bello (cf. article 227 alinéa 2-e)

    2 Le Bundestag est l'Assemblée législative de l'Allemagne. Tandis que le Bundesrat est le Conseil fédéral de l'Allemagne ; il représente les Länder (les Etats fédérés) au Parlement.

    promulgation, le Chancelier a le pouvoir de disposer de la force armée pour assurer la défense

    de la nation allemande. Une fois que ce pouvoir lui a été transmis il sera dès lors capable de procéder à une défense offensive. Admettant une telle interprétation de la Constitution allemande, nous pourrions dire qu'elle autorise la guerre préventive (à condition que l'état de défense soit promulgué). Elle fait cependant une nuance entre celle-ci et la guerre d'agression. Toutefois, nous nous demandons si l'histoire de l'Allemagne hitlérienne légitime une telle interprétation qui met pour le moins un peu mal à aise.

    B- La constitution des Etats-Unis d'Amérique

    Pour ce qui est de la Constitution des Etats-Unis, elle reconnaît en son article premier

    section 8 alinéa 11 le pouvoir qu'a le Congrès « de déclarer la guerre ». En considérant la récente guerre en Irak qui a été légitimée par le Congrès, on peut se demander si cette Constitution ne conditionne pas la légalité d'une guerre au simple critère du juste titre. C'est-

    à-dire qu'il suffise que la guerre soit déclarée par le Congrès (donc que la condition de forme soit respectée) pour encourir légalité et justice.

    Par ailleurs, une autre disposition de la Constitution américaine offre une vision plus spécifique à la guerre défensive par offense. Il s'agit de l'alinéa 3 de l'article premier section

    10 qui dispose qu'aucun des Etats fédérés ne pourra « entrer en guerre, à moins qu'il ne soit effectivement envahi ou en danger trop imminent pour permettre le moindre délai.» Si la Constitution américaine permet aux Etats fédérés de procéder à une guerre offensive lorsqu'ils sont menacés de manière imminente, alors qu'en sera-t-il de l'Etat fédéral lui- même lorsqu'il sera menacé ? Nous considérons donc cette disposition comme indirectement valable pour l'Union entière (les Etats-Unis).

    Quoi qu'il en soit, même si une guerre préventive devrait être considérée comme légale, il faut des preuves démontrant l'imminence de l'agression en question. A défaut de cette preuve, même théoriquement légale, une guerre préventive peut perdre son caractère légal et devenir illégale.

    Ce sont ces épineuses questions qui font parfois hésiter quand on veut se prononcer sur

    la légalité de la guerre d'Irak (en considérant seulement l'aspect préventif de cette guerre). Légale ou illégale, la guerre américaine en Irak ne peut vraiment se juger que du point de vue

    de sa légitimité. Car, dépourvue de la légitimité, la légalité n'est que pure forme. Nous

    abondons ainsi dans notre deuxième partie pour traiter de la légitimité du concept de la guerre

    préventive.

    DEUXIEME PARTIE :

    DE LA LEGITIMITE DU CONCEPT DE LA GUERRE PREVENTIVE

    CHAPITRE 1 : LA DEUXIEME GUERRE D'IRAK : LES FAITS ET LES

    MOBILES PRESUMES DU CONFLIT

    Nous ne saurions apprécier la légitimité réelle de la guerre préventive sans procéder à une étude de cas. Plusieurs exemples de guerre préventive existent et peuvent être mentionnés pour mieux représenter le concept afin d'en étudier la légitimité éventuelle. Mais, compte tenu du contexte très brûlant de l'actualité internationale, nous nous focaliserons exclusivement sur la deuxième guerre d'Irak, pour mieux apprécier les facteurs qui peuvent légitimer ou non une guerre préventive.

    Après avoir fait un bref rappel des faits de la guerre d'Irak (section 1), nous analyserons les

    mobiles présumés de cette guerre (section 2).

    Section 1 : Historique de la guerre d'Irak

    Le 1er juin 2002, dans un discours devant l'académie militaire de West Point à New York, le Président américain Georges W. Bush annonça un changement de stratégie dans la politique de défense américaine. Il faisait allusion au droit que les Etats-Unis se réservaient de frapper tout Etat ennemi en premier dès qu'ils se sentiraient menacés. Cette réorientation stratégique a été consignée plus tard, dans un document baptisé « National Security Strategy »1 qui a été rendu public le 17 septembre 2002 (soit une semaine après la première présentation de la menace irakienne devant le Conseil de Sécurité de l'ONU). C'est sur cette base sécuritaire et doctrinale d'une portée stratégique que les dirigeants américains ont fondé

    leur raisonnement en faveur de la guerre contre l'Irak (paragraphe 1) ; guerre dont les retombées négatives font de plus en plus jour et tendent à répugner (paragraphe2).

    Paragraphe1 : La justification officielle de la guerre et son déroulement

    Les causes officielles du conflit sont celles annoncées par la Maison Blanche (A). Après les avoir énoncées, nous exposerons brièvement le déroulement de la guerre et ses points marquants (B).

    A- La justification officielle de la guerre d'Irak

    A travers son discours du 07 octobre 2002 au Cincinnati Museum Center dans l'Ohio2,

    le Président Georges W. BUSH invoquait trois (3) raisons principales pour entrer en guerre contre l'Irak.Il s'agissait pour lui de :

    - Lutter contre le terrorisme : L'Irak était présenté par le Président Georges Bush comme un Etat soutenant le groupe terroriste Al-Qaida3. C'est ainsi que Georges Bush déclarait : « Nous savons que l'Irak et Al-Qaida ont eu des contacts de haut niveau qui datent d'il y a une décennie. Quelques chefs d'Al-Qaida qui se sont enfuis

    de l'Afghanistan sont allés en Irak ; parmi eux, un chef très important d'Al-Qaida qui

    a reçu traitement médical à Bagdad cette année et qui a été associé à la planification d'attaques chimiques et biologiques. Nous avons appris que l'Irak a formé des

    1 Voir un extrait de ce document dans les annexes.

    2 Discours disponible en annexe mais aussi sur le site de la Maison Banche dont l'adresse de la page est la suivante :

    http://www.whitehouse.gov/news/releases/2002/10/20021007-8.es.html

    3 Groupe responsable entre autres des attentats contre le navire militaire USS Cole, des attentats contre plusieurs ambassades

    des États-Unis en Afrique et des attentats du 11 septembre 2001

    membres d'Al-Qaida pour la fabrication de bombes et gaz toxiques et mortels... L'Irak pourrait décider à tout moment de fournir une arme biologique ou chimique à un groupe terroriste ou à des terroristes individuels. L'alliance avec les terroristes pourrait permettre au régime irakien d'attaquer l'Amérique sans ne laisser aucune empreinte digitale. »1 ;

    - Eliminer les armes de destruction massive (ADM) que l'Irak était supposé détenir.

    Aux dires du Président américain, « le régime a produit des milliers de tonnes d'agents chimiques, y compris le gaz de moutarde, le gaz neurotoxique de sarin... Les photographies satellites indiquent que l'Irak reconstruit des équipements aux emplacements qui ont fait partie de son programme nucléaire dans le passé ... Si le régime irakien peut produire, acheter, ou voler une quantité d'uranium fortement enrichi plus grand qu'un base-ball simple, il pourrait avoir une arme nucléaire en moins d'une année. Et si nous permettons qu'il se passe cela, une ligne terrible serait croisée.Saddam Hussein serait en mesure de passer la technologie nucléaire aux

    terroristes. »2

    - Libérer le peuple irakien de la servitude, et de pacifier la région du Moyen-Orient en implantant une démocratie exemplaire en Irak : «Les vies des citoyens irakiens s'amélioreraient spectaculairement si Saddam Hussein n'était plus au pouvoir... L'Amérique croit que toutes les personnes ont droit à l'espoir et aux droits de l'homme, aux exigences non négociables de la dignité humaine... L'oppression des Kurdes, des Assyriens, des Turcomans, des Chiites, des Sunnites et d'autres sera levée.

    La longue captivité de l'Irak finira, et une ère de nouvel espoir commencera. » 3

    Revenant à la question de l'opportunité d'une guerre préventive contre l'Irak, et plus précisément à celle de savoir en quoi l'Irak est une menace imminente, le Président américain répond en disant : « Les armes de destruction massive de l'Irak sont commandées par un tyran meurtrier qui a déjà utilisé des armes chimiques pour tuer des milliers de personnes. Ce

    même tyran a essayé de dominer le Moyen-Orient, a envahi et a brutalement occupé un petit

    1 Extrait du discours du Président BUSH le 07 octobre 2002 en Ohio. (Ma traduction)

    2 Extrait du discours du Président BUSH le 07 octobre 2002 en Ohio. (Ma traduction)

    3 Extrait du discours du Président BUSH le 07 octobre 2002 en Ohio. (Ma traduction). Notons que parmi les trois motifs avancés par la Maison Blanche, celui-ci est très peu en rapport avec l'idée d'une guerre préventive. Il est plutôt en rapport

    avec la notion du droit d'ingérence qui ne fera pas l'objet de nos développements puisque n'entrant pas dans le cadre de notre étude.

    voisin, a frappé d'autres nations sans avertissement, et tient une hostilité persistante en vers

    les Etats-Unis. » Ce tyran est donc une menace imminente contre laquelle la guerre s'avère indispensable ; et de préférence une guerre préventive. A défaut de ce type particulier de guerre, celui-ci risque de sévir en premier. Or les Etats-Unis n'entendent plus prendre le risque de subir en premier depuis le 11 septembre 2001.

    Les raisons avancées pour justifier de l'opportunité d'une guerre préventive contre Saddam Hussein ont été contestées par de nombreux analystes et responsables politiques. Cette contestation a entraîné en son temps, un important conflit diplomatique à l'ONU entre

    les partisans de la guerre (Etats-Unis et Royaume Uni) et ceux de la paix (France, Russie, Chine, Allemagne). Ces derniers estiment que tous les moyens pacifiques n'avaient pas encore

    été exploités. Ils préconisaient à ce titre, qu'il fallait donner encore du temps à la mission des inspecteurs pour qu'ils apportent les preuves nécessaires pouvant justifier une intervention éventuelle.

    Cependant, ce conflit diplomatique n'a pas pu empêcher les partisans de la guerre d'envahir l'Irak. Il conviendra maintenant de relater brièvement le déroulement de conflit.

    B- Le déroulement du conflit irakien

    Etant donné les réticences des partisans de la paix et la menace de leur part d'utiliser

    leur droit de veto pour empêcher une approbation à l'ONU de la guerre contre l'Irak, les forces

    de la coalition1 ont décidé d'attaquer l'Irak sans l'aval de l'ONU. Fort de l'autorisation du Congrès donnée depuis le 10 Octobre 2002, le Président américain déclara que « le Conseil de Sécurité des Nations Unies ne s'est pas montré à la hauteur de ses responsabilités. » Le 17 mars 2003, il lança un ultimatum de 48 heures au régime irakien.

    Quelques heures après la fin de l'ultimatum, les Etats- Unis débutent la guerre d'Irak.

    Ils lancent quelques missiles sur Bagdad. L'Irak réplique comme il peut mais sans créer de grands dégâts. Les systèmes de défense irakiens sont très tôt pilonnés et détruits. Les

    infrastructures d'importance stratégique et psychologique sont rasées par la coalition dans

    1 Les 49 pays de la coalition cités par la Maison Blanche sont : Afghanistan, Albanie, Angola, Australie, Azerbaïdjan, Bulgarie, Colombie, Corée du Sud, Costa Rica, Danemark, République dominicaine, Salvador, Erytrée, Espagne (retrait des

    troupes en mars 2004, après les élections législatives), Estonie, Ethiopie, Georgie, Honduras, Hongrie, Italie, Islande, Japon,

    Koweït, Lituanie, République de Macédoine, Îles Marshall, Micronésie, Mongolie, Nicaragua, Ouganda, Ouzbékistan, Palau, Panama, Philippines (jusqu'à l'exécution d'un otage philippin en juillet 2004), Pologne, Portugal, Roumanie, Rwanda,

    Singapour, Slovaquie, République tchèque, Royaume-Uni, Tonga, Turquie, Ukraine.

    l'espoir de voir des désertions massives dans l'armée irakienne ou un soulèvement de la population irakienne.

    Après environ trois semaines de combat, l'armée américaine pénétra dans Bagdad, menant des attaques contre des bâtiments symboliques du gouvernement irakien. Le régime

    de Saddam Hussein tomba dans les jours les jours qui suivirent. L'armée américaine prit le contrôle de la capitale.

    Réunis symboliquement dans un jeu de cartes, la plupart des hauts dignitaires du régime furent capturés. En février 2005, sur les 55 plus hauts dignitaires de l'ancien régime, seuls 11 étaient encore en fuite. Quant à Saddam Hussein, il avait été capturé dans une cave

    par l'armée américaine à Tikrit dans la nuit du 13 au 14 décembre 2003, avec l'aide des Kurdes1. Le 1er mai de la même année, le Président américain annonça la fin officielle de la guerre contre l'Irak.

    Certes, le conflit est officiellement terminé. Mais, elle a engendré de nombreuses suites dont nous mentionnerons les plus importantes.

    Paragraphe 2 : Les suites de la guerre d'Irak

    Jusqu'à présent on ne peut pas affirmer sans gêne que la guerre irakienne est réellement terminée. Elle continue par ses nombreuses conséquences dont un risque de plus

    en plus élevé de voir la région se déstabiliser (A). Hormis ce risque pour le moins probable, une vive polémique a actuellement cours sur l'existence réelle des armes de destruction massive (B).

    A- Un après-guerre sombre : le risque de déstabilisation d'une région fragile

    Le renversement du régime de Saddam Hussein a eu de nombreux inconvénients sur la

    stabilité de l'Irak et risque à long terme de déstabiliser toute la région du Moyen Orient. Pour mieux comprendre ces inconvénients et leurs effets sur la stabilité, il nous faudra faire un détour dans l'histoire ethno confessionnelle de l'Irak.

    En effet la composition de la population irakienne est très complexe. Après l'effondrement de l'empire Ottoman qui s'appuyait, pour son administration, sur les éléments

    1Encyclopédie Wikipédia. Guerre en Irak (2oo3-2005). [En ligne]. Disponible sur :

    http://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_en_Iraq_%282003-2005%29 (page consultée le 28 octobre 2005)

    sunnites, l'Irak a été créé par les britanniques à partir de trois provinces. La première province, Bassora, est peuplée de chiites de rite jafârite qui représentait 55% de la population totale. La deuxième province est Bagdad. Elle est essentiellement peuplée -sauf la capitale qui

    est mixte- de sunnites de rite hanafite qui représentent 20% de la population totale. Enfin, Mossoul la troisième province, est essentiellement peuplée de kurdes qui représentent 20% de

    la population totale. Ces derniers sont sunnites de rite châfite dans leur ensemble. Au total, les

    75% de la population sont arabes. Plus de 95% sont musulmans. Les minorités ethniques sont composées de Turkmènes (environ 500 000) et de minorités religieuses comprenant les chrétiens (Assyriens, Chaldéens, plus nombreux que les précédents) et les Yésidis, une secte dualiste kurde.1 Notons aussi que les kurdes sont répartis dans toute l'Asie de l'ouest. On les retrouve en Turquie, en Iran, en Irak, en Syrie, en Arménie et en Azerbaïdjan.

    A leur départ d'Irak, les Britanniques confièrent le pouvoir aux sunnites alors que la majorité était chiite. Une telle situation alimentait déjà beaucoup de rancoeurs internes. Mais c'est le renversement de Saddam Hussein (un sunnite) par la coalition en 2003 qui a déclenché encore une fois les rivalités2. Ces rivalités se sont accélérées à cause de l'impréparation de la coalition à l'après guerre. Cette impréparation à gérer les affrontements interethniques pouvant découler de la guerre, démontre que la coalition américaine n'avait pas

    pris la mesure du risque que cette intervention comportait. Cette erreur expose l'Irak et tout le

    Proche-Orient à des lendemains qui oscillent entre le chaos, la guerre civile et l'éclatement.

    L'insécurité augmente sans cesse (pillages, attaques terroristes, agressions, meurtres, prises d'otages...). Les divisions ethniques et religieuses constituent la cause principale de cette instabilité qui règne actuellement. De toute façon, les désaccords entre ces différentes

    communautés sont loin de se terminer3.

    1 Gérard Chaliand. D'une guerre d'Irak à l'autre : violence et politique au Moyen-Orient 1991-2004. Paris : Métaillé, 2004,

    Pp. 199-200

    2 Numériquement majoritaires, les chiites considèrent qu'ils ont été lésés depuis la création de l'Irak par le pouvoir central qui, depuis lors, a été toujours détenu par les Sunnites. Ils se mobilisent donc autour du pouvoir sans vouloir le partager encore avec les sunnites qui l'ont eu jusque ici. Or ces derniers n'entendent pas laisser faire cela. C'est ainsi que le climat de terreur s'installe notamment avec les assassinats et attentats que les deux camps perpètrent l'un contre l'autre

    3 Le régime sera-t-il ou non fédéral ? Comment, surtout, la rente pétrolière sera-t-elle partagée ? Quel poids aura la charia, la

    loi islamique ? Même le nom du pays a posé problème. Les Kurdes réclamaient la référence à son caractère «fédéral». Les chiites demandaient l'inclusion du mot «islamique». Faute de mieux, chacun devrait se contenter du nom actuel : république

    d'Irak.

    L'autonomie du Kurdistan, qui existe de facto depuis maintenant treize ans, demeure une des principales pierres d'achoppement. Plus encore que ses pouvoirs, ce sont ses contours qui divisent les négociateurs. Sous le régime baasiste, la protection des Occidentaux, qui s'arrêtait au 36e parallèle, tenait lieu de frontière. Les Kurdes veulent aujourd'hui étendre leur

    province jusqu'à Kirkuk, ville dont ils ont été chassés par dizaines de milliers du temps de Saddam Hussein et qui est entourée d'immenses gisements de pétrole. Or Ankara n'a jamais cessé de répéter, depuis le début de la crise irakienne, que le

    Tout départ précipité des forces de la coalition entraînera une guerre civile à coup sûr. Qu'elles le veuillent ou non, les forces de la coalition risquent d'en avoir encore pour longtemps en Irak. Elles ont maintenant l'obligation d'y rester, même si entre temps, une vive polémique s'est déclenchée au sujet des raisons évoquées pour justifier une intervention préventive aussi périlleuse.

    B- Polémique à propos des armes de destruction massive

    Aux Etats-Unis et au Royaume-Uni, plusieurs enquêtes ont eu lieu et sont encore en

    cours afin de déterminer les responsabilités à propos de fausses informations sur la présence d'armes de destruction massive en Irak, raison qu'avaient invoquée les Etats-Unis et le Royaume-Uni pour justifier leur intervention armée.

    Courant juillet 2003, différentes commissions ont été ouvertes, au Royaume Uni et aux Etats-Unis à propos des faux documents sur la présence d'armes de destruction massive, soumis par ces gouvernements à leur population. La CIA est remise en cause. Quelques uns

    de ses experts avaient alors été envoyés pour retrouver ces armes.

    Le 23 janvier 2004, David Kay, chargé de la recherche des armes de destruction massive en Irak par le gouvernement des Etats-Unis, démissionne et proclame qu'il n'y a pas

    eu d'armes de destruction massive produites depuis la fin de la première Guerre du Golfe.Un remplaçant a été nommé à sa place pour continuer la recherche. Colin Powell confirme également qu'il y a peu de chance pour qu'il y ait eu des armes de destruction massive en Irak1.

    Le 1er mars 2004, l'Australie lance à son tour une enquête indépendante sur une possible exagération de la menace que représentaient les ADM. Le 18 mars, le Président polonais Aleksander Kwasniewski déclare que son pays « a été mené en bateau » sur

    l'existence d'armes de destruction massive en Irak2.

    contrôle par les Kurdes de cette ville, serait un motif d'intervention de l'armée turque. Cette position s'explique par une

    crainte essentielle : « en prenant le contrôle des puits de pétrole, les kurdes se donnent les moyens d'une politique indépendantiste dont les conséquences pourraient se faire sentir dans les provinces turques à majorité kurde où une rébellion sanglante, entre 1984 et 1999, a fait plus de 36 000 morts », notent les observateurs de la région.

    1Encyclopédie Wikipédia. Guerre en Irak (2oo3-2005). [En ligne]. Disponible sur :

    http://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_en_Iraq_%282003-2005%29 (page consultée le 28 octobre 2005)

    2Radio France. Armes de destruction massive en Irak : plus d'un an de polémique. [en ligne]. Disponible sur :

    http://www.radiofrance.fr/reportage/dossiers/irak/reperes.php?i_id=15000008 (page consultée le 28 octobre 2005)

    Aux fils des révélations de l'actualité internationale, il apparaît de plus en plus clair

    que l'existence présumée d'ADM ayant justifié une intervention préventive en Irak, n'a jamais été vérifiée. Les Etats-Unis ont en effet renoncé depuis peu à la recherche de telles armes après plus de deux ans de quêtes infructueuses. A ce sujet Georges Bush déclara : « Je pensais que nous trouverions des armes de destruction massive. Beaucoup ici aux Etats-Unis, beaucoup dans le monde, les Nations unies, pensaient qu'il (Saddam Hussein) avait des armes

    de destruction massive et nous devons trouver ce qui a cloché dans la collecte de renseignements. » Cependant, le Président américain a aussi indiqué qu'il ne regrettait "absolument" pas d'avoir envahi l'Irak en mars 2003, même s'il n'y a pas trouvé d'armes de destruction massive. Selon lui, « Saddam était dangereux et le monde est un endroit plus sûr

    maintenant qu'il n'est plus au pouvoir »1.

    S'agirait-il donc d'une manipulation pure et simple de l'opinion publique à propos de

    ces fameuses ADM ? Si c'est le cas, il y a toutes les raisons de penser que d'autres mobiles ou enjeux de taille ont motivé le renversement du régime baasiste. Il nous revient dès lors, d'essayer de faire ressortir les probables mobiles ou enjeux qui auraient pu pousser les Etats- Unis à envahir l'Irak sous le prétexte d'une menace imminente.

    Section 2 : Les mobiles présumés de l'intervention

    Beaucoup de supputations ont eu cours sur les mobiles plus ou moins cachés de la guerre irakienne. Il a été dit que le Président Bush a voulu mener à terme le travail laissé inachevé par son père ; qu'il fallait venger l'affront du 11 septembre 2001, ou faire diversion après l'échec des tentatives de capture de Ben Laden, ou encore s'assurer le contrôle des gisements pétroliers. La presse arabe est allée même jusqu'à parler, d'un complot sioniste, conduit par un petit groupe d'idéologues néo-conservateurs, pour remodeler le Proche-Orient

    au profit d'Israël, d'une croisade intégriste chrétienne contre l'islam, d'une entreprise néo- coloniale, impériale...

    Dans le cadre de notre étude nous ne prétendrons pas à pouvoir développer tous ces aspects soulevés. Nous nous baserons seulement sur les mobiles les plus pertinents et les plus

    1Radio France. Irak : les USA renoncent à la quête d'ADM. [En ligne]. Disponible sur :

    http://www.radiofrance.fr/chaines/france-info/minisites/monde/index.php?m=2&numero=85000022 (page consultée le 28

    octobre 2005)

    développés qui auraient poussé la coalition à intervenir en Irak. La plupart de ces analyses sont propres aux Etats-Unis mais n'épargnent pas pour autant tous les pays de la coalition ; le

    cas de la Pologne sera par conséquent étudié.

    Les mobiles que nous allons étudier peuvent être rangés en deux groupes : les mobiles

    qui semblent plus ou moins légitimes (paragraphe1) et ceux qui font l'objet d'une dénonciation tapageuse (paragraphe 2).

    Paragraphe 1 : Les mobiles plus ou moins légitimes

    Deux principaux arguments retiennent notre attention dans le groupe des mobiles qui semblent moins intéressés. Le premier concerne les attentats du 11 septembre aux Etats-Unis (A). Le second est en rapport avec la deuxième guerre mondiale. Il concerne directement le passé de la Pologne (B).

    A- Le choc provoqué par l'affront du 11 septembre 2001

    Les attentats du 11 septembre 2001 ont suscité un choc émotionnel comme on en voit

    très rarement. Pour la première fois depuis 1812 les Etats-Unis ont été frappés par un ennemi extérieur sur leur territoire continental. Les pertes humaines subies dans cette attaque en une seule journée représentent l'équivalent de trois fois Pearl Harbor, ou encore près d'un huitième des pertes totales subies pendant la guerre du Viêt-Nam1. Ces attentats ont touché les deux symboles de la puissance américaine ; le symbole militaire avec le pentagone, et le symbole économique avec le World Trade Center. S'en fallait-il de très peu pour que la Maison Blanche soit aussi atteinte. Néanmoins, l'objectif visé par les terroristes avait été atteint : la vulnérabilité de la super puissance américaine fut mise à nu.

    Ces attaques constituaient donc bel et bien une déclaration de guerre. Mais une déclaration de guerre de la part de quel Etat, lorsqu'on admet que le groupe Al Qaïda a sans doute agi avec la collaboration de certains Etats dans l'ombre ? Le premier Etat complice trouvé sur la base des preuves et d'une manière légitime par la communauté internationale était l'Afghanistan. Une campagne sous mandat de l'ONU avait alors été très tôt menée

    contre le régime des Talibans.

    1Pascal Boniface (sous la direction de). Les leçons du 11 septembre. Paris : PUF, 2001, p. 8

    Mais persuadés que la guerre aux Talibans n'était que la première phase d'une guerre globale en réponse au 11 septembre, les Etats-Unis ont continué d'identifier à leur manière les autres complices ayant participé de près ou de loin à cet affront. En son temps, le Président américain avait même été autorisé par le Congrès à « user de toute la force nécessaire et appropriée contre les nations, Organisations ou personnes, qui selon lui ont planifié, ou aidé

    à commettre les attentats »1.

    Le 20 septembre 2001, soit neuf jours après les attentats, la campagne contre le terrorisme a été explicitée par le Président lors d'un discours devant le Congrès. Cette campagne ne sera pas limitée à une série de bombardements punitifs ou à une grande bataille, mais elle impliquera une « campagne prolongée » s'étendant à plusieurs théâtres d'opération jusqu'à ce que « chaque groupe terroriste à visée mondiale ait été découvert, arrêté et détruit

    ». Cette campagne prolongée a été par la suite étendue à l'axe du mal (Irak, Iran et Corée du

    Nord) en raison de l'intention de ces pays de développer des armements nucléaires, chimiques

    et bactériologiques2. Or depuis le 11 septembre, les Etats-Unis craignent de manière obsessionnelle la jonction entre la technologie chimique et le terrorisme international.

    Le lundi 12 septembre 2002, soit un an après les attentats, le Président Bush présente devant le Conseil de Sécurité, la guerre d'Irak comme une manière de prévenir cette jonction.

    Le 11 septembre 2001 a donc changé la donne de la défense aux Etats-Unis : ceux-ci n'entendent plus subir avant de réagir.

    En réalité, l'argument qui consiste en la prévention d'une jonction entre les armes biologiques et le terrorisme, aurait pu tout à fait être juste. Il aurait pu être juste s'il en existait

    les preuves contre l'Irak. Mais ce n'est pas le cas. 3

    Le 11 septembre 2001, bien qu'étant une raison historique déterminante dans la politique de défense des Etats-Unis, ne suffira pas à justifier leur engagement en Irak. En ce

    qui concerne la Pologne, quelles pourraient bien être les raisons historiques qui l'auraient

    poussé à s'engager aux côtés des Etats-Unis ?

    1Pascal Boniface (sous la direction de). Les leçons du 11 septembre. Paris : PUF, 2001, p. 47

    2 Michael T. Klare. Les vrais desseins de M. George Bush. Le monde diplomatique, novembre 2003. [En ligne]. Disponible

    sur : http://www.monde-diplomatique.fr/2002/11/KLARE/17285 (page consultée le 03 novembre 2005)

    3 Certes les Etats-Unis peuvent estimer qu'ils en ont donné les preuves en Février 2003 devant le CS des NU.

    Mais doit-on confondre les preuves formelles à des indices dont la fiabilité n'est non plus prouvée ? Cela nous interroge sur les modalités de preuve d'un danger imminent.

    B- Les raisons historiques de l'engagement polonais dans le conflit

    Il ressort du passé de la Pologne et même de l'histoire de l'humanité que si une guerre

    préventive avait été réussie contre Hitler, il n'aurait pas eu à causer tant de dégâts dans le monde. Certains documents que nous avons consultés au cours de nos recherches nous ont révélé que la Pologne, de peur de n'être envahi par l'Allemagne nazie, avait mis sur pied un projet de défense préventive qui n'avait malheureusement pas abouti.

    Nous allons exposer ici ce qu'a été la proposition polonaise de guerre préventive contre Hitler accédant au pouvoir en Allemagne en 1933. Cette connaissance de l'histoire de l'Europe nous permettra de mieux comprendre pourquoi la Pologne s'est engagée dans la guerre préventive contre l'Irak.

    Dans l'entre-deux-guerres, à partir de 1922, le fascisme s'était déjà installé en Italie et l'hitlérisme s'emparait du pouvoir en Allemagne. C'est alors que commença, à l'initiative de l'Allemagne, de l'Italie, de l'Union soviétique et du Japon, une nouvelle phase de la course aux armements à l'échelle internationale. Cela ébranla la conviction que les traités et les engagements entre Etats seraient respectés. Les conférences internationales confirmèrent que

    les obligations contractées avaient leur valeur de chiffon. Le chef de cabinet du Duce, le baron

    Aloisi, propageait ouvertement, à haute voix, la révision de la frontière germano-polonaise.1

    C'est alors que, réunissant informations et analyses du renseignement et de la diplomatie, le Maréchal Pilsudski2 fit à Paris en 1933, la proposition d'une "guerre préventive" contre le nouveau régime nazi. Le concept et le projet polonais de cette "guerre préventive" étaient fondés sur trois initiatives simultanées :

    1) concentrer des troupes polonaises en Poméranie et autour de la Prusse orientale ;

    2) demander qu'une Commission internationale examine l'état des armements secrets allemands, fabriqués en infraction au Traité de Versailles ;

    3) suggérer en cas de refus de l'Allemagne d'autoriser l'examen de son potentiel militaire, l'armée française occupe la Rhénanie et l'armée polonaise la Prusse

    orientale et la Silésie.

    1Alexandra Viatteau. 1933-2003: La guerre préventive selon Varsovie et Washington. Classiques de science politique. Classique N°4. [En ligne]. Disponible sur : http://www.diploweb.com/science-politique/guerrepreventive.htm [page consultée

    le 27 septembre 2005])

    2 Le Maréchal Pilsudski était le chef d'Etat de la Pologne. Il joua un rôle prépondérant dans la création de l'Etat Polonais à partir de 1918.

    La réponse de la France à la Pologne fut que la société française ne tolérerait pas d'offensive franco-polonaise contre Hitler et que cela pourrait être interprété comme une agression aux termes du Pacte Briand-Kellog de 1928. 1

    En tout état de cause, la position française peut se comprendre. L'Allemagne en cette période était militairement plus puissante par rapport à une France qui peinait encore à se relever de la crise économique de 1929. Déclarer une guerre préventive à l'Allemagne aurait donc été un péril audacieux et inutile. Cet acte aurait légitimé par anticipation une invasion de

    la France et de la Pologne par l'Allemagne.

    Toutefois, il n'en demeure pas moins que l'inaction des puissances européennes dans l'entre deux guerres vis-à-vis de l'Allemagne a poussé celle-ci à aiguiser son bellicisme et à envahir plus tard la Pologne. C'est cette invasion qui a d'ailleurs déclenché la deuxième guerre mondiale dont on n'ignore plus les conséquences sur la Pologne et le reste du monde.

    D'après Alexandra Viatteau, il semble que c'est dans l'intention de prendre une revanche sur le passé, que la Pologne a vite fait de saisir l'occasion irakienne d'une guerre préventive. Cela pourrait laisser croire que lutter préventivement contre Saddam Hussein, aurait pour conséquence d'éviter un désastre pareil à celui orchestré par Hitler. Seulement, dans le cas de Saddam Hussein, la menace a été plus démontrée dans le verbe que dans les faits. Le mobile polonais est donc tout aussi critiquable que celui du choc provoqué aux Etats- Unis par le 11 septembre.

    Pour toutes ces raisons nous pensons que ces motivations ne sont pas totalement légitimes d'où le thème "plus ou moins". Maintenant il convient de présenter les motivations

    les plus controversées.

    Paragraphe 2 : Les mobiles les plus controversés

    Le pétrole est considéré comme l'enjeu majeur ayant déterminé l'engagement des Etats-Unis en Irak (A). Hormis l'enjeu pétrolier de cette guerre, certains analystes voient en l'invasion de l'Irak, la première phase de la mise en oeuvre d'une idéologie stratégique et

    impériale élaborée soigneusement par « les faucons »2 du gouvernement américain (B).

    1 Waclaw Jedrzejewicz, The Polish Plan for a "Preventive War" against Germany in 1933. New York: éd. The Polish

    Review, 1966. (Cité par Alexandra Viatteau. Op cit.)

    2Les membre du gouvernement qui ont été surnommés les « les faucons » sont : le Vice-Président des Etats-Unis Dick

    Cheney, le chef du Pentagone Donald Rumsfeld et son adjoint Paul Wolfowitz.

    A- L'enjeu pétrolier

    Le contrôle du pétrole irakien est, selon la plupart des opposants à une guerre contre

    l'Irak, la raison principale pour laquelle l'administration Bush est parvenue à une confrontation militaire dite préventive.

    En réalité, plus des deux tiers des réserves mondiales connues de pétrole se trouvent concentrés sous le sol de quelques Etats situés en bordure du Golfe : Iran, Irak, Koweït, Arabie saoudite, Qatar et Emirats arabes unis. Pour les pays développés, et surtout pour les Etats-Unis, grands dilapidateurs d'énergies, cette région joue un rôle capital et détient l'une

    des clés fondamentales de leur croissance et de leur mode de vie. Toute intervention contre

    des pays du Golfe est donc considérée comme une menace pour les intérêts vitaux des Etats- Unis: «Toute tentative, de la part de n'importe quelle puissance étrangère, de prendre le contrôle de la région du golfe Persique sera considérée comme une attaque contre les intérêts vitaux des Etats-Unis d'Amérique. Et cette attaque sera repoussée par tous les moyens nécessaires, y compris la force militaire » déclarait le Président américain Jimmy Carter dans

    son discours sur l'état de la nation en 1980. 1

    Cette déclaration témoigne de toute l'importance de la région du golfe arabo-persique pour les Etats-Unis qui depuis 1945 n'ont cessé d'accroître d'une manière ou d'une autre, leur influence dans la zone. Toutefois, deux importants pays échappent à la mainmise de Washington : l'Iran, depuis la révolution islamique de 1979, et l'Irak, depuis l'invasion du Koweït, en 1990. L'Arabie saoudite est elle-même devenue suspecte depuis les attentats du 11 septembre 2001 en raison de ses liens avec l'islamisme militant et de l'aide financière qu'auraient apportée des Saoudiens au réseau Al-Qaida. Il y a donc un risque de voir baisser l'influence exercée par les Etats-Unis.

    Or ceux-ci ne peuvent pas tolérer une situation pareille surtout en l'état actuel où un rapport de la National Energy Policy Development Group, rédigé par le Vice-Président Richard Cheney, indiquait que la dépendance américaine en pétrole étranger devrait passer de

    52 % de la consommation totale en 2001 à 66 % en 2020. Ainsi les Etats-Unis vont devoir

    1Ignacio Ramonet. De la guerre perpétuelle. Le monde diplomatique, mars 2003. [En ligne]. Disponible sur :

    http://www.monde-diplomatique.fr/2003/03/RAMONET/9870 (page consultée le 03 novembre 2005)

    importer, en 2020, 60 % de pétrole de plus qu'aujourd'hui, passant ainsi de 10,4 millions de barils par jour à environ 16,7 millions1.

    Selon les analystes, c'est l'Irak qui a été désigné comme première cible afin de répondre à ces besoins en hydrocarbure. Pour ce faire, Saddam n'étant plus sous « la tutelle américaine » depuis la guerre du golfe, il faudra l'écarter du pouvoir et installer un gouvernement favorable aux Américains. Cela permettrait à ceux-ci de mettre plus facilement

    la main sur les réserves de l'Irak (les deuxièmes plus importantes du monde). Cela permettrait aussi, par la levée de l'embargo, de financer un programme pour l'exploitation davantage de nouveaux gisements dans le pays. L'Irak pourrait ainsi quadrupler sa production actuelle de

    1,5 millions de barils/jour. Pour l'heure, le pays n'en exploite que la moitié. Selon le quotidien britannique The Guardian, des réunions entre l'ancienne opposition irakienne et des représentants du gouvernement américain avaient même eu lieu à ce titre. Ces réunions avaient pour but d'après le même quotidien, d'évoquer l'avenir du pétrole après Saddam.2

    La guerre contre l'Irak ne serait donc due qu'à ses richesses pétrolières tant convoitées. Mais les enjeux de cette guerre ne se limitent pas qu'au pétrole. Selon ce qui est

    dit dans la presse, elle se justifie aussi par l'ambition nouvelle des Etats-Unis de dominer le monde.

    B- L'enjeu hégémonique et impérialiste

    L'invasion de l'Irak est considérée par certains comme la première grande étape d'une

    redéfinition de la géopolitique mondiale et du rôle que les Etats-Unis entendent y jouer. Cette vision aurait été élaborée avant le 11 septembre. Mais, ce sont les crimes commis par Al Qaeda ce jour du 11 septembre qui ont permis d'obtenir le soutien du peuple américain.

    En effet, dès avant l'accession de G. W. Bush au pouvoir, un "think tank" (réservoir à pensée) républicain avait sorti « The Project for the New American Century »3. Sont signataires de ce document : Dick Cheney qui est devenu Vice-Président, Donald Rumsfeld devenu Secrétaire à la Défense et Paul Wolfowitz devenu adjoint au Secrétaire à la

    Défense.Les objectifs de ce projet étaient :

    1Michael T. Klare. Op cit.

    2Radio France. L'Amérique et l'or noir irakien. Reportage diffusé le 28 janvier 2003. [En ligne]. Disponible sur :

    http://www.radiofrance.fr/reportage/dossiers/irak/reperes.php?type=4 (page consultée le 03 novembre 2005)

    3 Projet pour un nouveau siècle américain

    - Défendre l' « American Homeland » (terre américaine) ;

    - Combattre et gagner de manière décisive sur plusieurs théâtres d'opération simultanés : on peut avoir un front au Moyen-Orient et un autre en Asie (comme durant la seconde guerre mondial, en Europe et en Asie) ;

    - Mener des opérations de "gendarmerie" au niveau planétaire.

    - Assurer la révolution dans la gestion des affaires militaires. A ce niveau il est prévu le développement massif de nouveaux systèmes d'armement. Dans ce contexte, il est aussi envisagé la reprise de la recherche et des essais nucléaires.1

    La « stratégie de sécurité nationale » (NSS) publiée en septembre 2002, ne serait donc que l'officialisation de cette ambition militaire et idéologique. Ce document (la NSS), commente un journaliste, « affirme que si le gouvernement américain décide unilatéralement qu'un Etat représente une menace future pour les Etats-Unis, (...) ceux-ci interviendront préventivement pour éliminer la menace, si nécessaire en procédant à un "changement de

    régime" »2 Il préconiserait une domination américaine dans toutes les régions du monde. Les

    Etats-Unis agiront donc préventivement afin d'anticiper des actes hostiles de la part de leurs adversaires potentiels et de les dissuader d'accroître leur force militaire dans l'espoir de surpasser ou d'égaler la puissance américaine.

    Selon cette doctrine, les Etats-Unis doivent en effet s'assurer une force militaire sans égale pour pouvoir imposer partout leur volonté. Il leur faut donc anticiper l'apparition d'Etats capables de bloquer leurs impératifs. L'Irak représentait à cet égard, un pays-clé dans une région-clé. Mais il s'agirait aussi d'empêcher qu'un jour les puissances nucléaires comme

    la Chine et la Russie ne remettent en question leur hégémonie globale.

    La guerre en Irak marquerait donc l'apogée d'une décennie de travail intellectuel et politique intense d'un petit groupe de néoconservateurs qui ont cristallisé leurs ambitions sous

    la présidence de George Bush.3

    Vu tout cela, peut-on accepter aussi facilement que les Etats usent du concept de la guerre préventive pour mener une politique impérialiste, agressive ou bien à d'autres fins peu honorables ? Est-ce qu'une telle attitude est de nature à légitimer la guerre préventive ?

    Nous donnerons la réponse à ces questions dans le chapitre suivant.

    1 Cf. Philip S. Golub. Métamorphoses d'une politique impériale. Le monde diplomatique, mars 2003. [En ligne]. Disponible

    sur : http://www.monde-diplomatique.fr/2003/03/GOLUB/9964 (page consultée le 31 août 2005)

    2 Hicham Ben Abdallah El Alaoui. Le monde arabe au pied du mur. Le monde diplomatique, octobre 2003, p. 18

    3 Hicham Ben Abdallah El Alaoui. Op-cit. p.18

    CHAPITRE 2 : QUELLE LEGITIMITE POUR LE CONCEPT DE LA GUERRE

    PREVENTIVE AU REGARD DE LA CROISADE IRAKIENNE ?

    La guerre d'Irak nous a inspiré plusieurs idées concernant la légitimité de la notion de l'action préventive1. Nous dégagerons d'elle d'une façon très générale, quelques facteurs pouvant légitimer une guerre préventive et quelques autres qui ne la légitiment point. Ce

    n'est que de là, après comparaison des deux groupes de facteurs, que nous pouvons dire à la fin si le concept de la guerre préventive est légitime et à quelles conditions elle l'est.

    D'une part nous verrons les facteurs de légitimité du concept (section 1) et d'autre part les facteurs

    qui tendent à le désavouer (section 2).

    1 Mais toutes ces idées ne sont pas tout à fait nouvelles en soi. La plupart d'elles sont inhérentes au concept de la guerre préventive. La guerre d'Irak n'a suscité que l'émergence de quelques rares facteurs tels que : la mobilisation de la masse

    internationale contre le concept, la reconnaissante tacite de l'ONU et quelque part le terrorisme international.

    Section 1 : Les facteurs favorables à la légitimité du concept de la guerre préventive

    Au regard de l'intervention américaine en Irak, les facteurs qui contribuent à légitimer

    la doctrine de la guerre préventive sont au nombre de deux : primo, l'insécurité internationale (paragraphe 1) due à l'émergence des groupes terroristes de renom et à la menace nucléaire ; secundo, la reconnaissance apportée au concept par l'ONU (paragraphe 2).

    Paragraphe 1 : L'insécurité internationale

    Pour envahir l'Irak, les Etats-Unis ont présumé que celui-ci détenait des ADM et comptait acquérir des armes nucléaires en vue de les transmettre à des groupes terroristes. De

    ces motifs, en admettant qu'ils sont avérés, on peut déduire comme facteurs légitimant une guerre préventive, non seulement le terrorisme international, mais également l'insécurité des Etats vis-à-vis de la menace nucléaire et chimique. Face à ces deux menaces, n'importe quel Etat serait tenté d'invoquer cette doctrine, s'il en avait les moyens. Il est difficilement acceptable pour tout Etat soucieux de sécurité, de se laisser souffrir une attaque terroriste avant de l'inhiber.

    Pour ce faire nous expliquerons premièrement en quoi le terrorisme international peut s'avérer être une agression et mériter en tant que tel une répression de type préventif au moyen même d'une guerre (A). Deuxièmement nous montrerons le danger que peut constituer une menace nucléaire, chimique, ou biologique pour l'humanité entière. C'est après avoir dévoilé les risques d'une telle menace, que nous dirons sous quelle condition la guerre préventive est légitime lorsqu'il s'agit de l'insécurité nucléaire (B).

    A- Le terrorisme international : une menace à la défense nationale des Etats

    Nous montrerons dans ce sous paragraphe, en quoi le terrorisme peut constituer une

    menace de défense et plus précisément une agression de sorte à justifier légitimement une guerre de défense préventive. Mais d'abord nous essayerons de donner une définition de ce phénomène.

    Il ressort du rapport du Secrétaire Général des Nations Unies, « Dans une liberté plus grande : développement, sécurité et respect des droits de l'homme pour tous », une définition intéressante du terrorisme international. Celui-ci est défini comme « tout acte commis dans l'intention de causer la mort ou des blessures graves à des civils ou à des non-combattants,

    dans le dessein d'intimider une population ou de contraindre un gouvernement ou une

    Organisation internationale à accomplir un acte ou à s'abstenir de le faire »1. Ce rapport rejette en outre, toute idée de l'existence d'un terrorisme d'Etat mais n'exclut pas pour autant que le terrorisme, dans sa forme globale, soit une menace à la défense des Etats.

    Reconnaître en effet que le terrorisme est une menace de défense, reviendrait à lui attribuer la qualification d'une véritable agression, au sens le plus grave du terme. Cela reviendrait aussi à dire qu'en tant que tel, les groupes terroristes sont des armées potentielles

    et que la réponse militaire serait une option de défense contre ces supposées armées.

    La plupart des Etats ont érigé en principe, l'approche guerrière et militaire du phénomène terroriste2 compte tenu de l'ampleur et de la gravité de certaines opérations terroristes qui prennent la forme d'une réelle déclaration de guerre. Les exemples d'Israël et

    des Etats-Unis d'Amérique peuvent être donnés parmi les Etats qui ont fait cette option3. De

    plus, on peut lire dans le livre blanc de la défense nationale française de l'année 1994 que :

    « certaines formes d'agression comme le terrorisme ou, dans plusieurs de ses conséquences,

    le trafic de drogue, prennent des dimensions telles qu'elles peuvent menacer la sécurité ou l'intégrité du pays ; la vie de la population ou contrarier le respect de ses engagements internationaux. Elles relèvent dès lors de la défense au sens de l'article 1er de l'ordonnance

    du 7 janvier 1959»4. Le terrorisme est donc considéré comme une menace pour la défense

    nationale ; ce qui implique qu'il laisse le champ ouvert à une réponse de type militaire. C'est d'ailleurs l'exemple concret de l'intervention américaine en Afghanistan qui a été revêtue d'une légitimité consensuelle. Cependant, la voie ouverte à l'option militaire de la guerre au terrorisme, justifie t-elle pour autant une action militaire préventive ?

    Certains Etats, et plus principalement les E-U, estiment que oui. Car les nouvelles caractéristiques du terrorisme de masse ne laissent guère le choix à l'Etat qui ne peut attendre

    1 Précisons que cette définition quoi que pertinente, n'a pas fait l'objet d'unanimité au sein des Etats à cause de certaines tares qu'elle comporte. Au nombre de ces tares, nous pouvons aisément remarquer qu'elle ne différencie pas le terrorisme

    d'une prise d'otages par exemple ; la prise d'otages peut ne pas être du terrorisme mais peut consister pourtant à faire du chantage à un gouvernement ou à une Organisation internationale. En réalité, seul le contexte peut permettre de savoir si c'est

    du terrorisme.

    2 L'approche guerrière et militaire du terrorisme signifie que les terroristes ne sont plus considérés comme des civils. On leur attribue le statut de combattants militaires. Par conséquent, ils sont traités comme tels. C'est pour cette raison que certains prisonniers terroristes sont envoyés par l'armée américaine à la prison militaire de Guantanamo.

    3 Le cas d'Israël se justifie à deux égards : l'exiguïté de son territoire et la nature continuelle des attentats terroristes. Tandis que celui des E-U se justifie assez largement par le 11 septembre qui a révélé au monde entier les pires faces du terrorisme international.

    4 Didier Bigo, Sophie Body-Gendrot, Philippe Bonditti, et al. Défense et identités : un contexte sécuritaire global ? Paris : L'harmattan, 1989, p. 19

    de subir des pertes aveugles avant de réagir. En effet ce nouveau type de terrorisme est celui illustré par les attentats du 11 septembre 2001 où les groupes terroristes cherchent à infliger le plus de victimes possibles. Ils planifient les attaques sur plusieurs années (formation de pilotes d'avions de lignes dans des écoles occidentales, entraînement sur la stratégie d'attaque dans des camps militaires sur une longue durée). Ils s'organisent en branches dans tout le monde entier et capables de sévir n'importe quand (exemple des attentats de Madrid et de Londres...). Enfin, ils disposent d'une surface financière assez large et du soutien de certains Etats. Surtout en fonction de cette dernière caractéristique qui rend leur traque plus difficile,

    les Etats peuvent estimer avoir le droit d'agir par la force préventive pour se protéger.

    Si toutefois ce droit ne leur est pas reconnu, il appartient au minimum au Conseil de Sécurité des NU d'en faire usage pour les protéger, surtout si la menace en question était combinée à l'usage d'une arme biotechnologique.

    B- L'insécurité nucléaire et biotechnologique

    Aujourd'hui, nombreux sont ceux qui pensent que le risque de développement des

    ADM par les Etats ou par les groupes terroristes, de manière clandestine, est de plus en plus élevé. «Les agents biologiques possèdent des caractéristiques propres qui les rendent particulièrement attractifs à des fins terroristes ». Au nombre de ces caractéristiques, nous avons : la relative facilité de production de ces substances, la difficulté à les détecter, leur terrible impact psychologique, en plus ils ne coûtent pas aussi chers que la fabrication d'armes nucléaires.1 Les armes biologiques, moins chères que les engins nucléaires, sont donc

    à la portée de tous les Etats et groupes terroristes. Toutefois, « si la probabilité qu'un engin

    nucléaire tombe dans les mains de terroristes est réduite, on ne peut l'écarter totalement, et

    les conséquences en seraient catastrophiques ».

    De cela on peut déduire que la menace, qu'elle soit nucléaire, chimique, biologique ou même radiologique, existe réellement et peut être mise en oeuvre de deux différentes manières : soit par le biais d'un « Etat voyou », soit par le biais d'un groupe terroriste agissant seul ou agissant en collaboration avec un « Etat voyou ». Si il arrivait que cette menace se réalise, plus personne n'en ignore les conséquences. Il ne suffira qu'à jeter un regard sur les

    effets encore actuel du largage des deux bombes atomiques sur Hiroshima et Nagasaki2. (Voir

    1Cf Dominique LEGLU. La menace, Bioterrorisme : la guerre à venir. Paris : Robert Laffont, 2002, p. 171

    en annexe l'image des ravages orchestrés par cette bombe à Hiroshima). Pour empêcher que

    ces conséquences redoutables ne se reproduisent sous une forme terroriste ou agressive, la guerre préventive est-elle envisageable ?

    Quelque part, il est possible de répondre par la négative, en donnant comme argument

    la primauté de la prévention pacifique. Cette prévention pacifique passe indiscutablement par

    la politique de non prolifération dont l'axe central est le traité de non prolifération (TNP). Sous un certain angle, le traité a fonctionné. Depuis les années 1960, plus de vingt pays ont

    tiré un trait sur des programmes d'armement nucléaire, tout comme récemment la Libye.

    Mais, paradoxalement, ce traité n'a pu empêcher certains pays de développer leur armement. Certains Etats refusent d'y adhérer (Israël, Inde, Pakistan), et d'autres après y avoir adhéré, se retirent en le dénonçant (Corée du Nord).1 La prolifération nucléaire observée malgré la prévention pacifique, démontre que cette seule voie ne suffit pas pour empêcher les Etats de développer ces armes (voir en annexe carte des pays disposant d'armes ou de programmes nucléaires). Certes, il faudra la privilégier. Mais en cas d'échec, que faire pour qu'une arme aussi dangereuse ne tombe en de mauvaises mains ?

    C'est à ce niveau que nous admettons le droit de recourir à la force de manière préventive. Toutefois, précisons que pour être légitime, ce droit ne devrait être reconnu qu'au Conseil de Sécurité. Son usage ne doit intervenir que si toutes les voies pacifiques ont été épuisées en vain. Le Conseil de Sécurité des Nations Unies pourra peut être le déléguer à un Etat agissant seul, s'il le juge opportun. A défaut d'une telle délégation, aucun Etat ne devrait

    se prévaloir du droit à une guerre préventive s'il s'agit du cas précis d'une menace due à la prolifération nucléaire illicite. L'intervention du Conseil doit être considérée comme le prolongement de l'action de l'AIEA (agence internationale de l'énergie atomique). Elle doit donc être le dernier recours. Mais ce recours se doit d'être préventif. Son but est d' épargner l'humanité entière des risques de l'utilisation malencontreuse, par des groupes ou Etats

    malintentionnés, des ADM.

    2Les bombes larguées sur ces deux villes japonaises ont causé respectivement sur place, 140 000 morts à Hiroshima et 74 000

    à Nagasaki. Soixante ans après, le nombre d'irradiés (les survivants et leurs descendants atteints de diverses séquelles)

    s'élève à 266 600 selon les autorités japonaises. (Cf. Yoshibumi Wakamiya. Pesantes leçons de Hiroshima, Courrier international, N° 770 du 4 au 24 août 2005, p. 11)

    1 En 1986, l'affaire Vanunu a pu révéler au monde entier qu'Israël possédait un stock de 200 bombes. Puis, en 1998, l'Inde a procédé à cinq essais nucléaires. Deux semaines plus tard, le Pakistan en effectuait six. (Cf. Bob Edwards. Elle court, elle

    court la bombe.Courrier international, N° 770 du 4 au 24 août 2005, p. 9)

    Sans avoir à le répéter encore, il semble que l'insécurité internationale légitime très bien le concept de la guerre préventive. Mais si cela laisse encore douter quelques-uns, il faudra qu'on se réfère à la reconnaissance apportée par l'Organisation des Nations Unies à la notion.

    Paragraphe 2 : La reconnaissance ambiguë du concept de la guerre préventive par l'ONU

    L'ONU, à notre avis a apporté sa légitimation à ce concept par deux fois de suite. La première fois, cela s'était produit pendant la période ayant précédé la guerre d'Irak (A). La deuxième fois, c'était au cours du fameux projet de réforme de l'ONU où Kofi Annan avait proposé l'élaboration d'une résolution à caractère fondamental pour les décisions du Conseil

    de Sécurité d'entrer une guerre (« code d'entrée en guerre ») et qui prenne en compte les possibilités d'une intervention préventive (B).

    A- L'ONU dans la tourmente de l'avant-guerre d'Irak

    A l'analyse de l'évolution chronologique des faits depuis le 12 septembre 2002 quand

    le Président Bush a présenté son rapport « une décennie de mensonges et de défis » devant le Conseil de Sécurité, jusqu'aux derniers jours de négociation à l'ONU avant la guerre, il ressort que cette institution a tacitement reconnu la notion elle-même de guerre préventive depuis toujours. Voici comment se présente cette chronologie :

    Le 12 septembre 2002 : les Etats-Unis exposent la menace irakienne devant le Conseil

    de Sécurité et requièrent la possibilité d'une intervention contre le régime de Saddam afin de

    se défendre de cette menace. Le 17 septembre 2002 : ils présentent leur doctrine de la guerre préventive comme la future stratégie de défense qui servira de fondement à toute action militaire préventive contre leurs ennemis les plus menaçants dont l'Irak. Le 10 octobre 2002 :

    Au terme d'un débat très animé, la Chambre des représentants et le Sénat des Etats-Unis ont voté une résolution autorisant le Président George W. Bush à utiliser les forces armées

    « comme il le juge nécessaire et approprié » afin de « défendre la sécurité nationale des Etats-Unis contre la menace continue et faire appliquer toutes les résolutions du Conseil de Sécurité contre l'Irak ».

    Avec la succession des faits observés, les Etats-Unis étaient dans la perspective incontournable d'une guerre et il était impossible pour l'ONU de les en dissuader, vu déjà

    l'autorisation du Congrès. Consciente de la détermination américaine à mener une guerre contre l'Irak et non à négocier avec ce pays, l'ONU a quand même adopté à l'unanimité la résolution 1441 du 8 novembre 2002. Celle-ci faisait obligation à Saddam de fournir la liste

    des armes y compris des ADM en sa possession, d'accepter le retour des inspecteurs de l'ONU et de leur ouvrir tous les sites. En cas de violation patente dûment constatée par le Conseil de Sécurité, une intervention militaire préventive légitimée par l'Organisation devenait alors concevable. Cela se présentait un peu comme si en présence de ces preuves, la guerre préventive des Etats-Unis aurait pu recevoir quelque légitimité.

    En subordonnant l'autorisation d'une quelconque intervention préventive en Irak, à une preuve tangible, l'ONU semble avouer l'existence de ce droit au profit des Etats. Toutefois, cette légitimation du concept ne vaut pas légitimité de la guerre d'Irak elle-même1.

    La preuve la plus édifiante de la légitimité reconnue du concept par l'ONU se traduira

    par le projet de réforme des Nations Unies. Dans ce projet, il avait été proposé l'élaboration d'une résolution sur les conditions de l'autorisation de l'entrée en guerre.2

    B- L'ONU et le projet de « code d'entrée en guerre »

    La guerre d'Irak, par l'unilatéralisme dont elle est revêtue, a fait perdre à l'ONU

    beaucoup de son prestige et de son poids. Les divergences de vues qui ont opposé les Etats membres sur la façon dont l'Organisation devait assurer la sécurité collective et sur la nature

    de ce qui constitue pour le monde une menace, avaient aussi joué une partition de taille dans

    cet affaiblissement. C'est ainsi que le Secrétaire Général des Nations Unies Kofi Annan, a constitué un groupe de 16 hautes personnalités pour réfléchir sur une réforme profonde du système des Nations Unies, sur les menaces qui guettent actuellement le monde et sur l'opportunité de faire usage de la force pour les écarter.

    Dans son rapport déposé en décembre 2004 et intitulé « Un monde plus sûr : notre

    affaire à tous », le groupe des 16 personnalités de haut niveau a largement insisté sur l'utilité d'une prévention pacifique des conflits entre Etats. Mais, « que se passe-t-il en cas d'échec de

    la prévention pacifique? Si aucune des mesures préventives décrites jusqu'ici ne parvient à

    1 Tout d'abord parce que les preuves des allégations américaines contre Saddam n'ont pas été trouvées. Et ensuite parce que

    le Secrétaire Général des NU a déclaré cette guerre illégale à cause de l'absence d'autorisation de l'ONU. S'il y a eu légitimation de la guerre d'Irak par l'ONU, ce n'est qu'après coup, en octobre 2003, à travers la résolution 1551.

    2 Cette résolution avait été communément appelée dans la presse, « code d'entrée en guerre ».

    arrêter l'approche de la guerre et du chaos? Si des menaces lointaines deviennent imminentes? Ou si des menaces imminentes se concrétisent? Ou encore si une menace non imminente n'en devient pas moins très réelle et que les mesures, hormis l'usage de la force militaire, paraissent impuissantes à la stopper ?»1 C'est là que le groupe répond à la question

    de la mesure d'une menace imminente et des moyens d'y faire face.

    Dans la première phrase du paragraphe 183 de ce rapport on trouve l'affirmation suivante : « Les auteurs de la Charte des Nations Unies ont envisagé le recours à la force en vue de « prévenir et d'écarter les menaces à la paix et de réprimer tout acte d'agression ou autre rupture de la paix » ». Ce rapport soutient que traditionnellement en droit international,

    un Etat menacé peut lancer une opération militaire à condition que l'agression dont il est menacé soit imminente et qu'il n'y ait pas d'autre moyen d'écarter la menace.2

    En ce qui concerne les menaces extérieures qui ne sont pas imminentes, mais quand même latentes, ce groupe réserve le monopole d'action préventive au Conseil de Sécurité et

    ne se prononce point en faveur d'une action préventive unilatérale. Selon lui, le Chapitre VII

    de la Charte des Nations Unies confère au Conseil de Sécurité tous les pouvoirs nécessaires pour traiter de tous les types de menace sécuritaire auxquels les Etats sont confrontés ; que cette menace soit actuelle, imminente ou lointaine.

    Il faudra donc souligner une nuance d'importance majeure. Le groupe dénie aux Etats agissant seuls et non sous mandat onusien, le droit de recourir préventivement à la force si la menace dont ils se prévalent n'est pas imminente. Mais lorsque la menace est imminente, le droit à la défense préventive leur est naturellement et officiellement reconnu, même sans l'aval de l'ONU. (Voir le résumé officiel du rapport dans les annexes)

    Les interprétations et les propositions contenues dans ce rapport ont été reprises en grande partie par le Secrétaire Général des Nations Unies. Elles ont été reprises avec quelques modifications près, dans son rapport publié en 2005 et intitulé : « Dans une liberté plus

    grande : développement, sécurité et respect des droits de l'homme ». C'est ainsi que

    partageant les mêmes points de vue que les 16 personnalités de haut niveau, Kofi Annan

    1 Groupe de personnalités de haut niveau sur les menaces, les défis et le changement (Nations Unies). Un monde plus sûr :

    notre affaire à tous: rapport. New York, décembre 2004. p. 13 [En ligne] Disponible sur :

    http://www.un.org/french/secureworld/temp.html (page consultée le 31 août 2005)

    2 Groupe de personnalités de haut niveau sur les menaces, les défis et le changement (Nations Unies). Un monde plus sûr :

    notre affaire à tous: rapport. New York, décembre 2004. pp. 58-59 [En ligne] Disponible sur :

    http://www.un.org/french/secureworld/temp.html (page consultée le 31 août 2005)

    affirme dans ledit rapport : « Les menaces imminentes sont pleinement couvertes par l'article

    51 de la Charte, qui garantit le droit naturel de légitime défense de tout Etat souverain, dans

    le cas où il est l'objet d'une agression armée. Les juristes ont depuis longtemps établi que cette disposition couvre les attaques imminentes, ainsi que celles qui ont déjà eu lieu. Lorsque

    les menaces ne sont pas imminentes mais latentes, la Charte donne au Conseil de Sécurité pleine autorité pour employer la force armée, y compris de manière préventive, afin de préserver la paix et la sécurité internationales. » C'est sur cette base qu'il propose ensuite l'adoption d'un « code d'entrée en guerre » qui puisse harmoniser les positions des membres

    du Conseil de Sécurité sur les conditions d'autorisation de toutes les interventions militaires y compris préventives. « Je recommande donc au Conseil de Sécurité d'adopter une résolution établissant ces principes et faisant part de son intention de s'en inspirer lorsqu'il décidera d'autoriser ou de demander le recours à la force. » disait-il.

    Il convient dès lors, d'avouer que l'ONU s'est faite cautionnaire officielle du droit à la guerre préventive, à travers la proposition d'une telle résolution. Toutefois, il convient aussi

    de noter qu'elle a tenté de faire une nuance entre la guerre préventive contre une menace latente et la guerre préventive contre une menace imminente.

    Cela nous renvoie au problème de la guerre préemptive que plusieurs analystes et acteurs politiques se sont attelés à soutenir afin de ne pas légitimer le concept de la guerre préventive. Nous entrons ainsi de plein fouet dans notre deuxième section qui traite des facteurs défavorables à la légitimité de la GP.

    Section 2 : Les facteurs d'illégitimité du concept de la guerre préventive

    Tous les éléments ne sont pas de nature à légitimer jusqu'au bout, l'invocation du droit à la guerre préventive comme moyen de défense. La guerre d'Irak nous a montré la méfiance à l'égard du concept dans l'opinion publique internationale (OPI). Cette contestation virulente de la guerre préventive serait aussi en partie due aux risques d'effets dangereux qu'il pourrait entraîner sur les relations internationales.

    Nous exposerons en premier lieu, les manifestations de la méfiance internationale qui

    se sont traduites par une contestation internationale venue de toutes parts (paragraphe1). En second lieu, nous montrerons les risques d'effets pervers que pourrait avoir sur les rapports

    interétatiques, l'admission d'un tel concept (paragraphe 2).

    Paragraphe1 : La contestation internationale du concept

    La contestation du concept de la guerre préventive a eu lieu non seulement par la mobilisation de l'opinion publique internationale à travers des marches (A), mais aussi par un rejet catégorique de la guerre préventive au profit d'une guerre préemptive (B).

    A- La mobilisation de l'opinion publique internationale contre l'idée d'une GP

    L'ampleur des manifestations contre la guerre préventive américaine est illustrée par

    le tableau suivant :

    Dates des

    manifestations

    Lieux des

    manifestations

    Nombres des

    manifestants

    Sources des

    informations

    Observations

    particulières

    20 mars 2003

    Paris

    60 000 pers

    Le Monde, 22 mars

    2003, page 2.

    ---

    15 et 16 mars

    2003

    France

    150 000 pers

    Le Monde, 18 mars

    2003, page 5.

    ---

    Etats-Unis

    40 000 pers

    "

    ---

    Canada

    250 000 pers

    "

    ---

    Italie

    500 000 pers

    "

    ---

    Allemagne

    100 000 pers

    "

    ---

    Espagne

    ---

    "

    Pas de chiffres précis

    17 février 2003

    New York

    250 000 pers

    Le Monde, 18

    février 2003, page

    4.

    ---

    Hollywood

    30 000 pers

    "

    ---

    Chicago,

    Philadelphie, Miami, Seattle, Detroit

    ---

    "

    Pas de chiffres exacts

    San Francisco

    150 000 pers

    "

    ---

    15 février 2003

    Les 5 continents du monde

    Plus de 10

    millions de personnes

    Le Monde, 18 mars

    2003, page 5.

    ---

    NB: Pers = Personnes

    Tableau des manifestations observées contre la guerre préventive américaine

    Notons que ce tableau n'est pas une liste exhaustive des les manifestations qui ont eu lieu. Interrogés, certains manifestants ont déclaré : « Bien sûr il faut empêcher Saddam Hussein de posséder des armes de destruction massive, c'est un dictateur sanguinaire, mais une attaque préventive n'est pas moralement défendable et creusera encore le fossé entre les Etats-Unis et l'Europe, les Etats-Unis et les Arabes et les Etats-Unis et le monde »1.

    Pour sa part, l'Eglise catholique, qui compte 63 millions de fidèles2, est aussi hostile à une action militaire préventive. A l'occasion du message annuel pour la paix en 2002, Jean- Paul II avait en effet adressé aux chefs d'Etat et aux Organisations internationales, un message leur rappelant leur responsabilité première dans le «grave désordre actuel dans les affaires mondiales». Lors du commentaire de ce message, Mgr Renato Martino (Président du Conseil pontifical Justice et Paix au Vatican) a clairement pris position contre la notion de la guerre préventive en affirmant : «la guerre préventive est une guerre d'agression et ne rentre pas

    dans la définition de guerre juste».3

    Enfin, lors d'un débat public organisé par la Fondation Carnegie pour la paix (fin septembre 2002 aux E-U), Michael Walzer, l'un des théoriciens modernes de la guerre juste, s'est prononcé, lui aussi, contre la guerre préventive. L'argument donné par celui-ci, est qu'il

    y a une différence entre la stratégie de la « preemptive war » (guerre préemptive) et celle de la

    « preventive war » (guerre préventive).4 Nous exposerons de ce pas, la nuance entre ces deux notions ; nuance qui n'est pas de nature à légitimer le concept de la guerre préventive.

    B- Le rejet de la guerre préventive au profit de la guerre préemptive

    Ici, nous devons rappeler avant toute chose, que le terme français « guerre

    préventive », a deux variantes en Anglais. La première variante est celle de la « preventive war » et la seconde, celle de la « preemptive war ». Dans le dictionnaire français, le mot

    « préemptif/préemptive » n'existe pas. Mais on peut trouver un autre mot de la même famille :

    la préemption. Le terme « préemption » ne répond pas à la traduction à laquelle on pense en parlant de guerre préventive. Il a un sens juridique sans rapport avec le présent sujet.

    1Eric Leser, Claudine Mulard. La crise irakienne. Le monde, 18 février 2003, p. 5

    2Patrick Jarreau. Les anti-guerre. Le monde, 10 décembre 2002, p. 3

    3Radio France. Les menaces de guerre. Chronique du 16 février 2003. [En ligne] Disponible sur :

    http://www.radiofrance.fr/chaines/france-

    inter01/information/chroniques/chronique/fiche.php?numero=11823&chronique_id=16

    4Patrick Jarreau. Op cit, p. 3

    Conventionnellement, pour désigner la « preemptive war », nous utiliserons l'expression

    « guerre préemptive » comme cela a été fait dans la plupart des documents que nous avons lu.

    Il faudra donc la comprendre telle que calquée sur l'expression anglaise de la « preemptive war » que Michaël a essayé d'expliquer.

    Selon Michael Walzer, la stratégie de préemption n'a de sens que face à l'imminence d'une attaque, contrairement à la guerre préventive qui ne nécessite pas forcément l'imminence d'une agression. Ce concept de la guerre préventive, selon la langue anglaise, est donc à subdiviser en deux : la guerre préventive dite préemptive et la guerre préventive au sens très large qui implique une vision à long terme. Il souligne que cette dernière, c'est-à-dire

    la guerre préventive à long terme, n'a jamais été vue d'un bon oeil par les spécialistes et les théoriciens du droit international. C'est ainsi qu'il dénie légitimité non seulement à l'intervention américaine en Irak, mais également au concept de la « preventive action » qui justifierait selon les Etats-Unis, cette intervention.1

    En définitive, la guerre préemptive serait légitime tandis que la guerre préventive ne le serait pas. Quels sont donc les critères qui différencient de façon objective une guerre préemptive d'une guerre préventive ? Certains ont essayé, d'une manière ou d'une autre, de dégager ces critères comme suit :

    - Destinée à s'en prendre à des capacités, réelles ou supposées, une frappe préventive s'exerce contre un Etat ou un réseau terroriste qui n'ont pas encore planifié précisément une agression. Vouée à neutraliser une intention dont on crédite un adversaire potentiel, la frappe préemptive consiste à s'en prendre à un Etat ou un réseau terroriste qui auraient commencé de programmer leurs actes.2

    - La frappe préemptive requiert qu'on ait identifié la menace pour justifier qu'elle soit éradiquée par la force. La frappe préventive, en revanche, ne s'embarrasse pas, dans l'esprit de ceux qui la déclenchent, d'autant de détails : elle peut être fondée sur un dossier incomplet, partial ou monté de toutes pièces comme en Irak.3

    - La validité juridique d'une guerre préemptive dépend de l'existence de preuves matérielles démontrant l'imminence du danger et la nécessité d'agir. La guerre

    préventive s'appuie, en revanche, non pas sur la crainte d'une agression imminente,

    1 Patrick Jarreau. Op cit, p.3

    2 Jacques Isnard. Frappes préventives ou frappes préemptives ? Le Monde, 14 octobre 2003, p. 20

    3 Jacques Isnard. Op cit, p. 20

    mais sur une peur plus lointaine, sur la menace stratégique que ferait peser un pays sur

    un autre.1

    Si cette distinction est valide, on pourrait dire que la guerre de succession d'Espagne

    de 1700 dont nous avons donné l'exemple dans notre introduction (supra : page1, note1) est une guerre plus préventive que préemptive et donc, une guerre illégitime. Dans le cas de l'Irak, il est difficile d'apporter cette appréciation parce que les Etats-Unis ont argué d'une menace imminente et non d'une menace lointaine.2 Les Etats peuvent ainsi confondre menace imminente et menace lointaine dans un même panier afin d'entrer en guerre lorsque leurs

    intérêts sont en jeu.

    Il est surtout difficile de définir une frontière entre la menace lointaine (stratégique) et

    la menace imminente (immédiate) lorsqu'on se réfère aux déclarations de Georges Bush contenues dans la NSS. « Les spécialistes du droit et les juristes internationaux ont souvent posé, comme condition de la légitimité d'une attaque préventive, l'existence d'une menace immédiate ; il s'agissait le plus souvent d'une mobilisation visible d'armées, de navires et de forces aériennes se préparant à attaquer. Nous devons adapter la notion de menace immédiate aux possibilités et aux objectifs des adversaires d'aujourd'hui. » Selon Georges Bush, la menace immédiate se confondrait donc à la menace stratégique de nos jours, du fait

    de l'insécurité nucléaire et terroriste (cf. la NSS dans les annexes).

    Cette confusion entre les notions ne contribue point à distinguer objectivement une guerre réellement préemptive d'une guerre préventive. Or ce sont les effets pervers découlant d'un tel opportunisme que certains redoutent et préfèrent balayer d'un revers de mains toute idée de recours préventif à la force. L'admission de la guerre préventive peut s'avérer destructeur. Il peut fragiliser le système sécuritaire international chèrement mis en place depuis 1945.

    Paragraphe 2 : Les risques de destruction de l'architecture sécuritaire mondiale

    L'acceptation du droit à la guerre préventive risque d'avoir des inconvénients très importants sur la scène internationale, en favorisant la dilution du principe du non recours à la

    force (A). Mais ce n'est pas le seul inconvénient. Par effet de suivi, cette dilution risque aussi

    1 Richard Falk. Les Nations unies prises en otage. Le monde diplomatique, décembre 2003. [En ligne]. Disponible sur :

    http://www.monde-diplomatique.fr/2002/12/FALK/17288 (page consultée le 30 août 2005)

    2 Mais, même dans ce cas, la menace imminente que représentait l'Irak n'a pas encore été formellement prouvée dans les faits jusqu'aujourd'hui.

    d'entraîner à son tour d'autres impacts qui pourraient accroître de plus belle, l'anarchie internationale (B).

    A- La dilution risquée du principe du non recours à la force

    Le risque est en effet très grand d'admettre aussi librement le recours à un tel procédé

    de guerre dans les relations internationales. L'autorisation de la guerre préventive laissera cours sans doute à des conséquences très fâcheuses. Elle risque d'entraîner l'exacerbation de l'anarchie internationale déjà grandissante. Aussi, n'offrira t-elle pas une garantie de sécurité suffisante aux pays faibles. On pourrait par ailleurs donner l'occasion par là, à la multiplication des atteintes à la souveraineté ; ce qui ne serait plus conforme à l'idéal de sécurité vers lequel tend (d'une manière ou d'une autre), le milieu international.

    En outre, la doctrine de la guerre préventive est une vision qui remet en question les notions mêmes de souveraineté et d'intégrité territoriales, qui sont parmi les fondements du droit international. Les pays qui abritent volontairement ou non ou qui sont soupçonnés d'abriter des terroristes perdent ipso-facto leur droit à la souveraineté.

    Cette doctrine encourt aussi le risque de privilégier la guerre comme moyen de résolution des conflits internationaux, plutôt que la négociation préventive dont la Charte des Nations Unies s'est pourtant si bien dotée dans son Chapitre VI.

    Au-delà de la nécessité d'éviter une guerre injustifiable et aux conséquences imprévisibles, c'est la nature même de l'ordre mondial qui est en jeu. Or, une fois établie et admise en règle internationale, la guerre préventive pourra être invoquée par tous les Etats. Qui pourrait alors empêcher l'Inde ou le Pakistan de se l'appliquer l'un à l'autre. Comment empêcher d'autres Etats belliqueux d'en faire autant ? La Chine de l'appliquer à Taiwan ou à

    un autre Etat ? La Russie de l'appliquer à un Etat voisin sous prétexte que ce dernier soutient

    les fondamentalistes Tchétchènes ?

    La doctrine de la guerre préventive est difficilement soutenable car elle fait éclater tout cadre de référence pour l'usage de la force dans le système international en abusant réellement

    du droit de légitime défense reconnu par la Charte en son article 51. Le pire, c'est que

    personne ne connaît les dégâts futurs que ce droit pourrait causer.

    B- Les impacts sécuritaires à craindre de cette extension du recours à la force

    En réalité, la véritable menace provient de l'expression ADM. Cette expression

    désigne non seulement les armes nucléaires, mais également les armes biologiques et chimiques. En ce qui concerne les armes nucléaires, elles requièrent des ressources industrielles et scientifiques très importantes, moins répandues et plus faciles à contrôler. Mais pour ce qui est des armes biologiques et chimiques, elles sont beaucoup plus faciles à fabriquer et à dissimuler. Tout pays disposant de laboratoires ou d'industries pharmaceutiques peut les fabriquer.

    Bien que ces dernières (les armes biologiques et chimiques) se révèlent à l'expérience, d'un emploi difficile et peu efficace, les gouvernements peuvent utiliser l'expression ADM pour confondre les armes nucléaires avec les armes biologiques et chimiques. On peut ainsi désigner n'importe quel pays arabe ou musulman doté d'une industrie chimique ou biopharmaceutique rudimentaire comme potentiellement dangereux.

    On pourra facilement prétexter du fait qu'il pourrait un jour fournir ces armes à un groupe terroriste susceptible de s'en servir contre la sécurité internationale. Cela revient à dire que tout pays, même le Bénin, peut être accusé de détenir des ADM dangereuses et interdites. Il suffira désormais pour les Etats faibles, d'aller contre les intérêts d'un Etat fort pour être

    considéré comme une menace latente ou imminente1. Il suffira d'être crédité alors d'une

    intention à tort ou à raison pour mériter une répression préventive. Encore que cette intention peut avoir été montée de toutes pièces pour des raisons obscures et particulières au gouvernement qui invoque le droit de se défendre préventivement.

    En outre, le concept de la guerre préventive pourrait fort bien encourager des Etats hostiles à développer des programmes d'armement secrets. Ils développeront ces programmes dans le but de dissuader les Etats puissants d'employer préventivement la force contre eux. Pire encore, ce concept de la guerre préventive peut emmener les Etats inquiétés par l'action préventive, à susciter l'émergence d'un autre concept de sorte à créer le flou juridique total

    sur le sujet. Ces Etats dits rebelles2 peuvent arguer, en guise de défense à une attaque

    1 Il n'y a plus une grande différence entre ces deux notions : la menace imminente et la menace stratégique. Seuls les intérêts des Etats peuvent déterminer la frontière entre ces deux notions. La confusion est presque

    totale. Nous avons vu à ce sujet la position des Etats-Unis (supra, page 66).

    2 Pour les uns, les Etats qui ne se soumettent pas aux ordres des grandes puissances sont des Etats rebelles. Pour les autres, ce sont des Etats modèles qui jouissent effectivement de leur souveraineté. On peut ranger dans la catégorie de ces Etats dits

    préventive, du concept de la « la prévention de la guerre préventive ». Ce risque est très probable. Sous le coup d'un nationalisme poussé, qu'est- ce qui empêcherait un Etat comme l'Iran d'invoquer cet autre concept pour agresser un pays comme les Etats- Unis ? Rien n'est sûr. C'est ainsi qu'on peut lire une pensée allant dans ce sens, dans le quotidien français « Le

    Monde » : « Des théologiens discutaient de la moralité de la guerre "normale", ou disons

    "juste", maintenant ils discutent de la guerre préventive. Finalement, on arrivera à débattre

    de la " prévention de la guerre préventive " ».1

    Pour confirmer cette crainte, le ministre iranien de la Défense, Ali Chamkhani, déclarait le 18 août 2004: « les frappes préventives ne sont pas un monopole américain ». Il laisse planer par cette déclaration, la menace d'une offensive préemptive iranienne, pour empêcher une attaque israélienne ou américaine sur les équipements nucléaires de son pays.

    « Nous ne resterons pas les bras croisés en attendant que les autres fassent de nous ce qu'ils veulent. En tous cas, nous traiterons toute frappe contre nos installations nucléaires comme une frappe contre l'Iran tout entier, et nous y répondrons avec toute notre force ». 2

    Les bouleversements sécuritaires liés à l'avenir de ce concept sont donc réels et inquiétants.

    En synthèse à ce chapitre, nous pouvons dire que la guerre préventive ne pourrait être légitime que si la communauté internationale elle-même en a décidé ainsi. C'est peut être une manifestation de cette volonté qui constitue à admettre au minimum la guerre préemptive, ou bien de vouloir que l'Organisation des Nations Unies se situe au centre de toute décision de

    guerre préventive.

    rebelles, les pays de l'axe du mal (la Corée du Nord, l'Iran, l'Irak d'avant 2003), la Libye, le Cuba, et dans une moindre

    mesure, le Venezuela etc.

    1Jean-Pierre Stroobants Le primat de Belgique en a assez du " God Bless America ". Le Monde, 25 décembre 2002, p. 3

    2Preemptive action, la guerre impériale américaine. [En ligne]. Disponible sur :

    http://membres.lycos.fr/returnliberty/preemptive.htm

    CONCLUSION GENERALE

    En somme, l'admission de la guerre préventive en droit international fait l'objet d'une grande confusion. Le droit international ne tranche pas la question de façon décisive et explicite. Les arguments militant en faveur de la légalité internationale du concept sont nombreux et pertinents. Mais, l'acceptation unanime de la GP, comme un droit systématique

    de défense nationale, reste fortement controversée.

    D'interprétation en interprétation, on a pu dégager une certaine légalité pour le concept au regard des dispositions constitutionnelles des Etats. Mais dans le même temps, on

    a aussi pu observer que certaines Constitutions interdisent formellement la défense offensive.

    Le caractère licite du droit à la GP est donc relatif. Il n'y a donc pas de légalité ou d'illégalité absolue pour ce concept. A chaque fois, on devra se référer au droit interne de l'Etat qui invoque ce concept. Cette attitude est déplorable. Contrairement à ce qui est souhaitable, les dirigeants des Etats peuvent ainsi se soumettre le droit international au plus bas niveau possible. Cette option est d'autant plus encouragée, puisque le droit international lui-même manque de fermeté et de clarté à plusieurs égards.

    Les Etats peuvent alors estimer légitimement, en vertu de leurs Constitutions qu'ils détiennent le droit d'entrer en guerre préventive pour protéger leurs populations d'une agression. Certes, cette position semble être conforme à la morale humanitaire. Mais, tout aussi positif qu'il puisse paraître au regard de la morale, le concept de la guerre préventive peut s'avérer être une négation. Il apparaît comme une notion à double face, qu'on peut évoquer non seulement pour déclencher une guerre juste, mais qui peut être aussi usitée pour mener une guerre immorale et injuste.

    Pour ce faire, le droit à la GP exige d'être soumis à certaines conditions pour encourir quelque légitimité, à défaut d'une légalité consensuelle.

    - Toute guerre préventive doit recevoir l'assentiment de la communauté internationale ;

    - Toute guerre préventive doit être menée dans une intention droite ;

    - Toute guerre préventive doit être démontrée nécessaire par des preuves formelles et enfin,

    - Elle doit s'efforcer d'être le dernier recours.

    De ces critères, dépend donc l'acceptation minimale de ce droit si controversé. Cependant, qu'est-ce qui permettra de mesurer l'intention juste d'un Etat ? Quels sont les modes de preuves pour démontrer l'imminence d'une agression ? Et même, qu'entend-on par

    une agression imminente ? Aussi, combien d'Etats au monde ont la capacité politique et logistique d'user du concept de la guerre préventive pour se protéger dans la pratique. Une chose est d'en avoir théoriquement le droit, mais une autre chose est de pouvoir le mettre en oeuvre. Le droit à la guerre préventive n'est-il pas alors le droit des Etats forts ? Voilà autant

    de problèmes non résolus qui continuent de saper les idéaux de la sécurité internationale et

    qui interpellent l'ensemble de la communauté internationale sur l'opportunité de repenser le droit du recours à la force et ses modalités d'application sur la scène internationale.

    BIBLIOGRAPHIE

    I-OUVRAGES

    A- OUVRAGES GENERAUX

    BIGO Didier, BODY-GENDROT Sophie, BONDITTI Philippe, et al. Défense et identités :

    un contexte sécuritaire global ? Paris : L'harmattan, 2001, 172 p.

    BONIFACE Pascal (sous la direction de). Les leçons du 11 septembre. Paris : PUF, 2001,

    129 p.

    COLAS Dominique. La pensée politique. Paris : Larousse, 1992, 767 p.

    COLAS Dominique. Textes constitutionnels français et étrangers. Paris : Larousse, 1994,

    813 p.

    COT Jean Pierre, PELLET Alain (sous la direction de). La charte des Nations Unies :

    commentaire article par article. Paris : Economica, 1985, 1553 p.

    KISSINGER Henry. La nouvelle puissance américaine. Paris : Fayard, 2002, 386 p.

    LEGLU Dominique. La menace. Bioterrorisme : la guerre à venir. Paris : Robert Laffont,

    2002, 299 p.

    LONG M., WEIL P., BRAIBANT G. et al. Les Grands Arrêts de la Jurisprudence

    Administrative (GAJA). 13ème édition. Paris : Dalloz, 2001, 930 p.

    MERLE Marcel. Sociologie des relations internationales. 3ème édition. Paris : Dalloz, 1982,

    527 p.

    NGUYEN QUOC Dinh, DAILLIER Patrick, PELLET Alain. Droit International Public. 6ème

    édition. Paris : LGDJ, 1999, 1455 p.

    B- OUVRAGES SPECIALISES

    BURGNON-MORDANT Michel. Etats-Unis : la manipulation planétaire. Lausanne

    (suisse) : Favre, 2003, 296 p.

    CHALIAND Gérard. D'une guerre d'Irak à l'autre : Violence et Politique au Moyen Orient.

    1991-2004. Paris : Métaillé, 2004, 254 p.

    LAURENT Eric. La guerre des Bush : les secrets inavouables d'un conflit. Paris : Plon, 2003,

    250 p.

    PITT William Rivers. Guerre à l'Irak : ce que l'équipe Bush ne dit pas. Paris : Serpent à plumes, 2002, 133 p.

    WALZER Michaël. Guerres justes et injustes : Argumentations morales avec exemples

    historiques. 2ème édition. Paris : Bélin, 1999, 489 p.

    II- MÉMOIRES

    ADOUKONOU Evelyne, L'adhésion de la République Populaire de Chine à l'Organisation

    Mondiale du Commerce : Quels enjeux pour le pays et pour ses partenaires commerciaux ?

    Abomey-Calavi : Université d'Abomey-Calavi (ENAM), 2003, 91 p.

    HESSOU S. T. Romuald. La pratique de la segmentation Marketing dans le marché des

    assurances : cas de l'Africaine des Assurances du Bénin. Cotonou : Université de Poitiers/ Institut supérieur de Technologie du Bénin, 2002, 70 p.

    III- ARTICLES

    DE LA GORCE Paul-Marie. Les dynamiques du désordre mondial : Ce dangereux concept de

    guerre préventive. Le monde diplomatique, septembre 2002. [En ligne]. Disponible sur :

    http://www.monde-diplomatique.fr/2002/09/LA_GORCE/16840 (page consultée le 24 juillet

    2005)

    EDWARDS Bob. Elle court, elle court la bombe. Courrier international, N° 770 du 4 au 24

    août 2005, pp. 8-10

    EL ALAOUI Hicham Ben Abdallah. Le monde arabe au pied du mur. Le monde diplomatique, octobre 2003, pp. 1,18-19

    FALK Richard. Les Nations unies prises en otage. Le monde diplomatique, décembre 2003.

    [En ligne]. Disponible sur : http://www.monde-diplomatique.fr/2002/12/FALK/17288 (page consultée le 30 août 2005)

    GOLUB S.Philip. Métamorphoses d'une politique impériale. Le monde diplomatique, mars

    2003. [En ligne]. Disponible sur : http://www.monde-diplomatique.fr/2003/03/GOLUB/9964

    (page consultée le 31 août 2005)

    ISNARD Jacques. Frappes préventives ou frappes préemptives ? Le Monde, 14 octobre 2003,

    p. 20

    JARREAU Patrick. Les anti-guerre. Le monde, 10 décembre 2002, p. 3

    LESER Eric, MULARD Claudine. La crise irakienne. Le monde, 18 février 2003, p. 5

    RAMONET Ignacio. De la guerre perpétuelle. Le monde diplomatique, mars 2003. [En ligne]. Disponible sur : http://www.monde-diplomatique.fr/2003/03/RAMONET/9870 (page consultée le 03 novembre 2005)

    STROOBANTS Jean-Pierre. Le primat de Belgique en a assez du " God Bless America ". Le

    Monde, 25 décembre 2002, p. 3

    VIATTEAU Alexandra. Classiques de sciences politiques.1933-2003: La guerre préventive

    selon Varsovie et Washington. Classique N°4. [En ligne]. Disponible sur : http://www.diploweb.com/science-politique/guerrepreventive.htm (page consultée le 27 septembre 2005)

    WAKAMIYA Yoshibumi. Pesantes leçons de Hiroshima, Courrier international, N° 770 du 4

    au 24 août 2005, p. 11

    IV- RAPPORTS

    ANNAN Kofi (secrétaire général des Nations Unies). Dans une liberté plus grande :

    développement, sécurité et respect des droits de l'homme pour tous : rapport. New York, mars

    2005, 72 p. [En ligne]. Disponible sur : http://www.un.org/french/largerfreedom/toc.html

    (page consultée le 31 août 2005)

    Groupe de personnalités de haut niveau sur les menaces, les défis et le changement (Nations

    Unies). Un monde plus sûr : notre affaire à tous : rapport. New York, décembre 2004, 105 p.

    [En ligne]. Disponible sur : http://www.un.org/french/secureworld/temp.html (page consultée

    le 31 août 2005)

    V- RESOLUTIONS ET TEXTES DE LOI

    Résolution 3314 de l'AG des NU du 14 décembre 1974 portant définition de l'agression.

    Résolution 1441 du CS des NU du 08 novembre 2002 portant injonction à l'Irak de coopérer avec les inspecteurs des Nations Unies.

    Convention de Viennes de 1969 sur le droit des Traités. Constitution béninoise du 11 décembre 1990.

    VI- COURS ET EXPOSES

    ABDOU Mohamed. Droit International Humanitaire (DIH). ENAM : Administration

    Générale (option), 1ère année, Année académique 2002-2003.

    ACHODE Wilfried, AMOUSSOU Constantin, DONKPEGAN Fourier. Questions juridiques

    et politiques autour de l'invasion de l'Irak par les Etats-Unis (Exposé de Droit International Public). ENAM : Diplomatie et Relations Internationales (filière), 3ème année, Année académique 2004-2005. 14 p.

    AHOUANKA Etienne. Théorie Générale de Droit Administratif. ENAM : Administration

    Générale (option), 1ère année, Année académique 2002-2003.

    HESSOU Christian, AKPLOGAN Christel, OGOUBIYI Clauvis, et al. Le recours à la force

    dans les relations internationales. (Exposé de Droit International Public). ENAM : Diplomatie et Relations Internationales (filière), 2ème année, Année académique 2003-2004.

    13 p.

    LAVENUE Jean-Jacques.Cours de Droit International Public. [En ligne]. Disponible sur :

    http://www2.univ-lille2.fr/droit/dip/1_5.html (page consultée le 31 août 2005)

    VII- AUTRES RESSOURCES INTERNET

    - Site de Radio France : http://www.radiofrance.fr

    - Site de l'encyclopédie Wikipédia : http://fr.wikipedia.org

    VIII- CD ROM

    SA Le monde (quotidien français). Le monde sur CD-ROM. Québec (Canada) : CEDROM-

    Sni inc, 2005.

    ANNEXES

    LISTE DES ANNEXES

    1- Résolution 3314 de l'AG des Nations Unies du 14 novembre 1974 portant définition de

    l'agression..........................................................................................................................III

    2- Extrait de la National Security Strategy (NSS).................................................................VI

    3- Discours du Président Bush au Museum Center de Cincinnati à New York sur les raisons

    du conflit d'Irak. (en anglais)..........................................................................................XVI

    4- Illustration des dommages liés à l'utilisation d'une arme nucléaire (Hiroshima).........XXII

    5- Carte des pays disposant d'armes ou de programmes nucléaires.................................XXIII

    II

    RÉSOLUTION 3314 DE L'ASSEMBLEE GENERALE DES NATIONS UNIES DU 14

    NOVEMBRE 1974 PORTANT DÉFINITION DE L'AGRESSION

    III

    IV

    V

    La stratégie nationale de sécurité des Etats-Unis d'Amérique. Maison Blanche

    La stratégie nationale de sécurité des Etats-Unis d'Amérique

    Septembre 2002, La Maison Blanche - Washington

    Traduit par Daniel Martin

    Note du traducteur : le début de ce texte, ci-dessous, résume les neuf chapitres qui suivent

    Les grandes luttes du vingtième siècle entre la liberté et les totalitarismes ont pris fin avec une victoire décisive des forces de liberté - et un modèle unique de réussite nationale, basé sur la liberté, la démocratie et la libre entreprise. Au vingt-et-unième siècle, seules les nations qui partagent un engagement à protéger les droits fondamentaux de l'Homme et à garantir la liberté politique et économique pourront libérer le potentiel de leur peuple et assurer leur prospérité future. Partout, les gens veulent être libres de parler, d'élire ceux qui les gouverneront, de pratiquer le culte de leur choix, de donner un enseignement à leurs enfants - qu'il s'agisse de garçons ou de filles, de posséder des biens et de profiter des fruits de leur travail. Ces valeurs de liberté sont justes et vraies pour toute personne, dans toute société - et le devoir de protéger ces valeurs contre leurs ennemis

    est partagé par tous ceux qui aiment la liberté, partout et depuis toujours.

    Aujourd'hui, les Etats-Unis sont dans une enviable situation de puissance militaire incomparable et de grande influence économique et politique. Conformément à notre héritage et à nos principes, nous n'utilisons pas notre puissance pour obtenir un quelconque avantage unilatéral. Nous cherchons, au contraire, à créer un équilibre des forces qui favorise la liberté des hommes, des conditions permettant à toutes les nations et toutes les sociétés de choisir elles-mêmes la récompense et les défis de la liberté politique et économique. Dans un monde en sécurité,

    les gens pourront rendre leur vie meilleure. Nous défendrons la paix en combattant les terroristes et les tyrans. Nous ferons durer la paix en construisant de bonnes relations entre les grandes puissances. Nous ferons progresser la paix en soutenant les sociétés libres et ouvertes sur tous les continents.

    La défense de notre Nation contre ses ennemis constitue l'engagement premier et fondamental du Gouvernement Fédéral. De nos jours, cette tâche a changé d'une manière radicale. Dans le passé, pour mettre en danger l'Amérique, il fallait à des ennemis de grandes armées et de grandes capacités industrielles. Aujourd'hui, des réseaux d'hommes de l'ombre peuvent nous infliger des souffrances et un chaos considérables, pour un coût inférieur au prix d'achat d'un seul char. Des terroristes se sont organisés pour infiltrer les sociétés ouvertes et pour tourner contre nous le pouvoir des technologies modernes.

    Pour vaincre cette menace nous devons utiliser tous les moyens à notre disposition - la puissance militaire, de meilleures défenses civiles, le respect des lois, le renseignement et de vigoureux efforts pour tarir les sources financières du terrorisme. La guerre contre des organisations terroristes internationales est un effort d'ampleur mondiale et de durée indéterminée. L'Amérique aidera les nations qui ont besoin de notre assistance pour combattre la terreur. Et l'Amérique prendra à partie les nations qui font régner la terreur, y compris celles qui donnent asile à des terroristes, car les alliés de la terreur sont les ennemis de la civilisation. Les Etats-Unis et les pays qui coopèrent avec nous doivent interdire aux terroristes de créer de nouvelles bases de développement. Ensemble nous nous efforcerons de les empêcher d'avoir des sanctuaires où que ce soit.

    Le plus grave danger pour notre Nation est l'alliance de l'extrémisme et de la technologie. Nos ennemis ont clairement déclaré qu'ils cherchent à se doter d'armes de destruction massive et il y a des preuves qu'ils y travaillent avec détermination. Les Etats-Unis ne permettront pas à ces efforts de réussir. Nous construirons des défenses contre des missiles balistiques et d'autres vecteurs. Nous coopérerons avec d'autres pays pour empêcher nos ennemis d'acquérir des technologies dangereuses. Et, parce que c'est le bon sens même et qu'il s'agit d'autodéfense, l'Amérique agira contre de telles menaces émergeantes avant même qu'elles ne soient prêtes à nous frapper. Nous ne pouvons défendre l'Amérique et nos amis en nous contentant d'espérer que tout

    ira bien. Nous devons donc être prêts à contrer les plans de nos ennemis, à utiliser les meilleurs renseignements dont nous disposons et à agir de manière volontariste. L'Histoire jugera sévèrement ceux qui ont vu venir ce nouveau danger sans réagir. Dans le monde qui commence, la seule voie vers la paix et la sécurité est celle de l'action.

    VI

    Tout en défendant la paix, nous profiterons d'une opportunité historique de la préserver. De nos jours, la communauté internationale a la plus grande chance qui se soit présentée - depuis l'émergence des états-nations

    au dix-septième siècle - de construire un monde où les grandes puissances se font concurrence pacifiquement, au lieu de se préparer continuellement à la guerre. De nos jours, les grandes puissances de ce monde sont unies avec nous dans le même camp, unies par les mêmes dangers de violence terroriste et de chaos. Les Etats-Unis s'appuieront sur cette communauté d'intérêts pour promouvoir la sécurité mondiale. Nous sommes aussi unis par des valeurs communes. La Russie est dans une phase de transition porteuse d'espoirs ; elle progresse vers un avenir démocratique et c'est un partenaire dans la guerre contre le terrorisme. Les dirigeants de la Chine sont en

    train de découvrir que la liberté économique est la seule source de richesse nationale. Avec le temps, ils

    s'apercevront que la liberté sociale et politique est la seule source de grandeur d'une nation. L'Amérique encouragera le progrès de la démocratie et l'ouverture économique de ces deux pays, car ce sont là les meilleures fondations pour leur stabilité et l'ordre international. Nous résisterons avec force à d'éventuelles agressions venant d'autres grandes puissances, tout en saluant leur marche en paix vers la prospérité, le commerce et le progrès culturel.

    Enfin, les Etats-Unis profiteront de cette époque d'opportunités pour faire progresser la liberté à travers le monde. Nous travaillerons activement à apporter les espoirs de la démocratie, du développement, des marchés ouverts et du commerce libre partout dans le monde. Les événements du 11 septembre 2001 nous ont enseigné que des états faibles, comme l'Afghanistan, peuvent constituer pour notre intérêt national un danger aussi fort que s'il provenait d'états puissants. La pauvreté ne transforme pas des gens pauvres en terroristes et en meurtriers. Mais la pauvreté, la faiblesse des institutions et la corruption peuvent rendre des états faibles vulnérables aux agissements des réseaux terroristes et aux cartels de la drogue, à l'intérieur de leurs frontières.

    Les Etats-Unis seront aux côtés de tout pays déterminé à construire un avenir meilleur grâce aux avantages que

    la liberté apporte à son peuple. La liberté du commerce et l'ouverture des marchés ont prouvé leur aptitude à tirer des sociétés entières hors de la pauvreté ; les Etats-Unis travailleront donc avec des pays indépendants, des régions entières et l'ensemble de la communauté commerciale mondiale à construire un monde qui commerce librement et progresse de ce fait vers la prospérité. Les Etats-Unis accroîtront leur assistance au développement, dans le cadre du programme New Millenium Challenge Account, aux pays de bonne gouvernance, qui investissent dans leurs citoyens et encouragent la liberté économique. Nous continuerons aussi à être à l'avant- garde des pays qui luttent contre le fléau du sida et les autres maladies infectieuses.

    Dans leur effort d'arriver à un équilibre des pouvoirs qui favorise la liberté, les Etats-Unis sont guidés par la conviction que toutes les nations ont d'éminentes responsabilités. Les nations qui ont la chance d'avoir cette liberté doivent combattre activement le terrorisme. Les nations qui ont besoin de la stabilité internationale doivent aider à empêcher la prolifération des armes de destruction massive. Les nations qui sollicitent l'aide internationale doivent se gouverner de manière sage, pour que l'aide qu'elles reçoivent soit dépensée à bon escient. Pour que la liberté prospère, il faut demander et rendre des comptes.

    Nous sommes aussi guidés par la conviction que nul pays ne peut construire un monde meilleur et plus sûr tout seul. Les alliances et les institutions multilatérales peuvent renforcer les nations qui chérissent la paix. Les Etats- Unis sont engagés à supporter des institutions durables comme les Nations unies, l'Organisation Mondiale du Commerce, l'Organisation des Etats Américains et l'OTAN, ainsi que d'autres alliances conclues depuis longtemps. De nouvelles coalitions, regroupant des pays de bonne volonté, peuvent renforcer les institutions permanentes précédentes. Dans tous les cas, les engagements internationaux doivent être respectés. Ils ne doivent pas être pris de manière symbolique, pour faire semblant de supporter un idéal sans lui donner un contenu

    concret.

    La liberté est l'exigence non négociable de la dignité humaine, un droit que chaque personne acquiert à sa naissance, dans toutes les civilisations. Dans toute l'Histoire, la liberté a été menacée par la guerre et la terreur ; elle a été défiée par les volontés conflictuelles d'états puissants et les desseins malfaisants de tyrans ; et elle a été mise à mal par l'étendue de la pauvreté et de la maladie. De nos jours, l'Humanité tient entre ses mains l'opportunité d'assurer le triomphe de la liberté sur tous ces ennemis. Nous Américains sommes ravis de la responsabilité que nous confère notre rôle de leader de cette grande mission.

    George W. Bush

    La Maison Blanche, 17 septembre 2002.

    VII

    Table des matières

    1 Présentation de la stratégie internationale de l'Amérique.

    2 Nous faire les champions de la dignité humaine.

    3 Renforcer les alliances pour vaincre le terrorisme international et travailler à empêcher les attaques contre nous-mêmes et nos amis.

    4 Travailler avec d'autres pays à désamorcer les conflits régionaux

    5 Empêcher nos ennemis de nous menacer, ainsi que nos alliés et nos amis, avec des armes de destruction massive.

    6 Entrer dans une nouvelle ère de croissance économique mondiale grâce à l'ouverture des marchés et la liberté du commerce.

    7 Répandre le développement en ouvrant les sociétés humaines et en construisant l'infrastructure de la démocratie.

    8 Planifier l'action en commun avec les autres principales puissances mondiales.

    9 Transformer les services nationaux de sécurité de l'Amérique en fonction des défis et opportunités du vingt-et-unième siècle.

    1 Présentation de la stratégie internationale de l'Amérique

    "Les principes de notre Nation ont toujours dépassé ceux de notre défense. Nous combattrons, comme nous l'avons toujours fait, pour une paix juste, une paix qui soutient la liberté. Nous défendrons la paix contre les menaces des terroristes et des tyrans. Nous ferons durer la paix en oeuvrant pour des sociétés libres et ouvertes

    sur tous les continents."

    Le président Bush, West Point, New York, le 1er juin 2002

    Les Etats-Unis jouissent dans le monde d'une puissance et d'une influence incomparables. Soutenue par la foi dans les principes de liberté et la valeur d'une société libre, cette position entraîne des responsabilités et des obligations sans pareilles, ainsi que des opportunités uniques. La puissance considérable de cette nation doit être utilisée pour promouvoir un équilibre de puissance qui favorise la liberté.

    Pendant la majeure partie du vingtième siècle, le monde fut le siège d'un grand combat d'idées : des visions totalitaires destructrices s'opposaient à la liberté et l'égalité.

    Ce grand combat est terminé. Les visions militantes de classe, de nation et de race qui promettaient des utopies et apportaient la misère ont été vaincues et discréditées. De nos jours, l'Amérique est moins menacée par des états conquérants que par des états en situation d'échec. Nous sommes moins menacés par des flottes et des armées que par des technologies génératrices de catastrophes aux mains d'une poignée de gens amers. Il nous faut vaincre ces menaces contre notre Nation, nos alliés et nos amis.

    Pour l'Amérique, notre temps est aussi une époque d'opportunités. Nous travaillerons à traduire notre influence actuelle en des décades de paix, de prospérité et de liberté. La stratégie nationale de sécurité des USA sera basée

    sur une approche très américaine de l'action internationale, synthèse de nos valeurs et des intérêts de notre pays.

    Le but de cette stratégie est d'aider à rendre le monde meilleur, et pas seulement plus sûr. Nos buts sur le chemin

    du progrès sont clairs : liberté politique et économique, relations pacifiques avec les autres états et respect pour

    la dignité humaine.

    Et cette approche n'est pas réservée à l'Amérique. Elle est ouverte à tous les pays.

    VIII

    Pour atteindre ces objectifs, les Etats-Unis vont :

    § Se faire les champions des aspirations à la dignité humaine.

    § Renforcer les alliances pour vaincre le terrorisme international et travailler à empêcher les attaques contre nous-mêmes et nos amis.

    § Coopérer avec d'autres pays pour désamorcer des conflits régionaux.

    § Empêcher nos ennemis de nous menacer - ou de menacer nos alliés et nos amis - avec des armes de destruction massive.

    § Faire entrer le monde dans une ère nouvelle de croissance économique grâce à l'ouverture des marchés et au libre commerce.

    § Etendre les zones en développement en ouvrant leurs sociétés et en construisant l'infrastructure de la démocratie.

    § Développer des agendas de coopération avec d'autres centres de puissance internationale.

    § Transformer les infrastructures de sécurité de l'Amérique en les adaptant aux défis et aux opportunités du vingt-et-unième siècle.

    2 Nous faire les champions de la dignité humaine

    "Certains regrettent qu'il soit parfois peu diplomatique ou impoli de dire ce qui est bien et ce qui est mal. Je ne suis pas d'accord. Des circonstances différentes exigent des méthodes différentes, mais pas des principes moraux différents."

    Le président Bush, West Point, New York, le 1er juin 2002

    Dans la poursuite de nos objectifs, notre premier impératif est de clarifier ce que nous défendons : les Etats-Unis doivent défendre la liberté et la justice, parce que ces principes sont justes et vrais pour toute personne, partout. Ces aspirations ne sont pas le propre d'une nation particulière et aucune nation n'en est exemptée. Dans toutes

    les sociétés, les pères et les mères veulent que leurs enfants accèdent à l'instruction et vivent à l'abri de la pauvreté et de la violence. Sur la terre, aucun peuple n'aspire à l'oppression ou à la servitude, aucun citoyen n'attend avec espoir que la police secrète frappe à sa porte à minuit.

    L'Amérique doit soutenir fermement les exigences non négociables de la dignité humaine : le respect de la loi, la limitation du pouvoir absolu de l'Etat, la liberté d'expression, la liberté de culte, l'égalité devant la justice, le respect des femmes, la tolérance religieuse et ethnique et le respect de la propriété privée.

    Il y a de nombreuses façons de satisfaire ces exigences. A cet égard, la constitution de l'Amérique s'est avérée précieuse. De nombreuses autres nations, avec des histoires et des cultures différentes, confrontées à des circonstances différentes, ont incorporé avec succès ces principes fondamentaux dans leur propre système de gouvernance. L'Histoire n'a pas été tendre avec les nations qui ont ignoré ou négligé les droits et aspirations de leurs citoyens.

    L'expérience de l'Amérique, grande démocratie multiethnique, confirme notre conviction que des gens d'origines et de confessions très différentes peuvent vivre et prospérer en paix. Notre propre histoire est une longue lutte pour réaliser nos idéaux. Mais, même dans nos pires épreuves, les principes de notre Déclaration d'indépendance nous ont guidés. De ce fait, l'Amérique n'est pas seulement une société plus forte, c'est aussi une société plus libre et plus juste.

    Aujourd'hui, ces idéaux servent de repères à ceux qui défendent seuls la liberté contre ses adversaires. Et, lorsque l'occasion se présente, nous pouvons aider l'évolution - comme nous l'avons fait en Europe centrale et orientale entre 1989 et 1991 ou à Belgrade en l'an 2000. Lorsque nous voyons des processus démocratiques

    IX

    s'imposer, comme chez nos amis de Taiwan ou de la République de Corée, lorsque nous voyons des dirigeants élus remplacer des généraux en Amérique latine ou en Afrique, nous voyons des exemples de l'évolution possible des régimes autoritaires par synthèse de l'histoire locale et des principes que nous respectons tous.

    Profitant des leçons de notre passé et des opportunités d'aujourd'hui, la stratégie nationale de sécurité des Etats- Unis doit partir de ces principes fondamentaux et chercher à les faire adopter là où c'est nécessaire pour faire progresser la liberté.

    Nos principes guideront les décisions de notre gouvernement en matière de coopération internationale, d'aide étrangère et d'allocation de ressources. Ils guideront nos actions et nos discours dans le cadre des organismes internationaux.

    Nous allons :

    § Pour faire avancer la liberté, parler à voix haute et honnêtement des violations des exigences non négociables

    de la dignité humaine, en utilisant notre temps de parole et notre droit de vote dans les organismes internationaux.

    § Utiliser notre aide étrangère pour promouvoir la liberté et soutenir ceux qui luttent de manière non violente pour elle, en faisant en sorte que les pays qui vont vers la démocratie soient récompensés pour leurs efforts.

    § Faire de la liberté et de la mise en place d'institutions démocratiques des thèmes clés dans nos relations bilatérales, en recherchant la solidarité et la coopération avec les autres démocraties, tout en faisant pression sur

    les gouvernements qui ne respectent pas les droits de l'homme pour qu'ils évoluent vers un avenir meilleur.

    § Faire des efforts particuliers de promotion de la liberté religieuse et de la liberté de conscience, et défendre ces libertés des restrictions imposées par les gouvernements répressifs.

    Nous nous ferons les champions de la dignité humaine et nous opposerons à ceux qui la rejettent.

    3 Renforcer les alliances pour vaincre le terrorisme international et travailler à empêcher les attaques contre nous-mêmes et nos amis

    "Trois jours seulement après ces événements, les Américains n'ont pas encore le recul nécessaire. Mais notre responsabilité envers l'Histoire est déjà claire : il faut répondre à ces attaques et débarrasser le monde du mal.

    On nous a fait la guerre de manière furtive, fourbe et meurtrière. Notre peuple est épris de paix, mais la colère

    le rend féroce. Le conflit a commencé au moment et d'une manière choisis par d'autres. Il se terminera de la manière et au moment que nous aurons choisis."

    Le président Bush

    Washington, D. C. (National Cathedral), le 14 septembre 2001

    Les Etats-Unis d'Amérique sont en guerre contre une organisation terroriste à l'échelle mondiale. L'ennemi n'est pas identifiable en tant que régime politique, personne, religion ou idéologie. L'ennemi est le terrorisme - une violence à motivation politique préméditée, perpétrée contre des innocents.

    Dans de nombreuses contrées, des griefs légitimes empêchent l'émergence d'une paix durable. De tels griefs méritent attention dans le cadre d'un processus politique. Mais aucune cause ne justifie le terrorisme. Les Etats- Unis ne feront aucune concession aux exigences de terroristes et ne concluront aucun accord avec eux. Nous ne faisons aucune distinction entre des terroristes et des gens qui leur donnent asile ou les aident en toute connaissance de cause.

    La lutte contre le terrorisme international ne ressemble à aucune des guerres de notre histoire. Il faudra la faire

    sur de nombreux fronts à la fois, contre un ennemi particulièrement bien camouflé, et pendant très longtemps. Le progrès viendra d'une accumulation persévérante de succès, certains visibles et d'autres invisibles.

    X

    Aujourd'hui, nos ennemis ont vu ce que des pays civilisés sont capables de faire et qu'ils font, contre les régimes

    qui hébergent, soutiennent et utilisent le terrorisme à des fins politiques. L'Afghanistan a été libéré ; les forces de

    la coalition continuent à pourchasser les Talibans et al Qaida. Mais ce n'est pas là le seul champ de bataille sur lequel nous attaquerons les terroristes. Il reste des milliers de terroristes bien entraînés, dans des cellules en Amérique du Nord et du Sud, en Europe, en Afrique, au Moyen-Orient et en Asie.

    Notre priorité sera d'abord de déstabiliser et de détruire les organisations terroristes internationales et d'attaquer leurs chefs, leurs systèmes de commandement, de contrôle et de communications, leur infrastructure de support

    et leurs circuits de financement. Cela diminuera l'aptitude de ces terroristes à planifier et à mener à bien leurs actions.

    Nous continuerons à encourager nos partenaires régionaux à faire des efforts coordonnés pour isoler les terroristes. Lorsqu'une telle campagne régionale aura identifié une menace dans un pays particulier, nous aiderons ce pays à avoir les moyens militaires, policiers, politiques et financiers nécessaires pour terminer la tâche.

    Les Etats-Unis continueront à travailler avec nos alliés à couper les circuits de financement du terrorisme. Nous identifierons et bloquerons ses sources de financement ; nous gèlerons leurs comptes et les comptes de ceux qui

    les soutiennent ; nous empêcherons les terroristes d'accéder au système financier international ; nous empêcherons les oeuvres de bienfaisance honnêtes d'être abusées par les terroristes et nous empêcherons les transferts de fonds des terroristes à travers des réseaux financiers alternatifs.

    Les actions de cette campagne n'ont nullement besoin, pour être efficaces, de se dérouler dans un ordre bien défini. C'est l'effet cumulé de nos actions dans toutes les parties du monde qui contribuera au résultat voulu.

    Voici comment nous allons déstabiliser et détruire les organisations terroristes :

    § Nous agirons directement et sans aucune interruption, avec tous les moyens de notre propre puissance et celle des autres pays. Nous commencerons par nous occuper des organisations terroristes internationales, ainsi que des états terroristes ou soutiens du terrorisme qui tentent de se doter d'armes de destruction massive ou de moyens

    de les construire.

    § Nous défendrons les Etats-Unis, le peuple américain et nos intérêts, chez nous et à l'étranger, en identifiant et

    en détruisant les menaces avant qu'elles n'atteignent nos frontières. Nous nous efforcerons constamment d'obtenir le soutien de la communauté internationale, mais nous n'hésiterons pas à agir seuls, si nécessaire, au nom de notre droit de nous défendre ; nous frapperons ces terroristes de manière préventive, pour les empêcher

    de faire du mal à notre peuple et notre pays.

    § Nous empêcherons d'autres pays de continuer à soutenir ou héberger des terroristes, en les persuadant ou en les contraignant à accepter leurs responsabilités nationales.

    Pour gagner la bataille contre le terrorisme international, nous mènerons aussi la guerre sur le plan des idées. Pour ce faire :

    § Nous utiliserons toute l'influence des Etats-Unis et la coopération avec nos amis, pour faire comprendre que tous les actes de terrorisme sont illégitimes, pour que le terrorisme soit perçu de la même manière que l'esclavage, la piraterie ou le génocide, comme un comportement qu'aucun gouvernement respectable ne peut excuser ou soutenir, et auquel tous doivent s'opposer.

    § Nous soutiendrons la gouvernance modérée et moderne, particulièrement dans le monde musulman, pour que

    les idéologies qui encouragent le terrorisme ne trouvent de terrain fertile dans aucun pays.

    § Nous ferons régresser les contextes nationaux qui donnent naissance au terrorisme, en obtenant de la communauté internationale qu'elle concentre ses efforts et ses ressources dans les pays où le risque est le plus élevé.

    XI

    § Nous utiliserons les moyens diplomatiques les plus efficaces pour promouvoir la libre circulation des informations et des idées, afin de susciter les espoirs et l'aspiration à la liberté des citoyens des sociétés dirigées

    par les soutiens du terrorisme international.

    Tout en reconnaissant que notre meilleure défense est l'offensive, nous renforçons aussi la sécurité intérieure de notre pays, pour nous protéger des attaques et les dissuader.

    Notre administration a proposé la plus importante réorganisation gouvernementale depuis que l'administration Truman a créé le Conseil national de sécurité (National Security Council) et le Ministère de la défense (Department of Defense). Notre plan détaillé et complet de sécurité intérieure, basé sur un nouveau Ministère de

    la sécurité intérieure (Department of Homeland Security), comprend un commandement militaire unifié et une réorganisation en profondeur du FBI ; il concerne tous les rouages de l'Etat et la coopération entre les secteurs public et privé.

    Cette stratégie transformera les difficultés en opportunités. C'est ainsi, par exemple, que de meilleures procédures de gestion des circonstances critiques pourront s'appliquer à tous les types de crise, en plus des actes terroristes. Notre système de soins sera renforcé pour pouvoir gérer toutes les épidémies et les catastrophes à victimes nombreuses, en plus du terrorisme bactériologique. Nos contrôles aux frontières amélioreront l'efficacité des transports légitimes, en plus du blocage des terroristes.

    Bien que notre priorité soit la défense de l'Amérique, nous savons que pour vaincre le terrorisme dans le monde ouvert d'aujourd'hui nous avons besoin du soutien de nos alliés et de nos amis. Partout où c'est possible, les Etats-Unis compteront sur des organisations régionales et le pouvoir des pays pour faire face aux obligations de

    la lutte antiterroriste. Là où un gouvernement trouvera cette lutte au-dessus de ses forces, nous compléterons sa bonne volonté et ses ressources avec toute l'aide que nous et nos alliés pourront lui apporter.

    Tout en faisant la chasse aux terroristes en Afghanistan, nous continuerons à travailler avec les organisations internationales comme les Nations unies, ainsi qu'avec des organisations non gouvernementales et d'autres pays, pour fournir l'aide humanitaire, politique, économique et de sécurité nécessaire à la reconstruction de l'Afghanistan, pour que jamais plus ce pays n'opprime son peuple, ne menace ses voisins et n'abrite des terroristes.

    Dans la guerre contre le terrorisme international, nous n'oublierons jamais que nous luttons en fait pour nos valeurs démocratiques et notre mode de vie. La liberté et la crainte sont en guerre, et ce conflit ne s'arrêtera ni rapidement ni facilement. A la pointe de la campagne contre le terrorisme, nous construisons des relations internationales nouvelles et efficaces et nous redéfinissons les relations existantes pour les adapter aux défis du vingt-et-unième siècle [...]

    5 Empêcher nos ennemis de nous menacer, ainsi que nos alliés et nos amis, avec des armes de destruction massive

    "Le danger le plus grave pour la liberté est l'alliance de l'extrémisme et de la technologie. Si les armes chimiques, biologiques et nucléaires se répandaient en même temps que la technologie des missiles balistiques, même de petits groupes pourraient disposer d'une puissance leur permettant de frapper les grands pays de manière catastrophique. Nos ennemis ont déclaré leur intention de se doter de ces armes terribles et ont été surpris en train de chercher à s'en procurer. Ils veulent pouvoir nous faire chanter, nous faire du mal ou en faire à nos amis - et nous lutterons contre eux de toutes nos forces."

    Le président Bush

    West Point, New York, le 1er juin 2002

    Par sa nature même, la guerre froide exigeait que les Etats-Unis, ses alliés et ses amis, essaient en premier lieu de dissuader un ennemi d'utiliser la force, au moyen de la sinistre stratégie de la destruction mutuelle assurée. Avec l'effondrement de l'Union soviétique et la fin de la guerre froide, le contexte de notre sécurité s'est profondément transformé.

    XII

    Notre relation avec la Russie étant passée de la confrontation à la coopération, les dividendes en sont évidents :

    la fin de l'équilibre de la terreur qui nous divisait, une réduction d'ampleur historique de nos arsenaux nucléaires, ainsi qu'une coopération dans des domaines tels que le contre-terrorisme et la défense antimissiles, coopération qui était inconcevable il y a peu d'années.

    De nos jours, des états voyous et des terroristes nous lancent un défi mortel. Aucune de leurs menaces actuelles n'est comparable à la puissance de destruction mise en batterie contre nous par l'Union soviétique. Malgré cela,

    le contexte de sécurité d'aujourd'hui est plus complexe et plus dangereux, du fait de la nature et des motivations

    de ces nouveaux adversaires, de leur détermination à se doter d'une puissance destructrice dont seuls les états les plus puissants disposaient jusqu'ici, et de la probabilité plus grande qu'ils utilisent contre nous des armes de destruction massive.

    Dans les années 90 nous avons assisté à l'émergence d'un petit nombre d'états voyous qui, bien que différents selon certains critères importants, partagent plusieurs caractéristiques. Ces états :

    § Brutalisent leurs propres citoyens et gaspillent leurs ressources nationales au profit de leurs dirigeants.

    § Méprisent la loi internationale, menacent leurs voisins et violent sans vergogne les traités internationaux qu'ils ont signés.

    § Sont déterminés à acquérir des armes de destruction massive, ainsi que d'autres technologies militaires avancées, pour des menaces ou des attaques au service des desseins agressifs de leurs régimes.

    § Soutiennent le terrorisme sur toute la planète.

    § Rejettent les valeurs fondamentales de l'Humanité et haïssent les Etats-Unis et toutes les causes qu'ils défendent.

    Lors de la Guerre du Golfe, nous avons acquis la preuve irréfutable que les desseins de l'Iraq ne se limitaient pas aux armes chimiques utilisées contre son propre peuple et contre l'Iran, mais allaient jusqu'à l'acquisition d'armes nucléaires et d'agents biologiques. Dans les dix dernières années, la Corée du Nord est devenue le principal fournisseur mondial de missiles balistiques et a testé des missiles de plus en plus puissants, tout en développant son propre arsenal d'armes de destruction massive. D'autres états voyous cherchent également à se doter d'armes nucléaires, biologiques et chimiques. Les efforts de ces états pour se doter de telles armes et pour

    en vendre dans tous les pays sont devenus une épée de Damoclès pour toutes les nations.

    Nous devons être prêts à mettre un terme aux efforts des états voyous et de leurs clients terroristes, avant qu'ils puissent menacer les Etats-Unis, leurs alliés et amis ou utiliser des armes de destruction massive contre eux. Notre réaction doit profiter pleinement d'alliances renforcées, de relations de partenariat nouvelles avec d'anciens adversaires, d'utilisations innovantes des forces armées, des technologies modernes, ainsi que du développement d'un système de défense anti-missiles efficace et d'un effort en matière de collecte et d'analyse

    des renseignements.

    Notre stratégie tous azimuts de lutte contre les armes de destruction massive comprend :

    § Des efforts actifs pour limiter la prolifération. Nous devons dissuader les menaces et nous défendre contre elles avant leur déploiement. Nous devons nous assurer que les possibilités les plus importantes en matière de détection, de défense active et passive, ainsi que de défense contre les attaques des bases aériennes et de lancement d'engins, sont prises en compte dans la transformation de notre défense et dans les systèmes de sécurité de notre patrie. Il faut aussi intégrer cette contre-prolifération dans la théorie militaire, la formation et l'équipement de nos armées et de celles de nos alliés, pour être certains de l'emporter dans n'importe quel conflit contre des adversaires munis d'armes de destruction massive.

    § Renforcer les efforts de non-prolifération, pour empêcher les états voyous et les terroristes d'acquérir les matières premières, les technologies et la compétence nécessaires aux armes de destruction massive. Nous renforcerons la diplomatie, le contrôle des armes, les contrôles multilatéraux des exportations et l'aide à la réduction des menaces pour contrecarrer les efforts des états et des terroristes à la recherche d'armes de destruction massive. Lorsque c'est nécessaire, nous bannirons l'exportation des technologies et des matières

    XIII

    premières correspondantes. Nous continuerons à construire des coalitions pour soutenir ces efforts et à encourager un soutien politique et financier accru aux programmes de non-prolifération et de réduction des menaces. L'accord récent des pays du G8 pour débloquer jusqu'à 20 milliards de dollars dans le cadre d'un partenariat mondial contre la prolifération constitue un progrès significatif.

    § Une gestion efficace des conséquences de l'utilisation d'armes de destruction massive, qu'elle soit le fait de terroristes ou d'états hostiles. En réduisant les effets de l'utilisation d'armes de destruction massive contre notre peuple, nous contribuerons à dissuader ceux qui ont de telles armes de s'en servir, et à dissuader ceux qui cherchent à en acquérir de le faire. Nos ennemis seront ainsi persuadés qu'ils ne peuvent arriver à leurs fins. Les Etats-Unis doivent aussi être préparés à réagir aux effets de l'utilisation des armes de destruction massive contre nos forces basées à l'étranger et à aider des amis et des alliés s'ils sont attaqués.

    Il nous a fallu près de dix ans pour comprendre la vraie nature de cette nouvelle menace. Connaissant les objectifs des états voyous et des terroristes, les Etats-Unis ne peuvent plus se contenter de l'attitude d'attente d'une attaque qui a été la nôtre dans le passé. L'incapacité de dissuader un attaquant potentiel, le caractère immédiat des menaces d'aujourd'hui et l'énormité des conséquences dommageables du choix d'armes de nos ennemis ne nous le permettent plus. Nous ne pouvons pas laisser nos ennemis frapper les premiers.

    § Pendant la guerre froide et particulièrement après la crise des missiles de Cuba, notre adversaire était partisan

    du statu quo et redoutait les risques. La dissuasion était une défense efficace. Mais la dissuasion basée sur la seule menace d'une frappe en retour a moins de chance de marcher contre des dirigeants d'états voyous prêts à prendre des risques, jouant avec la vie de leurs citoyens et la richesse de leur pays.

    § Pendant la guerre froide, les armes de destruction massive étaient considérées comme à utiliser en dernier ressort, parce qu'elles pouvaient entraîner la destruction de ceux qui s'en servaient. De nos jours, nos ennemis

    les considèrent comme des armes de première frappe. Pour les états voyous, ce sont des armes d'intimidation et d'agression militaire contre leurs voisins. Ce genre d'armes peut aussi permettre à ces pays d'essayer de faire du chantage aux Etats-Unis et à nos alliés, pour nous empêcher de dissuader ou de repousser une agression. De telles armes, enfin, sont considérées par ces états comme le meilleur moyen de triompher de la supériorité des Etats-Unis en matière d'armes conventionnelles.

    § Les arguments traditionnels de la dissuasion sont sans valeur contre un ennemi terroriste, dont la tactique avouée est la destruction pour la destruction et la cible est constituée par des innocents, dont les soi-disant soldats cherchent à mourir en martyr et dont la protection la plus efficace est l'absence de patrie. Les états qui soutiennent le terrorisme étant aussi ceux qui cherchent à se doter d'armes de destruction massive, nous sommes obligés d'agir.

    Depuis des siècles, les lois internationales ont admis qu'un pays n'a pas besoin d'être attaqué pour se défendre

    en toute légalité contre des forces qui présentent un danger d'attaque imminente. Les spécialistes du droit et les juristes internationaux ont souvent posé, comme condition de la légitimité d'une attaque préventive, l'existence d'une menace immédiate ; il s'agissait le plus souvent d'une mobilisation visible d'armées, de navires et de forces aériennes se préparant à attaquer.

    Nous devons adapter la notion de menace immédiate aux possibilités et aux objectifs des adversaires d'aujourd'hui. Les états voyous et les terroristes ne cherchent pas à nous attaquer avec des moyens conventionnels. Ils savent qu'une telle attaque échouerait. Ils préfèrent compter sur des actes terroristes et, si possible, l'utilisation d'armes de destruction massive, des armes qui peuvent facilement être dissimulées, transportées en cachette et utilisées sans avertissement.

    Les cibles de telles attaques sont nos forces armées et notre population civile, en violation flagrante d'une des lois principales de la guerre. Comme l'ont prouvé les pertes du 11 septembre 2001, l'objectif des terroristes est

    de tuer des civils en masse. De telles pertes seraient infiniment plus élevées si ces terroristes disposaient et utilisaient des armes de destruction massive.

    Les Etats-Unis se sont depuis longtemps réservé la possibilité d'actions préventives pour contrer une menace suffisamment grande à notre sécurité nationale. Plus la menace est grande, plus le risque pris en n'agissant pas

    est important, et plus les raisons d'agir préventivement pour nous défendre sont fortes. Et ceci reste vrai même

    XIV

    lorsque l'heure et le lieu de l'attaque de l'ennemi sont inconnus. Pour prévenir de tels actes hostiles de nos adversaires, les Etats-Unis agiront préventivement si nécessaire.

    Les Etats-Unis n'utiliseront pas systématiquement la force d'une manière préventive contre des menaces naissantes, et aucun pays ne devrait utiliser la possibilité d'une action préventive comme prétexte d'agression. Toutefois, à une époque où les ennemis de la civilisation cherchent ouvertement et activement à se doter des technologies les plus destructrices du monde, les Etats-Unis ne peuvent rester l'arme au pied pendant que les dangers s'accumulent.

    Nous agirons toujours à bon escient, en évaluant les conséquences de nos actions. Pour préserver nos possibilités d'action préventive :

    § Nous construirons des systèmes de renseignement meilleurs et mieux intégrés, pour disposer en temps utile d'informations précises sur les menaces, quel que soit l'endroit où elles apparaissent.

    § Nous nous concerterons étroitement avec nos alliés, pour analyser ensemble les menaces les plus dangereuses.

    § Nous continuerons à transformer nos forces armées, pour être en mesure de mener rapidement des opérations précises afin d'obtenir des résultats décisifs.

    Le but de nos actions sera toujours d'éliminer une menace précise dirigée contre les Etats-Unis, nos alliés ou nos amis. Les raisons de nos actions seront claires, la force sera utilisée de manière mesurée et la cause sera juste.

    XV

    DISCOURS DU PRESIDENT BUSH AU MUSEUM CENTER DE CINICINNATI DE

    NEW YORK SUR LA MENACE IRAKIENNE

    For Immediate Release

    Office of the Press Secretary

    October 7, 2002

    President Bush Outlines Iraqi Threat

    Remarks by the President on Iraq

    Cincinnati Museum Center - Cincinnati Union Terminal

    Cincinnati, Ohio

    8:02 P.M. EDT

    THE PRESIDENT: Thank you all. Thank you for that very gracious and warm Cincinnati welcome. I'm honored to be here tonight; I appreciate you all coming.

    Tonight I want to take a few minutes to discuss a grave threat to peace, and America's determination

    to lead the world in confronting that threat.

    The threat comes from Iraq. It arises directly from the Iraqi regime's own actions -- its history of aggression, and its drive toward an arsenal of terror. Eleven years ago, as a condition for ending the Persian Gulf War, the Iraqi regime was required to destroy its weapons of mass destruction, to cease

    all development of such weapons, and to stop all support for terrorist groups. The Iraqi regime has violated all of those obligations. It possesses and produces chemical and biological weapons. It is seeking nuclear weapons. It has given shelter and support to terrorism, and practices terror against its own people. The entire world has witnessed Iraq's eleven-year history of defiance, deception and bad faith.

    We also must never forget the most vivid events of recent history. On September the 11th, 2001, America felt its vulnerability -- even to threats that gather on the other side of the earth. We resolved then, and we are resolved today, to confront every threat, from any source, that could bring sudden terror and suffering to America.

    Members of the Congress of both political parties, and members of the United Nations Security Council, agree that Saddam Hussein is a threat to peace and must disarm. We agree that the Iraqi dictator must not be permitted to threaten America and the world with horrible poisons and diseases and gases and atomic weapons. Since we all agree on this goal, the issues is : how can we best achieve it?

    Many Americans have raised legitimate questions: about the nature of the threat; about the urgency of action -- why be concerned now; about the link between Iraq developing weapons of terror, and the wider war on terror. These are all issues we've discussed broadly and fully within my administration. And tonight, I want to share those discussions with you.

    XVI

    First, some ask why Iraq is different from other countries or regimes that also have terrible weapons. While there are many dangers in the world, the threat from Iraq stands alone -- because it gathers the most serious dangers of our age in one place. Iraq's weapons of mass destruction are controlled by a murderous tyrant who has already used chemical weapons to kill thousands of people. This same tyrant has tried to dominate the Middle East, has invaded and brutally occupied a small neighbor, has struck other nations without warning, and holds an unrelenting hostility toward the United States.

    By its past and present actions, by its technological capabilities, by the merciless nature of its regime, Iraq is unique. As a former chief weapons inspector of the U.N. has said, "The fundamental problem with Iraq remains the nature of the regime, itself. Saddam Hussein is a homicidal dictator who is addicted to weapons of mass destruction."

    Some ask how urgent this danger is to America and the world. The danger is already significant, and it only grows worse with time. If we know Saddam Hussein has dangerous weapons today -- and we do

    -- does it make any sense for the world to wait to confront him as he grows even stronger and develops even more dangerous weapons?

    In 1995, after several years of deceit by the Iraqi regime, the head of Iraq's military industries defected. It was then that the regime was forced to admit that it had produced more than 30,000 liters

    of anthrax and other deadly biological agents. The inspectors, however, concluded that Iraq had likely produced two to four times that amount. This is a massive stockpile of biological weapons that has never been accounted for, and capable of killing millions.

    We know that the regime has produced thousands of tons of chemical agents, including mustard gas, sarin nerve gas, VX nerve gas. Saddam Hussein also has experience in using chemical weapons. He has ordered chemical attacks on Iran, and on more than forty villages in his own country. These actions killed or injured at least 20,000 people, more than six times the number of people who died in the attacks of September the 11th.

    And surveillance photos reveal that the regime is rebuilding facilities that it had used to produce chemical and biological weapons. Every chemical and biological weapon that Iraq has or makes is a direct violation of the truce that ended the Persian Gulf War in 1991. Yet, Saddam Hussein has chosen to build and keep these weapons despite international sanctions, U.N. demands, and isolation from the civilized world.

    Iraq possesses ballistic missiles with a likely range of hundreds of miles -- far enough to strike Saudi Arabia, Israel, Turkey, and other nations -- in a region where more than 135,000 American civilians and service members live and work. We've also discovered through intelligence that Iraq has a growing fleet of manned and unmanned aerial vehicles that could be used to disperse chemical or biological weapons across broad areas. We're concerned that Iraq is exploring ways of using these UAVS for missions targeting the United States. And, of course, sophisticated delivery systems aren't required for a chemical or biological attack; all that might be required are a small container and one terrorist or Iraqi intelligence operative to deliver it.

    And that is the source of our urgent concern about Saddam Hussein's links to international terrorist groups. Over the years, Iraq has provided safe haven to terrorists such as Abu Nidal, whose terror organization carried out more than 90 terrorist attacks in 20 countries that killed or injured nearly 900 people, including 12 Americans. Iraq has also provided safe haven to Abu Abbas, who was responsible for seizing the Achille Lauro and killing an American passenger. And we know that Iraq is continuing to finance terror and gives assistance to groups that use terrorism to undermine Middle East peace.

    We know that Iraq and the al Qaeda terrorist network share a common enemy -- the United States of

    America. We know that Iraq and al Qaeda have had high-level contacts that go back a decade. Some

    al Qaeda leaders who fled Afghanistan went to Iraq. These include one very senior al Qaeda leader who received medical treatment in Baghdad this year, and who has been associated with planning for chemical and biological attacks. We've learned that Iraq has trained al Qaeda members in bomb- making and poisons and deadly gases. And we know that after September the 11th, Saddam Hussein's regime gleefully celebrated the terrorist attacks on America.

    XVII

    Iraq could decide on any given day to provide a biological or chemical weapon to a terrorist group or individual terrorists. Alliance with terrorists could allow the Iraqi regime to attack America without leaving any fingerprints.

    Some have argued that confronting the threat from Iraq could detract from the war against terror. To the contrary; confronting the threat posed by Iraq is crucial to winning the war on terror. When I spoke

    to Congress more than a year ago, I said that those who harbor terrorists are as guilty as the terrorists themselves. Saddam Hussein is harboring terrorists and the instruments of terror, the instruments of mass death and destruction. And he cannot be trusted. The risk is simply too great that he will use them, or provide them to a terror network.

    Terror cells and outlaw regimes building weapons of mass destruction are different faces of the same evil. Our security requires that we confront both. And the United States military is capable of confronting both.

    Many people have asked how close Saddam Hussein is to developing a nuclear weapon. Well, we don't know exactly, and that's the problem. Before the Gulf War, the best intelligence indicated that Iraq was eight to ten years away from developing a nuclear weapon. After the war, international inspectors learned that the regime has been much closer -- the regime in Iraq would likely have possessed a nuclear weapon no later than 1993. The inspectors discovered that Iraq had an advanced nuclear weapons development program, had a design for a workable nuclear weapon, and was pursuing several different methods of enriching uranium for a bomb.

    Before being barred from Iraq in 1998, the International Atomic Energy Agency dismantled extensive nuclear weapons-related facilities, including three uranium enrichment sites. That same year, information from a high-ranking Iraqi nuclear engineer who had defected revealed that despite his public promises, Saddam Hussein had ordered his nuclear program to continue.

    The evidence indicates that Iraq is reconstituting its nuclear weapons program. Saddam Hussein has held numerous meetings with Iraqi nuclear scientists, a group he calls his "nuclear mujahideen" -- his nuclear holy warriors. Satellite photographs reveal that Iraq is rebuilding facilities at sites that have been part of its nuclear program in the past. Iraq has attempted to purchase high-strength aluminum tubes and other equipment needed for gas centrifuges, which are used to enrich uranium for nuclear weapons.

    If the Iraqi regime is able to produce, buy, or steal an amount of highly enriched uranium a little larger than a single softball, it could have a nuclear weapon in less than a year. And if we allow that to happen, a terrible line would be crossed. Saddam Hussein would be in a position to blackmail anyone who opposes his aggression. He would be in a position to dominate the Middle East. He would be in a position to threaten America. And Saddam Hussein would be in a position to pass nuclear technology

    to terrorists.

    Some citizens wonder, after 11 years of living with this problem, why do we need to confront it now? And there's a reason. We've experienced the horror of September the 11th. We have seen that those who hate America are willing to crash airplanes into buildings full of innocent people. Our enemies would be no less willing, in fact, they would be eager, to use biological or chemical, or a nuclear weapon.

    Knowing these realities, America must not ignore the threat gathering against us. Facing clear evidence of peril, we cannot wait for the final proof -- the smoking gun -- that could come in the form of

    a mushroom cloud. As President Kennedy said in October of 1962, "Neither the United States of

    America, nor the world community of nations can tolerate deliberate deception and offensive threats

    on the part of any nation, large or small. We no longer live in a world," he said, "where only the actual firing of weapons represents a sufficient challenge to a nations security to constitute maximum peril."

    Understanding the threats of our time, knowing the designs and deceptions of the Iraqi regime, we have every reason to assume the worst, and we have an urgent duty to prevent the worst from occurring.

    XVIII

    Some believe we can address this danger by simply resuming the old approach to inspections, and applying diplomatic and economic pressure. Yet this is precisely what the world has tried to do since

    1991. The U.N. inspections program was met with systematic deception. The Iraqi regime bugged hotel rooms and offices of inspectors to find where they were going next; they forged documents, destroyed evidence, and developed mobile weapons facilities to keep a step ahead of inspectors. Eight so-called presidential palaces were declared off-limits to unfettered inspections. These sites actually encompass twelve square miles, with hundreds of structures, both above and below the ground, where sensitive materials could be hidden.

    The world has also tried economic sanctions -- and watched Iraq use billions of dollars in illegal oil revenues to fund more weapons purchases, rather than providing for the needs of the Iraqi people.

    The world has tried limited military strikes to destroy Iraq's weapons of mass destruction capabilities -- only to see them openly rebuilt, while the regime again denies they even exist.

    The world has tried no-fly zones to keep Saddam from terrorizing his own people -- and in the last year alone, the Iraqi military has fired upon American and British pilots more than 750 times.

    After eleven years during which we have tried containment, sanctions, inspections, even selected military action, the end result is that Saddam Hussein still has chemical and biological weapons and is increasing his capabilities to make more. And he is moving ever closer to developing a nuclear weapon.

    Clearly, to actually work, any new inspections, sanctions or enforcement mechanisms will have to be very different. America wants the U.N. to be an effective organization that helps keep the peace. And that is why we are urging the Security Council to adopt a new resolution setting out tough, immediate requirements. Among those requirements: the Iraqi regime must reveal and destroy, under U.N. supervision, all existing weapons of mass destruction. To ensure that we learn the truth, the regime must allow witnesses to its illegal activities to be interviewed outside the country -- and these witnesses must be free to bring their families with them so they all beyond the reach of Saddam Hussein's terror and murder. And inspectors must have access to any site, at any time, without pre- clearance, without delay, without exceptions.

    The time for denying, deceiving, and delaying has come to an end. Saddam Hussein must disarm himself -- or, for the sake of peace, we will lead a coalition to disarm him.

    Many nations are joining us in insisting that Saddam Hussein's regime be held accountable. They are committed to defending the international security that protects the lives of both our citizens and theirs. And that's why America is challenging all nations to take the resolutions of the U.N. Security Council seriously.

    And these resolutions are clear. In addition to declaring and destroying all of its weapons of mass destruction, Iraq must end its support for terrorism. It must cease the persecution of its civilian population. It must stop all illicit trade outside the Oil For Food program. It must release or account for

    all Gulf War personnel, including an American pilot, whose fate is still unknown.

    By taking these steps, and by only taking these steps, the Iraqi regime has an opportunity to avoid conflict. Taking these steps would also change the nature of the Iraqi regime itself. America hopes the regime will make that choice. Unfortunately, at least so far, we have little reason to expect it. And that's why two administrations -- mine and President Clinton's -- have stated that regime change in Iraq is the only certain means of removing a great danger to our nation.

    I hope this will not require military action, but it may. And military conflict could be difficult. An Iraqi regime faced with its own demise may attempt cruel and desperate measures. If Saddam Hussein orders such measures, his generals would be well advised to refuse those orders. If they do not refuse, they must understand that all war criminals will be pursued and punished. If we have to act, we will take every precaution that is possible. We will plan carefully; we will act with the full power of the United States military; we will act with allies at our side, and we will prevail. (Applause.)

    XIX

    There is no easy or risk-free course of action. Some have argued we should wait -- and that's an option. In my view, it's the riskiest of all options, because the longer we wait, the stronger and bolder Saddam Hussein will become. We could wait and hope that Saddam does not give weapons to terrorists, or develop a nuclear weapon to blackmail the world. But I'm convinced that is a hope against all evidence. As Americans, we want peace -- we work and sacrifice for peace. But there can

    be no peace if our security depends on the will and whims of a ruthless and aggressive dictator. I'm not willing to stake one American life on trusting Saddam Hussein.

    Failure to act would embolden other tyrants, allow terrorists access to new weapons and new resources, and make blackmail a permanent feature of world events. The United Nations would betray the purpose of its founding, and prove irrelevant to the problems of our time. And through its inaction, the United States would resign itself to a future of fear.

    That is not the America I know. That is not the America I serve. We refuse to live in fear. (Applause.) This nation, in world war and in Cold War, has never permitted the brutal and lawless to set history's course. Now, as before, we will secure our nation, protect our freedom, and help others to find freedom of their own.

    Some worry that a change of leadership in Iraq could create instability and make the situation worse. The situation could hardly get worse, for world security and for the people of Iraq. The lives of Iraqi citizens would improve dramatically if Saddam Hussein were no longer in power, just as the lives of Afghanistan's citizens improved after the Taliban. The dictator of Iraq is a student of Stalin, using murder as a tool of terror and control, within his own cabinet, within his own army, and even within his own family.

    On Saddam Hussein's orders, opponents have been decapitated, wives and mothers of political opponents have been systematically raped as a method of intimidation, and political prisoners have been forced to watch their own children being tortured.

    America believes that all people are entitled to hope and human rights, to the non-negotiable demands

    of human dignity. People everywhere prefer freedom to slavery; prosperity to squalor; self-government

    to the rule of terror and torture. America is a friend to the people of Iraq. Our demands are directed only at the regime that enslaves them and threatens us. When these demands are met, the first and greatest benefit will come to Iraqi men, women and children. The oppression of Kurds, Assyrians, Turkomans, Shi'a, Sunnis and others will be lifted. The long captivity of Iraq will end, and an era of new hope will begin.

    Iraq is a land rich in culture, resources, and talent. Freed from the weight of oppression, Iraq's people will be able to share in the progress and prosperity of our time. If military action is necessary, the United States and our allies will help the Iraqi people rebuild their economy, and create the institutions

    of liberty in a unified Iraq at peace with its neighbors.

    Later this week, the United States Congress will vote on this matter. I have asked Congress to authorize the use of America's military, if it proves necessary, to enforce U.N. Security Council demands. Approving this resolution does not mean that military action is imminent or unavoidable. The resolution will tell the United Nations, and all nations, that America speaks with one voice and is determined to make the demands of the civilized world mean something. Congress will also be sending a message to the dictator in Iraq: that his only chance -- his only choice is full compliance, and the time remaining for that choice is limited.

    Members of Congress are nearing an historic vote. I'm confident they will fully consider the facts, and their duties.

    The attacks of September the 11th showed our country that vast oceans no longer protect us from danger. Before that tragic date, we had only hints of al Qaeda's plans and designs. Today in Iraq, we see a threat whose outlines are far more clearly defined, and whose consequences could be far more deadly. Saddam Hussein's actions have put us on notice, and there is no refuge from our responsibilities.

    XX

    We did not ask for this present challenge, but we accept it. Like other generations of Americans, we will meet the responsibility of defending human liberty against violence and aggression. By our resolve, we will give strength to others. By our courage, we will give hope to others. And by our actions, we will secure the peace, and lead the world to a better day.

    May God bless America. (Applause.) END 8:31 P.M. EDT

    Return to this article at:

    http://www.whitehouse.gov/news/releases/2002/10/20021007-8.html

    XXI

    ILLUSTRATION DES DOMMAGES LIES A L'USAGE D'UNE ARME NUCLEAIRE

    XXII

    CARTE DES PAYS DISPOSANT D'ARMES OU DE PROGRAMMES NUCLÉAIRES

    XXIII

    XXIV

    TABLE DES MATIERES

    Dédicaces...................................................................... ...........................................................ii

    Remerciements...................................................................... ................................................iii Liste des sigles et abréviations............................................................................................iv Sommaire...................................................................... ..........................................................v

    INTRODUCTION...................................................................... ...........................................1

    PREMIERE PARTIE : DE LA LEGALITE DU CONCEPT DE LA GUERRE PREVENTIVE............................................................................6

    Chapitre 1er : La légalité de la guerre préventive au regard de la doctrine..............7

    Section 1 : La doctrine de la guerre juste..............................................................................8

    Paragraphe1 : Exposé de la théorie........................................................................................8

    A- La thèse chrétienne de la guerre juste..............................................................................8

    B- La thèse séculière de la guerre juste...............................................................................10

    Paragraphe2 : Les implications de la théorie sur la notion de la guerre préventive......11

    A- Les implications en rapport avec les notions de la juste cause et de l'intention

    droite ..................................................................................................................................12

    B- Les implications en rapport avec les droits fondamentaux des Etats.........................13

    Section 2 : La doctrine de l'état de nature...........................................................................15

    Paragraphe1 : Exposé de la théorie......................................................................................15

    A- La pensée de Thomas Hobbes.........................................................................................15

    B- Les pensées des autres auteurs.........................................................................................16

    Paragraphe2 : Les implications de la théorie sur la notion de la guerre préventive.......17

    A- Les implications positives...................................................................... .........................17

    B- Les implications négatives.............. ...............................................................................19

    Chapitre2 : La légalité de la guerre préventive au regard de la norme.................21

    Section1 : La Charte de l'ONU et la notion de légitime défense préventive...................22

    Paragraphe1 : L'interprétation restrictive de la Charte......................................................23

    A- Le fondement : l'esprit de la Charte...............................................................................23

    B- Le problème de la condition : une agression préalable................................................24

    Paragraphe2 : L'interprétation extensive de la Charte.......................................................25

    A- Le fondement : le contexte actuel de la Charte.............................................................26

    B- Le problème de la condition : une agression imminente..............................................27

    Section2 : Les dispositions constitutionnelles des Etats....................................................29

    Paragraphe1 : Cas des constitutions africaines..............................................................29

    A- La constitution béninoise de décembre 1990................................................... .............29

    B- La constitution sud-africaine d'avril 1994......................................................... ...........30

    Paragraphe2 : Cas des constitutions occidentales......................... ................................31

    A- La constitution allemande de mai 1949...........................................................................31

    B- La constitution des Etats-Unis d'Amérique............................... ...................................32

    DEUXIEME PARTIE : DE LA LEGITIMITE DU CONCEPT DE LA

    GUERRE PREVENTIVE......................................................34

    Chapitre 1er : La deuxième guerre d'Irak : les faits et les mobiles présumés du conflit.............................................................................................................35

    Section1 : Historique de la guerre d'Irak.............................................................................36

    Paragraphe1 : La justification officielle du conflit et son déroulement...........................36

    A- La justification officielle du conflit.............................................................................. ..36

    B- Le déroulement du conflit irakien....................................................................................38

    Paragraphe2 : Les suites de la guerre...................................................................................39

    A- Un après-guerre sombre : le risque de déstabilisation d'une région fragile.............39

    B- La polémique à propos des armes de destruction massive......................................... .41

    Section 2 : Les mobiles présumés de l'intervention...........................................................42

    Paragraphe1 : Les mobiles plus ou moins légitimes..........................................................43

    A- Le choc provoqué aux Etats-Unis par l'affront du 11 septembre 2001.....................43

    B- Les raisons historiques de l'engagement polonais dans la guerre............................45

    Paragraphe2 : Les mobiles les plus controversés...............................................................46

    A- L'enjeu pétrolier.......................................................................................................47

    B- L'enjeu hégémonique et impérialiste.................................... ........................................48

    Chapitre2: Quelle légitimité pour le concept de la guerre préventive au regard

    de la croisade irakienne ? .............................................................................50

    Section 1 : Les facteurs favorables à la légitimité du concept..........................................51

    Paragraphe1 : L'insécurité internationale........................................................................... 51

    A- Le terrorisme international : une menace à la défense nationale des Etats..............51

    B- L'insécurité nucléaire et biotechnologique ...................................................................53

    Paragraphe2 : La reconnaissance par l'ONU du concept de guerre préventive............55

    A- L'ONU dans la tourmente de l'avant guerre d'Irak.................................................55

    B- L'ONU et le projet de « code d'entrée en guerre »......................................................56

    Section2: Les facteurs d'illégitimité du concept................................................................58

    Paragraphe1 : La contestation internationale du concept............................................. 59

    A- La mobilisation de l'opinion publique internationale contre l'idée de la

    guerre préventive.............................................................................................................59

    B- Le rejet de la guerre préventive au profit de la guerre préemptive............................60

    Paragraphe2 : Les risques de destruction de l'architecture sécuritaire mondial............62

    A- La dilution risquée du principe du non recours à la force.......................................63

    B- Les impacts sécuritaires à craindre de cette extension du recours à la force............64

    CONCLUSION......................................................................................................................66

    BIBLIOGRAPHIE................................................................................................................69

    ANNEXES................................................................................................................................I






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon