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L'incitation aux actes de terrorisme

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par Joseph Breham
Université Toulouse 1 - Master II Juriste International 2006
  

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II.La lutte contre l'incitation :

La première partie de ce mémoire contient une approche de la notion d'incitation à

travers ses diverses notions juridiques et les moyens utilisés par les terroristes pour inciter à la violence. Or, une fois le problème déterminé, il est nécessaire d'y trouver des solutions. C'est pourquoi, cette deuxième partie va s'intéresser à la lutte contre cette incitation, c'estàdire au cadre dans lequel cette lutte doit se jouer (A) et aux moyens dont cette lutte dispose (B).

A.Le cadre de la lutte :

Comme l'ensemble de la lutte contre le terrorisme, la lutte contre l'incitation aux

actes de terrorisme doit être respectueuse des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Le secrétaire général des Nations Unies l'indique dans son rapport

« S'unir contre le terrorisme : recommandations pour une stratégie antiterroriste mondiale » : La primauté du droit implique la défense des droits de l'homme, valeur fondamentale des Nations Unies et pilier de leur action. Loin de s'exclure mutuellement, l'efficacité de la lutte antiterroriste et la protection des droits de l'homme sont interdépendantes et complémentaires. La défense des droits de l'homme est donc l'une

des conditions essentielles du succès d'une stratégie antiterroriste.

Le Conseil de sécurité a par ailleurs rappelé dans la résolution 1624 (précité) (et dans la majorité des résolutions concernant le terrorisme) que les États doivent veiller à ce que toutes les mesures qu'ils prennent pour lutter contre le terrorisme respectent toutes les obligations qui leur incombent en vertu du droit international, et que ces mesures doivent être conformes au droit international, en particulier aux instruments relatifs aux droits de l'homme, au droit des réfugiés et au droit humanitaire.

Ainsi, la lutte antiterroriste en général, et la lutte contre l'incitation en particulier, doit

respecter plusieurs droits fondamentaux. Le premier de ces droits est le droit de résistance à l'oppression.

1.Le droit de résistance à l'oppression :

L'ordre établi détient le monopole légal de la force et il a le droit positif,

l'obligation même d'user de cette violence pour se défendre. En s'y opposant, on reconnaît et on exerce un droit plus élevé. [...] Sans ce droit de résistance, sans l'intervention d'un droit plus élevé contre le droit existant, nous en serions aujourd'hui encore au niveau de la barbarie primitive116.

Cette notion philosophique de résistance à l'oppression au nom d'un droit supérieur, c'est à dire d'un droit naturel, est reprise en droit positif. La Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, dans son article 2, proclame le droit de résistance à l'oppression comme un droit naturel et imprescriptible de l'homme. L'article 204 de la

loi fondamentale allemande (Grundegesetz Deutschland) autorisent les allemands à résister à quiconque entreprendrait de renverser cet ordre (démocratique), s'il n'y a pas d'autre remède possible.

Le droit international reprend cette notion fondamentale. Le préambule de la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948 considère la révolte contre la tyrannie et l'oppression comme un suprême recours. Les articles 12 et 55 de la Charte des Nations Unies posent le principe du respect du droit des peuples à disposer d'eux mêmes. Cette notion a été introduite à l'époque de la rédaction de la Charte, entre autres raisons, pour légitimer les luttes de décolonisations, c'est à dire, des luttes menées par des peuples contre des gouvernants légitimes en droit positif au nom d'un droit qu'ils estimaient supérieur.

116Professeur Herbert Marcuse « Conférence : Le problème de la violence dans l'opposition », juillet

1967, cité dans Haar Michel L'homme unidimensionnel : Marcuse : analyse critique, Paris, ed. Hatier,

1975.

Lors de sa 25e session, l'Assemblée Générale des Nations Unies a approuvé une

Déclaration relative aux principes du droit international touchant les relations amicales

et la coopération entre les Etats conformément à la Charte de Nations Unies117. Cette déclaration proclame et explicite plusieurs grands principes gouvernant les relations entre les peuples. Parmi ces principes se retrouve le principe d'égalité de droit des peuples et de leur droit à disposer d'euxmêmes qui impose à tout Etat (...) de s'abstenir

de recourir à toutes mesures de coercition qui priverait les peuples (...) de leur droit à disposer d'eux mêmes et de leur indépendance. Lorsqu'ils réagissent et résistent à une telle mesure de coercition dans l'exercice de leur droit à disposer d'eux mêmes, ces peuples sont en droit de chercher et recevoir un appui conforme aux buts et principes des Nations Unies.

Cette résolution est intéressante sur plusieurs points. Tout d'abord, elle légitime la résistance (donc une certaine violence) contre des mesures de coercition qui privent les peuples du droit à disposer d'euxmêmes. Cette légitimation est le fait de l'Assemblée Générale des Nation Unies, donc des représentants de toutes les Nations. Ainsi, le droit

de résistance contre certaines oppressions illégitimes n'est plus une notion seulement occidentale mais est devenue une notion partagée par tous les Etats du monde. Ensuite,

les peuples sont en droit de rechercher et de recevoir un appui conforme aux buts et principes de la Charte des Nations Unies. De la sorte, les peuples « non opprimés » sont

en droit d'aider les peuples qui entrent en résistance. Toutefois, cette aide et la résistance doivent être conformes aux buts et principes de Nations Unies. Or, les résolutions 1373 (2001) et 1624 (2005) du Conseil de sécurité ont qualifié le terrorisme et son incitation

de contraire aux buts et principes des Nations Unies. Ainsi, même si les peuples peuvent résister et être aidés dans leur résistance, le droit international leur dénie le droit d'utiliser la voie du terrorisme (la commission d'un des actes contenus dans les divers instruments sectoriels) ou la voie de l'incitation à la commission de tels actes. C'est pourquoi les résistances qui utilisent des actes terroristes ou qui incitent à la commission

117 résolution 2625 (XXV) 1883eme séance plénière 24 Octobre 1970 disponible sur :

http://daccessdds.un.org/doc/RESOLUTION/GEN/NR0/350/22/IMG/NR035022.pdf?OpenElement

de tels actes ne sont pas légitimes et sont interdites en droit international.

Il existe des cas où « résister est une obligation », où « ne pas résister est inexcusable ». Le droit positif légitime la résistance à l'oppression comme un droit et non pas comme un devoir. Néanmoins, après les exactions nazies, et la publication de Eichmann à Jérusalem118 ne pas se poser la question du devoir de résistance à l'oppression revient à faire preuve d'un aveuglement certain. Lors du procès de Nuremberg, les juges ont condamné ceux qui avaient obéi, sans discernement à la loi en vigueur, transformant ainsi le droit de résistance à l'oppression en un devoir. En droit pénal français le devoir d'obéissance d'un soldat a pour limite l'illégalité manifeste de l'ordre.

Toutefois, affirmer que résister à l'oppression peut être un devoir ne suffit pas. Il faut encore réussir à déterminer quelles violations de quels droits oblige à la résistance. À cette fin, l'étude du Statut de Rome119, du Statut des deux tribunaux pénaux internationaux pour le Rwanda et pour l'exYougoslavie peut aider. En effet, la commission d'actes entrant dans la compétence de ces juridictions ne pouvant être excusés, il devient légitime de résister (seraitce par la force) à des ordres qui impliquent

de tels actes.

Les articles 6, 7 et 8 du Statut de Rome donnent compétence à la Cour Pénal Internationale pour les crimes de génocide, les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre. Les crimes de guerre tels que définis par l'article 8 incluent les infractions relatives aux quatre convention de Genève de 1949120. Le Statut du Tribunal pénal international pour l'ex Yougoslavie lui donne compétence pour les infractions graves aux quatre conventions de Genève de 1949, les crimes de guerre, le crime de génocide et les crimes contre l'humanité (articles 2, 3, 4 et 5). Les articles 2, 3 et 4 du Statut du Tribunal pénal international pour le Rwanda lui donnent compétence pour les crimes de

118Eichmann à Jérusalem, La banalité du mal, Hannah Arendt Folio, 1963.

119Le Statut de Rome instaure la Cour Pénale Internationale. Voir le site de la Cour. Ibidem.

120ibidem

génocides, les crimes contre l'humanité et les violations de l'article 3 communs aux quatre conventions de Genève de 1949.

Ainsi, à l'exception des crimes de guerre qui ne sont pas de la compétence du Tribunal pénal international pour le Rwanda, les champs d'application ratione materiae des tribunaux sont quasiment identiques. Il est intéressant de constater que les trois notions : crimes de guerre (tels que définis par le Statut de Rome en son article 8), crimes contre l'humanité et crime de génocide sont au coeur du Jus Cogens. A cet égard, il n'y a qu'un pas à franchir pour affirmer que le devoir de résistance existe dès lors qu'un pays, un prince, un gouvernant opprime un peuple, une ethnie, une seule personne par le biais de crimes contraire au noyau dur des droits du Jus Cogens. Pour autant ces résistances deviennent illégitimes dès qu'elles prennent la forme d'actes de terrorisme.

Le droit de résistance à l'oppression n'est pas le seul droit qui doit être respecté dans le cadre dans le cadre de la lutte contre l'incitation. Les droits fondamentaux principalement mis en danger par l'incrimination de l'incitation aux actes de terrorisme

(et par l'incrimination de toute incitation) sont la liberté de penser, de conscience et de religion et le droit à la liberté d'expression.

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius